M. le président. « Art. 1er. _ I. _ Après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le signataire d'un certificat d'hébergement doit notifier à la mairie de sa commune de résidence, dans un délai de huit jours, sauf circonstances personnelles ou familiales justifiées, le départ de l'étranger hébergé. »
« II. _ Le deuxième alinéa du même article 5-3 est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Le maire refuse de viser le certificat d'hébergement dans les cas suivants :
« _ il ressort, soit de la teneur du certificat et des justificatifs présentés, soit de la vérification effectuée au domicile de son signataire, que l'étranger ne peut être hébergé dans des conditions normales ;
« _ les mentions portées sur le certificat sont inexactes ;
« _ les demandes antérieures de l'hébergeant font apparaître un détournement de la procédure au vu d'une enquête demandée par le préfet aux services de police ou unités de gendarmerie, le cas échéant, à l'initiative du maire ;
« _ le signataire du certificat d'hébergement n'a pas notifié à la mairie le départ d'un étranger hébergé dans les deux années précédant la demande de visa. »
« III. _ Après la première phrase de l'avant-dernier alinéa du même article 5-3, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il peut y procéder par des visites inopinées. »
Sur l'article, la parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. On nous explique depuis hier que le projet de loi dont nous sommes saisis est un texte purement technique, dont l'objet est de remédier à des dysfonctionnements de la loi de 1993. En particulier, puisque certains étrangers ne peuvent être expulsés en vertu de l'article 25 de l'ordonnance de 1945, il nous est proposé que soit délivrée une carte de séjour temporaire aux étrangers en situation irrégulière qui entrent dans le champ d'un nouvel article 12 bis de ladite ordonnance.
Nous avons déjà dit qu'il existait à cet égard un moyen très simple : décider, une fois pour toutes, d'attribuer une carte à tous ceux qui ne peuvent pas être expulsés. Ainsi, il n'y aurait plus de « sans-papiers ». Nous avons déposé des amendements dans ce sens.
M. Masson, qui écrit lui-même dans son rapport qu'il a été tenté de suivre cette logique, a néanmoins refusé ces amendements ce matin en commission. Cette logique aurait pourtant réglé le problème.
Il était d'autant moins nécessaire d'élaborer quelque texte que ce soit qu'il suffisait au ministre de l'intérieur, qui a tout pouvoir en la matière, avec les préfets, d'accorder une carte de séjour temporaire à tous ceux qui entrent dans le champ de l'article 25. Ainsi, nous n'aurions pas eu à revenir une nouvelle fois sur les conditions d'entrée, de séjour et de circulation des étrangers en France.
Nous ne contestons pas, monsieur le rapporteur, que le Parlement ait parfaitement le droit de définir ces conditions, et il est à nos yeux légitime que celles-ci soient différentes de celles qui s'appliquent aux nationaux, mais il n'y a pas de raison que le Parlement passe son temps à débattre sur ce sujet comme si ce sujet était le seul qui existât.
Si je dis cela à propos de l'article 1er, c'est précisément parce que celui-ci n'a strictement rien à voir avec la régularisation des « sans-papiers ». Ainsi, dès l'article 1er, nous constatons qu'il ne s'agit pas du tout, contrairement à ce que vous prétendez, d'un texte « technique » mais qu'il s'agit en fait pour vous d'aggraver ce que vous aviez déjà fait en 1993.
Vous « enrégimentez » les maires, vous leur demandez de jouer les policiers. Vous prévoyez même que c'est sur leur initiative que le préfet pourrait demander au procureur des enquêtes. On peut imaginer que, lorsqu'un maire veut demander une enquête au procureur, il n'a pas besoin que ce soit écrit dans la loi. De même, lorsqu'un préfet veut recueillir une demande de la part d'un maire, il n'est peut-être pas non plus nécessaire de l'écrire dans la loi. Vous, vous l'écrivez dans la loi.
De surcroît, alors que, actuellement, lorsque vous recevez un ami étranger, vous vous dispensez sûrement de demander un certificat d'hébergement, vous voulez que, désormais, ceux qui reçoivent chez eux un ami étranger, après avoir demandé un certificat d'hébergement, aient l'obligation d'aller déclarer à la mairie : « Ça y est ! Il est parti ! » Est-ce que vous vous rendez compte de ce que, psychologiquement, cela peut représenter ? (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
J'ajoute que, normalement, une décision administrative doit être motivée : c'est la règle générale. Or un texte de 1986, pris sous l'égide d'une majorité qui l'est redevenue depuis, prévoit qu'il n'y a pas à motiver les refus de visa.
Il apparaît que, de plus en plus, les visas sont refusés, Cela signifie que beaucoup de gens versent à l'office des migrations internationales, l'OMI, les cents francs requis pour un certificat d'hébergement, que ce dernier est envoyé au consulat concerné à l'étranger mais que, finalement, le visa est refusé.
Et il est impossible de demander les raisons de ce refus puisque, dans ce texte de 1986, vous avez prévu que le refus de visa n'avait pas à être motivé !
Monsieur le ministre, jugez-vous normal, alors que le Gouvernement a manifestement donné des instructions pour que l'on refuse massivement les visas, que ces refus ne soient pas motivés ? S'ils l'étaient, ils pourraient au moins être discutés devant les tribunaux administratifs. Cela étant, si les consulats étaient obligés d'invoquer des motifs, le plus souvent, c'est évident, ils en seraient incapables. C'est précisément pourquoi nous vous demandons de faire en sorte que, dorénavant, les refus de visa soient motivés.
J'ajoute qu'il n'est tout de même pas très honnête d'encaisser de multiples fois cent francs pour des certificats d'hébergement si l'on sait depuis le début que, dans la plupart des cas, le visa ne sera pas accordé !
Nous sommes décidés à dénoncer et à combattre cet article 1er. Ce qui nous incite à penser, si nous avions eu le moindre doute, que nous avons raison de le faire, c'est, vous le savez bien, la position qui a été prise à cet égard par le bureau de l'association des maires de France. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Je crois, pour ma part, que nous sommes bien là dans un domaine technique.
M. Jacques Mahéas. Non, absolument pas !
M. Guy Penne. Ou alors pyrotechnique ! (Sourires.)
M. Bernard Plasait. Par ce projet de loi, le Gouvernement manifeste clairement sa volonté de mettre un terme aux séjours irréguliers des étrangers sur notre territoire.
Dans cette perspective, une attention particulière doit être portée à l'immigration qui, initialement légale, est devenue clandestine par détournement de procédure.
La procédure du certificat d'hébergement fournit, sur ce point, un exemple frappant des carences de la réglementation.
En effet, l'article 5-3 de l'ordonnance de 1945, modifié par la loi du 24 août 1993, dispose que tout étranger non ressortissant de l'Union européenne qui souhaite séjourner en France pour moins de trois mois, dans le cadre d'une visite privée, doit présenter un certificat d'hébergement. Celui-ci, délivré sur la base d'un document type par la personne qui accueille l'étranger, indique les noms, adresse personnelle et identité du signataire et, s'il y a lieu, le lien de parenté qui unit le signataire et l'étranger. Lorsque le signataire est un étranger, le certificat porte mention du lieu, de la date de délivrance et de la durée de validité du titre de séjour du signataire.
Le certificat est établi en mairie. Lorsque le maire a un doute sérieux sur la réalité des conditions d'hébergement, il peut saisir l'office des migrations internationales d'une demande motivée aux fins de faire procéder à une vérification sur place. Pour effectuer la vérification, les agents de l'OMI ne peuvent pénétrer dans le domicile qu'avec le consentement écrit de l'hébergeant.
Les services de contrôle estiment que ce dispositif donne souvent lieu à fraude de la part des demandeurs. Il semble en effet que de nombreux étrangers obtiennent des certificats de complaisance, certaines personnes se spécialisant dans la production - rémunérée - de certificats sans héberger effectivement l'étranger demandeur.
On ne peut qu'être inquiet, monsieur le ministre, quand on sait que ces certificats d'hébergement, indispensables pour obtenir un visa, sont l'objet d'un important trafic et s'achètent, me dit-on, jusqu'à 5 000 francs, voire 10 000 francs pièce.
Ainsi, des étrangers obtiennent, grâce à ces certificats, le droit de séjourner trois mois en France et y demeurent, souvent dans la clandestinité, à l'issue de ce délai.
Si 142 736 certificats d'hébergement ont été officiellement visés en 1994, il semblerait que près du double l'aient été l'an dernier.
Dans ces conditions, je ne peux qu'être perplexe, comme ce maire de la banlieue parisienne qui déclarait, lors d'un entretien de presse, que, avec 600 familles d'étrangers installés sur sa commune, 450 demandes de certificat d'hébergement sont déposées chaque année. Cela veut dire que trois familles étrangères sur quatre demandent, chaque année, à recevoir un parent ou un ami pendant trois mois.
M. Jacques Mahéas. Et vous, combien de fois par an rendez-vous visite à des parents ?
M. Bernard Plasait. Dès lors, je m'étonne, monsieur le ministre, que des milliers d'étrangers, vivant généralement dans une grande pauvreté dans leur pays, acceptent de dépenser ce qui représente pour eux des années de salaire, simplement pour venir passer quelques semaines de vacances avec un parent ou un ami dans un logement de la banlieue parisienne ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Jacques Mahéas. C'est profondément déplacé !
M. Robert Pagès. Quel jugement méprisant !
M. Bernard Plasait. Il me semble donc clair qu'il y a, dans notre réglementation, trois carences majeures.
D'abord, les conditions exigées de l'hébergeant sont très peu contraignantes. Il doit seulement prouver que son logement répond à certaines normes de superficie. Il ne lui est demandé de justifier d'aucune ressource.
M. Robert Pagès. Alors, pourquoi certains maires refusent-ils systématiquement de viser les certificats ?
M. Bernard Plasait. Ensuite, les conditions demandées à l'hébergé sont, elles aussi, vraiment minimales. Une fois le certificat signé, pour obtenir son visa, il doit seulement justifier de ressources au moins égales à la moitié du SMIC journalier. Je crois vraiment qu'un tel montant ne peut garantir qu'il sera en mesure de faire face à toutes ses dépenses sur le territoire français.
M. Robert Pagès. Malheur aux pauvres !
M. Bernard Plasait. Enfin, les maires disposent de moyens très faibles pour s'opposer à la délivrance des certificats et, s'ils les délivrent, pour contrôler les conditions de séjour de l'hébergé.
La loi, en ne prévoyant aucune réelle mesure de surveillance de ce type de séjour et en imposant très peu de contraintes à l'hébergeant comme l'hébergé, a laissé, en réalité, la porte ouverte à des dérives qui font incontestablement, me semble-t-il, du certificat d'hébergement l'un des moyens privilégiés de l'immigration clandestine.
C'est la raion pour laquelle, monsieur le ministre, les dispositions de l'article 1er, tel qu'il résulte du vote en première lecture de l'Assemblée nationale, ne me paraissent pas répondre aux nécessités que je viens d'évoquer. J'ai donc déposé plusieurs amendements sur cet article. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. Robert Pagès. C'était la voix des ultras !
