Rapport n° 217 (2020-2021) de Mme Angèle PRÉVILLE , sénatrice et M. Philippe BOLO, député, fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, déposé le 10 décembre 2020

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N° 3654

N° 217

ASSEMBLÉE NATIONALE

SÉNAT

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

SESSION ORDINAIRE 2020-2021

Enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale

Enregistré à la présidence du Sénat

le 10 décembre 2020

le 10 décembre 2020

RAPPORT

au nom de

L'OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

POLLUTION PLASTIQUE :

UNE BOMBE À RETARDEMENT ?

PAR

M. Philippe BOLO, député, et Mme Angèle PRÉVILLE, sénatrice

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale

par M. Cédric VILLANI,

Président de l'Office

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Gérard LONGUET,

Premier vice-président de l'Office

Composition de l'Office parlementaire d'évaluation

des choix scientifiques et technologiques

Président

M. Cédric VILLANI, député

Premier Vice-président

M. Gérard LONGUET, sénateur

Vice-présidents

M. Didier BAICHÈRE, député

Mme Sonia de LA PROVÔTÉ, sénatrice

M. Jean-Luc FUGIT, député

Mme Angèle PRÉVILLE, sénatrice

M. Patrick HETZEL, député

Mme Catherine PROCACCIA, sénateur

DÉPUTÉS

SÉNATEURS

M. Julien AUBERT

M. Philippe BOLO

Mme Émilie CARIOU

M. Jean-François ÉLIAOU

Mme Valéria FAURE-MUNTIAN

M. Claude de GANAY

M. Thomas GASSILLOUD

Mme Anne GENETET

M. Pierre HENRIET

M. Antoine HERTH

M. Jean-Paul LECOQ

M. Gérard LESEUL

M. Loïc PRUD'HOMME

Mme Huguette TIEGNA

Mme Laure DARCOS

Mme Annie DELMONT-KOROPOULIS

M. André GUIOL

M. Ludovic HAYE

M. Olivier HENNO

Mme Annick JACQUEMET

M. Bernard JOMIER

Mme Florence LASSARADE

M. Ronan LE GLEUT

M. Franck MENONVILLE

Mme Michelle MEUNIER

M. Pierre OUZOULIAS

M. Stéphane PIEDNOIR

M. Bruno SIDO

L'ESSENTIEL

I - LES PLASTIQUES : DES MATÉRIAUX RÉCENTS DEVENUS
OMNIPRÉSENTS

A. UNE GRANDE DIVERSITÉ DE MATÉRIAUX AUX
PROPRIÉTÉS INTÉRESSANTES

• Une diversité de polymères et de formulations

Un plastique est une matière constituée d'un ou plusieurs polymères auxquels sont ajoutés des charges (pour réduire le coût ou améliorer les propriétés), des plastifiants et des additifs (colorants, anti-oxydants, etc.). Pour des plastiques de même nature chimique, il existe des centaines, voire des milliers de formulations différentes.

Les polymères de synthèse utilisés pour la fabrication des plastiques sont généralement classés en deux catégories : les thermoplastiques qui, sous l'effet de la chaleur, redeviennent malléables (ils représentent 80 % de la consommation de plastiques) et les thermodurcissables qui ne peuvent plus être fondus pour être réutilisés et ne sont donc pas recyclables.

Les polymères peuvent également être classés selon l'origine des atomes de carbone qui les composent : les hydrocarbures pour les polymères fossiles (99 % des plastiques) et la biomasse pour les polymères biosourcés.

Certains polymères sont biodégradables, ce qui signifie qu'ils sont capables d'être utilisés comme source de carbone par les micro-organismes dans des conditions précises. Les polymères à la fois biosourcés et biodégradables sont qualifiés de « biopolymères ».

• Des matériaux aux propriétés multiples devenus omniprésents

Les plastiques sont des matériaux extrêmement polyvalents : la variété de leurs formes et de leurs couleurs, leurs propriétés de souplesse ou de rigidité, leur légèreté associée à une grande résistance et à une longue durée de vie, leur stabilité, leur faible coût de fabrication en font une matière prisée par les industriels. Ces qualités ont permis de nombreuses innovations technologiques. Ils se sont ainsi imposés dans toutes les filières industrielles et imprègnent nos modes de consommation.

B.  UNE PRODUCTION EXPONENTIELLE SOUS L'INFLUENCE
DES PLASTIQUES À USAGE UNIQUE

En moins de cent ans, le plastique est devenu le troisième matériau le plus fabriqué au monde après le ciment et l'acier. 359 millions de tonnes ont été produites en 2018, et même 438 millions de tonnes si l'on tient compte des plastiques présents dans les textiles et les caoutchoucs synthétiques. Cette production devrait doubler d'ici 2050.

Évolution de la production de plastique par terrien entre 1950 et 2015

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les plastiques ont été conçus à l'origine pour être utilisés comme des matériaux résistants et de leur longue durée. Paradoxalement, ils sont aujourd'hui de plus en plus utilisés pour des usages uniques de courte durée. Ainsi, l a forte croissance de la production plastique est tirée par l'essor du secteur de l'emballage , qui, avec une part de marché de 36 % au niveau mondial (soit une production de 158 millions de tonnes en 2018), en constitue le premier débouché . Il en résulte que 81 % des plastiques mis en circulation deviennent des déchets au bout d'une année.

II -  UNE POLLUTION QUI NE SE LIMITE PAS AUX
MACROPLASTIQUES

A. UNE POLLUTION VISIBLE : LES MACROPLASTIQUES

• Une pollution difficile à quantifier mais considérable

Un macroplastique est un morceau de plastique dont la taille est supérieure à 5 millimètres.

L'analyse de la production de plastiques et leur destination finale entre 1950 et 2015 1 ( * ) fait ressortir les éléments suivants :

- depuis cette date, la production cumulée de polymères, de fibres synthétiques et d'additifs s'élève à 8,3 milliards de tonnes ;

- 2,5 milliards de tonnes de plastiques (soit 30 % du total) étaient encore en service en 2015 ;

- 5,8 milliards de tonnes étaient devenus des déchets (soit 70 % de la production).

Parmi ces déchets, 79 % (soit 4,6 milliards de tonnes) ont été mis en décharge ou jetés directement dans l'environnement, 12 % ont été incinérés et 9 % ont été recyclés.

Selon une étude 2 ( * ) , 72 % des emballages plastiques ne seraient pas collectés de manière efficace au niveau mondial et finiraient dans l'environnement (soit 114 millions de tonnes en 2018).

• Une pollution qui concerne tous les pays

Les pays en voie de développement sont particulièrement concernés . La quantité de déchets par habitant y est moins importante que dans les pays développés mais la part des déchets mal gérés est considérable. Ainsi cinq pays 3 ( * ) seraient responsables de plus de la moitié des déchets plastiques qui finissent par arriver dans les mers et les océans : la Chine, l'Indonésie, la Thaïlande, les Philippines et le Vietnam. La situation devrait encore s'aggraver puisque selon la Banque mondiale, les volumes de déchets dans la région Asie du Sud-Est/Pacifique pourraient doubler d'ici 2050.

Les pays développés sont également concernés : en dépit de systèmes de collecte plus efficaces, la gestion de la fin de vie « ultime » des déchets reste perfectible. En 2018, 29 millions de tonnes de déchets plastiques ont été collectés dans l'Union européenne dont 24,9 % ont été enfouis . Dans 10 pays, le taux de décharge atteint 50 %. En France, où 900 000 tonnes de déchets plastiques sont enfouies chaque année, le taux de mise en décharge est de 32,5 %. La situation des États-Unis n'est pas meilleure . Sur les 34,5 millions de tonnes de plastiques récoltées dans les ordures ménagères en 2015, seules 9,1 % ont été recyclées ; 75,4 % (soit 31,4 millions de tonnes) ont été mises en décharge.

