Audition de M. Jean-Claude Rameau,
professeur en écologie
forestière, membre des comités scientifiques régionaux de
protection de la nature (CSRPN) Champagne Ardennes et Lorraine et
président du groupe biogéographique
" continental "
(Jeudi 13 mars 1997)
Pour expliquer l'échec de la première phase de
désignation des sites pour le réseau
" Natura 2000 ",
M. Jean-Claude Rameau
a surtout
dénoncé le déficit flagrant de communication, de
concertation et de transparence.
Evoquant l'exemple malheureux de l'inventaire des zones naturelles
d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF)
qui s'était heurté à la franche opposition des
propriétaires privés, faute de communication et d'une
réelle transparence, il a regretté que cet épisode n'ait
pas pu servir de leçon.
Il a également souligné le peu de temps et de moyens impartis aux
travaux scientifiques préalables d'identification des habitats,
d'où parfois le manque de pertinence des choix proposés et
l'inflation des sites " soi-disant " éligibles au niveau
européen.
M. Claude Rameau
a suggéré que très rapidement la
composition des CSRPN soit élargie aux intervenants et aux ayants droit
du monde agricole et forestier, sur l'exemple de ce qui se pratiquait avec
succès en région Champagne-Ardennes, Lorraine et
Rhône-Alpes.
Ce comité auquel seraient associés les élus locaux
pourrait utilement s'appuyer sur un conseil scientifique qui resterait
composé de naturalistes et de scientifiques. Il a souligné que
cette structure élargie pourrait être associée à la
réflexion sur la définition des documents d'objectifs, assurer le
suivi de la gestion des sites et constituer une premier niveau d'arbitrage en
cas de contentieux portant sur un site Natura 2000 ou son mode de gestion.
A propos de la désignation des sites, il a rappelé la
multiplicité des normes de protection environnementales existant en
France et l'exemplarité des sites qui devaient prétendre au
classement en réseau Natura 2000, en présentant des
complémentarités en terme d'habitats. Il a jugé
remarquable le travail scientifique préalable accompli en Espagne, qui
dispose désormais d'une cartographie des habitats établie au
1/50.000e à partir de laquelle vont être définies des zones
au périmètre strictement entendu.
Soulignant l'effort d'adaptation des CSRPN aux nouvelles règles de
désignation des sites,
M. Jean-Claude Rameau
a mis en avant les
étapes indispensables à respecter pour assurer le succès
de l'opération :
- nécessité d'un groupe de travail élargi aux ayants
droit et aux gestionnaires ;
- identification des sites à partir de travaux cartographiques
précis ;
- définition des règles de gestion sur la base du consensus
et de l'adhésion ;
- évaluation des surcoûts éventuels tant dans les
habitats naturels prioritaires, que d'intérêt communautaire.
Il a insisté sur la vision dynamique qu'il fallait avoir de la
conservation de la biodiversité en rappelant qu'en France, la nature
ayant été modelée par la main de l'homme, l'instauration
du réseau écologique " Natura 2000 " ne consistait
pas à définir des sanctuaires de la nature.
M. Jean-Claude Rameau
a souhaité qu'au niveau européen
soit approuvé la stratégie retenue et précisé les
moyens de financements disponibles pour l'étude des sites. Il s'est
interrogé sur le statut juridique des différentes parties des
sites retenus dans le réseau Natura 2000, s'agissant des noyaux durs,
zones-tampons et zones interstitielles et sur la nécessité de
contractualiser au niveau de chaque site pour la mise en oeuvre des documents
d'objectifs.
Plusieurs programmes LIFE sont en cours pour aider à la mise en place du
réseau Natura 2000 :
- programmes Réserves Naturelles de France sur l'élaboration des
documents d'objectifs (les acquis étant insuffisamment utilisés
par la DNP) ;
- programme ONF, IDF ;
M. Jean-Claude Rameau
a souligné
l'excellence des relations prévalant entre l'Office national de la
Forêt, l'Institut du développement forestier et l'École
nationale du génie rural des eaux et des forêts ainsi qu'avec des
correspondants au Luxembourg et en Belgique. Il a indiqué que les
résultats obtenus permettront de mettre à disposition des
itinéraires sylvicoles, conçus comme des outils
pédagogiques et de conseil pour mieux appréhender la
biodiversité ; l'ambition de ce travail étant de dépasser
très largement le cadre strict du réseau Natura 2000 ;
- programme " forêt privée " devant préciser les
processus de financement des surcoûts d'une gestion conservatoire.