M. le président. La parole est à M. Ralite.
M. Jack Ralite. Avant d'évoquer l'article 1er, je veux dire à l'orateur précédent combien je suis choqué de voir quelqu'un s'autoriser à juger de la manière dont un pauvre utilise sa pauvreté ! Il a peu, et l'on veut aller enquêter sur la façon dont il dépense ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
Mon émotion est à la mesure de l'ignominie qui vient d'être proférée ! (Les protestations redoublent sur les mêmes travées.)
J'habite une ville où il y a beaucoup de pauvres, et je ne me suis jamais mêlé de savoir comment ils dépensaient leur pauvreté ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Charles de Cuttoli. C'est une réunion électorale ?
M. Jean Chérioux. On sait ce qu'est la pauvreté !
M. Michel Rocard. Il a parfaitement raison !
M. Jack Ralite. Dès son article 1er, le projet de loi comprend de vrais dangers pour les libertés - on vient d'en avoir l'illustration - et même pour l'organisation démocratique de notre pays.
En effet, évoquant les dispositions qui durcissent considérablement le régime des certificats d'hébergement, le Conseil d'Etat avait refusé d'accepter « cette atteinte à la liberté individuelle et à la vie privée de l'hébergeant ».
La commission nationale des droits de l'homme l'a confirmé le 15 novembre quand, sous la présidence de M. Kahn, elle a insisté sur le fait que cet article 1er risquait d'engendrer des « pratiques de délation ».
Oui, ces dispositions sont inacceptables, et ce pour deux raisons principales.
En premier lieu, elles instaurent des sanctions administratives ou pénales supplémentaires à l'encontre des hébergeants.
En second lieu, cet article 1er engendrera, de fait, la création de fichiers informatiques, à l'utilisation difficilement contrôlable.
Comment ne pas craindre la constitution, à l'avenir, de fichiers informatiques mettant en cause la vie privée des hébergeants et des hébergés ?
M. Gérard Braun. On n'est pas en Russie !
M. Jack Ralite. Nous ne contestons pas la nécessité de conserver tel ou tel document pour la bonne marche de l'administration des communes, car nous savons que la pratique l'impose. Mais, avec cet article 1er, c'est de tout autre chose qu'il s'agit, puisque M. le ministre a confirmé lui-même, devant la commission compétente de l'Assemblée nationale, la nécessité de conserver une trace des demandes.
Or, étant donné la nombreuse population des grandes villes, ces demandes devront être conservées grâce à l'informatique. Il s'agira donc non plus de « registres » ou de « répertoires », comme on a pu l'entendre ici ou là, mais de véritables fichiers informatiques qui tombent sous le coup de la loi du 6 janvier 1978, laquelle interdit toute atteinte à la vie privée. Qui peut contester ici l'existence potentielle d'une telle atteinte ?
Je dois rappeler ici que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 13 août 1993, a posé clairement son point de vue en la matière : il rappelle en effet que « le législateur a entendu explicitement assurer l'application des dispositions protectrices de la liberté individuelle prévues par la législation relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ».
L'article 1er est donc, selon nous, irrecevable sur le plan du strict respect des libertés fondamentales, et nous aurons l'occasion de revenir sur ce point à l'occasion de l'examen des amendements.
En outre, cet article 1er suscite des réserves, voire une franche hostilité, et ce au-delà de l'opposition et des associations qui protestent contre le projet de loi. Ainsi, l'Association des maires de France s'est clairement élevée contre cette disposition. Elle juge en effet ces mesures « nuisibles à la sérénité politique locale et susceptibles de créer un climat de suspicion à l'égard du maire ».
Ces remarques sont pertinentes, car les élus locaux ne peuvent accepter l'attitude du Gouvernement, qui tonne contre les immigrés mais qui, dans la pratique quotidienne, veut transférer au maire une responsabilité totale en matière de délivrance des certificats d'hébergement.
Nous constatons donc qu'il existe des points de vue très divers et que la majorité est même divisée sur cette question des certificats d'hébergement. C'est d'ailleurs bien normal, s'agissant d'un problème privé aussi fondamental.
Nous espérons donc que le bon sens démocratique prévaudra et que M. le ministre et la majorité renonceront, en acceptant le retrait ou la suppression de cet article, à ces nouveaux outils qui blessent les libertés.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen leur en offriront la possibilité, puisqu'ils ont déposé un amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Robert Pagès. Très bien !
M. Michel Rocard. Qu'est-ce que tu es bon, Jack !
M. le président. La parole est à M. Authié.
M. Germain Authié. J'interviendrai brièvement en qualité de président de l'association des maires de mon département, lequel présente la caractéristique de compter près de 180 kilomètres de frontière avec l'Espagne et 50 avec la principauté d'Andorre.
Etant moi-même maire d'une commune située à moins de 40 kilomètres de la frontière, je m'interroge sur l'efficacité du dispositif proposé au regard de l'objectif officiellement visé - je dis bien « officiellement » - à savoir la lutte contre l'immigration clandestine.
En revanche, ce texte, s'il est mis en oeuvre, aggravera sans aucun doute les difficultés déjà rencontrées par les étrangers qui souhaitent venir en France pour effectuer des visites familiales et privées.
En outre, je considère que le rôle des maires se trouverait singulièrement modifié, car ils n'ont pas été élus pour faire fonction d'agents de police. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Nous avons maintenant entamé la discussion du texte, et l'article 1er est le plus important, qui a suscité, il faut le savoir, le plus de réserves de la part d'abord de la commission consultative des droits de l'homme, ensuite du Conseil d'Etat et, enfin, de l'Association des maires de France. C'est dire à quel point son examen requiert une attention scrupuleuse de notre part.
Avec la pratique des certificats d'hébergement, nous nous trouvons dans une situation de droit qui a été reconnue par le Conseil d'Etat, à deux reprises, et par le Conseil constitutionnel.
Cette démarche concerne une personne qui souhaite recevoir chez elle, pour une visite privée, un étranger, qui est, bien sûr, par définition, en situation régulière, car, dans le cas contraire, on pense bien qu'il n'ira pas demander un certificat d'hébergement. Telle est la situation.
La pratique du visa s'est révélée variable selon les mairies. Nous savons que, hélas ! dans certaines mairies, on a pris le parti de refuser systématiquement de viser les certificats d'hébergement demandés, tandis qu'ailleurs le visa est toujours accordé. Cependant, le premier cas est le plus fréquent.
La pratique introduit également une discrimination entre les étrangers, parce qu'il ne faut pas oublier que, si l'étranger réside dans un hôtel, il n'est plus question alors pour lui de demander un certificat d'hébergement.
On veut apporter maintenant une adjonction au dispositif, laquelle a suscité une réaction négative du Conseil d'Etat et inquiète aussi les maires. L'adjonction est la suivante : lorsque le certificat d'hébergement a été obtenu et que l'étranger, régulièrement entré en France, a terminé son séjour chez l'hébergeant, celui-ci doit signaler à la mairie le départ de son invité.
Une question ne peut pas ne pas être posée à propos de cette obligation : à quoi sert-elle ?
S'il s'agit de lutter contre l'entrée irrégulière d'étrangers, cela n'a aucun sens, puisque, encore une fois, il s'agit de quelqu'un qui est entré sur le territoire avec un certificat d'hébergement. Donc, telle ne peut pas être la finalité de la nouvelle mesure proposée.
S'il s'agit de déceler le départ de France de cet étranger, ce n'est pas le fait de quitter le domicile de l'hébergeant qui implique la sortie du territoire. Telle n'est donc pas non plus la finalité.
Certes, on nous dit que cette disposition répond à une préoccupation, celle de repérer des filières d'immigration clandestines, et qu'elle permettrait de les cerner. Comment alors ne pas s'interroger ? J'ai rappelé que les filières clandestines sont constitutives d'infraction et que ce problème concerne la police judiciaire, le parquet et les magistrats instructeurs.
S'il s'agit de déceler des indices qui permettront à la police judiciaire d'accomplir sa mission, il est déjà très désagréable, on le comprendra, pour tous ceux qui, après avoir délivré le certificat d'hébergement, doivent dénoncer le départ de leur hôte, de savoir que leur déclaration sera utilisée dans le cadre d'opérations de police judiciaire. Je n'insiste pas sur ce point.
De surcroît, cette procédure est totalement inopérante, parce que ce qui caractérise la constitution d'une filière clandestine, ce sont évidemment les demandes de visa renouvelées, multipliées, singulières et concernant des lieux de séjour inadaptés, et non pas la date du départ.
Nous nous trouvons donc devant une démarche par laquelle on tend à exiger que tous les Français et les étrangers régulièrement domiciliés en France deviennent les dénonciateurs de ceux qui, après avoir séjourné chez eux, quittent leur domicile. Comment ne pas s'interroger lorsque l'on examine les conséquences d'une telle mesure, qui se caractérise par son absence d'efficacité, en dehors bien entendu des questions constitutionnelles qu'elle est de nature à soulever ?
Cette perplexité est d'autant plus grande que si par exemple le départ de parents étrangers reçus par leur enfant français ou d'une jeune fille marocaine ou tunisienne accueillie par son fiancé français n'a pas été dénoncé, il ne sera plus possible d'obtenir un autre certificat d'hébergement ultérieurement.
Cela signifie que le fils ne recevra plus ses parents ou que le jeune homme n'accueillera plus sa fiancée, parce qu'il aura oublié d'accomplir une formalité !
En me plaçant cette fois-ci du point de vue des maires, je veux souligner l'inévitable, et peut-être le prévenir. Je laisse de côté le problème du ficher, qui, j'en suis sûr, devra être constitué dans les mairies où des certificats d'hébergement seront fréquemment visés. En effet, comment constatera-t-on autrement que celui qui a été accueilli est reparti sans déclaration à l'appui ? Il faut donc établir un fichier, et admettons que celui-ci répondra aux exigences de la CNIL. Cela représentera une charge pour la mairie.
Il faut cependant mesurer que, comme pour être relevé de ce que j'appelle une sorte de déchéance du droit d'hébergement...
M. le président. Monsieur Badinter, je vous prie de bien vouloir conclure.
M. Robert Badinter. Tout à l'heure, vous n'étiez pas aussi pointilleux, monsieur le président !
M. le président. Ce n'est pas très gentil de votre part, monsieur Badinter, car je vous ai laissé parler deux minutes de plus que vous n'en aviez le droit.
Vous voyez que je suis très tolérant !
M. Robert Badinter. Je vous remercie, monsieur le président.
J'en termine, mais je tiens à aborder une question essentielle. Comme je le disais, du point de vue des maires, chacun de ces constats de déchéance, fût-ce pendant une période limitée, du droit d'hébergement, entraînera inévitablement un recours. En effet, il n'est pas possible que l'on ne s'aperçoive pas que ces décisions administratives sont susceptibles de recours, et l'ardeur justifiée des associations dans ce domaine entraînera, sans profit aucun, j'en suis convaincu, pour la finalité qui est affirmée par les auteurs du texte, une prolifération de contentieux dont les maires et les juridictions administratives auront à supporter le poids.
