Rapport d'information n° 584 (2021-2022) de M. Daniel GREMILLET et Mme Dominique ESTROSI SASSONE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 24 mars 2022

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N° 584

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 mars 2022

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le volet « Énergie » du paquet « Ajustement à l' objectif 55 » : face à la dépendance énergétique , comment décarboner l' économie ?,

Par M. Daniel GREMILLET et Mme Dominique ESTROSI SASSONE,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas , présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé , vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault , secrétaires ; MM. Serge Babary, Jean-Pierre Bansard, Mmes Martine Berthet, Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Marie Evrard, Françoise Férat, Amel Gacquerre, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Mme Guylène Pantel, MM. Sebastien Pla, Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-Claude Tissot .

L'ESSENTIEL

Le 24 février 2022, jour de l'offensive russe en Ukraine, la commission des affaires économiques a adopté les recommandations de ses rapporteurs sur le volet « Énergie » du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » , ayant trait notamment aux énergies renouvelables, à la performance et à l'efficacité énergétiques, aux biocarburants, à l'hydrogène ou à la fiscalité énergétique. En préparation, les rapporteurs ont organisé 10 auditions (instances de régulation nationales et européennes, représentants des gaziers et électriciens) et reçu 30 contributions (professionnels, collectivités, gestionnaires, associations). Au terme de leurs travaux, ils ont proposé 40 recommandations pour décarboner l'économie, toutes intégrées à une proposition de résolution commune à la commission des affaires économiques, à celle de l'aménagement du territoire et du développement durable et à celle des affaires européennes, adoptée le 1 er mars par cette dernière. Loin de remettre en question ces travaux, la guerre en Ukraine rend encore plus urgentes des actions vigoureuses pour se libérer de la dépendance aux hydrocarbures .

I. UNE SOMME DE RÉGLEMENTATIONS DÉTERMINANTES POUR LE SECTEUR ÉNERGÉTIQUE

A. UN PAQUET ACTUALISANT LES OBJECTIFS ÉNERGÉTIQUES EUROPÉENS

Présenté le 14 juillet 2021 et conforté le 15 décembre suivant, le paquet « 55 » est composé de 10 règlements, 7 directives, 2 décisions et 1 stratégie .

Ce paquet doit permettre à l'Union européenne de réduire de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030 . Pour ce faire, il prévoit de limiter de 39 % la consommation d'énergie primaire et de relever à 40 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie.

L'ambition ainsi proposée va bien au-delà de l'actuel paquet « d'Hiver » , intégré en droit interne, par la loi « Énergie-Climat », de 2019, et la loi « Climat-Résilience », de 2021 1 ( * ) . En effet, le paquet actuel a pour objectifs 40 % de baisse des émissions de GES , 27 % de baisse de la consommation d'énergie et 27 % de part des énergies renouvelables.

Les objectifs européens du paquet
« Ajustement à l'objectif 55 » d'ici 2030

de réduction
des émissions
de gaz à effet
de serre (GES)

de réduction de la consommation
d'énergie primaire

de part des énergies renouvelables dans la consommation
finale brute d'énergie

B. UN PAQUET SUPPOSANT UNE RÉVOLUTION DU SECTEUR ÉNERGÉTIQUE

L'atteinte du paquet « 55 » suppose un approfondissement et une accélération sans précédent de la décarbonation des économies européennes .

Dans le secteur de l'énergie, qui représente 75 % des émissions de GES européennes, cette atteinte nécessite une « révolution copernicienne », sur plusieurs plans : la production , avec les énergies décarbonées dont celles renouvelables, les usages , avec l'électrification des bâtiments, des industries ou des transports, et le stockage , avec l'hydrogène et les batteries électriques. Selon le commissaire européen chargé du marché intérieur, cette atteinte implique de doubler la production d'électricité d'ici 2050.

Pour nos économies, cette atteinte révèle plusieurs défis : l'indépendance énergétique , car la guerre en Ukraine démontre la nécessité de réduire notre dépendance au gaz, émissif et importé ; l'autonomie minière , car la fabrication de nos panneaux solaires, nos pales d'éoliennes, nos batteries électriques ou nos électrolyseurs d'hydrogène suppose une forte consommation de métaux critiques ; la relocalisation industrielle , une sécurisation de nos chaînes de valeur étant indispensable dans tous nos secteurs d'activité, dont l'énergie.

C. UN PAQUET PRÉSENTANT PLUSIEURS DIFFICULTÉS DANS UN CONTEXTE AUSSI INCERTAIN

Ce contexte énergétique, très perturbé, doit conduire l'Union européenne et ses États membres à la plus grande vigilance .

Tout d'abord, le paquet « 55 » constitue une juxtaposition de textes, très larges et très denses, dont l'évaluation doit être renforcée . Face à la flambée des prix des énergies, son impact sur le pouvoir d'achat des ménages, la compétitivité des entreprises et la soutenabilité financière des collectivités doit donc être mesuré avec attention.

Deuxièmement, le paquet manque de stabilité, de lisibilité et de cohérence ; or, les incertitudes juridiques nuisent aux investissements économiques . Trois ans après la loi « Énergie-Climat », et six mois après la loi « Climat-Résilience », il oblige ainsi à remettre sur le métier la transposition du droit européen, dans les secteurs de l'énergie et du bâtiment.

Troisièmement, ce paquet ne respecte pas toujours la neutralité technologique entre les énergies décarbonées, renouvelables comme nucléaire . Pourtant, la définition du mix énergétique relève de la compétence exclusive des États membres, en application de l'article 194 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

Enfin, ce paquet représente un coût pour les consommateurs d'énergie, particuliers comme professionnels, qui doit être limité . Cela suppose de ne pas fixer d'objectifs mal calibrés ou non financés. De plus, toute nouvelle contrainte normative appelle de nouveaux moyens budgétaires. Si la fiscalité énergétique doit être verdie, elle ne doit pas être alourdie.

L'évaluation et la compensation financières, la stabilité normative, la neutralité technologique et une subsidiarité effective constituent donc des points de vigilance .

À titre d'illustration, plusieurs sujets d'inquiétude existent sur les conséquences du paquet « 55 » pour le pouvoir d'achat des ménages : la révision du système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne (SEQE-UE), qui emporte un risque de hausse des prix du CO 2 et de l'électricité ; l'application aux logements et aux carburants d'un système similaire, qui soulève une inquiétude pour le pouvoir d'achat des ménages et la compétitivité des entreprises ; l'introduction d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne (MACF), qui induit un risque de hausse des prix des biens et des services mais aussi de comportements de contournement et de rétorsion ; la fin des véhicules thermiques, à compter de 2035, qui pose l'inconvénient d'une focalisation sur l'électromobilité, au détriment d'autres voies de décarbonation utiles.

Les rapporteurs ont souhaité inscrire ces points de vigilance dans la proposition de résolution précitée .

II. UN VOLET « ÉNERGIE » À CONSOLIDER

A. DÉCARBONER L'ÉLECTRICITÉ, LE GAZ ET LE PÉTROLE

La directive sur la taxation de l'énergie applique une fiscalité différenciée aux carburants ou aux combustibles, en fonction de leurs émissions, à compter de 2023 2 ( * ) . Les rapporteurs estiment nécessaire de tenir compte du contexte du prix des énergies, d'alléger la fiscalité sur les entreprises énergo-intensives, de ne pas oublier certaines énergies, comme l'hydrogène nucléaire, les biocarburants, le biogaz ou le bois-énergie, et de mieux associer aux réformes les collectivités territoriales. Les États membres doivent définir eux-mêmes quels sont les ménages vulnérables devant être soutenus fiscalement.

La directive sur les énergies renouvelables relève de 32 % à 40 % la part de ces énergies dans la consommation finale brute d'énergie d'ici 2030 . Pour les rapporteurs, les objectifs fixés doivent être généraux, adaptés et réalistes. De plus, il importe d'ajuster les critères de durabilité de la biomasse, de ne pas pénaliser certaines énergies, telles que l'hydrogène nucléaire et les bioénergies, et de mieux valoriser les projets des collectivités territoriales. Les États membres doivent déterminer eux-mêmes leur mix énergétique. Ceux dont le mix électrique est le plus décarboné ne doivent pas être pénalisés.

Le paquet « gazier » promeut, quant à lui, une meilleure intégration de l'hydrogène et du biogaz dans les réseaux de gaz naturel . Les rapporteurs jugent crucial un suivi de l'acte délégué prévu, pour garantir un traitement identique de l'hydrogène renouvelable et de celui bas-carbone. D'autres vecteurs de décarbonation du gaz, tels que le biogaz et le gaz bas-carbone, doivent être mobilisés à plein, l'hydrogène ne devant pas être injecté sans mesure dans les réseaux de gaz naturel.

B. DÉCARBONER LES BÂTIMENTS

La directive sur l'efficacité énergétique oblige à réduire de 9 % la consommation d'énergie d'ici 2030 et à rénover 3 % de la surface au sol des bâtiments publics par an . Pour les rapporteurs, il faut tenir compte de la spécificité des bailleurs sociaux et des réseaux d'électricité, de gaz ou de froid dans les objectifs de réduction envisagés. De plus, les États membres doivent être souverains dans l'application du principe de « primauté énergétique », plutôt favorable au gaz, qu'ils doivent pouvoir combiner avec un principe d'« efficacité carbone », plutôt utile à l'électricité. Ils doivent aussi pouvoir définir eux-mêmes les actions d'efficacité énergétique à mettre en oeuvre, en direction des ménages en situation de précarité énergétique. De leur côté, les collectivités territoriales doivent être mieux associées à ces actions. Enfin, les contrats de performance énergétique et les critères de commande publique doivent être utilement mobilisés dans un but d'efficacité énergétique.

La directive sur la performance énergétique oblige à construire des bâtiments « à émission nulle » et à rénover 15 % des bâtiments existants, à compter de 2027 . Pour les rapporteurs, la mise en oeuvre de ces nouvelles normes doit s'accompagner d'un soutien financier pour les constructeurs, les propriétaires ou les copropriétaires, les bailleurs et les locataires. Au-delà, la spécificité des bailleurs sociaux et des bâtiments tertiaires doit être reconnue. Sur le plan de l'approvisionnement en énergie des bâtiments, trois ajustements sont utiles. Un principe de neutralité technologique doit bénéficier à l'énergie nucléaire, dans l'appréciation des bâtiments faiblement émissifs. L'extinction des équipements de chauffage à énergie fossile doit être graduelle, et non sèche, au regard du grand nombre de logements, notamment sociaux, y recourant. Enfin, l'usage du biogaz pour l'alimentation en énergie des bâtiments mérite d'être expérimenté.

C. DÉCARBONER LES CARBURANTS ROUTIERS, AÉRIENS ET MARITIMES

Les règlements sur les carburants aériens et maritimes durables visent à accroître leur utilisation . Ils consacrent des exigences, respectivement, d'incorporation de carburants durables pour l'aérien et d'électrification à quai pour le maritime, à compter de 2025. Constatant que les objectifs des carburants aériens sont très ambitieux, les rapporteurs jugent crucial d'accorder une attention aux délais et aux surcoûts et de prévoir les investissements nécessaires. Un principe de neutralité technologique doit être appliqué à l'hydrogène nucléaire et aux différents biocarburants. À l'inverse, les objectifs des carburants maritimes étant moins ambitieux, ils doivent être relevés. Par ailleurs, il faut prévoir un soutien budgétaire pour les collectivités territoriales, dans l'électrification des quais, et un soutien extrabudgétaire pour les professionnels, dans la décarbonation des carburants. Là encore, les différents biocarburants doivent être intégrés.

Le règlement sur les infrastructures pour carburants alternatifs introduit des objectifs en matière d'infrastructures de recharge électrique, d'hydrogène ou de gaz naturel liquéfié (GNL) . Pour les rapporteurs il faut rehausser l'objectif pour l'électricité et accélérer celui pour l'hydrogène. En application du même principe de neutralité technologique, l'hydrogène et le gaz bas-carbone doivent être pris en compte.

III. UNE APPLICATION IMPACTÉE PAR LA GUERRE EN UKRAINE

A. UNE GUERRE AUGMENTANT LES PRIX ET RÉVÉLANT UNE DÉPENDANCE

La guerre en Ukraine a entraîné une flambée des prix des énergies . Ainsi, le 8 mars 2022, le prix du gaz a atteint 250 € le mégawattheure (MWh), celui du pétrole 130 € le baril et celui de l'électricité 650 € le MWh. Cela représente une multiplication par respectivement 2, 4 et 30 par rapport au confinement du printemps 2020 !

Cette guerre a révélé notre dépendance aux combustibles fossiles russes . En Europe, les importations russes sont supérieures à 75 %, pour le gaz, dans 10 pays 3 ( * ) , et pour le pétrole, dans 4 pays 4 ( * ) . Disposant d'un mix plutôt décarboné (avec 40 % d'énergie nucléaire et 11 % d'énergies renouvelables contre 30 % pour le pétrole et 15 % pour le gaz 5 ( * ) ), la France présente des importations russes inférieures à 25 %, pour le gaz, et à 50 %, pour le pétrole.

La dépendance européenne et française aux hydrocarbures russes

10 pays européens

4 pays
européens

Des importations
issues de Russie inférieures à

Des prix ayant atteint en mars

important les ¾
de leur
gaz

important les ¾
de leur
pétrole

25 %

pour le gaz

50 %

pour le pétrole

250 €

le MWh

130 €

le baril

650 €

le MWh

de Russie

en France

pour le
gaz

pour le pétrole

pour l'électricité

B. UNE SORTIE ENGAGÉE DES COMBUSTIBLES FOSSILES RUSSES

En réponse à la guerre en Ukraine , l'Union européenne et ses États membres ont prévu des sanctions économiques , dont une sortie du gaz, du pétrole et du charbon russes.

Le 8 mars dernier, la Commission européenne a ainsi proposé une action conjointe en faveur d'une énergie plus abordable, plus sûre et plus durable (Plan RePowerUE) , prévoyant une sortie des importations russes bien avant 2030 6 ( * ) via une diversification de l'approvisionnement en gaz et une réduction des combustibles fossiles.

À l'occasion du sommet européen de Versailles, des 10 et 11 mars, le Conseil européen a appelé la Commission européenne à présenter son plan RePowerUE , d'ici mai, et un plan visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement et des prix de l'énergie abordables au cours de la prochaine saison hivernale , d'ici mars. Le Conseil européen a indiqué qu' « alors que l'Union européenne s'emploie à atteindre [l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050], la situation actuelle nous oblige à réévaluer entièrement la manière dont nous assurons la sécurité de nos approvisionnements énergétiques ». Pour ce faire, il a notamment proposé de réduire la dépendance aux combustibles fossiles, de diversifier les sources d'approvisionnement - y compris en recourant au GNL et en développant le biogaz -, de favoriser un marché de l'hydrogène et l'interconnexion des réseaux de gaz et d'électricité ou encore de promouvoir les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique.

Le 23 mars, la Commission européenne a suggéré une obligation de remplissage des stocks de gaz de 90 % ainsi qu'un système de certification des stockeurs , excluant ceux mettant en péril la sécurité d'approvisionnement ou les intérêts liés à la sécurité. Deux jours plus tard, elle a indiqué la mise en place , avec les États-Unis, d'un « groupe de travail conjoint chargé de répondre aux besoins immédiats de l'Union européenne en matière de sécurité énergétique et d'accélérer la transition vers une énergie propre » .

À l'issue du sommet européen de Bruxelles, des 24 et 25 mars, le Conseil européen a appelé la Commission européenne à appliquer sa « boîte à outils » 7 ( * ) et à proposer des mesures complémentaires pour répondre à la hausse du prix de l'électricité ou pour consolider les marchés de l'électricité et du carbone. S'agissant du gaz, il a suggéré un remplissage rapide des stocks, de même que des mesures de coordination adéquates, de solidarité nécessaires et d'interconnexion complètes. De plus, il a plaidé pour un travail sur l'achat volontaire en commun de gaz, de GNL et d'hydrogène .

C. UNE DÉCARBONATION NÉCESSAIRE EN FRANCE ET EN EUROPE

Les rapporteurs seront très vigilants aux répercussions de ce contexte énergétique, totalement inédit et extrêmement fluctuant, sur l'atteinte du paquet « 55 » : si les prix des énergies devaient connaître une hausse durable en Europe, la réalisation de ses objectifs serait d'autant plus difficile et coûteuse, mais aussi d'autant plus nécessaire.

Pour sortir de la dépendance aux combustibles fossiles russes, ils appellent donc à accélérer et intensifier la décarbonation des économies française et européenne .

La commission des affaires économiques a proposé de renforcer les moyens en faveur de l'atteinte de la « neutralité carbone » d'ici 2050 , en mobilisant la production d'énergie décarbonée (nucléaire comme renouvelable), mais aussi la consommation (rénovation énergétique) et le stockage (hydrogène), dans son rapport d'information de 2021 sur l'application de la loi « Énergie-Climat », ainsi que dans deux propositions de loi liées 8 ( * ) .

Elle a plaidé pour mieux intégrer l'énergie nucléaire , non seulement à la « taxonomie verte » 9 ( * ) mais aussi au mix électrique national 10 ( * ) .

Elle a invité à inclure la sécurité d'approvisionnement dans les textes européens en cours d'application ou de négociation (la « taxonomie verte », le paquet « 55 » et la réforme des marchés de l'électricité et du gaz), dans son rapport d'information de 2022 sur l'état de la sécurité d'approvisionnement en France.

Dès le 25 février 2022 , elle a suggéré 5 mesures d'urgence pour sortir de la dépendance au gaz russe , plaidant pour une révision du principe du « coût marginal » 11 ( * ) , une diversification de l'approvisionnement en gaz ( via le gaz naturel liquéfié), une décarbonation de la production de gaz ( via le biogaz), une consolidation du « bouclier tarifaire » (pour les ménages, les entreprises et les collectivités) et un ajustement des textes européens (la « taxonomie verte » et le paquet « 55 » dont le paquet « gazier » connexe 12 ( * ) ).

Enfin, lors de la conférence interparlementaire, tenue au Sénat, le 14 mars, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne (PFUE) , elle a fait adopter des conclusions proposant « d'accélérer la mise en oeuvre de la sortie des économies européennes des énergies fossiles , prévue par le paquet “Ajustement à l'objectif 55” », « d'adopter une stratégie européenne en faveur de la sécurisation de l'approvisionnement en métaux stratégiques pour la transition énergétique , adossée [à ce paquet] » et « de limiter d'urgence la dépendance des économies européennes aux importations d'hydrocarbures , notamment de gaz , et de métaux stratégiques , notamment d'aluminium, de nickel, de palladium ou de titane, provenant de Russie » .

LISTE DES RECOMMANDATIONS

Directive sur la taxation de l'énergie

1. Tenir compte du contexte de crise des prix des énergies et de son impact sur les ménages et les entreprises.

2. Consolider les incitations fiscales prévues pour les entreprises énergo-intensives.

3. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'électricité renouvelable et celle bas-carbone dans la taxation de l'électricité ; prévoir une fiscalité simple et incitative pour les biocarburants, le biogaz, le gaz bas-carbone et le bois-énergie.

4. Prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en leur appliquant un régime fiscal idoine et en les associant aux négociations sur la taxation de l'électricité.

5. Garantir la compétence des États membres dans la définition des ménages en situation de précarité énergétique susceptibles d'être soutenus fiscalement.

Directive sur les énergies renouvelables

6. Tenir compte des caractéristiques économiques et climatiques des mix énergétiques, en prévoyant des objectifs de diversification généraux, réalistes et adaptés ; prendre en considération l'impact de ces objectifs de diversification sur l'équilibre et la performance du système énergétique, notamment sur les prix des énergies, de même que sur l'équilibre, le pilotage, le stockage et le « bilan carbone » de ces énergies.

7. Garantir la compétence des États membres dans la définition de leur mix énergétique, et notamment de l'ampleur et du délai de leur diversification ; ne pas imposer d'objectifs de diversification inadaptés aux États membres dont la production d'électricité est déjà largement décarbonée.

8. Promouvoir les biocarburants, quelle que soit leur génération, en veillant à exclure ceux présentant un risque élevé en termes de « bilan carbone », notamment au regard du changement d'affectation des sols, tels que ceux issus de l'huile de palme ou du soja.

9. Mieux intégrer le biogaz et le gaz bas-carbone, en particulier issus de déchets exempts de conflits d'usages, les réseaux de chaleur et de froid et la cogénération.

10. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone dans la décarbonation de l'industrie.

11. Ne pas déstabiliser les critères de durabilité applicables à la biomasse, s'agissant notamment du principe de cascade, des seuils de puissance, du niveau d'émission et de l'encadrement du bois-énergie.

12. Étendre l'obligation d'information, prévue pour les produits industriels, de l'énergie renouvelable vers celle bas-carbone.

13. Prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en renforçant leur association à la mise en oeuvre des projets d'énergies renouvelables.

Paquet gazier

14. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone, dans l'appréciation des seuils d'émission.

15. Accorder une attention spécifique aux seuils d'émission et aux critères d'additionnalité et de corrélation prévus pour l'hydrogène, devant être fixés par un acte délégué de la Commission européenne.

16. Ne faire de l'injection d'hydrogène dans les réseaux de gaz naturel qu'un débouché limité.

17. Accorder une place au biogaz et au gaz bas-carbone, aux côtés de l'hydrogène, dans la décarbonation du secteur du gaz.

Directive sur l'efficacité énergétique

18. Garantir la compétence des États membres dans l'application du principe de primauté énergétique, en leur permettant de le compléter par un principe d'efficacité carbone et de définir les actions d'efficacité énergétique à destination des ménages en situation de précarité énergétique.

19. Prendre en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine.

20. Prendre en considération la spécificité des réseaux d'électricité, de gaz, de chaleur et de froid dans cette même appréciation.

21. Mieux associer les collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), à la mise en oeuvre des actions d'efficacité énergétique.

22. Mobiliser les contrats de performance énergétique et les critères de commande publique dans un but d'efficacité énergétique.

Directive sur la performance énergétique

23. Accompagner par un soutien financier la mise en oeuvre des nouvelles normes en matière de performance énergétique pour les constructeurs, les propriétaires (bailleurs privés ou sociaux, monopropriétaires ou copropriétaires) et les locataires.

24. Prendre en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine.

25. Prendre en considération la spécificité des bâtiments tertiaires dans cette même appréciation.

26. Appliquer un seuil d'émission adapté, ambitieux et graduel, pour les énergies fossiles utilisées pour le chauffage et le refroidissement, plutôt qu'une interdiction sèche.

27. Appliquer une neutralité technologique entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone, et entre les énergies renouvelables sur site et celles de réseau, notamment dans la définition des bâtiments faiblement émissifs.

28. Prévoir l'expérimentation d'un système d'alimentation des bâtiments au biogaz.

29. Maintenir une bonne articulation entre normes européennes et nationales. Initiative sur les carburants aériens durables

30. Affiner les délais, compenser les surcoûts et encourager les investissements, dans la mise en oeuvre de l'objectif d'incorporation de carburants durables dans le secteur aérien.

31. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone dans cette incorporation.

32. Mieux intégrer les différents biocarburants et les carburants synthétiques.

Initiative sur les carburants maritimes durables

33. Accroître la limitation de l'intensité des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l'énergie utilisée à bord pour renforcer l'incorporation des carburants durables dans le secteur maritime.

34. Prévoir un accompagnement des collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), dans les surcoûts induits par l'électrification à quai.

35. Permettre l'utilisation des garanties d'origine pour favoriser l'incorporation du biogaz liquéfié (bio-GNL) et du gaz naturel liquéfié (GNL).

36. Mieux intégrer les différents biocarburants et les carburants synthétiques. Règlement sur les infrastructures pour carburants alternatifs

37. Renforcer les objectifs contraignants de déploiement des infrastructures de recharge électrique, a minima celles destinées aux véhicules utilitaires légers.

38. Mieux intégrer le gaz naturel liquéfié (GNL), le gaz naturel comprimé (GNC), le biogaz liquéfié (bio-GNL) et le biogaz comprimé (bio-GNC) ainsi que les différents biocarburants et les carburants synthétiques.

39. Renforcer et anticiper l'objectif prévu pour les infrastructures de recharge à hydrogène.

40. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone dans l'appréciation des carburants durables.

VOLET « ÉNERGIE » DU PAQUET « AJUSTEMENT
À L'OBJECTIF 55 » : FACE À LA DÉPENDANCE ÉNERGÉTIQUE, COMMENT DÉCARBONER L'ÉCONOMIE ?

I. UN PAQUET LÉGISLATIF D'AMPLEUR, DONT L'OBJECTIF EST CRUCIAL, MAIS LA MÉTHODOLOGIE PERFECTIBLE ET LE CONTEXTE BOULEVERSÉ

A. UN PAQUET LARGE, DENSE ET TECHNIQUE, ACTUALISANT LES OBJECTIFS ÉNERGÉTIQUES ET CLIMATIQUES EUROPÉENS

Présenté le 14 juillet 2021 et conforté le 15 décembre suivant par la Commission européenne, le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » 13 ( * ) doit permettre à l'Union européenne de réduire de 55 % ses émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030 14 ( * ) , en limitant à 39 % la consommation d'énergie primaire 15 ( * ) ou en relevant à 40 % la part de la consommation d'énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie 16 ( * ) .

Ce paquet constitue la déclinaison concrète de la loi « Européenne sur le climat » 17 ( * ) , du 30 juin 2021, qui assigne à l'Union européenne et à ses États membres un objectif de « neutralité carbone » à l'horizon 2050 (article 2).

Issu de l'Accord de Paris, adopté le 12 décembre 2015 et ratifié le 5 octobre 2016, cet objectif a été transcrit dans notre droit national par la commission des affaires économiques du Sénat , à l'article L. 100-4 du code de l'énergie (1° du I), via la loi « Énergie-Climat », du 8 novembre 2019 18 ( * ) .

Le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » proposé en juillet comporte 8 règlements 19 ( * ) , 5 directives 20 ( * ) , 2 décisions 21 ( * ) et 1 stratégie 22 ( * ) , auxquels ont été ajoutés 2 règlements 23 ( * ) et 2 directives 24 ( * ) connexes proposés en décembre.

Le graphique ci-dessous , établi par la Commission européenne 25 ( * ) , présente la composition initiale du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » :

L'ambition ainsi proposée en matière d'énergie et de climat par les nouveaux règlements et directives précités va au-delà de l'actuel paquet « d'Hiver » 26 ( * ) , présenté par la Commission européenne le 26 février 2020, qui poursuit des objectifs de réduction de 40 % des émissions de GES 27 ( * ) , de 27 % de la consommation d'énergie primaire 28 ( * ) et de 27 % de la part de la consommation d'énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie 29 ( * ) .

Ce paquet est composé 3 règlements 30 ( * ) et de 4 directives 31 ( * ) .

Il a lui aussi été transcrit en droit national par la commission des affaires économiques du Sénat , notamment par plusieurs ordonnances, autorisées par la loi « Énergie-Climat », du 8 novembre 2019 32 ( * ) , et ratifiées par la loi « Climat-Résilience », du 21 août 2021 33 ( * ) .

B. UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION COMMUNE, DONT LE VOLET « ÉNERGIE » A ÉTÉ SUIVI PAR LES RAPPORTEURS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

Pour permettre au Sénat d'exprimer une position forte et unique, à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne (PFUE), sur ces textes, très larges et très techniques, une proposition de résolution européenne (PPRE) a été rédigée conjointement par des membres des commissions des affaires économiques, des affaires européennes et du développement durable et de l'aménagement du territoire 34 ( * ) .

M. Daniel Gremillet et Mme Dominique Estrosi Sassone ont été désignés rapporteurs pour la commission des affaires économiques sur le volet « Énergie » du paquet « Ajustement à l'objectif 55 ».

Ils se sont ainsi penchés sur les textes énergétiques suivants :

- la directive sur la taxation de l'énergie ;

- la directive sur les énergies renouvelables ;

- le « paquet gazier », comprenant le règlement et la directive sur les marchés intérieurs du gaz naturel et renouvelable et de l'hydrogène et le règlement sur la réduction des émissions de méthane dans le secteur de l'énergie ;

- la directive sur l'efficacité énergétique ;

- la directive sur la performance énergétique des bâtiments ;

- l'initiative pour les carburants aériens durables (Initiative ReFuel EU Aviation) ;

- l'initiative pour les carburants maritimes durables (Initiative FuelEU Maritime) ;

- le règlement sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs.

Plus ponctuellement, les rapporteurs se sont penchés sur les implications énergétiques ou économiques d'autres textes, dont :

- le règlement sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne (MACF) ;

- les règlements ou directives sur le système d'échange de quotas d'émission de GES de l'Union européenne (SEQE-UE) et la mise en place d'un système distinct pour les bâtiments et les carburants routiers ;

- le règlement établissant des normes d'émission de CO 2 pour les voitures et les camionnettes.

Au cours de leurs travaux, les rapporteurs ont organisé une dizaine d'auditions, en commun avec leurs homologues de la commission des affaires européennes, MM. Claude Kern et Pierre Laurent : Direction générale de l'énergie de la Commission européenne, Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) et Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) au sein du ministère de la transition écologique, Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), Commission de régulation de l'énergie (CRE), professionnels de l'électricité et du gaz renouvelables et représentants des bailleurs privés et sociaux.

Ils ont également reçu une trentaine de contributions écrites, en commun avec leurs homologues susmentionnés : Haut Conseil pour le climat (HCC), Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - Agence de la transition écologique (ADEME-ATE), Réseau de transport d'électricité (RTE), Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), professionnels de l'électricité et du gaz renouvelables, des biocarburants, de l'électromobilité et de la construction.

Au terme de leurs travaux, les rapporteurs Daniel Gremillet et Dominique Estrosi Sassone ont présenté à leurs collègues les enjeux énergétiques posés par le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » , le 25 janvier 2022 35 ( * ) , ainsi que leurs recommandations , le 24 février suivant.

La proposition de résolution, complète et définitive, a fait l'objet d'un examen par les trois commissions concernées , le 24 février 2022, avant d'être déposée par ses auteurs puis adoptée formellement par la commission des affaires européennes , le 1 er mars.

C. UN CONTEXTE TRÈS DÉGRADÉ DANS LE SECTEUR DE L'ÉNERGIE, IMPUTABLE À LA CRISE DE LA COVID-19 ET À LA GUERRE EN UKRAINE, RENDANT PLUS DIFFICILE, PLUS COÛTEUX MAIS AUSSI PLUS NÉCESSAIRE LA RÉALISATION DU PAQUET

La mise en oeuvre du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » suppose un approfondissement et une accélération sans précédent de la décarbonation des économies européennes.

Dans le secteur de l'énergie , elle nécessite une « révolution copernicienne » , déjà bien engagée en France, sur le triple plan de la production , avec les énergies décarbonées dont celles renouvelables, des usages , avec l'électrification des bâtiments, des industries ou des transports, et du stockage , avec l'hydrogène et les batteries électriques.

Dans la présentation du paquet précité 36 ( * ) , du 14 juillet 2021, la Commission européenne a identifié le secteur de l'énergie comme le levier d'action majeur pour permettre l'application concrète et effective de ce paquet : « La consommation d'énergie étant à l'origine de 75 % des émissions de l'Union européenne, la transformation de notre système énergétique est essentielle à la réalisation de nos objectifs climatiques. Le fait d'économiser davantage d'énergie et de développer le recours accru aux sources renouvelables pour l'énergie consommée est un moteur essentiel de l'emploi, de la croissance et de la réduction des émissions ».

De plus, à cette même date 37 ( * ) , la commissaire européenne en charge de l'énergie, Kadri Simson, a appelé à une « révolution énergétique » pour atteindre la « neutralité carbone » : « Il ne sera pas possible d'atteindre les objectifs du pacte vert sans remodeler notre système énergétique, qui est à l'origine de la plupart de nos émissions . Pour parvenir à la neutralité climatique d'ici à 2050, nous devons faire de l'évolution vers les énergies renouvelables une révolution et veiller tout au long à ce qu'il n'y ait aucun gaspillage énergétique. Les propositions présentées aujourd'hui fixent des objectifs plus ambitieux, lèvent des obstacles et offrent davantage d'incitations pour nous permettre de progresser encore plus rapidement vers un système à consommation d'énergie quasi-nulle . »

De son côté, le 7 septembre 2021 38 ( * ) , le commissaire européen au marché intérieur, Thierry Breton, a précisé que la réalisation du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » suppose de multiplier par deux la production d'électricité décarbonée : « Cela implique de multiplier par deux la production électrique en 2050 [et notamment de] décupler les capacités éoliennes et multiplier par huit ou neuf les panneaux photovoltaïques. »

Pour y contribuer, il a plaidé , le 9 février 2022 39 ( * ) , pour des investissements massifs dans la production d'énergie décarbonée, renouvelable comme nucléaire, cette dernière nécessitant 50 Mds d'euros d'ici 2030 - pour les réacteurs existants - et 500 Mds d'ici 2050 - pour les nouveaux réacteurs : « Pour parvenir à la neutralité carbone, il faut réellement passer à la vitesse supérieure dans la production d'électricité décarbonée en Europe, sachant que la demande d'électricité elle-même va doubler en trente ans ! Cela implique des investissements considérables pour augmenter les capacités de production des énergies décarbonées : le nucléaire et les énergies renouvelables. Les centrales nucléaires existantes, à elles seules, nécessiteront 50 milliards d'euros d'investissements d'ici à 2030. Et 500 milliards d'ici à 2050 pour celles de nouvelle génération ! Cet effort représente environ 20 milliards d'euros par an ».

Ces bouleversements sont d'autant plus importants au regard de la guerre lancée par la Russie contre l'Ukraine, le 24 février 2022, qui a révélé la dépendance des États membres de l'Union européenne aux importations de gaz et de pétrole russes.

Cette guerre a renchéri les prix des énergies, dont la tendance était déjà haussière ces derniers mois au sortir la crise de la Covid-19 : le 8 mars 2022, le prix du gaz a ainsi atteint 250 € le mégawattheure (MWH), celui du pétrole 130 € le baril et celui de l'électricité 650 € le MWh 40 ( * ) .

En comparaison, ces prix s'étaient établis , au coeur du confinement, en mai 2020, à 115 € pour le gaz, 30 € pour le pétrole et 20 € pour l'électricité : ils ont donc été multipliés par respectivement plus de 2, 4 et 30 en deux ans !

Cette guerre a conduit l'Union européenne et ses États membres à prévoir des sanctions économiques, dont une sortie des importations de gaz, de pétrole et de charbon russes :

• le 8 mars 2022, la Commission européenne a ainsi proposé une action conjointe en faveur d'une énergie plus abordable, plus sûre et plus durable (Plan RePowerUE) , prévoyant une sortie des hydrocarbures russes bien avant 2030 41 ( * ) . Pour ce faire, le plan prévoit de diversifier l'approvisionnement en gaz ( via une augmentation des importations de gaz naturel liquéfié - GNL, des importations par gazoduc non russes, et des niveaux de biométhane et d'hydrogène) et de réduire la dépendance aux combustibles fossiles (dans les habitations, les bâtiments, l'industrie et le système énergétique et à travers l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables). Un relèvement des objectifs du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » en matière d'efficacité énergétique et d'énergies renouvelables est envisagé ;

• à l'occasion du sommet européen de Versailles, des 10 et 11 mars, le Conseil européen a appelé la Commission à présenter le plan RePowerUE , d'ici le mois de mai, et un plan visant à garantir la sécurité de l'approvisionnement et des prix de l'énergie abordables au cours de la prochaine saison hivernale , d'ici le mois de mars. Le Conseil européen a indiqué qu' « alors que l'Union européenne s'emploie à atteindre [l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050], la situation actuelle nous oblige à réévaluer entièrement la manière dont nous assurons la sécurité de nos approvisionnements énergétiques ». Il a proposé de réduire la dépendance aux combustibles fossiles, de diversifier les sources approvisionnement - y compris en recourant aux GNL et en développant le biogaz -, d'instituer un marché de l'hydrogène et de développer l'interconnexion des réseaux de gaz et d'électricité, ou encore de développer les énergies renouvelables et l'efficacité énergétique. Il a annoncé continuer à travailler pour assurer des niveaux suffisants de stocks de gaz, surveiller et optimiser le fonctionnement du marché de l'électricité, orienter les investissements vers les systèmes énergétiques - dont les infrastructures de GNL - et améliorer la connectivité avec le voisinage immédiat.

• le 23 mars, la Commission européenne a suggéré une obligation de remplissage des stocks de gaz de 90 % ainsi qu'un système de certification des stockeurs, excluant ceux mettant en péril la sécurité d'approvisionnement ou les intérêts de sécurité Deux jours plus tard, elle a indiqué la mise en place , avec les États-Unis, d'un « un groupe de travail conjoint chargé de répondre aux besoins immédiats de l'Union européenne en matière de sécurité énergétique et d'accélérer la transition vers une énergie propre » ;

• lors du sommet européen de Bruxelles, des 24 et 25 mars, le Conseil européen a appelé la Commission européenne à appliquer sa boîte à outils et à proposer des mesures complémentaires pour répondre à la hausse du prix de l'électricité ou pour maintenir des marchés robustes de l'électricité ou du carbone. S'agissant du gaz, il a appelé à un remplissage des stocks le plus rapidement possible, de même qu'à des mesures de coordination adéquates, de solidarité nécessaires et d'interconnexion complètes. De plus, il a plaidé pour un travail sur l'achat volontaire en commun de gaz, de GNL et d'hydrogène.

La commission des affaires économiques sera très attentive aux répercussions de ce contexte énergétique , totalement inédit et extrêmement fluctuant , sur l'atteinte du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » : si les prix des énergies devaient connaître une hausse durable en Europe, la réalisation de ces objectifs serait d'autant plus difficile et d'autant plus coûteuse, mais aussi d'autant plus nécessaire .

Les bouleversements induits par l'atteinte de la « neutralité carbone » à l'horizon 2050 , ainsi rappelés par les autorités européennes, sont également relevés par celles nationales .

En premier lieu, dans son étude Futurs énergétiques à l'horizon 2050 42 ( * ) , Réseau de transport d'électricité (RTE), en charge de l'équilibre entre l'offre et la demande d'électricité en France, a bien rappelé les implications du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » .

Tout d'abord, la poursuite de la « neutralité carbone » se traduit par une forte électrification : « Au cours des dernières années, les perspectives d'évolution de la consommation d'électricité ont été revues à la hausse partout dans le monde et notamment en Europe sous l'effet d'objectifs climatiques plus ambitieux (- 55 % en 2030, neutralité carbone en 2050) ».

Plus encore, le nouveau paquet précité , en renforçant les objectifs énergétiques et climatiques dès 2030, implique une accélération de cette électrification : « À moyen terme, les nouveaux objectifs européens (- 55 % net en 2030) impliquent une action plus rapide. La trajectoire correspondante nécessite ainsi d'augmenter le rythme d'électrification des usages ».

Pour répondre à ces besoins en électricité, qui augmentent et qui accélèrent, un développement massif et conjoint de toutes les énergies décarbonées, renouvelables comme nucléaire, est crucial : « La logique consistant à renforcer la capacité de production d'électricité bas-carbone (logique additive « renouvelables + nucléaire ») est celle qui présente le meilleur bilan climatique de court/moyen terme et donc celle qui est la plus à même de permettre l'atteinte des objectifs climatiques en 2030 » .

Au-delà de cette production , il faut également électrifier les usages et renforcer l'efficacité voire la sobriété énergétiques : « Une stratégie combinant (i) développement de nouveaux usages électriques, (ii) fort accent sur l'efficacité énergétique (voire sur la sobriété) et (iii) maximisation de la production d'électricité bas-carbone permet d'accélérer significativement la décarbonation à grande échelle du pays ».

C'est pourquoi RTE plaide pour une révision en ce sens de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) : « Dans une optique de renforcement des objectifs climatiques à l'horizon 2030, les options à débattre dans le cadre de la préparation de la future PPE pourront donc porter sur le respect voire l'accélération de la trajectoire de développement des renouvelables d'une part, l'étalement de la trajectoire de fermeture des réacteurs nucléaires d'autre part, sans oublier les nécessaires efforts sur la maîtrise de la consommation ».

En second lieu, lors de son audition par le groupe d'études « Énergie », le 16 février 2022, le président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), Jean-François Carenco a indiqué le tournant majeur auquel est actuellement confronté notre système énergétique .

En effet, des causes structurelles - la « neutralité carbone » - et conjoncturelles - la « flambée des prix des énergies » - éprouvent nos représentations actuelles : « Nous vivons actuellement un moment particulier qui remet en cause nos acquis et renverse notre représentation du monde énergétique. Ce bouleversement procède de deux facteurs concomitants, l'un structurel, l'atteinte de la neutralité carbone en 2050, l'autre, conjoncturel, la crise mondiale des prix de l'énergie. »

Sur le plan structurel, la « neutralité carbone » suppose de combiner électrification des usages, décarbonation de la production et réduction de la consommation : elle induit une « augmentation drastique de nos besoins en électricité si nous voulons décarboner l'économie » , ce qui implique de « réduire de 40 % notre consommation globale d'énergie, développer massivement les renouvelables et nous appuyer sur notre atout nucléaire pour répondre à l'électrification des secteurs ».

Sur le plan conjoncturel, la « flambée des prix des énergies » est venue complexifier singulièrement l'équation, révélant la dépendance des économies européennes aux importations de gaz russes : « En parallèle, la crise des prix de l'énergie, commencée à l'été 2021 en raison de la reprise mondiale post-covid et qui aurait pu être un simple bouleversement exogène et conjoncturel lié à une pénurie temporaire de gaz, a été fortement aggravée par le comportement de la Russie [...] Cette crise est venue mettre à nu une des principales fragilités de notre système énergétique : la dépendance au gaz, et particulièrement au gaz russe ».

Dans ce contexte, très difficile, la commission des affaires économiques est très impliquée en faveur de l'atteinte de l'objectif de « neutralité carbone », mais aussi de la sortie des combustibles fossiles russes :

• elle a appelé à renforcer les moyens en faveur de l'atteinte de la « neutralité carbone » , en mobilisant la production d'énergie décarbonée (nucléaire comme renouvelable), mais aussi la consommation (rénovation énergétique) et le stockage (hydrogène), dans son rapport sur l'application de la loi « Énergie-Climat », du 8 novembre 2019 43 ( * ) , ainsi que deux propositions de loi liées 44 ( * ) , dont une partie du contenu a été intégrée à la loi « Climat-Résilience », du 22 août 2021 45 ( * ) ;

• la commission a plaidé pour mieux intégrer l'énergie nucléaire, non seulement à la « taxonomie verte européenne » 46 ( * ) mais aussi dans le mix électrique national 47 ( * ) ;

• elle a invité à intégrer la sécurité d'approvisionnement , dans les textes européens en cours d'application ou de négociation : la « taxonomie verte européenne », le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » et la réforme des marchés de l'électricité et du gaz, dans son rapport d'information sur le risque de « black-out » 48 ( * ) ;

• le 25 février 2022 , la commission a proposé 5 mesures d'urgence pour sortir de la dépendance au gaz russe 49 ( * ) , plaidant pour une révision du principe du « coût marginal » 50 ( * ) , une diversification de l'approvisionnement en gaz ( via le GNL), une décarbonation de la production de gaz ( via le biogaz), une consolidation du « bouclier tarifaire » (pour les ménages, les entreprises et les collectivités) et un ajustement des textes européens (la « taxonomie verte européenne », le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » dont le « paquet gazier » 51 ( * ) )

• à l'occasion de la conférence interparlementaire, tenue au Sénat, le 14 mars 2022, dans le cadre de la PFUE , la commission a fait adopter des conclusions proposant « d'accélérer la mise en oeuvre de la sortie des économies européennes des énergies fossiles , prévue par le paquet “Ajustement à l'objectif 55” », « d' adopter une stratégie européenne en faveur de la sécurisation de l'approvisionnement en métaux stratégiques pour la transition énergétique , adossée au paquet “Ajustement à l'objectif 55” » et « de limiter d'urgence la dépendance des économies européennes aux importations d'hydrocarbures , notamment de gaz , et de métaux stratégiques , notamment d'aluminium, de nickel, de palladium ou de titane, provenant de Russie , compte tenu de la guerre engagée par cette dernière contre l'Ukraine » .

