B. DEUXIÈME PARTIE : SUIVI DÉTAILLÉ DE L'APPLICATION DE LOIS DE L'ANNÉE PARLEMENTAIRE 2022-2023 RELEVANT DE LA COMPÉTENCE DE LA COMMISSION DES LOIS

1. Loi n° 2022-1348 du 24 octobre 2022 visant à actualiser le régime de réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce

Issue d'une initiative de la sénatrice Nathalie Goulet, la loi n° 2022-1348 du 24 octobre 2022 s'inscrit dans la lignée de la loi n° 2021-1317 du 11 octobre 2021 corrigeant une malfaçon héritée de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, dite loi PACTE, en ce qu'elle privait d'éligibilité les membres en exercice et anciens membres du tribunal de commerce concerné ou des tribunaux limitrophes.

L'article unique supprime la condition de double inscription des candidats sur la liste des électeurs de la chambre de métiers et de l'artisanat et sur celle de la chambre de commerce et d'industrie, disposition qui avait pour conséquence de réserver depuis 2019 la candidature aux seuls artisans doublement inscrits.

Ce texte élargit, à compter du 1er janvier 2023, les conditions de recrutement des juges consulaires en ouvrant la candidature, d'une part aux cadres qui exercent des fonctions impliquant des responsabilités de direction commerciale, technique ou administrative situés dans le ressort du tribunal de commerce ou dans le ressort des tribunaux limitrophes et, d'autre part, aux membres en exercice des tribunaux de commerce ainsi qu'aux anciens membres de ces tribunaux ayant exercé les fonctions de juge de tribunal de commerce pendant au moins six années, étant précisé que ces candidats doivent disposer d'une résidence dans le ressort du tribunal où ils candidatent ou dans le ressort des tribunaux limitrophes.

Enfin, il rectifie des erreurs de plumes et ajoute à la liste des incompatibilités l'ouverture d'une procédure de sauvegarde judiciaire en sus des procédures de redressement et de liquidation judiciaires.

*

La loi n° 2022-1348 du 24 octobre 2022 visant à actualiser le régime de réélection des juges consulaires dans les tribunaux de commerce est d'application directe.

2. Loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur

La loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur a été promulguée par le 24 janvier 2023 et publiée dès le lendemain au Journal officiel de la République française.

Cette loi comprend plusieurs dispositions majeures pour la transformation, singulièrement numérique, du ministère de l'intérieur et des outre-mer et le renforcement des moyens budgétaires et judiciaires à disposition des forces de sécurité intérieure. Certaines des dispositions adoptées par le Parlement ont été censurées par le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 2022-846 DC du 19 juin 2024.

Sur les 29 articles que compte la loi, 25 articles sont d'application directe - y compris l'article 1er qui emporte l'adoption du rapport annexé comportant lui-même plusieurs mesures d'application - et 4 articles, les articles 11, 12, 17 et 18 prévoient six mesures d'application règlementaire.

Au 31 mars 2024, deux mesures d'application n'ont pas été publiées, sur les six prévues, soit un taux d'application de 60 %.

a) Les principales dispositions de la loi

La loi est structurée en cinq titres, répondant chacun à des préoccupations distinctes, bien que liées à l'objectif général de renforcement des moyens à disposition des forces de sécurité intérieure pour mener leurs missions. Ainsi, le titre Ier fixe les objectifs et moyens du ministère, le titre II comporte des dispositions relatives « à la révolution numérique du ministère », le titre III fixe les dispositions relatives à l'accueil des victimes, le titre IV vise à « anticiper les menaces et les crises » et le dernier titre comporte classiquement les dispositions relatives à l'outre-mer.

L'article 1er approuve le rapport annexé au projet de loi qui définit les grands axes de modernisation du ministère de l'intérieur, largement amendé au cours de l'examen du texte - à 36 reprises au Sénat et 148 reprises à l'Assemblée nationale. Bien que dans le rapport annexé renvoie lui-même à plusieurs mesures d'application, cet article 1er est d'application directe.

L'article 2, à caractère programmatique, détermine l'évolution du budget du ministère de l'intérieur pour les années 2023 à 2027, en passant de 22 milliards d'euros en 2022 à 25,3 milliards d'euros en 2027, soit un accroissement cumulé des moyens de 15 milliards d'euros.

L'article 3 permet aux officiers de police judiciaire, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction, de procéder à des saisies d'actifs numériques.

L'article 4 vise à faciliter la répression des plateformes numériques facilitant les transactions d'objets illicites et permettre, dans ce cadre, l'utilisation des techniques spéciales d'enquête prévues par l'article 706-73-1 du code de procédure pénale.

L'article 5 encadre les clauses de remboursement des cyber-rançons par les assurances, en le conditionnant au dépôt d'une plainte par la victime dans les quarante-huit heures suivant le paiement.

L'article 6 renforce les sanctions en cas d'atteinte à un système de traitement automatisé de données.

L'article 7 étend le champ de la circonstance aggravante de bande organisée en cas d'atteinte à un système de traitement automatisé de données (STAD), en supprimant la restriction qui la limitait aux seules infractions commises à l'encontre d'un STAD à caractère personnel mis en oeuvre par l'État.

L'article 8 vise à préciser les éléments constitutifs des infractions visant à initier des cyber-attaques à l'encontre des hôpitaux et services de secours.

L'article 9 étend la possibilité de recourir à une ordonnance pénale en cas d'accès et de maintien frauduleux dans un système de traitement automatisé de données.

L'article 10 complète la liste des actes autorisés dans le cadre des enquêtes sous pseudonyme, afin de faciliter le recours à la technique du « coup d'achat ».

L'article 11 habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance pour engager les modifications du code des postes et des communications électroniques (CPCE) nécessaires au déploiement du projet « réseau radio du futur ».

L'article 12 insère dans le code de procédure pénale une nouvelle procédure permettant aux victimes d'une infraction pénale de déposer plainte par un moyen de télécommunication audiovisuelle. Il simplifie également les règles relatives à l'établissement du procès-verbal s'agissant du recours à la visioconférence en procédure pénale.

L'article 13 vise à améliorer l'accueil des victimes en permettant à l'avocat de poser des questions à l'issue de chacune des auditions de la victime et à présenter des observations écrites à l'issue de l'audition de dépôt de plainte. 

L'article 14 renforce la répression de l'outrage sexiste aggravé, actuellement puni d'une contravention de la 5e classe, qui devient un délit puni de 3 750 euros d'amende. En complément, l'infraction d'outrage sexiste simple, qui est puni d'une contravention de la 4e classe, devrait quant à lui être modifié par voie réglementaire pour être réprimé par une contravention de la 5e classe.

L'article 15 introduit par la commission des Lois du Sénat, à l'initiative d'un des deux rapporteurs, Marc-Philippe Daubresse, afin de renforcer les peines encourues par les auteurs de violences sur les élus, de rodéos motorisés ou de refus d'obtempérer a été censuré par le juge constitutionnel en ce qu'il constituait un « cavalier législatif ».

L'article 16 étend le recours aux techniques spéciales d'enquête pour les homicides et viols sériels, la recherche de certains fugitifs et l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de faiblesse qui réprime notamment l'emprise sectaire et qui voit également ses peines aggravées.

L'article 17 permet aux policiers et gendarmes sortis d'école de passer directement l'examen d'officier de police judiciaire (OPJ) à l'issue de leur formation initiale, en supprimant les trois années d'ancienneté actuellement nécessaires pour se présenter à cet examen. Les lauréats pourront ensuite, après 30 mois de service dont 6 dans un service d'enquête, être habilités pour exercer les prérogatives d'OPJ.

L'article 18 crée un nouvel acteur de la procédure pénale, les assistants d'enquête, chargés de suppléer les officiers de police judiciaire et les agents de police judiciaire dans la réalisation de certaines formalités procédurales.

L'article 19 octroie la qualité d'agent de police judiciaire à l'ensemble des militaires de la gendarmerie nationale n'ayant pas celle d'officier de police judiciaire, à l'exception des réservistes. Il permettra ainsi aux élèves officiers de la gendarmerie nationale d'avoir cette qualité dès leur formation initiale.

L'article 20 supprime l'obligation, pour les enquêteurs, de procéder à une réquisition judiciaire lorsqu'ils sollicitent les services et organismes de police technique et scientifique.

L'article 21 prévoit que l'absence de mention, en procédure, de l'habilitation d'un agent à consulter un fichier n'est plus, par elle-même, une cause de nullité, le magistrat pouvant d'office ou à la demande des parties vérifier la réalité de l'habilitation.

L'article 22 étend de façon encadrée les hypothèses de consultation des traitements automatisés de données à caractère personnel de la police et de la gendarmerie.

