D. L'ABSENCE DE PRISE EN COMPTE DES CONTRIBUTIONS FINANCIÈRES

La pondération des votes au Conseil, déjà fort éloignée des réalités démographiques, ne tient aucun compte des contributions financières des Etats membres.

Cependant, alors que l'Europe des Six était un ensemble relativement homogène, la Communauté actuelle regroupe des Etats entre lesquels les différences de développement sont plus sensibles.

L'absence de prise en compte des efforts de chaque Etat entraîne un déphasage assez frappant entre la pondération des votes au Conseil et les responsabilités financières. Celles-ci sont retracées ci-dessous pour l'année 1994, dernière année pour laquelle les chiffres officiels sont disponibles :

Etats membres

Recettes de l'Union

Contribution nette

1994

 

en Mécus

en %

en Mécus

Belgique

2.822,1

4,4

-309,3

Danemark

1.296,2

2,0

198,9

Allemagne

21.366,3

33,3

-13.637,1

Grèce

992,3

1,5

3.851,9

Espagne

4.718,1

7,4

3.116.6

France

12.550,9

19,6

-2.626,4

Irlande

638,9

1,0

1.752,0

Italie

7.759,6

12,1

-2.540,4

Luxembourg

165,4

0,3

253,7

Pays-Bas

4.245,9

6,6

-1829,9

Portugal

1.215,6

1,9

1.827,0

Royaume-Uni

6.417,4

10,0

-1.158,8

(Source : Cour des Comptes des Communautés européennes)

On peut constater ainsi que le Portugal, la Grèce et l'Irlande, qui ont ensemble plus de voix que l'Allemagne (13 contre 10) fournissent au total 3,4 % des recettes du budget communautaire, soit dix fois moins que l'Allemagne. De même, il apparaît que la France et l'Allemagne fournissent à elles seules 53 % des recettes communautaires, alors qu'elles ne peuvent à elles deux constituer une minorité de blocage.

Si l'on considère par ailleurs la contribution nette des Etats membres, on peut constater que la solidarité financière communautaire repose principalement, dans la durée, sur un groupe assez réduit d'Etats membres, notamment l'Allemagne, les Pays-Bas et la France. Or ces trois pays, qui ensemble assurent approximativement les quatre cinquièmes des versements nets au budget communautaire, peuvent arithmétiquement être mis en minorité au sein du Conseil lorsqu'il s'agit de décider des dépenses.

Certes, on ne saurait fonder la pondération des voix au Conseil sur une approche purement financière qui serait la négation même de la solidarité communautaire. Mais ne tenir aucun compte des responsabilités financières de chacun, alors que les règles de décision sont également très éloignées des réalités démographiques, contribue à affaiblir encore la légitimité des décisions du Conseil.

Or, là encore, l'élargissement à l'Est va lourdement aggraver les déséquilibres existants, puisque les futurs adhérents verseront peu au budget communautaire et en recevront beaucoup, tout en disposant ensemble d'un grand nombre de voix si l'on conserve les règles actuelles de pondération. Avec ces règles, les futurs adhérents, qui ont au total 106 millions d'habitants et représentent une faible capacité contributive, auront 45 voix, alors que les quatre plus grands Etats parmi les membres actuels, qui ont ensemble 255 millions d'habitants et assurent 75 % des recettes du budget communautaire, n'auront que 40 voix.

Il parait donc indispensable que la CIG s'attache à prévenir des déséquilibres d'une telle ampleur, en adoptant des règles de pondération de nature à conserver une légitimité au processus de décision dans une Union élargie.

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