Conclusion des débats par Gérard LARCHER
Gérard LARCHER
Je tiens à remercier tous les intervenants qui ont participé à ce colloque ainsi qu'Henri Loizeau, journaliste à La Tribune et l'ensemble des participants à cette journée.
Pour conclure ces débats, je repartirai de ce qu'ont dit les différents intervenants :
• Jean-Paul Villot nous a parlé du courrier de
l'avenir.
• Alan Johnson nous a rappelé que le public
aimait sa poste d'état au point de militer pour son maintien dans le
service public.
• Monsieur Segura nous a rappelé que le
réseau français des bureaux de poste constituait à la fois
une chance et un problème.
• Gérard Delfau et Pierre Hérisson ont
pris la défense du service public qui est une véritable
nécessité.
• Messieurs Lemercier et Lhoman nous ont
démontré que le personnel des postes pouvait avoir une approche
très contrastée de ce qui se passe aujourd'hui dans le secteur
postal.
• Madame Sauto Arce nous a rappelé que les
consommateurs avaient une attente très forte en matière de
qualité du service postal. Le président de l'association des
consommateurs allemands me tenait d'ailleurs le même discours
récemment.
• Madame Hagelsteen et Monsieur Malhotra ont
également insisté sur l'égalité de traitement dont
devait être assurées les entreprises publiques et privées
du secteur postal.
• Monsieur Scheepbouwer nous a démontré
que nous assistions à une véritable réorganisation du
secteur et qu'un nouveau paysage postal était en train d'émerger
autour de quatre grandes postes européennes. Il faudrait ajouter
à ces quatre opérateurs historiques DHL, Fedex et quelques
autres. De nouvelles alliances sont d'ailleurs en cours et viendront modifier
encore ce paysage.
Je conclurai en disant tout d'abord qu'il semble exister un certain consensus sur le diagnostic que nous portons tous sur la situation postale actuelle. Tous les intervenants ont reconnu que le secteur postal européen était en ébullition. Le ministre a même reconnu qu'il partageait certaines positions qui figuraient au rapport que nous avons présenté devant la commission des affaires économiques et du plan à la fin de l'année 1997. Gérard Delfau l'a confirmé.
Par contre, il nous a été difficile de définir une stratégie d'avenir claire pour La Poste. Beaucoup ont préconisé une poursuite prudente des politiques actuelles. Je pense cependant que la prudence la plus élémentaire serait de ne pas avancer plus lentement que les autres acteurs du marché. Il nous faut être présents sur le marché.
Personne n'a d'ailleurs dénoncé l'alliance avec un grand opérateur international que je préconisais comme une erreur. Cet opérateur pourrait être une grande poste historique internationale ou un spécialiste du colis qui bénéficierait de ressources financières importantes mais serait intéressé par le savoir faire et le réseau de La Poste.
Je pense qu'il ne sera pas possible d'appliquer en France une méthode semblable à celle qu'ont employée les opérateurs allemands et néerlandais. Notre histoire, notre culture et nos impératifs sont différents des leurs et les méconnaître serait une erreur dangereuse. Je suis pragmatique et je me refuse à toute théorie ultra-libérale ou ultra-étatique. La France a souvent marié la réalité du marché et les grands équilibres de l'État en matière de cohésion et de la solidarité sociale. Au sortir de la guerre, notre pays avait déjà choisi cette voie médiane en acceptant le plan Marshall et en constituant un réseau d'entreprises publiques. Cette spécificité est trop souvent oubliée par les grands cabinets de conseil anglo-saxons.
Il nous faut prendre en compte cette tradition mais refuser la peur qui nous pousse à un certain conservatisme frileux qui nous distingue d'autres grands pays européens. Comme British Mail, nous pouvons conserver une grande entreprise publique tout en la guidant vers une meilleure rentabilité : il ne sert à rien de nous lancer dans des réformes aussi radicales qu'inutiles mais il serait tout aussi préjudiciable de nous en tenir à des structures dépassées.
En toute chose, c'est l'intérêt du citoyen qui doit primer et il ne faut pas comprendre service public, statut public de l'entreprise et statut public du personnel. Malgré nos divergences, nous sommes tous conscients que le service public ou universel est un élément très important de notre secteur postal. Mais il n'est pas figé et je pense même qu'il peut être étendu, comme c'est le cas dans le secteur des télécommunications, par exemple. Si tel n'était pas le cas, nous aurions rapidement pris un retard technologique important en matière de téléphonie par exemple.
Nous avons chacun la responsabilité de donner à notre pays une poste capable de s'adapter. Il ne faut pas avoir peur de la concurrence si les règles du jeu concurrentiel sont équitables. Il ne faut pas s'appuyer sur des monopoles pour constituer des positions discriminatoires mais il ne faut pas non plus mésestimer la force du secteur monopolistique.
L'économie va vers une mondialisation de plus en plus grande. Face à cela, il est possible de baisser les bras en considérant ce phénomène comme une fatalité ou bien d'humaniser cette mondialisation au prix de choix politiques forts qui vont dans le sens de la mise en place d'autorité de régulations et de commissions de service public. II faut entamer une réforme en cassant les images passéistes pour accepter le fait qu'une entreprise comme La Poste a un rôle à jouer au service de l'économie du pays. C'est un facteur de dynamisation très important de notre territoire.