L'article 23 étend, à travers une liste exhaustive, le champ des réquisitions susceptibles d'être réalisées dans le cadre d'instructions générales du parquet lors d'une enquête préliminaire.

L'article 24 vise à étendre les prérogatives des agents de police judiciaire (APJ) en leur permettant de réaliser certains actes en matière de réquisitions, de constatations et d'informations, sous le contrôle d'un officier de police judiciaire

L'article 25 étend le champ d'application de la procédure de l'amende forfaitaire délictuelle (dans sa version initiale, aux délits punis d'une peine d'emprisonnement n'excédant pas un an ou d'une seule peine d'amende).

L'article 26, introduit par le Sénat, modifiant les éléments constitutifs du délit de menace, en supprimant l'exigence de réitération ou de matérialisation de la menace pour qu'une sanction soit encourue a été déclaré contraire à la Constitution par le juge constitutionnel.

L'article 27 du projet de loi permet au préfet de département, lors d'événements d'une particulière gravité et sur autorisation du préfet de zone, de diriger l'action de l'ensemble des services et établissements publics de l'État ayant un champ d'action territorial, alors placés pour emploi sous son autorité, pour les seules mesures liées à la gestion de la situation.

Le Sénat a écrit directement dans l'article 28 les dispositions nécessaires à l'application et à l'adaptation du projet de loi dans les territoires ultramarins. Cet article est, dès lors, d'application directe.

Enfin, l'article 29 prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement de deux rapports d'évaluation des politiques publiques en matière de cybersécurité.

b) La publication des mesures réglementaires d'application

La loi prévoit l'édiction de 6 mesures d'application relevant d'un décret en Conseil d'État. Au 31 mars 2024, 4 mesures ont fait l'objet d'un texte d'application (soit un taux d'application de 60 %).

Ainsi, l'article 11 prévoit deux mesures d'application réglementaire. La première mesure d'application de la loi concerne les modalités de compensation des investissements identifiables et spécifiques mis en oeuvre en application du I de l'article L. 34-16 du CPCE, à la demande de l'Etat, par les opérateurs titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences pour établir et exploiter un réseau radioélectrique ouvert au public, sauf dans les cas où ces prestations ont fait l'objet d'un marché public (2° de l'article 11 de la loi). Celle-ci, bien qu'annoncée dans l'échéancier publié par le Gouvernement pour octobre 2023, n'a pas encore été publiée.

La deuxième mesure d'application de la loi concerne les conditions d'application du II de l'article L. 34-17 du CPCE, relatif à l'Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours notamment la composition du conseil d'administration, les conditions et les modalités de désignation de ses membres, les modalités de fonctionnement du conseil d'administration ainsi que ses attributions et celles du directeur (2° de l'article 11 de la loi) a été prise le 30 mars 2023487(*). En effet, le décret n° 2023-225 crée un établissement public administratif de l'Etat chargé d'assurer la conception, le déploiement, la maintenance et le fonctionnement des services mutualisés de communication mobile critique très haut débit pour les seuls besoins des missions de sécurité, de secours, de protection de la population et de gestion des crises et des catastrophes à la demande de l'Etat, des collectivités territoriales, des services d'incendie et de secours, des services d'aide médicale urgente et de tout organisme public ou privé chargé de mission de service public et d'intérêt général dans ces domaines. En conséquence, l'article 11 est partiellement applicable.

De façon analogue, l'article 12, relatif au dépôt de plainte par voie de télécommunication audiovisuelle comporte deux mesures d'application réglementaire dont seule une a été prise. La première mesure d'application porte sur les modalités d'application de l'article 15-3-1-1 du code de procédure pénale (CPP), notamment les infractions auxquelles la procédure prévue audit article est applicable et les modalités d'accompagnement de la victime qui y a recours (1° de l'article 12 de la loi). Celle-ci a été prise le 23 février 2024488(*). Ainsi, toute victime d'une infraction pénale peut désormais déposer plainte et voir sa déposition recueillie par les services ou unités de police judiciaire par un moyen de télécommunication audiovisuelle garantissant la confidentialité de la transmission. Ce procédé reste néanmoins facultatif, la victime disposant, à tout moment et en toute circonstance, du droit de déposer plainte dans un service de police ou une unité de gendarmerie de son choix. Les enquêteurs peuvent également procéder à une audition ultérieure en sa présence, si la nature ou la gravité des faits le justifie. Cependant, cette possibilité devient obligatoire en cas de plainte portant sur des infractions d'agressions sexuelles ou d'atteintes sexuelles.

Toutefois, la seconde mesure d'application portant sur les modalités de traitement des données à caractère personnel issues de la procédure de dépôt de plainte prévue à l'article 15-3-1-1 du CPP (1° de l'article 12 de la loi) n'a toujours pas été prise. Par conséquent, l'article 12 n'est pas pleinement applicable au 31 mars 2024.

L'article 17 de la loi modifie l'article 16 du code de procédure pénale afin d'autoriser un gardien de la paix en formation initiale et un élève sous-officier de gendarmerie à se présenter à l'examen technique d'officier de police judiciaire à l'issue de leur scolarité et substitue par conséquent aux trois ans de service pour pouvoir être habilité officier de police judiciaire (OPJ), un délai de 30 mois à compter de l'entrée en formation initiale, dont au moins 6 mois d'affectation dans un emploi comportant l'exercice d'attributions attachées à la qualité d'agent de police judiciaire, pour être habilités en tant qu'OPJ. Le décret allégeant les conditions d'ancienneté requises pour bénéficier de l'habilitation « OPJ » a été pris le 4 mai 2023489(*). Il prend également en compte les modifications d'organisation de la gendarmerie nationale, notamment les compétences désormais dévolues au commandant des écoles de la gendarmerie nationale. Par conséquent, cet article est pleinement applicable.

Enfin l'article 18, instituant la fonction d'assistant d'enquête, est pleinement applicable depuis la publication du décret n° 2023-747 du 9 août 2023 relatif aux assistants d'enquête490(*). Ce dernier précise les modalités encadrant leur affectation, celles relatives à la prestation de serment préalable à l'exercice de leurs missions ainsi que celles relatives aux modalités de transcription d'enregistrements issus d'interceptions de correspondances émises par la voie de télécommunications et de données recueillies dans le cadre de la mise en oeuvre de techniques spéciales d'enquête.

*

La loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur est partiellement applicable.

3. Loi n° 2023-23 du 24 janvier 2023 visant à permettre aux assemblées d'élus et aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d'un mandat électif public victime d'agression

La loi n° 2023-23 du 24 janvier 2023 visant à permettre aux assemblées d'élus et aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d'un mandat électif public victime d'agression a été adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 18 janvier 2023, dans la rédaction issue du Sénat qui a adopté le texte le 15 novembre 2022. Déposée à l'initiative de la sénatrice Nathalie Delattre, le texte vise à lutter contre la recrudescence d'incivilités, de faits de harcèlement et d'agressions à l'égard des élus locaux, en permettant à ces derniers d'être soutenus dans l'engagement d'une procédure pénale par les assemblées et associations d'élus.

L'article 1er de la loi n°2023-23 élargit le champ de l'article 2-19 du code de procédure pénale. Son dispositif initial prévoyait que toute association départementale des maires affiliée à l'Association des maires de France (AMF) et répondant à certaines conditions pouvait exercer les droits reconnus à la partie civile dans les instances introduites par les élus municipaux à la suite d'injures, d'outrages, de diffamations, de menaces ou de coups et blessures à raison de leurs fonctions. Le dispositif de l'article 2-19 tel que résultant de sa rédaction issue de la loi n°2023-23 élargit le nombre d'associations pour lesquelles s'ouvre la possibilité de se porter civile en cas d'agression d'un élu : sont désormais concernées l'AMF elle-même, l'Assemblée des départements de France et Régions de France, ainsi que les assemblées parlementaires et les assemblées territoriales au titre d'un de leur membre. Le champ des personnes concernées par le dispositif est également élargi : aux maires s'ajoutent désormais les conseillers départementaux et régionaux, ainsi que les membres de leur famille. Les élus peuvent en outre faire valoir les agressions subies au titre de leur mandat et non plus seulement de leurs fonctions. Enfin, l'article 1er élargit le champ des infractions : les infractions précitées sont complétées par les cas d'infractions prévues aux livres II ou III du code pénal, au chapitre III du titre III du livre IV du même code ou par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.

L'article 2 modifie les dispositions de l'article 804 du code de procédure pénale relatif à l'application dudit code dans les outre-mer et permet l'application des dispositions de la loi n°2023-23 en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

*

La loi n° 2023-23 du 24 janvier 2023 visant à permettre aux assemblées d'élus et aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, une personne investie d'un mandat électif public victime d'agression est d'application directe.