On comprend dès lors pourquoi l'Association des maires de France et le Conseil d'Etat, pour ne parler que d'eux, et en dehors de toute autre considération, sont opposés à cette disposition, dont on sent trop bien le caractère et l'origine. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga. Je voudrais porter quelques informations à la connaissance du Sénat sur les chiffres concernant les certificats d'hébergement. Combien délivre-t-on en effet de visas à des étrangers qui demandent à faire un séjour en France ? J'englobe ici tous les visas, qu'il s'agisse de visas de court séjour, qui sont la majorité, ou de visas de long séjour.
Sachez, mes chers collègues, qu'il n'est nul besoin de durcir les conditions d'obtention du certificat d'hébergement pour diminuer encore le nombre de visas accordés en particulier à tous les étrangers ressortissants de l'espace francophone.
En effet, si vous examinez les chiffres couvrant la période allant de 1987, époque à laquelle cette majorité était au pouvoir, à 1996, vous constaterez une chute incroyable du nombre de visas délivrés.
Par exemple, le nombre de visas délivrés aux ressortissants d'un pays comme la Côte d'Ivoire, est passé de 22 800 en 1987 à 12 500 en 1996. S'agissant des pays d'Afrique du Nord, pour lesquels les chiffres sont beaucoup plus élevés, le nombre de visas concernant des citoyens marocains est passé de 144 000 en 1984 à moins de 60 000 en 1996.
Cela signifie que c'est en amont, dans les services des visas, que l'on bloque la venue en France d'étrangers francophones dont on ne souhaite pas la visite.
Il en est de même en ce qui concerne la Tunisie. En effet, le nombre de visas est passé de 73 740 en 1987 à 48 262 en 1996, alors que nous avons signé l'accord de partenariat eurotunisien voilà quelques mois.
S'agissant, enfin, de l'Algérie, la situation est assez effroyable puisque le nombre de visas est passé de 571 000 en 1987 à 48 000 en 1996. Là, c'est vraiment le mur, le cordon sanitaire. Les Algériens, menacés ou non, ne viennent plus en France, quelle que soit la longueur du séjour, et les familles séparées par la Méditerranée ne peuvent pas se rencontrer en France.
Plus grave d'une certaine manière, même si cela ne concerne pas les certificats d'hébergement, le nombre des visas accordés aux étudiants d'un grand nombre de pays francophones diminue très nettement, de moitié ou des deux tiers.
Donc, que l'on ne nous dise pas que c'est en durcissant les conditions de délivrance des certificats d'hébergement que l'on réduira l'entrée d'étrangers en France, réguliers ou irréguliers ; on le fait déjà dans les services des visas ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Descours. Enfin ! Nous allons entendre un autre son !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. D'abord, je ne comprends pas les réticences que certains ont s'agissant des certificats d'hébergement. En effet, ces certificats résultent du décret n° 82-442 du 27 mai 1982, signé par M. Badinter, garde des sceaux ! (Bravo ! Rires et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants ; exclamations sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Modifié en 1991 !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Ce décret dispose : « pour une visite privée » - il prévoit les visites touristiques ou professionnelles - « est établi un certificat d'hébergement signé par la personne qui accueille l'étranger. Ce certificat indique l'identité de l'auteur du certificat, son adresse personnelle, l'identité du bénéficiaire et précise les conditions d'hébergement. Il mentionne, s'il y a lieu, le lien de parenté du signataire du certificat avec la personne hébergée. »
M. Guy Penne. C'était bien. Restez-en là !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. « Le certificat doit être revêtu du visa du maire de la commune après vérification par celui-ci. » (Exclamations sur les travées socialistes.)
Un sénateur du RPR. Bravo !
M. Charles Descours. Il est facile d'être dans l'opposition, monsieur Badinter !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Je tiens ce décret à votre disposition. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il a été modifié !
M. Charles Descours. Il est plus difficile de gouverner !
M. le président. Mes chers collègues, M. le ministre a seul la parole.
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Soyons clairs. Je n'ai jamais eu l'intention d'entraver l'accueil des étrangers en France lors des visites familiales ou privées. Il n'est pas question de fichiers. En tout état de cause, si certains maires veulent constituer des fichiers, ils doivent au préalable - vous l'avez dit, monsieur Badinter - obtenir l'accord de la CNIL.
M. Guy Penne. Elle va le leur donner !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Le seul objectif du Gouvernement est de mieux lutter contre les professionnels de l'hébergement, qui monnaient les certificats d'hébergement à des étrangers cherchant à s'introduire durablement en France sous le couvert d'un simple visa de court séjour, comme l'a fort bien expliqué M. Plasait. Je ne veux pas que l'on dénature l'intention du Gouvernement. J'ajoute qu'il me paraît légitime d'inciter les maires, agissant au nom de l'Etat, à ne pas s'associer indirectement, si peu que ce soit, à l'immigration irrégulière.
Un sénateur du RPR. Très bien !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. A cette fin, ils pourront s'appuyer non seulement sur l'OMI pour les visites domiciliaires, ce qu'ils ne font pas assez, ...
M. Guy Penne. Ils peuvent le faire !
Mme Joëlle Dusseau. C'est prévu par la loi !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... mais aussi, dans les cas les plus douteux, sur les services de l'Etat, afin de détecter d'éventuels détournements de procédure. J'espère ainsi surmonter des blocages que vous connaissez comme moi et redonner confiance dans cette procédure pour le plus grand profit des étrangers eux-mêmes. Aucune de ces dispositions ne contrevient à la décision du Conseil constitutionnel en date du 13 août 1993. Je ne vois donc pas de fondement réel à l'indignation qui se manifeste sur certaines travées, alors que ce sont des gouvernements de gauche qui ont créé les certificats d'hébergement...
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... et qui en ont confié le contrôle aux maires par les décrets de 1982 et de 1991.
M. Guy Penne. Si cela est suffisant, ne changez rien !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Enfin, je m'engage à définir précisément, par circulaire, les modalités d'application de la loi, à charge pour les préfets d'en assurer une mise en oeuvre homogène.
M. Guy Penne. Vous avez voté contre à l'époque !
M. Michel Mercier. Il s'agit d'un décret !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. En ce qui concerne la finalité, l'article 1er crée également une formalité nouvelle, vous avez raison, monsieur Badinter. Celle-ci tend à inviter l'hébergeant à informer la mairie du départ de l'étranger qu'il héberge. Cette démarche très simple peut amener les hébergeants à prendre conscience de leurs responsabilités s'ils s'associent au maintien irrégulier d'étrangers en France.
M. Charles Pasqua. Très bien !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Le projet de loi prévoit de les sanctionner par un refus de délivrance du certificat d'hébergement dans les deux années suivant l'absence de déclaration. Toutefois, en cas d'absence de déclaration ou de négligence de bonne foi, cette sanction n'interviendra bien sûr pas.
Voilà ce qui figure dans cet article. Il ne comporte rien de plus, rien de moins. Aussi, ne faites pas de procès d'intention ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Robert Badinter. Je demande la parole. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. le président. Monsieur Badinter, nous sommes dans un débat organisé, je ne peux donc vous donner la parole en l'instant. Vous vous exprimerez tout à l'heure.
M. Charles Descours. Pas de discrimination !
M. Paul Masson, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Masson, rapporteur. Je voudrais rappeler, après M. le ministre et certainement moins bien que lui, qu'il s'agit d'un texte ancien puisqu'il date de 1982. Je n'avais pas eu la curiosité de rechercher par qui avait été signé... (Sourires sur les travées du RPR.)
M. Guy Penne. De toute façon, vous auriez voté contre !
M. Alain Gournac. On ne vote pas un décret !
M. Guy Penne. Je ne parle pas du décret !
M. Paul Masson, rapporteur. Je voudrais souligner aussi que ce texte n'a été soumis au Conseil constitutionnel que parce qu'il a été intégré dans la loi en 1993, grâce à M. Pasqua. (Marques d'approbation sur les travées du RPR. - M. Pasqua sourit.)
M. Guy Penne. Vous faites sourire M. Pasqua !
M. Charles Pasqua. Du calme ! (Sourires.)
M. Paul Masson, rapporteur. Avant 1993, on ne savait pas si ce texte respectait la Constitution.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Maintenez le décret !
M. Paul Masson, rapporteur. C'est parce qu'il a été intégré dans la loi, comme bien d'autres dispositions, notamment le droit d'asile et le regroupement familial, que le Conseil constitutionnel a effectivement pu donner sa position. Elle est claire : il n'y a pas atteinte à la liberté des personnes ; le domicile privé n'est pas violé. Telle est la décision prise par le Conseil constitutionnel en 1993.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous n'avons jamais dit le contraire !
M. Bernard Piras. Ce n'est pas le débat !
M. Paul Masson, rapporteur. Or, depuis le début de ce débat, il est fait référence au droit d'exception de la France ; on reproche à notre pays d'être « bourré » de préjugés et on fait tous les procès d'intention pour que les étrangers ne viennent pas. Sommes-nous les seuls à agir ainsi ? Il faut faire toujours un peu de droit comparé européen...
M. Guy Penne. Il n'y a pas que l'Europe !
M. Paul Masson, rapporteur. ... quand on veut être un peu rappelé à la modestie et lorsque l'on ne veut pas être prisonnier de l'éloquence,...
M. Guy Penne. Redondante !
M. Paul Masson, rapporteur. ... parfois intelligente, parfois foisonnante, parfois redondante.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. N'ayez pas de complexe !
M. Paul Masson, rapporteur. A cet égard, que font la Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, l'Allemagne et ses Lander ? Voilà des pays où, à ma connaissance, on respecte le droit des personnes.
M. Alain Gournac. C'est normal !
M. Paul Masson, rapporteur. Mes chers collègues, il y a dans tous ces pays des déclarations de prise en charge, des conditions de ressources de l'hébergé, des exigences de police d'assurance et, pour certains cas, des précisions concernant la nature de l'hébergement.
M. Bernard Piras. Mais pas de délation !
M. Guy Penne. Si c'est bien, pourquoi voulez-vous modifier le dispositif ?
M. Paul Masson, rapporteur. On en est loin en France ! On ne va pas jusque-là ! Pourquoi nous faire en l'occurrence un procès, alors que, nous le savons, nos voisins et amis, nos partenaires européens font plus ? (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.) C'était ma deuxième observation.
M. Charles Descours. Et en Belgique, c'est un gouvernement socialiste ! C'est le parti social démocrate qui a la majorité !
M. Paul Masson, rapporteur. Ma troisième observation concerne la position de notre assemblée, constante depuis 1991. Je rappelle que, à la suite du rapport de notre éminent collègue M. Laurin, nous avons voté, en 1991, une proposition de loi qui est claire à cet égard et dont le titre II précise les dispositions relatives aux certificats d'hébergement.
On avait effectivement voulu ici la codifier et on avait notamment précisé que les dispositions de cet article sont relatives aux droits et libertés des communes, des départements et des régions et qu'elles sont applicables aux actes pris par le maire dans la plénitude de ses fonctions, c'est-à-dire en indépendance par rapport au préfet.