Ces orientations fortes, de bon sens , pour limiter la dépendance extérieure des économies européennes et accélérer leur décarbonation , doivent encore trouver une application effective, dans les prochains mois et années : la commission des affaires économiques y veillera .

D. LES PRÉREQUIS À UNE BONNE APPLICATION DU PAQUET : L'ÉVALUATION ET LA COMPENSATION FINANCIÈRES, LA STABILITÉ NORMATIVE, LA NEUTRALITÉ TECHNOLOGIQUE ET UNE SUBSIDIARITÉ EFFECTIVE

Les rapporteurs retiennent de leurs travaux plusieurs enseignements généraux , car le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » présente des difficultés de méthode.

Tout d'abord, ce paquet constitue une juxtaposition de textes, très larges et très techniques, dont l'évaluation doit être renforcée . En effet, il intervient dans un contexte de grave crise des prix des énergies, déclenchée par la crise de la Covid-19 et accélérée par la guerre en l'Ukraine. Son impact sur le pouvoir d'achat des ménages, la compétitivité des entreprises et la soutenabilité financière des collectivités doit être mesuré avec attention.

C'est pourquoi les rapporteurs ont soutenu une référence, dans la PPRE, aux « effets potentiels du paquet [...] et à la forte hausse des prix des énergies, qui invitent à réformer le marché européen de l'électricité. »

Deuxièmement, ce paquet manque de stabilité, de lisibilité et de cohérence ; or, les incertitudes juridiques nuisent aux investissements économiques . Environ trois ans après la loi « Énergie-Climat », de 2019, et six mois après la loi « Climat-Résilience », de 2021, le paquet oblige à revoir une grande partie de la transposition du droit européen dans les secteurs de l'énergie et du bâtiment. À titre d'illustration, les normes de performance énergétique applicables aux bâtiments viennent tout juste d'être révisées, qu'il s'agisse de ceux neufs (réglementation environnementale 2020 - RE2020 52 ( * ) ) ou de ceux existants (diagnostic de performance énergétique - DPE 53 ( * ) ).

Aussi les rapporteurs ont-ils plaidé pour une référence dans la PPRE au « besoin d'une stabilité normative et de perspectives claires pour développer les investissements [...] invitant donc la Commission européenne à éviter l'instabilité de la législation européenne en matière d'énergie, notamment. »

Troisièmement, ce paquet ne respecte pas toujours la neutralité technologique entre les énergies décarbonées, renouvelables comme nucléaire . Pourtant, la définition du mix énergétique relève de la compétence exclusive des États membres , en application de l'article 194 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). La France bénéfice d'ailleurs d'un avantage comparatif : parce qu'elle dispose d'un mix énergétique plutôt décarboné (40 % de l'énergie brute pour l'énergie nucléaire et 11 % pour celle renouvelable), elle est moins dépendante aux gaz et pétrole russes (moins de 25 % pour le gaz et de 50 % pour le pétrole, contre plus de 75 % pour la Finlande, la République tchèque, la Hongrie ou la Bulgarie) (voir encadré ci-après) .

C'est la raison pour laquelle les rapporteurs ont soutenu une référence dans la PPRE au fait que « l'Union européenne ne doit se priver d'aucune technologie permettant d'atteindre les objectifs ambitieux qu'elle s'est assignés ».

Enfin, ce paquet induit des surcoûts pour les consommateurs d'énergie, particuliers comme professionnels, qui doivent être limités . Cela suppose de ne pas fixer d'objectifs mal calibrés ou non financés, car la transition énergétique a un coût qui doit être pris en charge, dans un souci de solidarité et de compétitivité, par l'Union européenne et ses États membres. Ainsi, toute nouvelle contrainte normative appelle de nouveaux moyens budgétaires. De plus, si la fiscalité énergétique doit être verdie, elle n'a pas à être pour autant alourdie.

Ainsi, les rapporteurs se sont montrés favorables à une référence dans la PPRE à « la nécessité de préserver et de renforcer encore la compétitivité des entreprises de l'Union [...] en prenant en compte les effets potentiels de recomposition des filières économiques, notamment sur l'emploi. »

L'évaluation et la compensation financières, la stabilité normative, la neutralité technologique et une subsidiarité effective constituent , en définitive, les prérequis indispensables pour réussir la transition énergétique .

C'est la conviction des rapporteurs, dont les recommandations visent à conforter l'ambition du paquet , en veillant à ce que ses modalités d'application soient plus simples et plus neutres, donc plus effectives, car mieux acceptées.

À ces conditions, la transition énergétique ne sera plus perçue comme une obligation juridique, mais comme une opportunité économique , à même de relever les défis auxquels la France et l'Union européenne sont confrontés.

• le premier défi est l'indépendance énergétiqu e, car la guerre en Ukraine démontre la nécessité de réduire notre dépendance au gaz, émissif et importé. Cela suppose de relancer l'énergie nucléaire, mais aussi de développer les énergies renouvelables et leur stockage ;

• le deuxième est l'autonomie minière , puisque la transition énergétique induit une très forte consommation de métaux rares, dont l'approvisionnement doit être sécurisé et les émissions maîtrisées. La fabrication de nos panneaux solaires, de nos pales d'éoliennes, de nos batteries électriques ou de nos électrolyseurs d'hydrogène en dépend.

• le dernier est la relocalisation industrielle , car la décarbonation de notre économie repose sur des industries énergétique, automobile, agroalimentaire ou du bâtiment actives, sources d'emploi, de recherche et d'innovation. Il faut d'urgence relocaliser nos chaînes de valeur et consolider notre autonomie stratégique.

Pour les rapporteurs, les références dans la PPRE à « la résilience de l'économie européenne » , mais aussi à « l'indépendance et la souveraineté énergétiques de l'Union européenne » et à « son autonomie stratégique » sont donc cruciales.

Les États membres de l'Union européenne
face à la transition énergétique et à la dépendance russe : des situations hétérogènes

Les États membres de l'Union européenne présentent une forte hétérogénéité , s'agissant de la composition de leur mix énergétique, de leur dépendance extérieure - notamment vis-à-vis du gaz et du pétrole russes, et de leur transition énergétique - en particulier en matière d'énergies renouvelables et d'efficacité énergétique.

Tout d'abord, le choix du mix énergétique varie nettement entre les États membres.

L'ensemble des États membres recourent encore à des énergies fossiles, notamment au gaz et au pétrole. Pour autant, seuls 5 pays européens ont, en 2019, une part de pétrole dans leur énergie brute disponible supérieure à 50 % : l'Irlande (50,1 %), la Grèce (55 %), le Luxembourg (64,9 %), Malte (87 %) et Chypre (89,9 %). De plus, seuls 3 pays européens ont une part de charbon dans cette énergie supérieure à 25 % : la Bulgarie (27 %), la République tchèque (32,2 %) et la Pologne (41,2 %).

S'agissant de l'énergie nucléaire, près de la moitié des États membres y recourent. Sa part dépasse 20 % de l'énergie brute disponible dans 4 pays : la Bulgarie (22,1 %), la Slovaquie (23,8 %), la Suède (30,1 %) et la France (40,3 %).

Quant aux énergies renouvelables et aux biocarburants, ils représentent en moyenne entre 10 % et 20 % de l'énergie brute disponible des États membres. Pour autant, 5 pays présentent dans ce domaine une part allant au-delà de 30 % : l'Autriche (30 %), le Danemark (33,3 %), la Finlande (35,4 %), la Lettonie (36,8 %) ou la Suède (39,6 %).

Source : Toute l'Europe, janvier 2022

Plus encore, la dépendance énergétique des États membres à l'égard de pays tiers, et singulièrement des importations d'hydrocarbures russes, est aussi variable .

La dépendance au gaz russe est forte dans certains pays , 10 ayant des importations supérieures à 75 % (Finlande, Estonie, Lettonie, Autriche, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Roumanie, Bulgarie). Ces importations s'établissent entre 50 et 75 % dans 3 pays (Allemagne, Pologne, Suède). Cette dépendance est, en revanche, inférieure à 25 % dans 6 pays européens (Irlande, Belgique, Pays-Bas, Portugal, Espagne, Croatie). La France se trouve dans une situation intermédiaire, avec des importations inférieures à 50 %, tout comme l'Italie et la Grèce.

Source : Le Monde , février 2022

La dépendance au pétrole russe est aussi importante dans d'autres pays, 4 ayant des importations supérieures à 75 % (Finlande, Slovaquie, Hongrie, Bulgarie). Ces importations s'élèvent entre 50 % et 75 % dans 2 pays (Pologne, Lituanie) et entre 25 et 50 % dans 4 pays (Pays-Bas, Allemagne, Autriche, Roumanie). Quant à la France, elle présente une proportion inférieure à 25 %, tout comme 11 autres pays (Irlande, Belgique, Danemark, Suède, Estonie, Portugal, Espagne, Italie, Autriche, Croatie, Grèce).

Source : Le Monde , février 2022

Enfin, sur le plan de la transition énergétique, les États membres évoluent dans le même sens, mais à des rythmes différents .

Ce constat est ainsi lisible s'agissant des énergies renouvelables.

Entre 2019 et 2020 , la part des énergies renouvelables a augmenté dans la majorité des États membres ; ces derniers ont atteint ou étaient proches d'atteindre, à l'exception notable de la France, leurs objectifs fixés pour l'année 2020 .

Néanmoins, un écart considérable subsiste entre les États membres dans la part des énergies renouvelables . Tandis qu'en Suède, cette part avoisine les 55 %, elle reste inférieure à 20 % dans 11 pays (France, Croatie, Slovaquie, Chypre, Irlande, Pays-Bas, Hongrie, Belgique, Pologne, Luxembourg, Malte).

Source : Agence européenne pour l'environnement (AEE), mars 2022

Un constat similaire peut être dressé en matière d'efficacité énergétique.

Entre 2005 et 2019, les émissions de GES liées aux bâtiments ont été réduites dans l'ensemble des États membres de l'Union européenne , à l'exception de 3 pays (Luxembourg, Lituanie, Malte).

Cette baisse a atteint entre 30 et 40 % dans 5 pays européens (Autriche, Croatie, Finlande, France, Hongrie) et plus de 40 % dans 5 autres (Danemark, Grèce, Portugal, Slovénie, Suède).

Source : Agence européenne pour l'environnement (AEE), octobre 2021

II. DÉCARBONER L'ÉLECTRICITÉ, LE GAZ ET LE PÉTROLE

A. LES PRÉCONISATIONS : PROMOUVOIR ET RELOCALISER TOUTES LES SOURCES D'ÉNERGIES DÉCARBONÉES

1. La directive sur la taxation de l'énergie : verdir la fiscalité énergétique sans l'alourdir

La directive sur la taxation de l'énergie prévoit une taxation différenciée des carburants ou des combustibles en fonction de leurs émissions, à compter du 1 er janvier 2023, avec une période transitoire jusqu'au 1 er janvier 2033. Quatre catégories sont prévues, avec plusieurs taux, du plus fort au plus faible : gazole et essence ; gaz naturel, gaz de pétrole liquéfié (GPL), hydrogène fossile ; biocarburants non avancés ; électricité, biocarburants avancés, bioliquides, biogaz et hydrogène renouvelable. Une exonération obligatoire est supprimée pour la navigation aérienne et maritime, y compris pour le secteur de la pêche, après une période transitoire de 10 ans. Les États membres conservent la faculté de prévoir une exonération pour les ménages reconnus comme vulnérables et des réductions pour certains ménages, secteurs (agriculture, horticulture, aquaculture, sylviculture notamment), entreprises (grands consommateurs d'énergie notamment), ou produits (électricité renouvelable ou combinée).

Face à la « flambée des prix énergies », les rapporteurs appellent à tenir compte du contexte de crise des prix des énergies, et de son impact sur les ménages et les entreprises.

Pour ce faire, ils plaident pour alléger la fiscalité applicable aux entreprises énergo-intensives .

Dans sa contribution écrite, le Mouvement des entreprises de France (Medef) a ainsi mis en garde contre un « effet cocktail » induit par le paquet : « les taxes sur les combustibles fossiles ne doivent pas s'ajouter au coût des quotas de CO 2 au risque de pénaliser la compétitivité des entreprises, notamment des industries énergo-intensives en l'absence de mécanisme supplémentaire de protection contre les fuites de carbone. »

Cette position est convergente avec celle de l'Union des entreprises utilisatrices d'énergie (Uniden), qui a indiqué : « afin de préserver la compétitivité internationale de l'industrie européenne, les exemptions et exonérations existantes pour les industries à forte intensité énergétique exposées à la concurrence internationale ou fournissant des secteurs exposés aux fuites de carbone doivent être maintenues. »

Pour l'Uniden, il est nécessaire de prévoir une période transitoire, d'éviter les distorsions de concurrence entre les entreprises énergo-intensives (qu'elles soient exposées ou non à la concurrence, que leurs activités soient externalisées ou internalisées) et d'exonérer certaines activités (consommant plus de 50 % d'énergie, relevant de la minéralogie ou consommant de la biomasse de résidus ou de déchets).

La prise en compte spécifique des entreprises énergo-intensives est également souhaitée par les représentants des fournisseurs d'énergie, l'Union française de l'électricité (UFE) indiquant que « les réductions pour les clients énergo-intensifs doivent être maintenues » et l'Association française indépendante de l'électricité et du gaz (Afieg) plaidant pour « le maintien des exonérations fiscales pour le gaz et sur l'électricité » .

De plus, les rapporteurs estiment utile d'appliquer un principe de neutralité technologique entre l'électricité et l'hydrogène renouvelables ou bas-carbone .

S'agissant de la réduction prévue pour l'électricité renouvelable, le groupe EDF estime que « la lutte contre le changement climatique impose de l'étendre à toute l'électricité décarbonée, y compris donc le nucléaire. »

Pour ce qui est de la taxation de l'hydrogène, France Hydrogène regrette qu' « une différence de traitement soit introduite à partir de 2033, date à laquelle le niveau de taxation de l'hydrogène bas-carbone passe à 0,64 €/kg pour un usage dans les transports et 0,54 €/kg pour un usage combustible [contre 0,01 €/kg pour celui renouvelable] », précisant qu'elle « s'oppose à ce choix discriminant et pénalisant la compétitivité de l'hydrogène bas-carbone, sans que cet arbitrage n'ait aucun fondement environnemental qui pourrait justifier une telle différence de traitement ».

En matière de biocarburants, de biogaz et de bois-énergie, plusieurs demandes se font également jour :

- la simplification de la fiscalité applicable aux biocarburants , la Fédération des oléagineux et protéagineux (FOP) appelant à trois fiscalités « incitative, [...] plus avantageuse [et] nulle » et le Syndicat des énergies renouvelables (SER) à deux fiscalités « durable et non durable [en] appliquant au biocarburant durable le taux minimal de 0,15 €/gigajoule » ;

- la simplification de la fiscalité afférente au biogaz , l'Association française du gaz (AFG) proposant deux fiscalités « durable [et] non durable », de même que le SER qui souhaite en outre « appliquer à l'ensemble du biogaz durable le taux minimal de 0,15 €/gigajoule » ;

- la distinction de la fiscalité applicable aux gaz naturel liquéfié (GNL) et au gaz naturel comprimé (GNC) de celle prévue pour l'essence et le gazole , Gaz réseau de transport (GRTgaz) étant désireux d' « assurer un niveau de taxation différent pour le GNV (GNC et GNL) par rapport au pétrole » ;

- la prise en compte du bois-énergie, au même titre que les autres bioénergies , la Fédération des services énergie environnement (Fedene) souhaitant « fixer à zéro le niveau minimum de taxation des bioliquides, biogaz, produits solides utilisant la biomasse en bois et des combustibles provenant de déchets [...] en respectant les critères de durabilité et de GES ».

Les rapporteurs jugent nécessaire de tenir compte de la situation particulière des collectivités territoriales en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE).

Sans êtes hostiles aux incitations fiscales prévues, les AODE souhaitent être associées aux réformes de la fiscalité énergétique locale , et singulièrement à celle prévue pour l'électricité, qui peuvent avoir pour effet une réduction de leurs recettes .

C'est pourquoi la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) a indiqué aux rapporteurs qu'elle n'est « pas opposée par principe à des exonérations, des réductions ou des remboursements de taxe, mais à condition que ces mesures, qui seront prises et appliquées uniformément au niveau national, ne soient pas purement et simplement imposées aux collectivités, en ayant systématiquement et mécaniquement pour effet de diminuer leurs recettes fiscales ».

De plus, les AODE souhaitent voir clarifié leur statut fiscal , pour être assimilées à des consommateurs professionnels, et non particuliers.

Aussi la FNCCR a-t-elle indiqué aux rapporteurs la nécessité d' « assimiler les consommations d'électricité des organismes de droit public ou à tout le moins des autorités régionales et locales à des consommations professionnelles, à titre dérogatoire et le cas échéant de manière limitée dans le temps, afin de pouvoir soulager le budget de ces autorités quand une hausse excessive des prix l'impose ».

Enfin, les rapporteurs jugent crucial que les États puissent déterminer eux-mêmes les ménages vulnérables devant être soutenus fiscalement .

Si la fiscalité indirecte doit légitiment faire l'objet d'une harmonisation à l'échelle européenne, en vertu des articles 113 et 115 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), la politique sociale et celle énergétique relève largement de la compétence souveraine des États membres, aux titres des articles 152 et 194 du même traité.

Directive sur la taxation de l'énergie

1. Tenir compte du contexte de crise des prix des énergies et de son impact sur les ménages et les entreprises.

2. Consolider les incitations fiscales prévues pour les entreprises énergo-intensives.

3. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'électricité renouvelable et celle bas-carbone dans la taxation de l'électricité ; prévoir une fiscalité simple et
incitative, pour les biocarburants, le biogaz, le gaz bas-carbone et le bois-énergie.

4. Prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en leur appliquant un régime fiscal idoine et en les associant aux négociations sur la taxation de l'électricité.

5. Garantir la compétence des États membres dans la définition des ménages en situation de précarité énergétique susceptibles d'être soutenus fiscalement.

2. La directive sur les énergies renouvelables : mobiliser toutes les sources d'énergies décarbonées

La directive sur les énergies renouvelables relève de 32 % à 40 % la part de ces énergies dans la consommation finale brute de l'Union européenne d'ici 2030. Elle prévoit également des sous-objectifs par secteur pour les bâtiments (objectif indicatif de 49 %), l'industrie (objectif contraignant de 50 %), le chauffage et le refroidissement (objectif contraignant de + 1,1 point annuel) et les transports (objectif de 13 % de réduction des émissions de GES, de 0,2 % en 2022, 0,5 % en 2025 et 2,2 % en 2030 pour les biocarburants avancés et le biogaz et de 2,6 % pour les carburants durables d'origine non biologique). De plus, la directive renforce les exigences de réduction des émissions de GES, en introduisant un objectif de 70 % aux carburants renouvelables d'origine non biologique ou aux carburants à base de carbone recyclé. Elle consolide les critères de durabilité, en appliquant, à la biomasse forestière, ceux prévus pour la biomasse agricole, et aux installations existantes d'électricité, de chaleur ou de froid, ceux prévus pour les nouvelles installations ; elle prévoit un mécanisme de vérification pour les installations entre 5 et 10 mégawatts (MW) et une base de données pour les carburants renouvelables ou à base de carbone recyclé. Enfin, la directive renforce les obligations d'information des gestionnaires de réseaux de distribution et de transport en matière d'énergies renouvelables et d'émissions de GES, de même que les obligations de transparence des fabricants de batteries et de capacité de recharge ouvertes au public.

Les rapporteurs souhaitent que la directive sur les énergies renouvelables fasse progresser la décarbonation à l'échelle européenne.

Pour ce faire, ils estiment essentiel de bien tenir compte de la réalité des caractéristiques économiques et climatiques des mix des États membres. Les objectifs de diversification de ces mix doivent donc être généraux, adaptés et réalistes. Leur impact sur les prix des énergies, de même que sur l'équilibre, le pilotage, le stockage et le « bilan carbone » de ces énergies doit être mesuré avec attention .

De plus, les rapporteurs rappellent que la détermination du mix énergétique relève de la seule compétence des États membres. Ceux dont le mix électrique est déjà largement décarboné ne doivent pas être pénalisés.

En effet, l'article 194 du TFUE reconnaît le droit des États membres de définir les conditions d'exploitation de leurs ressources énergétiques, le choix entre différentes sources d'énergie et la structure générale de leur approvisionnement énergétique.

En outre, le Conseil européen, dans sa Stratégie de développement à long terme à faibles émissions de gaz à effet de serre , notifiée le 6 mars 2020 à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), a rappelé le droit des États membres de décider de leur mix énergétique et de choisir leurs techniques, précisant que « certains États membres ont indiqué qu'ils utilisaient l'énergie nucléaire comme part de leur mix énergétique ».

Sollicité par les rapporteurs , RTE considère l'objectif de 40 % d'énergies renouvelables comme « ambitieux », mais « indispensable » ; à  l'horizon 2030, il n'identifie ni « problématique de gisement » ni « mise en péril de la sécurité d'approvisionnement » .

En revanche, il estime indispensable de permettre, en parallèle, un fort recours à l'énergie nucléaire : « Dans le cadre du Pacte vert, l'Union européenne s'est fixée d'atteindre une réduction des émissions nettes de 55 % d'ici 2030. L'atteinte de cet objectif renforcé ne sera possible que sous réserve de maximiser la production bas-carbone, indispensable pour décarboner les usages domestiques et industriels. »

De surcroît, il juge nécessaire de veiller à la performance du système électrique, en évitant les pertes d'électricité induites par la transition énergétique : « Avec la transition énergétique, les pertes sur les réseaux vont augmenter en raison de facteurs exogènes qui ne sont pas spécifiques au réseau : il serait préférable de mettre l'accent sur la réduction de l'empreinte carbone du système électrique dans son ensemble (production-transport et distribution). »

Dans le même esprit, le groupe EDF considère l'objectif précité comme « ambitieux », mais « nécessaire » , relevant que certains objectifs sectoriels sont « très ambitieux » (bâtiments et industrie), « ambitieux » (transports) ou « plus réalistes » (réseaux de chaleur et de froid).

En outre, il considère incontournable d'offrir aux États membres des flexibilités, avec pour la France un fort recours à l'énergie nucléaire : « EDF soutient cet objectif au niveau européen, mais considère qu'il est nécessaire d'offrir plus de flexibilités aux États membres concernant les cibles à atteindre au niveau national. [...] Notamment dans le cas de la France, il apparaît contre-productif de fixer a priori une part EnR 54 ( * ) dans un mix énergétique si cela entraîne le remplacement de moyens de production déjà décarbonés. »

Enfin , il estime utile d'encourager parmi les États membres un chantier de simplification et d'accélération des projets d'énergies renouvelables : « Par ailleurs, cette cible sera très difficile à atteindre si les procédures d'autorisation des projets EnR ne sont pas simplifiées et accélérées. Les délais maximaux (3 ans pour un nouveau projet EnR et 2 ans pour des projets de ? repowering “) indiqués aujourd'hui dans la directive ne sont pas respectés par la plupart des États membres. »

Parmi les points d'attention indiqués aux rapporteurs figure l'évolution des critères de durabilité de la biomasse : font ainsi l'objet de réserves le principe de l'utilisation de la biomasse en cascade, l'abaissement de 20 à 5 MW du seuil de puissance des installations concernées, l'extension des objectifs de 70 à 80 % des émissions de GES des installations nouvelles à celles existantes, et enfin l'interdiction du recours au bois rond.

L'ADEME-ATE a ainsi rappelé ces difficultés : tout d'abord, « le premier point concerne l'interdiction d'utiliser du bois rond de qualité pour des utilisations énergétiques » ; plus encore « dans le projet de directive, la Commission européenne met en avant le principe d'utilisation en cascade. [...] Néanmoins, il faudra veiller à ne pas imposer d'exigences qui pourraient être contre-productives » ; s'agissant de l' « abaissement du seuil de puissance à partir duquel il faut apporter la preuve du respect des critères de durabilité et GES de 20 MW à 5 MW, il faudra que l'Ademe analyse les impacts de cette mesure et la capacité des petites installations à mettre en place cette exigence » ; concernant l' « application des critères GES à toutes les installations y compris existantes (- 70 % d'émissions jusqu'au 31 décembre 2025 puis - 80 %). L'Ademe devra évaluer l'impact de cette mesure sur les installations accompagnées par le fonds chaleur. »

Les difficultés ainsi indiquées par l'ADEME-ATE sont largement partagées par les professionnels auditionnés ou interrogés.

Dans ce contexte, les rapporteurs considèrent qu'un principe de neutralité technologique doit être appliqué entre les différentes énergies renouvelables :

- aux biocarburants, quelle que soit leur génération , la FOP estimant que « l'atteinte de l'objectif de 2,2 % de biocarburants avancés paraît être la plus en risque » et plaidant pour intégrer « toutes les générations et tous les types » et mieux valoriser «  la contribution des biocarburants produits à partir de cultures alimentaires » ;

- aux biogaz et gaz renouvelables ou bas-carbone , le SER regrettant l'absence d' « objectif spécifique pour le gaz renouvelable » pour les « bâtiments, industrie, réseaux de chaleur et de froid » et le Medef relevant que « le biométhane est également un élément clé de la feuille de route de l'Union européenne en matière de décarbonation » ;

- à la cogénération à haut rendement , l'Uniden regrettant « l'extinction du soutien » à l'électricité produite à partir de la biomasse, tandis que la Fedene appelle à maintenir « des objectifs raisonnables » et le SER « des soutiens publics » ;

- aux réseaux de chaleur et de froid , le Medef promouvant « la récupération [de la chaleur et de froid résiduels par les réseaux urbains de chaleur et de froid » , et la Fedene « l'exploitation du gisement de chaleur fatale » .

Les rapporteurs observent que le même principe de neutralité technologique doit également être appliqué entre l'énergie nucléaire et les énergies renouvelables :

- les objectifs sectoriels de décarbonation relatifs à l'électricité ne visent que celle renouvelable , alors que l'énergie nucléaire pourrait être utile notamment dans les transports. C'est pourquoi le groupe EDF a regretté que « s eule l'électricité d'origine renouvelable [puisse] être comptabilisée dans le secteur des transports pour atteindre la nouvelle cible de 13 % de réduction en intensité carbone. L'électricité bas-carbone nucléaire est donc exclue alors même qu'elle apporte des bénéfices comparables en termes de décarbonation » ;

- dans le même ordre d'idées, les objectifs sectoriels de décarbonation afférents à l'hydrogène ne ciblent que celui renouvelable , alors que l'énergie nucléaire pourrait, ici encore, être utile notamment dans l'industrie. Ainsi, France Hydrogène a déploré que « le cadre proposé par la Commission ne respecte pas le principe de neutralité technologique, puisqu'il impose le recours à de l'hydrogène renouvelable pour satisfaire les objectifs sectoriels dans l'industrie. [...] Par conséquent, France Hydrogène soutient l'idée que de plus grandes souplesses et marges de manoeuvre puissent être confiées aux États membres dans l'atteinte des objectifs sectoriels » ;

- s'agissant des obligations d'information prévues pour les produits industriels, elles pourraient être étendues de l'électricité renouvelable à l'électricité nucléaire car, pour le groupe EDF, il apparaît plus pertinent de donner des informations sur l'impact carbone des produits industriels plutôt que sur le "contenu" EnR seul ».

Enfin, les rapporteurs constatent que l'association des collectivités territoriales en tant qu'AODE aux projets d'énergies renouvelables est encore perfectible .

La FNCCR leur a ainsi indiqué que « les collectivités et leurs groupements doivent être au coeur des projets », l'objectif étant pour ces acteurs locaux « de développer directement ou de permettre le développement de projets d'énergie renouvelable. »

Directive sur les énergies renouvelables

6. Tenir compte des caractéristiques économiques et climatiques des bouquets énergétiques, en prévoyant des objectifs de diversification généraux, réalistes et adaptés ; prendre en considération l'impact de ces objectifs de diversification sur l'équilibre et la performance du système énergétique, notamment sur les prix des énergies, de même que sur l'équilibre, le pilotage, le stockage et le « bilan carbone » de ces énergies.

7. Garantir la compétence des États membres dans la définition de leur bouquet énergétique, et notamment de l'ampleur et du délai de leur diversification ; ne pas imposer d'objectifs de diversification inadaptés aux États membres dont la production d'électricité est déjà largement décarbonée.

8. Promouvoir les biocarburants, quelle que soit leur génération, en veillant à exclure ceux présentant un risque élevé en termes de bilan carbone, notamment au regard du changement d'affectation des sols, tels que ceux issus de l'huile de palme ou du soja.

9. Mieux intégrer le biogaz et le gaz bas-carbone, en particulier issus de déchets exempts de conflits d'usages, les réseaux de chaleur et de froid et la cogénération.

10. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone dans la décarbonation de l'industrie.

11. Ne pas déstabiliser les critères de durabilité applicables à la biomasse, s'agissant notamment du principe de cascade, des seuils de puissance, du niveau d'émission et de l'encadrement du bois-énergie.

12. Étendre l'obligation d'information, prévue pour les produits industriels, de l'énergie renouvelable vers celle bas-carbone.

13. Prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en renforçant leur association à la mise en oeuvre des projets d'énergies renouvelables.

3. Le paquet gazier : relocaliser le gaz pour moins en dépendre

Le paquet gazier est un ensemble de trois textes destinés à faciliter l'intégration du gaz renouvelable ou bas-carbone ainsi que de l'hydrogène.

La directive sur les marchés du gaz et de l'hydrogène applique aux gaz, hydrogène et carburants bas-carbone une réduction des émissions de GES de 70 %. Elle organise le marché du gaz et d'hydrogène : règles d'accès, obligations de service public, procédures d'autorisation, système de certification, de relevé et d'accès, règles d'autonomisation et de protection des consommateurs, règles des gestionnaires des réseaux de distribution, de transport de stockage et des autorités de régulation. Les États membres doivent protéger et soutenir les ménages en situation de précarité énergétique. De son côté, la Commission européenne doit instituer un système de certification des carburants renouvelables et bas-carbone. Enfin, les gestionnaires des réseaux de transport doivent réaliser un plan de développement du réseau d'hydrogène et se voient interdits d'exercer une activité de production ou de fourniture d'hydrogène.

Le règlement sur les marchés du gaz et de l'hydrogène prévoit l'évaluation du marché du gaz renouvelable et bas-carbone, l'application d'un taux de réfaction tarifaire et une coopération entre les gestionnaires de réseaux (de distribution, de transport, de stockage ou d'hydrogène). La sécurité d'approvisionnement en gaz doit également être garantie. Elle oblige les États membres à évaluer en commun les risques, mais aussi à prendre des mesures préventives 55 ( * ) et d'urgence - en cas de risque régional - ou de solidarité - en cas d'état d'urgence décrété. Elle leur permet de passer conjointement des marchés de stockage.

Le règlement sur les émissions de méthane prévoit plusieurs dispositions pour le secteur du pétrole et du gaz, mais aussi du charbon. Dans le premier secteur, il oblige les exploitants et les entreprises à déclarer ces émissions et à instituer un programme de détection et de réparation des fuites, ainsi qu'un inventaire des puits inactifs. De plus, il leur interdit, sauf dérogations, le recours à l'éventage 56 ( * ) et au torchage 57 ( * ) . Dans le second secteur, le règlement oblige les exploitants de mines à prévoir un mesurage et une quantification de ces émissions, de même qu'un inventaire des mines fermées et désaffectées. Il interdit également, sauf dérogation, le recours à l'éventage et au torchage, d'ici le 1 er janvier 2025 ou le 1 er janvier 2027. Enfin, s'agissant des émissions produites en dehors de l'Union européenne, sont prévus la communication d'informations par les importateurs, ainsi que l'établissement d'une base de données européenne et d'un outil de surveillance international.

Pour réaliser concrètement la sortie des combustibles fossiles russes, les rapporteurs forment le voeu que le paquet « gazier » contribue urgemment à décarboner et à relocaliser le secteur du gaz.

À cette fin, une vigilance doit s'exercer sur l'acte délégué, notamment pour garantir un traitement identique entre l'hydrogène bas-carbone et celui renouvelable.

C'est vrai pour le seuil d'émission.

France Hydrogène appelle ainsi à « instaurer un seuil similaire à celui de l'hydrogène renouvelable au sens de RED III 58 ( * ) (donc 3,38 kgCO 2eq /kgH 2 ) ».

C'est aussi vrai pour les critères d'additionnalité et de corrélation.

Engie appelle ainsi à éviter « des exigences trop strictes en termes d'additionnalité et de corrélations temporelle et/ou géographique pour la production d'hydrogène renouvelable ».

De plus, l'hydrogène doit être utilisé avec discernement, c'est-à-dire qu'il doit servir à décarboner les secteurs les plus difficiles, et non être injecté sans mesure dans les réseaux de gaz naturel .

Pour France Hydrogène, « l'injection d'hydrogène dans le réseau de gaz [constitue un] débouché complémentaire, à n'autoriser qu'en dernier recours ».

L'hydrogène ne doit pas non plus évincer les autres moyens de décarbonation du gaz plus répandus, le biogaz ou les gaz renouvelable ou bas-carbone.

Pour GRTgaz, le paquet doit ainsi favoriser « le biométhane » et « les autres types de gaz renouvelables », mais aussi « le gaz bas-carbone ».

Un autre point de préoccupation indiqué aux rapporteurs est la dissociation prévue des activités de production et de fourniture de l'hydrogène de celle de son transport ou de son stockage, qui exclurait de facto les gestionnaires de tels réseaux ou infrastructures.

Selon GRTgaz, « les règles de dissociation entre activités de transport H 2 et production/fourniture H 2 [...] excluraient de fait les nombreux gestionnaires de réseaux opérant sous le régime ITO 59 ( * ) en Europe ».

Enfin, pour répondre à la crise gazière née de la guerre en Ukraine, les dispositions relatives à la sécurité d'approvisionnement doivent être utilisées à plein, pour contrôler la provenance du gaz, favoriser son stockage et corriger les déséquilibres , ainsi que la commission l'a indiqué dans ses mesures d'urgence, proposées le 28 février dernier 60 ( * ) .

Paquet gazier

14. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone, dans l'appréciation des seuils d'émission.

15. Accorder une attention spécifique aux seuils d'émission et aux critères d'additionnalité et de corrélation prévus pour l'hydrogène, devant être fixés par un acte délégué de la Commission européenne.

16. Ne faire de l'injection d'hydrogène dans les réseaux de gaz naturel qu'un débouché limité.

17. Accorder une place au biogaz et au gaz bas-carbone, aux côtés de l'hydrogène, dans la décarbonation du secteur du gaz.

B. LES POINTS DE VIGILANCE : GARANTIR L'APPLICABILITÉ DE NOUVELLES EXIGENCES

1. Le système d'échange de quotas carbone de l'Union européenne (SEQE-UE) : veiller à la prévisibilité des prix du CO2 et de l'électricité

S'agissant du SEQE-UE, appliqué notamment à l'électricité et à l'industrie, les rapporteurs retiennent de leurs travaux le besoin d'un mécanisme plus prévisible, plus simple et plus contrôlable .

Certains professionnels sont inquiets de l'impact du prix du CO 2 sur le celui de l'électricité et in fine sur leurs coûts de production ainsi que leur compétitivité-prix.

L'Uniden a ainsi indiqué que les quotas de CO 2 ont un effet inflationniste sur les prix de l'électricité : « l'impact du prix des quotas de CO 2 est un des éléments qui contribuent à la hausse excessive et déconnectée des réalités économiques de production, des prix de marché de l'électricité, y compris décarbonée ».

Dans ce contexte, les rapporteurs relèvent plusieurs doléances.

Tout d'abord, certains professionnels prônent une révision du market design 61 ( * ) européen de l'électricité , souhaitant en particulier la suppression du principe du « coût marginal », qui lie dans les faits le prix de l'électricité à celui du gaz.

Aussi le Medef plaide-t-il pour une réforme en ces termes : « La publication du Paquet Fit for 55 s'inscrit dans un contexte de tension record sur les prix de marché de l'électricité, du gaz et des prix du CO 2 . La soutenabilité et la prévisibilité des prix de l'énergie [sont] une composante majeure de la compétitivité des entreprises. Les signaux envoyés par le marché de détail doivent être compatibles avec les objectifs de décarbonation . Le Medef soutient l'initiative prise par la France pour réformer le fonctionnement de ces marchés ».

En outre, certains professionnels souhaitent un renforcement des quotas de CO 2 attribués gratuitement.

L'Uniden demande « la suppression de la conditionnalité du versement des allocations à titre gratuit » de même que le rétablissement de telles allocations pour « les installations utilisant uniquement de la biomasse » et leur extension à « la chaleur produite à partir d'une chaudière électrique ».

Dans le même ordre d'idées, France Hydrogène souhaite faire bénéficier les installations de production d'hydrogène de ces allocations, en-deçà du seuil et de la date prévus : « Un abaissement du seuil pourrait être ainsi envisagé afin de faire bénéficier cette mesure à davantage de producteurs, ainsi que la date d'entrée en vigueur de cette nouvelle mesure (2026) ».

Enfin, certains professionnels attendent une réallocation des revenus tirés du marché carbone.

À titre d'illustration, RTE plaide pour affecter les « revenus du marché carbone » aux « projets de développement de réseau » .

2. Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne (MACF) : prévenir tout risque d'inflation et de rétorsion

Pour ce qui concerne le MACF, les rapporteurs observent l'anxiété des professionnels quant à deux risques induits par ce dispositif :

- d'une part , la hausse des prix des biens et des services et la baisse éventuelle de la compétitivité des entreprises, dont les industries ;

- d'autre part, des comportements de rétorsion, de contournement ou de fuite.

S'agissant du premier risque, l'ADEME-ATE a indiqué aux rapporteurs exclure un « effet inflationniste », mais anticiper une « hausse de certains produits ».

Concernant le second, l'Uniden a relevé que « les risques de contournement du MACF [sont] réels et importants », ajoutant que « l'efficacité du MACF reste à démontrer, alors que plusieurs pays exportateurs vers l'Europe, dont la Chine, la Russie ou la Turquie, développent déjà les stratégies qui leur permettront d'adosser leurs exportations à des mix énergétiques faiblement carbonés, sans pour autant que leur mix global le soit ».

Plus encore, les rapporteurs retiennent de leurs échanges avec les professionnels des prérequis indispensables à l'institution du MACF :

- sa compatibilité avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ;

- sa distinction d'avec le SEQE-UE, dont les quotas gratuits nécessitent d'être maintenus tant que le MACF n'est pas opérationnel ;

- sa redistribution vers les entreprises, dont les industries.

Le Haut Conseil pour le climat (HCC) a ainsi insisté sur plusieurs préalables à l'application du MACF : « La comptabilité du mécanisme avec les règles de l'OMC [...], la répartition des coûts supplémentaires qu'engendrerait un tel mécanisme pour les entreprises et les ménages [...], la concertation avec l'ensemble des partenaires commerciaux de l'Union européenne, notamment les pays en développement dont les efforts d'atténuation doivent être reconnus ».

De son côté, le Medef a insisté sur des enjeux similaires : « Le premier enjeu réside dans la compatibilité du MACF avec les règles de l'OMC. Pour y parvenir, le règlement final devra être non discriminant et ne pas favoriser les industries européennes au détriment des concurrents étrangers. Le second enjeu tout aussi essentiel est de communiquer auprès de nos principaux partenaires économiques sur les enjeux et le fonctionnement du MACF afin de prévenir d'éventuels contentieux et mesures de représailles. Le troisième enjeu est celui d'inciter nos principaux pays partenaires à se doter de mesures équivalentes à celles de l'Union européenne en matière de tarification des émissions. Le quatrième enjeu est celui de l'allocation des ressources dégagées par le MACF. Il conviendra de flécher prioritairement les ressources générées par le MACF à la transition énergétique de l'Union européenne et de ses entreprises. »

3. Les normes de performance de CO2 applicables aux voitures particulières et aux véhicules utilitaires : favoriser réellement, mais pas exclusivement, l'électromobilité

Quant aux normes de performance de CO 2 prévues pour les voitures particulières et aux véhicules utilitaires, les rapporteurs considèrent l'échéance de 2035, proposée pour l'interdiction des véhicules thermiques, comme très ambitieuse .

C'est pourquoi ils estiment utile d'envisager une dérogation pour les véhicules hybrides notamment.

Si l'électromobilité doit naturellement être encouragée, elle ne constitue pas le seul moyen de décarbonation : les biocarburants ou le biogaz sont une voie possible, notamment en zones rurales, éloignées des grands réseaux électriques ; il en est de même de l'hydrogène, pour certains véhicules.

À titre d'exemple, l'Association française du gaz naturel véhicule (AFGV) a rappelé l'intérêt du « bio-GNL et [du] bio-GNC », et la FOP celui des « biocarburants de toutes les générations et de tous les types » .

III. DÉCARBONER LES BÂTIMENTS

A. LES PRÉCONISATIONS : RENFORCER L'EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE EN TENANT COMPTE DU MIX ACTUEL DES ÉTATS MEMBRES ET DES SURCOÛTS INDUITS POUR LES MÉNAGES, LES ENTREPRISES ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. La directive sur l'efficacité énergétique : tenir compte du mix énergétique des États membres

La directive sur l'efficacité énergétique fixe un objectif de réduction annuelle contraignant, de 9 % d'ici 2030, de la consommation d'énergie à l'échelle de l'Union européenne, chaque État membre devant déterminer une contribution nationale indicative en matière d'efficacité énergétique sur sa consommation d'énergie finale et primaire, sur la base d'une méthodologie harmonisée. Sont prévus des objectifs annuels de réduction de la consommation d'énergie de 1,7 % et de rénovation de la surface au sol des bâtiments de 3 %, dans le secteur public, ainsi que de réalisation d'économies énergie, de 1,5 % entre 2024 et 2030. Les États membres doivent appliquer un principe de primauté énergétique, en veillant à ce que leurs solutions d'efficacité énergétique soient prises en compte dans les décisions de planification, de politique et d'investissement. Ils doivent aussi réduire la précarité énergétique, en mettant en oeuvre des mesures ciblées vers les clients et utilisateurs vulnérables. Sont également prévus une planification et un suivi des installations de chauffage et de refroidissement, un renforcement des audits (pour les grands consommateurs d'énergie) ou des systèmes de qualification, d'agrément et de certification, une consolidation des droits et des obligations des consommateurs et une facilitation du recours aux clauses des marchés publics et aux contrats de performance énergétique.

Les rapporteurs estiment nécessaire de tenir compte de la spécificité des bailleurs sociaux et des réseaux d'électricité, de gaz ou de froid dans les objectifs de réduction ainsi prévus.

S'agissant des bailleurs sociaux, leur inclusion dans le champ de la directive sur l'efficacité énergétique et, plus largement, dans le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », est un sujet de préoccupation majeure.

C'est pourquoi l'Union sociale de l'habitat (USH) a indiqué que « les 3 propositions législatives en cours de révision (directive sur l'efficacité énergétique, directive sur la performance énergétique des bâtiments, ETS 62 ( * ) sur le chauffage des bâtiments) proposent de nouvelles obligations, qui, cumulées deviennent très contraignantes pour les organismes de logement social, considérés, en France, comme organisme de droit public au sens du droit européen, sans visibilité par rapport à l'impact sur l'efficacité énergétique, la décarbonisation et l'impact sur la précarité énergétique ».

Concernant les réseaux, leur intégration dans le champ de la directive sur l'efficacité énergétique soulève plusieurs questions : d'une part, la Fedene s'inquiète de l'inclusion des « infrastructures de réseaux de chaleur et de froid » aux obligations de réduction précitées ; d'autre part, RTE, GRTgaz et l'Afieg s'interrogent sur l'inclusion des « gestionnaires de réseaux » dans les parties obligées des dispositifs d'économies d'énergie.

Les rapporteurs considèrent que les États membres doivent être souverains dans l'application du principe de « primauté énergétique », plutôt favorable au gaz, qu'ils doivent pouvoir combiner avec un principe d'« efficacité carbone », plutôt utile à l'électricité.

Il est aussi crucial qu'ils puissent définir par eux-mêmes les actions d'efficacité énergétique à mettre en oeuvre, en direction des ménages en situation de précarité énergétique.

