Audition de M. Henri Mouliérac, Président de l'Union des syndicats des industries routières françaises (USIRF) (19 février 1997)
M. Jean François-Poncet,
président
.- Je rappelle qu'Henri Mouliérac est
Président de la SACER qui fait partie du groupe COLAS, entreprise
employant près de 5000 personnes. Par conséquent, il va nous
parler, non pas du côté de l'administration des
sociétés concessionnaires, mais du côté des
constructeurs de son point de vue sur les infrastructures routières.
Il est accompagné de M. Jean-Claude Roudé, Président de
l'entreprise Jean Lefebvre, ainsi que de Jacques Saint-Raymond,
délégué général de l'USIRF dont M. Henri
Mouliérac est par ailleurs président.
M. Henri Mouliérac
.- Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, je vous remercie de nous avoir
permis de nous exprimer devant vous. Je suis sûr que vous nous
écouterez, mais j'espère aussi que nous serons entendus. C'est
sans doute la première fois que notre profession peut s'exprimer devant
les représentants de la nation. J'espère en profiter pour vous
exposer les préoccupations sérieuses de notre profession toute
entière.
Au tout début de ce siècle, on pouvait encore écrire
:
" Vous nous voyez marcher sur cette route droite, tout poudreux, tout
crottés, la pluie entre les dents, sur ce large éventail ouvert
à tous les vents. La route nationale est notre porte
étroite ".
Depuis cette évocation de Charles
Péguy, on pourrait penser que l'essentiel a été fait sur
nos routes, qu'il ne reste plus qu'à gérer et à entretenir
le réseau existant.
Pourtant ce constat, ou plutôt cette hypothèse mérite un
examen que je vais essayer de réaliser devant vous.
1) D'abord l'augmentation de la circulation, certes beaucoup plus faible que
dans la précédente décennie, mais dont la croissance se
poursuit, tout en se ralentissant. Il n'y aura jamais plus de voitures que
d'habitants en âge et en état de conduire. Nous tendons donc vers
une diminution.
2) Mais toutefois l'augmentation de la circulation nécessite des travaux
de voirie, en particulier aux abords des villes dans le péri-urbain,
sous peine d'aggraver fortement une congestion existante.
3) L'aménagement du territoire suppose le désenclavement de
régions fort mal desservies. C'est le cas de toute une partie du Massif
Central.
4) Par ailleurs, si l'on veut que la France ne reste pas à
l'écart du dynamisme de l'arc lotharingien de la mer du Nord aux rives
adriatiques, il faut développer des liaisons est-ouest adaptées
au trafic lourd et rapide, continuer et améliorer les liaisons
sud-européennes, en particulier les communications avec la
péninsule ibérique.
Pour toutes ces raisons, l'effort de construction des infrastructures
routières doit se poursuivre, selon le schéma directeur
autoroutier et ses prolongements, au rythme compatible avec les
possibilités de son financement.
5) La sécurité suppose, entre autres actions que nous verrons
peut-être ensuite, le contournement de nombreux villes ou villages
aujourd'hui traversés par des voies à grande circulation.
6) Enfin l'entretien des voiries existantes est notoirement insuffisant. La
Direction des routes estime à 1 % de la valeur du patrimoine le bon
niveau d'entretien, c'est-à-dire le niveau minimum pour éviter
des réfections lourdes. Or nous en sommes aujourd'hui à moins de
la moitié sur la voirie nationale non concédée. Je citerai
seulement un exemple actuel et récent : les barrières de
dégel qui paralysent aujourd'hui beaucoup d'industries de l'Est, en
particulier en Alsace, ont un coût économique sans aucune commune
mesure avec la mise hors gel des chaussées.
Alors que la circulation continue de croître régulièrement,
d'environ 2,3 % par an, les dépenses de chaussées
régressent en francs constants d'environ 2 % par an jusqu'en 1995,
et en 1996 probablement beaucoup plus -je n'ai pas encore les chiffres
précis- tandis que les recettes des administrations restent à peu
près constantes.
Il faut souligner que cette constance est due à de très nombreux
facteurs. Les recettes spécifiques attachées à l'usage de
la route ont connu quelques diminutions, par exemple la suppression de la
majoration de la TVA sur les véhicules. Par contre la TIPP, elle,
continue de progresser à peu près de 4 % par an.
On peut évidemment arguer que ces taxes sont un impôt, mais alors
pourquoi les autres modes de transport n'y seraient-ils pas soumis ?
Aussi, lorsque l'on compare recettes et dépenses, on voit que les
produits de la fiscalité spécifique routière couvrent
près de deux fois les dépenses directes liées à la
route (entretien, sécurité, police, éclairage, etc..).