C'était un risque que nous avions pris à l'époque. Je réponds là indirectement à notre collègue M. Authié. En effet, le maire aurait agi précisément seul, uniquement sous le contrôle de ses concitoyens et donc éventuellement sous leur pression. C'est vrai, mon cher collègue, le maire n'est pas fait pour cela ! (Rires sur les travées socialistes.) Attendez avant de vous esclaffer. Toutefois, le Conseil constitutionnel a bien précisé que le maire agissait dans le cadre du pouvoir hiérarchique des préfets. Cette précision figure dans la décision du Conseil constitutionnel. Cela change tout. En effet, nous sommes maintenant non plus dans la situation où le maire agit en toute souveraineté sous le seul contrôle de ses concitoyens et de la majorité municipale, mais dans celle où il intervient sous la responsabilité de l'Etat. Comme chacun le sait, dans notre pays, le maire est dépositaire d'un double pouvoir : d'une part, il gère ; d'autre part, il exerce des missions, au nom de l'Etat, dans un certain nombre de domaines sur lesquels le préfet représente l'échelon hiérarchique supérieur et, en définitive, se substitue à lui en cas de carence.
On le voit constamment en matière d'ordre public, lorsque le maire interdit ou autorise une manifestation. On le voit aussi constamment en matière de circulation, en matière de danger imminent, le maire prenant ou non un arrêté de péril et le préfet, le cas échéant, prend la décision à la place du maire.
Cette situation-là est très exactement celle dans laquelle nous nous trouvons avec les certificats d'hébergement. Cela signifie qu'il n'y a pas de craintes à avoir quant à une hétérogénéité dans l'interprétation de la loi. C'est le préfet et, derrrière lui, le Gouvernement qui précisent comment il faut agir en matière de certificat d'hébergement. Ainsi va être instauré un droit homogène par rapport à une décision du législateur et aux décrets d'application pris par le Gouvernement.
Il revient donc au Gouvernement de définir quelle doit être la position homogène des maires vis-à-vis du certificat d'hébergement. Si certains maires adoptent, à cet égard, une position hétérogène ou insolite, il revient alors au pouvoir hiérarchique d'agir. Il lui revient en effet de faire en sorte que, par un recours amiable s'il y a lieu, ou par un recours contentieux si c'est nécessaire, le maire qui irait à l'encontre de la loi et des décisions prises par le Gouvernement en matière réglementaire, en application de la loi, voie sa décision infirmée.
M. Guy Penne. C'est totalitaire !
M. Paul Masson, rapporteur. En l'occurrence, le maire est en effet l'auxiliaire du Gouvernement, et ce n'est pas la seule fois !
En cette matière, il s'agit non pas d'un quelconque détournement de pouvoir, mais simplement de l'application de notre logique républicaine, qui ne date pas d'hier car ces dispositions existaient déjà sous la IVe République.
Voilà, mes chers collègues, ce que je voulais ajouter aux commentaires qui ont été faits, afin de cadrer ce débat et de n'en faire ni un excès d'honneur ni un excès d'indignité. C'est important, car ce régime n'est ni dérogatoire de ce qui existe en Europe ni exorbitant du droit commun. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Guy Penne. Mieux vaudrait tout abroger !
M. le président. Sur l'article 1er, je suis saisi de trente-deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune, mais, pour la clarté du débat, je les appellerai séparément.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 60 est présenté par M. Pagès, Mme Borvo, M. Ralite, les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 100 est déposé par MM. Allouche, Autain, Authié, Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt, Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas et Mélenchon, Mmes Pourtaud et Printz, M. Rocard, les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 194 est présenté par Mme Dusseau.
Tous trois tendent à supprimer l'article 1er.
La parole est à Mme Borvo, pour défendre l'amendement n° 60.
Mme Nicole Borvo. Avant de défendre l'amendement n° 60, je souhaite inviter M. le ministre à répondre à la demande de M. Ralite, s'agissant du sort des personnes, dont plusieurs femmes, arrêtées ce matin et encore détenues au commissariat du XIVe arrondissement. Il est fâcheux, alors que nous discutons d'un projet de loi portant diverses dispositions relatives à l'immigration, que ces personnes continuent à être détenues sans que vous ayez dit un mot sur cette affaire, monsieur le ministre !
M. Robert Pagès. Très bien !
Mme Nicole Borvo. Quant à l'amendement n° 60, il a pour objet de supprimer les dispositions du projet de loi tendant à durcir encore un peu plus le régime du certificat d'hébergement.
Si le principe même de la nécessité de demander une autorisation pour pouvoir séjourner chez un parent ou un ami est déjà en soi quelque peu choquant, les nouvelles modalités de délivrance de ces certificats en font, de plus, une procédure profondément condamnable. Vous avez cité la Suisse, monsieur le rapporteur.
M. Paul Masson, rapporteur. Non, je n'ai pas cité la Suisse !
Mme Nicole Borvo. Je vous recommande d'aller voir le film Pain et Chocolat, qui, s'il date déjà de quelques années, est néanmoins toujours significatif du traitement des immigrés en Suisse ; il me paraît donc inutile de copier sur la Suisse.
Inspirée par une méfiance irrationnelle, attentatoire au respect de la vie privée de celles et de ceux qui souhaitent accueillir, dans le cadre de visites privées, des proches ou des amis, cette disposition est d'autant plus critiquable que l'imprécision de sa rédaction risque d'entraîner de nombreux abus faisant la part belle à l'arbitraire.
Que faut-il entendre, par exemple, par « détournement de procédure » ? Chacun sait que, juridiquement, cette notion est particulièrement vague.
De même, que sont des « conditions normales » d'hébergement ?
Cette imprécision n'est pas tolérable quand on sait que certains élus n'hésitent pas à exiger, à l'appui de la demande du certificat d'hébergement, des pièces justificatives plus ou moins farfelues, et que d'autres prônent ostensiblement une politique de refus systématique de ces certificats.
Jack Ralite a évoqué la mise en place inévitable de fichiers informatisés, contraires à la loi du 6 janvier 1978. En réalité, sous couvert de lutter contre l'immigration, vous travaillez surtout à réduire les libertés : celles des Français et celles des étrangers en situation régulière, en fichant ces derniers sans contrôle de l'utilisation des données.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons la suppression de l'article 1er.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Badinter, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Robert Badinter. Monsieur le ministre, soit vous n'avez rien compris à mon propos, soit - c'est ce que je crois plus volontiers - vous avez feint de ne rien comprendre pour pratiquer un amalgame ! (Applaudissements sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées de l'Union centriste.)
Je rappelle - et toute la Haute Assemblée peut d'ailleurs s'en souvenir - que, commençant mon intervention, j'ai énoncé l'état de droit existant, à savoir les certificats d'hébergement. J'ai rappelé moi-même que le Conseil d'Etat avait reconnu la légalité des certificats d'hébergement, et j'ai évoqué à cet égard la circulaire signée par le ministre de l'intérieur de l'époque, notre regretté ami Gaston Defferre, ainsi que par MM. Cheysson et Fabius, indépendamment de moi-même.
Mais il ne s'agit pas de cela. Si le Conseil d'Etat, dans son arrêt « Terre d'asile », a reconnu la légalité de ce texte, c'est parce que ce dernier constituait un juste équilibre entre les exigences de l'ordre public et les libertés.
Mais je n'insiste pas, car cela n'a rien à voir avec ce dont nous discutons. Nous débattons en effet de la diposition ajoutée par le projet de loi, à savoir l'obligation pour celui auquel on a délivré le certificat d'hébergement de dénoncer le départ de son hôte. C'est là une question tout à fait différente. L'amalgame fait à cet égard, par un effet de tréteau, sinon d'audience, n'est pas, au regard de l'importance du sujet, la meilleure façon de traiter ce dernier. Voilà ce que je voulais d'abord vous répondre, monsieur le ministre !
J'en arrive maintenant à l'article 1er et à l'amendement n° 100, qui vise à sa suppression.
En ce qui concerne l'équilibre évoqué, le Conseil d'Etat a déconseillé au Gouvernement de prendre une telle disposition, et ce pour les raisons que j'ai déjà énoncées : tout d'abord, cela fait peser sur les citoyens une obligation qu'ils n'ont pas à assumer au regard des libertés ; par ailleurs, cela fait nécessairement peser sur les maires une responsabilité dont ils auront à répondre devant les juridictions administratives ; enfin, cela engendrera un contentieux inutile et des amertumes durables.
Ces seuls motifs devraient suffire à retenir la Haute Assemblée de demander à tous les Français et à tous les étrangers régulièrement domiciliés qui recoivent des étrangers de dénoncer le départ des personnes titularise de visas admises à venir régulièrement sur le territoire national. Quelle société sera la nôtre, si, à chaque fois que nous recevons un ami, il nous faut prévenir les autorités administratives de son départ ? (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Un sénateur socialiste. C'est scandaleux !
M. Michel Caldaguès. N'en ajoutez pas !
M. le président. La parole est à Mme Dusseau, pour défendre l'amendement n° 194. Mme Joëlle Dusseau. L'article 1er est symbolique de l'état d'esprit général qui préside au projet de loi.
Ses dispositions sont dangereuses dans leur principe : elles autorisent les maires - et donc les incitent - à évaluer les capacités d'hébergement, à organiser des visites domiciliaires inopinées, à ficher les habitants et à noter le départ des personnes hébergées.
Quel rôle fait-on jouer aux maires ? Quels rapports instaure-t-on entre eux et leurs administrés ? D'ailleurs, leurs réactions ne se sont pas fait attendre, et je suis persuadé, mes chers collègues, que, quels que soient les propos que vous tenez actuellement, vous êtes nombreux à avoir enregistré ces réactions et à y être attentifs.
Le principe, c'est d'obliger les hébergeants - le parent, le fiancé dont parlait M. Badinter, mais aussi vous ou moi, quand nous recevons des visiteurs qui ne sont pas originaires de l'Union européenne - à notifier à la mairie le départ des personnes hébergées. Qu'est-ce donc, monsieur le ministre, si ce n'est de la délation organisée, institutionnalisée et légalisée ?
Nous avons connu ces pratiques en d'autres temps, dans d'autres pays, et elles existent actuellement dans certaines contrées du monde.
M. Dominique Braye. Arrêtez l'amalgame !
Mme Joëlle Dusseau. Nous sommes donc en train d'instaurer dans notre propre pays ce que nous avons dénoncé hier !
Quant à l'efficacité, plusieurs de nos collègues - je pense à M. Vallet, hier soir, et à M. Badinter, tout à l'heure - ont montré que le fait de notifier le départ de la personne hébergée ne permet en rien de savoir où va cette dernière et, en tout cas, ne permet en rien de s'attaquer au problème principal, c'est-à-dire l'institution de filières illégales et mafieuses.
Ce n'est pas parce que M. X ira dire que la Roumaine ou le Roumain qu'il hébergeait est bien parti que la filière mafieuse qui est proche sera démantelée.