La pollution plastique liée aux déchets sauvages est difficile à quantifier mais doit également être prise en compte.

Enfin, les exportations de déchets des pays développés vers les pays sans installations de traitement performantes constituent une source considérable de pollution plastique importée. Avant que la Chine interdise ces importations, 12 % du total de ses déchets plastiques étaient importés du reste du monde.

B. UNE POLLUTION INSIDIEUSE : LES MICROPLASTIQUES

La dégradation des plastiques

Abandonnés dans l'environnement, les plastiques se dégradent, selon des cinétiques qui dépendent de facteurs abiotiques (rayons ultra-violets, oxygène, eau) et biotiques (micro-organismes). La dégradation des plastiques se traduit par leur fragmentation en petites particules. Lorsque celles-ci ont une taille inférieure à 5 mm, elles sont appelées microplastiques. Des nanoplastiques (dont la taille est comprise entre 1 nm et 1um) sont également libérés tout au long du vieillissement des plastiques par érosion de leur surface, altérée sur ses premiers micromètres, notamment sous l'effet de l'oxydation. De pollution visible, la pollution plastique devient ainsi invisible.

Les microplastiques se présentent sous différentes formes (fibres, films, granulés, fragments, mousses, microbilles, etc.). On distingue deux catégories de microplastiques :

- les microplastiques primaires, fabriqués intentionnellement par les industriels pour différents usages (particules de gommage contenues dans des produits cosmétiques par exemple). Les fuites de ces microplastiques dans l'environnement se produisent essentiellement au moment de l'utilisation des produits qui les contiennent.

Les granulés plastiques industriels 4 ( * ) sont également des microplastiques primaires. L'agence européenne des produits chimiques chiffre leur perte annuelle à 41 000 tonnes à l'échelle européenne, soit 0,6 % de la production.

- les microplastiques secondaires : ils proviennent de la fragmentation de macrodéchets plastiques sous l'effet de différents facteurs environnementaux. Ils peuvent également résulter de l'usure d'objets en plastique au cours de leur fabrication, de leur utilisation ou de leur entretien (usure des pneumatiques, relargage de fibres lors du lavage de vêtements synthétiques, abrasion des gazons synthétiques, poussières urbaines, etc.).

Pollution par les microplastiques secondaires : les exemples des pneumatiques et des textiles synthétiques

- Les pneus s'érodent à mesure des kilomètres qu'ils parcourent. Un pneu usé pèse deux kilos de moins qu'un pneu neuf. Au niveau mondial, l'érosion des pneumatiques libèrerait chaque année 5,86 millions de tonnes de particules .

- En 2016, 62,1 millions de tonnes de fibres synthétiques ont été produites (dont 54 millions de tonnes pour le polyester) représentant près des deux-tiers du marché des fibres textiles. Le lavage des vêtements libère des fibres (le nombre de fibres libérées diminue avec la répétition des cycles de lavage). L'intensité du relargage des fibres textiles dépend de la méthode de découpe. L'apprêt mécanique subi par le textile joue également un rôle fondamental. Ainsi, le lavage d'un tissu polaire de 400 grammes libère 14 millions de fibres, soit dix fois plus que les autres textiles.

Le relargage de fibres textiles dans l'environnement est évalué au niveau européen entre 18 000 et 46 000 tonnes par an.

La pollution par les microplastiques est difficile à chiffrer mais la part des microplastiques secondaires serait prépondérante. La connaissance encore très partielle des phénomènes de dégradation des plastiques explique l'absence de chiffres validés par des études scientifiques.

C. UNE POLLUTION INVISIBLE ET MAL CONNUE : LES
NANOPLASTIQUES

Les recherches sur les nanoplastiques sont récentes et encore incomplètes. Toutefois, si l'hypothèse de la fragmentation des macrodéchets en nanoplastiques était avérée, elle serait particulièrement préoccupante pour deux raisons. D'une part, le nombre de nanoplastiques dans l'environnement pourrait être considérable, et bien supérieur à celui des macroplastiques et des microplastiques. D'autre part, par analogie avec les propriétés de translocation connues pour d'autres nanoparticules, les nanoplastiques seraient susceptibles de pénétrer dans l'ensemble des organes en traversant la barrière intestinale lorsqu'elles sont ingérées ou la barrière pulmonaire lorsqu'elles sont inhalées.

III - UNE POLLUTION DIFFUSE SUSCEPTIBLE DE CONSTITUER UNE
MENACE POUR LES ÉCOSYSTÈMES ET LA SANTÉ HUMAINE

A. UNE POLLUTION QUI TROUVE SES ORIGINES SUR TERRE
ET EN MER

Si les images de la pollution plastique sont souvent associées à la mer, les activités humaines terrestres en sont majoritairement responsables.

Les activités maritimes y contribuent principalement à travers quatre secteurs : les activités de la pêche et de l'aquaculture ( 640 000 tonnes de filets de pêche seraient abandonnées chaque année dans les océans au niveau mondial) ; le transport maritime (à travers la perte de containers et le rejet sauvage de déchets plastiques en mer) ; les activités de la plaisance ; l'exploration et l'exploitation minières et pétrolières.

Globalement, selon les observations connues, 80 % de la pollution plastique des mers et des océans seraient liés aux activités humaines terrestres, tandis que les activités marines contribueraient à hauteur de 20 %. Cette proportion ne repose toutefois sur aucune étude scientifique.

B. DES POLLUTIONS PONCTUELLES DISPERSÉES SUR
L'ENSEMBLE DU GLOBE

La pollution plastique obéit à un processus dynamique qui peut être schématiquement divisé en trois étapes :

? La première étape correspond aux pertes ou aux fuites de plastiques dans l'environnement. Elles se produisent sur l'ensemble du cycle de vie de ces matières.

? La deuxième étape correspond à la dispersion des plastiques présents dans l'environnement. Cette dispersion se produit sous l'effet :

- des réseaux d'eaux usées ou pluviales : les fibres textiles, les microplastiques issus des cosmétiques et des détergents, certains macroplastiques comme les textiles sanitaires sont transportés par les réseaux d'eaux usées. Les déchets plastiques jetés sur la voie publique, les microplastiques issus de l'abrasion des pneumatiques, des freins et des chaussées routières rejoignent également les réseaux d'eaux pluviales ;

- de l'air et du vent : sont concernées par cette voie de transfert les fibres textiles relarguées par frottement, mais également les poussières urbaines et les particules de pneumatiques. Cette voie de transfert concerne autant les macro que les microdéchets ;

- des retombées atmosphériques (notamment sous l'effet de la pluie et de la neige) : une fois mobilisées dans l'atmosphère sous l'effet du vent, les particules plastiques peuvent retomber à terre avec la pluie ou la neige ;

- des fleuves et des rivières : plusieurs études ont mis en exergue le rôle des fleuves et des rivières dans le transport des plastiques vers les océans. Au niveau mondial, les fleuves rejetteraient entre 6 000 et 7 000 tonnes de microplastiques par an dans les océans avec une répartition équilibrée entre eux. Contrairement aux idées reçues, le processus de fragmentation ne commencerait pas lors de l'arrivée des plastiques dans les océans. Il aurait déjà lieu dans les fleuves et les rivières et la majorité des plastiques transportés par ces derniers seraient sous forme de microplastiques ;

