N° 53
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 28 octobre 1997.
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la délégation du Sénat pour l'Union
européenne (1),
sur
l'intégration de Schengen dans l'Union européenne,
Par M. Paul MASSON,
Sénateur.
(1) Cette délégation est composée de
: MM. Jacques Genton,
président
; James Bordas, Michel
Caldaguès, Claude Estier, Pierre Fauchon,
vice-présidents
; Nicolas About, Jacques Habert, Emmanuel Hamel, Paul Loridant,
secrétaires
; MM. Robert Badinter, Denis Badré,
Michel Barnier, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Gérard Delfau,
Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Ambroise
Dupont, Jean-Paul Emorine, Philippe François, Jean
François-Poncet, Yann Gaillard, Pierre Lagourgue,
Christian de La Malène, Lucien Lanier, Paul Masson,
Daniel Millaud, Georges Othily, Jacques Oudin, Mme Danièle
Pourtaud, MM. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jacques Rocca Serra,
André Rouvière, René Trégouët, Marcel Vidal,
Robert-Paul Vigouroux, Xavier de Villepin.
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le traité sur l'Union européenne signé le 2 octobre 1997
à Amsterdam comporte un protocole intégrant l'acquis de Schengen
dans le cadre de l'Union européenne.
Ce protocole, qui avait été
élaboré par la
présidence néerlandaise
dans le cadre de la Conférence
intergouvernementale de révision du traité de Maastricht (CIG) et
qui n'avait jamais figuré au rang des propositions françaises,
est complété par trois autres protocoles relatifs à la
position d'une part du Royaume-Uni et de l'Irlande, d'autre part du Danemark.
Le présent rapport examine le contenu du protocole Schengen du
traité d'Amsterdam, analyse le fonctionnement de l'acquis de Schengen
après la mise en vigueur du nouveau traité ainsi que les
dispositions du traité d'Amsterdam ou du protocole permettant la
" communautarisation " de matières ou de dispositions
antérieures et examine les conséquences d'une mise en oeuvre
anticipée du protocole d'intégration de l'acquis de Schengen dans
l'Union européenne.
I. LE CONTENU DES PROTOCOLES
Le protocole principal comprend huit articles et une annexe.
A. LES ETATS CONCERNÉS
L'article 1er énumère les Etats membres qui
décident d'instaurer entre eux une coopération plus
étroite dans les domaines relevant de l'acquis de Schengen
. Ces
treize Etats sont la Belgique, le Danemark, l'Allemagne, la Grèce,
l'Espagne, la France, l'Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, l'Autriche, le
Portugal, la Finlande et la Suède.
L'article 4 ouvre la possibilité pour l'Irlande et le Royaume-Uni de
participer à tout moment à tout ou partie des dispositions de
Schengen
.
L'article 6 permet à l'Islande et à la Norvège, qui ne
font pas partie de l'Union européenne, d'être associées
à l'acquis de Schengen
sur la base de l'accord signé par le
Comité exécutif à Luxembourg le
19 décembre 1996.
B. L'ACQUIS DE SCHENGEN
L'annexe du protocole définit le champ de cet acquis,
lequel comporte :
-
l'accord du 14 juin 1985
entre le Bénélux, l'Allemagne
et la France relatif à la suppression graduelle des contrôles de
personnes aux frontières communes ;
-
la convention d'application du 19 juin 1990
conclue entre le
Bénélux, l'Allemagne et la France, ainsi que l'acte final et ses
déclarations communes ;
-
les accords d'adhésion signés avec l'Italie, l'Espagne, le
Portugal, la Grèce, l'Autriche, le Danemark, la Finlande et la
Suède
entre 1990 et 1996 ;
-
les décisions et déclarations adoptées par le
Comité exécutif
.
C. L'INTÉGRATION DU SECRÉTARIAT SCHENGEN AU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DU CONSEIL
L'article 7 donne pouvoir au Conseil statuant à la
majorité qualifiée d'adopter les modalités
d'intégration de l'actuel Secrétariat de Schengen au
Secrétariat général du Conseil
.
