M. le président. Par amendement n° 4, M. Souvet, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Conformément à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les exonérations de cotisations de sécurité sociale prévues à l'article 3 donnent lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l'Etat pendant toute la durée de son application. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. L'exposé des motifs du projet de loi ainsi que l'étude d'impact jointe comportent l'annonce d'une compensation qui ne serait que partielle des exonérations de cotisations prévues par l'article 3. Il est donc proposé de réaffirmer le principe de la compensation intégrale prévu par l'article 5 de la loi du 25 juillet 1994.
Mme le ministre a beaucoup insisté sur le fait qu'il n'y aurait pas de difficulté. Si cela va sans dire, cela va peut-être mieux encore en l'écrivant. Et si c'est redondant, on pourra toujours amender.
Une telle réaffirmation serait d'autant plus nécessaire que l'Assemblée nationale refuserait de suivre le Sénat dans sa démarche de sagesse.
En effet, la loi Aubry risque fort de détruire de nombreux emplois en faisant supporter de trop lourdes charges aux entreprises ; c'est en tout cas ce que nous craignons.
Dès lors, le raisonnement consistant à dire que les emplois créés, en apportant de nouvelles recettes, compenseront une large part des exonérations, nous semble spécieux, car il ne tient pas compte des pertes de recettes occasionnées par les emplois détruits.
Aussi la sagesse conseille-t-elle de compenser intégralement, au franc le franc, l'intégralité des exonérations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. J'ai déjà répondu à cette argumentation lors de la discussion d'un amendement précédent.
L'avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
Mme Dinah Derycke. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke. Il est vrai que nous nous étions tous émus, ici, dans un premier temps, de voir que la compensation n'était que partiellement prévue dans le texte. Nous avions rappelé que certaines dispositions avaient effectivement été revues en 1994 afin que, en cas d'allégement de charges, il y ait automatiquement compensation totale de l'Etat.
Nous avons donc interrogé Mme Aubry à plusieurs reprises, tant en commission que dans l'hémicycle, cet après-midi même. Les explications qu'elle nous a données nous semblent satisfaisantes.
Ce que vise le projet de loi du Gouvernement - tel ne serait sans doute pas le cas avec le texte issu des travaux du Sénat -, c'est une création forte d'emplois. A terme, tous les comptes publics s'en porteront mieux, puisque nous savons tous - nous l'avons suffisamment dit lors du débat sur la loi de financement de la sécurité sociale - que la cause essentielle du déficit de la sécurité sociale, c'est l'insuffisance des recettes, due elle-même à la situation de l'emploi dans notre pays.
Il y avait donc allégement des charges sans que l'on puisse vérifier s'il y avait ou non création d'emplois. On a d'ailleurs plutôt vérifié, jusqu'à présent, qu'il n'y avait pas de corrélation directe, qu'il n'y avait pas forte création d'emplois.
A partir du moment, où l'on peut effectivement vérifier le nombre d'emplois créés, et donc compenser très précisément le manque à gagner, le différentiel, le texte du Gouvernement devient tout à fait acceptable. Nous voterons donc contre l'amendement.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Cet amendement me paraît être un amendement de bon sens. Il est conforme à la législation que nous avons précédemment votée et, s'il y a lieu de faire un toilettage du texte à l'occasion de la navette, il ne sera pas difficile d'y procéder.
L'intention que reflète cet amendement semble imparable. Il s'agit bien d'acter le principe de compensation intégrale au bénéfice des régimes concernés. Il est préférable que les choses soient dites clairement et nettement, car, même si vous avez donné tout à l'heure, madame le ministre, des explications qui vont dans ce sens, cela vaut moins qu'un texte voté par une assemblée parlementaire.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Par amendement n° 33 rectifié, M. Arthuis et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - a) Dans la première phrase du II de l'article 39 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, après les mots : "de l'employeur" sont insérés les mots : "ou, par délégation, des caisses des congés payés mentionnées à l'article L. 731-9 du code du travail".
« b) Dans la troisième phrase du même paragraphe, après les mots : "l'employeur" sont insérés les mots : "ou la caisse mentionnée ci-dessus".
« II. - a) Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 39-1 de la même loi, après les mots : "de l'employeur" sont insérés les mots : "ou, par délégation, des caisses des congés payés mentionnées à l'article L. 731-9 du code du travail".
« b) Dans la quatrième phrase du même alinéa, après les mots : "de l'employeur" sont insérés les mots : "ou de la caisse mentionnée ci-dessus". »
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Cet amendement vise à faire bénéficier les caisses de congés payés, et donc indirectement les entreprises qui y cotisent, des aides de la loi Robien.