Telles sont toutes les raisons pour lesquelles l'amendement n° 194 vise à la suppression pure et simple de l'article 1er. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Par amendement n° 82, M. Plasait propose d'insérer, avant le paragraphe I de l'article 1er, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Dans le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, les mots : "d'un étranger" sont remplacés par les mots : "d'un ressortissant d'un Etat soumis à visa". »
La parole est à M. Plasait. M. Bernard Plasait. Je tiens tout d'abord à répondre très calmement à M. Ralite, qui m'a pris à partie tout à l'heure, que sa belle envolée lyrique ne m'impressionne pas ! Elle s'apparente à une espèce de terrorisme moraliste...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Bernard Plasait. ... ou à un procès d'intention que je trouve vraiment irresponsable. (Très bien ! sur les travées des Républicains et Indépendants.)
Pour moi, les droits de l'homme, loin d'être un slogan permettant des effets faciles (Très bien ! sur les mêmes travées.), sont au contraire une nécessité non seulement pour aujourd'hui, mais aussi pour demain.
C'est parce que l'immigration illégale conduit beaucoup trop souvent le clandestin à des conditions de vie incompatibles avec la dignité de l'homme que nous voulons lutter contre elle. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Ben voyons !
M. Bernard Plasait. L'amendement n° 82 vise à supprimer des formalités inutiles imposées jusque-là aux ressortissants de certains pays étrangers. Je suggère de renoncer à un certain patriotisme européen qui nous conduit à imposer des formalités inutiles aux ressortissants non européens.
C'est pourquoi je propose de réserver le certificat d'hébergement aux ressortissants des Etats soumis à visa.
M. le président. Par amendement n° 38, MM. Caldaguès, Calmejane, Chérioux, Debavelaere, François, de Gaulle, de La Malène, Jean-Jacques Robert et Schosteck proposent d'insérer, avant le I de l'article 1er, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Celui-ci en rend compte sans délai au représentant de l'Etat dans le département. »
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Certains, ici et là, ayant déploré l'excès de décentralisation que constituait l'attribution aux maires de la responsabilité d'octroyer des certificats d'hébergement, mes amis et moi-même proposons, pour tenir compte de cette préoccupation, d'obliger le maire à rendre compte immédiatement au représentant de l'Etat dans le département de la délivrance des certificats d'hébergement octroyés. Cela permettrait d'assurer un meilleur contrôle de l'autorité de l'Etat, au nom duquel agit le maire en la matière. Tel est l'objet de l'amendement n° 38.
Je voudrais saisir cette occasion pour éclaircir, à l'intention de ceux qui s'interrogent à ce sujet - je pense notamment à M. Badinter - les raisons qui motivent l'institution d'une déclaration de départ ; il est bon, en effet, d'avoir la pratique du terrain et, par conséquent, de savoir à quoi correspond concrètement une obligation ou son absence.
En tant que maire d'arrondissement à Paris, j'ai interrogé mes collaborateurs au sujet des certificats d'hébergement délivrés quotidiennement. Ils m'ont indiqué avoir repéré des hébergeants qui, toujours pour le même individu, demandaient à quelques mois d'intervalle un certificat d'hébergement, ce qui permettait à la personne hébergée de ne pas repartir et de disposer quasiment en permanence d'un certificat d'hébergement !
Or, il est certain que, si le départ de la personne hébergée est déclaré, ces manoeuvres seront moins faciles ; en effet, l'hébergeant engagera alors sa responsabilité sur cette déclaration de départ.
Voilà à quoi correspond concrètement, sur le terrain, cette obligation.
J'ajouterai, monsieur Badinter, que le certificat d'hébergement, que vous avez institué, comme M. le ministre l'a rappelé à l'instant, ...
Mme Joëlle Dusseau. Ce n'est pas un scoop !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est la preuve que nous ne sommes pas laxistes !
M. Michel Caldaguès. ... a fait figure de formalité relativement banale depuis son institution jusqu'à la vague d'attentats de septembre 1986. Et je puis vous dire que, pour ma part, je ne prends pas cette formalité à la légère !
Un sénateur socialiste. Nous non plus !
M. Michel Caldaguès. En effet, à cette époque des attentats, j'ai découvert un personnage qui en était pratiquement à sa cinquantième demande de certificat d'hébergement ! Je l'ai immédiatement signalé à la police.
M. Jean-Luc Mélenchon. Combien de terroristes parmi eux ?
Mme Joëlle Dusseau. Cela prouve bien l'inutilité du projet de loi !
M. Michel Caldaguès. Tout à l'heure, on a dit que les maires ne devaient pas jouer le rôle de la police.
M. Jean-Luc Mélenchon. Evidemment pas !
M. Michel Caldaguès. En l'occurrence, au moment de cette vague d'attentats, quand j'ai appris qu'un personnage en était à son cinquantième certificat d'hébergement, j'ai alors estimé de mon devoir de le signaler à la police, et j'espère que cela n'a pas été inutile !
M. Jean-Luc Mélenchon. Combien y avait-il de terroristes parmi ces cinquante personnes ?
Mme Joëlle Dusseau. Cela prouve bien l'inutilité du projet de loi !
M. Michel Caldaguès. Voilà, monsieur Badinter, la réalité des choses, sur le terrain,...
Mme Joëlle Dusseau. C'est un contre-exemple !
M. Michel Caldaguès. ... et voilà pourquoi je crois à la nécessité du certificat d'hébergement. A vous, cela vous est tout à fait indifférent...
M. Jean-Luc Mélenchon. Pas du tout ! Mais combien de terroristes y avait-il parmi ces personnes ?
M. le président. Monsieur Mélenchon, laissez M. Caldaguès s'exprimer !
M. Michel Caldaguès. Monsieur Mélenchon, je vais vous donner une précision supplémentaire : ce personnage...
M. Jean-Luc Mélenchon. C'était Carlos ?
M. Michel Caldaguès. ... était originaire d'un pays fortement soupçonné, à l'époque, d'avoir organisé un réseau de poseurs de bombes en France.
Voilà, mesdames, messieurs, la précision qui vous manquait et qui était importante pour comprendre mon intervention !
Mme Joëlle Dusseau. Ce projet de loi ne sert donc à rien, puisque vous avez fait cela sans ce texte !
M. le président. Monsieur Caldaguès, exposez votre amendement, ne vous laissez pas impressionner !
M. Michel Caldaguès. J'expose mon amendement ! Au demeurant, je ne suis pas à une minute près et, si l'on veut bien ne pas m'interrompre, je vais terminer, monsieur le président.
M. Bernard Piras. C'était Gordji, votre personnage ?
M. Michel Caldaguès. Je veux seulement dire, pour terminer - et, pour une fois, je vais me retrouver avec M. Dreyfus-Schmidt sur un point -... (Ah ! sur les travées socialistes.)
Voilà, ça l'intéresse !
Je dis seulement, monsieur le ministre, que, s'agissant d'une formalité telle que le certificat d'hébergement, qui est rendue nécessaire par l'intérêt général, par la protection de notre sécurité à tous, il me paraît quelque peu mesquin de demander un droit de 100 francs à tout étranger. En effet, il n'y a qu'une petite partie des étrangers qui abusent des certificats d'hébergement - même si nous connaissons des officines oeuvrant à répétition - mais il y a aussi des étrangers qui viennent en France en respectant la loi.
Nous nous honorerions donc, monsieur le ministre, en supprimant ce droit de 100 francs.
Mme Joëlle Dusseau. Il n'y a pas que l'étranger qui héberge, il y a aussi des Français hébergeants !
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 101, est présenté par MM. Allouche, Autain, Authié, Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt, Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas, Mélenchon, Mmes Pourtaud, Printz, M. Rocard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Le second, n° 162, est déposé par M. Pagès, Mme Borvo, M. Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer le I de l'article 1er.
La parole est à M. Allouche, pour défendre l'amendement n° 101.
M. Guy Allouche. Je tiens à ce que les choses soient bien claires jusqu'à la fin du débat. Peut-être nous sommes-nous mal expliqués ?
M. Alain Gournac. Ah !
M. Guy Allouche. Nous constatons, en effet, que vous n'avez pas encore compris.
M. Jean Chérioux. Nous sommes un peu idiots !
M. Bernard Piras. Nous l'avions remarqué !
M. le président. Monsieur Allouche, ne vous laissez pas influencer !
M. Guy Allouche. Je préfère attendre le calme, monsieur le président, afin que mes propos soient audibles pour tout le monde.
M. le président. Nous vous écoutons.
M. Guy Allouche. Nous n'avons jamais remis en cause le principe du certificat d'hébergement. Ce que nous condamnons, ce que nous refusons,...
M. Michel Caldaguès. Il faut pourvoir à notre éducation intellectuelle !
M. Guy Allouche. Ecoutez, monsieur Caldaguès ! Cela vous fera le plus grand bien !
M. Michel Caldaguès. Mais vous proposez des amendements de suppression !
M. Guy Allouche. Ce que nous contestons, ce sont les adjonctions qui ont été apportées à la première partie du texte.
Quoi qu'il en soit, monsieur Caldaguès, je suis sensible à votre mansuétude : il vous aura fallu attendre la cinquantième fois pour appeler l'attention de la police sur le comportement quelque peu délictueux d'un individu !
M. Michel Caldaguès. N'essayez pas de faire diversion !
M. Jean-Luc Mélenchon. Debré va vous faire mettre à table !
M. Guy Allouche. Par l'amendement n° 101, nous entendons supprimer le paragraphe I de l'article 1er, car l'obligation faite au signataire du certificat de notifier à la mairie de sa commune de résidence dans un délai de huit jours le départ de son hôte est pour nous inacceptable.
D'une part, ainsi que cela a été expliqué et démontré, il s'agit d'une atteinte au droit à mener sa vie privée comme on l'entend, composante de la liberté individuelle dont la valeur constitutionnelle est fortement consacrée.
D'autre part, cette obligation fait de tout hébergeant une personne susceptible d'être poursuivie sur le fondement de l'article 21 de l'ordonnance de 1945 pour aide au séjour irrégulier.
Permettez au sénateur du Nord que je suis d'appeler votre attention sur le cas de Mme Deltombe, qui est retournée hier au tribunal, où on l'a reconnue coupable sans pour autant sanctionner sa culpabilité au motif qu'elle a hébergé un ami d'origine zaïroise. Voilà ce qui risque d'arriver, demain, en France !
Enfin, on peut s'interroger sur la portée du terme « notification ». Faudra-t-il que l'hébergeant adresse un courrier recommandé afin que sa déclaration de départ de l'hébergé acquière date certaine ? Imagine-t-on les complications que cela entraînera au quotidien ? D'évidence, la liberté personnelle est contrainte au-delà du strict nécessaire !
C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression du paragraphe I de l'article 1er. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Pagès, pour défendre l'amendement n° 162.
M. Robert Pagès. L'amendement que nous vous proposons a pour objet de supprimer l'obligation faite aux personnes qui ont hébergé des étrangers en visite privée de déclarer le départ de ces derniers à la mairie.
Nous ne saurions donner notre aval à une mesure qui, au-delà même de son esprit exclusivement sécuritaire, porte atteinte aux libertés.