La présidence luxembourgeoise a mis en place un groupe de travail qui
est chargé, sous le contrôle du Secrétaire
général du Conseil des ministres, de prévoir les
conditions pratiques de l'incorporation du Secrétariat de Schengen dans
le Secrétariat Général du Conseil. Un rapport devrait
être remis au début du mois de novembre 1997.
D. L'INTÉGRATION DE L'ACQUIS DE SCHENGEN DANS L'UNION EUROPÉENNE
L'article premier du protocole indique que la
coopération sur la base de l'acquis de Schengen
" est conduite
dans le cadre juridique et institutionnel de l'Union européenne et dans
le respect des dispositions pertinentes du traité sur l'Union
européenne et du traité instituant la Communauté
européenne "
. L'article 2 ajoute que "
le Conseil,
statuant à l'unanimité, détermine, conformément aux
dispositions pertinentes des traités, la base juridique pour chacune des
dispositions ou décisions qui constituent l'acquis de Schengen. En ce
qui concerne ces dispositions et décisions et conformément
à la base juridique que le Conseil a déterminée, la Cour
de justice des Communautés européennes exerce les
compétences qui lui sont conférées par les dispositions
pertinentes applicables des traités
".
Ce transfert de l'acquis de Schengen dans l'ordre juridique européen est
ainsi réalisé par une substitution des bases juridiques
applicables à l'ensemble des décisions du Comité
exécutif, ainsi qu'au contenu de l'accord du 14 juin 1985 et de la
convention du 19 juin 1990. Le Conseil statue à l'unanimité pour
la détermination de ces nouvelles bases juridiques.
Tant que le
Conseil n'a pas déterminé cette base juridique, les dispositions
ou décisions constituant l'acquis de Schengen sont
considérées comme des actes fondés sur le titre VI du
traité
.
E. LES POSITIONS PARTICULIÈRES DU ROYAUME-UNI, DE L'IRLANDE, DE L'ISLANDE ET DE LA NORVÈGE
Les deux protocoles portant sur l'application de certains
aspects de l'article 7A du traité sur l'Union européenne et sur
la position du Royaume-Uni et de l'Irlande
permettent à ces deux
pays de participer le moment venu à la coopération menée
sur la base de tout ou partie des dispositions de l'acquis de Schengen. Le
Conseil se prononcera alors à l'unanimité des Etats
concernés sur une telle demande, c'est-à-dire les treize Etats
signataires des accords de Schengen (soit les onze plus l'Islande et la
Norvège) et l'Etat demandeur.
Pour ce qui est de la Norvège et de l'Islande
, un accord sera
conclu entre le Conseil statuant à l'unanimité des Etats membres
concernés (à l'heure actuelle, onze Etats) en vue de les associer
à la mise en oeuvre de l'acquis de Schengen, selon la décision
prise par le Comité exécutif le 19 décembre 1996 à
Luxembourg. Le Parlement français devra d'ailleurs intervenir pour
ratifier cet accord du 19 décembre 1996, comme l'a indiqué
le Conseil d'Etat à l'occasion de la transmission de ce document
à la délégation ; il convient de souligner l'importance de
cet arrangement qui pourra ultérieurement être
évoqué pour d'autres pays, par exemple candidats à
l'adhésion, qui seront encore non membres de l'Union
européenne.
Un groupe de travail va étudier le statut de la Norvège et de
l'Islande ; il est prévu que le Conseil doit négocier, d'une
part un accord avec ces deux Etats tiers pour déterminer leur
régime d'association et les conséquences financières de
leur participation aux accords de Schengen et à leur
développement et, d'autre part, un accord établissant les droits
et obligations de ces deux pays avec le Royaume-Uni et l'Irlande qui ne
reprendront pas la totalité de l'acquis de Schengen.
L'article 8 fait obligation à tous les Etats candidats à
l'adhésion à l'Union européenne d'accepter
intégralement cet acquis de Schengen.