Cela se justifie par un souci d'équité. En effet, toute entreprise bénéficie de l'exonération sur l'ensemble des salaires versés, y compris pour les congés payés. Seules n'en bénéficient pas les entreprises qui délèguent, pour des raisons spécifiques, le versement des congés payés à une caisse de congés payés, comme dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
Certes, il ne peut y avoir, en l'occurrence, de création d'emplois puisque les caisses ne sont pas employeurs. Mais, par ricochet, ces créations d'emplois se feront dans les entreprises, puisque ces dernières bénéficieront d'un allègement de cotisations au titre des congés payés.
Le dispositif ne devrait donc concerner que les entreprises qui ont signé des accords dits « Robien ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission ne minimise pas la complexité du dispositif. Elle émet cependant un avis défavorable, en espérant que Mme le ministre nous donnera quelques explications rassurantes.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Eh bien, ça alors ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je ne sais pas sur quoi je dois rassurer M. le rapporteur !
Je ne suis pas favorable à la rédaction de l'article 3 que propose la commission. C'est la raison pour laquelle je suis conduite à rejeter le mécanisme proposé, qui ajoute un mode de décompte particulier pour les entreprises du bâtiment et des travaux publics. D'ailleurs, sur le fond, cette question ne se pose pas dans le dispositif du Gouvernement.
M. Louis Souvet, rapporteur. Si !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Non, car notre aide n'est pas calculée en pourcentage par rapport aux cotisations versées. Elle représente une somme forfaitaire qui s'impute sur la masse des cotisations versées par l'entreprise, quel que soit le montant.
Je veux bien m'exprimer sur un amendement qui s'insère dans le dispositif proposé par la commission, mais nous, dans notre dispositif, nous avons déjà réglé le problème.
Si vous souhaitez, monsieur le rapporteur, reprendre le dispositif du Gouvernement, je ne peux que dire à l'auteur de cet amendement que le problème est déjà résolu.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Hoeffel ?
M. Daniel Hoeffel. Cet amendement avait pour objet de connaître la position de Mme la ministre. Faut-il, dans ces conditions, le maintenir ou non ? Je m'en remets, sur ce point, à l'avis de la commission. (Rires.)
M. Louis Souvet, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a donné un avis favorable sur l'amendement, qui constitue un apport intéressant dans son dispositif. Elle conseille donc à son auteur de le maintenir.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.
Par amendement n° 37 rectifié, MM. Cabanel et Barnier proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la cinquième phrase du paragraphe II de l'article 39 et dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article 39-1 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, après les mots : "avec l'Etat " sont insérés les mots : ", en concertation avec l'UNEDIC". »
La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. S'agissant du dispositif d'aide à la réduction du temps de travail, on a souvent parlé de la mise en jeu éventuelle de l'UNEDIC, qui est tout de même bénéficiaire des effets de la réduction du chômage.
La concertation avec l'UNEDIC nous paraît importante. Il y a peut-être là un gisement important de moyens de financement ; il y a peut-être là un moyen de rembourser intégralement les exonérations de cotisations que l'on sera amené à décider par ailleurs.
Madame le ministre, on en parle à voix basse ; autant avoir un dispositif qui permet d'ouvrir cette concertation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. L'activation des dépenses passives de l'assurance chômage est déjà mise en oeuvre, notamment avec l'allocation de remplacement pour l'emploi, l'ARPE, et les conventions de coopération.
Impliquer l'UNEDIC dans la réduction du temps de travail risque d'être particulièrement compliqué. L'UNEDIC pourra-t-elle intervenir dans chaque convention ? Ce sera extrêmement complexe.
En outre, si la réduction du temps de travail suscite la création d'emplois, cela permettra aux partenaires sociaux de diminuer les cotisations d'assurance chômage des entreprises. En ce sens, en tout cas, l'amendement est déjà satisfait.
C'est la raison pour laquelle la commission n'a pas émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. A mon sens, on ne pourra pas demander l'avis de l'UNEDIC pour chaque accord.
En revanche - je l'ai dit tout à l'heure - chaque création d'emploi liée à la réduction de la durée du travail fait rentrer 5 000 francs dans les caisses publiques, et donc une partie de cet argent dans les caisses de l'UNEDIC.
Le Gouvernement ne verrait qu'avec satisfaction que les partenaires de l'UNEDIC acceptent de participer au financement de cette réduction de la durée du travail.
Ce n'est pas à l'ordre du jour d'aujourd'hui, mais nous pourrons effectivement en discuter avec le patronat et les syndicats dans les mois qui viennent.
Vous avez dit, monsieur le rapporteur, que les rentrées de l'UNEDIC permettraient de réduire les cotisations des employeurs. Je dirai qu'elles pourraient permettre aussi de mieux indemniser, notamment les jeunes et les salariés précaires, exclus du champ de l'UNEDIC depuis des années.