4. Loi n° 2023-55 du 2 février 2023 sur le déroulement des élections sénatoriales

La loi n° 2023-55 du 2 février 2023 sur le déroulement des élections sénatoriales a été adoptée en lecture définitive par l'Assemblée nationale le 25 janvier 2023, à l'occasion d'un vote conforme avec le texte adopté par le Sénat selon la procédure de législation en commission491(*) le 30 novembre 2022 puis en séance publique le 6 décembre 2022.

Cette loi apporte des aménagements aux règles de droit commun en matière de propagande électorale, de communication des résultats et de financement des dépenses électorales de manière à tenir compte de la spécificité du scrutin sénatorial492(*). Elle a trouvé à s'appliquer pour la première fois lors des élections sénatoriales du 24 septembre 2023.

L'article 1er a ainsi prévu la non-application aux élections sénatoriales des articles L. 49 et L. 52-2 du code électoral, de manière à rétablir les conditions de diffusion des résultats telles qu'elles existaient avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 ; en conséquence, les résultats du premier tour des scrutins majoritaires peuvent être à nouveau communiqués dès la fin de la matinée - le scrutin étant clos à 11 heures -, tandis que les résultats des scrutins proportionnels et ceux du second tour des scrutins majoritaires sont diffusés au fur et à mesure de la proclamation des candidats élus. L'article 1er a également pour conséquence de rétablir, pour les candidats élus au premier tour dans les départements concernés par le scrutin majoritaire, la possibilité de mener des actions de propagande entre la proclamation des résultats du premier tour et l'ouverture du second tour.

L'article 2 assure l'éligibilité au remboursement des dépenses de campagne engagées par les candidats aux élections sénatoriales entre les deux tours de scrutin lorsque ceux-ci ont lieu le même jour.

L'article 3 étend l'application de la loi aux territoires d'outre-mer.

*

La loi n° 2023-55 du 2 février 2023 sur le déroulement des élections sénatoriales est d'application directe.

5. Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation du droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture

Le projet de loi n° 140 (2022-2023) portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture a été renvoyé à la commission des affaires sociales. La commission des lois a toutefois bénéficié d'une délégation au fond pour les articles 13, 14, 15, 21, 22 et 30 de la loi finalement adoptée.

L'article 13 de la loi a habilité le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive (UE) 2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 modifiant la directive 2017/1132 concernant les transformations, fusions et scissions transfrontalières. L'objectif poursuivi par le législateur européen est de garantir la liberté d'établissement des entreprises au sein du marché intérieur de l'Union européenne en harmonisant les règles relatives à leur mobilité. Le Gouvernement a pris l'ordonnance n° 2023-393 le 24 mai 2023 portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales. Enfin, le I de l'article 4 du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, déposé au Sénat le 15 novembre 2023, vient ratifier l'ordonnance précitée.

L'article 14 de la loi a modifié les articles L. 223-42 et L. 225-248 du code de commerce qui prévoyaient initialement, pour les sociétés anonymes et les sociétés à responsabilité limitée, que dans le cas où les capitaux propres d'une société deviennent inférieurs à la moitié de son capital social, l'assemblée générale des actionnaires ou les associés doivent se réunir rapidement pour décider de dissoudre ou non la société. En cas de non dissolution, la société a alors deux ans pour remédier à la situation, faute de quoi toute personne intéressée est en droit de demander sa dissolution. La nouvelle rédaction de ces articles modifie la nature de la sanction de dissolution, en la remplaçant par l'obligation d'apurer les pertes par une réduction du capital social, jusqu'à un minimum qui a été fixé par le décret en Conseil d'État n° 2023-657 du 25 juillet 2023 fixant les seuils prévus aux articles L. 223-42 et L. 225-48 du code de commerce. Le seuil de l'article L. 223-42 du code de commerce a été fixé à 1 % du total du bilan de la société constaté lors de la dernière clôture d'exercice et celui prévu pour l'article L. 225-48 du code de commerce est identique en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires imposant un capital social minimal ; dans le cas contraire, ce seuil correspond à la valeur la plus élevée entre 1 % du total du bilan de la société, constaté lors de la dernière clôture d'exercice, et le montant de capital social minimal associé à la forme sociale de la société.

L'article 15 de la loi a complété la transposition, jugée partielle par une récente décision du Conseil d'État, des directives 2014/23/UE et 2014/24/UE relatives au droit de la commande publique, en étendant à certaines infractions pénales entraînant une exclusion de plein droit des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession le mécanisme de régularisation prévu par lesdites directives. Cet article est d'application directe.

L'article 21 de la loi crée un droit à l'information pour les agents publics. D'application directe, il a néanmoins donné lieu à la publication du décret en Conseil d'État n° 2023-845 du 30 août 2023 relatif à la communication aux agents publics des informations et règles essentielles relatives à l'exercice de leurs fonctions.

L'article 22 de la loi vise à rendre applicables aux personnels médicaux des établissements publics de santé les dispositions de transposition de la directive (UE) 2019/1152 relative à des conditions de travail transparentes et prévisibles dans l'Union européenne introduites à l'article L. 115-7 du code général de la fonction publique par l'article 21 de la loi. Cet article est d'application directe.

L'article 30 de la loi modifie le dernier alinéa de l'article L. 221-3 du code de l'action sociale et des familles afin d'intégrer un renvoi au règlement (UE) n° 2019/1111 du 25 juin 2019, entré en vigueur le 1er août 2022, dans la mesure où il vient remplacer le règlement (CE) 2201/2003 du 27 novembre 2003. Cet article est d'application directe.

6. Loi n° 2023-222 du 30 mars 2023 visant à ouvrir le tiers financement à l'État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique

Issue d'une initiative du groupe Renaissance à l'Assemblée nationale, la loi n° 2023-222 du 30 mars 2023 vise à accompagner l'investissement de l'État, de ses établissements publics et des collectivités territoriales pour la rénovation énergétique de leurs bâtiments. Afin d'assouplir les conditions financières de mise en oeuvre des contrats de performance énergétique (CPE), elle créé, pour une durée de cinq ans, une expérimentation permettant à la puissance publique de déroger au code de la commande publique et ainsi de recourir au tiers financement pour les CPE sous la forme de marché global de performance.

a) Les principales dispositions de la loi

L'article 1er instaure à titre expérimental un nouveau dispositif juridique dérogeant à certains articles du code de la commande publique afin de permettre de recourir au paiement différé dans le cadre d'un marché global de performance. Il ouvre ainsi la possibilité pour les personnes publiques d'avoir recours au tiers financement pour la réalisation de travaux de rénovation énergétique et de mettre à profit les économies engendrées pour la prise en charge du coût de ces derniers.

L'article 2 comporte des mesures additionnelles visant à clarifier le régime applicable aux marchés conclus en application de l'article 1er, sur le modèle du régime applicable aux marchés de partenariats. Il prévoit des conditions spécifiques de recours au contrat telles que l'analyse de la soutenabilité financière du projet ainsi que la réalisation d'une étude préalable démontrant l'intérêt du recours au dispositif.

L'article 3 prévoit la transmission par le Gouvernement au Parlement d'un rapport d'évaluation de l'expérimentation dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi.

L'article 4 ouvre la possibilité pour les structures de mutualisation publiques - les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), les syndicats d'énergie et la métropole de Lyon - de prendre part à la réalisation des études et des travaux de rénovation énergétique des bâtiments publiques, ainsi que d'en assurer le tiers financement.

L'article 5 prévoit l'application de la loi en Polynésie française, en Nouvelle Calédonie, dans les îles Wallis et Futuna, régies par le principe de spécialité législative.

b) Une loi pleinement applicable par la publication des mesures d'application réglementaire

Sur les 5 articles que compte la loi, 4 sont d'application directe, seul l'article 2 prévoyant trois mesures d'application réglementaire. Au 25 mars 2024, la loi n° 2023-222 est pleinement applicable, les trois mesures d'application ayant été publiées.

Pris en application de la division IV de l'article 2 de la loi, le décret n° 2023-913 du 3 octobre 2023 détaille, premièrement, les modalités d'application relative à l'étude préalable au recours au contrat :

- il mentionne l'ensemble des éléments devant figurer au sein de l'étude préalable au recours au contrat institué à l'article 3 de la loi ;

- il confie la réalisation de l'étude à l'acheteur chargé de conduire le projet ;

- il précise que l'évaluation du mode de réalisation du projet est soumise pour avis à un organisme expert créé par voie réglementaire.

