2. Mieux assurer la présence audiovisuelle française en Asie
Des initiatives pourraient donc être prises afin de
renforcer notre présence en Asie :
· une adaptation de notre offre audiovisuelle,
· une meilleure "visibilité" de l'audiovisuel français,
· une réorientation des aides publiques à l'audiovisuel au
bénéfice de l'exportation,
· une réorganisation de notre stratégie audiovisuelle en
Asie.
a) Adapter l'offre audiovisuelle
Il faut, tout d'abord
, porter notre effort sur
l'amélioration des contenus
autant que se préoccuper des
"tuyaux" qui les diffuseront.
1°/ Il faudrait tout d'abord dépasser l'obstacle de la langue.
Les diffuseurs présents dans cette région devraient utiliser
trois vecteurs linguistiques selon la nature de l'émission
: le
français, l'anglais, et la langue locale.
2°/ Il serait indispensable que nos opérateurs (TV5 et CFI)
connaissent mieux leur audience
afin d'affiner leur stratégie de
programmation en fonction du public visé et des résultats
à obtenir.
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°/ Notre offre audiovisuelle devrait être regroupée
et plus cohérente
. En effet, les opérateurs publics envoient
des représentants en Asie sans se concerter, de manière autonome,
en ignorant la stratégie des autres acteurs et, ainsi, en ne profitant
pas des synergies possibles.
Cette situation devrait cesser et le plus
tôt serait le mieux
. De plus, ce qui apparaît séduisant
sur le papier, à Paris, s'apparente souvent, sur place, à du
bricolage
. Entre les décisions stratégiques du Conseil
audiovisuel extérieur de la France et leur mise en oeuvre sur le
terrain, un hiatus existe souvent. Tout d'abord, le distinguo entre CFI et TV5,
entre la chaîne française et la chaîne francophone, entre la
banque d'images et la diffusion directe, tout cela est souvent difficile
à comprendre pour les opérateurs étrangers. En outre, sur
le terrain, la logique TV5-diffusion directe / CFI-diffusion
numérique n'est pas toujours respectée.
4°/ L'offre audiovisuelle devrait être
adaptée au
marché international
.
Le secteur audiovisuel ne saurait constituer une exception à la
règle de base du commerce international : pour être
exportable, un produit doit avoir été conçu et
réalisé selon certaines règles ou normes établies
en fonction des besoins du marché.
Cette maxime est encore plus valable pour l'Asie.
Notre action audiovisuelle extérieure devrait donc être au moins
régionalisée
, sans pour autant se limiter à une
stratégie panasiatique ; le groupe Murdoch a fait les frais d'une
telle stratégie, et il a échoué. Or,
la France est
encore très en retard par rapport à un objectif qui devrait
constituer une priorité absolue, comme le Conseil audiovisuel
extérieur de la France de 1994 l'avait décidé.
L'offre audiovisuelle doit ensuite être
adaptée au format
international
. Les handicaps des programmes audiovisuels français
sont bien connus, et votre rapporteur les a souvent dénoncés :
les formats sont inadaptés au marché international, qui demande
des fictions de 52 minutes alors que nous produisons du 90 minutes, les
fictions que nous proposons ne comptent que 5 ou 6 épisodes alors que
les séries s'achètent par 100 ou plus, les scénarios sont
franco-français, voire "franchouillards", les fictions françaises
sont trop chères, car les cachets sont trop élevés, les
droits d'auteur et les droits voisins handicapent nos exportations de
programmes.
A ces défauts s'ajoutent, s'agissant du marché asiatique,
certaines spécificités : culturellement, il est plus difficile de
montrer des scènes dénudées et certains sujets sont
politiquement sensibles, voire tabous, dans certains pays.
Elle doit ensuite être au moins
régionalisée
. Les
chaînes américaines CNN et NBC diffusent désormais un
programme asiatique depuis Hong Kong. Mais, de même que le concept de
chaîne panasiatique a échoué, il faut se garder de proposer
une offre unique pour toute la région et il conviendrait d'affiner
celle-ci.
En effet, comme l'a vu Star TV, du groupe Murdoch, basée à Hong
Kong a dû abandonner son concept initial de bouquet de programmes
panasiatiques et régionaliser celui-ci en utilisant, dans un premier
temps, deux faisceaux séparés sur AsiaSat 1 : un pour le
sous-continent indien, l'autre pour l'Asie. Dans un second temps, le groupe
envisage de "localiser" davantage ses programmes avec
Star +
destinée au marché japonais, depuis avril 1996,
Chinese
Channel
pour Taïwan ou
Viva Cinema
aux Philippines.
Or,
la France est encore très en retard sur cet objectif qui devrait
constituer une priorité absolue.
Dès 1994, le Conseil audiovisuel extérieur de la France demandait
à TV5 de "
mettre au point sur des satellites régionaux des
grilles de programmes destinées à des publics
différenciés
"
11(
*
)
. Or,
fin 1996, seule la montée
du signal de TV5 sur un satellite régional, Asiasat 2, a
été obtenue, au sein d'un bouquet de programmes européens,
et celle-ci pose encore de nombreux problèmes techniques de reprise.
De même, le rapport Balle note que CFI est critiqué en Asie pour
le caractère trop africain de ses programmes.
Il importe, par ailleurs, que les opérateurs fassent des efforts pour
mieux appréhender leur audience réelle.
Il n'existe aucune raison pour que Star TV, bouquet de programmes du groupe
Murdoch, puisse produire des données concernant son audience
réelle - et non potentielle, comme le font TV5 ou CFI - ce qui
lui permet de justifier ses tarifs publicitaires auprès de ses
annonceurs, alors que les opérateurs français continuent à
se contenter de publier des mesures d'audience potentielle.
Connaître son audience devrait être, pour une chaîne, une
priorité afin d'affiner sa stratégie de programmation en fonction
du public qu'elle vise et des résultats qu'elle obtient.
A cet égard, le début d'implantation de la SOFRES en Chine est
une initiative très intéressante.