Vous ne serez donc pas étonnés qu'il nous apparaisse
indispensable de poursuivre la construction et l'entretien des routes à
un rythme raisonnable, d'autant que les routes ont un impact économique
indéniable sur le développement industriel et touristique. Ces
investissements correspondent à une attente beaucoup plus forte que ce
que l'on aurait pu croire en écoutant ou en lisant les médias,
comme nous le montre un sondage récent que l'IFOP a
réalisé à notre demande et dont nous publierons
bientôt les résultats.
Enfin, ces travaux essentiellement d'entretien sont à mener sur
l'ensemble du territoire. Entretenir nos routes est un moyen efficace de
maintenir l'emploi dans les petites unités, les entreprises locales
présentes dans chacun de nos départements.
Aujourd'hui, notre industrie routière est en panne. Elle ne peut plus
embaucher et former de jeunes. Le tissu des entreprises qui s'occupe de les
insérer dans la vie active est en train de se déliter. Je ne
pouvais manquer de le rappeler parce que la situation de nos entreprises est
aujourd'hui préoccupante. De très grandes sociétés,
comme des entreprises locales, ont disparu ces derniers mois, avec un
coût social et un coût économique très lourds.
J'ouvre une parenthèse : ceci est d'ailleurs le résultat de la
baisse de l'activité qui a entraîné des remises de prix
anormalement bas incompatibles avec une gestion équilibrée des
entreprises.
Au moment où le code des marchés doit être revu -je
rappelle qu'il concerne à peu près les ¾ de notre
activité- je me permets d'attirer votre attention sur le fait que cette
réforme pourrait être très efficace si elle incluait la
mise en place d'un certificat de garantie de bonne fin.
Cette garantie de bonne fin est utilisée depuis longtemps dans les pays
anglo-saxons. Elle est aujourd'hui étendue un peu partout dans le monde,
et particulièrement en Europe. On peut même se demander si l'Union
européenne ne la mettra pas en pratique et ne la rendra pas pratiquement
obligatoire.
Cette garantie protège nos clients des conséquences des
défaillances d'entreprise, mais elle a une conséquence
secondaire, à savoir qu'elle dissuade ces mêmes entreprises de
pratiquer des prix anormalement bas, auquel cas ces dernières
n'obtiendraient plus les garanties de leur banquier ou de leur assureur.
Je tenais tout de même à souligner ce point, parce que cette
réforme du code des marchés publics est aussi une de nos
préoccupations.
Si le réseau autoroutier et le maillage ne sont évidemment pas
encore terminés, par contre, le développement inéluctable
de nos villes entraîne une croissance anarchique des banlieues. Les
réseaux péri-urbains sont souvent incomplets, incohérents
et donc inefficaces.
Enfin, l'aménagement et l'entretien des itinéraires, leur
sécurité, leur confort, leur économie mêmes sont en
retard sur les besoins.
Alors quoi faire ? Que suggérons-nous ?
Je voudrais donner une piste parmi d'autres. Je crois qu'elle répondrait
beaucoup aux besoins de nos entreprises, mais surtout à ceux des
usagers. Il serait intéressant de mieux étudier les
problèmes posés par le transport routier pour adapter nos moyens
aux besoins prioritaires. Descartes, dans son Discours de la méthode,
deuxième précepte, proposait " de diviser chacune des
difficultés en autant de parcelles qu'il se pourrait et qu'il serait
requis pour les mieux résoudre ".
Si nous appliquons ce principe à nos routes, nous pourrions examiner
tour à tour les besoins de chaque catégorie d'usagers :
piétons, vélos, motos, voitures, bus, autocars, tracteurs
agricoles, transports légers, poids lourds, et j'en oublie bien
sûr. Or tous ces véhicules roulent ensemble quasiment sur les
mêmes voies, avec des usages, une fréquence, une destination, une
longueur du parcours, des interconnexions... Par exemple, la fréquence
d'utilisation d'une infrastructure peut aider à définir son
urgence. Nous avons vu quelques exemples récents dans les deux sens,
avec une structure qui soudain dépasse largement les prévisions
de trafic, et une autre qui, au contraire, était moins utilisée
qu'on ne pouvait l'imaginer.
Il y a un flux des ressources créé directement et indirectement
par ces transports d'hommes et de marchandises. L'éclatante
réussite du plan breton en est la meilleure expression tant les plans
ont été éloquents. C'est un plan ancien qui a
été voulu par le Général de Gaulle, à une
époque où il l'a quasiment imposé, et où l'on a vu
une progression très supérieure à la moyenne nationale du
développement des industries, de la population et du trafic dans toute
la Bretagne. Aujourd'hui, le plan routier breton est vraiment une
réussite éclatante et montre ce que peut faire un plan routier
dans l'aménagement du territoire.
