N°771 |
N° 345 |
ASSEMBLÉE NATIONALE |
SÉNAT |
CONSTITUTION DU- 4 OCTOBRE 1958 |
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998 |
ONZIÈME LÉGISLATURE |
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Enregistré à la Présidence de
l'Assemblée nationale
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Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 5 mars 1998 Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 mars 1984 |
OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION
DES POLITIQUES PUBLIQUES
RAPPORT
sur
LES ACTIONS MENÉES EN FAVEUR DE LA POLITIQUE
MARITIME
ET LITTORALE DE LA FRANCE,
par
M. Philippe MARINI,
Sénateur
ANNEXE 6
La marine marchande
Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale |
Déposé sur le Bureau du Sénat |
par M. Augustin BONREPAUX. |
par M. Christian PONCELET. |
Vice-président de l'Office |
Président de l'Office. |
Mer et littoral
AVANT-PROPOS
Cette évaluation a été effectuée par le Commissariat général du Plan, sous l'autorité de Monsieur Henri GUAINO, Commissaire au Plan, sur la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des politiques publiques, avec l'accord du Ministre de l'Économie et des Finances. Le groupe de travail a été présidé par Monsieur Jean Louis LEVET, Chef du Service du Développement Technologique et Industriel au Commissariat général du Plan.
Cette évaluation, réalisée dans des délais extrêmement brefs compte tenu de l'étendue du champ couvert, est faite pour être discutée et pour alimenter le débat public. Il ne s'agit pas d'une conclusion définitive mais bien au contraire du point de départ d'une réflexion stratégique autour de la question maritime.
Ont contribué à ce rapport :
Rapporteur :
Monsieur LEVIEUX (Sylvain)
Chargé de mission
Commissariat général du Plan
avec la collaboration de :
Monsieur BAUMGART (Thierry)
Chargé de mission au Service du Développement Technologique et Industriel
Commissariat général du Plan
Monsieur CARIOU (Pierre)
Institut du Shipping et chercheur au laboratoire LEN-CORRAIL
Madame DIORE (Valérie)
Chargée de mission
Commissariat général du Plan
Monsieur GUELLEC (Jean)
Chargé de Mission au Service du Développement Technologique et Industriel
Commissariat général du Plan
Monsieur LECLERC (Georges-François)
Administrateur civil du Ministère de l'Économie et des Finances
Chargé de mission au Commissariat général du Plan
Monsieur LAPEYRE
Chargé de Mission au Service Énergie, Environnement, Agriculture, Tertiaire
Commissariat général du Plan
Monsieur THERY
Chargé de mission au Service des affaires sociales
Commissariat général du Plan
Auditions administratives
Monsieur CHAVAROT
Directeur du Transport Maritime, des Ports et du Littoral
Ministère de l'Équipement, du Logement, des Transports et du Tourisme
Monsieur MEYNET
Directeur-adjoint du Transport Maritime, des Ports et du Littoral
Ministère de l'Équipement, du Logement, des Transports et du Tourisme
Monsieur GARACHE
Sous-Directeur
Sous-Direction de la Flotte de commerce
Ministère de l'Équipement, du Logement, des Transports et du Tourisme
Monsieur TOURRET
Commissaire aux Transports Maritimes
Ministère de l'Équipement, du Logement, des Transports et du Tourisme : Mer
Monsieur PARENT
Chef du service Contentieux
Direction Général des Impôts
Ministère de l'Économie et des Finances.
Monsieur GAUTIER
Chef de bureau
Direction Général des Impôts
Ministère de l'Économie et des Finances.
Audition de professionnels et experts
Monsieur BOLLORE
Président Directeur Général
Groupe BOLLORE
Monsieur CHEVIRON
Président du directoire
Compagnie Viking
Monsieur DIORE
Directeur de l'École Nationale de la Marine de Nantes
Monsieur DANEM
Inspecteur Général de l'Enseignement maritime
Maître GINTER
Cabinet Gide Loyrette Nouel, avocats
Monsieur LEONARD
Membre de l'Académie de Marine
Président d'honneur du Conseil Supérieur de la Marine Marchande
Madame NOURY
Head of shipping department
Société générale
Monsieur POIRIER d'ANGE d'ORSAY
Président du Comité Central des Armateurs de France
Monsieur REBOULEAU
Barry Rogliano Salles
Courtiers maritimes
Monsieur ROUDIER
Directeur du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées
Monsieur SIMONNET
Administrateur général des affaires maritimes
Membre titulaire de l'Académie de Marine
Monsieur VALLAT
Armateur
Monsieur WILLS
Directeur général CMA-CGM
Introduction
Du fait de la faiblesse de son coût, la marine marchande dispose, au niveau mondial, de perspectives de croissance importantes, dans la foulée de la progression des échanges internationaux. Pourtant, la flotte de commerce française - flotte sous pavillon français et flotte contrôlée par l'armement français, quel que soit le pavillon - ne profite pas de cette croissance.
