Dr TUMM Membre du directoire de Deutsche Post AG

Merci de m'avoir invité à ce colloque auquel j'espère pouvoir contribuer en vous apportant l'expérience de la poste allemande en matière de libéralisation. J'ai donné à mon intervention le titre de "Plaidoyer pour une libéralisation à l'unisson". C'est le slogan de la Deutsche Post.

De notre point de vue, les entreprises postales européennes doivent avoir, des chances de développement loyales sur le nouveau marché. En effet les entreprises ne pourront faire face à la concurrence que si elles satisfont les besoins de leur clientèle. Ce doit être la priorité absolue de toute stratégie postale. D'autre part, en tant que partenaires logistiques, les entreprises doivent être capables d'agir au niveau mondial et de traiter tous les produits de leurs clients. Outre le courrier traditionnel, il faut que les postes se positionnent sur l'ensemble des marchés.

Il ne faut pas qu'existent des entraves au développement des différents opérateurs, notamment dans le domaine des acquisitions. En fait, la libéralisation doit se faire de façon équilibrée, tant au niveau national qu'au niveau européen. Pour cela, il faut assurer une régulation objective et indépendante. L'objectif est en fait d'accéder à un marché européen réellement compétitif.

La satisfaction des clients

Nos clients agissent de plus en plus à l'international : 80 % du chiffre d'affaire est réalisé avec des entreprises qui se positionnent au niveau mondial. Les clients veulent donc avoir accès à la fois à des services postaux, logistiques et à des solutions flexibles et sur mesure. C'est pour cette raison que nous nous sommes positionnés sur le commerce électronique depuis quinze jours.

La libéralisation à l'unisson

Selon nous, la situation actuelle du marché postal européen entraîne d'importantes distorsions de concurrence. Il faut donc que la directive européenne soit adaptée le plus rapidement possible. La directive dit notamment que le courrier de moins de 350 grammes restera le monopole des opérateurs historiques. Notre propre loi postale de janvier 1998 n'assure un monopole que jusqu'à 200 grammes et même 50 grammes pour le courrier direct. Dès la fin 2002, ces limites disparaîtront. En fait, notre régulateur se montre même assez tolérant et accepte de nombreuses exceptions aux règles en vigueur.

Notre chance vient du fait que la poste allemande réalise plus de 50 % de son chiffre d'affaire à l'international. Mais nous nous heurtons au retard qu'ont pris de nombreux Gouvernements pour transposer la directive européenne. Il n'y a donc pas régulation symétrique.

La privatisation

La privatisation nous paraît être un outil privilégié de la libéralisation du marché postal du XXI ème siècle. Les entreprises ne pourront se maintenir au niveau mondial qu'en satisfaisant les impératifs internationaux de leur clientèle et il leur faut pour cela beaucoup investir. Il existe donc un fort besoin capitalistique qui peut être comblé de façon privilégiée par une privatisation qui apportera à l'entreprise les fonds dont elle a besoin.

Pourtant, afin d'assurer une introduction en bourse fructueuse, il faut auparavant assurer la rentabilité de l'entreprise. Pour cela, il faut être certain qu'aucune influence politique ne s'exerce sur elle. De plus, il faut créer des conditions cadres harmonisées sur le marché postal et assurer la liberté d'entreprise de l'opérateur. Nous pensons en effet qu'il doit être capable de traiter aussi bien des lettres que des colis, de l'express ou de la logistique. Ces différents marchés sont liés et ne sauraient être dissociés artificiellement.

C'est la raison pour laquelle nous nous sommes positionnés sur le secteur de la logistique en rachetant Danzas, Netloyd et ASG. Il faut également développer le secteur de l'express qui est de plus en plus demandé par les entreprises.

La stratégie de Deutsche Post

Nous avons aujourd'hui trois impératifs : internationaliser, élargir la base de produits et développer la logistique à haute valeur ajoutée (commissionnement, stockage, prise de commande...). Or la poste allemande est très bien préparée à affronter la concurrence puisqu'elle a déjà connu de nombreux succès : le résultat de 1998 a représenté 1,8 milliards de DM, soit 68 % de progression par rapport au résultat de 1997. Nous nous sommes internationalisés par le biais d'acquisitions, de coopérations et de prises de participation au niveau national et international. Nous avons investi dans DHL et Danzas. Nous avons développé le réseau de paquets, de colis et de logistique.