- des courants marins . L'association de l'accumulation des déchets en mer avec les zones de convergence des courants océaniques (gyres) a été faite en 1997 par l'océanographe Charles J. Moore. Cinq zones d'accumulation ont été observées dans le Pacifique Nord, le Pacifique Sud, l'Atlantique Nord, l'Atlantique Sud et l'Océan Indien. Ces vastes mouvements tourbillonnaires s'accompagnent d'un lent flux convergent en surface qui concentre les particules flottantes. Lors de la découverte de l'accumulation de plastiques dans le gyre du Pacifique Nord, certains l'ont qualifiée de septième continent (en raison de sa taille et du nombre considérable de déchets présents). En réalité, il s'agit plutôt d'une « soupe » de plastiques invisible à l'oeil nu (les concentrations de plastiques varient de 678 particules par m² pour ceux compris entre 0,5 et 5 mm à 3,5 par km² pour les déchets dont la taille dépasse 50 cm). Par ailleurs, les déchets accumulés dans les gyres s'élèveraient à 215 000 tonnes alors que 10 à 20 millions de tonnes seraient rejetées dans les océans chaque année. De nombreux chercheurs cherchent une explication à ce qu'ils appellent « le mystère du plastique manquant ».

? La troisième étape correspond à l'arrivée et à l'accumulation des déchets plastiques dans l'un des quatre compartiments que sont les eaux douces, le sol, l'air et les mers et océans. Cette « arrivée » n'est pas toujours définitive et les plastiques peuvent à nouveau être mobilisés pour passer d'un compartiment à un autre.

Les connaissances sur le devenir de la pollution plastique sont encore très parcellaires. Les recherches se sont longtemps focalisées exclusivement sur les océans, puis se sont étendues aux eaux douces. Très récemment, la communauté scientifique s'est saisie de la question de la pollution plastique dans les sols et dans l'air, mais ces champs de recherche restent à approfondir.

C. UNE POLLUTION AUX CONSÉQUENCES MULTIPLES POUR
L'ÉCONOMIE, LA BIODIVERSITÉ ET LA SANTÉ HUMAINE

• Un impact socio-économique certain mais difficile à quantifier

Il est très difficile d'évaluer l'impact économique de la pollution plastique. Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement estime qu'à l'échelle mondiale les dommages annuels causés aux environnements marins atteignent 8 milliards de dollars. Les secteurs les plus impactés sont ceux de la pêche, du tourisme et du transport maritime.

• Un impact sur la biodiversité qui ne se limite pas aux images des étranglements ou des ingestions de plastiques

Les images d'organismes marins morts soit étranglés par des plastiques soit parce qu'ils en avaient ingérés sont très médiatisées. De facto , 1,4 million d'oiseaux et 14 000 mammifères seraient retrouvés morts chaque année en raison de l'ingestion de macroplastiques .

Le risque chimique lié à la pollution par les plastiques mérite une attention sans doute encore plus importante.

Les déchets plastiques peuvent être sources de contaminants (perturbateurs endocriniens, polluants organiques persistants) par le biais des substances chimiques qu'ils contiennent (leurs plastifiants et additifs en particulier) susceptibles d'être relarguées lors de leur séjour dans l'environnement ou dans les organismes.

Des effets toxicologiques variables (sur la physiologie, le métabolisme, le comportement et la reproduction) sont constatés en laboratoire sur différents organismes vivants tels que les coraux, les huîtres ou certains types de poissons. Ces études ne permettent pas de conclure avec certitude sur la nature des impacts des plastiques dans le milieu naturel où l'exposition (de nature chronique) est sensiblement différente de celle simulée au laboratoire (qui s'apparente davantage à une exposition aigüe).

Les déchets plastiques peuvent également être vecteurs de contaminants , en particulier de polluants organiques persistants et auraient ainsi un effet amplificateur de la pollution chimique déjà présente dans l'environnement.

Enfin, les déchets plastiques peuvent servir de supports physiques pour des espèces invasives ou pathogènes. Des travaux récents de l'IFREMER, encore inédits, montrent que des espèces comme les dinoflagellés toxiques ou d'autres pathogènes d'huîtres se fixent sur les plastiques qui les véhiculent et les dispersent dans le milieu marin.

En l'état actuel des connaissances, il est possible d'affirmer que la pollution plastique fait peser un risque sur la biodiversité. En revanche, il reste difficile de quantifier les risques qu'elle fait peser sur la santé humaine.

Compte tenu des prévisions de croissance de la production de plastiques dans les prochaines décennies, du faisceau d'indices démontrant les dangers d'une pollution incontrôlée par les microplastiques et de leur persistance dans l'environnement, il apparaît urgent de faire jouer le principe de précaution et de prendre dès maintenant des mesures adaptées pour lutter contre les fuites de plastiques dans l'environnement.

IV - UNE PRISE DE CONSCIENCE RÉELLE MAIS ENCORE INSUFFISANTE AU REGARD DE L'AMPLEUR DE LA POLLUTION ET DE SES CONSÉQUENCES

A. UNE PRISE DE CONSCIENCE GÉNÉRALE

Le droit international s'est saisi du sujet en adoptant plusieurs conventions pour interdire l'immersion de plastiques dans la mer (convention de Londres, convention Marpol), assurer l'élimination progressive des polluants organiques persistants (convention de Stockholm) et renforcer le contrôle sur les exportations de plastiques contaminés ou en mélange (convention de Bâle).

Afin de dépasser le dilemme d'un matériau devenu indispensable dans de nombreux secteurs de l'économie mais ayant des impacts délétères sur l'environnement, l'Union européenne a mis en place en 2015 un plan d'action en faveur de l'économie circulaire puis, en 2018, une stratégie sur les matières plastiques . Ces textes européens favorisent la réutilisation, le recyclage, la réparation, et la promotion de matériaux plus durables et non toxiques, afin de diminuer la quantité de déchets générés.

La directive du 5 juin 2019 relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits plastiques a accéléré la dynamique en ciblant les plastiques à usages uniques. À partir du 3 juillet 2021, il sera interdit de mettre sur le marché des cotons-tiges, des couverts, des assiettes, des pailles, des bâtonnets mélangeurs, des tiges de ballons de baudruche, des récipients pour aliments et des récipients pour boissons en polystyrène expansé.

Depuis dix ans, La France a également pris une série de mesures législatives 5 ( * ) visant à favoriser la valorisation des déchets plastiques , réduire l'utilisation de plastiques à usage unique et des microplastiques intentionnellement ajoutés, responsabiliser les producteurs, mieux informer les consommateurs et promouvoir le réemploi.

Les collectivités territoriales sont également fortement mobilisées dans la prévention des déchets et le développement de l'économie circulaire.

La société civile n'est pas absente , notamment à travers les associations environnementales. Elle joue un rôle fondamental de lanceur d'alerte sur les risques que fait peser la consommation débridée de plastiques pour l'environnement et la santé humaine.

Soumises à une pression croissante, à la fois des pouvoirs publics et de l'opinion publique, un nombre croissant d'entreprises s'implique dans la réduction de la pollution plastique en fixant à leurs emballages des objectifs de recyclabilité, de réutilisation ou de compostabilité. Toutefois, leur implication varie en fonction de leur taille et des secteurs d'activité.

Enfin, la communauté scientifique française et internationale s'est emparée du sujet de la pollution plastique . Le nombre des travaux est en forte croissance depuis dix ans et les domaines de recherche concernent autant les phénomènes liés aux pollutions plastiques, que leurs conséquences ou la recherche de solutions.