Pour quelle raison, sinon celle de prêter des intentions frauduleuses à toutes celles et à tous ceux qui, dans notre pays, souhaitent accueillir des étrangers amis ou parents, imposer une telle obligation ?
Vous multipliez les formalités administratives sous prétexte de lutter contre l'immigration irrégulière mais, ce faisant, vous mettez en place un régime de surveillance généralisée des Français et des étrangers réguliers.
Votre méfiance vous amène à des entorses injustifiables aux libertés individuelles.
Est-il nécessaire de vous rappeler, monsieur le ministre, que le respect de la vie privée fait partie de ces libertés et qu'il a valeur constitutionnelle ?
Le Conseil d'Etat, dans son avis remis le 31 octobre 1996 au Gouvernement, souligne lui-même que les dispositions relatives aux certificats d'hébergement « feraient peser sur l'hébergeant des obligations nouvelles assorties de véritables sanctions ». Il ajoute que ces dispositions « porteraient atteinte à la liberté individuelle et à la vie privée de l'hébergeant ».
La commission nationale consultative des droits de l'homme n'a pas hésité, elle aussi, à condamner sévèrement cette obligation, qui risque « d'engendrer des pratiques de délation » et fait courir « le danger de voir criminaliser le simple fait d'accueillir un étranger chez soi ».
Dès lors, mes chers collègues, refusez, vous aussi, de faire de la vertu d'hospitalité une vertu suspecte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Par amendement n° 83, M. Plasait propose, avant le texte présenté par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'hébergeant doit justifier de ressources personnelles mensuelles, stables et suffisantes, de nature à subvenir aux besoins des personnes hébergées. Les étudiants titulaires d'une carte de séjour temporaire sont dispensés de l'obligation précitée. »
La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Cet amendement tend à étendre le contrôle des certificats d'hébergement par l'édiction d'une condition de ressources identique à celle qui est demandée pour le regroupement familial.
M. Jacques Mahéas. Les pauvres n'ont pas le droit d'héberger !
M. le président. Par amendement n° 9, M. Masson, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France :
« Toute personne ayant signé un certificat d'hébergement et hébergé un ressortissant étranger, dans le cadre d'une visite privée, notifie à la mairie de sa commune de résidence le départ de cet étranger de son domicile. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 51 rectifié, présenté par le Gouvernement, et tendant, dans le texte proposé par l'amendement n° 9, à remplacer les mots : « et hébergé » par le mot : « pour ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 9.
M. Paul Masson, rapporteur. Nous abordons ici la seule innovation importante par rapport aux textes de 1982 et de 1993 concernant le certificat d'hébergement.
Il s'agit de savoir si, oui ou non, l'obligation faite à l'hébergeant - qu'il soit français ou étranger, d'ailleurs - d'annoncer le départ de celui qu'il héberge est de nature incantatoire, de nature attentatoire,...
M. Jean-Luc Mélenchon. De nature inquisitoire !
M. Paul Masson, rapporteur. ... de nature inquisitoire, ou encore de nature administrative.
Personnellement, ma conviction est faite. Quelqu'un qui est allé annoncer au maire qu'il a un visiteur - c'est l'objet du certificat d'hébergement tel qu'il existe depuis 1982 - me paraît être en état de signaler au même maire le départ de ce visiteur !
Pourquoi parler - cet amalgame est sinon insupportable, du moins un peu désagréable - d'inquisition, de délation, de dénonciation ? Il y a là simplement une démarche tout à fait naturelle, faite par quelqu'un qui signale à l'autorité municipale, au maire, agissant au nom de l'Etat à cet égard, qu'il va recevoir un étranger. C'est la loi actuelle ! Je ne vois pas pourquoi on lui interdirait d'annoncer le départ ou la non-venue de cette personne !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il ne s'agit pas de lui interdire, mais de l'obliger à dire !
M. Marcel Debarge. C'est une obligation !
M. Jean-Luc Mélenchon. Oui, on va l'obliger à le dire !
M. Paul Masson, rapporteur. C'est une procédure administrative, comme il en existe d'autres dans le droit français.
M. Claude Estier. A quoi ça sert ?
M. Paul Masson, rapporteur. Je vais vous le dire, mon cher collègue.
M. Claude Estier. Oui, nous aimerions bien savoir !
M. Paul Masson, rapporteur. Cela sert à démanteler les réseaux. (Ah ! sur les travées socialistes.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Alors il fallait le faire depuis longtemps !
M. Paul Masson, rapporteur. Ne vous exclamez pas : ce que disait M. Caldaguès tout à l'heure est essentiel.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !
M. Paul Masson, rapporteur. Nous savons, et vous le saviez aussi quand vous étiez au gouvernement, qu'il y a des réseaux organisés à l'extérieur, qu'il y a de bonnes adresses de gens complices qui prêtent volontiers et facticement leur domicile et leur nom...
M. Dominique Braye. Eh oui !
M. Paul Masson, rapporteur. ... afin que l'on puisse bénéficier d'un certificat d'hébergement. Mais, bien entendu, l'intéressé ne réside pas à cette adresse, il s'agit simplement de donner à l'étranger la possibilité d'obtenir un visa au vu d'un certificat d'hébergement.
C'est cela, la clandestinité ! Nous voulons dénoncer les réseaux, il ne s'agit pas d'embêter les braves gens !
M. Jean Peyraffite. Mettez-leur des bracelets électroniques !
M. Paul Masson, rapporteur. Pour en revenir à l'amendement n° 9, la commission des lois vous propose de reprendre, en le précisant, le texte du Gouvernement tel qu'il avait été présenté en première lecture à l'Assemblée nationale. Elle le préfère, en effet, à celui qui a été voté par nos collègues députés.
L'amendement que je vous soumets, mes chers collègues, a donc pour objet d'alléger la rédaction du projet de loi, notamment en renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de fixer le délai au cours duquel la notification du départ de l'étranger hébergé doit être faite, en supprimant la mention de circonstances personnelles et familiales - qui seront reprises plus loin dans le texte et complétées par la faculté reconnue à l'intéressé d'exposer sa bonne foi pour justifier qu'il a omis d'annoncer le départ de la personne hébergée et en précisant que la notification porte sur le départ du domicile et non sur le départ du territoire, pour lequel, effectivement, pas plus l'hébergeant que le maire n'ont, par essence et par définition, aucun avis à formuler.
Il faut bien comprendre que nous sommes là au point dur, au point essentiel de notre délibération : faut-il, oui ou non, que l'hébergeant notifie le départ de l'hébergé comme il a notifié son arrivée ? Je pense que cela n'a rien à voir ni avec la délation ni avec la dénonciation : c'est une procédure qui me paraît normale dans un Etat qui veut s'assurer que ses frontières ne sont pas des passoires.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et le bracelet électronique, c'est pour la prochaine fois ?
M. Jacques Mahéas. Je l'avais déjà suggéré à M. Demuynck !
M. Christian Demuynck. Oui, mais nous n'avons pas besoin de perroquets !
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre le sous-amendement n° 51 rectifié.
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Avec son amendement n° 9, M. le rapporteur ne créé d'obligation que pour les hébergeants qui ont effectivement reçu leur invité étranger. Or il y a deux autres cas à prendre en considération : d'abord celui des étrangers invités qui n'ont pas pu, pour des raisons personnelles, effectuer le déplacement prévu ; ensuite le cas de ceux qui n'ont reçu un certificat qu'à titre de complaisance.
Ce sous-amendement a donc pour objet de bien distinguer ces différentes situations.
M. le président. Par amendement n° 84, M. Plasait propose, dans le texte présenté par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, de remplacer le mot : « huit », par le mot : « trois ».
La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Aux termes de l'article 1er, « le signataire d'un certificat d'hébergement doit notifier à la mairie de sa commune de résidence, dans un délai de huit jours, sauf circonstances personnelles ou familiales justifiées, le départ de l'étranger hébergé ».
Comme il s'agit d'une simple déclaration en mairie, je ne vois pas ce qui justifierait un délai de huit jours !
Aussi, sous réserve de plus amples explications, je propose de ramener ce délai à trois jours, ce qui me paraît largement suffisant pour répondre aux contraintes quelle que soit leur nature.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est laxiste !
M. Jacques Mahéas. En comptant le samedi et le dimanche ? Les mairies sont fermées, le dimanche !
M. Robert-Paul Vigouroux. Et quand on invite quelqu'un à dîner, faut-il dire quand il part ?
M. Jacques Mahéas. Bientôt, il faudra dire quand il prend sa douche ! (Rires sur les travées socialistes.)
M. le président. Par amendement n° 39, MM. Caldaguès, Calmejane, Chérioux, Debavelaere, François, de Gaulle, de La Malène, Jean-Jacques Robert et Schosteck proposent dans le texte présenté par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, de remplacer les mots : « sauf circonstances personnelles ou familiales justifiées » par les mots : « sauf cas de force majeure ».
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Il est apparu aux signataires de cet amendement et à moi-même que la notion de « circonstances personnelles ou familiales justifiées », circonstances qui excuseraient l'absence d'informations relatives au départ de l'hébergé, était bien vague. Que signifie, en effet, cette expression ? Cela ressemble beaucoup à une condition potestative ; au fond, on raconte ce que l'on veut !
Voilà pourquoi il nous paraît préférable d'y substituer la notion de « force majeure ». Là, au moins, on est sur du terrain solide. Les juristes savent ce qu'est la force majeure et la disposition devient facile à interpréter par les tribunaux. (M. Jean Chérioux applaudit.)
M. le président. Les amendements n°s 86, 87, 88, 89, et 85 sont présentés par M. Plasait.
L'amendement n° 86 tend, après le premier alinéa du texte proposé par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'hébergeant doit se porter caution des dettes contractées par l'hébergé au cours de son séjour. Cette condition trouve son terme à la date de déclaration du départ. »
L'amendement n° 87 vise, après le premier alinéa du texte proposé par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'hébergé doit justifier de ressources personnelles, mensuelles, stables. »
L'amendement n° 88 a pour objet, après le premier alinéa du texte proposé par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'hébergé est tenu de se présenter, dès son arrivée en France, à la mairie qui a délivré son certificat d'hébergement pour y déposer son titre de transport de retour. »
L'amendement n° 89 tend, après le premier alinéa du texte proposé par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'hébergeant doit être titulaire d'une carte de résident pour solliciter un certificat d'hébergement, sauf si celui-ci est titulaire d'une carte temporaire portant la mention "étudiant". »
Enfin, l'amendement n° 85 vise à compléter le texte proposé par le I de l'article 1er pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :
« Le certificat d'hébergement est envoyé par la mairie au consulat. »
La parole est à M. Plasait, pour défendre ces cinq amendements.
M. Bernard Plasait. L'amendement n° 86 vise à instituer une véritable responsabilité de l'hébergeant.
Dans le dispositif actuel, l'hébergeant ne souscrit aucun engagement le rendant responsable du séjour. Aussi, afin de rendre vraiment impossibles les certificats de complaisance, je propose d'obliger l'hébergeant à se porter caution des dettes contractées par l'hébergé au cours de son séjour.