Nous pouvons aujourd'hui proposer à nos clients des services électroniques logistiques et du commerce électronique. Nous avons également augmenté notre taux d'automatisation en établissant 83 centres de tri postal. Cela nous a permis à la fois de diminuer nos coûts et d'améliorer notre qualité. Nous comptons donc entrer en bourse à l'automne 2000. En fait, nous avons achevé la première phase d'assainissement et d'amélioration de la qualité, passant de pertes de 700 millions de DM à un profit de 1,3 milliard de DM. La deuxième phase comprendra une expansion et une meilleure intégration de nos services.

Notre entrée en bourse sera facilitée par l'évolution de notre chiffre d'affaires : 18,6 milliards de DM en 1990, 28,7 milliards de DM en 1998 et 50 milliards de DM en 2000.

Henri LOIZEAU

Je souhaitais poser une question commune aux trois présidents. Face à la montée en puissance du commerce électronique, les postes allemandes et néerlandaises se sont positionnées sur ce marché. La poste néerlandaise a notamment créé un service Quick Shipper qui permet de suivre en direct l'acheminement de ses colis sur Internet et souhaite faire passer les commandes Web de 3 % à 50 % en cinq ans. Les ventes conclues sur Internet sont encore peu importantes mais j'aimerais connaître la vision qu'ont les trois présidents des perspectives d'avenir de ce secteur.

Ad SCHEEPBOUWER

Le commerce électronique sera sans doute appelé à se développer beaucoup à l'avenir mais personne ne sait exactement quel est l'avenir exact de ce marché. J'ai lu une étude sur le volume de vente en 2003 qui l'estimait à 60 milliards de dollars. Hier, j'entendais parler de 120 milliards de dollars. De toutes façons, le secteur connaîtra une croissance très forte qui concernera principalement les rapports entreprises/entreprises. En effet, les transactions entreprises/particuliers ne représenteront que de faibles valeurs. Il nous faut cependant veiller à toutes les opportunités et acquérir les compétences qui seront nécessaires pour traiter ce type de commandes. Nous sommes déjà très accessibles pour les entreprises mais il nous faut consolider notre logistique pour les clients privés.

Dr TUMM

Il existe deux types d'activités de commerce électronique. Tout d'abord, nous avons créé une home page consacrée à certains produits que les consommateurs peuvent commander. D'ici deux ou trois semaines, nous voulons rendre accessibles tous nos produits par ce biais. D'autre part, nous avons créé un service de commerce électronique qui assure l'ensemble du processus, de la commande à la livraison. Le marché est très difficile à évaluer mais nous devons être présents afin de pouvoir offrir ce service aux clients qui le privilégieront. En Allemagne, certains consommateurs ne traitent plus leurs services bancaires que sur Internet, par exemple. La difficulté vient en fait des coûts très importants que nécessite un positionnement sur Internet.

Claude BOURMAUD

La Poste est convaincue du caractère irréversible des nouvelles technologies comme Internet et du développement du commerce électronique. Nous ne connaissons pas le rythme futur de cette évolution et nous avons donc déterminé une politique très simple. En premier lieu, il faut imprégner notre groupe de ces nouvelles technologies à la fois au service de la logistique et du commerce électronique. TAT Express et Chronopost offrent aujourd'hui à leurs clients la possibilité de suivre leurs envois en direct sur Internet. Ce sera bientôt le cas de Dilipack. Pour développer notre offre de commerce électronique, nous avons acheté Publitrans qui réalise aujourd'hui 400 millions de chiffre d'affaire et est spécialisé dans le domaine de la logistique fine.

Nous souhaitons également utiliser les nouvelles technologies pour assurer nos propres transactions. C'est déjà le cas de la philatélie qui représente un chiffre d'affaire de 600 millions de francs. Les philatélistes peuvent aujourd'hui commander et payer leurs timbres par Internet. Ils sont livrés dans un délai de quatre jours. Cela préfigure assez bien la relation nouvelle que nous comptons établir avec notre clientèle.

Nous comptons également transposer sur Internet un certain nombre d'offres de services comme les prêts à poster. Il serait également possible d'éditer un timbre en vente sur le Net. Nous avons d'ailleurs passé un accord avec la SAGEM pour une offre de certification qui nous permettra d'accompagner notre commerce électronique. Enfin, nous travaillons à la transposition de notre système de banque à domicile sur Internet. Le problème est de choisir le bon rythme pour ne pas affecter trop de ressources de façon aléatoire.

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