CONCLUSION
Le contexte international dans lequel s'inscrit la politique
portuaire française est en mutation. Sous l'effet des évolutions
techniques, la concurrence entre les ports européens s'intensifie.
Réagissant à cette tendance spontanée, la Commission
européenne commence à s'inquiéter de
l'égalité des conditions de concurrence entre les places
portuaires et propose de mettre en place une véritable politique commune
dans ce domaine.
Il est par ailleurs intéressant d'observer la manière dont la
Commission se trouve prise dans ses propres contradictions, entre son
inspiration purement libérale d'origine et sa nouvelle
préoccupation d'aménagement du territoire communautaire.
En effet, le simple jeu des forces du marché ne peut qu'aboutir à
renforcer la concentration des flux de trafics dans les ports
déjà en situation dominante, d'une manière
inéquitable pour les différents Etats membres et
préjudiciable à l'équilibre économique et
écologique global des transports terrestres en Europe.
S'agissant du sujet plus précis de la situation des ports
français de la Manche-Mer du Nord face à leurs voisins du
Benelux, votre rapporteur retire trois impressions de sa mission de
contrôle et d'information.
Première impression, comparés à leurs concurrents du
Benelux, les ports français de la Manche-Mer du Nord ne
déméritent ni par la qualité de leur gestion, ni par le
niveau de leurs tarifs. La question de leur fiabilité continue toutefois
de faire peser sur eux une hypothèque sérieuse.
Mais leur vraie faiblesse par rapport à leurs voisins du Nord
réside dans le fait qu'ils sont des outils techniques plus que de
véritables communautés d'affaires ou, autrement dit, des "ports
d'ingénieurs" plus que des "ports de marchands". Toutefois, les
mentalités évoluent rapidement, comme le prouvent la
révolution récente des pratiques douanières ou l'appel
"oecuménique" lancé par l'ensemble des professions portuaires
françaises et les armateurs étrangers au début de cette
année.
Ce nouveau dynamisme des acteurs portuaires, qui demande à être
confirmé, est encourageant car il constitue le véritable espoir
de succès des ports français. L'intervention publique, aussi
utile soit-elle, ne peut s'y substituer s'il fait défaut.
Deuxième impression, la compétitivité supérieure
des deux ports champions du Benelux s'explique d'abord par les économies
d'échelle découlant de leur taille, même si elle est aussi
confortée par une forte implication des pouvoirs publics.
Toutefois, ce modèle de gigantisme semble avoir atteint ses limites,
avec le manque d'espace et l'engorgement des accès terrestres. Par
ailleurs, la cherté relative de ces grands ports est de plus en plus mal
supportée par leurs utilisateurs, et un mouvement de déplacement
d'activité vers des ports de moindre taille se fait jour.
Troisième impression, il existe une réelle opportunité
à saisir pour les ports français de la Manche-Mer du Nord qui,
sans pouvoir prétendre faire jeu égal, ne partent certainement
pas battus d'avance dans la compétition avec leurs voisins. Mais il est
nécessaire d'agir vite, car les ports du Benelux ont planifié les
investissements nécessaires pour faire sauter les goulots
d'étranglement de leur développement, et retrouveront
bientôt toute leur agressivité commerciale.
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Réunie le mercredi 22 octobre 1997 sous la présidence de M. Christian Poncelet, la commission des finances a donné acte à M. Marc Massion des conclusions de sa mission de contrôle et en a décidé la publication sous la forme d'un rapport d'information.