Enfin, il y a la nature des liaisons routières : urbaines,
péri-urbaines, intercités, maillage fin, capillarisation. Point
n'est besoin d'insister sur les difficultés de déplacement de
banlieue à banlieue, dans les grandes villes. C'est vrai de toutes les
grandes métropoles des grandes villes de France.
Monsieur le Directeur des routes ne me contredira pas si je dis que bien des
études ont été menées sur chacun de ces sujets. Je
ne crois pas que nous ayons aujourd'hui, sur les projets, une matrice de
résultat qui permettrait sans doute de justifier, d'ajuster, de donner
des priorités aux crédits d'investissement et d'entretien
consacrés aux routes de notre pays, le seul réseau qui
évite toute rupture de charge. En effet, il n'y a que la route qui va
d'un point à un autre en totalité ; aucun autre moyen de
transport ne se fait sans une rupture à un moment ou un autre.
De ce fait, un audit des itinéraires en fonction de leur utilisation
devrait permettre de leur donner une cohérence favorable à la
sécurité et à la fluidité du trafic et donc un
meilleur usage de l'investissement public. Aujourd'hui, on voit des
itinéraires de ville à ville qui, parce qu'ils ont des
maîtres d'ouvrage différents, sont très
hétérogènes. Ceci est très néfaste, tant
pour la sécurité que pour la fluidité du trafic et le
confort des usagers.
Si l'on prenait l'exemple de la sécurité routière sur ces
différents points, on pourrait constater que près de 40 % des
victimes sont des piétons ou des conducteurs de deux roues. A-t-on
toujours, lorsque c'est possible, mis une séparation effective des
trafics qui est pourtant souvent peu onéreuse entre le trafic deux roues
et le trafic automobile ? A-t-on traité différemment une route
touristique d'une voie consacrée essentiellement aux trajets
domicile/travail ou aux transports lourds ?
Quand on parle de voie romaine, on voit une route dallée avec de
superbes dalles. Mais la voie romaine, ce n'était pas seulement ce qui
reste aujourd'hui, c'est-à-dire les dalles de la voie, mais aussi une
allée cavalière ensablée sur le côté
réservée aux chars rapides et une voie dont les charrois lourds,
traînés par des boeufs, marchaient au pas des piétons. A
cette époque-là, ils avaient déjà
séparé les trafics.
Je ne suis pas exhaustif -je ne saurais y prétendre- mais si notre
technique de construction est excellente -et l'on peut rendre hommage aux
ingénieurs de l'administration qui ont su mettre à la pointe du
progrès les techniques françaises, ainsi qu'à nos
entreprises, et je rappelle que les entreprises routières
françaises sont présentes dans le monde entier- la coordination,
la cohérence des itinéraires, la spécialisation des voies
n'ont peut-être pas forcément suivi le progrès des
études qui ont pu être réalisées sur ce sujet.
C'est un bien grand dessein qui devrait être notre ambition pour le
début du prochain siècle et pourrait contenter sans doute bien de
nos concitoyens qui, comme Michel Tournier, estiment que l'un des drames de
notre civilisation est que la roue et le pied ont des exigences incompatibles.
M. le Président
.- Merci de cette conclusion. Je ne sais
pas s'il faut choisir le pied ou la roue, mais nous sommes un certain nombre
à avoir un faible pour la roue.
Ouvrons le débat. Ce matin on nous a montré que les
crédits routiers avaient atteint un plafond qu'ils n'avaient jamais
dépassé dans le passé, à condition naturellement de
faire le total des crédits publics et des crédits
mobilisés par les sociétés concédantes. Or ce n'est
pas ce que paraît révéler votre diagramme. D'après
vous les dépenses chaussées baissent, tandis que ce matin on nous
a dit qu'elles augmentaient.
M. Henri Mouliérac
.- Les crédits qui ont dû
vous être présentés incluaient, sur le budget 1996, 21,9
milliards de francs correspondant aux travaux autoroutiers.
Sur cette somme, la part qui revient aux chaussées est de l'ordre de
15 %. Nous ne le saurons que lorsque les travaux seront terminés.
Cette part varie selon la nature de l'autoroute : selon qu'il s'agit d'une
autoroute de plaine, de montagne ou urbaine, les coûts ne sont pas les
mêmes, mais la moyenne est de 15 %.
