ACCORD AVEC L'ARMÉNIE SUR L'ENCOURAGEMENT ET LA PROTECTION RÉCIPROQUES DES INVESTISSEMENTS
Adoption d'un projet de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 495, 1995-1996)
autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République
française et le Gouvernement de la République d'Arménie sur l'encouragement et
la protection réciproques des investissements. [Rapport n° 18 (1996-1997).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Margie Sudre,
secrétaire d'Etat chargé de la francophonie.
Monsieur le président,
monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l'accord
d'encouragement et de protection réciproques des investissements avec l'Arménie
a été signé le 4 novembre 1995.
Le texte soumis à votre approbation contient les grands principes qui figurent
habituellement dans les accords de ce type, et que j'ai rappelés
précédemment.
Je crois utile de mentionner l'intérêt que présente cet accord dans nos
rapports avec l'Arménie. En effet, on ne saurait trop souligner qu'il a été
signé avec un pays qui est en train d'effectuer des réformes de structures
importantes. Cette réalité n'a bien évidemment pas échappé aux investisseurs
des pays occidentaux, qui y sont déjà bien implantés.
Le souci du Gouvernement est d'aider, autant que faire se peut, les
entreprises françaises à renforcer leur présence et à prendre toute leur place
dans une région du monde qui nous est de plus en plus proche.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord entre
le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
d'Arménie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements,
qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Hubert Durand-Chastel,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, l'accord de protection des investissements conclu le 5
novembre 1995 entre la France et l'Arménie s'inspire très largement de la
quarantaine de conventions comparables signées avec des Etats étrangers.
Il comporte des dispositions telles que le principe de l'octroi aux
investisseurs étrangers d'un traitement « juste et équitable », au moins aussi
favorable que celui qui est appliqué aux nationaux, un dispositif de protection
et un mécanisme d'arbitrage international pour le règlement des différends.
L'intérêt de cet accord réside davantage dans le fait qu'il concerne un pays
dont les relations avec la France sont étroites et anciennes, mais dont la
situation économique et politique est aujourd'hui encore très préoccupante.
Certes, le conflit avec l'Azerbaïdjan sur l'enclave à dominante arménienne du
Haut-Karabakh s'est apaisé puisque le cessez-le-feu est respecté depuis mai
1994, et les dirigeants arméniens et azéris semblent convaincus de la nécessité
de mettre un terme à un conflit qui ruine leurs espoirs de développement
économique.
Malheureusement, la situation politique intérieure demeure encore troublée.
Les conditions de la réélection du président Ter Petrossian, le 22 septembre
dernier, démontrent que l'évolution démocratique est encore fragile. Je
rappelle que, à la suite de contestations sur la régularité du scrutin, le
Parlement avait été envahi. L'ordre n'a été rétabli qu'à l'issue d'une
intervention de l'armée, et plusieurs parlementaires de l'opposition ont été
arrêtés.
Cette crise politique intervient dans un contexte économique très difficile. A
peine remise des conséquences dramatiques du séisme de 1988, l'économie
arménienne a subi de plein fouet le blocus économique de l'Azerbaïdjan et de la
Turquie, qui la prive notamment de ses approvisionnements énergétiques.
Elle demeure confrontée à des handicaps naturels considérables, à savoir
l'enclavement, l'absence de ressources minières et énergétiques, et
l'insuffisance d'une agriculture pénalisée par le climat et le relief.
La crise économique a été particulièrement sévère. La pénurie s'est
généralisée et le niveau de vie a fortement chuté, ce qui a entraîné une
émigration massive, notamment vers la Russie. Malgré tout, depuis le
cessez-le-feu au Haut-Karabakh, certains signes d'amélioration sont
perceptibles.
Des réformes de structure en vue de passer à l'économie de marché ont pu,
progressivement, être mises en oeuvre. Le produit intérieur brut, qui avait
chuté de 60 % depuis 1991, s'est accru de plus de 5 % en 1995. C'est la plus
forte croissance économique de tous les Etats de la CEI. L'inflation s'est
atténuée et la pénurie, toujours présente, est moins sévère. L'effort de
stabilisation économique a été reconnu par les institutions financières
internationales, qui ont accordé à l'Arménie une aide importante.
Toutefois, cette légère amélioration ne peut se poursuivre sans apport massif
d'investissements étrangers. On peut se demander si, dans la situation que
connaît l'Arménie, nombre d'investisseurs étrangers sont disposés à y
intervenir.
S'agissant de la France, je rappelle tout d'abord que les relations
culturelles et politiques avec l'Arménie sont anciennes et étroites.
L'importance de la communauté arménienne en France, soit quelque 400 000
personnes, en est l'une des raisons.
La France a reconnu l'Arménie dès son indépendance en 1991 et c'est avec notre
pays qu'elle entretient le dialogue politique le plus nourri. Près du quart des
jeunes arméniens étudie le français et un enseignement bilingue est dispensé à
Erevan.
Si les affinités culturelles sont à l'évidence très fortes, les relations
économiques sont, en revanche, encore embryonnaires. Les exportations
françaises se limitaient à 58 millions de francs en 1995 et, inversement, la
France n'a importé que pour 1,4 million de francs de produits arméniens.
Un protocole financier a été signé avec l'Arménie en décembre 1995 pour un
montant de 20 millions de francs de dons et de 24,5 millions de francs de
prêts.
En dehors de cet élément, les investissements français sont pratiquement
inexistants, mais de grandes entreprises s'intéressent à l'Arménie dans le
cadre de grands travaux de réhabilitation ou de modernisation des
infrastructures.
J'ajoute que les autorités arméniennes sont très conscientes de l'impérieux
besoin d'apport en capitaux et qu'elles ont adopté, en 1994, une loi ouvrant
largement les différents secteurs de l'économie aux investissements
étrangers.
En conclusion, tout laisse à penser que les incertitudes sur la situation
politique intérieure, les difficultés économique persistantes et le problème du
Haut-Karabakh qui reste en suspens créent un climat assez défavorable à cet
afflux de capitaux que le gouvernement arménien appelle de ses voeux.
Néanmoins, certaines de nos entreprises sont d'ores et déjà impliquées en
Arménie ou envisagent d'y intervenir.
C'est pourquoi l'accord d'investissement qui nous est soumis conserve son
utilité et, en conséquence, la commission des affaires étrangères vous demande
de bien vouloir l'adopter.
M. le président.
Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. -
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République
d'Arménie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements,
signé à Erevan le 4 novembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente
loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
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