B. LA LUTTE CONTRE LES INÉGALITÉS ET LES DISCRIMINATIONS
1. Promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décisions politiques et publiques
Mercredi 23 juin, au nom de la commission sur l'égalité et la non-discrimination, Mme Eglantina Gjermeni (Albanie - SOC) a présenté un rapport pour promouvoir la participation des femmes issues de groupes sous-représentés dans la prise de décisions politiques et publiques. Une résolution a été adoptée à la suite de cette présentation.
La participation des femmes à la prise de décision politique et publique a globalement augmenté dans les États membres du Conseil de l'Europe au cours des dernières décennies. Cependant, elles représentent encore un groupe assez homogène : les femmes des groupes sous-représentés, notamment les jeunes femmes, les femmes en situation de handicap, les femmes LGBTI et les femmes Roms sont moins visibles et ont moins accès aux postes de direction. Elles sont confrontées à de multiples obstacles à la participation, tels que la discrimination, le poids des préjugés, le risque de violence, la peur de la stigmatisation, les barrières au sein des partis politiques, la pression sociétale et le manque de reconnaissance de leurs compétences.
Les quotas, la formation, les programmes de mentorat, l'investissement dans l'accessibilité, les mesures de sélection des candidats, les politiques sensibles au genre, la promotion de modèles et les actions visant à combattre et à prévenir la violence à l'égard des femmes en politique peuvent contribuer à accroître leur participation.
Le renforcement de la participation des femmes issues de groupes sous-représentés à la prise de décision politique et publique aura un impact positif à long terme. Elle contribuera à réduire les écarts réels ou perçus entre les décideurs et les décideuses et la population. Il est grand temps que le paysage politique européen reflète mieux la diversité des sociétés européennes avec un engagement plus ferme en faveur de l'égalité.
S'exprimant au nom du groupe ADLE, Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation française, a rappelé que malgré les progrès accomplis, il reste encore du chemin à parcourir pour parvenir à une égalité véritable. La diversité des élus permet de donner une légitimité aux institutions. Pour elle, c'est une chance de siéger aux côtés de collègues issues de l'immigration, lesbiennes ou très jeunes qui portent des préoccupations multiples. Cependant, elle s'est opposée à l'alinéa 8.2.4 du projet de résolution qui propose des quotas, assortis de sanctions en cas de non-respect, pour chaque catégorie de femmes évoquée. Le rapport en dénombre pas moins de neuf : femmes handicapées, issues de minorités ou de l'immigration, d'origine sociale modeste, LGBTI, jeunes, issues des gens du voyage ou Roms, ou encore venant d'un milieu rural. Pour Mme Nicole Trisse, une société inclusive ne doit pas mettre en exergue les différences car cela contribue à la fragmenter en favorisant l'émergence de tous types de communautarismes. Elle a donc déposé un amendement de suppression de l'alinéa 8.2.4 du projet de résolution.
Cet amendement ayant été adopté, Mme Nicole Trisse et les membres du groupe ADLE ont voté le projet de résolution.
2. Pour une politique européenne relative aux diasporas
Jeudi 24 juin, l'APCE a adopté, sur le rapport de M. Paulo Pisco (Portugal - SOC), présenté au nom de la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées, une résolution et une recommandation pour une politique européenne des diasporas.
Les diasporas et leurs associations apportent une contribution positive au développement des pays de résidence et d'origine : elles enrichissent la diversité culturelle tout en tissant des relations dynamiques et constructives afin de favoriser les échanges économiques et culturels et le co-développement.
Les pays peuvent grandement bénéficier de ce que les diasporas peuvent offrir s'ils établissent des liens avec elles, examinent leurs besoins et y répondent, les intègrent dans les processus de décision et coopèrent avec elles pour formuler des politiques axées sur les diasporas.
Les recommandations adoptées peuvent faciliter l'élaboration de ces politiques et stratégies par les États membres, tandis que la coopération internationale en matière de questions relatives aux diasporas permettrait de promouvoir davantage ces politiques.
Le Conseil de l'Europe peut jouer un rôle majeur dans ce processus, en réunissant les multiples acteurs qui façonnent les politiques nationales en matière de diasporas, notamment les Parlements, les Gouvernements, les associations de diasporas, les ONG, les médias et les organismes de recherche, ainsi qu'en établissant ou promouvant un Forum européen des diasporas qui tiendrait lieu de plateforme d'échanges internationaux entre les communautés de diasporas.
M. António Vitorino, directeur général de l'Organisation internationale pour les migrations a participé à ce débat.
M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains) est intervenu pour évoquer principalement deux sujets : l'intégration des personnes issues de diasporas dans les sociétés d'accueil ainsi que l'enjeu de la citoyenneté et du vote. Face aux peurs que peut susciter l'immigration, chaque État doit travailler sur les questions d'intégration des migrants afin de faciliter leur inclusion dans la société d'accueil. Mais la question de l'intégration peut s'entendre différemment d'un État à un autre avec des différences notables entre un modèle républicain assimilationniste comme en France et un modèle multi-culturaliste. Ainsi, la Constitution française ne reconnaît qu'un seul peuple : le peuple français. De ce fait, aucun régime juridique particulier ne peut être mis en place pour les personnes issues des diasporas. Cette approche implique en outre que c'est la qualité de citoyen qui permet de voter. Cette citoyenneté peut être française ou européenne, au sein de l'Union européenne. Dès lors, les étrangers qui ne sont pas des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne ne peuvent ni voter, ni se présenter aux élections locales. Pour le faire, ils doivent acquérir la nationalité française. Enfin, M. Bernard Fournier a évoqué le cas de la communauté française à l'étranger représentée au Parlement français, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale.
3. La lutte contre l'afrophobie en Europe
Jeudi 24 juin, l'APCE a adopté, sur le rapport de M. Momodou Malcolm Jallow (Suède - GUE), présenté au nom de la commission sur l'égalité et la non-discrimination, une résolution pour lutter contre l'afrophobie, ou le racisme anti-Noirs, en Europe.
Mme E. Tendayi Achiume, rapporteure spéciale des Nations Unies sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a participé à ce débat.
En dépit des lois et politiques contre la discrimination, l'afrophobie, ou racisme anti-Noirs, est toujours répandue en Europe. Les personnes d'ascendance africaine et les Européens noirs sont victimes de préjugés et d'abus, de discours haineux, y compris dans le discours public et politique, d'obstacles à l'accès à une éducation de qualité, aux soins de santé et au logement. Leur représentation dans la vie publique et politique est très faible.
En 2020, les manifestations contre le racisme qui ont suivi la mort brutale de George Floyd et l'impact disproportionné de la pandémie de Covid-19 sur les personnes d'origine africaine et les Européens noirs ont fait prendre conscience au public de la gravité de l'afrophobie. Elles ont également déclenché un soutien plus fort de la part de personnalités publiques de premier plan en Europe, ouvrant une « fenêtre d'opportunité » pour agir contre ce phénomène.
Le racisme contemporain trouve ses racines dans l'histoire coloniale, l'esclavage et la traite transatlantique des esclaves. Les États membres du Conseil de l'Europe devraient admettre ce lien, reconnaître l'afrophobie, ou le racisme anti-Noirs, comme une forme spécifique de racisme, et introduire des mesures d'éducation, d'information et de sensibilisation pour la combattre. Les États membres devraient aussi concevoir et mettre en oeuvre des plans d'action contre le racisme, étayés par des données ventilées par origine ethnique.