Il convient néanmoins de relever que l'article 2 de la loi n° 2023-222 ainsi que l'article 3 du décret n° 2023-913 désignent l'organisme expert comme étant celui « mentionné à l'article L. 2212-2 du code de la commande publique », or l'article L. 2212-2 renvoie lui-même la création d'un organisme expert à une mesure d'application, n'ayant pas encore été prise.

Le décret n° 2023-913 du 3 octobre 2023 fixe également les conditions de lancement de la procédure de passation mentionnées à la division VI de l'article 2. Il confie aux ministres chargés du budget et de l'économie l'autorisation de lancement de la procédure de passation d'un marché global de performance énergétique à paiement différé pour les projets de l'État et de ses établissements publics.

Enfin, en application de la division XI de l'article 2, le même décret définit les conditions de signature des marchés globaux de performance par l'État et ses établissements publics. L'article 8 du décret n° 2023-913 du 3 octobre 2023 indique que le marché global de performance énergétique à paiement différé ne peut être signé qu'après avoir recueilli l'accord des ministres chargés du budget et de l'économie pour les projets de l'État, ainsi qu'après accord du ministère de tutelle pour les projets d'un établissement public de l'État.

*

La loi n° 2023-222 du 30 mars 2023 visant à ouvrir le tiers financement à l'État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique est pleinement applicable.

7. Loi n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions

La loi n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions est issue d'un projet de loi déposé au Sénat le 22 décembre 2022.

Initialement composé de 19 articles, ce dernier a été enrichi lors de son examen au Sénat de cinq articles additionnels puis à l'Assemblée nationale par l'ajout de quatre articles additionnels. Modifié par la commission mixte paritaire, le projet de loi a été adopté définitivement par le Parlement le 11 avril 2023, puis promulgué le 19 mai 2023 après une censure partielle du Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2023-850 DC du 17 mai 2023.

Les 29 articles que compte la loi, dont la plupart ont été examinés par la commission des lois, prévoient 12 mesures d'application. Parmi elles, au 19 avril 2024, 12 mesures ont été prises et celles qui demeurent manquantes - au nombre de 4 - sont, en réalité, des mesures d'application différées dont la date limite d'édiction fixée par le législateur n'est pas encore échue. Le taux d'application de la loi qui en résulte est donc de 100 %.

L'application des articles examinés au fond par d'autres commissions fait l'objet, pour chacune des commissions concernées, d'une fiche distincte dans le présent rapport.

Plus précisément, Agnès Canayer et Marie-Pierre de la Gontrie ont déposé au nom de la commission des lois, le 10 avril 2024, un rapport faisant le bilan d'application de ladite loi s'agissant des dispositions du titre III relatif à la sécurisation des JOP.

a) Les principales dispositions de la loi

La loi est structurée en cinq chapitres, répondant chacun à des préoccupations distinctes, bien que liées à l'objectif général de doter les pouvoirs publics des moyens nécessaires à l'organisation des JOP.

Le chapitre Ier, qui comporte les articles 1er à 4, apporte les « adaptations nécessaires en matière d'offre de soins et de formation aux premiers secours ».

Afin de couvrir les besoins médicaux des athlètes, la loi contient deux articles, délégués au fond à la commission des affaires sociales, visant à permettre l'ouverture d'un centre de santé au sein du village olympique et paralympique dans des conditions dérogatoires de celles du droit commun (article 1er) et à autoriser l'exercice des médecins étrangers dans le cadre des jeux Olympiques et Paralympiques (article 2).

L'article 3 autorise les vétérinaires à exercer la médecine et la chirurgie sur les animaux dans les lieux sous contrôle du comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, dans le cadre de la préparation et du déroulement des épreuves équestres.

Enfin, l'article 4 intègre à l'article L. 726-1 du code de la sécurité intérieure des acteurs auparavant autorisés à réaliser des actions d'enseignement et de formation en matière de secourisme, et malencontreusement écartés par la loi n° 2020-840 du 3 juillet 2020 et la loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021493(*). Les services publics auxquels appartiennent les acteurs de la sécurité civile et les associations ayant la formation aux premiers secours dans leur objet pourraient ainsi être de nouveau habilités à délivrer des formations aux premiers secours, afin de conserver un vivier d'acteurs suffisants pour former aux gestes qui sauvent. Cette malfaçon a été corrigée par le décret n° 2024-242 du 20 mars 2024 relatif aux formations aux premiers secours qui, à son article 3, prévoit des dispositions visant à prolonger la validité des agréments préalablement obtenus par l'ensemble des acteurs précités pendant deux ans afin de leur permettre d'obtenir le nouvel agrément tout en maintenant leurs activités d'ici à leur régularisation.

Le chapitre II, constitué des articles 5 à 8, vise à « renforcer la lutte contre le dopage ».

L'article 5 est destiné à autoriser le Laboratoire antidopage français à procéder à des tests génétiques sur des échantillons d'urine ou de sang prélevés auprès des sportifs le temps des jeux Olympiques et Paralympiques et pendant leurs phases préparatoires, pour répondre aux demandes du Comité international olympique (CIO) de mise en conformité avec le Code mondial antidopage.

L'article 6 prévoit un régime particulier pour la réalisation des contrôles antidopage nocturnes en alignant la législation nationale sur les standards internationaux existants.

Introduit par le Sénat et voté conforme par l'Assemblée nationale, l'article 7 qui visait à permettre à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) de recevoir des informations de la part des agents de la cellule de renseignement financier nationale (Tracfin) a été jugé contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel.

L'article 8 est relatif à la lutte contre le dopage en Polynésie française. Il prévoit l'homologation des peines de prison figurant dans les deux lois de pays n° 2015-12 et n° 2015-13 du 26 novembre 2015 prises en ce domaine.

À l'exception de l'article 5, l'ensemble de ces articles ne prévoyant pas de mesure d'application particulière sont d'application directe. L'article 5 quant à lui a fait l'objet du décret n° 2023-1157 du 7 décembre 2023 relatif aux analyses génétiques mentionnées à l'article L. 232-12-2 du code du sport et au traitement automatisé des données résultant de leur mise en oeuvre, nécessaire à sa pleine application.

Le chapitre III comporte les articles 9 à 19 et vise à « mieux garantir la sécurité » des JOP. L'ensemble des dispositions de cet article vise à doter les pouvoirs publics des moyens de sécuriser les JOP, évènement d'ampleur internationale inégalée.

(1) Trois articles concernent l'utilisation des images prises sur la voie publique.

L'article 9 procède à une mise en conformité des dispositions relatives à la vidéoprotection du code de la sécurité intérieure avec le Règlement général de protection des données (RGPD) et la loi « Informatique et libertés ».

L'article 10 vient quant à lui permettre, à titre expérimental, l'utilisation de traitements algorithmiques sur les images captées par les dispositifs de vidéoprotection et les drones afin de détecter et de signaler des évènements prédéterminés susceptibles de menacer la sécurité des personnes. Il s'agit d'une innovation majeure, puisque c'est la première fois que des dispositifs d'intelligence artificielle seraient utilisés dans l'espace public en matière de sécurité.

L'article 13 permet aux agents de la RATP et de la SNCF présents au sein du centre de coordination opérationnelle de la sécurité dans les transports d'Île-de-France (CCOS) de voir des images prises sur la voie publique dans la mesure où celles-ci concernent les « abords immédiats » de leurs emprises. Il leur permettra également de voir les images prises par les caméras de l'autre opérateur.

(2) Un article vise ensuite à assurer une unité de commandement sur la « plaque parisienne » pour toute la durée des JOP, résultant du souhait du CIO de disposer d'un interlocuteur unique.

L'unité de commandement est assurée par l'article 14 qui étend, pendant la stricte période des Jeux, les compétences en matière de sécurité du préfet de police de Paris aux quatre départements de la grande couronne parisienne.

(3) Cinq articles visent ensuite à assurer une meilleure sécurisation des grands événements accueillis par la France.

L'accès aux grands événements exposés, par leur ampleur ou leurs circonstances particulières, à un risque exceptionnel de menace terroriste est soumis à autorisation de l'organisateur, après enquête administrative. Les participants et spectateurs sont exonérés de cette autorisation.

Trois évolutions de cette procédure d'enquête administrative figurent aux articles 11 et 15 de la loi :

- l'élargissement de cette procédure aux zones de retransmission de ces évènements ;

- plus substantiellement, la suppression de l'exonération dont bénéficient les participants, qui pourront en conséquence également faire l'objet d'un criblage préalable à l'évènement ;

- de façon analogue, à l'initiative du Sénat, l'ouverture, à titre expérimental, de la faculté de diligenter une enquête administrative de sécurité préalablement à l'affectation de personnels intérimaires sur des missions en lien direct avec la sécurité des personnes ou des biens au sein d'entreprises de transport public, de marchandises dangereuses ou de gestion d'infrastructures.

