3. Une particularité française : la faiblesse de l'innovation
L'innovation
, que l'on pourrait définir avec
l'Institut REXECODE comme la concrétisation d'une découverte,
c'est-à-dire "
une idée nouvelle qui a pris corps dans le
système productif
", se distingue de la recherche. La plupart
des innovations n'ont en effet rien d'exceptionnel : remplacement d'un
composant, réorganisation de l'entreprise en vue d'améliorer la
qualité globale, nouvelle forme de distribution, etc.
Cependant, sous les effets du développement de l'économie de
l'information et de l'unification des technologies (en raison notamment de la
mondialisation des standards et des composants, ainsi que de la miniaturisation
des pièces, qui peuvent ainsi s'employer dans un nombre croissant
d'applications), le
progrès technique
prend de moins en moins la
forme d'un saut technologique, et relève de plus en plus de la
maîtrise et de l'incorporation de technologies et de processus existants,
c'est-à-dire d'innovations. L'innovation devient ainsi un enjeu majeur
pour la
compétitivité
des économies.
Or, comme le souligne le rapport
Industrie 1996
de REXECODE, les
indicateurs disponibles indiqueraient, au-delà des problèmes de
mesure, un
manque
d'innovation
dans l'économie
française, en particulier dans les PME. Par exemple le pourcentage
d'entreprises déclarant avoir innové lors des trois années
précédant l'enquête serait moindre en France qu'en
Allemagne ou au Royaume-Uni :
POURCENTAGE D'ENTREPRISES INNOVANTES (EN %)
|
20 à 49 salariés |
50 à 100 salariés |
plus de 100 salariés |
France
Allemagne Japon |
35
|
55
|
85
|
Source : Enquêtes européennes et Product
Development Survey, cité par REXECODE
De même, la part du chiffre d'affaires des entreprises françaises
portant sur des produits inchangés aurait été en 1992 de
40 % en Allemagne, mais de 70 % en France.
Selon REXECODE, de nombreux
facteurs
pourraient expliquer la faiblesse
de l'innovation en France :
- le ralentissement de la croissance ;
- les difficultés de
financement
du capital développement
des PME en raison du niveau des taux d'intérêt, des
difficultés du secteur bancaire, et de l'insuffisance des financements
publics destinés à l'innovation (ANVAR notamment) au regard de
80 milliards de francs de financement de la recherche ;
- le manque de
coopération
inter et intra-organisations et plus
particulièrement l'insuffisance de liens entre grands groupes et PME ;
- "
le manque de mise en situation créative des
étudiants
" (Pierre Gilles de Gennes) et le manque de
synergies
entre laboratoires publics et universités d'un
côté, PME de l'autre ;
- la
concentration
trop importante de la recherche : selon l'INSEE,
" les
40 principaux groupes industriels français ainsi que les
groupes étrangers identifiés dans la recherche exécutent
près des trois quarts de la R&D française et reçoivent
les neuf dixièmes des financements publics
"
20(
*
)
;
- l'insuffisance de la part de la recherche effectuée par les
entreprises
(63 % de la recherche française totale en 1993,
contre près de 70 % en Allemagne et aux Etats-Unis, et 75 % au
Japon), ce qui se traduirait par un plus grand éloignement de la R&D
française au marché.