B. UNE MULTIPLICITÉ D'ORGANISMES ASSUME, DIRECTEMENT OU NON, DES MISSIONS DE VEILLE SANITAIRE : MAIS ILS TRAVAILLENT ISOLÉMENT, SANS PROCÉDURE DE COORDINATION OU D'ALERTE ORGANISEE
Au cours de leurs travaux, les membres de la mission ont pris
la mesure de la multiplicité d'organismes susceptibles, à un
titre ou un autre, directement ou non, d'assumer des missions de veille
sanitaire. Elle a tenté un recensement, tout en étant consciente
du caractère nécessairement incomplet d'une telle
opération. Les ministres chargés de la santé, de
l'économie et des finances, de l'environnement, de l'industrie et de
l'agriculture ont été sollicités par la mission afin de
recenser ceux de ces organismes qui leur sont rattachés.
Ces organismes sont de statuts divers, et ils sont rattachés à
des ministères différents. L'audition de responsables de beaucoup
d'entre eux a donné aux membres de la mission le sentiment que chacun
faisait un bon travail, disposait de personnels compétents et oeuvrait
dans l'intérêt commun. Mais ces auditions ont également
montré l'extrême cloisonnement entre la plupart des organismes,
dont chacun ignore l'activité des autres. Elles ont également
montré leur isolement et la faiblesse des procédures d'alerte
.
Outre la Direction générale de la santé, ont
été relevés parmi les organismes situés dans
l'orbite du ministère de la santé, les observatoires
régionaux de la santé, les centres de référence
contre les maladies transmissibles ou l'Office de protection contre les
rayonnements ionisants, qui conseille les pouvoirs publics sur les mesures
à prendre en cas d'accident ou d'incident dû à des
rayonnements ionisants et assure à cet effet une veille permanente. Cet
organisme a mis en place un réseau de prélèvements sur
l'ensemble du territoire et un réseau de surveillance du rayonnement
ambiant (TELERAY).
Participent aussi à la veille, la commission de toxicovigilance et le
réseau national de toxicovigilance, ainsi que le Haut comité de
la santé publique, qui a pour mission de développer l'observation
de la santé de la population et le Comité supérieur
d'hygiène publique de France, qui a notamment pour mission d'exercer des
missions d'expertise en matière de prévision, d'évaluation
et de gestion des risques pour la santé de l'homme. L'on peut
également citer la commission nationale de médecine et de
biologie de la reproduction et du diagnostic prénatal, qui remet chaque
année au ministre un rapport portant sur l'évolution de la
médecine et de la biologie dans ces deux secteurs.
La veille sanitaire est également une préoccupation de l'INSERM
qui mène des recherches en santé publique. Ainsi, son directeur
général, le Pr Claude Griscelli, a récemment
déclaré : " jusqu'à présent, les instances
d'évaluation scientifiques intervenaient déjà en
établissant à chaque début de mandat quadriennal un
rapport de conjoncture et de prospective fort apprécié, mais il
peut se passer beaucoup de choses en quatre ans ! J'ai donc souhaité que
ces instances repèrent au fur et à mesure de l'évaluation
scientifique des équipes et des hommes, les éléments
nouveaux pour pouvoir diffuser des informations utiles à la
veille. " Les recherches menées par le CNRS peuvent aussi
être utilisées dans la veille sanitaire.
Le ministère de l'environnement dispose également d'organismes
impliqués dans la veille sanitaire : il en est ainsi de l'Institut
national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), de l'Institut
de la protection et de la sûreté nucléaire et de l'Agence
de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
Du côté du ministère de l'Economie et des Finances, la
Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes (DGCCRF) assure la surveillance des produits dans
le cadre de sa mission générale de protection de la
sécurité des consommateurs. La DGCCRF participe en outre à
plusieurs organismes consultatifs, tels que la Commission de Technologie
Alimentaire, chargée d'évaluer les pratiques et
procédés dans la fabrication et la conservation des
denrées alimentaires, la Commission interministérielle
d'étude des produits destinés à une alimentation
particulière, qui donne son avis pour les questions relatives à
la réglementation des produits diététiques et son
application, ou la Commission interministérielle et interprofessionnelle
de l'alimentation animale, qui examine les dossiers d'autorisation des additifs
et leurs conséquences pour les consommateurs.
La Commission de la sécurité des consommateurs est un organisme
indépendant, mais auprès duquel le DGCCRF exerce la fonction de
commissaire du Gouvernement. Malgré des compétences très
larges, cet organisme, dont la qualité des travaux est reconnue, se
focalise de plus en plus sur les accidents domestiques.
En matière agricole et alimentaire, il convient de citer l'INRA, le
CNEVA, la commission de technologie alimentaire, la commission nationale des
labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires, la
commission nationale de l'alimentation, la commission d'étude de la
toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole et
assimilés, des matières fertilisantes et supports de culture ou
le Conseil National de la Consommation.
L'Observatoire des Consommations Alimentaires, institué par un
arrêté du 8 juin 1990, a pour mission d'améliorer la
connaissance de la structure de la consommation alimentaire, de façon
à fournir aux pouvoirs publics les éléments d'information
leur permettant d'apprécier les risques que peuvent comporter les
consommations alimentaires pour la santé de l'homme.
Les organismes sociaux ont aussi mis en place des organismes qui oeuvrent en
faveur de la veille sanitaire : il en est ainsi de l'IRNS, à Nancy, en
matière de sécurité du milieu de travail.
Enfin, se fondant sur les dispositions du Traité de Maastricht, une
série de programmes concernant la santé publique a
été mise en oeuvre au niveau européen. Trois programmes
ont déjà été adoptés par le Parlement et le
Conseil : il s'agit du programme général d'information,
d'éducation et de formation à la santé, du programme de
prévention contre le Sida et du plan d'action contre le cancer. Le 18
juin 1996 a en outre été adoptée une position commune en
vue de l'adoption de la décision du Parlement et du Conseil adoptant un
programme d'action communautaire en matière de surveillance de la
santé publique.
La multiplicité des organismes de veille sanitaire ne constitue pas, en
soi, un obstacle à la conduite d'une veille sanitaire performante. On
pourrait même prétendre le contraire, à condition que ces
organismes couvrent l'ensemble du champ de la santé de la population,
que leur action soit coordonnée et qu'ils participent à un
système d'alerte efficace : ce n'est pas le cas aujourd'hui.