En outre, l'article 16 offre la possibilité pour les gestionnaires d'enceintes sportives, récréatives ou culturelles de s'équiper de scanners corporels à ondes millimétriques pour remplacer les palpations de sécurité opérées par les agents de sécurité privée, à l'instar de ce qui est déjà pratiqué dans le domaine de la sécurité aéroportuaire. L'utilisation de ce dispositif d'imagerie serait soumise au consentement des personnes et des garanties relatives au respect de la vie privée des personnes sont prévues.

Enfin, l'article 12, introduit par l'Assemblée nationale, vise à favoriser l'emploi des étudiants étrangers en tant qu'agents de sécurité privée pendant la durée des jeux Olympiques et Paralympiques en permettant que le temps de travail accompli comme agent de sécurité privée par un étudiant étranger du 1er juillet 2024 au 15 septembre 2024 ne soit pas décompté pour calculer la durée d'activité professionnelle salariée autorisée pour tout étranger titulaire d'un titre de séjour pour motif d'études.

Délégués au fond à la commission de la culture, les articles 17 et 18 tendent enfin à renforcer les sanctions pour les infractions commises à l'occasion des manifestations sportives.

Le bilan de l'application de ce chapitre a fait l'objet d'un rapport de contrôle spécifique de la commission des lois déposé le 10 avril 2024.

Comme l'ont constaté les rapporteures, ces mesures législatives nécessitaient, pour être pleinement applicables, l'édiction de quatre mesures réglementaires494(*). Entre le 9 août et le 27 novembre 2023 - soit dans un délai de moins de six mois après la promulgation de loi - l'ensemble des mesures d'application ont été prises, tandis que deux mesures complémentaires sont venues compléter le dispositif495(*). Si l'adoption, conformément aux intentions du législateur, de ces mesures ne peut qu'être saluée, il n'en demeure pas moins regrettable que le pouvoir réglementaire ait mis plus de trois mois à édicter le décret d'application de l'expérimentation de la vidéoprotection « augmentée » et plusieurs mois encore pour la constitution du comité de suivi et d'évaluation, dit « Comité Vigouroux »496(*). Cela a retardé la mise en oeuvre effective de ces technologies nouvelles, limitant le temps utile d'expérimentation conféré par le législateur au pouvoir réglementaire pour déployer cette nouvelle technologie afin d'espérer sa pleine opérationnalité pour l'été 2023.

La loi comporte ensuite plusieurs mesures disparates visant à assurer la bonne organisation des jeux Olympiques et Paralympiques réunies dans un quatrième chapitre. Il s'agit :

- de l'article 20, introduit à l'initiative la commission de la culture du Sénat, qui prévoit la remise au Parlement d'un rapport de la Cour des comptes, sur l'organisation, le coût, et l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, avant le 1er octobre 2025 ;

- de l'article 21, délégué au fond à la commission de la culture, qui vise à étendre la dérogation légale aux interdictions de publicité dans l'espace public pour le relais de la flamme olympique et le compte-à-rebours ;

- de l'article 22, délégué au fond à la commission de la culture, qui vise à étendre la dérogation légale temporaire aux interdictions de publicité dans l'espace public pour la durée de la Coupe du monde de rugby ;

- de l'article 23, qui vise à prolonger les fonctions de l'actuel délégué interministériel aux jeux Olympiques et Paralympiques jusqu'au 31 décembre 2024, celui-ci atteignant la fin de sa période dérogatoire en décembre 2023 ;

- de l'article 24, qui tend à permettre à la société de livraison des ouvrages olympiques (SOLIDEO) d'évoluer à partir de la fin des Jeux en transférant progressivement son activité vers celle des établissements fonciers et d'aménagement de l'État ;

- de l'article 25, délégué au fond à la commission des affaires sociales, qui prévoit des dérogations à la règle du repos dominical dans les communes d'implantation des sites de compétition et les communes limitrophes ;

- de l'article 26, qui vise à expérimenter jusqu'au 31 décembre 2024 et sur la zone de compétence du préfet de police de Paris, des autorisations de stationnement spécifiques pour les taxis accessibles aux personnes utilisatrices de fauteuils roulants, valables pour une durée de cinq ans ;

- de l'article 27, qui tend à permettre, pendant la période des JOP, au gestionnaire du service Vélib' Métropole de confier à des tiers, par convention de mandat, la vente de titres, sur le modèle des dispositions applicables aux autorités organisatrices de la mobilité ;

- et, de l'article 28, qui a ouvert la possibilité, pour l'autorité administrative compétente, de fixer un signe distinctif permettant de reconnaître facilement les taxis accessibles aux personnes à mobilité réduite.

À l'exception de l'article 26, l'ensemble de ces articles sont d'application directe. L'article 26 est depuis le 28 juillet 2023 totalement applicable. En effet, le décret n° 2023-683 du 28 juillet 2023 relatif aux modalités d'application de l'article 26 de la loi n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions a défini les caractéristiques auxquelles doivent répondre les personnes morales pour prétendre à cette expérimentation, le processus et les critères de sélection ainsi que les obligations auxquelles seront soumises les personnes morales ayant bénéficié d'autorisations de stationnement dans ce cadre.

Enfin, un dernier chapitre comporte un article unique - l'article 29 - qui tend à assurer l'application des dispositions de la loi dans les territoires ultramarins. Cet article, en ce qu'il a substitué à une habilitation à légiférer par ordonnance, des dispositions nécessaires à l'application et à l'adaptation de la loi, est d'application directe.

b) La publication des mesures réglementaires d'application et de rapports du Gouvernement au Parlement encore en attente

Plusieurs articles de la loi n° 2023-380 prévoient, au total, quatre rapports du Gouvernement au Parlement, à l'issue des expérimentations et une mesure d'application d'entrée en vigueur différée.

Il s'agit :

- à l'article 5, du rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de cet article par le Gouvernement au parlement avant le 1er juin 2025 ;

- à l'article 10, du rapport d'évaluation de la mise en oeuvre de l'expérimentation de la vidéoprotection intelligente, avant le 31 décembre 2024, ainsi que du décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés fixant le contenu dudit rapport ;

- à l'article 20, du rapport sur l'organisation, le coût et l'héritage des JOP, devant être remis avant le 1er octobre 2025 par la Cour des comptes au Parlement ;

- et à l'article 26, du rapport d'évaluation de l'expérimentation de l'élargissement des compétences du préfet de police de Paris en matière d'accessibilité des transports publics particuliers aux personnes utilisatrices de fauteuil roulant devant être remis par le Gouvernement au Parlement avant le 30 juin 2025.

La commission des lois du Sénat restera vigilante à la transmission de l'ensemble de ces rapports et à l'édiction des dernières mesures d'application dans des temps compatibles avec le contrôle et le suivi des expérimentations votées dans le cadre des JOP dans la perspective d'une éventuelle pérennisation de tout ou partie de ces dispositifs. Ainsi, s'il est évident que compte tenu de l'ampleur inédite des JOP certaines mesures ne trouveront plus leur utilité opérationnelle lors d'autres événements, il apparait indispensable d'inscrire la réflexion des moyens de la sécurisation des grands événements dans un temps long, singulièrement dans la perspective de l'organisation de prochaines manifestations olympiques ou sportives sur le territoire national.

Au surplus, la commission rappelle son attachement à une évaluation précise, transdisciplinaire, transparente et associant un large panel d'acteurs, des expérimentations votées par le Parlement, plus encore en matière de technologies nouvelles au service de la sécurisation. Seule une évaluation irréprochable sur le plan méthodologique sera à même d'accompagner le législateur dans son choix de pérenniser un dispositif existant, dans son contenu actuel ou sous une forme modifiée compte-tenu des résultats de ladite expérimentation. Sur ce point, elle demeure convaincue qu'une information transparente et fiable du Parlement conditionne, pour partie, l'acceptabilité sociétale de certaines solutions - elle-même indispensable à la confiance dans les moyens mis à disposition des pouvoirs publics pour assurer la sécurité de tous - en ce qu'elle permet, notamment, de renforcer la pédagogie autour des solutions technologiques déployées.

*

La loi n° 2023-380 du 19 mai 2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions est totalement applicable.

8. Loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire

La loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire est issue d'une proposition de loi déposée le 31 janvier 2023 par le député Sacha Houlié, président de la commission des lois. Elle vise à faire face à deux difficultés majeures : le coût et les délais d'obtention du permis de conduire.

Elle a été adoptée définitivement par l'Assemblée nationale en deuxième lecture.

