2. La coopération multilatérale
Lors d'une audition sur ce projet de réforme, le
docteur Kessler s'est prononcé contre les dispositions visant à
autoriser un médicament sur la base de son autorisation par une grande
agence européenne ou l'EMEA. Tout en étant favorable à
l'harmonisation en cours avec l'Union européenne et le Japon pour
standardiser les exigences, il estime que l'enregistrement d'un
médicament doit rester du ressort de chaque pays.
Un accord de coopération entre la FDA et les autorités
réglementaires du Mexique (SSA) et du Canada (HPB) a été
conclu en mars 1996 afin de renforcer les échanges d'informations entre
les trois pays :
- sur la sécurité des médicaments, les
cosmétiques, les appareils médicaux et les autres produits
réglementés ;
- sur leurs nouvelles lois, propositions de réglementation et
documents techniques en rapport avec les produits réglementés ;
- sur l'évaluation de la sécurité et de la
qualité nutritionnelle des aliments, sur l'efficacité, la
sécurité et la qualité des médicaments et
l'innocuité des produits cosmétiques (protocoles cliniques, AMM,
bioéquivalence).
La coopération portera également sur la recherche de positions
communes lors des réunions avec les organisations nationales et sur le
développement des programmes de protection du consommateur contre la
fraude dans le domaine de la santé ainsi que les programmes de recherche.
3. Les projets de réforme de la FDA
Les critiques généralement adressées
à la FDA ne portent ni sur la qualité de son expertise, ni sur
l'efficacité de ses procédures, mais sur le caractère
bureaucratique de ses méthodes, qui allongent indûment les
délais d'examen des demandes qui lui sont adressées par les
industriels.
A cet égard, les rencontres de la délégation ont
été fort instructives.
S'agissant du jugement des entreprises américaines, l'analyse des cadres
dirigeants de la compagnie Monsanto sur les agences d'autorisation et du
contrôle des produits thérapeutiques est sévère :
- le système américain d'autorisation des produits est flexible
mais ses délais sont excessifs ;
- le système japonais d'autorisation des produits est très
rigide, mais ses délais sont convenables ;
- la flexibilité de l'un tient à la qualité d'une
expertise scientifique qui manque cruellement à l'autre ;
- les systèmes européens empruntent au Japon la rigidité
des méthodes et aux Etats-Unis l'incertitude des délais ;
- les procédures européennes étant ainsi définies,
l'expertise scientifique française se distingue par sa qualité.
Ce jugement tranche avec les réactions de certains industriels
français.
Nos compatriotes sont en effet attachés à des rapports
très réglementés avec leur administration de tutelle ou de
contrôle.
Les méthodes américaines leur paraissent, à cet
égard, souvent surprenantes.
Lorsque la réussite est au bout de ces rapports, ils jugent
évidemm40nt l'agence américaine comme un modèle
d'organisation et de fonctionnement. Tel est le cas des Laboratoires Fabre, qui
ont obtenu récemment l'homologation de l'un de leurs produits de lutte
contre le cancer.
En revanche, lorsque l'échec est au bout des procédures, les
condamnations sont sévères. D'une manière
générale, il n'est pas besoin de rappeler ici le procès
inscrit contre la FDA, accusée de constituer l'un des instruments
essentiels du protectionnisme américain.
La délégation n'ayant pas d'autre objet que d'étudier la
qualité, du point de vue de la sécurité sanitaire, des
travaux de l'agence, n'a pas choisi d'instruire à son tour un tel
procès dans lequel elle n'entend pas prendre partie.
Compte tenu de ces critiques, le congrès a, à de multiples
reprises, tenté d'engager une réforme de l'agence. Ces tentatives
se sont faites plus pressantes dans la période récente, sous la
pression de la doctrine ultra libérale développée par
certaines tendances du Parti Républicain.
L'évolution interne de la FDA est marquée par des
restructurations fréquentes reflétant une volonté
d'assurer une adaptation constante face à un contexte industriel et
socio-économique évoluant avec une grande rapidité.
Les principales propositions ont visé notamment :
* à redéfinir le rôle de l'Agence :
- faciliter le développement rapide et la disponibilité de
produits efficaces et sans danger ;
- protéger le public contre la dissémination de produits
dangereux et inefficaces ;
- mettre en place des statuts et réglementations applicables en
temps utile, d'une manière juste, cohérente et catégorique.
* à favoriser un examen accéléré des dossiers
d'enregistrement :
Le dossier ne comprendrait que des données synthétiques
" certifiées exactes par le demandeur ".
* à permettre la promotion de produits hors indications :
La FDA ne pourrait interdire la promotion ou l'étiquetage d'indications
non approuvées que s'il était déterminé,
après audition, que cela entraîne une utilisation dangereuse ou
inefficace du produit.
* à simplifier des procédures pour débuter des essais
cliniques ;
* à simplifier des procédures en cas de changements dans le
processus de fabrication ;
* à l'utilisation d'organismes extérieurs à la FDA ;
* à l'harmonisation des réglementations concernant les
médicaments et les produits biologiques ;
* à la mise en place de structures de contrôle et
d'évaluation de la FDA.
*
* *
Quelles conclusions tirer, pour la France, de
l'activité de la FDA ?
La question du champ de compétences de l'agence est d'abord
décisive. A cet égard, le secrétaire d'Etat adjoint
à la santé, M. Philip Lee, qui a reçu la
délégation, estime que " si cela était à
refaire ", il distinguerait volontiers le contrôle des produits
alimentaires de celui des produits thérapeutiques. Il reste que les
produits " frontières " posent question, qu'il s'agisse, par
exemple, des produits cosmétiques ou encore des produits
diététiques. Il semble que l'efficacité et le
réalisme imposeront, au moins dans un premier temps, un champ de
compétences restreint aux seuls produits thérapeutiques.
L'intérêt d'une agence unique pour tous les produits
thérapeutiques tient, ensuite, à l'unité des principes et
de la méthode, qui n'interdit évidemment pas la diversité
des procédures pour tenir compte de la variété des
produits.
Il ne faut pas, enfin, confondre le contrôle de l'autorisation des
produits avec la veille sanitaire, dont le champ est plus large et souvent
différent.