B. DES MESURES À L'EFFICACITÉ QUI INTERROGE

• Une politique longtemps focalisée sur l'amélioration du recyclage

Dans le cadre de l'économie circulaire, le recyclage permet de valoriser les déchets et de les réinjecter dans le processus de production initial. Or, les taux de recyclage des plastiques sont particulièrement médiocres : en France, ils s'élevaient en 2018 à 24,2 % pour l'ensemble des déchets plastiques et, en 2019, à 29 % pour les seuls emballages plastiques. De fortes déperditions sont observées entre, d'une part, les quantités de déchets produites et collectées, d'autre part, les quantités collectées et recyclées. C'est la raison pour laquelle une série de mesures a été prise, dans le cadre de plusieurs lois, pour améliorer le taux de collecte, assurer une plus grande recyclabilité des plastiques, ou encore développer les débouchés des plastiques recyclés. L'objectif recherché est une « massification » et une plus grande efficacité du recyclage .

Néanmoins, le recyclage des plastiques se heurte à plusieurs limites.

- une limite économique liée à l'absence de rentabilité sous l'effet de l'effondrement des prix des résines vierges provoqué par la chute des prix du pétrole ;

- de nombreuses limites techniques : en raison de la dégradation des polymères lors du processus de recyclage mécanique, le procédé n'est pas infini. En outre, de nombreux plastiques ne sont pas recyclables actuellement, du fait de leur caractéristiques (thermodurcissables, multicouches, composites) ;

- des limites réglementaires qui empêchent le recyclage de produits plastiques mis sur le marché il y a parfois plusieurs décennies et fabriqués avec des substances désormais interdites (notion de substances héritées).

• Des politiques de réduction trop timides

La politique de réduction de certains usages des plastiques a commencé en 2016 avec l'interdiction des sacs de caisse. Elle s'est considérablement renforcée à partir de 2020 et devrait aboutir, d'ici 2025, à réduire significativement le nombre d'emballages à usage unique.

Les interdictions de plastiques à usage unique votées dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire

Au 1 er janvier 2021 : interdiction de la distribution gratuite de bouteilles en plastique contenant des boissons dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel ; interdiction des clauses contractuelles imposant la fourniture ou l'utilisation de bouteilles en plastique à usage unique dans le cadre d'événements festifs, culturels ou sportifs.

Au 1 er janvier 2022 : interdiction du conditionnement dans des emballages en plastique des fruits et légumes frais non transformés exposés dans les commerces de détail ; interdiction de la mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable ; interdiction de l'apposition d'étiquettes en plastique sur les fruits et légumes ; interdiction d'expédier les publications de presse dans des emballages plastiques ; interdiction de la mise à disposition gratuite de jouets en plastique dans le cadre de menus destinés aux enfants.

Au 1 er janvier 2025 : interdiction de l'utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique dans les services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires, les établissements d'accueil des enfants de moins de six ans, les services de pédiatrie, d'obstétrique et de maternité.

Enfin, l'article 7 pose comme objectif la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique à usage unique d'ici 2040.

Toutefois, ces mesures sont trop récentes (la plupart ne sont pas encore entrées en vigueur) pour produire des effets et permettre le contrôle de leur efficacité.

Par ailleurs, ces interdictions entrainent des substitutions par d'autres matériaux qui peuvent s'avérer contre-productives, voire dangereuses pour l'environnement et la santé humaine. C'est le cas de la vaisselle en plastiques biosourcés ou en bambou, développée par les industriels pour répondre à l'interdiction des couverts, assiettes et gobelets en plastique à usage unique.

Quant au réemploi des emballages, il fait l'objet d'un foisonnement d'initiatives au niveau local mais il n'existe encore aucun cadre national pour imposer des standards, accélérer le développement d'infrastructures (usines de lavage des bouteilles et des récipients) et fixer une trajectoire aux acteurs privés avec des objectifs chiffrés.

Enfin, la réduction de la pollution chimique par les microplastiques ne fait actuellement l'objet d'aucune stratégie spécifique.

V - LES RECOMMANDATIONS

1. Sensibiliser, éduquer et impliquer les citoyens

• Intégrer dans les parcours scolaires au moins une opération de ramassage de déchets plastiques (plages, bords de routes, berges de rivières) sous forme ludique et instructive pour éveiller les consciences ;

• Intégrer dans toutes les formations supérieures un module sur les matières plastiques et la pollution qu'elles peuvent engendrer ;

• Rendre obligatoire l'affichage en magasin de la possibilité pour le consommateur de laisser les emballages en caisse ;

• Multiplier les nudges « Ici commence la mer » aux abords des avaloirs des réseaux publics d'eau pluviale ;

• Rendre obligatoire, par voie d'étiquetage, l'affichage d'une mention « relargue des microfibres dans l'environnement » pour tous les textiles à base de fibres plastiques ;

• Associer davantage les citoyens à la définition des politiques de lutte contre la pollution plastique ;

• Informer les consommateurs sur les risques associés aux mésusages des contenants plastiques (risques de migration de perturbateurs endocriniens lorsque l'on utilise un contenant alimentaire en plastique en le détournant de la fonction pour laquelle il a été mis sur le marché) ;

• Promouvoir l'utilisation de masques en tissu par les citoyens.

2. Réduire la production de plastiques

• Définir une liste hiérarchisée ordonnée des plastiques à réduire en considérant leur qualité ; leur évitabilité ; leur durée de vie ; leur risque de fuite vers l'environnement ; leur substituabilité ;

• Accélérer l'interdiction des microplastiques intentionnellement ajoutés en les reconnaissant comme des polluants organiques persistants ;

• Utiliser le levier de la commande publique pour amplifier la réduction de la consommation de plastiques ;

• Développer et généraliser les accès à l'eau potable dans l'espace public de manière à réduire le recours aux bouteilles en plastique à usage unique ;

• Accélérer la réduction de la consommation d'emballages plastiques par les entreprises ;

• Accompagner la reconversion des entreprises qui seraient directement impactées par des interdictions de plastiques ;

• Imposer l'utilisation de plastiques biosourcés et compostables dans le secteur des films agricoles ;

• Interdire l'utilisation de polystyrène expansé pour l'emballage des colis, y compris pour les produits frais (poissons) et les objets fragiles.

3. Prévenir les fuites des plastiques dans l'environnement

• Renforcer la réglementation pour éviter les fuites de granulés industriels ;

• Imposer la géolocalisation des engins de pêche industrielle et de tous les conteneurs transportant des granulés ou des plastiques ;

• Favoriser le recours aux équipements de pêche et de conchyliculture en matériaux mono-matière et biodégradables ;

• Renforcer la règlementation sur la certification des pneus en l'élargissant à la prise en compte de l'abrasion des bandes de roulement ;

• Développer une procédure de test standardisé pour mesurer la dispersion des billes des gazons synthétiques et conditionner leur mise sur le marché au respect d'un seuil maximum de dispersion ;

• Interdire les lâchers de ballons ;

• Procéder à l'inventaire des décharges (actuelles et anciennes) ainsi que des lieux d'enfouissement sauvages et mettre en place un plan pour leur élimination progressive ;

• Interdire l'utilisation, dans la formulation de tout plastique, des substances utilisées comme additif ou charges dès lors qu'elles ont été classées par REACH comme substances toxiques, polluants très persistants et bioaccumulables.