Sur les 7 articles que compte la loi, 4 articles sont d'application directe, 2 articles prévoient au moins une mesure d'application réglementaire et 1 article prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement.

Au 31 mars 2024, aucune mesure d'application n'a été publiée, sur les 3 prévues.

a) Les dispositions de la loi

L'article 1er prévoit la création d'une plateforme numérique nationale gérée par France Travail recensant l'ensemble des aides proposées par l'État et les collectivités territoriales pour la préparation du permis de conduire. Dans le cadre de l'examen en séance publique de cet article en première lecture, le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement renvoyant à un décret en Conseil d'État le soin de préciser ses modalités de mise en oeuvre.

L'article 2 a simplifié le cadre juridique permettant d'organiser dans les lycées, en dehors du temps scolaire, l'épreuve théorique du permis de conduire et a élargi cette possibilité à la préparation de cette même épreuve. Auparavant, cette organisation était subordonnée à une autorisation du président du conseil régional prise après avis du conseil d'administration de l'établissement et, le cas échéant, accord de la collectivité propriétaire des bâtiments. Elle ne pouvait être accordée qu'après qu'une convention a été conclue entre le représentant de la région ou de la collectivité territoriale de Corse, celui de l'établissement et la personne physique ou morale qui désire organiser ces activités. Désormais, elle est possible sur autorisation du représentant de l'établissement, après conclusion d'une convention avec le représentant de la collectivité propriétaire des bâtiments et la personne physique ou morale qui désire organiser ces activités. Cet article est d'application directe.

L'article 3 vise à étendre la possibilité d'utiliser le compte personnel de formation (CPF) à toutes les catégories de permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur. Auparavant, sa mobilisation n'était possible que pour financer les formations à certaines catégories de permis de conduire (B, C1, C, D1, D, C1E, CE, D1E et DE). Cet article a donc étendu cette possibilité à toute autre catégorie de permis de conduire, soit notamment ceux relatifs aux motos légères ou puissantes (catégories A1, A2 et A), les voiturettes sans permis (permis B1) ainsi qu'aux examens autorisant les titulaires d'un permis B à tracter des remorques plus lourdes (permis B96 et BE). L'article prévoit que les conditions et les modalités d'éligibilité au CPF des formations concernées sont précisées par décret, après consultation des partenaires sociaux. Il est entré en vigueur au 1er janvier 2024.

L'article 4 prévoit la transmission à la Caisse des dépôts et consignations des informations relatives à l'existence, à la catégorie et à la validité du permis de conduire, afin de lui permettre d'exercer sa mission de gestionnaire du CPF dans de bonnes conditions. Il est d'application directe.

L'article 5 a permis de recourir aux agents publics ou contractuels comme examinateurs des épreuves de conduite du permis B dans l'ensemble des départements. Auparavant, ce recours n'était prévu que dans les seuls départements où le délai médian entre deux présentations d'un même candidat est supérieur à 45 jours. L'article est d'application directe.

L'article 6 a permis de faire bénéficier les examinateurs des centres organisant, pour le compte de l'État, le passage du code de la route ou des épreuves pratiques des permis de conduire de véhicules du groupe lourd de la même protection que les inspecteurs ou examinateurs du permis de conduire lorsque celui-ci est organisé par l'État. Ainsi, dès lors qu'une infraction aura été commise, le préfet pourra, dans les 24 heures qui suivent la transmission de l'information, interdire à titre provisoire à l'auteur de faits de se présenter à l'examen pratique ou théorique du permis de conduire. Le juge devra ensuite obligatoirement prononcer la peine complémentaire d'interdiction de se présenter à l'examen du permis de conduire pour une durée de trois ans au plus, sauf s'il en décide autrement en raison des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. L'article est d'application directe.

L'article 7 a prévu la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport sur la possibilité d'abaisser l'âge d'obtention du permis de conduire.

b) Les mesures d'application en attente

Deux articles de la loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire prévoient une mesure d'application réglementaire.

Aucune n'a encore été publiée bien que l'échéancier du Gouvernement annonce des publications en décembre 2023 ou en mars 2024.

S'agissant de l'article 1er, le décret en Conseil d'État devant préciser les modalités de mise en oeuvre de la plateforme recensant l'ensemble des aides disponibles pour la préparation du permis de conduire n'a pas été pris. Selon l'échéancier du Gouvernement, sa publication était pourtant envisagée en mars 2024.

S'agissant de l'article 3, le décret devant préciser, après consultation des partenaires sociaux, les conditions et les modalités d'éligibilité au CPF de la préparation aux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur, n'a pas été pris. Selon l'échéancier du Gouvernement, sa publication était pourtant envisagée en décembre 2023.

L'application de ce dernier article constitue un point de vigilance important. En effet, le rapport de Loïc Hervé fait au nom de la commission des lois identifiait un important enjeu financier, alors qu'environ 160 000 personnes passent chaque année le permis moto et qu'en conséquence l'impact budgétaire de la mesure pourrait s'élever jusqu'à 360 millions d'euros selon la Caisse des dépôts et consignations. Cet enjeu impose de veiller à préserver un lien avec l'emploi dans les dispositifs financés par le CPF. L'entrée en vigueur différée au 1er janvier 2024 de la mesure visait ainsi non seulement à donner à la Caisse des dépôts et consignations le temps de procéder aux développements techniques nécessaires, mais également à permettre la consultation des partenaires sociaux. Le rapporteur soulignait que ces discussions étaient « cruciales pour déterminer les conditions de soutenabilité financière de cette extension - est actuellement évoquée la possibilité de ne financer qu'un seul permis par personne - et les modalités de maintien d'un lien avec l'employabilité des titulaires des droits à la formation ».

Enfin, le rapport prévu par l'article 7 sur la possibilité d'abaisser l'âge d'obtention du permis de conduire qui devait être remis par le Gouvernement au Parlement au plus tard le 21 décembre 2023, n'a pas été remis. En revanche, le décret n° 2023-1214 du 20 décembre 2023 est venu abaisser cet âge à 17 ans pour le permis B, rendant de fait désormais caduque cette disposition.

*

La loi n° 2023-479 du 21 juin 2023 visant à faciliter le passage et l'obtention de l'examen du permis de conduire est partiellement applicable.

9. Loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires

Issue d'une initiative de Françoise Gatel, présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, la loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires a modifié les règles relatives au remplacement des conseillers communautaires en cas de démission au cours du mandat afin d'éviter toute vacance prolongée du siège et pour permettre aux communes d'être représentées en permanence au sein des conseils communautaires.

À cet effet, l'article unique de la proposition de loi a modifié le code électoral pour prévoir deux dérogations aux règles relatives à l'application du principe de parité au sein des conseils communautaires. Désormais, au terme de la première année d'installation du conseil municipal, en cas de vacance de siège au sein d'un conseil communautaire, le poste vacant peut être pourvu :

- par le premier candidat élu conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement suivant sur la liste des candidats aux sièges de conseiller communautaire sur laquelle le conseiller à remplacer a été élu, sans tenir compte de son sexe ;

- à défaut, par le premier conseiller municipal ou conseiller d'arrondissement élu sur la liste correspondante dans candidats aux sièges de conseiller municipal n'exerçant pas de mandat de conseiller communautaire, sans tenir compte de son sexe.

*

La loi n° 2023-506 du 26 juin 2023 tendant à garantir la continuité de la représentation des communes au sein des conseils communautaires ne nécessitait aucune mesure d'application. Elle est d'application directe.

10. Loi n° 2023-610 du 18 juillet 2023 visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces

Si le projet de loi n° 531 (2022-2023) visant à donner à la douane les moyens de lutter contre les nouvelles menaces a été renvoyé à la commission des finances, la commission des lois a bénéficié d'une délégation au fond pour les articles 1er à 5, 8, 11 et 11 ter du texte, qui sont devenus les articles 1er à 5, 9, 19 et 21 de la loi finalement adoptée.

Les articles 1er à 5 visaient à mettre le droit de visite douanière en conformité avec la Constitution après la censure prononcée par le Conseil constitutionnel par sa décision n° 2022-1010 QPC du 22 septembre 2022.

L'article 2 prévoyait l'intervention de deux arrêtés :

- le premier, de la compétence du ministre chargé des douanes, pour définir les ports, les aéroports et les gares ferroviaires ou routières ouverts au trafic international ;

- le second, de la compétence conjointe des ministres chargés des douanes et des transports, pour fixer la liste des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte et des arrêtés présentant des spécificités justifiant des modalités de contrôle douanier adaptées.