Par conséquent, c'est dans le cadre d'une discussion générale avec l'UNEDIC que ce type de problèmes pourront être réglés. J'attends avec impatience de voir si les partenaires de l'UNEDIC accepteront d'entrer dans votre logique.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 37 rectifié.
M. le président. Votre amendement est-il maintenu, monsieur Cabanel ?
M. Guy Cabanel. Non, monsieur le président, je le retire car je suis extrêmement satisfait des propos tenus par Mme la ministre.
En effet, ce n'est peut-être pas le jour de déposer un amendement sur ce texte, qui est déjà modifié, mais ne pas faire entrer l'UNEDIC dans ce grand débat serait, à mon avis, rater une réflexion profonde sur le financement à la fois de la stimulation de l'emploi et de la lutte contre le chômage.
Vos propos me donnent donc entière satisfaction, madame la ministre, même si je suis navré que vous soyez obligée de vous prononcer contre mon amendement qui se rattachait à un dispositif que vous n'approuvez pas.
Cela dit, ce débat d'aujourd'hui, qui figurera au Journal officiel, est, je crois, important pour la réflexion à venir.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 37 rectifié est retiré.
Par amendement n° 55, M. Fischer et Mme Borvo, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art... . - L'aide définie aux articles 39 et 39-1 peut prendre la forme d'une bonification de nouveaux crédits à moyen et long termes accordée à l'entreprise permettant d'en rabaisser le taux en dessous de celui du marché, en fonction du nombre d'emplois créés ou maintenus en liaison avec la réduction du temps de travail.
« Cette bonification tend à réduire d'autant plus le taux d'intérêt de ces crédits que les investissements nouveaux ainsi financés seront associés à un objectif plus élevé de création d'emplois en liaison avec la réduction du temps de travail. »
« II. - Pour compenser les charges résultant de l'application des dispositions du I ci-dessus, le taux, prévu au premier alinéa du 9° du paragraphe III de l'article 125 A du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Générant des gains de productivité considérables, le progrès des sciences et des techniques permet, aujourd'hui, d'envisager de nouvelles perspectives en matière de réduction du temps de travail, afin de créer un maximum d'emplois.
Notre groupe n'est pas totalement opposé au fait que l'Etat soutienne financièrement les entreprises qui s'engagent sur la voie de la réduction du temps de travail.
Nous constatons seulement qu'un doute existe quant à l'utilité des aides publiques à l'emploi sous leurs formes actuelles. Nous proposons simplement une alternative afin de démontrer que la baisse des charges sociales n'est pas l'unique solution.
Toutes sensibilités confondues, on s'accorde à penser que les aides publiques à l'emploi ont un coût exorbitant, des effets pervers indéniables. La discussion sur leur efficacité est donc ouverte.
En amendant l'article 3, la droite a réactualisé la loi Robien. Conjuguant réduction du temps de travail et annualisation, le système proposé ne peut pas nous satisfaire. Sans contrôle véritable, on nous propose, une fois de plus, d'aider les entreprises en les exonérant de cotisations sociales.
Dans son rapport, l'instance d'évaluation de la loi quinquennale pour l'emploi notait que cet abaissement du coût du travail pour les salariés les moins qualifiés ne résoudrait pas durablement leurs difficultés.
Pour notre part, nous pensons que cette logique d'exonération de cotisations sociales en induit une autre, celle de la baisse générale des coûts salariaux. Elle ne règle en rien l'insuffisance de qualification. Nous savons tous aujourd'hui que les titulaires d'un bac + 2 occupent ces emplois faiblement rémunérés, laissant ainsi hors marché du travail les personnes peu qualifiées.
De plus, vis-à-vis de notre système de protection sociale, les exonérations consenties ne sont pas neutres. Nous avons déjà développé ce thème précédemment. Est-ce vraiment le rôle de la sécurité sociale de financer l'emploi ? C'est une véritable question.
Notre amendement vise donc à introduire une seconde modalité d'aide de l'Etat en abaissant les charges financières des crédits nouveaux pour les entreprises qui s'engageraient à réduire le temps de travail en créant, corrélativement, des emplois.
Toutes les entreprises pourraient être intéressées par cette bonification de crédits, les PME, les PMI supportant des conditions de crédit très lourdes se trouveraient ainsi avantagées.
C'est pour toutes ces raisons que je vous présente cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission remarque qu'il s'agit d'un amendement sur la loi quinquennale. Le système proposé est astucieux, mais il posera des problèmes techniques considérables. Il relève d'une philosophie autre que celle de la commission, qui, elle, recherche au maximum la simplicité.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission a donné un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Il est défavorable. Ce système aurait des effets qui ne seraient pas substantiellement différents de l'aide proposée par le Gouvernement, mais il nous apparaît beaucoup trop complexe.