4. Favoriser le réemploi

• Subventionner massivement le réemploi ;

• Faciliter le retour de la consigne en verre pour les boissons (en particulier pour les productions de boissons locales), notamment en accélérant le développement d'infrastructures (verrerie, industrie du lavage, etc.) ;

• Élaborer une feuille de route nationale déclinée à l'échelle territoriale sur les contenants alimentaires dans d'autres matières que le plastique ;

• Augmenter au-delà des 2 % actuels la part des contributions perçues par les éco-organismes consacrée au développement du réemploi.

5. Rendre le recyclage plus efficient

• Documenter les flux de déchets par résine en vue de la création de filières de recyclage lorsque les quantités les rendent pertinentes ;

• Interdire dès maintenant la mise en décharge des plastiques bénéficiant d'une filière opérationnelle de recyclage ;

• Imposer des taux de réincorporation par résine et par produit ;

• Mettre en place des incitations fiscales et réglementaires pour encourager l'incorporation de plastiques recyclés ;

• Imposer la transparence sur les additifs utilisés afin de garantir leur traçabilité pour la gestion de fin de vie (tri, recyclage et réincorporation) ;

• Garantir la traçabilité de l'incorporation des matières premières recyclées pour éviter les fraudes ;

• Conditionner la mise sur le marché de tout nouvel emballage plastique à son respect de critères environnementaux (recyclable, compostable ou réutilisable) ;

• Imposer pour le produit final un étiquetage indiquant le pourcentage d'incorporation de matières plastiques recyclées, y compris s'il n'en contient pas (mention « 0 % de plastique recyclé ») ;

• Généraliser l'écoconception de tout objet en plastique, notamment en lui associant une analyse technico-économique du recyclage pour en chiffrer le coût ;

• Faire appliquer la réglementation internationale sur les exportations de déchets plastiques vers les pays tiers en renforçant leur suivi et leur traçabilité.

6. Soutenir l'acquisition des connaissances et la recherche

• Poursuivre les recherches sur les sources des pollutions plastiques, leurs voies de transfert dans l'environnement, notamment dans le sol et l'atmosphère ; renforcer les connaissances sur le devenir des plastiques en étudiant leur vieillissement en conditions naturelles standardisées avec un accent particulier sur les microplastiques et les nanoplastiques ; cartographier la répartition des pollutions à l'échelle du globe ;

• Harmoniser les définitions des microplastiques et des nanoplastiques et standardiser les protocoles de collecte et de mesure des données sur les pollutions plastiques ;

• Mieux connaître les impacts toxiques des microplastiques et développer de nouvelles méthodes d'évaluation des risques intégrant les effets conjugués avec d'autres polluants ;

• Renforcer les recherches sur les transferts de micro et de nanoplastiques dans la chaîne alimentaire ;

• Renforcer le rôle de la science coopérative par le financement d'appels à projets impliquant des organismes de recherche et des associations ;

• Soutenir la recherche en sciences humaines et sociales afin de disposer de données quantitatives et qualitatives sur les pratiques de consommation et de production, sur la perception du risque, sur les mécanismes encourageant l'acceptation du changement, sur la formation et l'évolution des normes sociales, etc. ;

• Favoriser le mécénat d'entreprise en direction de l'environnement afin de faciliter l'augmentation des moyens de la recherche et des associations.

7. Évaluer et contrôler l'application des lois qui intègrent des dispositions relatives à la pollution plastique et s'assurer que les lois adoptées ne soient pas en contradiction avec l'objectif de lutte contre les pollutions plastiques

8. Promouvoir de nouvelles actions à l'échelon européen et international

• Mettre en place, à l'image du GIEC, une plateforme scientifique européenne ou mondiale sur la pollution plastique pour permettre un accès partagé à des données normalisées ;

• Promouvoir un traité mondial visant à réduire la pollution plastique ;

• Faire évoluer la directive cadre sur l'eau afin de prendre en compte la problématique plastique et exiger, qu'à l'instar de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin », les États membres prennent des mesures pour lutter contre les déchets plastiques dans les eaux de surface ;

• Renforcer la réglementation européenne afin de lutter plus efficacement contre les perturbateurs endocriniens.

REMERCIEMENTS

Cette étude est le fruit d'un immense travail. Au-delà de la compilation de plus de deux cents heures d'auditions, de nombreux échanges ont été nécessaires avec les personnes entendues pour obtenir des précisions sur certains chiffres, expliciter certaines affirmations, approfondir certaines hypothèses.

Vos rapporteurs tiennent à remercier toutes les personnes impliquées dans ce dialogue pour leur transparence, leur disponibilité et leur réactivité.

Ils sont particulièrement reconnaissants vis-à-vis de tous les chercheurs qui non seulement ont pris le temps de répondre à leurs multiples sollicitations, mais ont facilité le récolement de données scientifiques souvent éparpillées.

Enfin, ils remercient chaleureusement l'ensemble des personnes qui ont pris le temps de relire ce rapport afin d'en garantir la pertinence scientifique.

INTRODUCTION

Il est difficilement imaginable de concevoir un monde sans plastique. Son extrême polyvalence, sa légèreté associée à sa grande résistance, son coût particulièrement abordable, sa facilité d'entretien en font une matière prisée par les industriels et par les consommateurs. Ses qualités ont permis des innovations technologiques qui n'auraient pas vu le jour sans lui, que ce soit dans le secteur médical, le sport de haut niveau ou le domaine spatial.

Le plastique a considérablement allégé le poids des matériaux, contribuant ainsi à réduire significativement les consommations de carburant et les émissions de CO 2 . C'est la raison pour laquelle il est devenu incontournable dans le secteur du transport.

En garantissant la bonne conservation des aliments, notamment des produits frais, et en supprimant de nombreuses tâches liées à la préparation des repas, il est peu à peu devenu incontournable dans le secteur de l'alimentation, transformant considérablement nos modes de consommation.

Ces propriétés et ces utilisations ont produit son essor extraordinaire. En moins de cent ans, le plastique est devenu le troisième matériau le plus fabriqué au monde après le ciment et l'acier. 359 millions de tonnes ont été produites en 2018, chiffre qui grimpe à 438 millions de tonnes en tenant compte des plastiques présents dans les textiles et les caoutchoucs synthétiques. Au rythme actuel, cette production devrait doubler d'ici à 2050.

Toutefois, cet emballement de la consommation de plastiques a un coût pour l'environnement : chaque minute c'est l'équivalent d'un camion-poubelle de déchets plastiques qui se déverse dans les océans, où ils s'accumulent, des fosses océaniques aux mers les moins fréquentées, perturbant la pêche et le tourisme, menaçant les écosystèmes et la biodiversité (1,4 million d'oiseaux et 14 000 mammifères marins sont retrouvés morts chaque année en raison de l'ingestion de plastiques).

Compte tenu de l'ampleur des enjeux de la pollution plastique, notamment dans les océans, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a saisi, le 30 avril 2019, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques « afin de dresser un état des lieux des risques que cette pollution fait peser pour l'environnement et la santé humaine et animale ainsi que des choix scientifiques et technologiques envisageables pour réduire la production de plastique et éliminer ou recycler les déchets existants » .

Lors de sa réunion du 6 juin 2019, l'Office a nommé Philippe Bolo, député de Maine-et-Loire, et Angèle Préville, sénatrice du Lot, rapporteurs de cette étude.

En présentant une étude de faisabilité le 7 novembre 2019, les rapporteurs ont estimé nécessaire d'élargir le champ de la saisine initiale afin :

- de dresser un état des lieux des connaissances scientifiques sur la pollution plastique pour mieux comprendre son ampleur, sa nature et son origine ;

- d'examiner l'avancement de la recherche sur les impacts de la pollution plastique sur l'environnement, la chaîne alimentaire et la santé humaine.