Constatant la divergence de vues entre l'Association française du gaz (AFG), qui plaide pour un principe de « primauté énergétique » , et l'UFE, qui lui préfère un principe d' « efficacité carbone » , les rapporteurs considèrent que ce sont aux États membres, et à eux seuls, de trancher.

De plus, ils estiment que les collectivités territoriales doivent être mieux associées à ces actions d'efficacité énergétique.

Ils retiennent ainsi de leur audition de la FNCCR que « les AODE doivent pouvoir intervenir dans la mise en oeuvre et le contrôle du principe de primauté de l'efficacité énergétique en matière de réseaux de distribution ».

Enfin, les rapporteurs soulignent que les contrats de performance énergétique et les critères de commande publique , qui font la quasi-unanimité parmi les personnes auditionnées ou interrogées, peuvent et doivent être utilement mobilisés dans un but d'efficacité énergétique .

Directive sur l'efficacité énergétique

18. Garantir la compétence des États membres dans l'application du principe de primauté énergétique, en leur permettant de le compléter par un principe d'efficacité carbone et de définir les actions d'efficacité énergétique à destination des ménages en situation de précarité énergétique.

19. Prendre en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine.

20. Prendre en considération la spécificité des réseaux d'électricité, de gaz, de chaleur et de froid dans cette même appréciation.

21. Mieux associer les collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), à la mise en oeuvre des actions d'efficacité énergétique.22. Mobiliser les contrats de performance énergétique et les critères de commande publique dans un but d'efficacité énergétique.

2. La directive sur la performance énergétique : limiter les surcoûts pour les ménages, les professionnels et les collectivités territoriales

La directive sur la performance énergétique des bâtiments oblige à la construction de bâtiments « à émission nulle » , en 2027, pour les bâtiments publics, et en 2030, pour les autres. Elle prévoit également la rénovation de 15 % des bâtiments existants les moins performants ; les bâtiments publics et les bâtiments non résidentiels doivent atteindre la classe F, d'ici 2027, et la classe E, d'ici 2030, et les bâtiments résidentiels la classe F, d'ici 2030, et la classe E, d'ici 2033, un calendrier devant être fixé par les États membres pour atteindre des classes plus élevées, d'ici 2040 ou 2050. Les États membres doivent notamment instituer des guichets uniques, des aides financières ou une assistance technique, pour aider les ménages vulnérables, réduire la pauvreté énergétique ou soutenir le logement social. Le non-subventionnement des chaudières à combustible fossile est appliqué, à compter du 1 er janvier 2027, une possibilité d'interdiction de ces chaudières étant ouverte aux États membres. Pour la bonne application de ces dispositions, il est prévu de renforcer les plans nationaux de rénovation des bâtiments (d'ici le 30 juin 2024), d'instituer un « passeport de rénovation du bâtiment » (d'ici le 31 décembre 2024), d'harmoniser les « certificats de performance énergétique » (en prévoyant une grille de A à G, en réduisant leur durée de validité de 10 à 5 ans pour certaines classes et en les appliquant aux rénovations majeures et aux bâtiments publics), de préciser les règles d'inspection (qualité de l'air, mobilité durable, plan d'inspection) ou de conforter les bases de données (en instituant de nouvelles bases ou de nouveaux indicateurs et en garantissant leur accessibilité).

Compte tenu de la « flambée des prix des énergies », les rapporteurs estiment crucial que la mise en oeuvre des nouvelles normes de performance énergétique s'accompagne d'un soutien financier pour les constructeurs, les propriétaires ou les copropriétaires, les bailleurs et les locataires.

Ils retiennent de leur audition du HCC le coût élevé de la rénovation énergétique : « La massification de la rénovation énergétique [...] nécessite d'accroître fortement les montants investis par rapport aux tendances passées. La manière dont les instruments de politique publique répartissent l'effort entre ménages, entreprises et dépense publique doit s'inscrire dans une logique de transition juste. »

Outre cet accompagnement des coûts, la spécificité des bailleurs sociaux et des bâtiments tertiaires doit être pleinement reconnue.

L'USH s'est ainsi inquiétée de l'inclusion des bailleurs sociaux dans l'obligation de rénovation, rappelant que 1,3 à 1,8 M de logements nécessiteraient d'être rénovés : « L'article 6 du projet de directive impose aux organismes publics de rénover 3 % par an de la surface de leurs bâtiments, de manière à être transformés en bâtiments à énergie quasi nulle. Ainsi les organismes HLM français, au sens du droit européen, seraient soumis à cette obligation, au côté des bâtiments publics ».

Sur le plan de l'approvisionnement en énergie des bâtiments, trois ajustements semblent nécessaires aux rapporteurs.

Tout d'abord, un principe de neutralité technologique doit bénéficier à l'énergie nucléaire, par rapport aux énergies renouvelables, dans l'appréciation des bâtiments faiblement émissifs. Ce même principe doit aussi être appliqué aux énergies renouvelables de réseau, par rapport à celles sur site.

En effet, l'UFE a regretté devant les rapporteurs que la directive « ne tienne compte que de l'énergie issue de sources renouvelables alors que l'énergie décarbonée joue un rôle clé dans la décarbonation du parc immobilier ».

De plus, s'agissant des équipements de chauffage à énergie fossile, l'extinction prévue doit être graduelle, et non sèche, au regard du grand nombre de logements, notamment sociaux, y recourant actuellement .

Ainsi, l'AFG a indiqué aux rapporteurs que « ce serait une erreur de complètement exclure dans ces délais la possibilité de recourir aux énergies fossiles, sachant que les énergies renouvelables, notamment les EnR locales adaptées aux besoins de chauffage, ne seront pas encore pleinement déployées ».

Enfin, l'usage du biogaz pour l'alimentation en énergie des bâtiments mérite d'être expérimenté, comme s'y est d'ailleurs engagé le Gouvernement auprès de la filière biogaz, lors de la récente révision des normes bâtimentaires nationales 63 ( * ) .

La FNCCR a alerté les rapporteurs en ce sens : « La neutralité doit pouvoir rendre éligibles les productions d'énergie bas-carbone comme le biogaz. Ces boucles locales que pourraient être aussi les modèles d'autoconsommation permettront aussi de limiter la hausse des coûts des énergies. »

Au-delà de la directive en tant que telle, les rapporteurs estiment crucial de veiller à une bonne articulation entre les normes nationales et celles européennes, s'agissant notamment du diagnostic de performance énergétique (DPE) .

Sur ce point, l'USH a ainsi indiqué qu' « une attention particulière est à porter sur les étiquettes E, dont le classement d'indécence est prévu en 2034 dans la réglementation française, contre 2033 par la directive » .

Dans le même esprit, la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) a relevé « l'inadéquation entre le DPE à la française et le certificat de performance énergétique (CPE) européen ».

Directive sur la performance énergétique

23. Accompagner par un soutien financier la mise en oeuvre des nouvelles normes en matière de performance énergétique pour les constructeurs, les propriétaires (bailleurs privés ou sociaux, monopropriétaires ou copropriétaires) et les locataires.

24. Prendre en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine.

25. Prendre en considération la spécificité des bâtiments tertiaires dans la prise en considération dans cette même appréciation.

26. Appliquer un seuil d'émission, adapté, ambitieux et graduel, pour les énergies fossiles utilisées pour le chauffage et le refroidissement, plutôt qu'une interdiction sèche.

27. Appliquer une neutralité technologique entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone, et entre les énergies renouvelables sur site et celles de réseau, notamment dans la définition des bâtiments faiblement émissifs.

28. Prévoir l'expérimentation d'un système d'alimentation des bâtiments au biogaz.

29. Maintenir une bonne articulation entre normes européennes et nationales.

B. UN POINT DE VIGILANCE : FACE À LA « FLAMBÉE DES PRIX DES ÉNERGIES », N'ENVISAGER QUE TRÈS PRUDEMMENT L'APPLICATION D'UN SYSTÈME D'ÉCHANGE DE QUOTAS CARBONE AUX BÂTIMENTS

Outre ces deux directives, les rapporteurs retiennent de leurs travaux une inquiétude ayant trait à l'inclusion éventuelle des bâtiments dans un système d'échange de quotas carbone.

Ils considèrent qu'il ne faut envisager que très prudemment cette évolution, car elle pourrait de fait renchérir le coût d'acquisition des logements et de leur approvisionnement en énergie.

Face à la « flambée des prix des énergies », des conséquences majeures pourraient en résulter sur le pouvoir d'achat des ménages et, plus largement, sur la compétitivité du secteur du logement.

L'ensemble des personnes auditionnées ou interrogées ont alerté sur le besoin d'un accompagnement et d'une compensation, si ce système venait à être mis en oeuvre. Une part importante d'entre elles ont également plaidé pour un système distinct de celui existant (SEQE-UE).

Le groupe EDF a estimé « le surcoût pour un ménage de l'Union européenne en 2030 [à] 300 € pour le logement ».

C'est pourquoi la Fédération française du bâtiment (FFB) a fait part de son opposition à l'intégration du logement à un « marché carbone », indiquant qu'elle « n'est pas favorable à l'intégration du secteur du bâtiment dans un système ETS et [juge] préférable d'intégrer le critère carbone dans la révision de la DPEB 64 ( * ) . »

De même, la Fnaim a fait part de son opposition à l'intégration à un « marché carbone » du chauffage individuel, précisant que « cela nous paraît peu réaliste pour le chauffage individuel : intuitivement, cela reste un marché complexe, difficilement accessible pour des particuliers : sa matérialisation serait un défi, ou très inégalitaire. »

Enfin, l'USH a relevé que l'application d'un « marché carbone » au logement constitue une difficulté redoutable pour les bailleurs sociaux : « Le marché carbone posera un problème majeur au logement social. Il peut être un moyen de ne pas affronter "le mur" de la rénovation, en contribuant de manière opportuniste à ce marché. Par ailleurs, s'il semble nécessaire d'attribuer les bénéfices de ce marché à la réhabilitation énergétique, [...] il est plus pertinent de réclamer des actions aux propriétaires des logements que de leur imposer une pénalité redistribuée a posteriori pour faire des travaux. L'outil d'indécence utilisé dans la législation française répond déjà à cet objectif. »

Quant au HCC, il a lui aussi fait part de réserves, à tout le moins, de prérequis : ainsi, s'il estime que « plusieurs options sont envisageables » , c'est à la « condition de mettre en place les accompagnements et les ajustements adéquats par des politiques complémentaires » .

Au total, les rapporteurs sont donc très réservés sur l'hypothèse d'un système d'échange de quotas carbone appliqué aux bâtiments ; ils estiment indispensable de ne pas appliquer ce système aux logements des particuliers, qu'il s'agisse du parc privé ou du parc social.

IV. DÉCARBONER LES CARBURANTS ROUTIERS, AÉRIENS ET MARITIMES

A. LES PRÉCONISATIONS : CONSOLIDER LES OBJECTIFS PRÉVUS POUR LES CARBURANTS AÉRIENS ET MARITIMES DURABLES ET RENFORCER CEUX POUR LES INFRASTRUCTURES DE RECHARGE

1. L'initiative sur les carburants aériens durables (Initiative ReFuelUE Aviation) : affiner les délais et limiter les surcoûts d'objectifs ambitieux

Le règlement sur les carburants aéronautiques applique, aux exploitants d'aéronefs, aux aéroports de l'Union européenne et aux fournisseurs de carburants d'aviation, une part minimale de carburant durable d'aviation, y compris une part de carburant de synthèse, à compter du 1 er janvier 2025, avec une période transitoire jusqu'au 1 er janvier 2030. Relèvent de ce règlement les exploitants ou propriétaires d'aéronefs réalisant au moins 730 opérations de transport aérien commercial ainsi que les aéroports dépassant un seuil annuel de trafic ou de fret de 1 million de passagers ou de 100 000 tonnes. Pour y parvenir, plusieurs obligations sont prévues dans les aéroports : une quantité annuelle embarquée de carburants représentant 90 % de celle requise (à partir du 1 er janvier 2025), la fourniture d'infrastructures nécessaires à l'accès aux carburants (dans un délai de 5 ans suivant la constatation d'un manquement) et une déclaration annuelle pour les exploitants d'aéronefs ou les fournisseurs de carburants (à partir du 1 er avril 2024).

Les rapporteurs notent que les objectifs fixés pour les carburants durables aériens sont très ambitieux ; aussi appellent-ils à affiner les délais, compenser les surcoûts et encourager les investissements.

En effet, ils rappellent que l'ADEME-ATE leur a indiqué qu' « une période transitoire est nécessaire, car actuellement, les capacités n'existent pas pour permettre l'incorporation de carburants durables. De plus, le surcoût reste un paramètre critique. »

De plus, les rapporteurs observent que certains carburants sont mal intégrés : l'hydrogène bas-carbone, au-delà de celui renouvelable, les biocarburants de première génération, au-delà de ceux plus avancés, ou encore les carburants synthétiques.

Pour décarboner rapidement et effectivement les carburants aériens, les rapporteurs plaident donc pour appliquer à ces différentes technologiques un principe de neutralité technologique.

Leurs échanges avec le HCC les ont convaincus de la nécessité d'accélérer et d'intensifier l'action des États membres en direction de la décarbonation des carburants aériens : « Les émissions des transports aériens doivent être pleinement inscrites dans les efforts des États membres, et en France, pour qu'ils soient intégrés à l'objectif de neutralité carbone. »

Initiative sur les carburants aériens durables

30. Affiner les délais, compenser les surcoûts et encourager les investissements dans la mise en oeuvre de l'objectif d'incorporation de carburants durables dans le secteur aérien.

31. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone dans cette incorporation.

32. Mieux intégrer les différents biocarburants et les carburants synthétiques.

2. L'initiative sur les carburants maritimes durables (Initiative FuelUE Maritime) : renforcer l'ambition d'objectifs limités

Le règlement sur les carburants maritimes durables applique aux navires une réduction des émissions de GES de 2 % d'ici 2025, et jusqu'à 75 % d'ici 2050 (avec une augmentation tous les 5 ans). Relèvent de ce règlement les navires dont la jauge brute est supérieure à 5 000 tonnes, quel que soit leur pavillon. Les États membres doivent permettre une électrification à quai, à compter du 1 er janvier 2030, tandis que les compagnies doivent instituer des plans de surveillance, vérifiés annuellement, au plus tard le 31 août 2024 ; un certificat de conformité est délivré aux navires ne présentant pas de déficit de conformité (pour une période de 18 mois). La Commission européenne est tenue d'instituer une base de données des bilans de conformité.

Les rapporteurs observent que les objectifs fixés pour les carburants durables maritimes sont peu ambitieux : leur rehaussement est donc nécessaire.

En effet, ils rappellent que l'ADEME-ATE leur a précisé que « ce taux peut paraître faible et facile à atteindre par exemple en réduisant la vitesse. Toutefois, le secteur manque de solution de décarbonation. La question principale est surtout d'identifier les sources de financement ».

En outre, les rapporteurs constatent les surcoûts induits par ces objectifs, qui nécessitent de prévoir un soutien budgétaire pour les collectivités territoriales, pour l'électrification des quais, et un soutien extrabudgétaire pour les professionnels, pour la décarbonisation des carburants.

Sur le premier point, la FNCCR a indiqué aux rapporteurs que « l'obligation de raccordement à l'électricité à quai va engendrer des investissements très importants, notamment si les navires ne sont pas déjà eux-mêmes alimentés de manière décarbonée. Par ailleurs, les zones littorales où se situent les ports sont par définition éloignées des ossatures principales du réseau de distribution d'électricité et nécessiteront pas construction des extensions de réseau importantes et/ou des renforcements induits par la demande ».

Preuve de l'importance de ces coûts, l'ADEME-ATE a précisé que « l'investissement côté quai est de l'ordre de 600 €/mégawatt », ajoutant que « les coûts de raccordement de lignes supplémentaires au réseau ENEDIS viennent grever cet investissement ».

Sur le second point, l'AFG a affirmé que « cette trajectoire prévue très ambitieuse prévue n'est tenable que si [...] les compagnies maritimes peuvent utiliser des garanties d'origine ».

Enfin, les rapporteurs jugent utile d'appliquer un principe de neutralité technologique aux différents biocarburants et aux carburants synthétiques, pour décarboner rapidement et réellement les carburants maritimes.

Ils retiennent ainsi de leurs échanges avec le HCC la nécessité d'avancer pleinement dans ce sens : « le Haut Conseil pour le climat recommande l'inclusion des transports internationaux (y compris le maritime) dans les efforts de décarbonation ».

Initiative sur les carburants maritimes durables

33. Accroître la limitation de l'intensité des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l'énergie utilisée à bord pour renforcer l'incorporation des carburants durables dans le secteur maritime.

34. Prévoir un accompagnement des collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), dans les surcoûts induits par l'électrification à quai.

35. Permettre l'utilisation des garanties d'origine pour favoriser l'incorporation du biogaz liquéfié (bio-GNL) et du gaz naturel liquéfié (GNL).

36. Mieux intégrer les différents biocarburants et les carburants synthétiques.

3. Le règlement sur les infrastructures de recharge en carburants alternatifs : élargir les objectifs aux différentes technologies

Le règlement sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs introduit plusieurs objectifs. Pour les véhicules routiers, des objectifs sont prévus pour les véhicules utilitaires légers (puissance de sortie entre 0,66 et 1 kW pour les stations de recharge ouvertes au public et déploiement le long du réseau central et global à un intervalle de 60 km) et les véhicules utilitaires lourds (puissance de sortie entre 100 et 1 200 kW pour les points de recharge ouverts au public et déploiement le long du réseau central, à un intervalle de 60 km, et du réseau global, à un intervalle de 100 km, entre 2025 et 2035) ainsi que l'hydrogène (déploiement le long du réseau central et global, à un intervalle entre 150 et 450 km, d'ici 2030) ou le GNL (déploiement d'un nombre approprié, le long du réseau central, d'ici 2025). Pour le transport maritime, des objectifs sont prévus en matière d'électrification à quai (pour les ports maritimes, dont la jauge brute est de plus de 5 000 tonnes, de même que ceux de navigation intérieure, du réseau central, d'ici 2025, et du réseau global, d'ici 2030), et de GNL (avec un nombre approprié de points d'avitaillement pour les ports maritimes du réseau central, d'ici 2025). Pour le transport aérien, la fourniture d'électricité est requise pour l'embarquement (d'ici 2025) ou le stationnement (d'ici 2030), avec une alimentation renouvelable du réseau ou sur site (d'ici 2030). Les États membres doivent présenter un cadre d'action national pour le développement du marché relatif aux carburants alternatifs et le déploiement des infrastructures correspondantes (avant 2025) et un rapport d'avancement de ce cadre national (avant 2027), la Commission européenne évaluant ces rapports et émettant des recommandations, y compris des mesures correctrices. Sont également prévues des exigences en matière d'information des utilisateurs, de fonctionnement des infrastructures ou de fourniture de données.

Les rapporteurs juge souhaitable de relever l'objectif proposé pour les infrastructures de recharge électrique et de consolider et d'accélérer celui proposé pour l'hydrogène.

Concernant l'électricité, l'UFE a indiqué que les objectifs prévus pour les véhicules légers « paraissent insuffisants », car « 26 États membres sur 27 les ont déjà atteints », de même le groupe EDF a préconisé de « rehausser cet objectif à 2 kW par véhicule électrique à batterie et 1 kW par véhicule hybride rechargeable » .

S'agissant de l'hydrogène, France Hydrogène lui a indiqué qu' « une seule station par agglomération apparaît comme une faible exigence » , tandis qu'Air Liquide a plaidé pour « un objectif minimum à plus court terme » avant l'échéance prévue de 2030.

De surcroît, les rapporteurs estiment utile de faire bénéficier d'un principe de neutralité technologique l'hydrogène bas-carbone, aux côtés de celui renouvelable, le gaz naturel comprimé (GNC), aux côtés du GNL, ainsi que les différents biocarburants et carburants synthétiques.

Pour ce qui est du gaz renouvelable, l'AFGNV a précisé que « les deux principales préoccupations relatives aux objectifs d'infrastructures de recharge sont l'absence d'objectifs pour les stations de ravitaillement en GNC et le délai limité pour les infrastructures de GNL ».

Quant au biogaz et aux biocarburants, la même association a indiqué « la nécessité d'inclure explicitement le biogaz et les biocarburants ».

Règlement sur les infrastructures de recharge en carburants alternatifs

37. Renforcer les objectifs contraignants de déploiement des infrastructures de recharge électrique, a minima celles destinées aux véhicules utilitaires légers.

38. Mieux intégrer le gaz naturel liquéfié (GNL), le gaz naturel comprimé (GNC), le biogaz liquéfié (bio-GNL) et le biogaz comprimé (bio-GNC) ainsi que les différents biocarburants et les carburants synthétiques.

39. Renforcer et anticiper l'objectif prévu pour les infrastructures de recharge à hydrogène.

40. Appliquer une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone dans l'appréciation des carburants durables.

B. UN POINT DE VIGILANCE : ICI ENCORE, FACE À LA « FLAMBÉE DES PRIX DES ÉNERGIES », N'ENVISAGER QUE TRÈS PRUDEMMENT LE SYSTÈME D'ÉCHANGE DE QUOTAS CARBONE APPLIQUÉ AUX CARBURANTS ROUTIERS

Hormis ces trois règlements sur les carburants durables, les rapporteurs retiennent de leurs travaux une inquiétude s'agissant de l'application d'un système d'échange de quotas d'émission aux carburants routiers.

Très réservés sur cette proposition, compte tenu du contexte, déjà rappelé, de « flambée des prix des énergies », ils estiment indispensable qu'un tel système, s'il était effectivement mis en oeuvre, soit distinct de celui existant (SEQE-UE), dans un souci de stabilité normative, et accompagné financièrement, dans un souci de soutenabilité sociale.

Le groupe EDF a estimé « le surcoût pour un ménage de l'Union européenne en 2030 [à] 300 € pour le transport ».

De plus, le HCC s'est exprimé en des termes réservés sur cette disposition : « Une hausse des prix TTC pourrait être très complexe à soutenir d'un point de vue social. [...] Il existe en outre des situations dans lesquelles la demande est très peu élastique, une hausse des prix ne fait pas forcément diminuer la demande. Si aucune alternative n'existe, un automobiliste peut ne pas avoir d'autre choix que de payer son carburant au prix fort, avec une incidence nulle sur les émissions de CO 2 , alors que l'effet sur le pouvoir d'achat est important. »

Pour les rapporteurs, avant d'envisager l'application d'un système d'échange de quotas carbone aux carburants routiers, il faut évaluer avec attention son acceptabilité sociale.

TRAVAUX EN COMMISSION

Mardi 25 janvier 2022

Présentation préalable des rapporteurs

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Le Sénat est saisi d'un ensemble de textes européens que l'on désigne comme le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » : il s'agit d'une dizaine de textes présentés par la Commission européenne, le 14 juillet 2021, pour mettre en oeuvre la « loi européenne sur le climat ». Ce paquet sera l'un des axes importants de la présidence française du Conseil de l'Union européenne qui vient de s'ouvrir pour six mois.

Les textes qui seront finalement adoptés au niveau européen auront des conséquences majeures pour nos entreprises et nos concitoyens. C'est pourquoi il est essentiel que le Sénat fasse connaître sa position sur ces propositions de la Commission européenne dont l'examen a débuté au Conseil des ministres de l'Union européenne et parallèlement au Parlement européen. Ces négociations vont s'accélérer durant ce semestre où la France préside ce Conseil : pour pouvoir peser sur ces négociations, le Sénat doit rapidement adopter une résolution européenne portant sur le contenu de ce paquet, au risque sinon d'arriver après la bataille.

La résolution européenne indiquera au Gouvernement les orientations politiques auxquelles tient le Sénat et signalera les points durs à tenir au long de la négociation des textes proposés par la Commission ; cette négociation va, d'abord, se faire entre les Vingt-Sept au sein du Conseil, puis, une fois l'accord politique trouvé au Conseil et les positions du Parlement européen connues, entre le Conseil et le Parlement européens, dans le cadre des trilogues. La suspension des travaux parlementaires fin février resserre encore la contrainte de calendrier.

Le paquet de textes « Ajustement à l'objectif 55 », que j'appellerai par commodité « Paquet 55 », est construit d'une manière qui appelle le Sénat à se positionner sur l'ensemble des textes qu'il contient, car ils présentent entre eux des interactions - et c'est leur conjonction qui doit permettre à l'Union européenne de se conformer à ses objectifs climatiques : réduire d'ici 2030 les émissions nettes de gaz à effet de serre d'au moins 55 % par rapport à 1990 et atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. Le Conseil lui-même refuse de scinder la négociation qui est donc prévue sur l'ensemble du paquet, même si ce dernier touche à divers sujets : énergie, transports, logement, utilisation des terres, qui ressortent de plusieurs de nos commissions permanentes. Nous l'avons bien mesuré, la semaine dernière, en commission des affaires européennes, en entendant nos deux rapporteurs, Marta de Cidrac et Jean-Yves Leconte, présenter l'architecture d'ensemble du paquet. Notre commission des affaires européennes avait déjà entrepris de se pencher sur le sujet. C'est pourquoi j'ai proposé à Sophie Primas et à Jean-François Longeot, respectivement présidente de la commission des affaires économiques et président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, une méthode de travail qui nous conduit à tenir cette réunion conjointe entre nos deux commissions, comme se tiendra demain une réunion commune entre la commission des affaires européennes et la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

L'objectif est de permettre à ces deux commissions, par la voie du binôme de rapporteurs qu'elle a désignés, de faire valoir au mieux les points de vue en présence, dans un cadre temporel contraint à la fois par le calendrier européen et par les élections nationales qui nous empêchent d'envisager un débat en séance publique sur ce sujet pourtant majeur.

Je vous propose aujourd'hui d'entendre les rapporteurs de la commission des affaires européennes exposer le schéma d'ensemble du « paquet 55 » et ses enjeux, avant que nos commissions en débattent. Après cette réunion, les rapporteurs des trois commissions vont poursuivre ensemble leurs travaux ; l'objectif est qu'ils parviennent à élaborer de concert une proposition de résolution européenne qui serait présentée lors d'une réunion conjointe de ces trois commissions le jeudi 24 février et deviendrait ensuite résolution européenne du Sénat.

Cette démarche concertée devrait nous permettre de faire valoir une position sénatoriale unique et lisible dans des délais appropriés, pour peser efficacement dans les négociations à Bruxelles.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - Alors que la France vient de prendre la présidence du Conseil de l'Union européenne, l'actualité européenne est très riche dans le domaine de l'énergie.

Des négociations importantes se poursuivent sur la « taxonomie verte », pour laquelle le Sénat a adopté, en décembre dernier, une résolution en faveur de l'inclusion de l'énergie nucléaire, à l'initiative de ses commissions des affaires économiques et des affaires européennes.

Je souhaite sincèrement que le Gouvernement parvienne à infléchir le projet d'acte délégué présenté par la Commission européenne : en effet, le statut transitoire proposé n'est pas du tout satisfaisant. L'énergie nucléaire devrait être assimilée à une activité durable, car ses émissions de gaz à effet de serre sont minimes et son impact environnemental maîtrisé, comme l'a estimé le rapport du Centre commun de recherche (CRC) de la Commission européenne. L'énergie nucléaire ne devrait pas être mise sur le même plan que le gaz naturel, car ses émissions sont soixante-dix fois inférieures, selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

Le Gouvernement doit réagir, rapidement et fortement, car l'énergie nucléaire est indispensable pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. Sans une « taxonomie verte » infléchie, il est illusoire d'espérer réaliser le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ». Pour atteindre des objectifs climatiques ambitieux, il faut se donner les moyens énergétiques suffisants. Sans énergie nucléaire, point de salut pour le climat...

Nos collègues Daniel Gremillet et Dominique Estrosi Sassone suivent, en tant que rapporteurs pour la commission des affaires économiques, le volet « Énergie » de ce paquet - les huit textes de ce volet, qui vont des énergies renouvelables à la performance et à l'efficacité énergétiques, en passant par les biocarburants et l'hydrogène, sans oublier la fiscalité énergétique : ils vous présenteront leurs premiers éléments de constat après les rapporteurs de la commission des affaires européennes.

Mme Marta de Cidrac , rapporteur de la commission des affaires européennes . - La Commission européenne a présenté, le 14 juillet dernier, ce paquet « Ajustement à l'objectif 55 », pour mettre en oeuvre la « loi européenne sur le climat ».

Cet élément phare du pacte vert s'inscrit en cohérence avec les objectifs de l'Accord de Paris de 2015 : il impose d'atteindre la neutralité climatique à l'horizon 2050 et, dans ce but, rehausse de 40 % à 55 % l'objectif de réduction nette des émissions domestiques de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Ce point a donné lieu à de nombreux débats avec certains États membres, notamment la Pologne. Le règlement affirme également la volonté de l'Union d'augmenter les absorptions de gaz à effet de serre par les puits de carbone.

L'impact budgétaire, économique et social de cette inflexion est majeur, la Commission européenne évoquant une « transformation radicale ». Lors de la réunion des Présidents de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires de l'Union des Parlements nationaux de l'Union européenne (Cosac) qui s'est tenue au Sénat, le 14 janvier dernier, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a relevé l'importance du plan de relance européen pour financer la transition écologique, mais a aussi pointé l'ampleur des besoins complémentaires. Elle a ainsi estimé que « la transition écologique demandera[it] des investissements supplémentaires de 520 milliards d'euros par an d'ici à 2030 ».

Sur un autre plan et à un échelon national, l'Institut de l'économie pour le climat met en avant l'écart entre les dépenses de l'État en faveur du climat au cours des dernières années et celles qui devraient être déployées pour atteindre les nouveaux objectifs : la marche est considérable, d'autant que la mise en concrète du pacte vert et de la loi européenne sur le climat implique de trouver de nouveaux équilibres et de prendre garde à accompagner la transition économique, sociale et territoriale.

Aussi, avant d'entrer dans le détail de ce paquet, je voudrais relever quelques problématiques transversales ou critères d'analyse ayant une importance politique.

Le paquet tel qu'il est conçu devrait conduire à renchérir les prix de l'énergie, dans un contexte où ces prix flambent déjà. Se pose clairement une question d'acceptabilité sociale de la transition écologique et de choix des outils, à la fois pour atteindre les objectifs et accompagner les mutations nécessaires. Le président de la commission de l'environnement du Parlement européen, M. Pascal Canfin, agite lui-même le spectre de l'apparition de « gilets jaunes » à l'échelle de l'Union.

Deuxième sujet : comment donner les bons signaux à l'industrie tout en tenant compte de ses capacités d'innovation et en préservant la compétitivité des entreprises de l'Union européenne vis-à-vis des entreprises étrangères ? C'est notamment l'enjeu du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières.

Troisième sujet : comment finance-t-on le besoin massif d'investissements ? Quelle doit être la part des investissements publics et privés ? Cette question est en suspens et renvoie à des éléments qui ne figurent pas en tant que tels dans ce paquet, comme le débat sur l'éventuelle adaptation du pacte de stabilité et de croissance pour donner aux États membres des marges de manoeuvre budgétaires supplémentaires, comme la taxonomie ou encore la réglementation financière. Nous avons eu un échange très intéressant avec le fonds Amundi concernant la finance verte et l'intégration par les investisseurs et les entreprises des enjeux climatiques.

Ces différentes questions nous conduisent à poser celle du mix pertinent d'outils : comment combiner de manière efficace objectifs, réglementation, mécanismes de marché, dépenses budgétaires ou fiscales ? Cela nous conduit également à nous interroger sur les curseurs pertinents sur le niveau de solidarité entre les États membres, mais aussi sur l'articulation entre l'action qui doit être menée par les États membres et celle qui doit relever de l'Union européenne.

Ces enjeux sont importants du point de vue des principes et de la capacité opérationnelle à mener à bien les négociations de ce paquet qui implique des transitions particulièrement importantes dans l'est de l'Europe. Or, les tensions en cours relatives au lien entre État de droit et fonds européens pourraient provoquer un raidissement de certains États membres, voire percuter directement ces négociations.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Le paquet comprend treize révisions législatives et nouvelles initiatives interdépendantes ainsi qu'une stratégie sur la forêt.

Il comprend trois pièces maîtresses qui donnent le cadre général :

- la révision du système d'échange de quotas d'émission (SEQE) de l'UE, y compris son extension au transport maritime, la révision des règles relatives aux émissions de l'aviation et la mise en place d'un système distinct d'échange de quotas d'émission pour le transport routier et les bâtiments ;

- la révision du règlement sur la répartition de l'effort en ce qui concerne les objectifs de réduction des émissions des États membres dans les secteurs ne relevant pas du SEQE de l'UE, même si le paquet introduit des zones de recouvrement pour le transport et les bâtiments ;

- la révision du règlement relatif à la prise en compte des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre résultant de l'utilisation des terres, du changement d'affectation des terres et de la foresterie (UTCATF).

Ces trois textes ont déjà été révisés en 2018 : il y a donc des antécédents de négociations. Deux textes totalement nouveaux apparaissent comme des « boucliers » destinés à protéger les ménages et les acteurs économiques européens du choc induit par ce paquet. Il s'agit du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières et du fonds social pour le climat.

Les autres textes sont plus ciblés et apparaissent comme des déclinaisons sectorielles pour atteindre les objectifs assignés par les trois règlements posant le cadre. Je ne les cite pas pour ne pas être trop long.

La difficulté de ce paquet réside dans l'interconnexion des textes : si l'on modifie un curseur dans l'un, il faut procéder à des ajustements dans d'autres pour atteindre l'objectif global de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Cette interdépendance interne au paquet se double de ramifications externes. Un seul exemple : les ressources liées à l'extension du champ du système d'échange de quotas d'émissions et au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières font partie des nouvelles ressources propres proposées par la Commission. Si l'on remet en cause ces éléments, il faudra également en tenir compte sur le volet ressources propres et en tirer les conséquences sur le remboursement de la dette liée au plan de relance européen.

Cette interdépendance des textes et le caractère transversal du paquet rendent particulièrement complexe la conduite des négociations, qui ont pris un peu de retard au départ. L'objectif de la présidence française est de poursuivre les négociations pour parvenir à des orientations du Conseil en fin de semestre. Le Parlement européen, après avoir tâtonné dans son organisation interne, a également pour objectif d'adopter ses positions d'ici l'été. Les négociations ne s'achèveront donc pas sous présidence française, mais risquent d'avancer durant la suspension de nos travaux parlementaires. Si les objectifs sont tenus, la phase de trilogues devrait débuter sous présidence tchèque du Conseil.

Je voudrais maintenant évoquer plus particulièrement quelques enjeux spécifiques à certains textes, en commençant par l'extension proposée du marché carbone.

La Commission européenne s'appuie notamment sur les bons résultats enregistrés par le système d'échanges de quotas d'émission de l'Union, qui aurait permis d'atteindre des résultats plus élevés que ceux prévus, sans toutefois être en capacité de répondre en l'état à la nouvelle ambition climatique de l'Union.

Le transport maritime serait inclus dans le champ du marché à compter de 2023, avec une restitution progressive des quotas gratuits d'ici 2026.

Surtout, le marché serait étendu aux secteurs du transport routier et du bâtiment à compter de 2026, avec une période de test de démarrage en 2025.

Ces deux secteurs, qui représentent un volume important d'émissions, relèvent jusqu'à présent exclusivement du règlement sur la répartition de l'effort. Compte tenu du grand nombre d'émetteurs, c'est la mise à disposition de combustibles destinés aux secteurs du bâtiment et du transport routier qui serait réglementée par le nouveau cadre.

La Commission européenne propose d'utiliser une partie des recettes générées par l'extension du mécanisme de marché de quotas aux secteurs du bâtiment et du transport routier pour alimenter un nouveau fonds social pour le climat qui serait doté de 72,2 milliards d'euros sur la période 2025-2032, allant donc au-delà de l'actuel cadre financier pluriannuel.

Cette proposition de réforme est loin d'être consensuelle. La France a très clairement exprimé des réserves, tout comme le président de la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie du Parlement européen, que nous avons auditionné. M. Pascal Canfin qui considère que la Commission a commis une « erreur majeure », va dans le même sens puisqu'il a proposé la semaine dernière que « le nouveau marché carbone ne concerne que les entreprises, à travers leurs bâtiments commerciaux, et les poids lourds ».

Il précise qu'il faudra alors « diminuer le fonds social en conséquence. À un moment où l'on se bat contre la hausse du prix de l'énergie, étendre le marché carbone au chauffage serait difficilement explicable. Le coût politique de l'extension du marché du carbone, comme le conçoit la Commission, serait majeur, mais l'impact climatique serait très faible parce que l'immense majorité des déplacements de particuliers sont contraints, notamment dans les territoires où il n'existe pas d'alternatives à la voiture individuelle ».

C'est donc un sujet important de débat, qui repose la question de l'accompagnement de la transition, notamment pour les États de l'Est : une réduction du fonds social est-elle acceptable et jusqu'à quel point ?

Une refonte du dispositif remet par ailleurs en cause le schéma proposé sur les ressources propres.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure . - Deuxième volet important : le règlement sur la répartition de l'effort. Jusqu'à présent, le marché carbone et ce règlement sont étanches : on se trouve soit dans un cadre, soit dans l'autre.

Ce ne serait plus le cas. La Commission souhaite maintenir le champ du règlement sur la répartition de l'effort aux secteurs du transport routier et du bâtiment, qui représentent près de la moitié des émissions de ce périmètre, même si elle propose de les inclure aussi dans le marché carbone.

La méthode de calcul utilisée pour la détermination des objectifs nationaux reste fondée sur le PIB par habitant, un nombre limité de corrections ciblées étant appliqué afin de répondre aux préoccupations en matière d'efficacité au regard des coûts.

Les ministères français auraient souhaité que l'on prenne davantage en compte le rapport coût-efficacité et un peu moins la solidarité intra-européenne. D'autres États membres seraient sur la même ligne, mais, à ce stade, il n'y aurait pas de volonté de rouvrir cette question dans la mesure où il s'agit d'un jeu à somme nulle entre États membres. L'effort de négociations porterait davantage sur les flexibilités envisageables.

Le dernier grand cadre du paquet est relatif à la prise en compte de l'utilisation des terres, du changement d'affectation des terres et de la foresterie, qui vient d'entrer en vigueur.

Le dispositif proposé par la Commission européenne fixe un objectif de neutralité climatique des terres à l'horizon 2035. Il s'agit d'un objectif ambitieux puisque les absorptions de CO 2 ont diminué dans le secteur des terres ces dernières années.

La trajectoire proposée par la Commission européenne comprendrait trois étapes : en 2030, un niveau d'absorption de carbone à hauteur de 310 millions de tonnes d'équivalent CO 2 , réparti entre les États membres en objectifs contraignants ; la neutralité en 2035 ; enfin, une hausse supplémentaire des absorptions à compter de 2036.

À cela s'ajoute le fait qu'à compter de 2031, seraient prises en compte les émissions hors CO 2 du secteur agricole. Cela doit nous conduire à bien évaluer les conséquences potentielles du dispositif sur le secteur agricole. Le directeur général de l'énergie et du climat du ministère de la transition écologique considère lui-même que le niveau d'ambition pour les puits de carbone est particulièrement élevé. C'est un point qui mérite d'être davantage approfondi en vue de la proposition de résolution européenne du Sénat qui sera présentée fin février.

J'évoquerai brièvement les secteurs du bâtiment et des transports, qui sont au coeur du paquet.

La Commission européenne veut renforcer l'efficacité énergétique des bâtiments et intensifier le recours aux énergies renouvelables. Lors du Conseil « énergie » de décembre dernier, les ministres de l'énergie ont discuté de l'équilibre entre la nécessité de soutenir le potentiel des énergies renouvelables en tant que source d'énergie rentable et la nécessité de tenir compte des situations nationales et des situations de départ différentes. C'est évidemment un point politique important.

Le président de la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie du Parlement européen appelle à ne pas faire de surenchère sur les objectifs. Il considère en particulier que l'objectif de relèvement de 32 % à 40 % d'énergie renouvelable dans la consommation finale brute d'énergie de l'Union en 2030 paraît « réalisable, mais très difficile à atteindre ».

J'ajoute que pour atteindre les objectifs, la Commission assortit sa démarche de contraintes spécifiques pour les bâtiments publics. Le secteur public serait ainsi tenu de rénover 3 % de la surface de ses bâtiments chaque année.

Le schéma d'ensemble pose un défi important d'adaptation des logements privés et d'évolution du parc social. Il pose des questions de fond, tant sur l'accompagnement financier que sur les garanties d'efficacité des travaux et, plus largement, sur la conception même de l'urbanisme et le lien entre bâtiment et mobilité.

S'agissant des transports, je me contenterai d'évoquer deux points. Concernant l'aérien, le paquet prévoit un plafonnement plus strict du nombre de quotas pour les vols intra-UE et la suppression progressive totale des quotas gratuits d'ici 2026. C'est un sujet qui mérite une expertise spécifique compte tenu des impacts territoriaux potentiels.

S'agissant de l'industrie automobile, l'impact de ce paquet sera très fort et il y a un vrai enjeu de stratégie industrielle et de visibilité pour les constructeurs. En lien avec les objectifs plus ambitieux du règlement sur la répartition de l'effort, la Commission propose de majorer les objectifs de réduction des émissions de CO 2 pour les voitures et les camionnettes à l'échelle de l'Union européenne d'ici 2030 et, surtout, fixe un nouvel objectif de 100 % de réduction d'ici 2035. Dans la pratique, cela signifie qu'à partir de 2035, il ne serait plus possible de mettre sur le marché de l'Union des voitures ou camionnettes équipées d'un moteur à combustion interne, y compris des modèles hybrides.

Des débats existent entre États membres, certains sont plus maximalistes que d'autres. Comme l'a souligné l'une des personnes auditionnées, et cela vaut pour les transports comme pour le bâtiment, la démarche générale de la Commission européenne ne prend pas en compte l'usage et interroge sur la prise en compte de l'ensemble du cycle de vie, de la production jusqu'au recyclage.

Dans le cadre de ces débats, se posent plusieurs sujets connexes, comme celui de la définition de l'hydrogène renouvelable et bas carbone et l'enjeu de déploiement des infrastructures de recharge.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur . - Nous terminons la présentation de ce paquet en évoquant les deux boucliers prévus, à savoir le fonds social pour le climat et le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières.

Le nouveau fonds social pour le climat, dont la création est directement corrélée au projet d'extension du marché carbone aux secteurs du bâtiment et des transports routiers, a pour objectif, selon la Commission européenne, « d'atténuer les incidences sociales et distributives sur les plus vulnérables » de ce projet.

Alimenté par 25 % des recettes résultant de cette extension, il devrait représenter un volume de dépenses de 23,7 milliards d'euros de 2025 à 2027, puis de 48,5 milliards de 2028 à 2032.

Le fonds disposerait en particulier de mesures de soutien aux ménages vulnérables, aux microentreprises vulnérables et aux usagers vulnérables des transports et pourrait couvrir des aides directes temporaires au revenu.

Pour cela, en reprenant une formule éprouvée dans le cadre de la Facilité pour la reprise et la résilience, les États membres devraient présenter des plans sociaux pour le climat assortis de mécanismes de reporting très lourds, mais aussi contribuer à hauteur de 50 % au financement du coût total estimé de leurs plans nationaux.

La création de ce fonds pose des questions de principe sur l'articulation entre l'action des États membres et celle de l'Union, sur le mécanisme de reporting , mais aussi sur la clé de répartition des droits entre États membres.

Enfin, je dirai quelques mots du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, que le Sénat avait appelé de ses voeux et qui devrait être pleinement opérationnel en 2026, après une phase transitoire expérimentale d'ici 2025. Le Parlement européen pourrait vouloir aller plus vite.

Directement lié au système d'échanges de quotas d'émissions, mais aussi à la proposition de décision sur les ressources propres, il apparaît comme un outil indispensable pour prévenir le risque de fuite de carbone et faire en sorte que les nouvelles ambitions climatiques de l'Union ne pénalisent pas les entreprises européennes.

À ce stade, cinq secteurs particulièrement émetteurs et exposés seraient couverts par ce mécanisme qui doit être conçu pour être conforme aux règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

On sait que les appétences des États membres vis-à-vis de ce dispositif sont diverses, l'Allemagne étant particulièrement attentive aux mesures de rétorsion commerciale potentielles.