M. Emmanuel Hamel. Il y a convergence avec la commission !
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 55, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 56, M. Fischer et Mme Borvo, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 141-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En aucune circonstance, une mesure de réduction ou d'aménagement du temps de travail ne peut modifier le niveau de prescription du salaire minimum interprofessionnel de croissance défini au premier alinéa. »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Intimement lié à la réduction du temps de travail, la question des salaires, de la rémunération minimale doit être traitée avec prudence et considération.
Comment vouloir créer des emplois si la réduction du temps de travail se solde par une réduction des salaires ? L'équation entre consommation, production et emploi est pourtant claire.
De tout temps, la question salariale a été un point fort de conflit entre salariés et patronat.
Conçu pour réduire les inégalités salariales, le SMIC, de par son mécanisme d'indexation sur la croissance en valeur, permet une évolution des bas salaires. Il est source de garanties pour les travailleurs rémunérés au SMIC, mais aussi pour l'ensemble des salariés.
Nous sommes tous conscients que le voeu le plus cher du patronat est de réussir à faire sauter cette garantie pour y substituer un revenu mensuel garanti, le RMG, remettant de fait en cause tout notre système de protection sociale.
En février 1996, au cours des débats sur la loi Robien, le rapporteur, au nom de la commission des affaires sociales, proposait, par amendement, de rétablir « une disposition qui était au centre des débats de 1993 sur la loi quinquennale : l'exigence de réduction de salaire ».
La boucle se trouvait ainsi refermée. On conjuguait alors allégrement réduction du temps de travail et réduction des salaires. Dans les faits, les accords Robien n'en sont ni plus ni moins qu'une adaptation. Les bilans dressés sont peu encourageants.
Les propositions présentées aujourd'hui par la majorité du Sénat, alors que nous discutons de la réduction du temps de travail, ont peu varié. L'objectif est toujours le même : il s'agit de minimiser la progression - que dis-je ? - de faire reculer encore la part des salaires dans la valeur ajoutée.
Dans le présent projet de loi, seul l'exposé des motifs fait référence aux salaires. La mention « progression maîtrisée » de ceux-ci ne peut nous satisfaire.
Si le projet de loi ne traite pas expressément de la question de la rémunération minimale pour compenser la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail, le problème de la revalorisation du SMIC horaire demeure posé.
L'objet de notre amendement est simple. Il attire l'attention sur le fait que la revalorisation du SMIC horaire devra prendre en compte le passage aux 35 heures afin de garantir à chaque salarié le maintien, au moins, de son pouvoir d'achat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Mme Hélène Luc. Le rapporteur est d'accord !
M. Louis Souvet, rapporteur. Je vais être d'accord, madame Luc, mais dans les même termes que, tout à l'heure, Mme la ministre. (Sourires.)
L'amendement n° 56 soulève un réel problème, à savoir celui de la multiplicité des SMIC dans le dispositif proposé par le Gouvernement. Ce problème ne se pose pas dans le dispositif que nous vous proposons de lui substituer.
L'avis de la commission est donc défavorable.
Mme Hélène Luc. Dommage !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je le répète, le dispositif que préconise le Gouvernement devra faire l'objet d'un projet de loi, et sera donc soumis au Parlement.
Ce dispositif ne vise pas à créer deux SMIC. Le SMIC, tel qu'il existe aujourd'hui, s'agissant de son niveau et de son mode d'évolution, ne sera pas modifié aux termes de la proposition que nous soumettons actuellement aux organisations patronales et syndicales.
Nous souhaitons instaurer un revenu mensuel garanti qui permet effectivement d'éviter, comme vous le souhaitez, madame le sénateur, que les salariés payés au SMIC voient diminuer leur rémunération du fait de la réduction de la durée du travail.
J'ai indiqué qu'il subsistait des problèmes qui sont actuellement en discussion avec les partenaires sociaux. Ainsi, comment va-t-on payer les heures supplémentaires entre 35 et 39 heures ? Comment seront traités les travailleurs à temps partiel ? Comment va évoluer ce revenu minimum garanti ?
Ces questions sont actuellement en discussion. Elles donneront lieu à un débat, comme la loi le prévoit, devant la commission nationale de la négociation collective et à un texte de loi, puisque cette mesure est d'ordre législatif.
Je le confirme, les salariés payés au SMIC ne verront pas leur rémunération réduite du fait de la réduction de la durée du travail. Aussi souhaiterais-je, madame Terrade que vous retiriez votre amendement en attendant ce futur texte qui est aujourd'hui soumis à concertation et qui ne serait en tout état de cause pas applicable maintenant, puisque la durée légale du travail passera à 35 heures au 1er janvier 2000.
M. le président. Madame Terrade, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade. Nous entendons l'invitation de Mme la ministre, et nous le retirons.
M. le président. L'amendement n° 56 est retiré.
Article 4