Pour ce qui nous concerne, le total de ces crédits est ramené
à un montant de l'ordre de 4 milliards de francs. La variation dans le
temps fait que la totalité de nos crédits -il ne s'agit pas
seulement de l'Etat, mais de l'ensemble de notre activité- a
également baissé. Deuxième explication : les
collectivités locales, qu'il s'agisse des départements ou des
villes, ont vu chuter les crédits consacrés à la route du
fait essentiellement des dépenses sociales dans les départements
qui en ont absorbé une large part.
M. le Président
.- Vous parlez de 15 % pour la
chaussée. A quoi se rapportent les 85 % qui restent ? Aux ouvrages
d'art ?
M. Henri Mouliérac
.- Aux terrassements, aux ouvrages
d'art, à la signalisation, à l'achat des terrains, aux murs
antibruits, à l'éclairage...
M. le Président
.- Vos sociétés font bien
aussi les ouvrages d'art ?
M. Henri Mouliérac
.- Non, pas les sociétés
routières proprement dites. D'ailleurs l'une des caractéristiques
un peu particulière à la France est que les
sociétés routières en France font essentiellement de la
chaussée. Elles appartiennent souvent à des groupes qui font
autre chose.
M. Jean-Claude Roudé
.- Nous connaissons maintenant les
chiffres d'affaires consolidés des principales entreprises
routières françaises. En 1996 les chiffres d'affaires en France
ont baissé de 9 %. C'est un chiffre très difficile à
supporter pour les entreprises.
M. le Président
.- Comment cela s'explique-t-il ? Comment
peut-on faire plus d'autoroutes ? Vous avez dit que cette année nous
étions arrivés à un niveau que nous pourrions
difficilement dépasser. En même temps, les entreprises qui
construisent des autoroutes font la grimace.
M. Christian Leyrit
.- Comme l'indiquait M. Mouliérac, dans
le chiffre d'affaires des sociétés routières, la part du
budget de l'Etat, y compris des sociétés autoroutières,
est tout à fait minoritaire -de l'ordre de 20 %. Pour le reste, ce sont
les départements, les communes et l'investissement privé.
Deuxième facteur : les chiffres que j'évoquais concernent
l'ensemble des projets. Il y a de plus en plus, notamment en zone urbaine,
d'ouvrages d'art, de tunnel, etc. et la part de chaussées a tendance
à se réduire. Sur 100 F de projet autoroutier aujourd'hui, le
pourcentage affecté à la chaussée est moindre qu'il y a
dix ou vingt ans.
Troisième facteur : lorsque les projets autoroutiers prennent une place
aussi importante, cela se répercute sur les effectifs. Le nombre
d'emplois est très différent, probablement dans un rapport de 1
à 3 ou 4, voire plus, selon que l'on dépense 100 MF pour
l'entretien des routes nationales ou pour construire uniquement une
chaussée d'autoroute.
M. Jean-Claude Roudé
.- J'attire votre attention sur le
point suivant : puisque nous nous intéressons aux problèmes
économiques de la route, il y a une différence très forte
de comportement actuellement entre le marché routier en France et
à l'étranger.
Le Président Mouliérac nous a dit que les entreprises
françaises avaient une technique qui se vendait bien à
l'étranger. Plusieurs groupes sont fortement implantés. Pour ce
qui concerne mon entreprise, nous aurons cette année presque 40 %
d'activités à l'étranger.
Sur le marché français, nous avons constaté une diminution
en 1996 de l'ordre de 9 % du marché, alors qu'à
périmètre constant, sur les sociétés à
l'étranger, nous avons un accroissement d'activité à deux
chiffres, c'est-à-dire qu'il y a une différence de conjoncture
assez parlante entre ce qui se passe entre le marché routier
français et les secteurs où nous sommes concernés à
l'étranger (en gros l'Amérique du Nord et l'Europe).
M. Le Président
.- Notez-vous une diminution des
crédits de la part des départements et des villes ?
M. Jean-Claude Roudé
.- Oui.
M. Henri Mouliérac
.- Ce sont des chiffres très
difficiles à collecter. La collecte est quelquefois faite par la
Direction régionale de l'Equipement de façon très
efficace, mais malheureusement pas partout. C'est de l'ordre de 4 à 5 %
pour chacun. C'est important, puisque le total de notre activité villes
et départements est de l'ordre de 60 %.
M. Jean-Claude Roudé
.- On connaît assez bien les
chiffres pour les départements. A part les exceptions de ceux qui se
trouvent en face d'un projet très particulier, ils ont une attitude soit
d'être sensiblement stable, soit d'être en diminution, laquelle
diminution peut être parfois forte. La moyenne de l'attitude stable,
faible diminution, ou forte diminution est forcément un résultat
en diminution sensible, mais vraiment variable suivant les départements.