M. Henri Weber. Les dettes de jeu ?
M. Jacques Mahéas. C'est risible !
M. Bernard Plasait. J'en viens à l'amendement n° 87.
Une fois signé le certificat d'hébergement, pour obtenir son visa, la personne hébergée doit seulement justifier de ressources au moins égales à la moitié du SMIC journalier. Un tel montant ne peut, bien entendu, garantir que la personne sera en mesure de faire face à toutes ses dépenses sur le territoire français.
Sur ce point, monsieur le ministre, il convient de rappeler que, pour le séjour touristique d'une durée semblable à celle de la visite familiale ou privée, il est exigé que les étrangers justifient non seulement de leur réservation d'hôtel mais encore de ressources égales au SMIC journalier.
Cette différence de régime me paraît incompréhensible. Cet amendement vise à y remédier par l'édiction d'une condition de ressources équivalente.
L'amendement n° 88 me paraît être un amendement de bon sens puisqu'il tend à obliger l'hébergé à se présenter dès son arrivée en France à la mairie qui a délivré son certificat d'hébergement afin d'y déposer son billet de retour. C'est une disposition qui vise à s'assurer des intentions de l'hébergé arrivant en France et à éviter qu'il ne s'évanouisse dans la nature.
L'amendement n° 89 vise à faire en sorte que seuls les étrangers munis de titres de séjour définitifs soient admis à solliciter un certificat d'hébergement, réserve faite du cas des étudiants susceptibles de recevoir leur fiancée.
L'amendement n° 85 tend à sécuriser le certificat d'hébergement afin de limiter les possibilités de falsification ; il prévoit que le certificat sera envoyé au consulat directement par la mairie et non plus par l'hébergeant.
M. Jacques Mahéas. Il faut prendre votre carte au Front national !
M. Bernard Plasait. Bien sûr, vous me répondrez, monsieur le ministre, qu'une telle mesure coûterait cher aux finances publiques, l'Etat devant apporter une compensation financière aux communes depuis la suppression de la franchise postale. On peut même estimer ce coût à environ 4 millions de francs par an dans l'hypothèse maximale.
Mais on peut aussi s'interroger légitimement, me semble-t-il, sur le coût que représente pour notre pays cette immigration clandestine. J'ai bien peur que les proportions ne soient pas les mêmes !
M. Jean-Luc Mélenchon. Démontrez-le !
M. le président. Par amendement n° 40, MM. Caldaguès, Calmejane, Chérioux, Debavelaere, François, de Gaulle, de La Malène, Jean-Jacques Robert et Schosteck proposent, au deuxième alinéa du texte présenté par le II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : « de son signataire », d'insérer les mots : « soit des informations disponibles ».
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Cet amendement tend à rétablir un membre de phrase qui figurait dans le texte initial du Gouvernement, qui a été supprimé par l'Assemblée nationale.
En effet, parmi les raisons qui peuvent inciter un maire à refuser la délivrance du certificat, le projet initial évoquait les « informations disponibles ». L'Assemblée nationale, sur l'insistance de son rapporteur, qui estimait que ce membre de phrase était « sans consistance juridique », a supprimé cette raison.
Personnellement, je ne vois pas en quoi cette notion aurait moins de consistance juridique que, par exemple, celle de la preuve par tous moyens, qui est bien vague.
Voilà pourquoi il nous paraît opportun de rétablir le texte du Gouvernement.
M. le président. Par amendement n° 163, M. Pagès, Mme Borvo, M. Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer les deux derniers alinéas du texte présenté par le II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par cet amendement, nous proposons de supprimer deux des cas dans lesquels le maire pourra refuser de viser un certificat d'hébergement.
Ces cas, qui n'existent pas dans la législation en vigueur, sont les suivants :
« - les demandes antérieures de l'hébergeant font apparaître un détournement de procédure au vu d'une enquête demandée aux services de police ou unités de gendarmerie, le cas échéant, à l'initiative du maire. »
« - le signataire du certificat d'hébergement n'a pas ratifié à la mairie le départ d'un étranger hébergé dans les deux années précédant la demande de visa. »
Ces dispositions restreignent davantage encore les possibilités de délivrance des certificats d'hébergement. C'est inadmissible !
De plus, la notion de « détournement de procédure », qui pourrait ainsi constituer un motif de refus de délivrance d'un certificat d'hébergement, n'est pas claire.
Peut-être vise-t-elle les situations dans lesquelles un étranger, entré en France sous couvert d'un visa de tourisme, se serait maintenu sur le territoire au-delà de la durée autorisée par ce visa ?
Mais ce pourrait être aussi le cas des étrangers qui, pendant la durée de validité de leur visa de tourisme, solliciteraient un titre de séjour pour rester en France.
Je pense, par exemple, aux conjoints de Français ou aux étrangers qui demandent une autorisation de séjour pour soins ou encore ceux qui déposent une demande « d'asile territorial ».
Ainsi, une personne ayant demandé un certificat d'hébergement pour un étranger qui, une fois arrivé en France, sollicite son admission avec séjour pour un de ces motifs pourrait se voir opposer par la suite ce « détournement de procédure ».
De plus, on peut légitimement se demander sur quels critères le préfet déciderait de demander une enquête de police - à moins que toute demande de certificat ne soit précédée d'une enquête !
En fait, le dispositif proposé en matière de certificat d'hébergement a été pensé pour être le plus dissuasif possible, notamment par la suspicion qu'il fait peser sur toutes les personnes susceptibles d'établir des certificats d'hébergement pour des étrangers, diminuant ainsi les possibilités d'obtention de visa.
On peut d'ores et déjà s'interroger sur son efficacité réelle quant au but officiellement visé, à savoir la lutte contre l'immigration clandestine.
Une fois de plus, la hantise de la clandestinité conduit à réduire les libertés, celles des Français et celles des étrangers en situation régulière.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons supprimer les nouvelles restrictions à la délivrance du certificat d'hébergement contenues dans l'article 1er.
M. Robert Pagès. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements présentés par MM. Allouche, Autain, Authié, Badinter, Mme Ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt, Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas, Mélenchon, Mmes Pourtaud, Printz, M. Rocard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 102 vise à supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le paragraphe II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945.
L'amendement n° 103 tend à supprimer le cinquième alinéa du texte proposé par le paragraphe II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945.
L'amendement n° 104 a pour objet de compléter in fine le cinquième alinéa du texte proposé par le II de l'article 1er pour le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 par les dispositions suivantes : « : ces dispositions ne sont applicables qu'à partir de deux ans après l'entrée en vigueur de la présente loi. »
La parole est à M. Allouche, pour défendre ces trois amendements.
M. Guy Allouche. Monsieur le président, compte tenu de son objet erroné, nous retirons l'amendement n° 102.
M. le président. L'amendement n° 102 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur Allouche.
M. Guy Allouche. L'amendement n° 103 est un amendement de coordination. L'obligation de notification du départ de l'étranger devant être supprimée, il nous apparaît logique de faire disparaître la sanction qui s'y trouvait rattachée.
Enfin, l'amendement n° 104 s'explique par son texte même.
M. le président. Par amendement n° 41, MM. Caldaguès, Calmejane, Chérioux, Debavelaere, François, de Gaulle, de La Malène, Jean-Jacques Robert et Schosteck proposent de compléter le texte présenté par le II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par un alinéa ainsi rédigé :
« Le maire rend compte sans délai de cette décision au représentant de l'Etat dans le département. »
La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Cet amendement est le pendant de celui que nous avons proposé pour la déclaration au représentant de l'Etat de l'établissement du visa. Il nous a semblé que le maire devait également prévenir le représentant de l'Etat dans les meilleurs délais de l'information qui lui a été donnée du départ de l'hébergé. Cela permet de mieux asseoir, dirai-je, le contrôle de l'autorité de l'Etat dans ce domaine.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. De quelle décision s'agit-il ?
M. le président. Par amendement n° 10, M. Masson, au nom de la commission, propose :
A. - De compléter le texte présenté par le II de l'article 1er pour remplacer le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France par un alinéa ainsi rédigé :
« L'absence de notification du départ de l'étranger hébergé n'est pas opposable au signataire du certificat d'hébergement de bonne foi ou qui justifie de circonstances personnelles ou familiales. »
B. - En conséquence, dans le premier alinéa du II, de remplacer les mots : « cinq alinéas » par les mots : « six alinéas ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Masson, rapporteur. Cet amendement tend, dans une rédaction allégée et plus simple, à réintroduire la bonne foi de l'hébergeant, qui figurait dans le texte initial du Gouvernement, mais qui a été supprimée par l'Assemblée nationale, d'où la modification du nombre d'alinéas.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements présentés par MM. Allouche, Autain, Authié, Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt, Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas, Mélenchon, Mmes Pourtaud, Printz, M. Rocard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 105 tend, après le paragraphe II de l'article 1er, à insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Après le deuxième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le maire doit motiver son refus de viser le certificat d'hébergement à défaut de quoi le visa est réputé accordé. »
L'amendement n° 106 vise, après le paragraphe II de l'article 1er, à insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Après le troisième alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En l'absence de réponse du maire dans un délai de quatre semaines à compter de la demande de visa du certificat d'hébergement, le visa est réputé accordé. »
La parole est à M. Allouche, pour défendre ces deux amendements.
M. Guy Allouche. L'amendement n° 105 a pour objet de soumettre la décision de refus de visa à une obligation de motivation, au sens des prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs.
Cette motivation devra donc indiquer les circonstances de fait et de droit à l'origine du refus. Une motivation simplement stéréotypée sera insuffisante et sera, dès lors, regardée comme inexistante.
Cette obligation est d'autant plus nécessaire que les nouveaux cas de refus proposés au maire conduisent à devoir encadrer un pouvoir très largement discrétionnaire.
Elle est, de surcroît, de nature à faciliter le contrôle du juge de l'excès de pouvoir.
Enfin, la sanction du défaut de motivation - une décision implicite d'acceptation - permettra de limiter la volonté de certains élus, qui se vantent de ne plus signer de certificat d'hébergement.
Quant à l'amendement n° 106, il permettra d'éviter que la pratique avouée de certains maires, qui, par leur silence, paralysent la procédure du visa des certificats, ne perdure.
Dans le droit-fil du projet de loi de M. Perben, actuellement en discussion, il s'agit de prévoir que le silence gardé pendant quatre semaines vaudra une décision implicite d'acceptation.
Bien connu en droit administratif, cet effet donné au silence de la personne publique saisie d'une demande aura, en outre, pour avantage de simplifier la procédure.
De la sorte, seul le refus devra faire l'objet d'une décision particulièrement motivée.
La collectivité locale, l'hébergeant, le futur hébergé, tout le monde y gagne.