La mise en place de ce dispositif doit s'accompagner d'une suppression progressive des allocations de quotas gratuits d'émission. C'est intellectuellement cohérent, mais il faut veiller à ce que cette suppression progressive s'effectue à un rythme compatible avec la situation des entreprises européennes.

Des questions se posent également sur le champ d'application du mécanisme, le Parlement européen envisage par exemple d'y inclure le secteur de la chimie. Mais le point qui me paraît le plus important politiquement est celui des failles qui ont déjà été identifiées. En effet, le mécanisme, conçu pour assurer une neutralité au sein de l'Union, pourrait pénaliser les entreprises européennes exportatrices, dès lors qu'elles ne bénéficieraient plus de l'allocation de quotas gratuits. C'est un point majeur, car il serait évidemment absurde que le système pénalise nos exportations ou conduise à créer des filiales extérieures à l'Union pour contourner ces difficultés.

Voici résumés quelques points saillants de ce paquet particulièrement complexe du fait de son caractère transversal et de l'interdépendance des textes, mais aussi particulièrement lourd en termes d'impact sur la vie quotidienne des citoyens européens et des entreprises. Au-delà des enjeux techniques, il nous paraît essentiel d'avoir une approche politique de ce paquet et de bien mesurer ce qui est politiquement acceptable et ce qui ne l'est pas.

Des divergences parfois majeures d'appréciation existent par rapport à la proposition de la Commission européenne, qui utilise indéniablement ce paquet comme un outil d'accroissement de ses capacités d'action. Ce paquet s'inscrit également dans des réflexions budgétaires plus larges, tant concernant les marges de manoeuvre des États membres pour faire face au coût de la transition écologique que concernant la dimension de l'action de l'Union.

Il faut bien voir également que ce paquet implique une transformation majeure de notre vie économique, et que les questions qu'il pose vont bien au-delà de celle des ressources budgétaires : il y a, en réalité, un défi technique et technologique majeur, pour que la transition se réalise et qu'elle voit naître des outils que nous devons être en mesure de fabriquer, et c'est pourquoi nous ne devons pas nous fermer les portes à l'innovation, mais conserver la palette la plus large possible. Le paquet pose aussi un défi massif de financement, en particulier pour les dépenses contraintes de logement et de transports, mais aussi pour des organisations actuelles, par exemple le logement social.

Nous devons aussi bien mesurer l'incidence de nos décisions sur les émissions globales de carbone. Ainsi, nos productions ont beaucoup progressé pour réduire leur empreinte carbone. C'est ce qui rend la taxe carbone aux frontières de l'Union particulièrement importante. Mais nous n'avons pas la même position sur ce sujet que l'Allemagne, parce que nos voisins ont bien plus que nous besoin d'importer des produits pour fabriquer d'autres produits qu'ils exportent, et je ne parle pas que de l'automobile.

Il faut également parvenir à ce que l'exemple européen contribue à modifier certaines règles au sein de l'OMC. Les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre n'ont pas un calendrier aussi serré que le nôtre pour atteindre la neutralité carbone : la Chine se positionne sur 2060, l'Inde sur 2070 - comment faire pour que les mesures que nous prenons servent aux autres, et que notre exemplarité soit en quelque sorte motrice, en particulier auprès de nos voisins qui aspirent à plus d'intégration avec l'Europe - je pense par exemple à la Turquie - ?

Enfin, il est très important de ne pas mettre tout l'argent disponible sur les sujets techniques, car il faut prévoir un accompagnement fort pour que la société s'adapte, les enjeux sociaux sont cruciaux.

M. Daniel Gremillet , rapporteur de la commission des affaires économiques . - Le 14 juillet dernier, la Commission européenne a présenté le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », dont l'objectif est de décarboner les politiques publiques de l'Union européenne et de ses États membres, pour réduire les émissions de 55 % d'ici à 2030.

Le volet « Énergie » de ce paquet étant très vaste et très dense, ma collègue Dominique Estrosi Sassone et moi-même ne vous en présenterons que les aspects les plus saillants : j'évoquerai l'énergie et ma collègue, le bâtiment.

En premier lieu, les textes proposés fixent des objectifs très ambitieux en matière d'énergies renouvelables ou alternatives.

La directive sur les énergies renouvelables relève de 32 % à 40 % la part de ces énergies dans la consommation finale d'ici à 2030, en prévoyant des sous-objectifs par secteur - le bâtiment, l'industrie, le chauffage et les transports. Pour le bâtiment et l'industrie, le sous-objectif est de 50 %. Pour les biocarburants avancés, le sous-objectif est de 2,2 %. De plus, la directive promeut le stockage et l'hydrogène et renforce la durabilité et la traçabilité de la biomasse utilisées à des fins énergétiques.

Les règlements sur les carburants aéronautiques et maritimes durables visent à accroître l'utilisation de carburants alternatifs. Ils consacrent en particulier des exigences, respectivement, d'incorporation de carburants durables pour l'aérien et d'électrification à quai pour le maritime, à compter de 2025. C'est un complément utile au dispositif d'incorporation existant pour les biocarburants routiers depuis dix ans déjà.

En second lieu, les textes proposés comprennent des outils concrets pour réaliser ces objectifs ambitieux.

La directive sur la taxation de l'énergie prévoit une taxation différenciée des carburants ou des combustibles en fonction de leurs émissions, à compter de 2023. En clair, les carburants fossiles (le gazole et l'essence) seront davantage taxés que ceux alternatifs (le gaz naturel, le gaz de pétrole liquéfié - GPL, l'hydrogène fossile) ou que ceux durables (l'électricité, certains biocarburants, le biogaz, l'hydrogène renouvelable). Une exonération fiscale sera supprimée pour l'aérien et le maritime. Les États membres conserveront la faculté de prévoir des exonérations ou des réductions fiscales pour les ménages vulnérables ou dans certains secteurs (l'agriculture, la forêt, l'industrie).

De son côté, le règlement sur les infrastructures pour carburants alternatifs introduit des objectifs en matière d'infrastructures de recharge électrique, pour les véhicules légers comme lourds, ainsi que pour l'aérien et le maritime. Elle prévoit aussi de tels objectifs pour l'hydrogène et le gaz naturel liquéfié (GNL).

Enfin, le paquet gazier promeut, quant à lui, une meilleure intégration du biogaz et de l'hydrogène dans les réseaux de gaz naturel. C'est une nécessité, car la stratégie européenne pour l'hydrogène vise à produire 10 millions de tonnes d'hydrogène renouvelable d'ici à 2030.

Enfin, au-delà de ces textes énergétiques, il faut savoir que le paquet renforce les outils « carbone », que je ne ferai que mentionner.

Le système d'échange de quotas d'émission sera renforcé, ce qui aura une incidence forte pour les producteurs d'énergie et les industries énergo-intensives. Un dispositif similaire sera appliqué aux carburants routiers et aux logements, un débat animé existant déjà à ce sujet.

Enfin, un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne sera appliqué : c'est un serpent de mer, qui doit protéger effectivement nos industriels et nos entreprises du dumping environnemental.

Je ne pourrais vous donner aujourd'hui qu'une première appréciation sur ces textes, car notre travail est en cours - à ce stade, nous avons organisé six auditions et sollicité une trentaine de contributions.

Je soutiens pleinement la décarbonation cruciale du secteur de l'énergie ; pour autant, plusieurs éléments doivent être rappelés.

Tout d'abord, il faut veiller à la neutralité technologique, car toutes les énergies décarbonées, renouvelables comme nucléaires, doivent être mobilisées en faveur du climat. Nous n'avons plus le temps d'ergoter sur ce sujet. Par ailleurs, je rappelle que la définition du mix énergétique relève de la seule compétence des États membres.

Plus encore, il faut veiller à davantage de constance, de lisibilité et de cohérence dans les textes. Ma collègue et moi-même avions transposé en tant que rapporteurs les précédents paquets européens, dans les lois du 8 novembre 2019 relatives à l'énergie et au climat dite « Énergie-Climat », et du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « loi Climat et Résilience ». À la lecture de ce nouveau paquet, tout serait à reprendre... Or, pour réussir la transition énergétique et ses lourds investissements, il nous faut donner du temps et de la stabilité.

Dans le même esprit, il faut veiller à la compensation des effets sociaux et économiques de ces textes. Car la transition énergétique a un coût, qui doit être pris en charge par l'État ou l'Union européenne, au titre de la solidarité. Gardons-nous d'objectifs non financés, ou d'objectifs peu réalistes, dans le secteur si sensible de l'énergie. Si la fiscalité énergétique doit ainsi être verdie, elle ne doit pas être alourdie, a fortiori dans ce contexte de crise. Le coût global du paquet nécessite également d'être évalué...

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur de la commission des affaires économiques . - S'agissant du bâtiment, la directive sur la performance énergétique oblige à la construction de bâtiments « à émission nulle », en 2027 pour les bâtiments publics et en 2030 pour les autres. Elle prévoit également la rénovation de 15 % des bâtiments existants et le non-subventionnement des chaudières à combustible fossile, à compter de 2027. Pour la bonne application de ses dispositions, il est prévu de renforcer les plans de rénovation des bâtiments, d'harmoniser les certificats de performance énergétique, d'instituer un passeport sur les rénovations et de renforcer les normes d'inspection.

Plus encore, la directive sur l'efficacité énergétique oblige à réduire de 9 % la consommation d'énergie d'ici à 2030. Elle introduit le principe de la primauté de l'efficacité énergétique, c'est-à-dire que les États membres devront intégrer les solutions d'efficacité énergétique dans leurs politiques nationales et en rendre compte, via des contributions nationales. Ces derniers devront réduire de 1,5 % par an leur consommation d'énergie ; chaque année, dans le secteur public, la réduction de la consommation devra atteindre 1,7 % et la rénovation des bâtiments 3 % en fonction de leur surface au sol. Enfin, les règles afférentes à l'installation des systèmes de chauffage, à la réalisation d'audits techniques ou encore à la passation des marchés publics seront renforcées.

Tout comme mon collègue, je souscris pleinement à la décarbonation du secteur du logement. Je crois aussi qu'il faut veiller à la neutralité technologique, à la stabilité normative, et à la compensation des coûts.

S'agissant de la stabilité normative, je rappelle que nous venons tout juste de réformer la règlementation environnementale 2020 (RE2020), applicable aux bâtiments neufs, et le diagnostic de performance énergétique (DPE), prévu pour les bâtiments existants !

Sur le fond, trois éléments méritent d'être indiqués.

D'abord, la définition des bâtiments neufs à « émission nulle » doit bien intégrer toutes les sources d'approvisionnement énergétiques décarbonées, nucléaires comme renouvelables.

Ensuite, si une harmonisation de la classification des bâtiments existants est utile, il faut bien prendre en compte la diversité géographique et climatique au sein de l'Union européenne.

Enfin, l'intégration du logement dans un marché carbone, que je ne ferai qu'évoquer, est un vrai sujet d'attention, dont les conséquences doivent être pleinement évaluées.

Pour conclure sur mes premières observations, je veux insister sur la nécessité de compléter les obligations juridiques par des incitations financières : toute nouvelle norme, pour les propriétaires ou les bailleurs, doit être accompagnée par l'État ou l'Union européenne, faute de quoi elle ne ferait que renforcer la précarité énergétique.

M. Jean-François Rapin , président . - Merci pour ces présentations. Ce chantier est énorme, nous y travaillons à trois commissions, les consensus seront probablement difficiles à trouver, mais j'ai bon espoir que nous y parviendrons. Nous avons déjà évoqué l'aspect financier, après les chiffres communiqués par notre collègue Christine Lagarde, car le cadre pluriannuel de financement et le plan de relance ne suffiront pas : il faudra examiner ce qu'il en est.

M. Laurent Duplomb . - Pour l'agriculture, la stratégie « Farm to fork » est la chronique d'un désastre annoncé et programmé : elle se traduira par une perte globale de terres agricoles de 10 %, par un recul des engrais de 20 % et de 50 % pour les produits phytosanitaires et, résultat d'une politique perdant-perdant, par un recul de notre production alimentaire de 12 %. Si ces dispositions s'appliquaient au niveau international, la production alimentaire mondiale reculerait de 11 %, ce qui signifie 191 millions de personnes supplémentaires en pénurie alimentaire et une perte générale de 1 100 milliards de dollars de richesse. Sans compter qu'avec l'augmentation des prix qui s'en suivrait sur le marché européen, nous devrions quasiment doubler nos importations de produits agricoles, ce qui ferait pencher les émissions carbone du mauvais côté. On estime en effet que si cette stratégie de « Farm to fork » faisait baisser nos émissions carbone de 20 %, les deux-tiers de ce gain seraient perdus par les émissions supplémentaires des produits que nous serions contraints d'importer plutôt que de les produire... L'Europe continuerait ainsi d'exporter ses nuisances environnementales, en faisant reculer la production chez elle, au prix de problèmes sociaux qui ne feraient que s'aggraver. C'est de tout cela dont nous ne voulons pas.

M. Jacques Fernique . - Il faut bien voir que l'extension envisagée du système d'échanges de quotas et les nouvelles normes appliquées au logement et aux transports routiers poseront des problèmes aux ménages, car nous sommes dans des dépenses contraintes - et c'est bien la norme, ici, qui est le levier d'action. Ensuite, sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, le maintien de quotas gratuits pour des zones géographiques plus émettrices de carbone n'est pas tenable longtemps. Enfin, il apparaît clairement qu'il faut accompagner la transition, au moins sur trois volets : les ménages, en raison des dépenses supplémentaires ; le tissu industriel, qui doit adapter son appareil de production et les emplois, nous voyons déjà ce qui se profile dans l'automobile ; enfin, et on n'en parle pas assez, les territoires : il faut qu'une part des nouvelles ressources abondent un fonds pour les collectivités territoriales, qui seront conduites à jouer un rôle plus important dans la transition.

M. Jean-Marc Boyer . - Tous ces milliards d'euros annoncés m'inquiètent. La Chine représente 28 % des émissions de carbone, les États-Unis 14 %, l'Inde 6,6 %, et les projections montrent que les principaux émetteurs vont continuer de l'être, voire qu'ils vont renforcer leurs émissions. De son côté, la France représente 0,8 % des émissions de CO 2 et va faire de gros efforts pour les diminuer encore : sait-on quelles mesures prendront les autres pays pendant que nous ferons ces efforts - et quelles garanties a-t-on qu'ils les prendront effectivement ?

M. Franck Montaugé . - Dans la stratégie « Farm to fork », les émissions sont-elles évaluées en net des émissions captées, ou bien seules les émissions brutes sont-elles prises en compte ? Ensuite, dispose-t-on d'un chiffrage pluriannuel des coûts, à l'échelle des pays, voire des territoires ? Enfin, il me semble qu'on ne pourra pas réussir la transition sans une planification : ces directives prévoient-elles des outils de planification ?

Mme Marta de Cidrac , rapporteur . - Je ne m'engagerai pas, tant que nos travaux ne sont pas terminés, à répondre à ces questions importantes, mais je peux d'ores et déjà dire que nous sommes bien conscients que l'évaluation des émissions est importante, et qu'on ne parle pas de la même chose quand on prend en compte le carbone capté : nous examinons cette question et nous entendons bien mettre la focale sur l'évaluation concrète des émissions.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur . - Il y a sur ce sujet une question de volonté politique : les pays européens se sont mis d'accord sur un objectif chiffré pour 2030, reste à définir les modalités d'action. Nous voyons que nous n'avons pas encore tous les outils, et que, dans le fond, on parle d'un changement profond de la société, ce qui montre bien l'importance du débat.

M. Jean-François Rapin , président . - Merci à tous pour votre participation, nous nous retrouverons prochainement pour poursuivre ces travaux.

Mercredi 23 février 2022

Présentation des conclusions des rapporteurs

Mme Sophie Primas , présidente . - Comme vous le savez, notre commission ainsi que celles du développement durable et des affaires européennes conduisent depuis plusieurs mois des travaux pour aboutir à une proposition de résolution commune sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ».

Nos rapporteurs Daniel Gremillet et Dominique Estrosi Sassone sont en charge du volet « Énergie » de ce paquet. Ce dernier est composé de huit textes ayant trait aux énergies renouvelables, à la performance et l'efficacité énergétiques, aux biocarburants routiers, aériens et maritimes, à l'hydrogène ainsi qu'à la fiscalité énergétique notamment.

Le but de cette proposition de résolution est d'offrir une position sénatoriale commune que le Gouvernement devra défendre au Conseil. Je ne doute pas que nous aboutissions sur ce dossier majeur qui engage notre transition et notre souveraineté énergétiques.

Le contexte actuel est marqué par de lourdes turbulences économiques et géopolitiques en Europe, notamment du fait du marché du gaz. Cette période doit toutefois nous inspirer. Nous devons réduire notre dépendance au gaz, largement importé et émissif, pour lui préférer une production domestique d'énergie nucléaire et de gaz renouvelable. Il en va, en somme, de notre sécurité d'approvisionnement.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Madame la Présidente, chers collègues, nous avons en effet travaillé avec ma collègue Dominique Estrosi Sassone sur ce sujet, à la fois complexe et important pour notre pays, dans le concert de la politique européenne.

Le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » vise à réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030. Pour ce faire, il fixe notamment pour objectif une baisse de 39 % de la consommation d'énergie primaire et une hausse de 40 % de la production d'énergies renouvelables.

Dans le cadre de nos travaux préalables, nous avons organisé six auditions, au cours desquelles nous avons entendu des instances nationales comme européennes, des représentants des électriciens comme des gaziers. De plus, nous avons reçu une trentaine de contributions qui nous ont permis de recueillir l'ensemble des points de vue des professionnels, des collectivités territoriales, des gestionnaires ainsi que des associations.

Au terme de nos travaux, je retiens plusieurs enseignements généraux, car le paquet présente plusieurs difficultés de méthode.

C'est une juxtaposition de textes, très larges et très denses, dont l'évaluation doit être renforcée. En effet, ce paquet intervient dans un contexte de grave crise des prix des énergies, qui impose de bien mesurer son impact sur les ménages, les entreprises et les collectivités territoriales.

De plus, il faut veiller à davantage de stabilité, de lisibilité et de cohérence dans les textes. Je rappelle que ce paquet, trois ans après la loi « Énergie-Climat », de 2019, et six mois après la loi « Climat-Résilience », de 2021, nous oblige à revoir toute la transposition du droit européen en matière d'énergie et de bâtiment à laquelle ma collègue Dominique Estrosi Sassone et moi-même avions contribué.

La neutralité technologique doit être garantie entre toutes les énergies décarbonées, renouvelables comme nucléaires. Il en va de même de la compétence des États membres, tant dans la définition du mix énergétique que dans la lutte contre la précarité énergétique. Je rappelle que l'article 194 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) fait de la définition de ce mix une compétence souveraine des États membres.

Enfin, il faut veiller à limiter le coût des textes pour les consommateurs d'énergie, particuliers comme professionnels. Cela suppose de ne pas fixer d'objectifs mal calibrés ou non financés, car la transition énergétique a un coût qui doit être pris en charge, dans un souci de solidarité et de compétitivité, par l'Union européenne et ses États membres. Ainsi, toute nouvelle contrainte normative appelle de nouveaux moyens budgétaires. Si la fiscalité énergétique doit être verdie, elle n'a pas à être pour autant alourdie.

J'en viens aux six textes sur l'énergie.

S'agissant de la directive sur la taxation des énergies, il faut tenir compte du contexte du prix des énergies, alléger la fiscalité sur les entreprises énergo-intensives, ne pas oublier certaines énergies comme l'hydrogène nucléaire, les biocarburants, le biogaz ou le bois-énergie et mieux associer aux réformes les collectivités territoriales. Les États membres doivent déterminer eux-mêmes les ménages vulnérables devant être soutenus fiscalement.

Concernant la directive sur les énergies renouvelables, ses objectifs doivent être généraux, adaptés et réalistes. Il est nécessaire d'ajuster les critères de durabilité de la biomasse, de ne pas pénaliser certaines énergies, telles que l'hydrogène nucléaire et les bioénergies, et de mieux valoriser les projets des collectivités territoriales. Les États membres doivent déterminer eux-mêmes leur mix. Ceux dont le mix est le plus décarboné ne doivent pas être pénalisés.

Pour ce qui est de l'initiative sur les carburants durables aériens, ses objectifs sont très ambitieux et il faut donc faire attention aux délais et aux surcoûts et conforter les investissements nécessaires. Un principe de neutralité technologique doit bénéficier à l'hydrogène nucléaire et aux différents biocarburants.

À l'inverse, s'agissant de l'initiative sur les carburants durables maritimes, ses objectifs sont bien moins ambitieux et doivent donc être relevés. Par ailleurs, il faut prévoir un soutien budgétaire pour les collectivités territoriales, dans l'électrification des quais, et un soutien extrabudgétaire pour les professionnels, dans leur recours au biogaz naturel liquéfié (bioGNL). Là encore, les différents biocarburants doivent être intégrés.

Concernant le règlement sur les infrastructures de recharge pour carburants alternatifs, il faut relever l'objectif pour l'électricité et accélérer celui proposé pour l'hydrogène. Un principe de neutralité technologique doit bénéficier à l'hydrogène et au gaz bas-carbone.

Quant au paquet gazier, une vigilance doit s'exercer sur l'acte délégué, pour garantir un traitement identique de l'hydrogène renouvelable et de l'hydrogène bas carbone. De plus, l'hydrogène doit être utilisé avec discernement pour décarboner les secteurs les plus difficiles, et non pas être injecté sans mesure dans les réseaux de gaz naturel.

Enfin, si l'essor de l'hydrogène se trouve sur toutes les lèvres, il ne faut pas oublier les technologies déjà existantes qui ont fait leurs preuves, telles que le biogaz et le gaz bas-carbone.

Au-delà de ces directives et règlements, je retiens de mes auditions quelques observations des acteurs de l'énergie sur les aspects « Climat » du paquet.

S'agissant du système d'échange de quotas carbone, ils attendent un mécanisme plus prévisible, plus simple et plus contrôlable. Ils sont particulièrement attentifs à la prolongation des quotas gratuits de CO 2 , ainsi qu'à l'évolution ultérieure de leurs prix.

Pour ce qui est de l'interdiction des véhicules thermiques, beaucoup considèrent comme très ambitieuse l'échéance de 2035 proposée par la Commission européenne.

Quant au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne (MACF), sa compatibilité avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), de même que l'affectation des recettes et le risque de rétorsion, sont des sujets d'anxiété.

Mes préconisations sur l'énergie, que je viens de vous indiquer, figurent dans la proposition de résolution. Je vous remercie et laisse ma collègue vous entretenir du bâtiment.

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur . - Mes chers collègues, s'agissant du bâtiment, deux directives le concernent.

La première est la directive sur l'efficacité énergétique. Il faut tenir compte de la spécificité des bailleurs sociaux et des réseaux d'électricité, de gaz ou de froid dans les objectifs de réduction prévus dans ce texte. De plus, les États membres doivent être souverains dans l'application du principe de « primauté énergétique », plutôt favorable au gaz, qu'ils doivent pouvoir combiner avec un principe de « neutralité carbone », plutôt utile à l'électricité. Ils doivent aussi pouvoir définir par eux-mêmes les actions d'efficacité énergétique à appliquer, en direction des ménages en situation de précarité énergétique. De leur côté, les collectivités territoriales doivent être mieux associées à ces actions. Enfin, les contrats de performance énergétique et les critères de commande publique doivent être utilement mobilisés dans un but d'efficacité énergétique.

Le second texte qui concerne le bâtiment est la directive sur la performance énergétique. Il me semble crucial que la mise en oeuvre des nouvelles normes en la matière s'accompagne d'un soutien financier pour les constructeurs, les propriétaires ou les copropriétaires, les bailleurs et les locataires. Au-delà, la spécificité des bailleurs sociaux et des bâtiments tertiaires doit être également reconnue. Sur le plan de l'approvisionnement en énergie des bâtiments, trois ajustements me semblent utiles. Un principe de neutralité technologique doit bénéficier à l'énergie nucléaire, dans l'appréciation des bâtiments faiblement émissifs. L'extinction des équipements de chauffage à énergie fossile doit être graduelle, et non sèche. Enfin, l'usage du biogaz pour l'alimentation en énergie des bâtiments mérite d'être expérimenté, comme s'y est d'ailleurs engagé le Gouvernement auprès de la filière biogaz, lors de la récente révision des normes bâtimentaires nationales.

Outre ces deux directives, je retiens de mes travaux une inquiétude ayant trait à une disposition des aspects « Climat » du paquet. Il s'agit, en l'espèce, de l'inclusion éventuelle des bâtiments dans un marché carbone européen. Je crois qu'il faut avancer très prudemment sur ce sujet, car un tel système pourrait de fait renchérir le coût d'acquisition des logements et de leur approvisionnement en énergie. On mesure les conséquences majeures qu'il pourrait en résulter sur le pouvoir d'achat des ménages et, plus largement, sur la compétitivité du secteur du logement. Toutes les personnes que nous avons auditionnées ou sollicitées ont alerté sur le besoin d'un accompagnement et d'une compensation, si ce système venait à être mis en oeuvre. Pour ma part, je suis convaincue de la nécessité de ne pas appliquer ce système au logement des particuliers, qu'il s'agisse du parc privé ou social.

Pour conclure, je partage les points d'attention indiqués par mon collègue Daniel Gremillet sur la stabilité normative, la compensation financière et la neutralité technologique. Ce sont, en effet, des prérequis indispensables pour que la transition énergétique soit, non seulement effective, mais aussi acceptée.

Or, dans le domaine du logement, je regrette les changements incessants de législation, que ce soit au niveau national comme au niveau européen.

Sur ce point, je rappelle que nous venons tout juste de réformer la réglementation environnementale 2020 (RE2020), applicable aux bâtiments neufs, et le diagnostic de performance énergétique (DPE), prévu pour les bâtiments existants.

Or, tous les acteurs de terrains disent qu'ils ont besoin d'une stabilité, d'une lisibilité et d'une prévisibilité pour mener à bien les travaux de rénovation énergétique et les actions d'efficacité énergétique nécessaire à la décarbonation.

Mes préoccupations sur le bâtiment figurent, elles aussi, dans la proposition de résolution.

Au total, je crois que notre contribution au volet « Énergie » de cette proposition de résolution s'est voulue à la fois utile, concrète, pragmatique et ambitieuse.

Il s'est agi, pour nous, de définir des modalités plus opérationnelles pour atteindre l'objectif de « neutralité carbone », issu de l'accord de Paris, de 2015, et transcrit par la loi « Énergie-Climat », de 2019, et la loi « Européenne sur le climat », de 2020.

Nous ne devons surtout pas relâcher l'effort, car le secteur de l'énergie représente 27 % des émissions GES et celui du bâtiment 12 % de ces émissions, dans l'Union européenne en 2019.

Or, la décarbonation de ces deux secteurs est loin d'être achevée.

Pour preuve, en France en 2020, on dénombre 19,1 % d'énergies renouvelables consommées - contre un objectif de 33 % d'ici 2030 - et 50 000 dispositifs MaPrimeRénov attribués - contre un objectif de 500 000 rénovations par an.

Le Gouvernement doit donc faire plus et mieux !

Mme Sophie Primas , présidente . - Merci à nos deux rapporteurs, qui ont négocié avec les commissions du développement durable et des affaires européennes, pour trouver un point d'équilibre partagé par tout le monde.

M. Laurent Duplomb . - Je souhaite appuyer les propos de nos deux rapporteurs. Je perçois une vraie similitude entre l'énergie et l'agriculture dans la mesure où, dans ces deux domaines, l'on raconte des histoires sans savoir réellement où l'on souhaite aller. Cette situation engendre des aberrations et des paradoxes conséquents. En 2018, les consignes étaient de fermer des réacteurs nucléaires, tels que ceux de la centrale de Fessenheim. Quatre ans plus tard, le nucléaire se retrouve à nouveau sur le devant de la scène et sur la totalité du territoire. Les politiques actuelles ne sont plus en adéquation avec les investisseurs et les entrepreneurs. Le taux de retour sur investissement dans notre pays est d'au moins sept ou huit ans, dans le meilleur des cas. Dans le secteur de l'énergie, ces retours sur investissement se comptent quasiment en générations. Au-delà de la stabilité réglementaire, nous devons arrêter de légiférer. Il faut déterminer une ligne de conduite et s'y tenir.

Lorsque l'on constate le travail effectué par la précédente génération sur les barrages hydroélectriques, qui sont renouvelables, et que l'on laisse, par dogme, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) supprimer tous les seuils sur les rivières pour éviter que s'installent de petites centrales hydroélectriques, lorsque l'on ne mentionne plus le photovoltaïque alors que la filière a été lancée il y a seulement quelques années, lorsque l'on condamne la méthanisation, les investisseurs, notamment du secteur agricole, sont en droit de se demander ce qui est attendu de leur part. Quand un ministre de l'agriculture est envoyé à Bruxelles, il ne sait pas quelle politique agricole défendre : le bio, le conventionnel, l'interdiction des pesticides et du glyphosate, la souveraineté alimentaire et les clauses miroirs ? La situation est exactement la même dans le domaine de l'énergie.

L'énergie, tout comme l'alimentation, concerne l'ensemble de la population. Or, le résultat de ce manque de lisibilité est de monter les différentes personnes et professions les unes contre les autres pour finalement constater que la population nous en voudra, à juste titre.

M. Frank Montauget . - Je remercie nos deux rapporteurs pour leur présentation de ce paquet. Je pense que nous faisons beaucoup de politique à partir d'intentions louables, eu égard aux enjeux auxquels nous sommes confrontés. Ces enjeux climatiques sont fondamentaux pour l'avenir.

Je souhaiterais toutefois poser la question du chiffrage de ces engagements. L'absence d'un tel chiffrage me paraît dommageable, car elle biaise complètement le débat. Si nous rendions compte des coûts envisagés, nous aurions plus de place pour effectuer des choix politiques, qu'ils soient de gauche ou de droite. Cette remarque vaut autant au plan national qu'européen, ainsi que l'a indiqué notre collègue Laurent Duplomb. Nous pouvons discuter sur de longues périodes sans avancer sur le sujet.

Du point de vue opérationnel, la planification qui doit accompagner ces politiques est également déficiente.

M. Fabien Gay . - Je remercie également les deux rapporteurs pour leurs travaux. Ma première remarque porte sur la transparence du sujet discuté. Le mandat de négociation de ce plan couvre un très vaste domaine. Ce plan restera-t-il dans les mains des Gouvernements successifs, sans que le Parlement n'y soit associé, à aucun moment ? À l'inverse, créera-t-on les conditions de son association très régulière ? J'ai lu la proposition de résolution, qui recherche un point d'équilibre, ce qui n'est pas simple. Se pose également une véritable question démocratique en France et au niveau de l'Union européenne. Si le Parlement n'est jamais associé, il ne décidera de rien, dans les mois ou les années à venir. Tout se jouera ailleurs. Moins le Parlement est en mesure de s'exprimer, plus les citoyens sont éloignés de la décision et plus le populisme croît. La solution, qui n'est pas simple, doit être trouvée via un système où les Gouvernements successifs viennent devant le Parlement pour débattre et où le Parlement soit en mesure de peser sur les décisions. Ce point qui, je le sais, est évoqué par la proposition de résolution, est fondamental de mon point de vue.

Par ailleurs, nous devons également débattre du problème posé par notre collègue Franck Montaugé. Les décisions à prendre auront des impacts considérables sur les budgets. Réinvestir dans le nucléaire ou basculer dans le 100 % renouvelable demandera, dans tous les cas, beaucoup d'investissements et une planification. Les retours sur investissement se mesurent en effet sur du temps long, comme l'a indiqué notre collègue Laurent Duplomb. Les décisions prises aujourd'hui quant au nucléaire seront rentables dans trente ans.

Toutefois, le prisme du financement n'est pas le seul par lequel les choix doivent être faits. En effet, il ne faut pas nécessairement renoncer à des projets, parce que ceux-ci ne seraient pas finançables. Je considère que nous sommes dans un moment où la politique doit faire de la politique, en passant outre les explications fournies par la technocratie, qui sous-entend qu'un seul chemin est possible. Il ne faut pas renforcer cette illusion que nous ne décidons plus de rien. La crise nous a montré que nous pouvons trouver les moyens financiers de répondre à de grands défis et d'influer sur les politiques publiques. Je vous remercie de ces travaux, car je sais qu'ils n'ont pas été évidents à réaliser. Nous sommes mis au pied du mur, peu de temps avant la fin des travaux, et nous devrons voter dans la précipitation.

M. Alain Chatillon . - Je félicite nos deux rapporteurs, car il n'est pas facile de synthétiser des dossiers aussi lourds et complexes que ceux-ci. Pour revenir sur les propos de notre collègue Laurent Duplomb, je trouve scandaleux de constater que des projets hydroélectriques sont bloqués dans le Sud-Ouest par la DREAL depuis sept ans. Or, nous pourrions faire avancer les choses, de manière intelligente, comme nous avons su le faire par le passé.

Par ailleurs, je souhaite appeler votre attention sur les négociations européennes autour du Nutriscore. J'étais à une réunion avec des entreprises agroalimentaires et trois médecins et scientifiques de renom. Il en est ressorti que ce Nutriscore ne correspond strictement à rien. Dans une grande surface, 90 % des produits sont achetés, entre trois et dix secondes. Les clients ne s'arrêtent pas pour lire les indications et se voient « interdits » de sélectionner des produits, du fait de la couleur rouge présente sur l'emballage. Madame la Présidente, nous devons nous opposer à ce dossier qui avance très vite et qui pourrait nuire à 40 % des produits agroalimentaires français. Nous devons défendre nos produits agroalimentaires. L'excédent de la France n'est plus que de trois milliards d'euros contre dix milliards il y a six ans.

Mme Sophie Primas , présidente . - Une mission sur ce sujet sera menée au deuxième semestre de l'année 2022. Votre expérience sera la bienvenue, si vous souhaitez vous joindre à ces travaux.

Mme Valérie Létard . - Je remercie nos deux rapporteurs qui nous ont éclairés et ont essayé d'apporter un certain nombre de correctifs et de précisions qui nous sont utiles.

Nous sommes tous édifiés de voir la portée et les conséquences massives sur l'ensemble de la société française des sujets à l'ordre du jour de ce paquet. Comme cela a été indiqué par notre collègue Fabien Gay, le Parlement doit nécessairement être associé à cette définition d'une vision stratégique pour l'avenir de notre pays, au sein d'un ensemble européen.

Concernant le volet bâtiment et logement qui m'intéresse particulièrement, le maintien d'objectifs et de délais extrêmement ambitieux, dans le contexte budgétaire actuel et à venir, ne me semble pas réaliste. Le Parlement peut-il encore être force de proposition ? Nous devons rédiger des résolutions, mais le mode opératoire actuel de décision de l'évolution de notre pays interroge plus que jamais.

Mme Sophie Primas , présidente . - Les trois commissions sénatoriales se sont saisies par elles-mêmes du sujet, tandis qu'on ne constate aucun débat à l'Assemblée nationale. Cela représente bien un problème démocratique.

M. Daniel Salmon . - Je remercie nos deux rapporteurs également. Nous comprenons le caractère urgent de la situation. Toutefois, traiter de sujets engageant massivement l'avenir de notre société, en si peu de temps, n'est pas sérieux.

Nous n'avons pas atteint les objectifs précédents et nous en fixons pourtant de nouveaux. Les rapports du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) sont toujours plus alarmants et nous montrent que nous ne sommes pas dans la bonne trajectoire. Nous n'avons pas de planète B. Les retours sur investissement relèvent d'un paradigme dont la pertinence est interrogée. Nous avons vu l'orthodoxie budgétaire voler en éclats ces dernières années : beaucoup d'argent a été déversé, avec trop peu d'éco-conditionnalité.

La réduction de 55 % des émissions de GES doit être atteinte si nous souhaitons rester en deçà de 1,5 °C de réchauffement climatique. Or, on assiste à une politique de « gribouille » actuellement, avec la succession d'objectifs non atteints.

Dans un monde mondialisé, le MACF représente un mécanisme crucial de cette réduction, afin de conserver notre souveraineté et d'arriver à maintenir notre industrie et notre économie. Des politiques exigeantes peuvent être menées au niveau de l'Europe, qui doit servir d'exemple au monde.

M. Jean-Marc Boyer . - Je souhaite rappeler que la France produit aujourd'hui 0,8 % des émissions de CO 2 mondiales. La Chine, les États-Unis, l'Allemagne et l'Australie en produisent bien davantage. Il faut donc savoir raison garder et faire attention aux conditions que l'on souhaite imposer à nos habitants.

À titre d'exemple, on ne peut imposer à une personne allant travailler en voiture tous les jours le coût d'achat d'une voiture électrique. Nous risquons de dépasser le seuil d'acceptabilité toléré par nos concitoyens. Les « gilets jaunes » sont apparus au moment de l'instauration de la taxe carbone.

M. Henri Cabanel . - Je remercie nos deux rapporteurs et souhaite apporter, en sus des interventions de mes collègues, une réflexion sur notre manière de faire de la politique.

Nous discutons aujourd'hui d'une politique de prospective que nous n'avons pas. Nous sommes coresponsables de l'état actuel des choses, car nous sommes dans l'incapacité de nous mettre d'accord sur un diagnostic et d'envisager un futur où chacune de nos convictions peut s'exprimer. Nous devons nous remettre en cause sur la façon dont nous menons la politique.

M. Serge Mérillou . - Nous attendions autre chose du Haut-Commissariat au Plan présidé par François Bayrou...

Mme Sophie Primas , présidente . - Un certain nombre d'entre nous n'attendent plus rien de François Bayrou depuis longtemps.

M. Serge Mérillou . - ...Sur des sujets qui nous engagent sur des décennies, j'attendais de cette institution qu'elle puisse s'extraire du débat partisan et qu'il nous donne un certain nombre de pistes prospectives. Comme l'a indiqué notre collègue Laurent Duplomb, aucune réponse n'a été apportée sur des sujets tels que l'énergie, l'agriculture ou la souveraineté alimentaire - où nous reculons chaque année - et je le regrette.

Mme Sophie Primas , présidente . - L'invasion des plaines céréalières de l'Ukraine devrait nous faire réfléchir.

M. Pierre Cuypers . - Je retiens de ce qui a été dit la planification et la durabilité qui doivent être le préalable de toute discussion. Les engagements pris ne sont pas tenus, car nous trouvons toujours une circonstance nous faisant revenir sur les décisions déjà prises.

Mme Sophie Primas , présidente . - Cela nous oriente vers des débats très importants, dont celui du quinquennat. Écoutons désormais les réactions de nos rapporteurs.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Nous nous sommes, heureusement, saisis de ce sujet pour la commission des affaires économiques. Nous avons passé beaucoup de temps à auditionner divers acteurs, mais également à échanger entre nous, ce qui n'était pas gagné d'avance. Je suis fier de cette discussion préalable au niveau de la commission des affaires économiques, car elle donnera plus de force au travail des rapporteurs.

Par ailleurs, comme nous l'avions déjà relevé lors de nos travaux sur la « taxonomie verte », l'Europe s'assoit sur la souveraineté, dans la définition du mix énergétique par les États membres, élément majeur qui appartient en France au Parlement. Nous sommes attachés à ce point, qui est écrit dans notre rapport d'information. C'est le Sénat qui a prévu que la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) soit discutée au niveau du Parlement. Nous aurons effectivement à définir le futur mix énergétique de la France, dans le cadre de la « loi quinquennale sur l'énergie » de 2023.

Je souhaite revenir sur la question de l'instabilité normative. Nous souhaitons parfois repositionner des productions en France, tout en ne laissant pas le temps aux chefs d'entreprise de suivre le rythme des évolutions législatives, qui sont parfois contradictoires. Cet élément, qui ressort de l'ensemble de vos réactions, doit être souligné.

Le MACF constitue également un sujet essentiel. Nous pourrions toutefois aller plus loin. Le problème du réchauffement climatique, rappelé par le GIEC, ne concerne pas uniquement la France et l'Europe, qui ne pourront pas à elles seules résoudre ce problème.

Enfin, les politiques énergétiques s'inscrivent dans un temps long, au moins dans le quart de siècle, ce qui implique une stratégie de planification des besoins et des sources énergétiques. C'est le cas de l'hydraulique, de la méthanisation, du photovoltaïque ou de l'éolien. La mixité énergétique constitue un gage d'innovation et de compétitivité.

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur . - La loi « 3DS », et notamment son volet lié à la réforme de la loi « Solidarité et Renouvellement urbain » (SRU), prend en compte les spécificités locales. Dans un cadre comme celui-ci, il s'agit de tenir compte les spécificités nationales existantes, afin que chaque État membre se sente entraîné dans ces objectifs de décarbonation. Il faut garantir la compétence des États membres pour définir les principes et modalités d'une politique d'efficacité énergétique nationale.

Dans le domaine du logement, par exemple, il faut tenir compte des contraintes spécifiques auxquelles sont confrontés les bailleurs sociaux, acteurs majeurs de la solidarité nationale. Si nous ne voulons pas porter atteinte à ce système social, auquel nous sommes tous attachés au sein de la commission des affaires économiques, il faut accompagner ces acteurs, qui ont été déstabilisés ces dernières années. Il faut les aider à adapter le parc de logements d'habitation à loyer modéré (HLM) aux nécessaires standards de la décarbonation.

Mme Sophie Primas , présidente . - Je note qu'une forme de consensus au sein de notre commission se dégage autour du nécessaire équilibre démocratique entre le rôle de l'Europe, qui doit donner une vision stratégique pour décarboner l'ensemble de nos activités humaines, et les modalités de cette décarbonation, qui relèvent bien évidemment des États membres, voire des régions. Nous devrions donc avoir des objectifs de résultats.

Pour répondre à notre collègue Fabien Gay, et bien que je provienne d'une tradition prônant une forme de rigueur budgétaire toujours d'actualité, je considère que les investissements pour le changement climatique peuvent être payés par les générations futures. La difficulté actuelle vient du fait que des ressources ont été utilisées en fonctionnement, et non en investissement. Nous pouvons réfléchir hors du cadre de notre budget et éventuellement dédier une partie de notre dette à ces investissements qui sont importants.

Je suis frappée, au terme de ce quinquennat, par la volonté de tous d'avancer vite sur de nombreux sujets : l'agriculture, le logement, l'énergie, la mobilité. Nous ne pourrons peut-être pas tout faire d'un seul coup. La question de la priorité des investissements, pour être le plus rapide et le plus efficient dans la réponse aux défis posés par le changement climatique, doit se poser collectivement. C'est notre rôle ici d'en débattre, dans notre chambre des territoires.

Enfin, notre collègue Jean-Marc Boyer a raison de souligner que la France ne génère qu'une faible part des émissions de GES mondiales. Cela pose la question de l'équilibre de l'effort avec d'autres pays européens ; nous avons tenu à l'inscrire dans la proposition de résolution. Cela pose également la question de la désindustrialisation de la France, qui nous permet d'émettre si peu, et par conséquent la question des émissions de GES importées. Nous ne pouvons pas demander des efforts aussi importants à la France, par rapport à d'autres pays de l'Union européenne : quand vous êtes au régime, ce sont les derniers kilos qui sont les plus difficiles à perdre. Il me semble donc que la réalisation de l'objectif de 55 % de réduction des émissions de GES devrait être appréciée à l'aune des spécificités de chaque pays.

Je vous remercie et vous demande d'être nombreux demain matin à notre réunion de commission « tripartite », afin de soutenir la position équilibrée de nos deux rapporteurs.

La commission adopte à l'unanimité les recommandations proposées par les rapporteurs et autorise la publication du rapport d'information.

Jeudi 24 février 2022

Examen de la proposition de résolution européenne

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes. - Ce format de réunion est un peu particulier. Cette réunion conjointe de la commission des affaires européennes, de la commission des affaires économiques et de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable constitue le point d'aboutissement du processus de rédaction conjointe d'une proposition de résolution européenne (PPRE) sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », qui décline les objectifs climatiques de l'Union européenne en une douzaine de propositions de directives et de règlements européens.