Le présent rapport enregistre, en effet, son déclin en niveau depuis une vingtaine d'années. D'autre part, la très faible présence de l'armement français dans les grandes alliances stratégiques devrait aggraver cette tendance et pourrait placer le commerce extérieur français dans une situation délicate dans les années qui viennent.
Être présent dans les alliances, c'est pouvoir négocier des prix de transports. D'où l'importance pour nos exportateurs et importateurs. C'est, aussi, pouvoir négocier des escales. D'où l'importance pour les ports français.
Pour être le maillon de la filière du transport maritime qui, directement, apporte le moins, la marine marchande n'en est pas moins, indirectement, le plus stratégique.
Pour disposer d'armateurs puissants et présents dans les grands flux du commerce mondial, un nombre minimal de navires sous pavillon français est indispensable. La politique de la flotte de commerce doit donc comporter deux volets complémentaires : une politique de soutien aux armements nationaux et une politique de soutien au pavillon. Mais il faut bien distinguer les arguments en faveur du pavillon français des arguments qui peuvent être déclinés en faveur d'un soutien aux armateurs. Les débats publics confondent, en effet, trop souvent les uns avec les autres.
Soutenir le pavillon français, c'est aussi soutenir un pavillon qui est reconnu au niveau mondial par la sécurité qui lui est associée, à la fois parce que les officiers et marins français sont bien formés et parce que les normes de contrôle sont bien définies et respectées Cette sécurité pourrait, dans les décennies qui viennent, se révéler un avantage commercial important.
Deux caractéristiques majeures du secteur doivent être présentes à l'esprit, dès lors qu'il s'agit d'évaluer la politique de la flotte de commerce :
- la rentabilité d'exploitation des entreprises d'armement est faible. D'où l'obligation, pour les armateurs, de compléter leur exploitation commerciale par une gestion de leurs actifs, conduisant, en jouant sur le cycle d'activité du secteur, à acheter ou vendre des navires au meilleur moment ;
- le secteur de la marine marchande est pauvre en emplois peu qualifiés. Dans ces conditions, une politique de la marine marchande doit :
- éviter, dans les négociations internationales, une déréglementation excessive des normes, afin de soutenir de manière implicite le pavillon français et de participer au mouvement spontané d'assainissement du marché ;
- compenser le surcoût du pavillon français, afin d'éviter les phénomène trop fréquents de « dépavillonnement » ;
- assurer la solidarité entre exportateurs et importateurs français et armateurs ;
- assurer le développement conjoint des armateurs et du pavillon français.
Ces objectifs ne sont pas, dans les conditions actuelles, accomplis.
1/ La libéralisation du cabotage européen s'est effectuée sans une harmonisation préalable des conditions d'exploitation, notamment et surtout en matière de sécurité. Il en résulte des distorsions de concurrence.
2/ La liaison entre chargeurs et armateurs ne fait pas l'objet de politique publique. Sous une forme atténuée - organisation d'une concertation - elle devrait être au coeur des préoccupations de la puissance publique.
3/ Le surcoût du pavillon français n'est pas suffisamment compensé par les instruments qui, implicitement ou explicitement, sont destinés à limiter les phénomènes de dépavillonnement. Une amélioration supplémentaire du dispositif d'allégement de charges pour les registres métropolitain et Kerguelen pourrait, dans ces conditions, être envisagée.
4/ La loi sur les quirats doit faire l'objet d'une évaluation nuancée.
- son application conduit à un avantage moyen de 25 % du coût d'achat pour les armateurs ;
- son impact sur l'emploi - 306 emplois pour la flotte et 1500 emplois maintenus dans la construction navale française sur un an - est faible, mais plus élevé que ce qui était attendu. Alors que le taux de correspondance entre les spécialisations de la construction navale française - très spécialisée -et la marine marchande - au contraire, diverse et peu polarisée - est de 25 %, l'agrément quirataire l'a porté à 35%. 35 % du montant des dossiers quirataires agréés correspondent à des constructions neuves effectuées par les chantiers français ;
- la dépense fiscale associée aux quirats sera sensiblement plus importante que ce qui était prévu, et ce en faisant abstraction de l'effet d'anticipation observé lors des six premiers mois de mise en oeuvre ;
- parce que le comportement des armateurs est spéculatif et parce que le législateur n'a limité la durée de détention du navire sous pavillon français qu'à 5 ans, 30 % des navires quiratisés pourraient faire, à l'échéance de la durée de détention, l'objet d'une revente ou d'un dépavillonnement. Une durée supérieure - 8 ans - repousserait dans le temps ce risque et fidéliserait les armateurs.
Le dispositif quirataire serait donc plus cohérent si la période de détention était plus élevée, et s'il était conjugué avec une baisse des charges patronales
- pour limiter le dépavillonnement en sortie du dispositif.