Afin de réaliser cette étude, vos rapporteurs ont réalisé, entre le 11 septembre 2019 et le 17 juillet 2020, 140 auditions et 19 visites lors de 5 déplacements. Ils ont auditionné 459 personnes :

- associations environnementales ;

- chercheurs ;

- pouvoirs publics aux échelons européen, national et local, ainsi que leurs représentants ;

- Agence du développement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) ; Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) ; Agence de l'eau Loire-Bretagne ;

- représentants de l'ensemble des filières industrielles concernées par le plastique à toutes les étapes de son cycle de vie : de la production des polymères à la fabrication de matières plastiques recyclées, en passant par les metteurs en marché de produits plastiques, à la gestion de leur fin de vie ;

- éco-organismes.

L'épidémie de la Covid-19 a perturbé le mode de travail de vos rapporteurs, notamment en substituant des visioconférences aux rencontres avec les chercheurs dans leurs laboratoires. Par ailleurs, tous les déplacements prévus en Europe et en Chine ont dû être annulés. Toutefois, à l'occasion du colloque franco-américain sur la pollution plastique organisé par la ville du Mans en décembre 2019, vos rapporteurs ont eu l'occasion d'organiser deux tables rondes avec 11 chercheurs américains.

Au cours des auditions, il est rapidement apparu que la pollution plastique ne se réduisait pas à la vision dramatique mais réductrice de déchets plastiques rejetés dans les océans et ingérés par les animaux marins.

De la même manière qu'il existe une grande diversité des matériaux plastiques (I), la pollution plastique est en fait multiforme (II), avec une pollution visible par les macroplastiques, à laquelle s'ajoutent deux autres pollutions plus insidieuses mais tout aussi préoccupantes : la pollution par les microplastiques et la pollution par les nanoplastiques.

Ces pollutions se sont peu à peu disséminées dans tous les compartiments de l'environnement (III). Or, non seulement les plastiques diffusent de nombreuses molécules toxiques et agissent comme une source de pollution diffuse, mais ils servent également de vecteurs pour les polluants organiques persistants, les espèces invasives et les pathogènes : ils sont de plus en plus considérés comme une menace potentielle pour l'environnement et la santé humaine (IV).

Face à cette situation, un nombre croissant d'initiatives est pris par les pouvoirs publics, mais également par les entreprises, sous la pression des opinions publiques et des organisations environnementales, afin de mieux gérer la fin de vie des plastiques, de réduire leur fuite dans l'environnement et de limiter leur toxicité (V).

Toutefois, la lutte contre la pollution plastique reste encore trop axée sur l'amélioration de l'efficacité du recyclage au détriment d'une politique plus volontariste de réduction de la consommation et de développement du réemploi et de la réutilisation (VI).

À l'issue de cette étude, vos rapporteurs proposent huit séries de recommandations (VII) :

- sensibiliser, éduquer et impliquer les citoyens ;

- réduire la production de plastique ;

- prévenir la fuite des plastiques dans l'environnement ;

- favoriser le réemploi ;

- rendre le recyclage plus efficient ;

- soutenir l'acquisition de connaissances et la recherche ;

- évaluer et contrôler l'application des lois qui intègrent des dispositions relatives à la pollution plastique ;

- promouvoir de nouvelles actions à l'échelon européen et international.

I. LA GRANDE DIVERSITÉ DES MATÉRIAUX PLASTIQUES

A. LES PLASTIQUES : DÉFINITION

Les polymères sont des macromolécules de synthèse obtenues par polymérisation ou polycondensation de petites molécules, les monomères. La réaction de polymérisation donne naissance à des chaînes carbonées dont la structure (linéaire, ramifiée, réticulée), la longueur (nombre n d'atomes de carbone réunis de la formule chimique simplifiée CH3-(CH2) n -CH3) et l'assemblage forment des topologies qui déterminent leurs propriétés physiques et chimiques.

Plastique = polymère + charge + plastifiants + autres additifs

Ainsi, pour des plastiques de même nature chimique, il existe des centaines, voire des milliers de formulations différentes.

Tous les polymères ne sont pas synthétiques. De nombreux polymères naturels sont présents dans la nature : polypeptides (collagène, gélatine), polysaccharides (sucres) et polynucléotides (ADN, ARN). Le latex (caoutchouc naturel) est également un polymère naturel produit par l'Hévéa.

B. LA DIVERSITÉ DES POLYMÈRES

Plusieurs critères permettent de classer les matières plastiques : leur procédé de polymérisation, leur structure chimique leur comportement mécanique, leur type d'usage, etc.

1. Les polymères de synthèse : les thermoplastiques ou les thermodurcissables
a) Les thermoplastiques

Sous l'effet de la chaleur, les thermoplastiques se ramollissent, se déforment et peuvent être mis en forme. Après refroidissement, la forme qui leur a été donnée est figée, mais l'opération est réversible. Ainsi, à nouveau chauffés, les thermoplastiques redeviennent malléables et peuvent être remis en forme. Cette caractéristique exclusive des thermoplastiques permet leur recyclabilité mécanique 6 ( * ) .

Parmi les thermoplastiques, on trouve les polymères suivants :

- les polyoléfines tels que le polyéthylène (PE) et le polypropylène (PP). Il faut distinguer deux types de polyéthylène : le polyéthylène basse densité (PEBD) utilisé pour les bouteilles, les jouets, les sacs plastiques, les sacs poubelles, les emballages, les tubes pour le transport du gaz ou de l'eau, et le polyéthylène haute densité (PEHD) utilisés pour les articles de ménage et de cuisine, l'isolation électrique, les emballages alimentaires. Le polypropylène est utilisé principalement pour les films alimentaires et dans la construction automobile (filtres, pare-chocs) ;

- les polyesters linéaires dont le plus connu est le polyéthylène téréphtalate (PET) , qui entre dans la composition de rubans, de composants électroniques et de bouteilles de boisson ;

- les styréniques tels que le polystyrène (PS) utilisé comme emballage alimentaire (pots de yaourts et barquettes) et pour leurs propriétés isolantes (contre-portes de réfrigérateurs ou de congélateurs). La famille des styréniques comprend également le polystyrène expansé (PSE) utilisé comme isolant, barquettes alimentaires ou caisses à poissons isothermes ;

- les vinyliques tels que le chlorure de polyvinyle (PVC). Souple, le PVC permet de fabriquer des tissus enduits pour l'habillement et la maroquinerie, des gaines d'isolation, des rubans adhésifs ou des bâches, des poches à sang et des gants médicaux. Rigide, on l'utilise pour créer des tuyaux d'installations sanitaires, des fenêtres, des volets, des gouttières et des emballages alimentaires ;

- les polyamides (PA), tels que le nylon : ils servent principalement à fabriquer des fibres textiles et des filets de pêche, mais sont également utilisés pour produire des interrupteurs, des prises électriques, des engrenages, des vis, des appareils électro-ménagers, des seringues ou des pièces d'équipement automobile ;

- les polyacryliques et polyméthacryliques : le polyméthacrylate de méthyle (PMMA) permet de produire des fibres synthétiques, des verres de lunettes, des vitrages, des équerres, des règles, des lentilles et divers articles de coiffure. Le polyacrylonitrile (PAN) est notamment utilisé comme fibre synthétique par l'industrie textile ;

- les polycarbonates (PC) : matériaux à usage technique, très rigides et peu combustibles, ils entrent dans la composition des disques compacts, des casques de moto ou des vitrages de sécurité.