Marta de Cidrac et Jean-Yves Leconte avaient présenté fin janvier une analyse d'ensemble devant chacune des trois commissions concernées. Depuis lors, de nombreux rapporteurs des trois commissions ont travaillé pour nous proposer aujourd'hui un texte d'ensemble consensuel, sur ce paquet particulièrement complexe. Ce projet de texte résulte de compromis entre différentes approches - c'est aussi cela, la méthode européenne - ; des compromis qui nous proposent, me semble-t-il, une démarche ambitieuse, mais réaliste, qui fait clairement ressortir l'enjeu de l'acceptabilité sociale de la transition climatique et du besoin d'accompagnement de celle-ci. Ces compromis ne sont pas des renoncements et ne mènent pas à une position incohérente ou « à l'eau tiède ».

Le travail de nos rapporteurs peut être salué. Il m'apparaît maintenant essentiel de conserver cet état d'esprit pour faire aboutir cette démarche concertée entre nos commissions et finaliser, ensemble, une position claire du Sénat sur ce paquet législatif. Ce paquet est en haut de l'agenda législatif de la présidence française du Conseil de l'Union européenne (PFUE). Il aura des répercussions très concrètes sur nos concitoyens et nos entreprises.

Je vous propose, en accord avec la présidente Sophie Primas et le président Jean-François Longeot, auxquels je vais successivement céder la parole, que les rapporteurs puissent s'exprimer pendant deux minutes chacun. Nous aurons ensuite, si vous le souhaitez, une phase de débat sur l'ensemble du texte, avant d'évoquer de manière précise le contenu du projet de proposition de résolution.

Certains d'entre vous ont d'ores et déjà exprimé des demandes hier, devant la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ou devant la commission des affaires économiques pour modifier ce projet. J'ai moi-même reçu une demande d'ajout de visa de la part de Louis-Jean de Nicolaÿ. Je ne doute pas non plus que les groupes politiques auront des propositions de rédaction à soumettre.

Je précise la méthode d'examen de ces propositions, qu'elles soient d'ores et déjà formalisées ou qu'elles soient formulées à l'oral de manière plus spontanée : tous les commissaires, quelle que soit leur commission d'appartenance, peuvent naturellement prendre part au débat et formuler des propositions. S'agissant du vote en revanche, la procédure la réserve aux membres de la commission des affaires européennes. L'objectif est donc d'échanger autant que possible entre nous, en amont de ce vote, pour le préparer au mieux.

Après les propos de mes collègues présidents, je passerai la parole à Didier Marie, vice-président de la commission des affaires européennes, qui a suivi avec moi le processus collectif inédit qui a permis l'élaboration du projet de proposition de résolution européenne qui vous est soumis.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - Je suis très heureuse que nos trois commissions se retrouvent aujourd'hui, pour examiner une proposition de résolution sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ». C'est un beau travail commun, concret et ambitieux, qui doit permettre au Sénat de faire entendre sa voix sur ce dossier majeur pour notre transition et notre souveraineté énergétiques. Je tiens ici à remercier chaleureusement le président Jean-François Rapin, le président Jean-François Longeot et l'ensemble des rapporteurs pour l'avoir rendu possible.

Notre commission s'est plus spécifiquement penchée sur le volet « Énergie » du paquet, qui a trait aux énergies renouvelables, à la performance et à l'efficacité énergétiques, aux biocarburants et à l'hydrogène, sans oublier la fiscalité énergétique. Dans l'examen préparatoire de ce volet, très dense et très technique, notre commission a souhaité rappeler plusieurs exigences, qui conditionnent à notre sens l'applicabilité du paquet et donc son atteinte.

Tout d'abord, le contexte de grave crise des prix des énergies impose de tenir compte de l'incidence du paquet sur le pouvoir d'achat des ménages, la compétitivité des entreprises ou la soutenabilité financière des collectivités territoriales. Plus encore, sans une complète neutralité technologique, accordant toute sa place à l'énergie nucléaire, la décarbonation de notre économie ne pourra pas être réalisée. En sus, davantage de stabilité et de lisibilité sont attendues de la législation européenne, car l'incertitude nuit toujours aux investissements des acteurs économiques. Enfin, les compétences souveraines des États membres doivent être respectées, notamment dans la définition de leur mix énergétique, ainsi que dans le soutien à l'efficacité énergétique et la lutte contre la précarité énergétique.

La compensation financière, la neutralité technologique, la stabilité normative et une subsidiarité effective sont des prérequis indispensables pour réaliser concrètement la transition énergétique à l'échelle européenne. Les recommandations proposées par nos rapporteurs vont dans ce sens ; elles confortent l'ambition du texte, tout en facilitant son application. C'est une ardente obligation, pour diviser par deux nos émissions d'ici à 2030 et atteindre la « neutralité carbone » à l'horizon 2050, car les secteurs de l'énergie et du logement représentent 40 % des émissions européennes.

Pour que l'application du paquet soit une réussite, je forme le voeu que l'Europe relève trois défis. Le premier défi est celui de l'indépendance énergétique, car les turbulences actuelles, économiques, mais aussi géopolitiques, sur le marché européen du gaz, démontrent la nécessité de réduire notre dépendance au gaz, émissif et importé. Cela suppose de relancer l'énergie nucléaire, mais aussi de développer les énergies renouvelables et leur stockage.

Le deuxième défi est celui de l'autonomie minière, car la transition énergétique repose sur une très forte consommation de métaux rares, dont l'approvisionnement doit être sécurisé et les émissions maîtrisées. La fabrication de nos panneaux solaires, nos pales d'éoliennes, nos batteries électriques ou nos électrolyseurs d'hydrogène en dépend.

Le dernier défi est celui de la relocalisation industrielle, car la décarbonation de notre économie repose sur des industries énergétique, automobile, agroalimentaire ou du bâtiment actives, sources d'emploi, de recherche et d'innovation. Nous devons d'urgence relocaliser nos chaînes de valeur et consolider notre autonomie stratégique.

À ces conditions, la transition énergétique pourra être considérée non comme une contrainte juridique, mais comme une opportunité économique, à même de placer l'Europe aux avant-postes de la décarbonation.

M. Jean-François Longeot , président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Nous voici donc réunis ce matin pour débattre de l'aboutissement d'un travail considérable sur ce paquet « Ajustement à l'objectif 55 ». Je remercie les présidents de commission, particulièrement le président Jean-François Rapin, pour l'organisation souple qui nous a permis de nous appuyer sur l'expertise de chaque commission et de nous assurer de la cohérence du message sénatorial avec les travaux précédemment menés. Je remercie également l'ensemble des rapporteurs.

La proposition de résolution, dans la version qui vous est présentée ce matin, est le fruit d'un travail d'auditions et de consultations menées depuis le début du mois de janvier. Cette réflexion a été prolongée par un déplacement enrichissant à Bruxelles, où notre commission a pu échanger avec Frans Timmermans, vice-président de la Commission européenne, et la représentation permanente de la France auprès de l'Union européenne. Ce texte est le résultat d'un compromis : cette tâche n'était pas simple, mais vous êtes parvenus, mesdames, messieurs les rapporteurs, à nous proposer un projet équilibré.

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a souhaité que cette résolution soit à la hauteur de nos engagements climatiques. Nos rapporteurs ont donc été particulièrement vigilants au maintien de la cohérence climatique de la résolution : l'ambition de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'au moins 55 % en 2030 par rapport à 1990 devait être maintenue en pratique - et non seulement en théorie - sur l'ensemble du texte, en dépit d'oppositions parfois légitimes à certaines propositions de la Commission. Cet équilibre me semble globalement préservé dans le projet proposé, même si notre commission a fait un certain nombre de concessions. J'en suis évidemment satisfait et j'y vois le signe d'un consensus croissant sur la finalité du paquet : la lutte contre le réchauffement climatique.

M. Didier Marie , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Je veux saluer le travail de nos rapporteurs, qui nous permettent d'aboutir ce matin à une proposition de résolution européenne qui est, dans l'ensemble, équilibrée. La lutte contre le changement climatique et ses effets est un sujet majeur à l'échelle mondiale. Elle s'inscrit dans le cadre de l'Accord de Paris sur le climat que le Sénat a soutenu à plusieurs reprises.

Au travers du Pacte vert pour l'Europe, dont ce paquet est l'une des déclinaisons opérationnelles, l'Union européenne entend jouer un rôle moteur dans cette lutte, en développant un nouveau modèle de croissance durable et vertueuse. Ce paquet législatif aura des effets très concrets sur la vie de nos concitoyens et sur nos entreprises, sur l'évolution des énergies, des transports ou encore du bâtiment. Il était donc nécessaire que le Sénat prenne position à une étape pertinente des négociations.

L'enjeu politique essentiel, bien mis en relief par le texte qui nous est soumis, est celui de l'accompagnement de la transition climatique. Cette transition doit être socialement inclusive. L'acceptabilité sociale de ce paquet est un sujet clé, de même que son volet d'accompagnement budgétaire et financier. À cet égard, nous proposons une approche critique de la démarche de la Commission européenne, qui doit présenter une stratégie de financement de la transition adaptée aux enjeux. Il y a assurément sur ce point des marges de progrès et je pense que nous pourrions l'interpeller encore davantage sur la mise en oeuvre de nouvelles ressources propres. Le financement du Fonds social pour le climat est un sujet important, notamment pour la solidarité intra-européenne et la capacité des États membres de l'Europe de l'Est à accepter la démarche. Je citerai également l'inclusion des secteurs du bâtiment et des transports routiers au mécanisme de marché carbone. Nos débats interviennent à un moment d'envolée des prix de l'énergie, mais, plus fondamentalement, le fonctionnement actuel du marché européen de l'électricité doit être réformé. La proposition de résolution souligne les risques liés à la réforme du marché carbone et propose des garde-fous qui sont des points d'équilibre.

Nous retrouvons cette démarche d'équilibre concernant les puits de carbone et la mise en oeuvre du règlement sur la répartition de l'effort entre les États membres - la solidarité est au coeur de la démarche européenne -, tout comme en matière de commercialisation des véhicules neufs en Europe, puisque la résolution confirme la fin de la commercialisation des véhicules à moteur thermique en 2035, tout en demandant la mise en place d'une dérogation jusqu'en 2040 pour les véhicules hybrides.

La lutte contre le dérèglement climatique est un enjeu mondial. L'Union européenne ne produit que 8 % des gaz à effet de serre ; elle se doit d'être moteur. Ce pacte doit constituer le pilier de sa diplomatie climatique et elle doit utiliser sa politique commerciale pour faire progresser ses normes, ses valeurs et ses règles de durabilité, dans un monde malheureusement perturbé.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure de la commission des affaires européennes . - Je me félicite de la démarche initiée par nos trois commissions pour permettre au Sénat de prendre position sur ce sujet majeur de la mise en oeuvre de la loi européenne sur le climat. L'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 % d'ici à 2030 par rapport à 1990 n'est pas qu'un chiffre en l'air : cela va devenir une réalité tangible pour nos concitoyens. Nous en avions déjà conscience lors de l'examen du projet de loi « Climat et résilience » du 22 août 2021, mais je crois que notre démarche permet à chacun d'entre nous de bien le mesurer et de préciser les enjeux à l'échelle de l'Europe.

Nous avons tous cherché une voie d'équilibre par rapport aux propositions de la Commission européenne : une voie d'équilibre éminemment sénatoriale, ce qui nous conduit à mettre l'accent sur l'acceptabilité sociale, économique et territoriale de ce paquet. C'est un point essentiel. La transition sera lourde. Prenons garde aux contestations possibles si les mesures sont mal calibrées ou mal accompagnées. Nous avons connu les « gilets jaunes » en France et, clairement, cette préoccupation sociale, économique et territoriale est au coeur du texte que nous présentons aujourd'hui. Je veux ainsi, une nouvelle fois, souligner devant vous la nécessité d'un portage politique au plus haut niveau de cette politique de lutte contre le changement climatique. Il faudra faire oeuvre de pédagogie et dialoguer avec nos concitoyens pour mettre en oeuvre les mesures de manière efficace et harmonieuse.

Nous avons également exprimé des points de vigilance sur la compétitivité de nos entreprises : nous soutenons l'objectif global, mais demandons à veiller à l'accompagnement de la transition et à pallier certaines failles, comme celles qui ont été identifiées sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, qui pénaliserait en l'état les entreprises exportatrices, ce qui n'est pas acceptable.

Nous mettons l'accent sur les moyens d'accompagnement et sur le Fonds pour l'innovation, que nous souhaitons renforcer. Cela me paraît constituer un point d'équilibre par rapport à des mesures qui insistent plus sur la solidarité intra-européenne, évoquée par Didier Marie. Les alinéas 94, 95 et 119 de la proposition de résolution me paraissent ainsi essentiels. Ce paquet de mesures est d'une grande complexité et la Commission européenne en joue assurément. J'ai pu le constater lors de deux déplacements à Bruxelles. La France préside aujourd'hui le Conseil de l'Union ; c'est une chance que nous devons saisir, même si cette présidence va être hachée par la période électorale qui s'ouvre. Je forme le voeu que le Gouvernement intègre nos préoccupations, celles du Sénat.

M. Jean-Yves Leconte , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Il est heureux qu'au sein de nos trois commissions ainsi qu'au Conseil européen, les objectifs ne soient pas remis en cause et qu'il s'agisse maintenant de savoir comment nous parviendrons aux objectifs que nous nous sommes collectivement fixés. Cette volonté européenne est essentielle. L'analyse des propositions de la Commission européenne indique combien notre vie quotidienne, nos activités économiques, nos politiques publiques seront impactées par la loi européenne sur le climat, en matière d'énergie, de transport, d'industrie ou de logement. Je ne suis pas sûr que nous mesurions l'ampleur des changements essentiels à venir et qui bousculeront nos comportements ainsi que nos référentiels de valeurs.

Nos référentiels, comme celui de la « richesse argent » comme seule mesure de la croissance, sans tenir compte de l'impact de l'activité économique sur notre capital environnemental, sont à remettre en cause. Or aujourd'hui, alors que nous sommes en pleine campagne présidentielle, ces changements ne sont pas au coeur de nos débats. Ceci est inquiétant.

Les enjeux financiers et techniques du défi que nous nous fixons sont considérables ; il va falloir investir dans l'innovation et la recherche pour trouver des solutions. Il ne faut négliger aucune direction de recherche, tant que nous n'avons pas la certitude d'avoir une solution globale. Se posent aussi des questions en matière de normes RSE, de délégation aux États membres d'un certain nombre de politiques de compensation des coûts engendrés par les dispositifs retenus, à l'instar de l'usage du Fonds social pour le climat.

Enfin, je me réjouis que la résolution insiste sur le fait qu'il s'agit d'un projet européen majeur et ambitieux, Il faudra en assurer le financement dans le temps, après le plan de relance, mais aussi « dans l'espace », pour entraîner nos voisins, principalement ceux qui sont liés par des accords d'association, une union douanière ou un processus d'élargissement dans cette démarche et que ceci soit pris en compte dans la mise en place du Mécanisme de compensation carbone aux frontières. Les efforts et la transformation de notre continent, qui représente moins de 10% des émissions carbone du monde, ne seront utiles que ni nous arrivons, avec succès, en utilisant tous les outils dont nous disposons, à entraîner nos partenaires dans la même direction.

M. Daniel Gremillet , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Au terme de ses travaux préalables sur le volet « Énergie » du paquet « Ajustement à l'objectif 55 », notre commission propose d'infléchir les différents textes dans plusieurs directions.

Tout d'abord, nous souhaitons garantir une neutralité technologique, entre l'hydrogène nucléaire et l'hydrogène renouvelable, partout où les textes du paquet y font référence. C'est une position cohérente avec la résolution européenne sur l'inclusion de l'énergie nucléaire dans la taxonomie verte, que nous avons adoptée en décembre dernier. Elle est indispensable à l'essor de la filière française de l'hydrogène.

Ensuite, nous entendons favoriser davantage les bioénergies : les biocarburants, le biogaz et le bois-énergie. Naturellement, ces bioénergies doivent respecter des critères de durabilité et ne pas entraîner de conflits d'usages. Pour autant, elles ne doivent pas être omises, car elles sont très utiles pour faire aboutir la décarbonation jusque dans les territoires ruraux.

Dans le contexte très dégradé de crise des prix des énergies, il est crucial de soutenir les ménages en situation de précarité énergétique, ainsi que les entreprises énergo-intensives, en veillant notamment à ce qu'ils bénéficient de soutiens fiscaux ou d'aides budgétaires idoines.

Plus encore, nous voulons consolider la place des autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), c'est-à-dire des collectivités territoriales exerçant une compétence en matière d'énergie, en tenant mieux compte de ces acteurs dans la réforme de la taxation de l'électricité, l'application des projets d'énergies renouvelables ou encore l'électrification des quais.

Enfin, un dernier point d'attention est de garantir la compétence des États membres, tant dans la définition de leur mix énergétique que dans la lutte contre la précarité énergétique. Cela est fondamental pour permettre à la France de conserver son parc nucléaire, atout majeur de sa décarbonation, et utile pour garantir aux Français des politiques publiques au plus près des territoires.

Je forme le voeu que ces recommandations, concrètes, techniques, ponctuelles, qui facilitent l'application du texte sans toucher à sa portée, recevront l'assentiment de chacun.

Au-delà du paquet « Ajustement pour l'objectif 55 », deux difficultés doivent encore être levées : d'une part, il faut inclure pleinement l'énergie nucléaire à la « taxonomie verte », qui l'assimile à une activité transitoire et non durable ; d'autre part, il faut réformer réellement le marché européen de l'électricité, car la tarification de l'électricité selon le principe du « coût marginal » lie malheureusement la valeur de l'électricité décarbonée aux fluctuations du gaz fossile.

Je souhaite que la PFUE permette de progresser réellement et rapidement sur ces enjeux.

Mme Dominique Estrosi Sassone , rapporteur de la commission des affaires économiques . - Dans le cadre du volet « Énergie » du paquet « Ajustement à l'objectif 55 », notre commission émet aussi des recommandations sur les enjeux de performance et d'efficacité énergétiques des bâtiments.

En premier lieu, nous proposons d'appliquer un principe de neutralité technologique entre les différentes sources d'approvisionnement en énergie des bâtiments, en revalorisant la place de l'électricité par rapport à celle du gaz et des énergies renouvelables de réseaux par rapport à la production sur site dans la définition des bâtiments faiblement émissifs. C'est, en somme, le modèle énergétique français que nous souhaitons conserver.

Nous suggérons également que l'application des nouvelles normes de performance énergétique s'accompagne d'une aide financière pour les propriétaires, les bailleurs ou les locataires. C'est une nécessité pour leur permettre de faire face aux surcoûts induits, dans le contexte de crise des prix des énergies.

De plus, nous souhaitons que les contraintes spécifiques auxquelles sont confrontés les bailleurs sociaux soient prises en compte. En effet, ces acteurs majeurs de la solidarité nationale doivent être accompagnés, et non déstabilisés, pour adapter le parc d'habitations à loyer modéré (HLM) aux nécessaires standards de la décarbonation.

Par ailleurs, nous proposons de permettre l'expérimentation du biogaz pour l'alimentation en énergie des bâtiments, comme s'y est d'ailleurs engagé le Gouvernement auprès de la filière biogaz, lors de la révision récente des normes nationales de performance énergétique.

Enfin, nous recommandons de garantir la compétence des États membres pour définir les principes et les modalités de la politique d'efficacité énergétique nationale. C'est une nécessité pour bien prendre en compte les spécificités nationales existantes, et répondre ainsi aux besoins identifiés localement.

Pour conclure, je partage les points d'attention indiqués par la présidente Sophie Primas et mon collègue Daniel Gremillet sur la stabilité normative, la compensation financière et la neutralité technologique : ce sont des prérequis indispensables pour faire en sorte que la transition énergétique soit effective, car acceptée. Or, dans le domaine du logement, je regrette les changements incessants de législation, nationale comme européenne ; sur ce point, je rappelle que nous venons tout juste de réformer la réglementation environnementale 2020 (RE2020), applicable aux bâtiments neufs, et le diagnostic de performance énergétique (DPE), prévu pour les bâtiments existants.

Il est déplorable que, trois ans après la loi « Énergie-Climat » de 2019, et six mois après la loi « Climat-résilience » de 2021, nous devions encore légiférer sur ces sujets.

Mme Denise Saint-Pé , rapporteure de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - J'aimerais rappeler quelques positions structurantes de notre commission dans cette résolution. Je ne serai évidemment pas exhaustive.

Concernant la réforme du marché carbone européen - le SEQE ou ETS -, notre appréciation est globalement positive, notamment puisque la réforme envisagée accélérera la transition bas carbone des industries européennes. Nous avons aussi jugé pertinente la proposition de consolidation de la réserve de stabilité du marché (MSR) pour renforcer la stabilité du prix de la tonne de CO 2 sur le marché carbone. Nous aurions toutefois apprécié que cet outil soit complété par l'instauration d'un prix plancher et d'un prix plafond, croissant dans le temps, afin de renforcer la visibilité pour les acteurs économiques et de crédibiliser à long terme l'augmentation du prix de la tonne de CO 2 . Cette proposition n'a pas été retenue dans la proposition de résolution européenne.

Concernant la création d'un nouveau marché carbone pour le transport routier et le bâtiment, nous avons relayé les nombreuses inquiétudes sociales, mais également environnementales, autour du dispositif proposé par la Commission européenne, tout en insistant sur la nécessité de préserver la cohérence générale du paquet « Climat ». C'est pourquoi nous avons proposé un certain nombre de garde-fous - prix plafond sur ce nouveau marché, limitation du dispositif aux professionnels et moyens accrus pour l'accompagnement des plus précaires - au lieu de nous opposer frontalement à la proposition de la Commission européenne. Notre commission est très attachée à cet équilibre, fidèlement retranscrit dans la résolution.

Nous nous félicitons également de l'instauration d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, même si nous pensons que son périmètre pourrait être élargi en 2026 à certains produits de base, voire à certains produits finis, pour limiter les risques de perte de compétitivité des industries européennes. Nous nous interrogeons également sur la pertinence du calendrier pour l'extinction totale des quotas gratuits, actuellement prévue en 2036, au regard de l'ambition climatique du paquet et de la nécessité de faire naître des champions industriels bas carbone au niveau de l'Union européenne. Ces points apparaissent très nettement dans la résolution.

Sur le volet transport de ce paquet, nous avons jugé que l'interdiction de vente des véhicules thermiques neufs en 2035 était ambitieuse et réaliste, compte tenu de l'accélération de la transition vers les motorisations électriques par les constructeurs français et européens et du bilan carbone favorable des véhicules électriques par rapport aux véhicules thermiques, même dans une analyse de cycle de vie, a fortiori en France, où l'électricité est peu carbonée. Nous prenons acte de la dérogation demandée dans la résolution pour les hybrides rechargeables, tout en estimant qu'il faudra encourager largement l'usage de carburants durables par ces véhicules.

M. Guillaume Chevrollier , rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Je me joins aux remerciements du président Longeot à l'attention de nos collègues de l'ensemble des autres commissions, avec lesquels nous avons travaillé en bonne intelligence.

Notre commission a souhaité voir figurer certains points dans cette proposition de résolution européenne.

Nous avons tout d'abord fait de l'objectif de réduction des émissions de 55 % l'élément structurant de la résolution : il nous a semblé indispensable de préserver la cohérence d'ensemble du texte afin de coller en pratique - et non seulement en théorie - à cet objectif.

La dimension sociale est le deuxième fil rouge de cette résolution. Toutefois, nous avons rappelé que cette préoccupation ne devait pas être un alibi, qui nous conduirait à renoncer à agir fermement. Nous avons donc plutôt insisté sur la nécessité d'un accompagnement social dimensionné au défi inéluctable que représente la transition climatique du continent.

Troisième considération générale : nous avons souligné que la transition offrait des opportunités économiques considérables et devait, à cette aune, être accélérée pour développer des industries bas-carbone européennes.

Quatrième fil rouge, dans la droite ligne de nos travaux précédents et des enseignements que nous avons tirés de la COP26 : le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » devrait constituer le pilier de la diplomatie climatique de l'Union européenne, en agissant comme un levier pour le relèvement de l'ambition des États tiers.

Enfin, le dernier élément cardinal est que le niveau d'investissement particulièrement élevé requis pour atteindre les objectifs à l'horizon 2030, puis la neutralité carbone à l'horizon 2050, conduise à une réflexion approfondie sur le soutien financier, grand absent de ce paquet « Climat ». La proposition de résolution invite donc tout particulièrement la Commission européenne à adapter les règles du pacte de stabilité et de croissance - elles limitent les niveaux annuels de déficit et de dette au niveau national - pour inciter et faciliter les investissements publics verts.

M. Claude Kern , rapporteur de la commission des affaires européennes . - En tant que rapporteur de la commission des affaires européennes sur le volet « Énergie » de ce paquet, je m'associe aux propos de mon collègue Daniel Gremillet, dont je partage les conclusions et les propositions.

Le secteur de l'énergie constitue indéniablement la clé de voûte pour atteindre les objectifs très ambitieux fixés à l'ensemble des États membres par la Commission européenne. Je rappelle que 75 % des émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne proviennent de la consommation et de la production d'énergie. La décarbonation du secteur de l'énergie est donc une étape essentielle pour parvenir à la réduction de ces émissions et à la neutralité climatique de l'Union prévue d'ici à 2050.

Les ambitions climatiques de l'Union européenne s'inscrivent aujourd'hui dans un contexte inédit de très haut niveau des prix des énergies, que nous devons prendre en considération. Cette situation, qui est appelée à durer, renforce les questionnements que nous avons sur le financement de la transition climatique, ses conséquences sur le coût énergétique pour les acteurs économiques, notamment pour les PME, et les inquiétudes sur le pouvoir d'achat des ménages européens.

Si nous partageons l'ambition de ce paquet, la politique énergétique européenne doit s'inscrire dans le respect de certains principes : la souveraineté des États membres sur le choix de leur bouquet énergétique, la neutralité technologique et la prise en compte de la situation des États membres dont la production d'électricité est déjà largement décarbonée.

Ainsi, nous considérons que l'ensemble des solutions décarbonées en matière énergétique doivent pouvoir contribuer à la transition énergétique, qu'elles soient issues de sources renouvelables ou non. Sur de nombreuses dispositions de ce texte, nous avons exprimé le souhait d'élargir le périmètre actuel aux carburants bas carbone ou de pouvoir valoriser une électricité autre que renouvelable, dans les règles de calcul des émissions de gaz à effet de serre. Le principe de neutralité technologique doit aussi bénéficier à l'hydrogène, qui constitue un enjeu géopolitique et de souveraineté majeur. Le directeur général de l'énergie et du climat au ministère de la transition écologique a d'ailleurs souligné, lors de son audition, le risque de passer d'une dépendance au gaz russe à une dépendance à l'hydrogène du Sahara.

Nous devrions disposer d'orientations générales sur ces textes « Énergie » à la fin du premier semestre 2022 ; une réunion du Conseil « Énergie » doit ainsi se tenir à la fin du mois de juin.

M. Pierre Laurent , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Un important travail a été réalisé ces dernières semaines, en un temps express et beaucoup trop contraint, sans donner aux commissions le temps de réaliser une évaluation contradictoire approfondie. Des éléments d'appréciation essentiels nous font défaut, tels que le niveau d'investissement nécessaire, l'impact des changements productifs et sociaux amenés par le pacte vert ou les conditions pérennes des financements massifs attendus.

La PPRE estime nécessaire de mettre en place des modalités d'implication des parlements dans le suivi des négociations et demande à la Commission européenne de présenter des études d'impact plus pertinentes. Je m'en félicite, même si nous n'avons aucune garantie en la matière. Comment serons-nous associés aux négociations, alors que le Parlement va cesser de siéger, au moment même de la PFUE ?

La PPRE nous engage de manière positive sur le paquet, non seulement sur l'objectif de 55 %, mais aussi sur les voies pour y parvenir. À ce stade, ce soutien me paraît hasardeux, prématuré et aveugle à maints égards.

Nous sommes en pleine campagne présidentielle et en pleine PFUE. Avons-nous conscience que la grande majorité de nos concitoyens ignore l'impact du paquet que nous sommes en train de soutenir ? Voyez la suppression des véhicules thermiques et hybrides en 2035 : c'est demain ! Il en est de même pour l'élargissement du marché carbone aux ménages par l'introduction du chauffage et des carburants, ou l'augmentation à 40 % de la part des renouvelables dans les mix énergétiques.

Je souligne un point clé : le caractère juste de la transition devrait se trouver en amont et au centre des décisions, pour conduire à un cadre légal de transition juste, comme le propose la Confédération européenne des syndicats (CES). Or la proposition du Sénat continue de s'inscrire dans une logique qui ne traite la dimension sociale qu'en termes d'atténuation et de compensation, alors que 50 millions de ménages européens sont déjà en précarité énergétique.

Sur la création d'un marché carbone pour le transport routier et le bâtiment, nous rendons les armes avant d'avoir mené le combat, en intégrant dans la PPRE toutes les possibilités, même les plus mauvaises, plutôt que de nous en tenir, au début des négociations, au refus de ce marché en l'état. La création du Fonds social pour le climat est conditionnée au maintien de l'élargissement du marché carbone, rendant aléatoire tout le système de compensation sociale.

La PPRE demande une révision des modalités de fonctionnement du marché de l'électricité - je m'en félicite -, mais elle ne donne aucune indication sur le sens de cette révision. S'agissant de la libéralisation du marché de l'énergie, le Sénat ne propose rien. La concurrence aberrante entre les opérateurs nationaux et les opérateurs alternatifs va donc continuer, entravant notre capacité à agir de manière planifiée et durable.

Malgré notre soutien au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, l'étroitesse du champ couvert va poser de nombreux problèmes, sans parler de son lien avec le marché carbone, qui risque d'engendrer des inégalités très importantes.

Sur la nécessité de sortir des règles obsolètes du pacte de stabilité, la vague mention dans la PPRE à ce sujet est bien trop légère par rapport au niveau des investissements à mobiliser. J'avais fait des propositions de rédaction, elles n'ont pas été retenues à ce stade. En l'état, je ne pourrai pas soutenir une telle PPRE.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes - Effectivement, le temps est contraint. Cette PPRE doit porter ses fruits au cours de la PFUE, qui subit la situation électorale et la situation de crise. Nous aurions eu de grandes difficultés à réunir les trois commissions après la suspension des travaux en séance plénière et donc à porter la parole du Sénat. Il est vrai que les parlements nationaux n'ont absolument pas été consultés. Nous n'avons pas pu travailler en amont. Au nom du Sénat français, nous nous positionnons dès lors que les textes nous sont transmis. Il ne s'agit en rien de faire passer un texte à marche forcée. Le calendrier est contraint, et nous avons dénoncé cette situation.

M. Pierre Laurent , rapporteur . - Je ne critique pas les trois présidents de commission, je ne fais que dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas !

M. Dominique de Legge , rapporteur de la commission des affaires européennes . - Les transports sont aujourd'hui responsables de 30 % des émissions totales de CO 2 de l'Union européenne. Malgré les efforts de décarbonation des filières du secteur, les émissions de gaz à effet de serre se sont accrues de près de 20 % en Europe depuis 1990, en raison du développement des secteurs routier et aérien. Ce secteur a donc un rôle essentiel à jouer dans la transition écologique. Le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » fixe une trajectoire de réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur des transports d'ici à 2050, et d'au moins 55 % en 2030. Je laisserai mes collègues, Pascale Gruny et Jean-Michel Houllegatte, évoquer plus précisément les trois textes qui recouvrent les secteurs routier, aérien et maritime et les carburants alternatifs.

Pour ma part, je souhaiterais vous faire part de quatre considérations d'ordre général.

Ces textes auront des traductions concrètes, plus spécifiquement pour les entreprises des secteurs aérien et maritime. Je voudrais rappeler qu'elles sont, pour la plupart, déjà très engagées dans la diminution de l'impact environnemental de leurs activités et qu'elles investissent dans des technologies ou procédés qui permettent une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.

Je déplore l'absence d'évaluation de l'impact des mesures proposées par la Commission européenne. Cela est d'autant plus regrettable qu'elles sont particulièrement complexes et que leur cumul rend difficile l'appréhension des interactions entre elles. Nous demandons à la Commission européenne, dans notre proposition de résolution, de présenter en cours de négociation des études actualisées et sectorielles. Il s'agit de s'assurer de l'impact des différentes dispositions sur les ménages, les entreprises et les territoires ainsi que de la crédibilité du calendrier.

J'en viens à l'acceptabilité sociale et économique. Le maintien de la compétitivité des entreprises françaises et l'adaptation de la transition à nos territoires sont aussi des enjeux transversaux à l'ensemble des textes du paquet ; nous devons leur porter une attention particulière. Le niveau d'investissement de la transition écologique est très élevé. Les interlocuteurs bruxellois que nous avons auditionnés nous ont d'ailleurs alertés sur la capacité de l'Union européenne à financer ces mesures.

Nous avons pris bonne note de la création d'un Fonds social pour le climat. Mais nous disposons de peu d'éléments sur la hauteur de son financement. Quels sont les critères pour sa mobilisation et sa redistribution ? Comment les disparités géographiques seront-elles prises en compte ? Quel sera son mode de gestion ?

Mme Pascale Gruny , rapporteur de la commission des affaires européennes - Permettez-moi de citer quelques chiffres pour mesurer les efforts que doit accomplir le transport routier pour contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et parvenir à la neutralité climatique à l'horizon 2050. Aujourd'hui, le transport routier représente 80 % du transport des passagers de l'Union européenne et 75 % du transport des marchandises. Les voitures et les camionnettes génèrent plus de 70 % des émissions de gaz à effet de serre des transports en Europe, ce qui représente 12 % des émissions européennes totales. La mobilité est bien au coeur de la transition climatique.

Je voudrais attirer votre attention sur quelques points qui me semblent importants pour engager le continent européen dans une transformation profonde de son économie, des usages des transports et des modes de comportement des citoyens. Plusieurs sujets de vigilance ont déjà été évoqués, tels que l'acceptabilité de la transition par les ménages, le maintien de la compétitivité des entreprises européennes, en particulier dans le domaine des transports, ou le financement des mesures nécessaires à cette transition. Le niveau d'ambition pour s'adapter au changement climatique nécessite, en effet, des investissements considérables dans la recherche et l'innovation. J'ai la conviction que le développement de transports décarbonés est un des enjeux forts de la transition écologique et que l'accompagnement des ménages au report modal, qui concerne en priorité les grandes métropoles, doit aussi être favorisé.

Par ailleurs, pour lever les barrières à l'achat de véhicules électriques, le déploiement d'infrastructures de recharge doit s'accélérer. C'est pourquoi nous souhaitons un renforcement des objectifs fixés par la Commission européenne, qui concerne d'ailleurs tous les modes de transport. Je ne reviendrai pas sur la proposition relative à la fin de la commercialisation des véhicules à moteur thermique qui a précédemment été exposée.

Cependant, nous devons être particulièrement attentifs à l'incidence que pourrait avoir cette mesure sur le marché des véhicules d'occasion. Il ne faudrait pas qu'elle favorise une augmentation des exportations de nos voitures anciennes et très polluantes vers des pays moins développés. J'ai donc proposé le développement d'une économie circulaire, notamment pour l'automobile, qui peut se matérialiser par le reconditionnement de véhicules - certaines entreprises se sont déjà positionnées sur ce créneau - ou la réutilisation de pièces détachées. J'invite aussi à mieux prendre en compte l'ensemble du cycle de vie au regard des enjeux de neutralité carbone.

Enfin, il me semble important d'être attentif à la superposition de mesures européennes dont l'effet cumulatif peut avoir des conséquences sur les acteurs économiques.

M. Jean-Michel Houllegatte , rapporteur de la commission des affaires européennes. - J'aborderai le volet du paquet relatif aux secteurs aérien et maritime.

L'objectif de la Présidence française est de conclure des orientations générales à la fin du premier semestre 2022 sur la quasi-totalité des textes. Force est de noter que deux des textes les plus avancés dans la négociation entre États membres concernent les projets de règlement qui visent, d'une part, à obliger les fournisseurs de carburants à accroître la part des carburants d'aviation durables, et, d'autre part, à réduire l'intensité des émissions de gaz à effet de serre de l'énergie utilisée à bord des navires. L'utilisation de carburants d'aviation durables, qui permet de réduire les émissions globales de CO 2 jusqu'à 80 % par rapport au kérosène fossile, constitue, en effet, l'un des principaux leviers de la réduction des émissions de l'aviation.

Plusieurs études montrent d'ailleurs que le transport aérien peut parvenir à la neutralité carbone à l'horizon 2050. Trois leviers de décarbonation sont actuellement identifiés : les carburants d'aviation durables (SAF), les avancées technologiques dans un avenir plus ou moins lointain - Airbus vient ainsi d'annoncer un premier test de moteur d'avion propulsé avec de l'hydrogène, qui sera réalisé en 2026, et qui pourrait être une étape importante vers la mise au point d'un avion zéro émission -, ainsi que la mise en oeuvre du ciel unique européen qui implique un effort de la part des États membres pour moderniser et rationaliser le contrôle aérien, permettant des trajectoires plus directes au-dessus du territoire européen. Ces trois points sont exposés dans la proposition de résolution telle que présentée aujourd'hui.

Je voudrais aussi vous faire part de plusieurs points de vigilance.

Premièrement, le risque de contournement par les hubs et de distorsion de concurrence pour les compagnies aériennes européennes est un premier sujet d'attention. L'aéroport d'Istanbul, par exemple, pourrait à terme devenir un concurrent pour les aéroports européens.

Deuxièmement, la recherche et l'innovation dans le domaine des carburants alternatifs pour l'aviation doivent contribuer à la réduction de l'écart des coûts entre les SAF et le kérosène.

Troisièmement, le développement de la production de carburants d'aviation alternatifs à grande échelle conditionne la décarbonation du secteur.

Quatrièmement, enfin, il faut être attentif au coût de la transition énergétique pour le secteur de l'aviation.

L'objectif de réduction des gaz à effet de serre est également largement soutenu par les acteurs du transport maritime, mais plusieurs points de vigilance ont toutefois été identifiés, notamment la prise en compte de la disponibilité des carburants et de leur coût, alors que ce secteur repose, à l'heure actuelle, presque entièrement sur les combustibles fossiles.

M. Jacques Fernique . -Cette proposition de résolution constituera l'approche du Sénat sur le paquet « Climat » par lequel l'Europe donne corps à son nouvel objectif de réduction de 55 % des gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Il s'agit non pas d'en rester aux belles formules, mais de mettre en place des actions concrètes. Au travers de cette proposition de résolution, le Sénat prend la mesure de cet objectif en envisageant les nécessaires réformes structurelles et sectorielles pour transformer nos industries, nos transports, notre agriculture et nos conditions énergétiques. Il affirme également l'urgence de parvenir à un cadre clair et soutenable pour les ménages, les entreprises et nos territoires. On ne peut pas gagner le combat climatique dans un seul pays ou dans la seule Union européenne, qui représente 8 % du problème. Cette proposition de résolution insiste à juste titre sur la capacité d'entraînement dont l'Europe peut jouer, par l'ajustement carbone à ses frontières et par ses capacités de régulation des échanges économiques mondiaux. Les termes précis de cette proposition constituent donc un pas explicite vers la remise en cause des politiques ultralibérales de libre-échange ; les alinéas 200 et 201 sont éloquents à cet égard.

Cette PPRE pointe la nécessité d'accompagnement pour l'acceptabilité sociale, d'adaptation des politiques de formation professionnelle, de reconversion des métiers, de soutien aux territoires et aux appareils productifs affectés. Notre groupe propose de muscler la proposition de résolution en ajoutant, après l'alinéa 95, un alinéa sur le rôle clé des territoires dans la mise en oeuvre concrète de politiques déterminantes en matière climatique. Il serait bon de pointer la nécessité, pour l'Union européenne, de présenter une stratégie globale pour abonder le financement de l'action climatique des territoires. La mobilisation et la mise en cohérence des différents fonds structurels, des fonds d'investissement et des divers programmes de soutien financier, doivent s'opérer au profit des collectivités territoriales - un accord sur cette proposition de rédaction devrait se dégager au sein de la Chambre des territoires.

Voilà les avancées positives qui caractérisent la proposition de résolution européenne. Restent deux écueils majeurs qui en compromettent la bonne trajectoire. L'énergie nucléaire et les biocarburants sont deux fausses solutions. La première ne doit pas être traitée comme les énergies renouvelables. Elle est dangereuse, coûteuse et porte en elle des conséquences néfastes au-delà de nos frontières nationales. Or il ne faut pas nier les divergences d'approche entre États membres en la matière et l'importance des objectifs de sobriété énergétique et de développement des énergies renouvelables. Quant aux biocarburants, notre groupe a la conviction qu'ils ne remplaceront jamais les carburants conventionnels fossiles dans les secteurs aérien et maritime. C'est pourquoi l'alinéa 148 ne peut rester en l'état. Il convient certes de promouvoir les biocarburants, mais pas « quelle que soit leur génération ». Les agrocarburants de première génération représentent une concurrence inacceptable.

Cette proposition de résolution prend effectivement le sujet à bras-le-corps, mais deux illusions la rendent inopérante : la foi nucléaire et la croyance dans les biocarburants.

M. Daniel Salmon . - Je reviendrai sur les deux points de divergence que vient de soulever Jacques Fernique. L'énergie nucléaire, tout d'abord, est très présente tout au long de cette PPRE. Elle est très différente des autres en ce qu'elle ignore les frontières - le nuage de Tchernobyl ne s'y est pas arrêté ! En réalité, la liberté de chaque pays de se doter du mix énergétique de son choix vient affecter celle des autres. Si un accident majeur devait intervenir en France, les autres pays européens seraient impactés. De plus, cette énergie est génératrice de déchets qu'il nous faut gérer pendant des durées dépassant notre échelle humaine. Par ailleurs, à nos frontières, les bombes tombent en ce moment. Or la vulnérabilité de la France en temps de paix est indéfendable en temps de guerre ! Cette donnée doit absolument être prise en compte, car demain, nous pourrions connaître de graves difficultés liées à l'énergie nucléaire. Les biocarburants sont une partie de la solution. Compte tenu de la situation en Ukraine, la surface agricole utile en France sera à l'avenir très sollicitée : pour l'alimentation, les fibres et l'énergie. Elle ne pourra pas alimenter le transport aérien et le transport maritime, très voraces en énergie. Ces problèmes s'ajouteront à ceux du commerce international. Nous devons faire preuve d'une très grande vigilance - car ce sont, en définitive, deux fausses solutions - et placer la sobriété en tête de nos priorités.

Mme Angèle Préville . - Je salue le travail très important qui a été réalisé face aux enjeux colossaux qui sont devant nous. Je ferai une proposition de rédaction concernant les alinéas 172, 177 et 180 qui mentionnent les carburants synthétiques susceptibles d'être élaborés à partir de fossiles, de charbon, de lignite, de pétrole. Il faudrait d'emblée les exclure et ne mentionner que les carburants synthétiques provenant d'énergies renouvelables, à l'exclusion de ceux provenant d'énergies fossiles. Se trouve actuellement dans l'atmosphère un stock inédit de dioxyde de carbone, inégalé au cours des 800 000 dernières années. Afficher simplement une neutralité carbone dans notre feuille de route ne suffira pas ; il nous faudra réduire ce stock à l'origine du dérèglement climatique.

Sur les alinéas 130 et 131 relatifs au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, nous aurions pu aller beaucoup plus loin eu égard aux interpellations régulières du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) à propos de l'impact carbone des produits finis. Au lieu de dire que l'intensité carbone des produits importés « peut être évaluée », je proposerais d'écrire : « devant être évaluée ».

M. Stéphane Demilly . - Je prendrai le contrepied des propos tenus sur les biocarburants. J'ai présidé des groupes de travail sur le sujet à l'Assemblée nationale durant vingt ans, publié de nombreux rapports et participé à de multiples tables rondes et colloques. Ce sujet a toujours déclenché des débats passionnés, souvent manichéens et caricaturaux comme tout à l'heure.

