b) M. André THEVENOT, secrétaire adjoint de la FNSEA
J'irai
dans le sens des propos qui viennent d'être tenus par le Président
de l'Ile-de-France. Je voudrais dire que jamais l'agriculture ne s'est
opposée à l'implantation d'infrastructures, ou de changements de
destination des sols dans la mesure ou cela a été
négocié. Je le dis pour bien faire prendre conscience que les
agriculteurs sont des gens très légalistes et très
respectueux des lois de la République. L'agriculture est une
activité à capitaux lourds et avec un retour sur investissements
long, et là aussi nous avons besoin au niveau de notre activité
d'un certain nombre de certitudes dont la durée.
Je souhaiterais rappeler que l'activité agricole, qu'elle soit dans le
rural profond, mais aussi dans le périurbain, a besoin de foncier, et
qu'il ne peut pas y avoir d'activité sans support du foncier. Nous avons
cru un certain temps que l'agriculture pourrait être hors sol. Nous nous
apercevons de plus en plus que la terre est indispensable. Je rappelle aussi
que depuis 1982, l'agriculture a perdu 465 000 hectares, dont 45 000 à
peu près par an, ce qui fait depuis 15 ans la perte d'un
département agricole.
La terre agricole est un bien très rare, surtout, bien que l'on croit
que la France est un grand pays, plus que dans les pays du nord, mais moins que
dans les pays neufs comme l'Australie ou les Etats-Unis. Il faut faire
très attention que la terre agricole ne soit pas gaspillée. Pour
cela l'agriculture a besoin d'un certain nombre d'outils qui apportent cette
stabilité au niveau des espaces afin que les agriculteurs puissent
exercer leur activité avec un minimum de sécurité, sans
entrer dans la précarité. Nous devons donc renforcer les outils
existants que sont les documents d'urbanisme, les schémas directeurs,
les POS.
Concernant le schéma directeur, pourrions-nous associer la profession
agricole chaque fois qu'il y a élaboration de ces schémas ? Cela
va de soi, mais il faut éviter la représentation graphique qui
rend souvent la délimitation de ces zones, tout à fait
imprécise. C'est 300/400 mètres de différence ou
même plus et cela apporte une instabilité au niveau de ces zones.
Concernant le plan d'occupation des sol, il faut arriver à stabiliser
les zones «NC». C'est tout à fait anormal que lorsqu'un
document a été adopté, il soit révisé deux
ou trois ans après, et qu'il déstabilise un certain nombre de
zones. Nous pouvons comprendre qu'il y a des phénomènes
d'urgence. Si une usine vient s'implanter dans une commune rurale et où
l'on crée un certain nombre d'emplois, tout le monde sera d'accord. Mais
nous nous apercevons qu'il y a trop d'excès ce qui crée une
instabilité au niveau de notre activité agricole.
Il y a un surdimensionnement des zones «NA» qui sont à terme
constructibles. Il en a été mis un peu trop et tout le monde sait
que nous aurons des difficultés à terme à les remplir. A
ce niveau, le législateur devrait préciser un certain nombre de
règles, et être un peu dirigiste.
Il y aura peut-être demain, par la loi d'orientation, la
possibilité d'arriver à des zones agricoles
protégées. Nous sommes totalement d'accord puisqu'elles doivent
pérenniser un certain nombre de zones «NC». S'il doit y avoir
des zones protégées, je souhaite que cela se fasse avec les
principaux acteurs de ces espaces.
Un autre sujet qui est un véritable fléau pour l'agriculture et
encore plus pour le secteur périurbain, c'est ce que l'on appelle le
phénomène de la réciprocité des distances. Pour un
certain nombre d'exploitations agricoles qui se sont mises aux distances
réglementaires qui était imposées, des modifications
ultérieures d'urbanisme ont rapproché ces zones créant une
précarité pour ces exploitations. Là aussi, il a fallu
légiférer mais j'attends de voir les décrets d'application
parce que je crois que cela a été vu simplement pour les
activités classées et pas simplement pour les autres
activités agricoles.
Un autre point souvent évoqué par le sénateur Larcher est
le problème des ventes de terres et des indemnités
d'expropriation qui semblent trop élevées. Il y a deux positions
au niveau de la profession : il y a ceux qui disent "faisons attention à
ce que ces indemnités soient tout à fait correctes de
façon à ce qu'il n'y ait pas ensuite une inflation des prix du
foncier dans les zones qui sont à côté de ces zones
périurbaines" et ceux qui disent, qu'au contraire, ces indemnités
correspondent à un réel préjudice pour l'exploitation.
Nous sommes dans un cadre relationnel. Il y a des commissions de
négociation entre la profession agricole et les services fiscaux et je
crois qu'il faut essayer de toujours travailler dans ce cadre. La profession
agricole est très attachée à la cogestion d'un certain
nombre de politiques et de son application et nous sommes tous d'accord pour
aller dans le sens du bien public.
J'ai pris part à la négociation d'un grand ouvrage qui ne s'est
pas fait, le canal Rhin/Rhône et nous avions réussi à
négocier ce que l'on appelait un fonds de reconstitution du potentiel
agricole perdu. C'est quelque chose qui doit être considéré
parce que lorsque vous enlevez quelques hectares ou de l'activité
agricole, c'est tout le potentiel de l'économie agricole qui s'en
ressent. Il est nécessaire de pouvoir conserver une économie,
c'est-à-dire des outils de transformation et là, il y a
peut-être quelque chose à faire. Le prix du foncier ou les
indemnités, cela ne représente pas beaucoup par rapport aux
infrastructures, c'est un pourcentage minimum. Le potentiel agricole perdu doit
donc être pris en compte. Cela peut, à terme, faire partie des
outils. S'il y a une obligation de créer ce fonds et qu'une
indemnité soit demandée, cela obligera peut-être les
aménageurs à être plus précis et pas aussi gourmands
sur l'espace car trop souvent l'agriculture est considérée avant
tout comme une simple réserve foncière et jamais dans ces
secteurs-là comme un secteur d'activité économique. Il y a
là aussi des révolutions culturelles à faire.
Le sénateur Larcher a fait un excellent rapport qui sert de
réflexion à notre organisation syndicale. Il a approché
d'une manière très précise tout ce qui concerne le
périurbain et cette zone qui n'est pas souvent considérée,
même par nos organisations agricole. Il était bien que Monsieur
Larcher organise ce colloque auquel j'ai été heureux de
participer.
M. Guy FISCHER :
Merci M. Thévenot. Nous voyons bien qu'avec le
partenariat, des outils de stabilité, un certain dirigisme
(c'était l'aspect contradictoire dans votre intervention),
éléments esquissés à travers la loi d'orientation
agricole, vous avez planté un décor basé sur votre
expérience, et nous continuons avec Monsieur Malabirade qui est
vice-président du Centre national des jeunes agriculteurs.