III. LE FONDS DE COHÉSION A-T-IL UN AVENIR ?

A. LE DISPOSITIF ACTUEL DE COHÉSION

Instauré par le Conseil européen d'Edimbourg de décembre 1992 pour aider les Etats membres en retard de développement, le fonds de cohésion intervient pour la " réalisation de projets dans le domaine de l'environnement dans celui des réseaux transeuropéens en matière d'infrastructure des transports " (article 130 D du traité de Maastricht).

L'action du fonds de cohésion est soumise à deux conditions impératives :

- elle est d'abord exclusivement réservée aux Etats membres dont le PNB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire , disposition qui en a réservé le bénéfice exclusif à quatre pays : l'Espagne, la Grèce, l'Irlande et le Portugal, pour l'ensemble de leur territoire ;

- elle est subordonnée à l'adoption d'un programme national de convergence économique , dont le respect est contrôlé. C'est ainsi que la Commission européenne a appliqué, pour la première fois en juin 1996, les dispositions du fonds de cohésion prévoyant que ce financement spécifique pourrait être suspendu si les pays bénéficiaires ne respectaient pas les objectifs fixés par le Conseil en matière de réduction des déficits excessifs. Les objectifs ayant été d'ailleurs largement atteints (15( * )) , la poursuite des versements a pu être autorisée.

B. LA CONFIRMATION DU DISPOSITIF

1. Pour les actuels bénéficiaires

a) Des critères inchangés

Dans le cadre " Agenda 2000 ", la Commission a proposé de maintenir le fonds de cohésion selon les normes actuellement en vigueur. Seule novation, elle a précisé, toutefois, qu'il sera procédé à une vérification à mi-parcours de l'éligibilité au critère d'un PNB inférieur à 90 % de la moyenne communautaire.

Une interrogation demeure sur la manière dont sera calculée la moyenne communautaire du PNB par habitant : sera-t-elle revue systématiquement à chaque nouvelle adhésion ? Comment seront gérés les effets de seuils qui en résulteront forcément ?

D'après les premiers éléments dont on dispose, il semble que l'éligibilité du fonds de cohésion sera constatée en 1999, en fonction des résultats de PNB, et restera valable jusqu'au contrôle de mi-parcours. Il devrait en résulter une sortie (16( * )) de l'Irlande, vers 2003, si ce pays est resté inclus dans le dispositif en 2000, et un maintien du bénéfice des dotations de cohésion pour les trois autres bénéficiaires.

b) Le maintien du bénéfice du fonds de cohésion pour les pays accédant à l'union économique et monétaire

Le débat porte sur le point de savoir si les pays accédant à la troisième phase de l'union économique et monétaire doivent, du même coup, se voir exclus du bénéfice du fonds de cohésion. Même si, tout naturellement, certains Etats s'opposent à cette vision des choses -notamment l'Espagne-, il paraît en effet logique de considérer que les Etats accédant à l'Euro ne remplissent plus les conditions d'allocation du fonds de cohésion, qui aura alors accompli sa mission (17( * )) .

Or, la Commission a précisément indiqué que les Etats membres dont le PNB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire et qui ont adhéré à la troisième phase de l'union économique et monétaire resteront éligibles au concours de ce fonds, pour la totalité de leur territoire, sous réserve qu'ils respectent les dispositions prévues par le pacte de stabilité et de croissance et, notamment, les programmes de stabilité. L'argument qui lui a semblé décisif a été de considérer qu'en dépit des progrès réalisés, ces pays restaient encore " à la traîne " de l'Union et qu'il ne semblait pas justifié, au regard des sommes en cause, de supprimer ce financement. Il faut toutefois souligner que le rapprochement de l'augmentation respective du fonds de cohésion et de l'objectif 1 entraînera une très forte concentration des aides pour certains bénéficiaires .

c) Une forte augmentation de la dotation budgétaire

Pour les actuels membres de l'Union, l'enveloppe à répartir s'élève à 20 milliards d'écus sur la période (18( * )) , soit une augmentation de plus de 25 % par rapport à la situation actuelle : le fonds de cohésion était en effet doté de 15,5 milliards d'écus pour 1993-1999.

De nombreuses voix se sont élevées contre cette hausse massive. Le Comité économique et social de l'Union a ainsi considéré, sur ce point, que cette dotation était incohérente, notamment parce qu'il est encore impossible de déterminer quels pays répondront au critère du PNB au début de la période et à mi-parcours (19( * )) .

Le volume accru de l'enveloppe pour un nombre de bénéficiaires qui devrait décroître est un point important de la négociation qui va s'ouvrir. Elle est intimement liée à la question de l'élargissement de l'Union, car souvent considérée comme le prix à payer aux Etats de la cohésion pour obtenir leur adhésion au principe de l'élargissement.

2. L'élection des nouveaux adhérents au fonds de cohésion

S'agissant des futurs membres, et notamment des pays de l'Europe centrale et orientale, il est prévu le droit à bénéficier des fonds structurels et du fonds de cohésion pour l'ensemble des nouveaux adhérents dès leur entrée dans l'Union.

Par précaution, la Commission a envisagé de plafonner les aides dont ils seront bénéficiaires à hauteur de 4 % maximum de leur PIB respectif afin de tenir compte de leur capacité d'absorption budgétaire et des difficultés, administratives et techniques, qu'ils peuvent rencontrer pour gérer des programmes lourds et complexes. Cette limite a été calculée par comparaison avec la capacité actuelle d'utilisation des fonds européens par la Grèce et le Portugal, qui est de l'ordre de 3 % aujourd'hui.

Enfin, le niveau élevé de cofinancement assuré par le fonds de cohésion aujourd'hui (85 %) devrait permettre, dès l'adhésion, et compte tenu de l'existence d'un programme de convergence, le financement de projets importants dans des secteurs comme l'environnement et les réseaux transeuropéens.

Le programme " Agenda 2000 " évalue à 3 ou 4 milliards d'écus environ, sur les 38 globalement attribués aux nouveaux entrants, la partie affectée au fonds de cohésion, soit environ 10 % de l'enveloppe structurelle comme pour les membres actuels de l'Union. Cette enveloppe variera en fonction de la date effective et du nombre des adhésions qui conduiront chaque nouvel Etat membre à bénéficier plus ou moins longtemps de cette dotation sur la période 2000-2006. A titre de référence, l'entrée simultanée des onze candidats à l'adhésion dans l'Union en 2003 aurait mathématiquement conduit à calibrer la dotation destinée aux nouveaux arrivants à 85 milliards d'écus.

Il n'en demeure pas moins que la contribution de l'Union sera nettement plus favorable aux membres actuels qu'aux entrants, créant le risque d'une " Europe à deux vitesses ", dont l'existence serait difficilement acceptable .

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