Les thermoplastiques représentent 80 % de la consommation de plastiques dans le monde.

b) Les thermodurcissables

À l'inverse des thermoplastiques, les plastiques thermodurcissables ne peuvent pas être fondus pour être réutilisés.

Dans cette catégorie se trouvent les polymères suivants :

- les polyuréthanes (PUR) : ils entrent au coeur de la fabrication d'un grand nombre de produits (mousses, peintures, préservatifs, vernis, colles et autres solutions diverses). Sous une forme thermoplastique élastomère, ils permettent aussi à l'industrie textile de produire du Lycra ;

- les phénoplastes : ils entrent dans la composition de certaines encres d'imprimerie, de mousses, d'abrasifs, de garnitures de freins et d'embrayage ou de peintures diverses ;

- les polyépoxydes : ils sont utilisés pour fabriquer des revêtements, des adhésifs et diverses peintures ;

- les élastomères , qui se caractérisent par leur grande déformabilité, tels que le caoutchouc naturel, le néoprène ou encore les silicones.

2. Les deux origines du carbone des polymères
a) Les polymères issus de carbone fossile

99 % des polymères qui constituent les plastiques proviennent de sources de carbone fossile (dérivés du pétrole et du gaz de schiste principalement).

b) Les polymères issus de carbone renouvelable

La différence entre les polymères fossiles et les polymères biosourcés réside dans l'origine des atomes de carbone constituant leur squelette moléculaire . Alors que le carbone des polymères fossiles est issu des hydrocarbures, celui des polymères biosourcés provient de la biomasse d'origine végétale 7 ( * ) (amidon du blé, pommes de terre ou maïs, cellule extraite du bois, huiles obtenues à partir du tournesol ou encore des chardons) ou animale (les protéines de lait, la kératine).

Il convient de remarquer que les plastiques biosourcés sont souvent composés d'un mélange de molécules fossiles et d'autres issus de la biomasse. Ainsi, la réglementation européenne reconnaît le caractère biosourcé à un sac en plastique à usage unique dès lors qu'il respecte une teneur minimale de 50 % de carbone biosourcé (60 % à partir du 1 er janvier 2025).

Les plastiques biosourcés ont les mêmes propriétés que leur équivalent d'origine fossile.

Par conséquent, si le plastique fossile n'est pas biodégradable (c'est le cas du PE, PP, PVC, PS, ABS, PET, PUR), son homologue biosourcé ne l'est pas non plus.

Le caractère biosourcé d'un polymère est une réponse aux deux enjeux planétaires que sont l'épuisement des ressources fossiles non renouvelables, d'une part, et la dérive climatique provoquée par les émissions de CO 2 associées à l'utilisation du pétrole, d'autre part.

L'origine du carbone végétal utilisé pour produire les polymères biosourcés est importante à considérer 8 ( * ) . Deux écueils doivent être évités : celui de l'utilisation de carbone issu de plantes produites à l'autre bout de la planète (bénéfices CO 2 gommés par les émissions du transport et/ou productions en lien avec des pratiques de déforestation, comme par exemple pour la canne à sucre au Brésil) et celui de la concurrence avec les cultures alimentaires (les coproduits apparaissent plus pertinents à utiliser).

3. Les polymères biodégradables

Le caractère biodégradable ou non d'un polymère est une propriété qui intéresse sa fin de vie et donc sa capacité à persister dans l'environnement s'il vient à s'y trouver au terme de son utilisation.

Plusieurs facteurs influencent le processus de biodégradation :

- des facteurs externes liés aux conditions physiques et chimiques (température, présence d'eau et oxygène, rayonnement ultraviolet, pH) du milieu dans lequel se retrouve le polymère (sol, compost, eau douce, eau de mer) ;

- des facteurs biologiques liés à la présence, ou non, de micro-organismes constituant la microflore et la microfaune de l'environnement. Les plastiques biodégradables sont des plastiques capables d'être attaqués par les micro-organismes pour obtenir la source de carbone indispensable à leur métabolisme 9 ( * ) . Cette aptitude à la biodégradation a été préalablement évaluée et validée pour un milieu donné dans des conditions standardisées de laboratoire ;

- des facteurs intrinsèques au matériau (composition chimique, propriétés de surface telles que l'hydrophilicité ou la rugosité, masse molaire, cristallinité, propriétés thermiques, formulation et structuration, surface spécifique 10 ( * ) ...).

On trouve aujourd'hui des polymères biosourcés et biodégradables par les micro-organismes : l'acide polylactique (PLA), le polyhydroxyalcanoate (PHA). Cette biodégradabilité des plastiques concerne également des polymères dérivés du pétrole : le PBAT (polybutylène adipate-co-téréphtalate), le PBS (polybutylène succinate) et le PCL (polyaprolactone).

Si la biodégradation atteint son terme ultime, la minéralisation complète en composés inorganiques (également dénommée bioassimilation), produit de l'eau, du dioxyde de carbone ou du méthane (selon les conditions d'oxygénation du milieu, aérobies ou anaérobies), de l'ATP 11 ( * ) et un accroissement de la biomasse des micro-organismes.

Dans la pratique, la minéralisation ultime des plastiques biodégradables dans l'environnement (milieu ouvert) n'est pas démontrée car son évaluation nécessite l'utilisation d'un milieu fermé (dosage de l'O 2 consommé ou du CO 2 libéré).

La biodégradabilité est mesurable par des tests utilisés pour définir et contrôler les normes de biodégradabilité. Actuellement, les normes de spécification qui fixent les exigences de biodégradation à atteindre afin qu'un plastique soit reconnu comme biodégradable sont associées à trois milieux particuliers :

- industriel : la biodégradation (dénommée compostage) est effectuée sur des plateformes dédiées où les conditions de température (58°C +/- 2°C) et d'humidité sont rigoureusement contrôlées. Le seuil de biodégradation doit être supérieur à 90 % sur une période de six mois (ces conditions définissent la norme NF EN 13 432) ;

- domestique : la biodégradation du plastique (compostage) intervient dans des conditions peu ou non contrôlées et à une température de 25°C (+/- 5°C). Le seuil de biodégradation doit être supérieur à 90 % sur une période de douze mois (ces conditions déterminent la norme NFT 51 - 800) ;

- dans le sol 12 ( * ) . Cette biodégradation (compostage) concerne les films utilisés pour le paillage en agriculture et en horticulture. Le seuil de biodégradation doit être supérieur à 90 % sur une période de vingt-quatre mois (ces conditions déterminent la norme NF EN 17 033).

En revanche, aucun matériau plastique n'a été certifié biodégradable dans l'eau douce ou dans l'eau de mer sur la base de normes nationales ou internationales actuellement en vigueur. De même, les conditions de biodégradabilité dans les sols sont très restrictives puisque la température doit osciller entre 20 et 28°C.

Le caractère biodégradable d'un polymère est une réponse aux deux enjeux de gestion des déchets et de devenir des plastiques présents dans l'environnement.

4. Les biopolymères

Certains polymères sont à la fois biosourcés et biodégradables. Ils peuvent dès lors être qualifiés de biopolymères (bioplastiques).

En 2019, 1,17 million de tonnes de plastiques biosourcés et biodégradables et 941 000 tonnes de plastiques biosourcés non dégradables ont été produites. Par conséquent, seuls 55 % des plastiques biosourcés sont réellement des bioplastiques.

Les polymères biosourcés, les polymères biodégradables
et les biopolymères

Plastiques biosourcés

Plastiques biodégradables

Source : Emmanuelle Gastaldi, Joint Research Unit Agro-polymers Engineering and Emerging Technologies - UMR 1208 IATE, Campus INRA SupAgro Montpellier.