Ces deux arrêtés ont été pris le 18 juillet 2023 : il s'agit, respectivement, de l'arrêté du 18 juillet 2023 établissant la liste des ports, aéroports, gares ferroviaires et gares routières ouverts au trafic international relevant du 3° de l'article 60-1 du code des douanes et de l'arrêté portant application de l'article 60-1, 5° du code des douanes.

L'article 9 autorise, dans des conditions d'habilitation devant être définies par un décret, les agents des douanes à recourir à des dispositifs de captation et de sonorisation. Ledit décret a été pris (décret n° 2024-271 du 27 mars 2024 modifiant le décret n° 2004-976 du 15 septembre 2004 fixant les conditions d'habilitation des agents des douanes visés aux articles 67 bis et 67 bis-4 du code des douanes). Ce texte prévoit l'intervention d'un arrêté pour désigner « les services d'affectation des agents habilités aux procédures spéciales d'enquête » : celui-ci a été publié le même jour (arrêté du 27 mars 2024 désignant les services et unités d'affectation des agents des douanes habilités aux procédures spéciales d'enquête douanière visées à la section VII du chapitre IV du titre II du code des douanes) et constitue une mesure d'application non prévue.

L'article 19, relatif à la mise en oeuvre d'une expérimentation étendant la durée de conservation des données issues des lecteurs automatiques de plaques d'immatriculation (LAPI) et autorisant le recours à un nouveau traitement de données, suppose l'intervention d'un décret en Conseil d'État, pris après avis motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, pour déterminer les critères de recherche utilisés par le traitement précité, les catégories de données traitées, les mesures mises en oeuvre pour écarter l'exploitation des photographies des occupants des véhicules et pour assurer la sécurité des données stockées, le nombre maximal de dispositifs de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules concernés ainsi que les axes de circulation où ils sont installés sur le territoire. Ce décret n'a pas vocation à être publié ; toutefois, le sens de l'avis émis par la Cnil est rendu public.

Ce décret n'a pas été pris.

L'article 21 instituait la catégorie des agents de police judiciaire des finances, dont la mise place supposait l'intervention d'un décret en Conseil d'État, de même que la définition des modalités selon lesquelles ces agents devaient se trouver placés sous la direction administrative d'un magistrat de l'ordre judiciaire. Ce décret a été récemment pris (décret n° 2024-302 du 2 avril 2024 portant adaptation du code de procédure pénale et d'autres dispositions réglementaires à la création de l'Office national anti-fraude et d'agents de police judiciaire des finances, dont le chapitre II est relatif aux agents de police judiciaire des finances).

Cet article a également donné lieu à une mesure d'application non-prévue, avec un décret simple n° 2024-235 du 18 mars 2024 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Office national anti-fraude », qui prévoit notamment le rattachement audit Office des agents de police judiciaire des finances.

*

La loi n° 2023-610 du 18 juillet 2023 visant à donner à la douane les moyens de faire face aux nouvelles menaces est, dans les domaines relevant de la compétence de la commission des lois, partiellement applicable.

11. Loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique

La loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 a été adoptée en lecture définitive par le Sénat le 6 juillet 2023, après qu'un accord a été trouvé en commission mixte paritaire le 28 juin 2023.

Cette loi a pour objectif de féminiser les postes à responsabilités dans les trois versants de la fonction publique. À cette fin, elle relève de 40 % à 50 % le quota de « primo-nominations » de personnes de chaque sexe dans un certain nombre de postes, introduit une règle portant sur le « stock » d'emplois, et prévoit des sanctions en cas de non-respect de ces obligations.

Sur les 10 articles que compte la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023, 7 sont d'application directe ; 3 nécessitent une mesure d'application (l'un de ces articles entrera en vigueur au 1er janvier 2026 seulement).

L'article 4 de la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 étend le champ des emplois soumis à l'obligation de nominations équilibrées pour y inclure notamment les fonctions de chefs de service et de chefs de pôle dans les établissements de santé dans lesquels le nombre de ces fonctions est au moins égal à un nombre défini par décret.

Ce décret est paru au Journal officiel du 31 décembre 2023 (décret n° 2023-1381 du 28 décembre 2023 modifiant les règles applicables aux modalités de nominations équilibrées dans l'encadrement supérieur de la fonction publique).

L'article 9 de la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 crée un index de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans les trois versants de la fonction publique (nouvel article L. 132-9-3 du code général de la fonction publique - CGFP) ; il prévoit des pénalités financières en cas de non-respect de l'obligation de publication et en cas de persistance, au-delà d'un délai de trois ans, de résultats inférieurs à une cible définie par décret (nouvel article L. 132-9-5 du CGFP).

Non prévu explicitement par l'article L. 132-9-3 du CGFP créé par l'article 9 de la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023, le décret n° 2023-1136 du 5 décembre 2023 a défini les indicateurs relatifs aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ainsi qu'aux actions mises en oeuvre pour les supprimer et aux objectifs de progression. Il a également précisé leurs conditions de publication ainsi que le montant forfaitaire de la contribution prévue à l'article L. 132-9-4 du CGFP.

Prévu par l'article L. 132-9-5 du CGFP, le décret n° 2023-1137 du 5 décembre 2023 relatif aux modalités de calcul des indicateurs définis à l'article 1er du décret n° 2023-1136 du 5 décembre 2023 précise la cible à atteindre par les employeurs et la période de référence sur laquelle les indicateurs doivent être calculés. Il indique les agents qui sont comptabilisés dans l'index et les éléments de rémunération dont il doit être tenu compte. Il prévoit enfin la méthode de calcul des indicateurs et barème à appliquer aux résultats obtenus.

Les IV et V de l'article 2 de la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 prévoient qu'à compter du 1er janvier 2026, les nominations dans les emplois des cabinets ministériels et les emplois du cabinet du Président de la République doivent concerner 50 % de personnes de chaque sexe. La définition de la liste des emplois en question est renvoyée à un décret, qui n'a pas encore été pris à la date du 20 mars 2024. L'échéancier d'application ne précise pas la date de publication envisagée pour ce décret.

*

La loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023 visant à renforcer l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique est entièrement applicable au 20 mars 2024.

La seule mesure d'application prévue par la loi qui n'a pas encore été prise concerne une disposition dont l'entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2026. Il conviendra donc de vérifier, dans le rapport sur l'application des lois du printemps 2026, que ce décret aura bien été pris d'ici là pour permettre l'application de l'intégralité de l'article 2 de la loi n° 2023-623 du 19 juillet 2023.

12. Loi n° 2023-656 du 25 juillet 2023 relative à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023

La loi n° 2023-656 du 25 juillet 2023 a été adoptée définitivement par l'Assemblée nationale le 20 juillet 2023, dans la rédaction issue du Sénat qui a adopté le texte le 18 juillet 2023. Le Parlement a donc fait preuve d'une particulière célérité pour l'examen d'une loi d'urgence, censée accélérer la reconstruction des bâtiments dégradés lors des émeutes de l'été 2023.

Cette loi comporte trois articles, qui habilitent chacun le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de prendre des mesures dérogatoires au droit de l'urbanisme (article 1er), au droit de la commande publique (article 2) et aux règles de financement des opérations d'investissement des collectivités territoriales (article 3).

La commission des lois a été saisie au fond de l'article 2.

Cet article assouplit, pour les seuls bâtiments ayant fait l'objet de dégradations lors des violences urbaines de l'été 2023, les conditions dans lesquelles les acheteurs publics peuvent déroger à deux principes forts de la commande publique : le principe de publicité et le principe d'allotissement. Ces mesures devaient faire l'objet de la publication d'une ordonnance, dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la loi.

Cette ordonnance a été publiée le 26 juillet 2023, dès le lendemain de la promulgation de la loi. Il s'agit de l'ordonnance n° 2023-660 du 26 juillet 2023 portant diverses adaptations et dérogations temporaires en matière de commande publique nécessaires à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des équipements publics et des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023.

Cette ordonnance comporte cinq articles, qui respectent le périmètre de l'habilitation voté par le Parlement.

L'article 1er de l'ordonnance du 26 juillet 2023 autorise les acheteurs publics concernés par la reconstruction de bâtiments dégradés pendant les émeutes à passer des marchés publics sans publicité mais avec mise en concurrence pour des travaux dont le montant est inférieur à 1,5 million d'euros hors taxes, soit un fort rehaussement par rapport au seuil de droit commun de 100 000 euros.

La même dérogation est autorisée pour les lots dont le montant est inférieur à 1 000 000 d'euros hors taxes, à la condition que le montant cumulé de ces lots n'excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots.

Par dérogation au principe d'allotissement, l'article 2 autorise le recours à un marché unique et l'article 3 assouplit les conditions de recours aux marchés de conception-réalisation.