M. Georges Berchet
.- Il est difficile de faire autrement puisque
chacun demande aux maires ou aux conseillers généraux de baisser
la pression fiscale. On ne peut pas faire porter le chapeau par les uns ou par
les autres.
Notez-vous vraiment une baisse ? Vous parlez des crédits
départementaux, mais dans mon département ils sont liés
aux crédits d'Etat, du moins à 50 %.
M. Jean-Claude Roudé
.- Il y a certainement des
départements qui versent des fonds de concours à des routes
nationales, mais en gros il y a des plans Etat Régions qui concernent
les régions et l'Etat et il y a des départements qui votent des
fonds de concours sur d'autres réseaux. La plupart du temps, les
crédits départementaux sont affectés au réseau
départemental et sont des crédits propres du département.
Il y a des exceptions à cela, mais la généralité
des cas est celle-ci.
Celà dit, nous connaissons très bien en effet l'origine de cette
attitude des départements qui n'est probablement pas une volonté
d'ordre politique ou économique, mais le constat qu'ils sont
" coincés " en quelque sorte entre la nécessité
de ne pas augmenter les recettes fiscales et les autres types de
dépenses auxquelles ils sont amenés à faire face.
M. Georges Berchet
.- Est-il normal que l'Etat
récupère la TVA sur 100 % des travaux alors qu'il n'en fait
que la moitié ? Nous en avons parlé aux uns et aux autres. C'est
de l'argent que les départements pourraient mettre ailleurs.
Quand on prend la participation réelle de l'Etat dans
l'aménagement ou l'entretien des routes nationales sous contrat, on
s'aperçoit que l'Etat doit amener quelque 15 à 20 %.
M. Fernand Tardy
.- Non, 9 à 10 % seulement.
M. Georges Berchet
.- Il faut faire une révolution pour
cela. Après on dit qu'il y a des impôts locaux... A-t-on une
chance de faire supprimer cela ?
M. le Président
.- Vous pouvez sûrement essayer. Vous
aurez probablement le soutien d'un certain nombre de vos collègues. Que
vous gagniez la sympathie du gouvernement reste à démontrer, mais
il ne faut jamais désespérer.
Autre question : travaillez-vous beaucoup à l'étranger ?
M. Jean-Claude Roudé
.- En France, deux entreprises
réalisent des chiffres d'affaires de l'ordre de 35 % à
l'étranger. Notre entreprise est implantée aux Etats-Unis, au
Canada, en Espagne, en Angleterre, en République tchèque pour une
implantation principale, en Afrique, dans des pays d'Afrique francophone, et
pour de petites implantations secondaires en Lituanie.
La moyenne de la profession est 17 %.
M. Georges Berchet
.- N'avez-vous pas d'impayés ?
M. Jean-Claude Roudé
.
- Une entreprise qui n'a
jamais d'impayés est certainement une entreprise très heureuse.
Sur l'Afrique, nous avons eu de gros problèmes avant la période
de dévaluation du franc CFA. Sans que l'on puisse considérer que
la situation soit parfaite aujourd'hui et qu'elle ait atteint le niveau de
fiabilité occidental, la situation s'est très fortement
améliorée.
M. Georges Berchet
.- Bénéficiez-vous de la garantie
de la COFACE ?
M. Jean-Claude Roudé
.- En général, non,
parce que nous travaillons pour une part significative de l'activité sur
des crédits internationaux qui présentent des garanties
suffisantes. Mais mêmes les crédits locaux, qui sont une part
maintenant modeste de l'activité, sont beaucoup plus fiables qu'ils ne
l'étaient avant la dévaluation.
M. Georges Berchet
.- Avez-vous des couvertures de la Banque
mondiale ?
M. Jean-Claude Roudé
.- Sur les chantiers qu'elle finance,
mais pas sur les autres. Mais cela passe toujours par l'Etat. C'est un vaste
problème. Il y a des crédits de type occidental (Banque mondiale,
fonds européen de développement, etc...) qui transitent par les
Etats, avec des règlements directs par l'organisme international
correspondant.
Donc au niveau du règlement il n'y a pas de problème, mais si un
conflit surgit entre l'Etat et l'organisme en question -on l'a vu au moment de
la dévaluation du CFA- il peut entraîner une interruption des
paiements de l'organisme international, alors que l'entreprise au-dessous est
complètement piégée par la situation correspondante.
Par contre, quand le règlement intervient, il est direct et donc sans
problèmes significatifs.
M. le Président
.- Messieurs, je vous remercie, vous avez
admirablement tenu votre horaire. Nous vous souhaitons une année 1997
plus prometteuse.