C. LA MODULATION DES COTISATIONS CHÔMAGE

Il est régulièrement proposé de moduler les taux de cotisations chômage employeurs en fonction du passé récent de l'entreprise en matière d'embauches et de licenciement : les entreprises qui ont licencié auraient un malus, tandis que les entreprises qui ont récemment embauché auraient un bonus 38( * ) .

A priori, la modulation des cotisations chômage est un système relativement lisible qui pourrait avoir un effet favorable sur l'emploi en réduisant le coût marginal des créations d'emplois d'une part, en freinant les licenciements de l'autre. La théorie économique suggère toutefois que l'augmentation des coûts de licenciements peut constituer un frein à l' embauche , notamment lorsque la reprise de l'activité est peu assurée, ce qui pourrait être le cas de l'économie française aujourd'hui : les employeurs seraient plus réticents à embaucher s'ils sont au bonus maximal et s'il existe un risque significatif qu'ils doivent licencier plus tard.

La modulation des coûts de licenciements risquerait ainsi ou bien de réduire la flexibilité nécessaire aux entreprises, ou bien d'être contournée (les entreprises en expansion embauchant prioritairement des intérimaires) amplifiant la tendance actuelle à la concentration de la flexibilité sur une minorité de salariés " non permanents " et augmentant la précarité de l'emploi pour les jeunes.

La modulation des cotisations chômage aurait également pour conséquence de pénaliser les entreprises lors des phases de ralentissement de l'activité, au risque de conduire les plus fragiles d'entre elles à la faillite et, surtout, de pénaliser structurellement les secteurs en déclin (par exemple le textile), c'est-à-dire de pénaliser des entreprises qui peuvent n'être en rien " responsables " de leurs difficultés.

Au total, la modulation des cotisations chômage apparaît ainsi comme un dispositif darwinien , favorisant la disparition des entreprises les plus fragiles et des secteurs en déclin, et accélérant le développement de nouvelles entreprises et de nouvelles activités, sans que le bilan coût-avantage pour l'emploi de ce darwinisme économique soit très net : il dépend sans doute de la dynamique d'innovation d'une économie, de la durée moyenne du chômage (si les salariés licenciés des secteurs en déclin tardent à retrouver un emploi, il en résulte un effet récessif) et de l'aptitude des salariés à changer plusieurs fois de métier au cours de leur vie.

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