Parmi toutes les études sérieuses, pas celles financées par les lobbies pro ou anti-biocarburants, celle qu'a menée l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) démontre clairement l'intérêt environnemental des bio ou agrocarburants. Ceux-ci ne sont pas exempts de défaut, mais ils sont bons pour l'environnement - moins 50 % de gaz à effet de serre pour l'éthanol, et moins 66 % s'ils sont réalisés à partir de betteraves - et pour l'agriculture, car ils sont une source de diversification, notamment pour les betteraviers qui ont perdu 100 000 hectares en trente ans. Plus d'une exploitation disparaît chaque heure dans notre pays. Les biocarburants sont également une ressource favorable au pouvoir d'achat et à notre indépendance énergétique, car nous dépendons à 99 % des importations pour le fossile. Ils sont aussi utiles à notre indépendance diplomatique et économique, qui ne peut être assurée sans indépendance énergétique. Or celle-ci est mise à mal par le contexte international actuel et notre dépendance au gaz russe...

Ces carburants n'ont jamais eu pour objet de remplacer totalement les carburants fossiles, et nos terres arables ont vocation à être nourricières, pour reprendre les propos du ministre de l'agriculture. C'est pourquoi seulement 2,3 % de notre surface agricole utile est destinée aux biocarburants, contre 3 % en moyenne en Europe. La solution miracle n'existe pas, et la méthanisation a ses défauts, de même que l'éolien et le solaire. Quant au nucléaire, je vous laisse juges. Il ne faut pas tenir des propos excessifs, et le biocarburant est une des nombreuses pistes à explorer. C'est pourquoi je suis très heureux que cette proposition de résolution européenne lui consacre un beau chapitre.

M. Ludovic Haye . - Merci pour ces interventions qui représentent les différentes sensibilités. Ce sujet me tient particulièrement à coeur : les douze propositions législatives du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » vont assurément dans le bon sens et s'inscrivent dans le droit fil des priorités françaises. Pour la présidence française, le présent semestre est crucial pour concilier investissements économiques et ambitions climatiques, avec en ligne de mire la justice sociale.

Cette approche globale correspond à celle que la France a adoptée dans le plan de relance, la loi « Énergie-Climat », puis le projet de loi « Climat et résilience ». Selon cette optique, la PPRE est compatible avec cette stratégie. Sur ce point, l'alinéa 90, qui sous-entend que nous devons nous appuyer sur le potentiel nucléaire pour valoriser nos engagements dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, nous satisfait.

Il en est de même pour la référence à la nouvelle taxonomie verte européenne énoncée à l'alinéa 60. Nous ne pouvons que souscrire à l'alinéa 93, en vertu duquel la transition vers une économie décarbonée ne doit pas être synonyme de décroissance. Nous sommes tous d'accord pour une écologie capable d'innovation, pourvoyeuse d'emplois, qui ne gaspille pas ni ne détruit, mais crée de la richesse.

De même, l'acceptation sociale figurant à l'alinéa 94 doit animer chaque responsable politique. Nous proposons sur le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières la même vision que la France a portée. C'est un paradigme indispensable si nous voulons nous tourner vers une géopolitique responsable. Cela représenterait un changement culturel majeur en Europe et une avancée diplomatique réelle.

Pour toutes ces raisons, je soutiendrai cette PPRE au nom de mon groupe.

M. Franck Montaugé . - À l'alinéa 93, il m'apparaîtrait plus adéquat d'écrire que la transition vers une économie décarbonée « doit s'inscrire dans le cadre d'une croissance mesurée par des objectifs de développement durable adaptés aux enjeux et à la planification qui en résulte. »

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques. - Une proposition de rédaction a été proposée en ce sens. Peut-être votre proposition sera-t-elle satisfaite.

EXAMEN DES PROPOSITIONS DE RÉDACTION

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Louis-Jean de Nicolaÿ a formulé une proposition de rédaction afin de faire référence, dans les visas de la résolution, à la lettre de mission qui lui avait été adressée par le Président du Sénat en vue de la COP26. Il s'agit de préciser à nouveau l'implication du Sénat sur ces sujets, en particulier la délégation d'une mission dans ce cadre. Cette spécificité ne soulève pas de problème et ne déstructure pas la PPRE.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - Lors de la réunion interparlementaire en marge de la COP26 à Glasgow, le président Larcher avait en effet souhaité qu'une motion - adoptée à l'unanimité - rappelle le rôle vital des collectivités territoriales dans la mise en oeuvre des politiques d'atténuation du changement climatique et d'adaptation à celui-ci, et la nécessité de leur apporter un financement suffisant. Cela doit permettre d'atteindre l'objectif de 55 %.

La proposition de rédaction est retenue.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes. - À l'alinéa 79 , une proposition de rédaction vise à remplacer les mots : « réévaluer les modalités de fonctionnement du » par les mots : « réformer le ». La rédaction serait donc la suivante : « Considérant que les effets potentiels du paquet "Ajustement à l'objectif 55 " et la forte hausse des prix des énergies invitent à réformer le marché européen de l'électricité. » Cette formulation est un peu plus offensive ; j'y suis plutôt favorable.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques. - Notre commission est d'accord avec cette écriture un peu plus offensive, qui devrait répondre en partie aux remarques de M. Laurent. Il y a urgence à réformer très rapidement le système de tarification de l'électricité.

M. Franck Montaugé . - Cet alinéa 79 appelle d'une certaine façon à la révision du marché de l'électricité. L'évocation d'un sujet aussi important ne devrait-elle pas figurer à la fin du texte, où l'on appelle à des actions concrètes ?

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Nous avons voulu mettre l'accent sur l'acceptation sociale et sociétale du dispositif. Ceci oriente notre conclusion qui propose une ouverture. Je suis favorable au maintien de cette architecture du texte.

M. Pierre Laurent , rapporteur. - Lundi soir, lors de l'élaboration de la rédaction du texte que nous examinons ce matin, j'ai envoyé un texte avec une série de propositions, qui ont visiblement été classées sans suite. Qu'en est-il ?

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes. - Vous pouvez les présenter de nouveau.

M. Pierre Laurent , rapporteur. - Je le ferai donc au moment de l'examen des alinéas concernés.

La proposition de rédaction est retenue.

M. Didier Marie , rapporteur. - À l'alinéa 93, nous proposons de remplacer les termes : « ne doit pas être synonyme de décroissance », par le terme : « nécessite ». La rédaction serait donc la suivante : « Affirme que la transition vers une économie décarbonée nécessite de concilier lutte contre les dérèglements climatiques, développement durable, développement économique et inclusion sociale... ». La référence à la décroissance nous apparaissait un peu trop défensive ; nous proposons là aussi une version plus offensive.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - La rédaction initiale avait du sens pour ne pas accréditer une perspective décroissante par ce texte. Je ne suis donc a priori pas très favorable à cette proposition, mais je souhaiterais entendre l'avis de la présidente de la commission des affaires économiques et du président de la commission de l'aménagement du territoire.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - N'ayant pu évoquer cette question avec les commissaires, mon avis sera personnel. Dans cette PPRE, nous devons donner un cap stratégique pour l'Europe. À l'instar du président Rapin, je ne pense pas que la décroissance soit une option pour l'Europe. Je comprends le sens de la proposition de rédaction, mais j'émettrai un avis très réservé.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - La possibilité d'émettre des avis divergents fait partie de l'intérêt de ce format de réflexion.

M. Patrice Joly . - La croissance et la décroissance, déjà évoquées dans de multiples réunions, doivent à l'évidence être questionnées de nouveau. Nous nous orientons nécessairement sur une croissance différente. Si la production de biens matériels est toujours nécessaire, sa finitude se heurte à l'infini culturel et relationnel.

M. Franck Montaugé . - Je partage la position de la présidente de la commission des affaires économiques, mais la décroissance renvoie à la dimension purement économique du développement. La notion d'objectif de développement durable trouverait sa place, qui ne se limite pas à la seule dimension productive de notre société. Il s'agit d'un positionnement stratégique.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Cette notion figure déjà dans l'alinéa.

M. Daniel Gremillet , rapporteur. - La rédaction initiale me paraissait équilibrée. Autrement, nous risquons de ne pas être au rendez-vous de l'enjeu de la transition décarbonée. La France et l'Europe doivent être présentes, tout en conciliant le développement durable, le développement économique et l'inclusion sociale. C'est un pari sur l'avenir !

M. Pierre Louault . - La croissance sera verte ou ne sera pas ; les deux notions sont liées !

M. Laurent Duplomb . - J'ai l'impression de rêver : notre continent est depuis cinq heures du matin en guerre, pour la première fois depuis 1945 - hormis la guerre de Yougoslavie. Ce n'est tout de même pas anodin ! Les conséquences seront considérables sur les prix des énergies, notamment du gaz russe, le blé ukrainien, les bourses mondiales et en particulier européennes. C'est comme si nous nous trouvions dans une voiture sans moteur, sans feux, sans frein qui va droit dans le mur, et que nous continuions à parler de tout et de rien. Sommes-nous aujourd'hui à la hauteur du débat ? En quelques minutes, Vladimir Poutine va émettre la quantité de dioxyde que nous produirions en plusieurs mois ou plusieurs années. Si demain l'Europe est en guerre, croyez-vous vraiment que l'on se posera la question de la décroissance ?

Mme Marta de Cidrac , rapporteure. - Je suis défavorable à la proposition de rédaction. L'écriture de l'alinéa 93 est tout à fait équilibrée. Il faut au contraire maintenir le terme « décroissance » pour le distinguer des autres notions du texte.

M. Dominique de Legge , rapporteur. - Je souhaite également le maintien de cette rédaction, pour une autre raison simple : pour financer nos objectifs, nous avons besoin de croissance. Il faut l'affirmer très clairement.

M. Daniel Salmon . - Nous sommes évidemment favorables à cette proposition visant à supprimer le terme « décroissance ». On parle souvent de sobriété. Or notre trajectoire d'une croissance infinie sur une planète finie n'est pas viable. Ce terme de « décroissance » irrite beaucoup, notamment quand nous le portons. S'il disparaissait de ce texte, ce serait mieux pour tout le monde !

M. Didier Marie , rapporteur. - Nous ne voulions pas engager un débat sur la décroissance. Nous souhaitions juste proposer une formulation plus positive que celle qui était inscrite. À l'instar de nombre de nos collègues, nous sommes pour une croissance, mais différente de celle que nous connaissons aujourd'hui. Elle serait respectueuse du développement durable, du développement économique et de l'inclusion sociale. Cela étant, eu égard à l'imbroglio que cette suggestion semble susciter, nous la retirons.

La proposition de rédaction est retirée.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - À l'alinéa 94, une proposition de rédaction vise à insérer après le mot : « d'accompagnement » les mots : « et d'inclusion sociale ». La rédaction serait la suivante : « ...et à prévoir les dispositifs pertinents d'accompagnement et d'inclusion sociale de cette transition en amont... ». J'y suis favorable.

La proposition de rédaction est retenue.

M. Pierre Laurent , rapporteur. - Je proposais d'insérer, entre les alinéas 93 et 94 un alinéa sur la question de la transition juste. Ce terme ne figure pas une seule fois dans le texte. Concernant le cadre « clair et soutenable », j'avais proposé qu'il soit « juste, clair et soutenable ». Mais cela n'a pas été retenu. Quant au terme « d'inclusion sociale », il est trop minimal et devrait s'attacher au développement économique. Il faudrait passer d'une logique de compensation à une logique de promotion sociale.

Je vous soumets donc la proposition suivante : « Demande que la transition juste s'appuie sur un cadre légal qui doit conduire les États membres à garantir les droits sociaux fondamentaux dans la période de transition, à renforcer les systèmes de protection sociale, à garantir la négociation collective des plans de transition des entreprises et des administrations, notamment pour favoriser les droits à la formation, à la requalification et au perfectionnement des travailleurs dans les domaines des nouvelles technologies propres, et à l'adaptation aux changements climatiques ». Cette idée s'inspire fortement des demandes des syndicats et d'une proposition plus détaillée de la Confédération européenne des syndicats (CES).

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - On touche aux compétences des États membres.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - L'action européenne en matière de participation et de formation doit respecter le principe de subsidiarité.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Didier Marie , rapporteur . - À l'alinéa 95, une proposition de rédaction vise à insérer après le mot : « besoins » les mots : « notamment au regard du niveau des ressources propres actuelles et futures, largement en deçà des dépenses prévues. » La rédaction qui en découle serait la suivante : « S'inquiète de l'adéquation des ressources prévues aux besoins, notamment au regard du niveau des ressources propres actuelles et futures, largement en deçà des dépenses prévues, et appelle la Commission à présenter une stratégie globale de financement adaptée aux enjeux et, le cas échéant, à envisager le regroupement des différents fonds qui y contribuent ; ».

Aujourd'hui, le niveau de ressources propres de l'Union européenne est insuffisant. Des négociations sont en cours, dont le troisième volet n'a pas été engagé. Par ailleurs, le montant des investissements à réaliser est sous-estimé comme l'indique Mme Lagarde, selon laquelle ce montant est au moins égal au double de ceux qui sont déjà prévus.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes. - Les ressources propres doivent en principe être allouées essentiellement au remboursement de l'emprunt commun. Il ne faut à mon sens pas y déroger. La proposition viserait à augmenter le volume des ressources propres pour prévoir une affectation plus importante. Compte tenu de la logique du dispositif tel que je l'ai présenté avec le rapporteur général du budget, je resterai sur cette position, à moins de prévoir en priorité le remboursement de l'emprunt commun à l'échelle européenne. Il est hors de question de puiser dans ces ressources propres pour financer ne serait-ce que le Fonds social pour le climat !

M. Didier Marie , rapporteur. - L'Europe est confrontée à deux enjeux : rembourser la dette mutualisée ayant permis de mettre en oeuvre le Fonds de relance, et investir massivement dans la transition écologique. Quelle que soit l'affectation des fonds, tant pour le remboursement de la dette que pour les investissements, ils sont insuffisants ; à moyen terme, les États devront contribuer. Il faut donc absolument poursuivre les négociations pour augmenter le niveau des ressources propres et prendre en considération la réalité du montant des investissements à réaliser. Notre proposition ne consiste pas à imaginer un vase communicant entre les deux ; c'est un paquet global que l'Europe devra mettre en oeuvre pour financer la totalité de ses engagements, aussi bien sur la dette que sur la transition écologique.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Je suis d'accord sur le principe, sous réserve de bien définir l'objectif de l'utilisation des ressources propres. Sinon, cette solution va à l'encontre de ma philosophie, partagée par nombre des commissaires, selon laquelle nous allons tout droit vers un fédéralisme financier non contrôlé. Ce désaccord est légitime, mais je n'adhère pas à l'utilisation complète des ressources propres ou à leur augmentation pour financer un budget européen. Il m'apparaît essentiel que les États gardent une maîtrise budgétaire en Europe. Je suggère donc d'ajouter à la proposition les termes : « rappelle que les nouvelles ressources propres doivent être prioritairement affectées au remboursement de l'emprunt mutualisé levé pour financer l'instrument de relance Next Generation EU . » Cela vous convient-il ?

M. Didier Marie , rapporteur . - Oui, sachant qu'il s'agit d'une masse globale qui devra être affectée en fonction des besoins. Le remboursement de la dette proviendra soit de l'affectation des ressources propres, soit d'une contribution des États. Il en sera de même des investissements réalisés en matière de transition écologique.

M. Pierre Laurent , rapporteur. - Je ne voterai pas cette proposition de rédaction. Le débat est irréel : la sous-estimation globale des niveaux de financement est considérable, bien qu'elle ne puisse être appréciée faute d'éléments probants.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes. - C'est pourquoi ce garde-fou permettra en priorité de rembourser l'emprunt avec les ressources propres.

M. Pierre Laurent , rapporteur . - Dans ce cas, il ne faut pas dire que la priorité des priorités est de parvenir à 55 % en 2030.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - C'est peut-être le fond du problème.

Mme Marta de Cidrac , rapporteure. - Notre proposition a le mérite d'être claire et d'évoquer justement les besoins. De quoi parle-t-on ? Nous ne le savons pas précisément. Il serait inopportun d'introduire de nouvelles subtilités susceptibles de nous échapper.

La proposition de rédaction, modifiée, est retenue.

M. Jacques Fernique . - Après l'alinéa 95, ma proposition de rédaction, qui a été travaillée avec Ronan Dantec, insiste sur le rôle clé des territoires. Elle consisterait à ajouter : « Rappelle l'importance de l'approche territoriale et enjoint la Commission européenne à présenter une stratégie globale de financement adaptée aux capacités et opportunités d'action des territoires, estime que la mobilisation et la mise en cohérence des différents fonds structurels, des fonds d'investissement européens et des divers programmes de soutien financier intéressant les collectivités territoriales est une condition nécessaire à l'atteinte des objectifs à l'horizon 2030 et à la neutralité carbone en 2050. »

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Cette proposition de rédaction me semble globalement acceptable pour les deux commissions. Il est pertinent de rappeler l'importance de l'approche territoriale sur le sujet. Toutefois, nous suggérons de remplacer « enjoint » par « demande ».

M. Jacques Fernique . - C'est d'accord.

La proposition de rédaction est retenue.

Mme Denise Saint-Pé , rapporteure . - Après l'alinéa 106, la proposition de rédaction de notre collègue Jean Bacci vise à rappeler que l'Europe ne parviendra pas à tenir le niveau d'adoption de carbone qu'elle s'est fixé dans le paquet « Ajustement à l'objectif 55 » si elle ne lutte pas efficacement contre les feux de forêt. Il faut, pour cela, que des politiques publiques adaptées en matière de prévention des risques soient mises en place, tant au niveau national qu'au niveau européen.

La rédaction qui en découlerait serait la suivante : « Afin d'atteindre le niveau d'absorption de carbone visé par le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », insiste également sur la nécessité de mobiliser une politique de prévention des risques aux échelles européenne et nationale à la hauteur de la menace que représente l'augmentation de l'intensité et du nombre d'incendies en Europe du fait du dérèglement climatique. » Notre commission a donné un avis favorable à cette proposition de rédaction.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - Je ne m'oppose pas à cette proposition, qui « ne mange pas de pain », si je puis dire, mais je trouve qu'elle est un peu décalée par rapport à l'objet de la PPRE. Le problème des mégafeux et de la pollution qu'ils apportent est très important : il faut le combattre au niveau européen. Toutefois, si l'on adoptait cette proposition, il faudrait également parler de la lutte contre la pollution marine, contre la pollution des eaux, contre la pollution de l'air... À nouveau, je ne m'y oppose pas pour autant.

M. Jean-François Longeot , président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable soutient cette proposition de rédaction, et il serait regrettable que la commission des affaires européennes ne l'adopte pas. Il vaut mieux que nous la retirions - je m'en entretiendrai avec M. Bacci. Je souligne néanmoins que, d'un point de vue environnemental, ce sujet est fondamental.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Dans les arbitrages, nous n'avions pas retenu cette proposition de rédaction, car, comme l'a dit la présidente Sophie Primas, rien n'empêcherait alors d'intégrer toutes les questions environnementales, tous les types de pollutions... Plus on ajoute à la PPRE, moins on lui donne de corps.

M. Didier Marie , rapporteur . - Je me satisfais de la demande de retrait du président de la commission des affaires européennes, parce que notre texte s'intéresse aux douze mesures législatives du paquet « Climat ». Or il n'y a pas de mesure législative concernant les feux de forêt. C'est une préoccupation importante, mais qui mériterait, effectivement, une démarche séparée.

Mme Denise Saint-Pé , rapporteure . - Je retire donc la proposition de rédaction, présentée au nom de M. Bacci. Je lui ferai part de nos débats.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Rien ne l'empêche de déposer une proposition de loi sur le sujet !

La proposition de rédaction est retirée.

M. Pierre Laurent , rapporteur . - Aux alinéas 107 et 108, qui portent une appréciation très positive sur le système d'échange de quotas d'émissions SEQE-1, la proposition que j'avais préparée tendait à une rédaction beaucoup plus nuancée.

Je m'en tiendrai à vous proposer de réécrire les premières lignes de l'alinéa 108 de la manière suivante : « Prend acte des évaluations de la Commission européenne sur le bilan du SEQE-1, souligne toutefois que ce bilan appelle une évaluation approfondie et contradictoire. » Cette absence d'évaluation critique du SEQE-1 est, à mon avis, très discutable, d'autant que l'appréciation très positive que l'on porte sur le SEQE-1 a des conséquences sur la manière dont est promu le SEQE-2, qui suscite encore plus de problèmes. Ce point me paraît extrêmement important.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Votre proposition ne soulève de difficultés pour aucun des présidents.

La proposition de rédaction est retenue.

M. Didier Marie , rapporteur . - À l'alinéa 117, nous proposons, après le mot « rurales », d'insérer une nouvelle phrase : « souhaite dès lors qu'au moins 50 % des recettes issues du nouveau système d'échange de quotas d'émissions pour les secteurs du bâtiment et du transport routier (SEQE- bis ) soient allouées au fonds social pour le climat ; et ».

L'idée est simple : dès lors que l'on instaure un nouveau système, et quelles que soient les critiques dont celui-ci peut faire l'objet, nous considérons qu'il devrait alimenter le Fonds climat pour le climat, dont on sait qu'il est insuffisamment financé, pour accompagner les publics les plus en difficulté, ainsi que, éventuellement, les petites et moyennes entreprises.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Je sollicite le retrait de cette proposition de rédaction : dans la mesure où l'on a peu de visibilité sur le financement du fonds social pour le climat, il paraît compliqué de s'engager sur des montants...

M. Dominique de Legge , rapporteur . - On ne peut à la fois déplorer l'absence d'impact et de visibilité du fonds et expliquer qu'on veut augmenter son budget ! Ce n'est pas très logique.

M. Didier Marie , rapporteur . - Tout au long de la PPRE, on indique que l'une des principales difficultés sera l'accompagnement social des publics susceptibles de pâtir d'une modification de la transition énergétique.

À ce jour, la Commission européenne prévoit une affectation de 25 % des nouveaux quotas au fonds climat, ce qui représente, au total, 72,2 milliards d'euros. Tout le monde considère que ce montant est insuffisant pour permettre l'accompagnement et l'acceptabilité sociale des changements à venir.

C'est pourquoi nous proposons de prélever plutôt 50 % des nouveaux quotas qui seront installés, de manière à avoir les moyens d'accompagner réellement toutes celles et tous ceux qui seront pénalisés par le changement de paradigme.

Mme Sophie Primas , présidente de la commission des affaires économiques . - Je comprends évidemment l'objectif de cette proposition de rédaction : tout au long de la PPRE, on insiste fortement sur l'acceptation sociale de la transition énergétique.

Il me semble néanmoins que cette proposition est un peu prématurée, parce que l'on ne sait pas à quoi servent les 75 % restants. Il y a peut-être, derrière, de très bonnes intentions et de très bonnes idées. Je suis donc un peu sceptique.

M. Jean-François Longeot , président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable . - Je partage ce point de vue : on peut comprendre cette proposition de rédaction, mais je crois qu'il faut que nous trouvions un consensus et que le dispositif soit affiné. Nous n'y sommes donc pas favorables.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Didier Marie , rapporteur . - Aux alinéas 125, 142, 172, 177 et 180, mes cinq propositions de rédaction visent à ajouter, après le mot « biocarburants », la formule suivante : « dont le bilan carbone et énergétique est positif », afin de rassurer sur la nature des biocarburants qui seraient utilisés - je vous renvoie au débat que nous avons eu tout à l'heure.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - C'est un grand point de désaccord entre les deux commissions...

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Il ne s'agit pas d'un désaccord : nous considérons que ces propositions de rédaction sont satisfaites. En effet, les biocarburants doivent aujourd'hui respecter les critères de durabilité - c'est l'objet des directives « Énergies renouvelables 2 » (EnR 2) et « Énergies renouvelables 3 » (EnR 3). N'oublions pas que le paquet promeut déjà les biocarburants dans les objectifs des EnR et que cette promotion est d'ores et déjà conditionnée à une diminution entre 50 et 65 % des émissions liées à leurs installations - cela sera encore plus avec la nouvelle règlementation européenne.

Les propositions de rédaction ne sont pas retenues.

M. Didier Marie , rapporteur . - J'avais proposé une proposition de rédaction tendant à supprimer l'alinéa 148, mais, pour gagner du temps, je vais présenter directement ma proposition de repli : il s'agit, après le mot « biocarburants », d'insérer « dont le bilan carbone et énergétique est vertueux » et, surtout, de supprimer, « quelle que soit leur génération ».

Sans rouvrir le débat, je rappelle qu'il convient de distinguer les biocarburants d'hier et ceux d'aujourd'hui, qui n'ont pas exactement la même valeur écologique.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Cette proposition de rédaction est problématique.

Premièrement, elle enlève une protection magistrale pour nos agriculteurs concernant la référence aux importations prohibées de soja et d'huile de palme.

Deuxièmement, elle supprime la référence aux critères de durabilité, chose que, je pense, personne ne souhaite.

M. Jacques Fernique . - Nous avions soumis une proposition de rédaction tendant elle aussi à supprimer les mots « quelle que soit leur génération » - je l'ai évoqué lors de mon propos liminaire. Cela fragilise votre argument...

M. Pierre Cuypers . - Je rappelle que la première génération n'a pas encore complètement et totalement abouti. Il faut donc maintenir la rédaction en l'état.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Didier Marie , rapporteur . - À l'alinéa 164, ma proposition de rédaction consiste à le rédiger de la manière suivante : « Juge que doit être appliqué un seuil d'émission, adapté, ambitieux et graduel, pour les énergies fossiles référencées dans le règlement (UE) 2020/852 du 18 juin 2020 du Parlement européen et du Conseil sur l'établissement d'un cadre visant à favoriser les investissements durables et modifiant le règlement (UE) 2019/2088 dit règlement sur la taxonomie, et utilisées pour le chauffage et le refroidissement, plutôt qu'une interdiction sèche ; »

Il s'agit d'encadrer la possibilité de poursuivre l'utilisation d'énergies fossiles, s'agissant notamment du logement social et des bâtiments, pour le chauffage et le refroidissement, pour la limiter à la condition expresse qu'il s'agisse d'énergies fossiles référencées dans la taxonomie - soit essentiellement le gaz.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Je vais répondre à la place de ma collègue Dominique Estrosi Sassone : le problème de cette proposition de rédaction est qu'elle empêcherait les logements sociaux de recourir au gaz, ce que font aujourd'hui les trois quarts du parc social.

M. Didier Marie , rapporteur . - La rédaction que nous proposons permet de considérer que ce sont les énergies fossiles qui sont aujourd'hui encore autorisées dans le règlement de la taxonomie, soit le gaz, à l'exclusion de toute autre.

On peut très bien imaginer que, dans tel ou tel pays, on continue de chauffer les logements sociaux avec des chaudières au charbon. L'idée est de s'en tenir exclusivement à ce que l'Union européenne a prévu.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - La taxonomie n'autorise que le gaz émettant moins de 100 grammes de CO 2 par kilowattheure.

Il faut mesurer les conséquences qui découleraient de cette rédaction pour les logements sociaux...

M. Didier Marie , rapporteur . - C'était le sens de notre proposition de rédaction tendant à remonter à 50 % le taux des nouveaux quotas affectés au Fonds pour le climat pour accompagner les modifications.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - L'idée est bonne. Le seul problème est que le gaz que vous évoquez n'existe pas. Soyons concrets.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Les commissions des affaires économiques et de l'aménagement du territoire et du développement durable sont défavorables à la proposition.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Jean-Michel Houllegatte , rapporteur . - Je vous soumets une proposition de rédaction, de nature technique, qui vise à supprimer un doublon : l'alinéa 171 est en effet redondant avec l'alinéa 192, lequel concerne également la certification internationale des carburants d'aviation durables et moins bien rédigé.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Cette proposition de rédaction est portée par la commission des affaires européennes. J'y suis favorable.

La proposition de rédaction est retenue.

Mme Angèle Préville . - Je propose de modifier la rédaction des alinéas 172, 177 et 180 pour rappeler que les carburants synthétiques peuvent être élaborés à partir de charbon et de lignite. Il me paraît absolument nécessaire de le mentionner, car il ne serait pas vertueux d'utiliser des matières fossiles pour fabriquer des carburants synthétiques. Il faut exclure ceux qui seraient fabriqués de la sorte.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Cela est déjà pleinement intégré dans l'objectif général du texte. Vos propositions de rédaction sont satisfaites. La base moléculaire de tous les carburants restera le carbone.

Mme Angèle Préville . - En termes d'émissions de gaz à effet de serre, fabriquer des carburants synthétiques en se servant de l'électrolyse de l'eau et du dioxyde de carbone qui se trouve dans l'atmosphère est vertueux. Utiliser le charbon et le lignite ne l'est pas.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Le texte prévoit des seuils d'émission, qui excluent, de fait, le charbon et le lignite. La proposition de rédaction est donc satisfaite.

M. Daniel Salmon . - Si elle ne l'était pas, ajouter cette précision me semblerait tout à fait pertinente : ce n'est pas du tout la même chose que le carbone soit issu de matières fossiles ou des énergies renouvelables !

Mme Angèle Préville . - En effet !

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Pour les mêmes raisons, avis défavorable à votre proposition de rédaction indiquant, aux alinéas 172, 177 et 180, que les carburants synthétiques doivent être élaborés à partir d'énergies renouvelables.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

Mme Angèle Préville . - À l'alinéa 130, ma proposition de rédaction tend à aller plus loin sur l'intégration des produits supplémentaires dans le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières : il s'agit d'écrire que l'intensité carbone « doit » - et non « peut » - être évaluée, et que des produits de base supplémentaires « devraient » - et non « pourraient » - être intégrés au mécanisme à l'occasion de la clause de revoyure. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) nous interpelle très souvent sur l'impact environnemental des produits finis importés.

M. Daniel Gremillet , rapporteur . - Je suis plutôt défavorable à cette proposition de rédaction, qui complexifie les choses. Au reste, le marché carbone doit respecter les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et votre proposition fragiliserait cette nécessaire conformité.

Mme Denise Saint-Pé , rapporteure . - Nous en avons débattu en commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Même si l'objectif est tout à fait louable, nous avons nous aussi conclu qu'il y aurait un risque d'incompatibilité avec les règles de l'OMC.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

Mme Angèle Préville . - À l'alinéa 131, nous proposons, dans le même état d'esprit, de remplacer « l'opportunité » par « la nécessité » d'une extension du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières à certains produits finis exposés à un risque de fuites de carbone. Ce serait montrer un peu plus de volontarisme sur le sujet.

La proposition de rédaction n'est pas retenue.

M. Didier Marie , rapporteur . - À l'alinéa 96, je propose la rédaction suivante : « Considère que la transition vers une économie décarbonée présente de réelles opportunités de développement économique mais que le niveau d'ambition affiché par l'Union européenne lui impose de jouer le rôle de meneur économique et de développement durable ainsi que de prescripteur de normes en matière de durabilité. »

Il s'agit d'affirmer que l'Union européenne doit imposer - par la négociation, bien évidemment - ce changement de paradigme à l'échelle internationale, notamment dans le cadre des règles de l'OMC.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Cette proposition paraît acceptable.

La proposition de rédaction est retenue.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Pour répondre au souhait que Pierre Laurent a exprimé tout à l'heure, je lui suggère une proposition de rédaction tendant à intégrer l'expression « transition juste » dans notre PPRE. Nous pourrions le faire à ce même alinéa 96, par la rédaction suivante : « souligne néanmoins la nécessité d'accompagner l'évolution des acteurs économiques, des ménages et des territoires les plus vulnérables pour permettre une transition juste. »

M. Pierre Laurent , rapporteur . - Je suis d'accord.

La proposition de rédaction est retenue.

La proposition de résolution européenne est ainsi modifiée pour être déposée dans cette rédaction par ses auteurs.

M. Jean-François Rapin , président de la commission des affaires européennes . - Je remercie les rapporteurs, mes deux collègues présidents et les groupes politiques. Nous avons travaillé à la façon européenne, avec beaucoup de diplomatie, en nous égarant parfois dans les réflexions, mais en étant, au final, efficaces.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES65 ( * )

Mardi 11 janvier 2022

- Secrétariat général des affaires européennes (SGAE) : MM. Jérôme BROUILLET , secrétaire général adjoint, François GIBELLI , chef du secteur Industrie, télécommunications, postes, société de l'information, environnement, énergie, compétitivité, recherche, espace (ITEC), et Mme Constance DELER , chef du secteur Parlement européen et parlement national (PARL).

Mardi 18 janvier 2022

- Commission de régulation de l'énergie (CRE) : MM. Dominique JAMME , directeur général, Romain CHARVET , chargé de mission à la direction de la communication et des relations institutionnelles, et Mme Claire HELLICH-PRAQUIN , directrice des affaires européennes, internationales et de la coopération.

- Ministère de la transition écologique - Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) : M. François ADAM , directeur.

- Ministère de la transition écologique - Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) : M. Laurent MICHEL , directeur général.

Mardi 25 janvier 2022

- Association française du gaz (AFG) : MM. Jean-Marc LEROY , président, Thierry CHAPUIS , délégué général, et Max-Erwann GASTINEAU , responsable affaires publiques.

- France gaz renouvelables (FGR) : M. Olivier DAUGER , co-président, Mme Cécile FREDERICQ , déléguée générale, et M. Arnaud BOUSQUET , secrétaire général.

- Union française de l'électricité (UFE) : Mme Alice FRANZ , responsable des affaires européennes et internationales, et M. Rudy CLUZEL , responsable des relations institutionnelles France ;

- Syndicat des énergies renouvelables (SER) : MM. Jean-Louis BAL , président, Alexandre ROESCH , délégué général, et Mme Léa EZENFIS , responsable juridique et affaires institutionnelles ;

- France énergie éolienne (FEE) : MM. Michel GIORIA , délégué général, et Laurent CAYREL , directeur des relations institutionnelles ;

- Enerplan : MM. Daniel BOUR , président, et David GREAU , directeur général adjoint.

Jeudi 3 février 2022

- Commission européenne : Mme Mechthild WÖRSDÖRFER , directrice générale de l'énergie.

Mardi 8 février 2022

- Union sociale pour l'habitat (USH) : MM. Nicolas PRUDHOMME , directeur de la maîtrise d'ouvrage et des politiques patrimoniales, Laurent GHEKIERE , directeur des affaires européennes et des relations internationales, représentant auprès de l'Union européenne, Mmes Francine ALBERT , conseillère pour les relations avec le Parlement, et Carine PUYOL , responsable de missions - mission Affaires européennes.

- Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) : MM. Jean-Marc TORROLLION , président, Benoît FAUCHARD , secrétaire général, et Mme Bénédicte ROUAULT , chef de cabinet du président.

LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

- Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - Agence de la transition écologique (ADEME-ATE)

- Air liquide

- Association française du gaz (AFG)

- Association française du gaz naturel véhicule (AFGNV)

- Association française indépendante de l'électricité et du gaz (Afieg)

- Association nationale pour le développement de la mobilité électrique (Avere)

- EkWateur

- Électricité de France (EDF)

- Engie

- Fédération des services énergie environnement (Fedene)

- Fédération française du bâtiment (FFB)

- Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR)

- Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim)

- France énergie éolienne (FEE)

- France gaz renouvelables (FGR)

- France hydrogène

- Fédération des producteurs d'oléagineux et de protéagineux (FOP)

- Gestionnaire du réseau de transport gaz (GRTgaz)

- Haut Conseil pour le climat (HCC)

- Mouvement des entreprises de France (Medef)

- Platform for electromobility

- Réseau de transport d'électricité (RTE)

- Syndicat des énergies renouvelables (SER)

- Union des industries utilisatrices d'énergie (Uniden)

- Union française de l'électricité (UFE)

- Union française des industries pétrolières (UFIP)

- Union sociale pour l'habitat (USH)

- Vattenfall.

ANNEXES

ANNEXE 1 : PRINCIPALES PROPOSITIONS DE RÈGLEMENTS ET DE DIRECTIVES DU VOLET « ÉNERGIE » DU PAQUET « AJUSTEMENT À L'OBJECTIF 55 »

Proposition
de texte

Objectifs et mesures

Proposition
de directive

sur la taxation de l'énergie

Objectif : Aligner la taxation des produits énergétiques et de l'électricité sur la politique de l'Union européenne en matière d'énergie et de climat, de manière à réduire les émissions de GES.

Mesures :

• Passage d'une taxation fondée sur le volume à une taxation fondée sur le contenu énergétique :

o À compter du 1 er janvier 2023, les taux suivants, classés en fonction des performances environnementales, sont appliqués (articles 7, 8, 9 et 10) :

§ les combustibles fossiles conventionnels, tels que le gazole et l'essence, sont taxés au taux le plus élevé, soit le taux de référence ;

§ les carburants et combustibles d'origine fossile moins nocifs et qui peuvent contribuer à la décarbonation à court et à moyen termes (gaz naturel, GPL, hydrogène d'origine fossile) sont taxés à deux tiers du taux de référence pendant une période transitoire de dix ans, avant d'atteindre le taux complet ;

§ les biocarburants durables mais non avancés sont taxés à 50 % du taux de référence ;

§ l'électricité, les biocarburants avancés, les bioliquides, le biogaz et l'hydrogène d'origine renouvelable bénéficient du taux le plus bas ;

o Une période transitoire de dix ans est prévue dans certains secteurs, avec une augmentation de la taxation d'un dixième par an jusqu'à la fin de la période transitoire, c'est-à-dire jusqu'au 1 er janvier 2033 (article 7) ;

o À compter du 1 er janvier 2024, ces taux seront adaptés annuellement sur la base de la variation de l'indice des prix à la consommation harmonisé publié par Eurostat (article 5) ;

o La directive ne s'applique pas à la taxation en aval de la chaleur ni aux produits énergétiques à double usage ou utilisés autrement que comme carburants ou combustibles ni à l'électricité utilisée pour la chimie, l'électrolyse ou la métallurgie (article 3).

• Nécessité d'une taxation de la navigation aérienne et de la navigation par voie d'eau, y compris pour le secteur de la pêche, intra-UE :

o Dispositions applicables à l'aviation (article 14) :

§ les taux minimaux de taxation sont atteints sur une période transitoire de dix ans ;

§ un taux minimal nul s'applique aux carburants alternatifs durables et à l'électricité durable pendant dix ans ;

§ les niveaux de taxation sont différents pour l'aviation intra-UE autre que l'aviation d'affaires et pour les vols intra-UE autres que les vols d'agrément ;

§ les services aériens intra-UE affectés exclusivement au transport de fret sont exonérés.

o Dispositions applicables à la navigation par voie d'eau (article 15) :

§ pour la navigation maritime intra-UE ainsi que la navigation régulière, la pêche et le transport de fret sur les voies navigables intérieures, les niveaux minimaux de taxation sont ceux applicables pour l'utilisation de carburants à des fins spécifiques ;

§ un taux minimal nul s'applique aux carburants alternatifs durables et à l'électricité pendant dix ans ;

§ l'électricité fournie par le réseau électrique terrestre aux navires à quai dans les ports peut être exonérée.

o Pour la navigation aérienne et par voie d'eau extra-UE , sans préjudice des obligations internationales, les États membres peuvent exonérer ou appliquer les mêmes niveaux de taxation que pour la navigation intra-UE, en fonction du type de vol ou d'activité.

• Possibilité de réductions ou d'exonération fiscales (article 6) :

o Exonération des ménages reconnus comme vulnérables , c'est-à-dire situés sous le seuil de risque de pauvreté correspondant à 60 % du revenu disponible équivalent médian national, de la taxation des produits énergétiques et de l'électricité pendant une période transitoire de dix ans (article 17) ;

o Réductions ciblées , à condition qu'elles ne soient pas inférieures aux taux minimaux :

§ aux ménages ou par des organismes caritatifs (article 17) ;

§ à certains secteurs (transports, déchets, administrations, forces armées, santé, travaux agricoles, horticoles ou aquacoles, sylviculture) (même article) ;

§ à certains produits (production combinée de chaleur et d'électricité, production d'électricité à partir de sources renouvelables) (même article) ;

§ aux entreprises grandes consommatrices d'énergie et autres (article 18).

• Renforcement des exigences en matière de contrôle et de circulation pour certains produits , comme les huiles lubrifiantes (article 21).

• Définition de conditions particulières d'exigibilité pour certains produits , comme l'hydrogène (article 22).

• Obligation pour les États membres d'adopter ou de publier, au plus tard le 31 décembre 2022, les dispositions législatives, réglementaires et administratives prises pour se conformer au règlement (article 30).

• Obligations en matière de rapports :

o Les États membres doivent informer la Commission des niveaux de taxation appliqués ainsi que des volumes correspondants de produits énergétiques et d'électricité soumis à taxation (article 26) ;

o Tous les cinq ans, la Commission doit présenter au Conseil un rapport concernant l'application de la directive et, le cas échéant, une proposition en vue de la modification de cette dernière (article 31).

Proposition
de directive

sur les énergies renouvelables

Objectif : Augmenter l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables d'ici à 2030, favoriser une meilleure intégration du système énergétique et contribuer aux objectifs climatiques et environnementaux.

Mesures :

• Changement de la définition des carburants renouvelables d'origine non biologique et de la valeur par défaut et ajout de nouvelles définitions (par exemple, la définition du bois rond de qualité ou encore du marché de l'électricité) (article 1 er paragraphe 1).

• Relèvement de l'objectif de la part d'énergie de sources renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie de l'Union de 32 % à 40 % d'ici à 2030 (article 1 er paragraphe 2).

• Renforcement de l'obligation de réduire au minimum les risques de distorsions indues sur le marché résultant des régimes d'aide et d'éviter de soutenir certaines matières premières destinées à la production d'énergie selon le principe de l'utilisation en cascade (article 1 er paragraphe 2).

• Suppression du soutien à la production d'électricité à partir de la biomasse à compter du 31 décembre 2026 (article 1 er paragraphe 2).

• Modification du calcul de la part de l'énergie de sources renouvelables (article 1 er paragraphe 3) afin que :

o l'énergie produite à partir de carburants renouvelables d'origine non biologique soit prise en considération dans le secteur dans lequel elle est consommée (électricité, chauffage et refroidissement ou transport) ;

o l'électricité renouvelable utilisée pour produire des carburants renouvelables d'origine non biologique ne soit pas incluse dans le calcul de la consommation finale brute d'électricité produite à partir de sources renouvelables de l'État membre.

• Renforcement de la coopération entre les États membres (article 1 er paragraphe 4) :

o Les États membres doivent mettre en place un projet pilote transfrontalier pour la production d'énergies renouvelables, sous trois ans ;

o Ceux situés sur le pourtour d'un même bassin maritime doivent définir conjointement la quantité d'énergie renouvelable en mer qu'ils prévoient de produire dans ledit bassin d'ici à 2050, avec des étapes intermédiaires en 2030 et 2040.

• Facilitation du recours des États membres aux accords d'achat d'électricité renouvelable et révision des procédures administratives afférentes au bâtiment , sous un an (article 1 er paragraphe 5).

• Renforcement des exigences en matière de qualification et de certification des installateurs (article 1 er paragraphe 7) :

o Les États membres doivent rendre publique la liste des installateurs qualifiés ;

o Ils doivent prendre des mesures visant à encourager la participation à des programmes de formation.

• Suppression de la possibilité pour les États membres de ne pas délivrer de garanties d'origine à un producteur qui bénéficie d'un soutien financier (article 1 er paragraphe 8).

• Facilitation de l'intégration de l'électricité renouvelable dans le système énergétique (article 1 er paragraphe 10) :

o Les gestionnaires de réseaux de transport et les gestionnaires de réseaux de distribution doivent publier des informations sur la part des sources d'énergie renouvelable et le contenu en gaz à effet de serre (GES) dans l'électricité qu'ils fournissent ;

o Les fabricants de batteries doivent respecter des obligations de transparence ;

o Les États membres doivent garantir une capacité de recharge intelligente pour les points de recharge électriques normaux non ouverts au public ;

o Les États membres doivent veiller à ce que les dispositions réglementaires concernant l'utilisation des actifs de stockage et d'équilibrage ne créent pas de discrimination à l'encontre de la présence de systèmes de stockage petits ou mobiles sur le marché des services de flexibilité, d'équilibrage et de stockage.

