B. DIALOGUER DANS UN CADRE CLAIREMENT DÉFINI
1. Le choix du multilatéralisme
Le
prochain cycle de négociations sur le commerce mondial devrait
débuter à la fin de 1999 comme l'ont indiqué les
représentants des pays membres de l'OMC réunis à
Genève le mois dernier.
Un conseil général extraordinaire agricole au sein de l'OMC
devrait d'ailleurs se tenir au mois de septembre prochain pour préparer
ces négociations.
L'Europe doit affirmer son souhait de traiter des problèmes agricoles
au sien de cette enceinte internationale, privilégiant ainsi une
démarche multilatérale
.
En effet, la position de l'Europe vis-à-vis du multilatéralisme a
été souvent ambiguë. Incapable d'adopter des mesures
sérieuses vis-à-vis des Etats-Unis, ne serait-ce qu'à
titre de rétorsion, la Communauté Européenne a assez
largement pratique le bilatéralisme et le commerce administré
vis-à-vis du reste du monde (Asie, Europe de l'Est), par un usage
intensif des droits antidumping (à peine moins nombreux que ceux
pratiqués par les Etats-Unis) ou des accords d'autolimitation.
Les partenaires devront décider préalablement s'ils
négocient secteur par secteur ou dans un cadre plus global. Si les
Etats-Unis avancent l'argument de la rapidité et de l'efficacité
pour préconiser la négociation secteur par secteur, les
Européens privilégient des négociations globales plus
souples qui permettent de parvenir à de réels
compromis.
2. Les conséquences de ce choix
Le
choix de l'OMC comme enceinte privilégiée des négociations
sur le commerce international a deux conséquences notables
:
En premier lieu, il exige de
l'Europe la définition d'une
stratégie cohérente
. Si les Etats-Unis ont su valoriser,
à leur profit, les mécanismes de l'OMC, l'Europe, au contraire a,
du moins initialement, mal compris les implications du multilatéralisme
et n'a pas su transformer en avantage le handicap relatif a son processus de
prise de décision -les Etats-Unis utilisent judicieusement les relations
conflictuelles entre l'exécutif et le législatif-. Ainsi,
l'Europe doit-elle aujourd'hui refuser d'entamer toute négociation
internationale au sein de l'OMC en l'absence d'une garantie que le Gouvernement
américain obtiendra le " Fast Track ". Sans que la certitude
sur ce point, la négociation ne peut s'engager.
En second lieu, il implique, non pas l'exclusion de toute discussion
bilatérale entre Etats, ce qui est ni souhaitable ni envisageable,
mais que celles-ci respectent les échéances et les
règles fixées à l'OMC.
A ce propos, la France a
été prise au dépourvu par la récente initiative du
commissaire Sir Leon Brittan, Commissaire en charge de la politique
commerciale. Le projet de nouveau marché transatlantique (NTM) proposait
une zone de libre-échange à l'horizon 2010 entre l'Union
Européenne et les Etats-Unis. A la grande satisfaction de plusieurs
Etats membres, cette initiative a été écartée du
sommet du 18 mai sur le Nouvel Agenda transatlantique approuvé en
1995. Mais elle témoigne à l'évidence d'un certain manque
de méthode et de cohérence dans la démarche des
autorités communautaire
Par ailleurs, le choix du multilatéralisme nécessite de la
part de la Communauté un refus de " jouer sur les deux
tableaux
".
S'opposer à l'unilatéralisme
américain au nom des grands principes du multilatéralisme et s'y
rallier dans ses relations avec le Japon, Taiwan ou la Pologne serait manquer,
là encore, à la cohérence.
Enfin, la multiplication des accords préférentiels conclus par
l'Union Européenne doit, d'une part, ne pas mettre en danger les
productions communautaires et, d'autre part, ne pas s'effectuer en
contradiction avec les règles de l'OMC
.
Pour la mission d'information, le fait de trancher sans
ambiguïté en faveur du multilatéralisme implique
l'affirmation d'une réelle présence Européenne au sein de
l'OMC. Celui-ci mettrait ainsi en conformité l'influence réelle
de la Communauté avec sa position de première puissance
exportatrice. En défendant l'affirmation de l'OMC et du
multilatéralisme, la Communauté Européenne rallierait, en
outre, à la cause la plupart des pays tiers.