B. LA MODERNISATION DE LA POLITIQUE DE RECONVERSION PEUT ÊTRE POURSUIVIE AU SERVICE DU RAYONNEMENT TERRITORIAL DES ARMÉES ET DE LA FIDÉLISATION DES TROUPES
1. Le succès global de la politique de reconversion des militaires est à nuancer au regard des limites de ses indicateurs de suivi et d'un déséquilibre en faveur du secteur privé
Les indicateurs utilisés par « Défense mobilité » ne permettent pas d'assurer un suivi global de la reconversion des anciens militaires. En premier lieu, les indicateurs de suivi utilisés par « Défense mobilité » témoignent de l'efficacité de ses services d'accompagnement dès lors que 59% des anciens militaires du ministère des armées ayant été radiés des cadres ou des contrôles en 2019 ont été reclassés dans les douze mois suivant leur départ.
Toutefois, le dispositif de suivi actuel, ne permet pas d'avoir une vision complète de la situation relative à la reconversion des anciens militaires. En effet, l'absence d'informations consolidées sur le reclassement des anciens militaires qui ne font pas appel aux services de « Défense mobilité » limite la connaissance dont dispose les services du ministère et par voie de conséquence l'adaptation de leur réponse à la situation actuelle de la transition professionnelle des anciens militaires.
Les anciens militaires se reconvertissent massivement dans le secteur privé , en dépit des investissements publics consentis en faveur de leur formation : parmi les anciens militaires reclassés dans un délai d'un an et ayant quitté l'institution en 2019 et bénéficié d'un accompagnement de « Défense mobilité », seuls un quart (26%) s'est reconverti dans le secteur public.
Ventilation des reclassements de la cohorte 2019 suivie par « Défense mobilité »
Source : HCECM, juillet 2021, 15e rapport thématique, L'emploi des militaires après leur départ des forces armées |
2. La poursuite de la modernisation des instruments de reconversion est un levier au service du rayonnement des armées et de la fidélisation des troupes
Le renforcement des reconversions depuis les armées vers les administrations publiques locales permettrait de consolider le rayonnement territorial de l'institution militaire. Les rapporteurs relèvent qu'il existe une réelle demande des collectivités territoriales qui apprécient les qualités professionnelles dont font preuve la majorité des anciens militaires. Un des obstacles pratiques résulte de l'organisation très centralisée de la procédure de l'article L. 4139-2 (voie d'accès des anciens militaires à la fonction publique), qui repose sur la coordination d'une entité unique pour l'ensemble du territoire, la commission nationale d'orientation et d'intégration (CNOI) 9 ( * ) . Les rapporteurs seront attentifs à l'évolution à moyen terme des reclassements dans la fonction publique territoriale, qui bénéficient mutuellement aux collectivités et aux armées pour lesquelles ils constituent un instrument précieux de rayonnement local.
L'ouverture de la politique de reconversion au bénéfice des conjoints de militaire doit être poursuivie au service de la fidélisation des troupes. L'éligibilité des conjoints de militaire aux services d'accompagnement proposés par « Défense mobilité » est justifiée par le fait que la proportion des conjoints de militaire exerçant une activité professionnelle a augmenté de treize points entre 2000 et 2014, pour atteindre 73% 10 ( * ) . À ce titre, les rapporteurs seront attentifs au suivi et à l'évaluation des différents instruments issus de la politique de reconversion qui ont été récemment mis à la disposition des conjoints de militaires dans le cadre du plan « famille », et qui ont permis d'accompagner 1 775 11 ( * ) conjoints en 2020.
3. La modernisation de la politique de reconversion doit s'inscrire dans une revalorisation globale de la condition militaire, qui passe par le déploiement définitif de la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM)
Au-delà de la modernisation des dispositifs de reconversion, qui concourt indirectement à l'attractivité des armées, la commission des affaires étrangères et de la défense est attentive depuis plusieurs années à l'effort de rationalisation de la rémunération des militaires qui reposait jusqu'à récemment sur un ensemble hétéroclite de quelques cent-soixante-dix primes et indemnités différentes.
À ce titre, les rapporteurs suivront de près le déploiement définitif de la « nouvelle politique de rémunération des militaires » (NPRM) qui doit substituer au système actuel un dispositif de rémunération fondé sur huit composantes regroupées en trois volets relatifs en premier lieu aux sujétions inhérentes au statut militaire , en deuxième lieu aux engagements opérationnels et aux responsabilités exercées et en troisième lieu aux performances et aux compétences spécifiques des militaire. Après l'entrée en vigueur au 1 er janvier 2021 de l'indemnité de mobilité géographique des militaires 12 ( * ) , les étapes les plus importantes restent à franchir et les rapporteurs seront particulièrement attentifs à ce que cette réforme atteigne ses objectifs tant en termes de lisibilité de la rémunération que de réduction des coûts de gestion.
* 9 v. arrêté du 6 juin 2017 relatif à l'organisation et au fonctionnement de la commission nationale d'orientation et d'intégration
* 10 Cf. sur ce point HCECM, juin 2018, 12e rapport thématique, La vie des militaires et de leur famille selon le lieu d'affectation
* 11 En incluant la gendarmerie
* 12 v. décret du 22 décembre 2020 relatif à l'indemnité de mobilité géographique des militaires