• Renforcement des objectifs d'intégration des énergies renouvelables :

o Bâtiments (article 1 er paragraphe 6) :

§ objectif indicatif de l'Union européenne de 49 % d'énergies renouvelables dans les bâtiments d'ici à 2030 ;

§ objectifs spécifiques nationaux inclus dans les plans nationaux intégrés en matière d'énergie et de climat (PNEC), selon une méthodologie commune à l'Union européenne.

o Industrie (article 1 er paragraphe 11) :

§ objectif contraignant de 50 % pour les carburants renouvelables d'origine non biologique utilisés comme matières premières ou transporteurs d'énergie ;

§ objectif indicatif d'augmentation des énergies renouvelables de 1,1 point de pourcentage par an en moyenne ;

§ pourcentage d'énergie renouvelable utilisé inclus dans l'étiquetage des produits industriels écologiques, selon une méthode commune à l'échelle de l'Union européenne.

o Systèmes de chauffage et de refroidissement :

§ objectif contraignant d'augmentation des énergies renouvelables de 1,1 point de pourcentage par an en moyenne (voire de 1,5 point dans les États membres où la chaleur et le froid fatals sont utilisés) (article 1 er paragraphe 12) ;

§ obligation des États membres de procéder à une évaluation de leur potentiel d'énergie produite à partir de sources renouvelables et d'utilisation de chaleur et de froid fatals (article 1 er paragraphe 12) ;

§ objectif indicatif d'augmentation des énergies renouvelables de 2,1 points de pourcentage par an en moyenne dans les réseaux de chaleur et de froid (article 1 er paragraphe 13) ;

§ extension de l'accès des tiers aux réseaux de chaleur et de froid de plus de 25 mégawatts thermiques (MWth), les États membres devant instituer un mécanisme permettant de traiter les refus injustifiés (article 1 er paragraphe 13) ;

§ obligation pour les GRD de procéder tous les quatre ans à une évaluation du potentiel des réseaux de chaleur et de froid, notamment en matière de fourniture d'énergie, d'équilibrage et d'autres services de réseau (article 1 er paragraphe 13).

o Transports (article 1 er paragraphe 14) :

§ réduction de 13 % de l'intensité des GES dans les carburants destinés au transport d'ici à 2030, en faisant passer le sous-objectif pour les biocarburants avancés et du biogaz à au moins 0,2 % en 2022, à 0,5 % en 2025 et à 2,2 % en 2030 et en introduisant un sous-objectif de 2,6 % pour les carburants renouvelables d'origine non biologique ;

§ introduction d'un mécanisme de crédit pour promouvoir l'électromobilité.

• Établissement des règles de calcul permettant d'établir la réduction de l'intensité d'émission de GES des carburants obtenue par l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports et les objectifs en matière de biocarburants avancés, de biogaz et de carburants renouvelables d'origine non biologique (article 1 er paragraphe 16).

• Renforcement des critères de réduction des émissions de GES appliqués aux carburants (article 1 er paragraphe 19) :

o L'énergie provenant des carburants renouvelables d'origine non biologique ne peut être comptabilisée aux fins des objectifs fixés dans la directive que si ses réductions d'émissions de GES sont d'au moins 70 % ;

o L'énergie produite par les carburants à base de carbone recyclé ne peut être comptabilisée aux fins de l'objectif relatif aux transports que si les réductions d'émissions de GES sont d'au moins 70 %.

• Renforcement des critères de durabilité appliqués à la biomasse (article 1 er paragraphe 18)

o Les critères existants relatifs aux terres sont appliqués à la biomasse agricole et à la biomasse forestière ;

o Les installations de production de chaleur et d'électricité dont la capacité thermique est inférieure à 5 MW sont incluses ;

o Les seuils actuels de réduction des émissions de GES pour les nouvelles installations de production d'électricité, de chaleur et de froid à partir de combustibles issus de la biomasse sont appliqués aux installations existantes ;

o Les incidences négatives de la récolte sur la qualité et la biodiversité des sols doivent être réduites au minimum.

• Introduction d'un mécanisme de vérification simplifié pour les installations dont la puissance est comprise entre 5 et 10 MW (article 1 er paragraphe 20).

• Élargissement du champ d'application de la base de données de l'Union , afin de couvrir les carburants au-delà du secteur des transports et de permettre la traçabilité des carburants renouvelables liquides et gazeux et des carburants à base de carbone recyclé, ainsi que leurs émissions de GES tout au long de leur cycle de vie (article 1 er paragraphe 22).

Proposition
de directive

sur les marchés

du gaz naturel et renouvelable et de l'hydrogène

Objectif : Faciliter l'intégration des gaz renouvelables et bas-carbone, y compris de l'hydrogène, dans le système énergétique de l'Union, en soutenant la création d'infrastructures et l'émergence de marchés compétitifs, en vue de décarboner la consommation de gaz.

Mesures :

• Définition du gaz bas-carbone, de l'hydrogène bas-carbone et des carburants bas-carbone, qui doivent chacun respecter une réduction des émissions de GES d'au moins 70 % (article 2).

• Établissement de marchés du gaz concurrentiels , fondés sur des règles nationales transparentes, souples et non discriminatoires, facilitant l'accès au marché

o Libre choix du fournisseur par les clients et possibilité d'avoir plus d'un contrat de fourniture à la fois de gaz naturel ou d'hydrogène (article 3) ;

o Libre détermination des prix par les fournisseurs de gaz (article 4) ;

o Les États membres veillent à ce que le droit national n'entrave pas les échanges transfrontaliers (article 3) et prennent des mesures appropriées pour assurer une concurrence effective entre les fournisseurs (article 4) ;

o Ils peuvent recourir à des interventions publiques dans la fixation des prix pour la fourniture de gaz naturel (article 4) :

§ pour les ménages les plus vulnérables et en situation de précarité énergétique ;

§ pour les consommateurs résidentiels et les micro-entreprises, dans le cadre d'une période transitoire.

o Ils notifient à la Commission les mesures prises, au plus tard un mois après leur adoption ; un rapport relatif à la mise en oeuvre de ces mesures est ensuite remis, dans le cadre des rapports d'avancement nationaux intégrés en matière d'énergie et de climat, par les États membres à la Commission au 15 mars 2025, puis tous les deux ans (article 4).

• Possibilité d'imposer aux entreprises de gaz naturel et d'hydrogène des obligations de service public en matière de sécurité, de régularité, de qualité, de prix, ainsi que de protection de l'environnement (article 5).

• Promotion de la coopération entre États membres, en vue d'intégrer leurs marchés nationaux dans des marchés régionaux , notamment en facilitant la coopération régionale des gestionnaires de réseaux de transport du gaz naturel et de réseaux d'hydrogène (article 6).

• Encadrement et simplification des procédures d'autorisation requises pour la construction ou l'exploitation d'installations de gaz naturel ou d'hydrogène , notamment en limitant leur durée à deux ans (avec une prolongation d'un an en cas de circonstances exceptionnelles) ou en instituant des points de contact uniques ou des mécanismes alternatifs de règlement des litiges (article 7).

• Introduction d'un système de certification des carburants renouvelables et bas-carbone , la Commission devant adopter, au plus tard le 31 décembre 2014, des actes délégués pour préciser la méthodologie d'évaluation des économies d'émissions de GES grâce au recours à des gaz bas-carbone. (article 8).

• Définition d'exigences techniques minimales en matière de sécurité (article 9).

• Règles relatives à l'autonomisation et la protection des consommateurs :

o Libre choix des fournisseurs par les clients, indépendamment de l'État membre dans lequel le fournisseur est enregistré' (article 10) ;

o Droit des clients de changer de fournisseurs, dans un délai maximal de 3 semaines à compter de la demande (article 11) ;

o Mise en place d'outils de comparaison des prix, dont au moins un sur le marché du gaz naturel, pouvant bénéficier d'un label de confiance (article 12) ;

o Droit des clients d'agir en tant que clients actifs, sans être soumis à des exigences, procédures ou redevances inappropriées (article 13) ;

o Institution de communautés énergétiques citoyennes (article 14) ;

o Dispositions relatives à la facturation, dont les informations doivent être précises et faciles à comprendre, claires, concises, accessibles et comparables (article 15).

• Dispositions en matière de relevés :

o Les États membres veillent au déploiement sur leurs territoires de systèmes intelligents de mesure :

§ Dans le système de gaz :

• Le déploiement peut être subordonné à une évaluation coûts-avantages (article 16) ;

• En cas de déploiement, des exigences minimales s'appliquent aux futures installations, ainsi qu'aux installations remplaçant des compteurs intelligents plus anciens (article 18) ;

• Lorsqu'un futur déploiement est évalué' de manière négative, tout client final doit pouvoir faire installer ou, le cas échéant, mettre à niveau un compteur intelligent (article 19) ;

• Quant aux clients finals ne disposant pas de compteurs intelligents, ils doivent pouvoir disposer de compteurs classiques individuels, permettant de mesurer avec précision leur consommation réelle (article 20).

§ Dans le système d'hydrogène, la Commission adopte, des actes d'exécution, pour fixer certaines exigences et procédures (article 17).

• Dispositions relatives à la gestion des données (articles 21), avec des exigences en matière d'accès aux données et d'interopérabilité notamment (article 22).

• Création de guichets uniques permettant d'informer les consommateurs sur leurs droits et sur les mécanismes de règlement des litiges (article 23).

• Droit à un règlement extrajudiciaire des litiges , via un médiateur de l'énergie, une association de consommateur ou une autorité de régulation (article 24).

• Mesures de protection et de soutien des ménages vulnérables et en situation de précarité énergétique , telles que l'interdiction de l'interruption du raccordement de ces clients lorsqu'ils font face à des difficultés (article 25).

• Mise en place d'un système d'accès réglementé des tiers aux infrastructures , dont les tarifs ou les méthodes de calcul sont approuvés par une autorité de régulation :

o Infrastructures de gaz naturel :

§ ce système concerne les réseaux de transport et de distribution du gaz naturel, ainsi que les terminaux GNL. Des contrats à long terme pour les gaz renouvelables et bas-carbone peuvent être conclus. Aucun contrat à long terme d'une durée s'étendant au-delà de fin 2049 ne peut être conclu pour la fourniture de gaz fossile sans dispositif d'atténuation (article 27) ;

§ il vise aussi les réseaux de conduites de gaz naturel en amont (article 28) ;

§ il s'applique également aux installations de stockage du gaz naturel (article 29) ;

§ les États membres doivent permettre l'accès des gaz renouvelables et bas-carbone au marché et aux infrastructures (article 26).

o Infrastructures liées à l'hydrogène :

§ ce système concerne les réseaux d'hydrogène. Une dérogation à cette mesure est possible jusqu'au 31 décembre 2030, à condition de prévoir un accès négocié (article 31) ;

§ il vise aussi les terminaux d'hydrogène, dont l'accès est négocié (article 32) ;

§ il s'applique également aux installations de stockage d'hydrogène et, si nécessaire, de stockage en conduite (article 33) ;

§ les entreprises de gaz naturel et d'hydrogène peuvent refuser l'accès ou le raccordement au système de gaz naturel ou d'hydrogène en se fondant sur le manque de capacité, à condition de procéder aux améliorations nécessaires, sous le contrôle des États membres (article 34).

• Renforcement des gestionnaires de réseaux de transport, d'installations de stockage et de systèmes de GNL (articles 35 à 38), ainsi que de réseaux de distribution (articles 39 à 44)

o Coopération entre les gestionnaires de réseaux de transport et ceux de réseaux de distribution en vue d'assurer la participation effective des acteurs du marché raccordés à leur réseau au marché de détail, de gros et d'équilibrage (article 35) ;

o Gestion par ces gestionnaires de la qualité du gaz dans leurs installations (articles 35 et 40) ;

o Possibilité de délégation des responsabilités à un gestionnaire du réseau de transport de gaz naturel autre que celui propriétaire de ce réseau (article 35) ;

o Impossibilité de rejeter les demandes de raccordement à ces réseaux de nouvelles installations de production de gaz renouvelable et bas-carbone aux réseaux économiquement raisonnables et techniquement faisables (articles 37 et 40) ;

o Institution d'une procédure de raccordement d'installations d'hydrogène au réseau de transport de gaz naturel ou au réseau d'hydrogène (article 38) ;

o Application de procédures transparentes et efficaces pour le raccordement d'installations de gaz renouvelable et bas-carbone au réseau de distribution de gaz naturel (article 41).

• Institution de règles applicables aux réseaux d'hydrogène dédiés :

o Définition des tâches des gestionnaires de réseaux, de stockage et de terminaux d'hydrogène, comprenant (article 46) :

§ l'exploitation, l'entretien et le développement d'une infrastructure pour le transport ou le stockage de l'hydrogène, dans le respect de l'environnement et en coopération étroite avec les gestionnaires de réseau d'hydrogène voisins ;

§ la construction des capacités infrastructures transfrontalières en vue d'intégrer une infrastructure européenne d'hydrogène ;

§ la gestion de la qualité d'hydrogène dans leurs installations.

o Possibilité de déroger à certaines mesures de la directive jusqu'au 31 décembre 2030 pour :

§ les réseaux d'hydrogène existants (article 47) ;

§ les réseaux d'hydrogène géographiquement limités (article 48).

o Conclusions d'accords intergouvernementaux pour les interconnecteurs d'hydrogène entre les États membres et des pays tiers (article 49).

• Planification intégrée des réseaux :

o Remise d'un plan décennal de développement de réseau, tous les deux ans au moins, par les gestionnaires de réseau de transport à l'autorité de régulation (article 51) :

§ le plan comporte un répertoire des principales infrastructures de transport à construire ou mettre à niveau durant les dix prochaines années, des investissements déjà décidés et des nouveaux investissements à réaliser durant les trois prochaines années, ainsi que des infrastructures qui peuvent ou vont être déclassées. Un calendrier pour l'ensemble des projets d'investissement et de déclassement est, en outre, établi ;

§ il se fonde sur un scénario-cadre commun développé entre les gestionnaires d'infrastructure concernés, et tient compte des résultats des évaluations nationales et communes des risques ;

§ chaque État membre dispose d'au moins un plan de développement du réseau.

o Remise d'un rapport sur le développement du réseau d'hydrogène par les gestionnaires de réseaux d'hydrogène à l'autorité de régulation, à un intervalle déterminé par ladite autorité (article 52) :

§ le plan contient des informations sur les besoins en termes de capacité ;

§ il comporte la proportion de conduites de gaz naturel réaffectées au transport de l'hydrogène.

o Procédure de financement d'infrastructures d'hydrogène transfrontalières (article 53) :

§ lorsqu'un projet d'interconnecteur d'hydrogène est inclus dans le plan décennal de développement du réseau à l'échelle de l'Union européenne et ne constitue pas un projet d'intérêt commun, les gestionnaires de réseaux d'hydrogène adjacents concernés établissent un plan commun, comprenant notamment une demande d'allocation de coûts transfrontaliers. Les autorités de régulation décident de l'allocation des coûts d'investissement à supporter par chaque gestionnaire de réseaux ;

§ à compter du 31 décembre 2030, les gestionnaires de réseaux d'hydrogène concernés disposent de trois ans pour négocier un système de compensation financière relatif au financement de l'infrastructure d'hydrogène transfrontalière. En l'absence d'accord, les autorités de régulation statuent conjointement sous deux ans.

• Introduction de règles de dégroupages , prévoyant de dissocier la production et la fourniture d'hydrogène de son transport et de son stockage (article 62) et de prohiber les financements croisés entre les activités de gaz et celles d'hydrogène (article 69), un gestionnaire de réseau d'hydrogène intégré pouvant être désigné jusqu'au 31 décembre 2030 (article 62).

• Dispositions relatives aux autorités de régulation :

o Les autorités de régulation ont notamment pour objectif de contribuer au développement d'un marché intérieur du gaz naturel, des gaz renouvelables et bas-carbone et de l'hydrogène concurrentiel au sein de l'Union européenne (article 71), ainsi que de veiller à la mise en oeuvre des dispositions de la présente directive (article 72) ;

o En cas de non-respect par certaines entités des obligations qui leur incombent, les autorités de régulation ont la possibilité d'infliger des sanctions (article 72) ;

o Possibilité de demander aux gestionnaires de réseaux d'hydrogène, à compter du 1 er janvier 2031, de modifier leurs tarifs ou la méthode de calcul de ces derniers (article 73) ;

o Au plus tard le 5 juillet 2022 puis tous les quatre ans, la Commission présente un rapport relatif au respect par les autorités nationales du principe d'indépendance (article 70).

• Au plus tard le 31 décembre 2030, révision par la Commission de la directive et présentation d'un rapport au Parlement européen et au Conseil (article 85).

Proposition
de règlement
sur les marchés
du gaz naturel et renouvelable et
de l'hydrogène

Objectif : Déterminer les conditions d'accès aux réseaux de transport de gaz naturel et aux systèmes d'hydrogène, en vue d'assurer le bon fonctionnement du marché intérieur des gaz, de faciliter l'émergence d'un marché de gros et de promouvoir les échanges transfrontaliers.

Mesures :

• Affirmation de principes généraux s'appliquant aux systèmes de gaz naturel et d'hydrogène , tels que la formation des prix du gaz en fonction de l'offre et de la demande, le transport du gaz via un système entrée-sortie, des règles du marché permettent la décarbonation des systèmes et la suppression des obstacles aux flux transfrontaliers de gaz (article 3).

• Séparation des bases d'actifs régulés (article 4) :

o Lorsqu'un gestionnaire de transport ou de réseau fournit des services régulés pour le gaz, l'hydrogène ou l'électricité, il dispose de bases d'actifs régulés séparées pour ses actifs dédiés ;

o Des transferts financiers entre services régulés séparés peuvent toutefois, sous certaines conditions, être approuvés par un État membre ou l'autorité de régulation ;

o Au plus tard un an après l'adoption du règlement, puis tous les deux ans, l'Agence de l'Union européenne pour la coopération des régulateurs de l'énergie (ACER), formule des recommandations sur ce sujet.

• Services d'accès des tiers applicables :

o Aux gestionnaires de réseaux de transport (article 5) :

§ les gestionnaires sont tenus d'offrir non seulement des services, mais également des capacités aux utilisateurs du réseau ;

§ lorsque plusieurs points d'interconnexion relient deux systèmes entrée-sortie adjacents, les gestionnaires des réseaux de transport concernés proposent de transférer les capacités de ces points d'interconnexion vers un seul point d'interconnexion virtuel.

o Aux gestionnaires de réseaux d'hydrogène (article 6) :

§ les gestionnaires de réseaux d'hydrogène offrent leurs services à l'ensemble des utilisateurs du réseau. Les informations relatives aux conditions contractuelles, aux tarifs pour l'accès au réseau et, le cas échéant, aux redevances d'équilibrage sont rendues publiques ;

§ la durée maximale des contrats de capacité est de 20 ans pour les infrastructures achevées à la date d'entrée en vigueur du règlement et de 15 ans pour les infrastructures achevées après cette date. Les autorités de régulation peuvent, si besoin, imposer des durées maximales plus courtes ;

§ à compter du 1 er janvier 2031, les réseaux d'hydrogène sont organisés sous la forme de systèmes entrée-sortie. Les dispositions relatives aux tarifs d'accès aux tiers s'appliquent dès lors aux réseaux d'hydrogène et les exigences imposées aux gestionnaires de réseaux de transport sont également étendues aux gestionnaires de réseaux d'hydrogène. Aucun tarif n'est toutefois appliqué aux points d'interconnexion entre États membres.

o Aux installations de stockage de gaz naturel, aux terminaux d'hydrogène et aux installations de GNL et de stockage d'hydrogène (article 7) :

§ les contrats d'utilisation d'installations de stockage d'hydrogène et de terminaux d'hydrogène d'une durée inférieure à celle d'un contrat annuel standard s'appliquant au GNL ne donnent pas lieu à des tarifs arbitrairement plus élevés.

• Obligation d'évaluation de la demande sur le marché des gaz renouvelables et bas-carbone par les gestionnaires de système de GNL et de stockage au moins tous les deux ans, ainsi que lors de la planification de nouveaux investissements, en tenant compte de la sécurité d'approvisionnement (article 8).

• Mise en place d'une plateforme de réservation par les gestionnaires d'installations de GNL, de terminaux d'hydrogène et de système de stockage, à titre individuel ou à l'échelle régionale , permettant aux utilisateurs de revendre leur capacité contractuelle sur le marché secondaire au plus tard 18 mois après l'entrée en vigueur du règlement (article 10).

• Coopération entre les gestionnaires de réseau de transport en vue, d'une part, de coordonner la maintenance de leurs réseaux respectifs et de limiter toute interruption des services de transport et, d'autre part, de maximiser la capacité technique au sein du système entrée-sortie et de réduire ainsi autant que possible l'utilisation de gaz combustible (article 14).

• Application d'un rabais sur les tarifs d'accès aux réseaux pour les gaz renouvelables et bas-carbone (article 16) :

o aux points d'entrée des installations de production , avec un rabais de 75 % sur les tarifs respectifs fondés sur la capacité, afin de développer l'injection de gaz renouvelables et bas-carbone ;

o aux points d'entrée et de sortie des installations de stockage , avec un rabais de 75 % sur les tarifs de transport fondés sur la capacité, sauf lorsque l'installation est reliée à plusieurs réseaux de transport ou de distribution et est utilisée pour concurrencer un point d'interconnexion et uniquement dans les États membres où le gaz renouvelable et bas-carbone a été injecté pour la première fois ;

o aux points d'interconnexion avec un rabais de 100 % sur le tarif régulé appliqué, à partir du 1 er janvier de l'année suivant l'adoption du règlement, sous réserve du respect de certaines conditions et en contrepartie d'un mécanisme de compensation ;

o dans les deux premiers cas :

§ les autorités de régulation peuvent fixer des taux de rabais inférieurs à ceux prévus, à condition que ceux-ci soient conformes aux principes généraux de tarification d'accès au réseau ;

§ Ces réductions tarifaires sont réexaminées par la Commission cinq ans après l'entrée en vigueur du règlement.

• Dans un délai d'un an suivant la transposition du règlement , détermination par les autorités de régulation des recettes autorisées ou prévisionnelles des gestionnaires de réseaux de transport , une comparaison de l'efficience des coûts des gestionnaires de réseaux de transport de l'Union européenne étant publiée par l'ACER trois ans après cette transposition, puis tous les quatre ans (article 17).

• Établissement de capacités fermes par les gestionnaires de réseaux de transport (article 18) et de distribution (article 33) pour garantir l'accès des installations de production de gaz renouvelable et bas-carbone à leurs réseaux respectifs , des procédures, des arrangements et des investissements permettant un flux inversé depuis le réseau de distribution vers le réseau de transport devant, à cette fin, être élaborés par ces gestionnaires.

• Règles spécifiques à la gestion du transport, du stockage, des systèmes/terminaux de GNL et d'hydrogène :

o Procédure de coordination transfrontalière sur la qualité du gaz (article 19) :

§ lorsqu'une restriction aux flux transfrontaliers due aux différences de qualité du gaz ne peut être évitée par les gestionnaires de réseaux de transport, ces derniers disposent d'un délai de 12 mois pour soumettre une proposition de solution, fondée notamment sur une analyse coûts-avantages, aux autorités de régulation compétente, afin de levier la restriction ;

§ en l'absence d'accord permettant une solution conjointe, l'ACER statue sur la solution pour éliminer la restriction, ainsi que sur l'allocation des coûts d'investissements à supporter par chaque gestionnaire de réseaux de transport.

o Injection d'hydrogène aux points d'interconnexion entre États membres de l'Union dans le système de gaz naturel (article 20) :

§ les gestionnaires de réseaux de transport acceptent les flux de gaz dont la teneur en hydrogène est inférieure ou égale à 5 % en volume aux points d'interconnexion entre États membres de l'Union européenne dans le système de gaz naturel à partir du 1 er octobre 2025 ;

§ lorsque la teneur en hydrogène en mélange dans le système de gaz naturel dépasse 5 % en volume, la procédure de coordination transfrontalière sur la qualité du gaz ne s'applique pas.

o Publication par le réseau européen des gestionnaires de réseaux de transport (REGRT) au plus tard le 15 mai 2024, puis tous les deux ans, d'un rapport de suivi de la qualité du gaz (article 23).

• Coopération entre les gestionnaires de réseaux de distribution (GRD) au sein d'une entité européenne :

o Les règles et procédures relatives à la participation des gestionnaires de réseaux de distribution à l'entité des GRD de l'Union européenne s'appliquent également aux gestionnaires de réseaux de distribution exploitant un réseau de gaz naturel (article 37) ;

o Un an après l'entrée en vigueur du présent règlement, l'entité des GRD de l'Union européenne soumet à la Commission et à l'ACER un projet de statuts actualisés, comprenant notamment un code de conduite, une liste des membres inscrits et un projet de règlement intérieur actualisé, ces documents étant adoptés après un avis favorable de la Commission (article 37) ;

o Le GRD participe à l'élaboration des codes de réseau pour la gestion et la planification des réseaux de distribution et pour la gestion coordonnée des réseaux de transport et de distribution (article 38).

o Le GRD contribue à l'atténuation des émissions fugitives de méthane provenant du réseau de gaz naturel (article 38) ;

o Le GRD coopère avec le REGRT (article 38).

• Coopération transfrontalière des gestionnaires de réseaux d'hydrogène sur la qualité de l'hydrogène , afin d'éviter les restrictions aux flux d'hydrogène transfrontaliers dues aux différences de qualité de l'hydrogène (article 39).

• Coopération des gestionnaires de réseaux d'hydrogène à travers le réseau européen des gestionnaires de réseaux d'hydrogène (REGRH) , afin de promouvoir le développement du marché intérieur de l'hydrogène et les échanges transfrontaliers :

o Le 1 er septembre 2024 au plus tard, pour le futur REGRH, les gestionnaires de réseaux de transport de gaz soumettent à l'ACER, le projet de statuts, une liste de membres et un projet de règlement intérieur, leurs modifications étant également soumises à la Commission qui émet un avis favorable (article 40) ;

o Dans l'attente de l'établissement du REGRH (article 41) :

§ la Commission met en place une plateforme temporaire associant l'ACER et l'ensemble des acteurs du marché concernés et assure un soutien administratif ;

§ le REGRT pour le gaz est responsable de l'élaboration de plans de développement de réseau à l'échelle de l'Union pour les réseaux de gaz et d'hydrogène.

o Les tâches du REGRH sont notamment les suivantes (article 42) :

§ élaborer des codes de réseau et surveiller leur mise en oeuvre ;

§ publier, tous les deux ans, un plan décennal non contraignant de développement du réseau dans l'ensemble de l'Union européenne, qui recense notamment les lacunes en matière d'investissement dans les infrastructures transfrontalières (article 43) ;

§ coopérer avec le REGRT pour l'électricité et le REGRT pour le gaz ;

§ formuler des recommandations relatives à la coordination de la coopération technique entre les gestionnaires de réseau de l'Union européenne et ceux des pays tiers ;

§ adopter un programme de travail annuel, ainsi que des perspectives annuelles sur l'approvisionnement en hydrogène des États membres ;

§ publier un rapport de suivi de la qualité de l'hydrogène au plus tard le 15 mai 2026, puis tous les deux ans.

o L'ACER surveille l'exécution de ces missions (article 46), étant saisie pour avis par le REGRH sur le projet de plan de développement du réseau le projet de programme de travail annuel et les autres documents visés.

• Exigences en matière de transparence :

o Publication par les gestionnaires de réseaux de transport (article 30) et de distribution (article 35) des informations concernant notamment la qualité des gaz transportés dans leurs réseaux respectifs qui pourraient affecter les utilisateurs de ces réseaux ;

o Dans les 18 mois à compter de l'entrée en vigueur du règlement, établissement par les gestionnaires d'installations de GNL et d'installations de stockage de plateformes européennes uniques, permettant la publication d'un certain nombre d'informations (article 31) ;

o Publication par les gestionnaires de réseaux d'hydrogène des informations concernant notamment la qualité de l'hydrogène transporté dans leurs réseaux qui pourraient affecter les utilisateurs de ces réseaux (article 48).

• Adoption par la Commission de codes de réseau et lignes directrices s'appliquant à tous les points d'interconnexion à l'intérieur de l'Union , ainsi qu'aux points d'entrée et de sortie à destination ou en provenance de pays tiers, afin d'assurer un degré d'harmonisation minimal (articles 52 à 56).

• Possibilité pour les nouvelles infrastructures de gaz naturel et d'hydrogène de bénéficier , sous certaines conditions et pour une durée déterminée, de dérogations à certaines dispositions du règlement (article 60).

• Préservation de la sécurité d'approvisionnement en gaz dans l'Union européenne (article 67) :

o Évaluation complémentaire des risques par les États membres, six mois après l'entrée en vigueur du règlement ;

o En cas d'identification d'un risque au niveau régional, les États membres concernés prennent les mesures préventives et d'urgence appropriées, telles que l'obligation pour les utilisateurs de stockage de stocker un volume minimal de gaz en stockage souterrain ou pour un gestionnaire de réseaux de transport d'acquérir et de gérer des stocks stratégiques de gaz ;

o Les États membres s'efforcent de parvenir à un accord sur le niveau visé de stocks dans la région et sur les mécanismes de financement conjoints des mesures prises ;

o Les États membres peuvent mettre en place un mécanisme de passation conjointe de marché pour des stocks stratégiques par les gestionnaires de réseaux de transport ;

o Les États membres prennent également en considération les enjeux de cybersécurité ;

o Une mesure de solidarité est prise en dernier recours en faveur d'un État membre demandeur qui a déclaré un état d'urgence, qui n'a pas été en mesure de combler le déficit d'approvisionnement, a épuisé toutes les mesures (fondées ou non sur le marché notamment) et notifié à la Commission une demande de solidarité et un engagement explicites de verser rapidement une indemnisation équitable aux États membres répondant à cette demande.

Proposition
de règlement

sur les émissions

de méthane dans le secteur de l'énergie

Objectif : Réduire les émissions de méthane dans les secteurs du pétrole, du gaz et du charbon, notamment en imposant l'obligation de mesurer, de déclarer et de vérifier ces émissions de méthane, en définissant des règles de détection et de réparation des fuites de méthane et en limitant l'éventage et le torchage.

Mesures :

• Prise en compte de coûts supportés par les exploitants soumis à la nouvelle réglementation dans la fixation des tarifs de transport, de distribution ou de stockage notamment, l'ACER publiant tous les 3 ans un ensemble d'indicateurs et de valeurs de référence permettant la comparaison des coûts d'investissement unitaires (article 3).

• Dispositions relatives aux autorités compétentes chargées d'assurer un suivi de l'application du règlement et de veiller à son respect :

o Désignées par les États membres (article 4), les autorités compétentes prennent les mesures nécessaires pour garantir le respect des exigences énoncées dans le règlement (article 5) ;

o Elles procèdent, à cette fin, à des inspections périodiques (article 6) ;

o Toute personne physique ou morale estimant avoir subi un préjudice résultant d'une infraction aux exigences du règlement peut déposer une plainte auprès des autorités compétentes (article 7) ;

o Indépendants des exploitants et exploitants de mines (article 9), les vérificateurs évaluent la conformité des déclarations d'émissions par ces exploitants ou exploitants de mines (article 8) ;

o L'Observatoire international des émissions de méthane (OIEM) est chargé de la vérification des données relatives aux émissions de méthane (article 10).

• Dispositions relatives aux émissions de méthane dans les secteurs du pétrole et du gaz :

o Obligation de déclaration auprès des autorités compétences (article 12) :

§ Pour les exploitants :

• dans un délai de 12 mois suivant l'entrée en vigueur du règlement, déclaration contenant les émissions de méthane au niveau de la source, pour toutes les sources ;

• dans un délai de 24 mois, déclaration contenant des mesures directes des émissions de méthane au niveau de la source pour les actifs exploités ;

• dans un délai de 36 mois, puis au 30 mars de chaque année, déclaration contenant des mesures directes des émissions de méthane au niveau de la source pour les actifs exploités, complétée par des mesures des émissions de méthane au niveau du site ;

§ Pour les entreprises établies dans l'Union européenne, tenues de soumettre :

• dans un délai de 36 mois, une déclaration contenant des mesures directes des émissions de méthane au niveau de la source pour les actifs non exploités ;

• dans un délai de 48 mois, puis au 30 mars de chaque année, une déclaration contenant des mesures directes des émissions de méthane au niveau de la source pour les actifs non exploités, complétée par des mesures des émissions de méthane au niveau du site.

o Obligation générale d'atténuation (article 13) : obligation pour les exploitants de prendre toutes les mesures possibles pour prévenir et réduire au minimum les émissions de méthane dans le cadre de leurs activités ;

o Détection et réparation des fuites (article 14) :

§ élaboration par les exploitants d'un programme de détection et de réparation des fuites, dans un délai de 3 mois à compter de l'entrée en vigueur du règlement ;

§ réalisation par les exploitants des enquêtes, dans un délai de 3 mois après l'entrée en vigueur du règlement ;

§ réparation ou remplacement par les exploitants de tous les composants sur lesquels une émission de méthane d'au moins 500 parties par million (ppm) est détectée, dès que possible et dans d'un délai de cinq jours à compter de cette détection.

o Éventage et torchage :

§ interdiction de l'éventage et du torchage, sauf dans certains cas (article 15) :

• pour l'éventage :

- en cas d'urgence ou de dysfonctionnement ;

- lorsque cela est inévitable et strictement nécessaire à l'exploitation, à la réparation, à l'entretien ou à l'essai de composants ou d'équipements ;

- lorsque le torchage n'est pas techniquement réalisable ou risque de compromettre la sécurité de l'exploitation du personnel.

• pour le torchage : dans le cas où la réinjection du méthane, son utilisation sur site ou son expédition vers un marché ne sont pas réalisables pour des raisons autres qu'économiques.

§ notification par les exploitants des événements d'éventage et de torchage aux autorités compétentes au moins 48 heures à l'avance (article 16) ;

§ application aux torchères ou tout autre dispositif de combustion de certaines normes (article 17).

o Puits inactifs (article 18) :

§ établissement et publication par les États membres d'un inventaire de tous les puits inactifs sur leur territoire ou relevant de leur compétence, au plus tard 12 mois après l'entrée en vigueur du règlement ;

§ installation des équipements permettant d'effectuer des mesures des émissions de méthane sur tous les puits inactifs, au plus tard 18 mois après l'entrée en vigueur du règlement ;

§ soumission des déclarations contenant les mesures précitées, au plus tard 24 mois après l'entrée en vigueur du règlement, puis au 30 mars de chaque année ;

§ élaboration et mise en oeuvre par les États membres d'un plan d'atténuation visant à assainir, réhabiliter et boucher définitivement les puits inactifs ;

• Dispositions relatives à l'émission de méthane dans le secteur de charbon :

o Obligation de mesure et de déclaration des émissions de méthane auprès des autorités compétentes (article 20) :

§ dans les mines de charbon souterraines, mesurage par les exploitants - en contenu et par échantillonnage mensuel - et quantification des émissions de méthane d'air de ventilation sur tous les puits d'aérage d'évacuation ;

§ dans les stations de captage, mesurage par les exploitants des volumes de méthane mis à l'évent et brûlé, quelles que soient les raisons de cet éventage et de ce torchage ;

§ dans les mines à ciel ouvert en exploitation, quantification par les exploitants des émissions résultant des opérations d'extraction en utilisant des facteurs d'émission de méthane des mines de charbon propre au gisement ;

§ un an après l'entrée en vigueur du règlement, puis au 30 mars de chaque année, soumission par les exploitants d'une déclaration contenant des données sur les émissions annuelles de méthane au niveau de la source ;

o Émissions de méthane provenant de mines de charbon souterraines en exploitation :

§ interdiction du torchage des stations de captage, à partir du 1 er janvier 2025, et de l'éventage des puits d'aérage dans les mines de charbon, à partir du 1 er janvier 2027, sauf dans certains cas (article 22) :

• pour le torchage (article 22) :

- en cas d'urgence ou dysfonctionnement ;

- lorsque cela est inévitable et strictement nécessaire à des fins d'entretien ;

- lorsque le torchage n'est pas techniquement réalisable ou risque de compromettre la sécurité de l'exploitation ou du personnel.

• pour l'éventage :

- dans les mines de charbon émettant moins de 0,5 tonne de méthane par kilotonne de charbon ;

- dans les mines de charbon à coke.

§ notification par les exploitants des événements d'éventage et de torchage aux autorités compétentes au moins 48 heures à l'avance (article 23).

o Émissions de méthane provenant de mines de charbon souterraines fermées et désaffectées :

§ établissement et publication par les États membres d'un inventaire de toutes les mines de charbon fermées et désaffectées sur leur territoire ou relevant de leur compétence, au plus tard 12 mois après l'entrée en vigueur du règlement (article 25) ;

§ installation d'équipements de mesure, au plus tard 18 mois après l'entrée en vigueur du règlement (article 25) ;

§ soumission des déclarations relatives aux émissions annuelles de méthane au niveau de la source aux autorités compétentes au plus tard 24 mois après la date d'entrée en vigueur du règlement, puis au 30 mars de chaque année (article 25) ;

§ élaboration par les États membres d'un plan d'atténuation des émissions de méthane provenant des mines de charbon désaffectées (article 26) ;

§ à partir du 1 er janvier 2030, interdiction de l'éventage et du torchage, sauf lorsque l'utilisation ou l'atténuation ne sont pas techniquement possibles ou comportent des risques pour la sécurité de l'environnement, des opérations ou du personnel (article 26).

• Dispositions relatives aux émissions de méthane se produisant en dehors de l'Union européenne :

o Obligation pour les importateurs de communiquer un certain nombre d'informations aux autorités de régulation de l'État membre d'importation, au plus tard 9 mois après l'entrée en vigueur du règlement, puis au 31 décembre de chaque année (article 27) ;

o Établissement d'une base de données pour la transparence sur le méthane par la Commission, dans les 18 mois suivant l'entrée en vigueur du règlement (article 28) ;

o Mise en place, dans un délai de deux ans, d'un outil mondial de surveillance des émetteurs de méthane (article 29).

• Détermination des sanctions applicables aux infractions aux dispositions du règlement par les États membres , pouvant comporter des amendes proportionnelles aux dommages environnementaux ainsi que des astreintes, dans le respect d'une liste minimale d'infractions faisant l'objet de sanctions (article 30).

• Remise tous les cinq ans d'un rapport sur l'évaluation du règlement par la Commission au Parlement européen et au Conseil (article 33).

Proposition
de directive

sur l'efficacité énergétique

Objectif : Établir un cadre commun aux règles destinées à donner la priorité à la mise en oeuvre de mesures d'efficacité énergétique dans tous les secteurs, à lever les obstacles sur le marché de l'énergie et à surmonter les défaillances du marché qui nuisent à l'efficacité au niveau de l'approvisionnement énergétique et de l'utilisation de l'énergie .

Mesures :

• Objectifs d'efficacité énergétique (article 4) :

o Les États membres veillent à réduire la consommation d'énergie d'au moins 9 % en 2030, par rapport aux projections du scénario de référence de 2020 ;

o La consommation d'énergie primaire de l'Union européenne ne doit pas dépasser 1023 mégatonnes équivalents pétrole (Mtep) en 2030 ;

o La consommation d'énergie finale de l'Union européenne ne doit pas dépasser 787 Mtep en 2030 ;

o Chaque État membre fixe des contributions nationales en matière d'efficacité énergétique relatives à la consommation d'énergie finale et primaire ;

o Lorsque la Commission conclut que les progrès accomplis sont insuffisants, les États membres se trouvant au-dessus de leurs trajectoires indicatives disposent d'un délai d'un an pour mettre en oeuvre des mesures supplémentaires leur permettant d'atteindre leur contribution nationale.

• Introduction du principe de primauté de l'efficacité énergétique , en vertu duquel les États membres doivent veiller à ce que les solutions d'efficacité énergétique soient prises en compte dans les décisions de planification, de politique et d'investissement concernant les systèmes énergétiques ainsi que les secteurs non énergétiques, lorsque, dans ce second cas, ils ont une incidence sur la consommation d'énergie et l'efficacité énergétique (article 3).

• Rôle du secteur public dans le domaine de l'efficacité énergétique :

o Les États membres doivent réduire la consommation d'énergie finale de tous les organismes publics cumulés de 1,7 % par an (article 5) ;

o Ils doivent rénover au moins 3 % de la surface totale au sol des bâtiments appartenant aux organismes publics, de manière à être transformés en bâtiments dont la consommation d'énergie est quasi nulle (article 6).

• Renforcement des dispositions relatives aux marchés publics (article 7) :

o Les États membres peuvent exiger que les pouvoirs adjudicateurs et les entités adjudicatrices tiennent compte des aspects plus généraux liés à la durabilité et à l'économie sociale, environnementale et circulaire dans les pratiques de passation de marché ;

o Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exiger que les offres communiquent le potentiel de réchauffement planétaire du cycle de vie des bâtiments neufs, en particulier lorsque la superficie dépasse 2 000 m 2 ;

o Les États membres doivent aider les pouvoirs adjudicateurs à adopter des exigences en matière d'efficacité énergétique ;

o Les États membres doivent éliminer toute entrave réglementaire et non réglementaire faisant obstacle à l'efficacité énergétique.

• Obligations en matière d'efficacité énergétique (article 8) :

o Les États membres doivent réaliser de nouvelles économies d'énergie annuelles, correspondant à 1,5 % de la consommation d'énergie finale de 2024 à 2030 ;

o Lorsque la Commission conclut que les mesures de politique publique ne permettent pas d'atteindre le volume requis d'économies d'énergie cumulées, elle peut adresser des recommandations aux États membres dont elle juge les mesures insuffisantes.

• Obligations en matière d'audits énergétiques , en particulier pour les grands consommateurs d'énergie (article 11).

• Reconnaissance de droits contractuels fondamentaux pour les réseaux de chaleur et de froid et l'eau chaude sanitaire (article 20).

• Règles relatives à l'information et la sensibilisation (article 21) :

o Les États membres veillent à la transparence des informations sur les mesures d'amélioration de l'efficacité énergétique ainsi que les actions individuelles et cadres financiers et juridiques ;

o L'institution de guichets uniques et de mécanismes extrajudiciaires pour le règlement des litiges est prévue.

• Règles relatives à la réduction de la précarité énergétique :

o Les États membres doivent mettre en oeuvre les mesures en matière d'efficacité énergétique en priorité en faveur des personnes touchées par la précarité énergétique, des clients vulnérables et, le cas échéant, les personnes vivant dans des logements sociaux. Ils doivent veiller à ce que ces mesures n'aient pas d'impact négatif sur ces derniers (article 8) ;

o Les gestionnaires de réseaux de transport sont considérés comme parties obligées potentielles, permettant aux États membres d'exiger de leur part qu'ils réalisent un volume d'économies d'énergie en faveur des personnes précitées (article 9) ;

o Les États membres doivent mettre en oeuvre des mesures appropriées pour autonomiser et protéger les personnes précitées (article 22).

• Règles relatives aux secteurs du chauffage et du refroidissement (articles 23 et 24) :

o Exigences minimales en matière de systèmes de réseau de chaleur et de froid, progressivement augmentées en vue d'assurer un approvisionnement en chaleur ou en froid décarboné d'ici à 2050 ;

o Obligation de réaliser une analyse coûts-avantages et de prendre des mesures appropriées partant des conclusions de l'analyse ;

o Obligations en matière de réutilisation de la chaleur fatale ;

o Application à la cogénération à haut rendement d'un critère relatif aux émissions directes de CO 2 provenant de la cogénération, lorsque celle-ci n'est pas alimentée par des énergies renouvelables ou des déchets.

• Clarification et renforcement du rôle des autorités de régulation nationales en matière de mise en oeuvre du principe de primauté de l'efficacité énergétique lors de la planification et de l'exploitation des réseaux énergétiques (article 25).

• Clarification et renforcement des dispositions relatives aux systèmes de qualification, d'agrément et de certification des différents fournisseurs de services énergétiques, des auditeurs énergétiques, des gestionnaires énergétiques et des installateurs (article 26).

• Règles relatives au recours aux contrats de performance énergétique , notamment par les PME (article 27).

• Obligation pour les États membres de communiquer des informations sur les investissements en matière d'efficacité énergétique et d'instituer des mécanismes de financement et des structures d'assistance (article 28).