Permettez-moi, à cet égard, de lire le premier alinéa de l'article 5 du projet de loi relatif à l'amélioration des relations entre l'administration et le public :
« Le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande fait naître une décision implicite d'acceptation dans les cas prévus par décrets en Conseil d'Etat. Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, ces décrets peuvent fixer une durée différente au terme de laquelle la décision implicite intervient. Ils définissent, lorsque cela est nécessaire, les mesures destinées à assurer l'information des tiers. »
M. le président. Par amendement n° 164, M. Pagès, Mme Borvo, M. Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après le paragraphe II de l'article 1er, d'insérer un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La décision de délivrance ou de refus de délivrance d'un certificat d'hébergement doit intervenir dans un délai d'un mois à compter de la demande. Cette décision doit être motivée en fait et en droit et signifiée par écrit au demandeur ainsi qu'à la personne qui s'est proposée de l'héberger. »
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Notre amendement a le même objet que le précédent, mais je veux encore préciser que, pour obtenir un papier signé de son maire autorisant un ami étranger à vous rendre visite, il faut en principe remplir un questionnaire assorti d'un justificatif de domicile, d'une pièce d'identité et d'un timbre fiscal de 100 francs !
La pratique en vigueur est en fait à géométrie variable en fonction du maire. Nombreux sont ceux qui réclament, par exemple, le livret de famille. Certains n'hésitent pas, en effet, à allonger abusivement la liste des pièces justificatives prétendument exigibles, à multiplier les embûches pour refuser le précieux papier qui permettra ensuite la délivrance du visa, alors même que les demandes en vue d'obtenir ce dernier sont déjà sévèrement filtrées par les consulats pour les étrangers des pays dits « à risques ».
La notion pour le moins vague d'hébergement dans « des conditions normales » est elle-même sujette à des interprétations plus ou moins restrictives.
Enfin, comme cela vient d'être dit, certains maires ne se cachent pas d'appliquer une politique de refus systématique des certificats d'hébergement.
Cette formalité est donc devenue véritablement attentatoire aux libertés individuelles des Français comme des étrangers. Elle est une immixtion intolérable dans la vie privée de celles et de ceux qui souhaitent recevoir amis et parents vivant hors de France.
Dans la version actuelle, aucun garantie ne permet d'empêcher une utilisation abusive du certificat d'hébergement.
C'est pourquoi nous proposons que la décision de délivrance ou de refus soit soumise à un délai strict d'un mois et qu'elle soit motivée en fait et en droit.
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 107 est présenté par MM. Allouche, Autain, Authié et Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt et Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas et Mélenchon, Mmes Pourtaud et Printz, M. Rocard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 165 est présenté par M. Pagès, Mme Borvo, M. Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent à supprimer le III de l'article 1er.
La parole est à M. Allouche, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Guy Allouche. Cet amendement tend à supprimer la possibilité pour les agents de l'OMI de procéder à des visites inopinées chez les personnes signataires du certificat d'hébergement. Le dispositif actuel, admis tant par le Conseil d'Etat que par le Conseil constitutionnel, est équilibré ; celui qui est proposé, à la suite d'une adjonction introduite par l'Assemblée nationale au texte initial du Gouvernement, remet en cause cet équilibre.
Le consentement préalable et écrit de l'hébergeant sera-t-il toujours une manifestation non équivoque de volonté quand il sera recueilli au cours d'une visite surprise ? Sachant que le refus d'y consentir a pour conséquence automatique un refus de visa, le consentement de l'intéressé sera à l'évidence contraint. Ce mécanisme va donc bien au-delà de ce que la jurisprudence admet.
Hier, au cours de la discussion générale, nous avons été quelques-uns à refuser ces visites inopinées car nous considérons que se présenter en l'absence de l'hébergeant qui travaille ou qui se trouve absent pour des raisons personnelles vaudra refus. Nous ne souhaitons pas, au motif que l'agent de l'OMI ait trouvé porte de bois signifie un refus alors que l'hébergeant a pour de multiples raisons dû quitter son domicile.
M. le président. La parole est à M. Billard, pour défendre l'amendement n° 165.
M. Claude Billard. Dans le droit-fil des arguments que vient de développer mon collègue, M. Allouche, l'amendement que nous vous proposons tend à supprimer la possibilité de visites inopinées de l'agent de l'office des migrations internationales au domicile des hébergeants qui souhaitent recevoir chez eux, dans le cadre de visites privées, des amis ou des parents étrangers.
Le régime actuel des vérifications sur place est déjà suffisamment strict sans qu'on y ajoute des procédures nouvelles qui n'apporteront aucune amélioration à l'efficacité du dispositif mais qui porteront, en revanche, atteinte à la vie privée des personnes résidant sur notre territoire.
La procédure en vigueur permet au maire de demander, préalablement au visa du certificat d'hébergement d'un étranger, à l'office des migrations internationales de vérifier, en se rendant au domicile de l'hébergeant, si ce dernier remplit bien les « conditions normales » d'hébergement.
Une telle vérification ne peut être faite sans le consentement de l'intéressé. Cependant, en cas de refus de l'hébergeant, les « conditions normales » sont réputées non remplies.
Laissez-moi vous faire remarquer, monsieur le ministre, que la liberté de l'hébergeant de refuser une vérification est pour le moins limitée, pour ne pas dire inexistante, dès lors que ce refus revient à priver ce dernier de certificat.
Si le nombre de visites domiciliaires apparaît peu élevé au regard du nombre des certificats d'hébergement demandés, comme le note d'ailleurs le rapporteur, M. Paul Masson, ce n'est en aucun cas en ouvrant à l'OMI la possibilité de visites inopinées que vous changerez cet état de fait.
La méfiance toujours plus grande qui inspire la majorité nous laisse craindre le pire ; elle conduit à une répression accrue et à des libertés rognées dans le seul but de prévenir un mal imaginaire qu'est le fameux mythe de l'invasion.
Nous ne pouvons accepter de cautionner des dérives sécuritaires qui alimentent la xénophobie et le rejet de l'autre.
Nous vous invitons donc à nous rejoindre en votant cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements présentés par M. Plasait :
L'amendement n° 90 a pour objet :
I - De rédiger ainsi le paragraphe III de l'article 1er :
« III - les deux premières phrases du 4e alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 sont remplacées par les dispositions suivantes :
« L'office des migrations internationales et les services administratifs municipaux sont habilités à procéder aux vérifications sur place demandées par le maire préalablement au visa du certificat d'hébergement d'un étranger. Ils peuvent y procéder par des visites inopinées. Les agents de l'office et des services administratifs municipaux qui sont habilités à procéder à ces vérifications ne peuvent pénétrer chez l'hébergeant qu'après s'être assurés du consentement, donc par écrit, de celui-ci.
II - De compléter, in fine, l'article 1er par un paragraphe ainsi rédigé :
« ...Le dernier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 est complété par la phrase suivante :
« Cette taxe est acquittée au profit de la commune au cas où les services administratifs municipaux ont effectué la vérification. »
L'amendement n° 91 tend à compléter, in fine, l'article 1er par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... Dans le dernier alinéa du même article 5-3, la somme : "100 francs" est remplacée par la somme : "200 francs". »
La parole est à M. Plasait pour défendre ces deux amendements.
M. Bernard Plasait. L'expérience a montré que les maires avaient peu recours aux services de l'Office des migrations internationales, l'OMI, pour contrôler les conditions relatives au logement. En 1994, au plan national, pour presque 150 000 certificats instruits, l'Office n'a été sollicité que dans 5 364 cas : le taux de recours est donc de 3,6 %. Evidemment, dans quelques rares départements, ce taux est plus important, puisqu'il est de 10 % à Paris, de 8 % dans le Var et de 7 % en Seine-Saint-Denis.
Cependant, il faut remarquer que, lorsqu'il est sollicité, l'Office répond aux demandes et réalise des inspections qui peuvent conduire à un avis défavorable.
Ainsi, en 1994, sur 4 612 enquêtes, 1 828 ont connu une issue défavorable, c'est-à-dire 40 %. Cela montre combien ces contrôles sont utiles.
Le désintérêt des maires s'explique largement par les limites des pouvoirs de l'OMI.
En effet, si le demandeur de certificat accepte, dès le stade de la demande, le principe de la visite domiciliaire, celle-ci ne peut avoir lieu qu'après notification du jour et de l'heure du passage des agents de l'office.
Je ne m'exprimerai pas davantage, puisque j'approuve la disposition qui a été votée par l'Assemblée nationale. J'ajouterai simplement que, compte tenu de la faible densité du réseau de l'OMI, il me semble nécessaire de relayer ses actions en confiant aux maires le pouvoir de contrôler les conditions d'hébergement et de ressources sans passer par cet organisme.
M. Jacques Mahéas. La nuit à trois heurs du matin !
M. Bernard Plasait. Ce dispositif serait efficace en raison même de la proximité.
Dès lors, la taxe actuellement versée à l'OMI serait dans ce cas acquitée au profit de la commune.
Par l'amendement n° 91, je propose que le montant de la taxe prévue au dernier alinéa de l'article 5-3 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, acquittée au moyen de timbres fiscaux et perçue au profit de l'OMI soit porté de 100 à 200 francs. (Exclamations sur les travées socialistes.) Le montant de cette taxe n'avait pas été revalorisé depuis 1991. Cette augmentation permettrait d'apporter quelques ressources supplémentaires. En outre, elle n'est pas exorbitante si on la compare au montant du timbre demandé pour l'obtention d'une carte nationale d'identité qui est de 150 francs pour la délivrance d'un passeport qui est de 350 francs.
Mme Monique ben Guiga. Cela n'a rien à voir !
M. le président. Par amendement n° 108, MM. Allouche, Autain, Authié et Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Charzat, Delanoë, Dreyfus-Schmidt et Estier, Mme Durrieu, MM. Mahéas et Mélenchon, Mmes Pourtaud et Printz, M. Rocard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après le paragraphe III de l'article 1er, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - L'article 5-3 de l'ordonnance de 2 novembre 1945 est complété in fine par deux alinéas ainsi rédigés :
« En cas de refus par le maire de viser le certificat d'hébergement, le signataire peut, dans les 24 heures suivant la notification de ce refus, saisir le président du tribunal administratif d'un recours en annulation de cette décision.
« Le président ou son délégué statue dans un délai de quinze jours. Le jugement du président du tribunal administratif ou de son délégué est susceptible d'appel dans un délai d'un mois devant la cour administrative d'appel. Cet appel n'est pas suspensif. »
La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Cet amendement a pour objet d'organiser une procédure contentieuse enfermée dans de brefs délais. Ce type de recours devant le président du tribunal administratif ou le conseiller délégué par lui n'est pas inédit en contentieux administratif. Il trouve même à s'appliquer déjà dans le cadre du droit des étrangers. Il se justifie particulièrement dans la mesure où se trouve en cause une liberté publique, celle de recevoir chez soi une personne de son choix. Le refus opposé à l'exercice d'une telle liberté, outre sa motivation très précise, doit donc pouvoir être contesté à bref délai par l'intéressé.
Quant au risque d'une multiplication des contentieux, il ne réside pas dans l'instauration de cette nouvelle procédure, mais dans l'accroissement inconsidéré des pouvoirs des maires et dans le fait que certains d'entre eux se vantent de refuser systématiquement tout visa.
M. le président. Mes chers collègues, avant de demander l'avis de la commission et du Gouvernement sur ces 32 amendements, je vous propose d'interrompre quelques instants nos travaux.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)