C. TROIS RECOMMANDATIONS POUR DÉFINIR UNE STRATÉGIE GÉOPOLITIQUE EUROPÉENNE EN RÉPONSE À L'ACCESSION PROCHAINE DE LA CHINE AU STATUT DE PREMIÈRE PUISSANCE MONDIALE
1. S'agissant de la boussole stratégique européenne et de la stratégie européenne dans l'indopacifique
Alors que la France sera en charge de la présidence de l'Union européenne au 1 er semestre 2022, elle devra avoir un rôle moteur afin : - de réévaluer la relation bilatérale avec l'Australie , dans les domaines stratégiques et commerciaux, d'une part, avec les États-Unis d'autre part, |
- de réaffirmer l'attachement indéfectible de la France à la maîtrise des armements et à la non-prolifération nucléaire , - et de r éévaluer l'analyse des menaces dans le cadre de la préparation de la boussole stratégique tant la dénonciation par l'Australie du partenariat stratégique avec la France et son équipement en sous-marins d'attaque américains, à propulsion nucléaire dans le cadre du pacte Aukus conclus avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni est un « game changer », c'est-à-dire un profond bouleversement stratégique susceptible d'ébranler la stabilité de l'indopacifique dans son ensemble . |
2. Sur l'évolution du positionnement de l'OTAN face à la Chine
La volonté des États-Unis d'affronter la Chine afin de l'empêcher de devenir la prochaine première puissance mondiale ne doit pas conduire à l'instrumentalisation de l'Alliance atlantique , qui basée sur des valeurs démocratiques serait fragilisée par un tel dévoiement de sa gouvernance . Il convient donc :
- de rappeler que l'OTAN est une institution qui doit être rééquilibrée politiquement et ne doit pas s'organiser autour de la rivalité sino-américaine mais bien pourvoir à la défense euro-atlantique . La révision du concept stratégique de l'OTAN devra aller en ce sens,
- de prôner la transparence en matière de stratégie nucléaire ,
- d'inciter tous les États dotés, Chine comprise - lorsque l'architecture de maîtrise internationale des armements a été posée pendant la guerre froide, la Chine n'avait pas été associée à hauteur du statut qui est le sien -, à participer à des discussions favorisant la non-prolifération et la maîtrise des armements nucléaires .
3. Pour que l'Union européenne s'affirme comme la puissance géostratégique qu'elle doit être
L'Union européenne dans le monde instable et dangereux de ce début de XXI e siècle voit la Chine multiplier les marqueurs de puissance, au point de devenir probablement plus vite qu'escompté la prochaine première puissance mondiale. Dans le même temps, elle assiste à la poursuite de la politique égoïste américaine, plus soucieuse de réaliser le fameux « America first » que de garantir la stabilité mondiale. L'UE doit s'affirmer comme une puissance stratégique stabilisatrice . Pour cela :
- l'Union européenne doit développer son régime de sanctions politiques comme économiques et envisager cet outil de puissance géoéconomique sous toutes ses facettes : sanctions, droit extraterritorial européen, contrôle des exportations, notamment pour ce qui concerne les technologies de rupture, lutte contre la corruption et contrôle des investissements,
- l'UE comme la France doivent continuer de mener un dialogue de haut niveau lucide et exigeant avec la Chine sur les sujets qui constituent désormais les lignes rouges de la politique étrangère chinoise : le Tibet, Hong Kong, Taïwan, le traitement des minorités musulmanes du Xinjiang, la liberté de navigation, y compris en mer de Chine, les droits de l'homme, notamment,
- enfin, les États membres de l'UE doivent veiller à leur unité sur ces sujets.