2. Le développement de la filière pétrochimique
2.1 L'avantage technologique de la France
Sur ce marché, la compétition existe entre technique norvégienne (type « phère » ou Moss-Rosenberg) et technique française (type membrane). Aujourd'hui, sur les quatre-vingt-dix méthaniers en vogue, 50 % sont issus de la conception norvégienne et 43 % issus de la technique française. Pour les commandes au premier janvier 1996, 23 % font appel à la technique membrane (française), et 77 % à la technique norvégienne.
La technique norvégienne reste donc aujourd'hui la plus utilisée. Les trois japonais (Mitsubishi, Mitsui et Kawasaki) la privilégient toujours. Des signes avant-coureurs montrent que la technique française s'impose toutefois de plus en plus :
- les constructeurs mondiaux s'engagent dans cette voie. 29 chantiers sont sous licence de la technique membrane dans le monde en 1997, dont 5 en République de Corée, 8 au Japon, 9 en Europe, 3 aux États-Unis. Elle permet des économies en coût d'installation des infrastructures (3 millions de $ d'investissement pour une cale permettant de construire des membranes contre 50 millions de $ pour la technique sphère) et en coût de revient (d'environ 10 %) pour la construction ;
- les armateurs reconnaissent une supériorité d'exploitation en mer, de manoeuvrabilité, de vitesse, de résistance et de sécurité pour ce procédé. Ils commandent aujourd'hui des navires membranes et démontrent, ainsi, qu'il n'y a pas de difficultés opérationnelles entre les deux systèmes (Yunkong Line a programmé 2 navires type membrane alors qu'il venait de commander il y a 2 ans, 1 navire type sphère).
Les perspectives de commandes sont de 9 à 11 méthaniers pour 1997-1998, dont 60-80 % avec la technique française. Pour 1999-2001, les estimations tournent aux alentours de 10 à 13 navires en commande.
2.2 La nouvelle filière française du gaz ?
La France maîtrise les deux techniques de fabrication les plus performantes (basées sur la technologie membrane). Le rapprochement de ces deux techniques au sein d'une structure commune va permettre de proposer une nouvelle solution encore plus performante. Aussi, une nouvelle carte peut être jouée ; proposer le méthanier de la nouvelle génération. Le marché potentiel est important, de l'ordre de 10 milliards de dollars. La France a déjà une part de marché de 3,5 %. Elle pourrait donc l'accroître très significativement.
La compétence de GTT - GazTransport & Technigaz issue, en 1994, du rapprochement de Gaz Transport et SN Technigaz, est une des clés du succès de la technique de construction française. Ce groupe présente une structure performante dans la conception et la manutention du système de cargaison. Deux qualités ressortent de cette fusion : la mise en commun de compétences techniques, et la création d'un puissant pôle Financier et commercial comprenant Gaz de France (40 %), Total (30 %) et Bouygues Offshore (30 %). En complément, 1TRCN développe un programme de recherche permettant d'optimiser les formes de cuves de méthaniers, de plus grandes tailles et plus résistantes aux mouvements de liquide. Ainsi, on pourra construire des méthaniers moins coûteux avec un petit nombre de cuves.
La France peut de nouveau espérer supplanter les fournisseurs japonais dans la conception du système de cargaison de quatre navires membranes par la Korea Gas Corporation (KGC).
Si on peut donc parler de filière technologique, la filière maritime du transport de gaz n'existe cependant plus. Un débouché s'offre aujourd'hui aux Chantiers de l'Atlantique : la commande par Gaz de France de 2 méthaniers GNL d'ici trois ans. La maîtrise du système de fabrication et les études menées par ce chantier dans les nouvelles techniques de production (CSI) permet de maintenir l'espoir.
La maîtrise intégrale de la filière gaz n'est pas perdue pour la France.
L'émergence de la technique française de fabrication en est un exemple.
Dans un marché où la commande d'un nouveau type de navire est la matérialisation d'une nouvelle compétence, la relation entre armateurs (Gaz de France) et constructeurs (Chantiers de l'Atlantique) serait, dans le cas de filière du gaz, un signe puissant de l'efficacité de la politique publique maritime et de ses effets d'entraînement.