Enfin, l'article 4 précise que les dérogations ouvertes par l'ordonnance du 26 juillet 2023 sont applicables pendant une période de neuf mois et l'article 5 confie la responsabilité de l'application de ladite ordonnance à la Première ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

*

L'article 2 de la loi n° 2023-656 du 25 juillet 2023 relative à l'accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 est entièrement applicable.

13. Loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite

La loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite a été déposée le 18 octobre 2022 par le député Guillaume Kasbarian et les membres du groupe Renaissance. Elle a été adoptée définitivement par le Sénat, après deux lectures dans chaque chambre, la procédure accélérée n'ayant pas été engagée par le Gouvernement.

Sur les 13 articles que compte la loi, 11 articles sont d'application directe, et 2 articles, les articles 11 et 12, prévoient respectivement une et trois mesures d'application règlementaire.

Au 31 mars 2024, aucune mesure d'application n'a été publiée, sur les quatre prévues.

a) Les principales dispositions de la loi

La loi est structurée en trois chapitres, répondant chacun à des préoccupations distinctes, bien que liées à l'objectif général de fluidification du marché locatif par la lutte contre l'occupation illicite des logements.

Le chapitre Ier, qui comporte les articles 1er à 8, vise à « mieux réprimer le squat ».

Pour cela, l'article 1er a créé deux nouvelles infractions pénales afin d'étendre à tous les locaux la protection du domicile face aux occupations frauduleuses. L'article 2 a supprimé la faculté dont dispose le juge d'accorder des délais aux squatteurs dont l'expulsion a été judiciairement ordonnée. L'article 3 a augmenté la peine encourue en cas de violation du domicile, pour la porter à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende. L'article 4 a créé un nouveau délit, afin de sanctionner d'une amende de 3 750 euros la propagande et la publicité en faveur de méthodes facilitant ou encourageant la violation d'un domicile. L'article 5 a triplé la peine encourue en cas d'usurpation du titre de propriétaire aux fins de louer un bien immobilier.

L'article 6 a, d'une part, clarifié la notion de domicile afin d'y inclure tous les locaux d'habitation contenant des biens meubles, y compris les résidences secondaires, et, d'autre part, effectué des ajustements concernant la procédure administrative d'évacuation forcée prévue à l'article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, dite loi Dalo, afin de la rendre applicable à tous les locaux d'habitation et de renforcer sa bonne exécution par les services préfectoraux en leur imposant de collaborer avec les services fiscaux.

L'article 7, qui visait à transférer la responsabilité du propriétaire vers l'occupant sans droit ni titre en cas de dommages résultant d'un défaut d'entretien, a été déclaré contraire à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2023-853 DC du 26 juillet 2023.

Enfin, l'article 8 a pérennisé le dispositif de mise à disposition temporaire de locaux vacant, qui avait été introduit à titre expérimental en 2009.

Aucun de ces articles ne prévoyant de mesures d'application règlementaire, le chapitre Ier de la loi n° 2023-668 est donc entièrement applicable.

Le chapitre II, constitué des articles 9 à 11, vise à « sécuriser les rapports locatifs ».

L'article 9 a systématisé, dans les contrats de bail, les clauses de résiliation de plein droit et a limité la faculté du juge d'en suspendre les effets.

L'article 10 a réduit plusieurs délais de la procédure contentieuse du litige locatif et a modifié les règles relatives à la rédaction et à la transmission des diagnostics sociaux et financiers qui structurent l'accompagnement social des locataires en difficultés et éclairent le juge dans l'élaboration de son jugement.

L'article 11 prévoit qu'un décret en Conseil d'État clarifie et harmonise les règles d'évaluation de l'indemnisation à laquelle ont droit les propriétaires lorsque le préfet leur refuse le concours de la force publique pour expulser un locataire défaillant à l'issue de la procédure judiciaire.

Le chapitre III, intégralement issu d'ajouts du Sénat, comporte les articles 12 et 13 et vise à « renforcer l'accompagnement des locataires en difficulté ».

L'article 12 a accru le rôle et les prérogatives des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (Ccapex).

Enfin, l'article 13 a étendu au préfet et aux Ccapex la faculté de saisine du juge pour que soit octroyé ou suspendu un accompagnement social personnalisé (MASP) de niveau 3 pour les locataires défaillants lorsqu'il appert que leurs difficultés de paiement résulteraient principalement d'une mauvaise gestion de leurs ressources financières.

b) La publication des mesures réglementaire d'application encore en attente

Les articles 11 et 12 de la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 prévoient, au total, quatre mesures d'application réglementaire.

Aucune n'a encore été publiée à la date du 31 mars 2024. Contrairement à l'usage, aucun échéancier d'application n'a en outre été publié par le Gouvernement sur le site Légifrance.

Il s'agit :

- à l'article 11, du décret précisant les modalités d'évaluation de la réparation due au propriétaire en cas de refus, par le préfet, du concours de la force publique afin d'exécuter une mesure d'expulsion ;

- à l'article 12 :

§ du décret définissant le délai dont dispose le commissaire de justice pour informer la Ccapex de toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée ou accordant des délais de paiement au locataire déficient ;

§ du décret fixant la composition et les modalités de fonctionnement de la Ccapex, et notamment du système d'information qui en permet la gestion ;

§ du décret précisant les modalités d'application de l'article L. 824-2 du code de la construction et de l'habitation, lequel prévoit une saisine de la Ccapex lorsque le bénéficiaire d'une aide personnelle au logement (APL) ne règle pas la dépense de logement, afin qu'elle décide ou non du maintien du versement de l'APL. Pour cela, le diagnostic social et financier du locataire lui est transmis.

Les deux premiers décrets constituent des mesures nouvelles. En revanche, les deux derniers décrets étaient déjà prévus par les versions antérieures des articles que la loi n° 2023-668 a modifiés.

Le décret fixant la composition et les modalités de fonctionnement de la Ccapex est le décret n° 2015-1384 du 30 octobre 2015 relatif à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives. À la date du 31 mars 2024, il n'a cependant pas été modifié pour tenir compte des évolutions résultant de la loi n° 2023-668, notamment la possibilité, pour le président de la métropole, d'assurer la coprésidence de la Ccapex, en sus du préfet et du président du conseil départemental.

Les modalités d'application de l'article L. 824-2 du code de la construction et de l'habitation ont été - partiellement - précisées par le décret n° 2019-772 du 24 juillet 2019 relatif à la partie réglementaire du livre VIII du code de la construction et de l'habitation. À l'instar du décret régissant la composition et le fonctionnement de la Ccapex, il n'a pas été actualisé pour tenir compte des évolutions résultant de la loi n° 2023-668, notamment pour déterminer les modalités de saisine de la Ccapex par les caisses d'allocations familiales ou par les caisses de mutualité sociale agricole.

Interrogé à deux reprises, le ministère du logement n'a pas été en mesure de fournir une explication sur l'absence de publication et d'actualisation de ces quatre mesures règlementaires.

*

La loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023 visant à protéger les logements contre l'occupation illicite est partiellement applicable.


* 487 Décret n° 2023-225 du 30 mars 2023 portant création de l'agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours.

* 488 Décret n° 2024-139 du 23 février 2024 relatif au dépôt de plainte par voie de télécommunication audiovisuelle.

* 489 Décret n° 2023-345 du 4 mai 2023 portant diverses mesures réglementaires relatives à l'habilitation des officiers de police judiciaire.

* 490 Décret n° 2023-747 du 9 août 2023 relatif aux assistants d'enquête.

* 491 En application de l'article 47 ter du Règlement du Sénat.

* 492 Le scrutin ayant lieu lors d'une journée électorale unique, dans les circonscriptions où l'élection se déroule au scrutin proportionnel, comme dans celles où l'élection se déroule au scrutin majoritaire.

* 493 Loi n° 2020-840 du 3 juillet 2020 visant à créer le statut de citoyen sauveteur, lutter contre l'arrêt cardiaque et sensibiliser aux gestes qui sauvent et loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels.

* 494 Pour l'article 9, il s'agit du décret n° 2023-1102 du 27 novembre 2023. Pour l'article 10, ont été pris les décrets n° 2023-828 du 28 août 2023 et n° 023-855 du 4 septembre 2023. Ce dispositif a été complété par le décret n° 2023-939 du 11 octobre 2023.

* 495 Décrets n° 2023-1388 du 29 décembre 2023 et n° 2024-107 du 14 février 2024 pour l'application de l'article 14.

* 496 Décret du 28 novembre 2023 portant nomination du président du comité d'évaluation de l'expérimentation de traitements algorithmiques d'images légalement collectées au moyen de systèmes de vidéoprotection et de caméras installées sur des aéronefs.

Les thèmes associés à ce dossier

Partager cette page