Proposition
de directive
sur la performance énergétique des bâtiments

Objectif : Parvenir à un parc immobilier à émissions nulles au sein de l'Union européenne d'ici à 2050, en améliorant la performance énergétique des bâtiments et en réduisant leurs émissions GES.

Mesures :

• Introduction de nouvelles définitions (article 2) pour

o les bâtiments à émission nulle ;

o les bâtiments à quasi zéro énergie ;

o la rénovation en profondeur et par étapes.

• Introduction de plans nationaux de rénovation des bâtiments (article 3)

o Les plans de rénovation des bâtiments sont établis dans le cadre des PNEC, au plus tard le 30 juin 2024 ;

o Ils visent à garantir la rénovation du parc national de bâtiments résidentiels et non résidentiels, tant publics que privés ;

o La Commission européenne évalue les projets de plans et émet des recommandations.

• Modification de la méthodologie de calcul de la performance énergétique des bâtiments , permettant de tenir compte de la consommation sur site d'énergie produite à partie de sources renouvelables ou fournie par des communautés énergétiques (article 4).

• Modifications des exigences minimales de performance énergétique, prévoyant leur application aux bâtiments protégés (article 5).

• Modification du calcul des niveaux optimaux en fonction des coûts des exigences minimales de performance énergétique, permettant de prendre en compte les coûts des quotas de GES ainsi que les externalités environnementales et sanitaires de la consommation d'énergie (article 6).

• Exigences pour la construction de bâtiments neufs (article 7) :

o Les bâtiments neufs devront se conformer au standard des bâtiments à émission nulle :

§ à partir du 1 er janvier 2027 dans le secteur public ;

§ à partir du 1 er janvier 2030 dans l'ensemble du parc immobilier.

o Le potentiel de réchauffement de la planète des bâtiments neufs doit être calculé à partir du cadre européen pour les bâtiments durables :

§ à partir de 1 er janvier 2027 pour les bâtiments neufs dont la surface au sol utile est supérieure à 2 000 m 2 ;

§ à partir du 1 er janvier 2030 pour les autres bâtiments.

• Exigences pour la rénovation des bâtiments existants :

o En cas de rénovation majeure, le bâtiment rénové ou la partie rénovée du bâtiment doit, dans la mesure du possible, répondre aux exigences minimales de performance énergétique (article 8) ;

o Les bâtiments existants les moins performants doivent être rénovés (article 9) :

§ les bâtiments du secteur public et les bâtiments non résidentiels doivent au moins répondre aux exigences minimales de performance énergétique de la classe F d'ici à 2027 et de la classe E d'ici à 2030 ;

§ les bâtiments résidentiels doivent au moins répondre aux exigences minimales de performance énergétique de la classe F d'ici à 2030 et de la classe E d'ici à 2033 ;

§ des normes nationales minimales de performance énergétique peuvent être fixées par les États membres pour tout autre bâtiment existant.

o Les États membres doivent soutenir le respect des exigences minimales de performance énergétique, notamment en aidant financièrement les ménages les plus vulnérables (article 9).

• Incitations financières et barrières commerciales (article 15) :

o Les États membres doivent prendre des mesures, financières ou non, permettant de lever les barrières et stimuler les investissements ;

o Parmi ces mesures figurent des prêts, des hypothèques, des contrats de performance énergétique ou des guichets uniques ;

o Ces mesures doivent notamment soutenir les projets de rénovation profonde et ceux visant un nombre important de bâtiments, permettant une réduction globale d'au moins 30 % de la demande d'énergie primaire ;

o Ces mesures doivent viser en priorité les ménages vulnérables, ceux touchés par la précarité énergétique et ceux vivant dans des logements sociaux.

• Obligation d'installation de dispositifs de mesure et de contrôle pour la surveillance et la régulation de la qualité de l'air intérieur dans les bâtiments neufs et, si possible, dans les bâtiments existants ayant fait l'objet d'une rénovation majeure (article 11).

• Limitation de l'installation de chaudières à combustible fossile :

o À partir du 1 er janvier 2027, les États membres ne peuvent accorder aucune subvention à l'installation de chaudières à combustible fossile (article 15) ;

o Ils disposent de la possibilité d'interdire certaines chaudières en fonction de leur combustible, sans que cette exigence ne constitue une entrave injustifiée au marché (article 11).

• Passeport de rénovation du bâtiment » (article 10) :

o Destiné aux propriétaires, il facilite une rénovation par étapes des bâtiments vers un niveau d'émissions nulles ;

o Avant le 31 décembre 2024, les États membres doivent instituer un système de passeports de rénovation reposant sur le cadre commun européen élaboré par la Commission (article 10).

• Obligations en matière d'infrastructures pour la mobilité durable dans les bâtiments neufs et les bâtiments ayant fait l'objet d'une rénovation majeure (article 12) :

o le pré-câblage est la norme ;

o des places de stationnement sont prévues pour les vélos ;

o des points de recharge sont prévus dans les bureaux et doivent permettre une recharge intelligente.

• Application de l'indicateur de potentiel d'intelligence de l'Union européenne, avant le 31 décembre 2025 , aux bâtiments non résidentiels dont la puissance nominale effective des systèmes de chauffage ou des systèmes combinés de chauffage et de ventilation est supérieure à 290 kW (article 13).

• Obligation de constitution de bases de données numériques accessibles aux propriétaires, aux locataires et au gestionnaire du bâtiment, voire à des tiers (article 14).

• Harmonisation des certificats de performance énergétique (article 16)

o D'ici à 2025, tous les certificats doivent reposer sur une échelle harmonisée de A à G (article 16) ;

o La validité des certificats de performance énergétique est réduite à 5 ans pour les classes inférieures D à G (article 16) ;

o L'obligation de posséder un certificat de performance énergétique s'applique :

§ aux bâtiments faisant l'objet d'une rénovation majeure, aux bâtiments dont le contrat de bail est renouvelé, ainsi qu'aux bâtiments ou unités de bâtiment proposés à la vente ou à la location. En cas de vente ou de location, le certificat doit figurer dans toutes les annonces publicitaires (article 17) ;

§ à l'ensemble des bâtiments du secteur public (article 17). Les bâtiments du secteur public et ceux recevant du public doivent afficher leur certificat (article 18).

o Les États membres doivent créer des bases de données nationales sur la performance énergétique des bâtiments (article 19).

• Modification des règles en matière d'inspection (article 20) :

o Des plans d'inspection distincts sont établis par les États membres pour les systèmes résidentiels et non résidentiels ;

o Les systèmes doivent être inspectés au moins tous les cinq ans, à l'exception des systèmes équipés de générateurs d'une puissance nominale effective de plus de 290 kW qui doivent être inspectés au moins tous les deux ans ;

o L'inspection doit comprendre un certain nombre d'évaluations listées ;

o Au plus tard le 31 décembre 2024, les bâtiments non résidentiels équipés de générateurs d'une puissance nominale effective de plus de 290 kW doivent être dotés de systèmes d'automatisation et de contrôle des bâtiments ;

o Au plus tard le 31 décembre 2029, ce seuil est abaissé à 70 kW.

Proposition d'initiative sur

les carburants aériens durables

(Initiative ReFuelUE Aviation)

Objectif : Établir des règles harmonisées concernant l'utilisation et la fourniture de carburants durables d'aviation.

Mesures :

• Champ d'application du règlement :

o Le règlement s'applique aux exploitants d'aéronefs, aux aéroports de l'Union européenne et aux fournisseurs de carburant d'aviation (article 2) ;

o Certaines restrictions à ce champ d'application sont prévues (article 3) :

§ seuls les exploitants ou propriétaires d'aéronefs assurant au moins 729 opérations de transport aérien commercial sont concernés ;

§ seuls les aéroports dont le trafic est supérieur à 1 million de passagers ou 100 000 tonnes de fret sont concernés.

• Obligation pour les fournisseurs de carburant d'aviation de veiller à ce que tout le carburant d'aviation mis à la disposition des exploitants d'aéronefs dans les aéroports de l'Union européenne contienne une part minimale de carburant durable d'aviation, y compris une part minimale de carburant de synthèse (article 4)

o Cette mesure entre en vigueur au 1 er janvier 2025 (article 15) ;

o Une période transitoire de cinq ans, du 1 er janvier 2025 au 31 décembre 2029, est néanmoins prévue, au cours de laquelle les fournisseurs de carburant d'aviation peuvent fournir la part minimale de carburant durable d'aviation sous la forme d'une moyenne pondérée des quantités totales du carburant d'aviation qu'ils ont fournies dans les aéroports de l'Union européenne pour cette période de déclaration (article 13).

• Obligation pour les exploitants d'aéronefs de veiller à ce que la quantité annuelle de carburant d'aviation embarquée dans un aéroport de l'Union donné représente au moins 90 % de la quantité annuelle de carburant d'aviation requise (article 5)

o Cette mesure entre en vigueur au 1 er janvier 2025 (article 15).

• Obligation pour les aéroports de l'Union européenne de fournir les infrastructures nécessaires pour faciliter l'accès des exploitants d'aéronefs à des carburants d'aviation contenant une part de carburant durable d'aviation (article 6)

o Lorsque l'Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne (AESA) constate un manquement d'un aéroport à ces obligations, ce dernier dispose d'un délai de 5 ans pour combler ce manque (même article).

• Obligation de déclaration annuelle à l'AESA

o pour les exploitants d'aéronefs (article 7) ;

o pour les fournisseurs de carburants (article 9) ;

o ces déclarations sont obligatoires à partir du 1 er avril 2024 (article 15).

• Interdiction pour les exploitants d'aéronefs , dans le cadre de leur déclaration annuelle à l'AESA, de demander à bénéficier d'avantages pour l'utilisation de carburants durables dans plusieurs systèmes de réduction de gaz à effet de serre (article 8).

• Désignation par les États membres des autorités compétentes chargées de faire respecter le règlement et d'infliger des amendes aux exploitants d'aéronefs, aux aéroports de l'Union européenne et aux fournisseurs de carburants (article 10).

• En cas de violation des dispositions du règlement, application de sanctions par les États membres (article 11) :

o Les dispositions prises par les États membres doivent être notifiées à la Commission au plus tard le 31 décembre 2023 ;

o Les montants perçus par les États membres des amendes administratives sont transférés à titre de contribution aux investissements dans la transition verte dans le cadre du Fonds InvestEU.

• Obligation pour l'AESA de publier un rapport technique annuel sur la base des déclarations annuelles soumises par les exploitants d'aéronefs et les fournisseurs de carburant (article 12).

• Obligation pour la Commission de remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil sur plusieurs aspects de l'application du présent règlement au plus tard le 1 er janvier 2028 puis tous les cinq ans (article 14).

Proposition d'initiative sur

les carburants maritimes durables

(Initiative FuelUE Maritime)

Objectif : Etablir des règles uniformes en vue de réduire l'intensité des émissions de GES de l'énergie utilisée à bord des navires ou d'utiliser l'alimentation électrique à quai, afin d'accroître la cohérence dans l'utilisation des carburants renouvelables et bas-carbone et des sources d'énergie de substitution.

Mesures :

• Champ d'application du règlement (article 2) :

o Le règlement s'applique à tous les navires d'une jauge brute supérieure à 5 000 tonnes, quel que soit leur pavillon en ce qui concerne (article 2) :

§ l'énergie utilisée pendant leur séjour dans un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre ;

§ l'intégralité de l'énergie utilisée lors des voyages au départ d'un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre à destination d'un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre ;

§ la moitié de l'énergie utilisée lors des voyages au départ ou à destination d'un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre lorsque le dernier ou le prochain port d'escale relève de la juridiction d'un pays tiers.

o Il ne s'applique toutefois pas aux navires de guerre ni aux navires d'appoint de la marine de guerre, aux navires de pêche ou aux navires-usines pour le traitement du poisson, aux navires en bois de construction primitive, aux navires qui ne sont pas propulsés par des moyens mécaniques ni aux navires d'État utilisés à des fins non commerciales ;

o Il s'applique à partir du 1 er janvier 2025.

• Interdiction pour l'intensité annuelle des émissions de GES de l'énergie utilisée à bord d'un navire de dépasser des limitations fixées par le règlement (article 4) :

o Les limitations sont calculées en déduisant un pourcentage, fixé à 2 % en 2025 et augmentant tous les cinq ans pour atteindre 75 % en 2050, d'une valeur de référence, correspondant à l'intensité moyenne des émissions de GES en 2020.

• Exigences supplémentaires en matière d'émissions nulles concernant l'énergie utilisée à quai (article 5) :

o À compter du 1 er janvier 2030, un porte-conteneurs ou un navire à passagers se trouvant à quai dans un port d'escale relevant de la juridiction d'un État membre doit se raccorder à l'alimentation électrique à quai et l'utiliser pour tous ses besoins en énergie pendant qu'il est à quai ;

o Certaines exceptions sont néanmoins prévues, telles que pour les navires à quai pendant moins de deux heures ou utilisant des technologies à émissions nulles.

• Règles relatives à la déclaration et aux plans de surveillance :

o Les compagnies effectuent une surveillance et une déclaration pour chacun de leurs navires à l'intérieur de tous les ports relevant de la juridiction d'un État membre et pour tout voyage à destination ou au départ d'un port relevant de la juridiction d'un État membre. La surveillance et la déclaration comprennent l'énergie utilisée à bord des natives, en mer et à quai (article 6) ;

o Les compagnies soumettent aux vérificateurs un plan de surveillance pour chacun de leurs navires au plus tard le 31 août 2024. Elles doivent dans ce cadre indiquer la méthode choisie pour surveiller et déclarer la quantité, le type et le facteur d'émission de l'énergie utilisée à bord des navires (article 7) ;

o Les compagnies doivent vérifier régulièrement, au moins une fois par an, si le plan de surveillance du navire rend compte des caractéristiques et du fonctionnement du navire et l'améliorer si besoin (article 8) ;

o Sont précisées les dispositions relatives à la certification des biocarburants, du biogaz, des carburants renouvelables d'origine non biologique et des carburants à base de carbone recyclé (article 9).

• Règles relatives aux vérificateurs :

o Le vérificateur évalue la conformité du plan de surveillance. En cas d'irrégularités, la compagnie concernée doit réviser son plan et soumettre la version révisée au vérificateur pour une évaluation finale. Le délai de mise en oeuvre de ces révisions est fixé d'un commun accord avec le vérificateur, mais ne peut excéder le début de la période de déclaration (article 10) ;

o Chargé d'évaluer la fiabilité, la crédibilité et l'exactitude des données, le vérificateur est indépendant de la compagnie ou de l'exploitant d'un navire et exécute ses activités dans l'intérêt public (article 11) ;

o Il doit respecter une procédure de vérification (article 12) ;

o Il est accrédité par un organisme national d'accréditation (article 13).

• Règles relatives aux certificats de conformité :

o Sur la base du plan de surveillance, les compagnies doivent enregistrer, pour chaque navire plusieurs informations énumérées, telles que la quantité de chaque type de combustible consommé à quai et en mer (article 14) ;

o Le vérificateur évalue l'exactitude des informations et procède à plusieurs calculs, dont l'intensité annuelle moyenne des émissions de gaz à effet de serre de l'énergie utilisée à bord du navire concerné et le bilan de conformité du navire (article 15) ;

o La Commission élabore une base de données utilisée pour enregistrer le bilan de conformité et le recours aux mécanismes de flexibilité (article 16) ;

o Des dispositions en matière de flexibilité permettent aux exploitants de mettre en réserve, en cas d'excédent de conformité, ou d'emprunter, dans une certaine limite, un excédent de conformité pour permettre la conformité (article 17) ;

o Des groupements de conformité peuvent être constitués, mettant en commun les bilans de conformité de deux navires ou plus, qui sont vérifiés par le même vérificateur (article 18) ;

o Un certificat de conformité FuelUE Martime, valable pour une période de 18 mois, est délivré par le vérificateur aux navires ne présentant pas de déficit de conformité (article 19) ;

o Les compagnies peuvent demander une révision des calculs et des mesures adressés par le vérificateur, y compris pour le refus de délivrer un certificat de conformité FuelEU Maritime (article 24).

• Sanctions en cas de non-conformité :

o Des sanctions pécuniaires sont prévues en cas de non-conformité au 1 er mai de l'année suivant la période de déclaration (article 20) ;

o Les recettes générées par ces sanctions sont affectées au Fonds pour l'innovation et sont destinées au soutien des projets communs en faveur du déploiement rapide de carburants renouvelables et bas-carbone dans le secteur maritime (article 21) ;

o Les États membres sont chargés de déterminer le régime des sanctions applicables aux violations du règlement et de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de ces sanctions (article 23).

• Obligation pour la commission de remettre un rapport au Parlement européen et au Conseil sur l'application du règlement au plus tard le 1 er janvier 2030 , puis au moins tous les cinq ans (article 28).

Proposition
de règlement

sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs

Objectif : Parvenir au déploiement d'un réseau suffisant d'infrastructures pour carburants alternatifs dans l'Union européenne, pour les véhicules routiers, les navires et les aéronefs en stationnement.

Mesures :

• Objectifs pour les infrastructures de recharge électrique ouvertes au public et réservées aux véhicules utilitaires légers (article 3) :

o Objectifs cumulatifs en termes de puissance de sortie à atteindre par les États membres à la fin de chaque année :

§ pour chaque véhicule utilitaire léger électrique à batterie immatriculé, une puissance de sortie totale d'au moins 1 kW doit être fournie par des stations de recharge ouvertes au public ;

§ pour chaque véhicule utilitaire léger hybride rechargeable immatriculé, une puissance de sortie totale d'au moins 0,66 kW doit être fournie par des stations de recharge ouvertes au public.

o Obligation de déploiement de parcs de recharge le long du réseau central et du réseau global du RTE-T dans chaque sens de circulation, à un intervalle maximal de 60 km entre chaque parc :

§ pour le réseau central, une puissance de sortie totale d'au moins 600 kW doit être fournie par des parcs de recharge ouverts au public d'ici le 31 décembre 2030 ;

§ pour le réseau global, une puissance de sortie totale d'au moins 600 kW doit être fournie par des parcs de recharge ouverts au public d'ici le 31 décembre 2035.

• Objectifs pour les infrastructures de recharge électrique réservées aux véhicules utilitaires lourds (article 4) :

o Obligation de déploiement de points de recharge, ouverts au public et répondant à certaines exigences en matière de puissance de sortie, dans chaque sens de circulation :

§ le long du réseau central du RTE-T, à un intervalle maximal de 60 km entre chaque parc, une puissance de sortie totale d'au moins 3 500 kW doit être fournie par les parcs de recharge ouverts au public d'ici le 31 décembre 2030 ;

§ le long du réseau global du RTE-T, à un intervalle maximal de 100 km entre chaque parc, une puissance de sortie totale d'au moins 3 500 kW doit être fournie par les parcs de recharge ouverts au public d'ici le 1 er décembre 2035.

o Au 31 décembre 2030, chaque aire de stationnement doit être équipée d'au moins une station de recharge fournissant une puissance de sortie d'au moins 100 kW ;

o Au 31 décembre 2025, chaque noeud urbain doit être équipé de points de recharge ouverts au public fournissant une puissance de sortie cumulée d'au moins 600 kW ;

o Au 31 décembre 2030, chaque noeud urbain doit être équipé de points de recharge ouverts au public fournissant une puissance de sortie cumulée d'au moins 1 200 kW.

• Des dispositions sont prévues pour garantir la convivialité des infrastructures de recharge électrique (article 5).

• Objectifs pour les infrastructures de recharge en hydrogène pour les véhicules routiers (article 6) :

o Obligation de déploiement de stations de ravitaillement en hydrogène ouvertes au public et réservées aux véhicules utilitaires lourds et légers le long du réseau central et du réseau global du RTE-T (article 6).

§ au 31 décembre 2030, des stations de ravitaillement en hydrogène d'une capacité minimale de 2 tonnes par jour et équipées d'un distributeur d'au moins 700 bars ouvertes au public doivent être déployées à un intervalle maximal de 150 km le long du réseau central et du réseau global du RTE-T ;

§ à la même date, l'hydrogène liquide doit être mis à disposition dans des stations de ravitaillement ouvertes au public et déployées à un intervalle maximal de 450 km ;

§ de plus, au moins une station de ravitaillement en hydrogène ouverte au public doit être déployée dans chaque noeud urbain.

• Des dispositions sont prévues pour garantir la convivialité de l'infrastructure de ravitaillement en hydrogène (article 7).

• Objectifs pour les infrastructures de gaz naturel liquéfié (GNL) pour les véhicules de transport routier (article 8) :

o Obligation de mise en place d'un nombre approprié de points de ravitaillement en GNL ouverts au public et réservés aux véhicules utilitaires lourds, au moins tout au long du réseau central du RTE-T, d'ici le 1 er janvier 2025 ;

o Possibilité de dérogation en cas de coûts disproportionnés par rapport aux avantages.

• Objectifs pour l'alimentation électrique à quai des ports :

o Les ports maritimes du réseau central et du réseau global du RTE-T dont les porte-conteneurs de mer, les navires rouliers à passagers de mer et les engins à passagers à grande vitesse de mer ou tout autre navire à passagers de plus de 5 000 tonnes de jauge brute ont respectivement effectué plus de 50, 40 ou 25 escales par an en moyenne au cours des trois dernières années, disposent d'une puissance de sortie à quai suffisante pour satisfaire au moins 90 % de cette demande (article 9) ;

o Les ports de navigation intérieure disposent d'une installation fournissant une alimentation électrique à quai (article 10) :

§ pour réseau central du RTE-T, au plus tard le 1 er janvier 2025 ;

§ pour le réseau global du RTE-T, au plus tard le 1 er janvier 2030.

• Objectifs pour l'approvisionnement en GNL dans les ports maritimes (article 11) :

o Obligation de mise en place d'un nombre approprié de points de ravitaillement en GNL dans les ports maritimes du réseau central du RTE-T d'ici le 1 er janvier 2025 ;

o Obligation de mise en place d'un cadre d'action national.

• Objectifs pour la fourniture d'électricité aux aéronefs en stationnement dans les aéroports du réseau central et du réseau global du RTE-T (article 12) :

o Obligation de fourniture d'électricité à toutes les portes d'embarquement utilisées pour les opérations de transport aérien commercial, au plus tard le 1 er janvier 2025 ;

o Obligation de fourniture d'électricité à tous les postes de stationnement éloignés utilisés pour les opérations de transport aérien commercial, au plus tard le 1 er janvier 2030 ;

o Obligation de fourniture d'électricité en provenance du réseau électrique ou produite sur place en tant qu'énergie renouvelable, à partir du 1 er janvier 2030.

• Cadres d'action nationaux et rapports d'avancement :

o Au plus tard le 1 er janvier 2025, chaque État membre notifie un cadre d'action national pour le développement du marché relatif aux carburants alternatifs dans le secteur des transports et le déploiement des infrastructures correspondantes (article 13) ;

o Au plus tard le 1 er janvier 2027 puis tous les deux ans, chaque État membre soumet un rapport indépendant d'avancement sur la mise en oeuvre de son cadre d'action national (article 14) ;

o Au plus tard le 30 juin 2024 puis tous les trois ans, une évaluation doit être menée par une autorité de régulation d'un État membre (article 14) ;

o Au plus tard le 1 er janvier 2026, la Commission européenne évalue les cadres d'actions d'action nationaux et publie un rapport (article 15) ;

o Elle évalue les rapports d'avancement et publie un rapport (article 15).

• Suivi des progrès (article 16) :

o Au plus tard le 28 février de l'année suivant l'entrée en vigueur du règlement, puis chaque année, les États membres doivent communiquer à la Commission un rapport comprenant la puissance de sortie totale cumulée de recharge, le nombre de points de recharge ouverts au public, ainsi que le nombre de véhicules hybrides rechargeables et de véhicules électriques à batterie immatriculés et déployés sur leur territoire ;

o Lorsqu'un État membre risque de ne pas atteindre ses objectifs nationaux, la Commission peut demander de prendre des mesures correctives, qu'il doit notifier dans un délai de trois mois.

• Des exigences en matière d'information des utilisateurs sont prévues, dont une comparaison entre les prix des carburants affichés en station-service (article 17).

• Obligations en matière de fourniture de données (article 18) :

o Les États membres désignent une organisation chargée de l'enregistrement de l'identification pour la délivrance de codes d'identification ;

o Les exploitants ou propriétaires de points de recharge ou de ravitaillement ouverts au public doivent rendre les données statiques et dynamiques des infrastructures pour carburants alternatifs qu'ils exploitent disponibles et accessibles.

• Des spécifications techniques communes doivent être respectées dans le déploiement des infrastructures (article 19).

• Possibilité de réexamen du règlement par la Commission au plus tard le 31 décembre 2026 (article 22).

ANNEXE 2 : PRINCIPALES DISPOSITIONS DU VOLET « ÉNERGIE » DE LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE SUR LE PAQUET « AJUSTEMENT À L'OBJECTIF 55 »

N° 558

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 1 er mars 2022

PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

sur le paquet « Ajustement à l' objectif 55 »,

[...]

- Concernant la fiscalité de l'énergie :

Estime nécessaire de tenir compte du contexte de crise des prix des énergies et de son impact sur les ménages et les entreprises ;

Invite à consolider les incitations fiscales prévues pour les entreprises énergo-intensives ;

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'électricité renouvelable et celle bas-carbone dans la taxation de l'électricité ; appelle à prévoir une fiscalité simple et incitative, pour les biocarburants, le biogaz, le gaz bas-carbone et le bois-énergie ;

Invite à prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en leur appliquant un régime fiscal idoine et en les associant aux négociations sur la taxation de l'électricité ;

Attire l'attention sur le fait que la définition des ménages en situation de précarité énergétique susceptibles d'être soutenus fiscalement doit relever de la compétence des États membres ;

- Concernant la promotion de l'énergie produite à partir de sources renouvelables :

Juge nécessaire de tenir compte des caractéristiques économiques et climatiques des bouquets énergétiques, en prévoyant des objectifs de diversification généraux, réalistes et adaptés ; invite à prendre en considération l'impact de ces objectifs de diversification sur l'équilibre et la performance du système énergétique, notamment sur les prix des énergies, de même que sur l'équilibre, le pilotage, le stockage et le bilan carbone de ces énergies ;

Considère que les États membres doivent être pleinement souverains dans la définition de leur bouquet énergétique, et notamment de l'ampleur et du délai de leur diversification ; attire l'attention sur la nécessité de ne pas imposer d'objectifs de diversification inadaptés aux États membres dont la production d'électricité est déjà largement décarbonée ;

Relève que les biocarburants répondent d'ores et déjà aux critères de durabilité ; appelle à promouvoir les biocarburants, quelle que soit leur génération, en veillant à exclure ceux présentant un risque élevé en termes de bilan carbone, notamment au regard du changement d'affectation des sols, tels que ceux issus de l'huile de palme ou du soja ;

Invite à mieux intégrer le biogaz et le gaz-bas carbone, en particulier issus de déchets exempts de conflits d'usages, les réseaux de chaleur et de froid et la cogénération ;

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone dans la décarbonation de l'industrie ;

Appelle à ne pas déstabiliser les critères de durabilité applicables à la biomasse, s'agissant notamment du principe de cascade, des seuils de puissance, du niveau d'émission et de l'encadrement du bois-énergie ;

Demande à étendre l'obligation d'information, prévue pour les produits industriels, de l'énergie renouvelable vers celle bas-carbone ;

Invite à prendre en considération la spécificité des collectivités territoriales et de leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), en renforçant leur association à la mise en oeuvre des projets d'énergies renouvelables ;

- Concernant l'efficacité énergétique :

Considère que les États membres doivent être pleinement souverains dans l'application du principe de primauté énergétique, et pouvoir à ce titre le compléter par un principe d'efficacité carbone et de définir les actions d'efficacité énergétique à destination des ménages en situation de précarité énergétique ;

Demande que soit prise en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine ;

Considère que la spécificité des réseaux d'électricité, de gaz, de chaleur et de froid doit également être prise en considération dans cette même appréciation ;

Estime que les collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), doivent être mieux associés à la mise en oeuvre des actions d'efficacité énergétique ;

Considère que la mobilisation des contrats de performance énergétique et les critères de commande publique dans un but d'efficacité énergétique doivent être encouragés ;

- Concernant la performance énergétique des bâtiments :

Estime que la mise en oeuvre des nouvelles normes en matière de performance énergétique pour les constructeurs, les propriétaires (bailleurs privés ou sociaux, monopropriétaires ou copropriétaires) et les locataires doit s'accompagner d'un soutien financier ;

Demande que soit prise en compte la spécificité des bailleurs sociaux dans l'appréciation de l'obligation de réduction de la consommation d'énergie en leur appliquant un statut juridique idoine ;

Considère que la spécificité des bâtiments tertiaires doit également être prise en considération dans cette même appréciation ;

Juge que doit être appliqué un seuil d'émission, adapté, ambitieux et graduel, pour les énergies fossiles utilisées pour le chauffage et le refroidissement, plutôt qu'une interdiction sèche ;

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'énergie renouvelable et celle bas-carbone, et entre les énergies renouvelables sur site et celles de réseau, notamment dans la définition des bâtiments faiblement émissifs ;

Demande que soit prévue l'expérimentation d'un système d'alimentation des bâtiments au biogaz ;

Appelle à maintenir une bonne articulation entre normes européennes et nationales ;

- Concernant l'initiative sur l'incorporation de carburants durables dans le secteur aérien :

Appelle à affiner les délais, compenser les surcoûts et encourager les investissements dans la mise en oeuvre de l'objectif d'incorporation de carburants durables dans le secteur aérien ;

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et bas-carbone dans cette incorporation ;

Estime nécessaire de mieux intégrer les différents biocarburants et carburants synthétiques ;

- Concernant l'initiative sur l'intégration des carburants durables dans le secteur maritime :

Souhaite accroître la limitation de l'intensité des émissions de gaz à effet de serre de l'énergie utilisée à bord pour renforcer l'incorporation des carburants durables dans le secteur maritime ;

Demande que soit prévu un accompagnement des collectivités territoriales et leurs groupements, en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), dans les surcoûts induits par l'électrification à quai ;

Appelle à permettre l'utilisation des garanties d'origine pour favoriser l'incorporation du bio-GNL et du GNL ;

Estime nécessaire de mieux intégrer les différents biocarburants et carburants synthétiques ;

- Concernant le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs :

Appelle à renforcer les objectifs contraignants de déploiement des infrastructures de recharge pour tous les modes de transports, a minima pour les infrastructures électriques destinées aux véhicules utilitaires légers ;

Estime nécessaire de mieux intégrer le GNL, le GNC, le bio-GNL et le bio-GNC ainsi que les différents biocarburants et les carburants synthétiques ;

Appelle à renforcer et à anticiper l'objectif prévu et pour les infrastructures de recharge à hydrogène ;

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone et entre l'énergie renouvelable et bas-carbone dans l'appréciation des carburants durables ;

- Concernant l'intégration de l'hydrogène, du biogaz et du gaz bas-carbone :

Demande que soit appliquée une neutralité technologique entre l'hydrogène renouvelable et celui bas-carbone, dans l'appréciation des seuils d'émission ;

Appelle à la vigilance sur les seuils d'émission et les critères d'additionnalité et de corrélation prévus pour l'hydrogène qui seront fixés par un acte délégué de la Commission européenne ;

Fait valoir que l'injection de l'hydrogène dans les réseaux de gaz naturel doit constituer un débouché limité ;

Invite à accorder une place au biogaz et au gaz bas-carbone, aux côtés de l'hydrogène, dans la décarbonation du secteur du gaz.


* 1 Lois n°2019-1147 du 8 novembre 2019 (article 39) et n°2021-1104 du 22 août 2021 (article 96).

* 2 Avec une période de transition jusqu'en 2033.

* 3 Finlande, Estonie, Lettonie, Autriche, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Roumanie, Bulgarie.

* 4 Finlande, Slovaquie, Hongrie, Bulgarie.

* 5 En énergie brute disponible.

* 6 La date de 2027 ayant été envisagée par la présidente de la Commission européenne.

* 7 Prévue pour atténuer les conséquences sociales de la flambée des prix des énergies.

* 8 Proposition de loi n° 648 tendant à conforter l'application de la loi « Énergie-Climat » et l'atteinte de son objectif de « neutralité carbone », déposée le 28 mai 2021 ; proposition de loi n° 389 tendant à inscrire l'hydroélectricité au coeur de la transition énergétique et de la relance économique, adoptée le 13 avril 2021.

* 9 Proposition de résolution européenne sur l'inclusion du nucléaire dans le volet climatique de la taxonomie européenne des investissements durables, adoptée le 7 décembre 2021.

* 10 Proposition de résolution n° 38 invitant le Gouvernement à étudier la possibilité d'une mise en cohérence de sa politique énergétique avec ses ambitions écologiques, adoptée le 23 mars 2021.

* 11 Liant dans les faits les prix de l'électricité à ceux du gaz.

* 12 Afin d'intégrer un critère de provenance du gaz dans la « taxonomie verte », de veiller à la production de biogaz et aux infrastructures de GNL dans le paquet « 55 » et de garantir la régulation, la décarbonation et le stockage du gaz dans le paquet « gazier ».

* 13 Commission européenne, « Pacte vert pour l'Europe : la Commission propose de transformer l'économie et la société européens afin de concrétiser les ambitions climatiques de l'Union », 14 juillet 2021.

* 14 Règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) no 401/2009 et (UE) 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »).

* 15 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'efficacité énergétique (refonte) - COM(2021) 558 final (15 juillet 2021).

* 16 Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil, le règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil et la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la promotion de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, et abrogeant la directive (UE) 2015/652 du Conseil - COM(2021) 557 final (15 juillet 2021).

* 17 Règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant les règlements (CE) n° 401/2009 et (UE) 2018/1999 (« loi européenne sur le climat »).

* 18 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 1 er ).

* 19 Les règlements proposés ou modifiés sont les suivants :

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'instauration d'une égalité des conditions de concurrence pour un secteur du transport aérien durable - COM(2021)561 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2018/841 en ce qui concerne le champ d'application, la simplification des règles de conformité, la fixation des objectifs des États membres pour 2030 et l'engagement dans la réalisation collective de la neutralité climatique d'ici à 2035 dans le secteur de l'utilisation des terres, de la foresterie et de l'agriculture, et le règlement (UE) 2018/1999 en ce qui concerne l'amélioration de la surveillance, des rapports, du suivi des progrès et de la révision - COM(2021) 554 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2018/842 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de 2021 à 2030 contribuant à l'action pour le climat afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris - COM(2021) 555 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières - COM(2021) 564 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un Fonds social pour le climat - COM(2021) 568 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs et abrogeant la directive 2014/94/UE du Parlement européen et du Conseil - COM(2021) 559 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'utilisation de carburants renouvelables et bas carbone dans le transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE - COM(2021) 562 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2019/631 en ce qui concerne le renforcement des normes de performance en matière d'émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et les véhicules utilitaires légers neufs conformément à l'ambition accrue de l'Union en matière de climat - COM(2021) 556 final (15 juillet 2021).

* 20 Les directives proposées ou modifiées sont les suivantes :

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la contribution de l'aviation à l'objectif de réduction des émissions à l'échelle de l'ensemble de l'économie de l'Union et mettant en oeuvre de manière appropriée un mécanisme de marché mondial - COM(2021) 552 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans l'Union, la décision (UE) 2015/1814 concernant la création et le fonctionnement d'une réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union et le règlement (UE) 2015/757 - COM(2021) 551 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de directive du conseil restructurant le cadre de l'Union de taxation des produits énergétiques et de l'électricité (refonte) - COM(2021) 563 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil, le règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil et la directive 98/70/CE du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne la promotion de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, et abrogeant la directive (UE) 2015/652 du Conseil - COM(2021) 557 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'efficacité énergétique (refonte) - COM(2021) 558 final (15 juillet 2021).

* 21 Les décisions ainsi proposées ou modifiées sont les suivantes :

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/87/CE en ce qui concerne la notification de la compensation dans le cadre d'un mécanisme de marché mondial pour les exploitants d'aéronefs établis dans l'Union - COM(2021) 567 final (15 juillet 2021) ;

- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil modifiant la décision (UE) 2015/1814 en ce qui concerne la quantité de quotas à placer dans la réserve de stabilité du marché pour le système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union jusqu'en 2030 - COM(2021) 571 final (15 juillet 2021).

* 22 Stratégie de l'Union européenne pour les forêts à l'horizon 2030.

* 23 Les nouveaux règlements connexes présentés sont les suivants :

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur les marchés intérieurs des gaz naturel et renouvelable et de l'hydrogène (refonte) - COM(2021) 804 final (15 décembre 2021) ;

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant la réduction des émissions de méthane dans le secteur de l'énergie et modifiant le règlement (UE) 2019/942 - COM(2021) 805 final (15 décembre 2021).

* 24 Les nouvelles directives connexes présentées sont les suivantes :

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la performance énergétique des bâtiments (refonte) - COM(2021) 802 final (15 décembre 2021) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour les marchés intérieurs des gaz naturel et renouvelable et de l'hydrogène - COM(2021) 803 final (15 décembre 2021).

* 25 Commission européenne, « ”Ajustement à l'objectif 55“ : atteindre l'objectif de l'UE à l'horizon 2030 sur la voie de la neutralité climatique », 14 juillet 2021.

* 26 Commission européenne, « Une énergie propre pour tous : le Conseil adopte les dossiers restants relatifs au marché de l'électricité et à l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie », 22 mai 2019.

* 27 Règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l'union de l'énergie et de l'action pour le climat, modifiant les règlements (CE) n° 663/2009 et (CE) n° 715/2009 du Parlement européen et du Conseil, les directives 94/22/CE, 98/70/CE, 2009/31/CE, 2009/73/CE, 2010/31/UE, 2012/27/UE et 2013/30/UE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2009/119/CE et (UE) 2015/652 du Conseil et abrogeant le règlement (UE) n° 525/2013 du Parlement européen et du Conseil.

* 28 Directive (UE) 2018/2002 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 modifiant la directive 2012/27/UE relative à l'efficacité énergétique.

* 29 Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables.

* 30 Les règlements ainsi intégrés sont les suivants :

- Règlement (UE) 2018/1999 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l'union de l'énergie et de l'action pour le climat, modifiant les règlements (CE) n° 663/2009 et (CE) n° 715/2009 du Parlement européen et du Conseil, les directives 94/22/CE, 98/70/CE, 2009/31/CE, 2009/73/CE, 2010/31/UE, 2012/27/UE et 2013/30/UE du Parlement européen et du Conseil, les directives 2009/119/CE et (UE) 2015/652 du Conseil et abrogeant le règlement (UE) n° 525/2013 du Parlement européen et du Conseil ;

- Règlement (UE) 2019/941 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur la préparation aux risques dans le secteur de l'électricité et abrogeant la directive 2005/89/CE ;

- Règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l'électricité (refonte).

* 31 Les directives ainsi transposées sont les suivantes :

- Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables ;

- Directive (UE) 2018/2002 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 modifiant la directive 2012/27/UE relative à l'efficacité énergétique ;

- Directive (UE) 2018/844 du Parlement Européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments et la directive 2012/27/UE relative à l'efficacité énergétique ;

- Directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et modifiant la directive 2012/27/UE.

* 32 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat (article 39).

* 33 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (article 96).

* 34 Proposition de résolution européenne en application de l'article 73 quinquies du Règlement, sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 », présentée par M. Jean-François Rapin, Mme Marta de Cidrac, M. Guillaume Chevrollier, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Jean-Michel Houllegatte, Claude Kern, Jean-Yves Leconte, Dominique de Legge, Didier Marie et Mme Denise Saint-Pé, déposée le 28 février 2022.

* 35 A l'occasion d'une réunion commune avec la commission des affaires européennes.

* 36 Commission européenne, « ”Ajustement à l'objectif 55“ : atteindre l'objectif de l'UE à l'horizon 2030 sur la voie de la neutralité climatique », 14 juillet 2021.

* 37 Commission européenne, « Pacte vert pour l'Europe : La Commission propose de transformer l'économie et la société européennes afin de concrétiser les ambitions climatiques de l'Union », 14 juillet 2021.

* 38 Le Journal du dimanche , « L'Europe devra avoir doublé sa production électrique en 2050 », 7 septembre 2021.

* 39 Le Journal du dimanche , « Thierry Breton : "Il faudra investir 500 milliards d'euros dans les centrales nucléaires de nouvelle génération" », 9 janvier 2022.

* 40 Indices spot européen pour le gaz, Brent international pour le pétrole et Spot français pour l'électricité.

* 41 La date de 2027 ayant été envisagée par la présidente de la Commission européenne.

* 42 Réseau de transport d'électricité (RTE), Futurs énergétiques à l'horizon 2050, Principaux résultats , octobre 2021.

* 43 Rapport d'information n° 553 fait au nom de la commission des affaires économiques sur la mise en application de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, Où en est l'application de la loi ?Énergie-Climat“ ? Où en est l'atteinte de l'objectif de ”neutralité carbone? ? , par Daniel Gremillet, 5 mai 2021.

* 44 Proposition de loi n° 648 tendant à conforter l'application de la loi « Énergie-Climat » et l'atteinte de son objectif de « neutralité carbone », déposée par Daniel Gremillet, le 28 mai 2021 ; proposition de loi n° 389 tendant à inscrire l'hydroélectricité au coeur de la transition énergétique et de la relance économique, déposée par Bruno Retailleau, Sophie Primas et Daniel Gremillet, le 25 février 2021 et adoptée le 13 avril 2021.

* 45 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (articles 85 à 99).

* 46 Proposition de résolution européenne au nom de la commission des affaires européennes, en application de l'article 73 quater du Règlement, sur l'inclusion du nucléaire dans le volet climatique de la taxonomie européenne des investissements durables, déposé le 1 er décembre 2021 par Daniel Gremillet, Claude Kern et Pierre Laurent et adoptée le 7 décembre 2021.

* 47 Proposition de résolution n° 38 en application de l'article 34-1 invitant le Gouvernement à étudier la possibilité d'une mise en cohérence de sa politique énergétique avec ses ambitions écologiques, déposée le 4 février 2021 par le président Bruno Retailleau, la présidente Sophie Primas et le rapporteur Daniel Gremillet et adoptée le 23 mars 2021.

* 48 Rapport d'information n° 551 sur l'impact de la transition énergétique sur la sécurité d'approvisionnement électrique, La France est-elle en risque de "black-out" ? , par Daniel Gremillet, Jean-Pierre Moga et Jean-Jacques Michau, 25 février 2022.

* 49 Commission des affaires économiques, « Guerre en Ukraine : la commission des affaires économiques du Sénat propose 5 mesures d'urgence pour sortir de la dépendance française et européenne au gaz russe », 28 février 2022.

* 50 Liant dans les faits les prix de l'électricité à ceux du gaz.

* 51 Afin d'intégrer un critère de provenance du gaz dans la « taxonomie verte européenne », de mieux intégrer le biogaz - dans la directive sur les énergies renouvelables du paquet « Ajustement à l'objectif 55 » et le GNL - dans le règlement sur les infrastructures de recharge en carburants alternatifs prévue par le même paquet -, et de garantir la régulation, la décarbonation et le stockage du gaz dans le paquet « gazier ».

* 52 Décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine.

* 53 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (articles 148 à 190).

* 54 Energies renouvelables (EnR).

* 55 Telles que des mesures liées aux stocks stratégiques de gaz.

* 56 Soit le fait de retirer du gaz.

* 57 Soit le fait de brûler du gaz.

* 58 Renewable Energy Directive III (RED III) ; en français, directrice énergies renouvelables III (EnR III).

* 59 C'est-à-dire les gestionnaires de réseaux de transport indépendants.

* 60 Commission des affaires économiques du Sénat, « Guerre en Ukraine : la commission des affaires économiques du Sénat propose 5 mesures d'urgence pour sortir de la dépendance française et européenne au gaz russe » , 28 février 2022.

* 61 C'est-à-dire de l'architecture du marché européen de l'électricité.

* 62 Emissions Trading Scheme (ETS) ; en français, système d'échange de quotas d'émission (SEQE).

* 63 En l'espèce la révision de la réglementation environnementale 2020 (RE2020) susmentionnée.

* 64 Directive sur la performance énergétique des bâtiments (DPEB).

* 65 En commun avec les rapporteurs de la commission des affaires européennes.

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