C. LES CARACTÉRISTIQUES DES PLASTIQUES

1. Les propriétés communes à l'ensemble des plastiques

Tous les plastiques sont légers, stables, isolants, résistants aux chocs et à la corrosion.

Les plastiques sont des matériaux extrêmement polyvalents ; la variété de leurs formes et de leurs couleurs, leurs propriétés de souplesse ou de rigidité les rendent aptes à toute une série de fonctions, d'applications et d'utilisations.

La densité relativement faible de la plupart des plastiques les rend légers , ce qui facilite leur manutention et réduit la consommation de carburants au moment de leur transport. Cette légèreté ne s'oppose pas à une bonne ténacité et résistance. Un sac plastique ne contenant pas plus de 3 grammes de polymère peut, par exemple, porter jusqu'à 3 kg, soit 1 000 fois son poids !

Plusieurs polymères présentent d'excellentes propriétés d'isolation thermique et électrique , même si d'autres peuvent être conçus pour conduire l'électricité le cas échéant.

Ils sont plus résistants à la corrosion provoquée par de nombreuses substances qui attaquent d'autres matériaux et sont, à ce titre, plus durables, ce qui leur ouvre la voie vers des applications dans des environnements hostiles, sans avoir nécessairement besoin d'une protection spécifique comme un traitement de surface, une peinture ou une protection cathodique.

En raison de leurs propriétés d'imperméabilité, les plastiques sont très utilisés dans le domaine de l'emballage alimentaire : c'est le seul matériau qui permette une conservation sous atmosphère modifiée de l'aliment qu'il contient.

La combinaison des propriétés des plastiques peut en faire des matériaux difficilement substituables dans certains domaines.

Ce rapide panorama des nombreuses propriétés des plastiques est en évolution constante, en conséquence de développements qui en font des matériaux de plus en plus sophistiqués.

Enfin, le plastique est une matière première bon marché dont le prix est fortement corrélé à celui du pétrole.

2. Une grande variété de formulations

Les matières plastiques sont constituées d'un polymère auquel on a additionné des composants chimiques dans le but :

- de leur conférer des caractéristiques physiques et chimiques recherchées pour les produits finis ;

- de faciliter la transformation de la matière plastique au cours de sa fabrication ;

- d'en réduire le coût de production et le prix de vente.

En pratique, on distingue plusieurs catégories de composants auxiliaires :

- les additifs destinés à freiner la dégradation des matières plastiques (ignifugeants, antioxydants, stabilisants, biocides, etc.) qui font d'eux des matériaux conçus pour durer (ce qui n'est pas sans poser des problèmes lorsqu'ils se retrouvent dans la nature) ;

- les additifs fonctionnels (agents antistatiques, plastifiants, lubrifiants, agents de glissement, agents de durcissement, agents moussants etc.) ;

- les additifs colorants (pigments, azocolorants solubles, etc.) ;

- les charges (mica, talk, kaolin, argile, carbonate de calcium, sulfate de baryum, etc.) ;

- les renforts (fibres de verre, fibres de carbone, etc.).

Par ailleurs, les polymères peuvent contenir des substances non intentionnellement ajoutées, qui sont définies comme des impuretés présentes dans les substances utilisées, intermédiaires de réaction formés au cours des réactions chimiques ou produits de décomposition ou de réaction (catalyseurs 13 ( * ) , monomères, oligomères, solvants résiduels, etc.).

Tous ces produits constituent une large gamme de composés chimiques plus ou moins toxiques. Leur proportion respective dans les résines est très variable, suivant la nature du composant auxiliaire et la résine considérée. Leur concentration peut aller de quelques %o à plus de 100 % du poids de la résine de base.

La présence des précurseurs monomères, des catalysateurs et solvants de polymérisation ainsi que des additifs (plastifiants, retardateurs de flamme, stabilisants, pigments, etc.) présente un risque potentiellement de migration dans l'air, dans l'eau et vers d'autres supports avec lesquels ils sont en contact, dont la nourriture.

L'exemple des plastifiants et des ignifugeants illustre cette toxicité potentielle.

Les plastifiants peuvent représenter jusqu'à plus de 100 % du poids du polymère d'une matière plastique afin d'en améliorer la souplesse, la tenue aux chocs et aux basses températures. Parmi eux figurent les phtalates, reconnus comme perturbateurs endocriniens. Or, la plupart des plastifiants sont susceptibles de migrer vers la surface de l'objet fini, de s'évaporer dans l'air ou d'être en partie dissous dans l'eau ou d'autres liquides en contact avec la matière plastique.

Les ignifugeants rendent plus difficile l'inflammation de la matière, diminuent la vitesse de propagation de la flamme et peuvent, dans les meilleurs des cas, provoquer l'arrêt spontané de la combustion. Toutefois, les retardateurs de flammes perfluorés ou polybromés sont des perturbateurs endocriniens qui se photodégradent rapidement et s'échappent donc dans l'environnement.

Selon l'Agence européenne des produits chimiques, sur les 906 substances chimiques recensées dans les emballages plastiques, 63 sont considérées comme dangereuses pour la santé humaine et 68 pour l'environnement.

Les phénomènes de migration

Les emballages alimentaires plastiques sont rarement complètement inertes. L'interaction entre le contenant et le contenu peut aboutir à des transferts de molécules depuis la matrice des emballages vers les aliments ou, inversement, des aliments vers l'emballage plastique. Ces phénomènes sont susceptibles d'altérer la qualité de l'aliment, de détériorer les propriétés mécaniques de l'emballage et de causer des problèmes toxicologiques.

La migration d'une substance est régie par les lois de la thermodynamique et des équilibres chimiques. Différents paramètres déterminent l'intensité de la migration : la nature de l'aliment au contact du plastique (teneur en lipides, teneur en eau), la concentration de la substance dans le plastique, la structure du polymère et la présence de vide qui favorise la migration via ces espaces libres, l'épaisseur de l'emballage, sa géométrie, la température et le temps de contact.

Concrètement, plus le rapport surface de matériau /volume d'aliment est grand, plus la migration sera importante.

La migration vers l'aliment n'est pas le fait du polymère, mais des monomères, des additifs, des auxiliaires technologiques, des impuretés, des produits de réaction et des produits de dégradation de la matière plastique. Ainsi, le PVC peut libérer des phtalates, le polycarbonate du bisphénol A, le polystyrène du styrène.

Le r èglement (CE) n° 1935/2004 du parlement et du conseil du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec des denrées définit les critères d'aptitude au contact alimentaire. L'article 3 prévoit notamment que les matériaux doivent être suffisamment inertes pour ne pas céder aux aliments des substances en quantités susceptibles de présenter un danger pour la santé humaine ; de modifier les caractéristiques organoleptiques des aliments ou d'altérer leur composition.

Ce principe d'inertie est exprimé en termes de limite de migration globale et de limite de migration spécifique. La migration globale correspond à la somme des migrations des composés qui constituent le matériau ou l'objet. La limite de migration spécifique est quant à elle définie pour le composé individuel.

D. UNE PRODUCTION EXPONENTIELLE DE PLASTIQUES

1. Une production récente en forte croissance

Le plastique est une invention récente. Si les premiers plastiques synthétiques sont apparus au début du XX e siècle 14 ( * ) (scotch et nylon ont été inventés dans les années 1930) et à la sortie de la Seconde Guerre mondiale, il faut attendre les années 1950 pour que le plastique se généralise dans de nombreux objets de la vie quotidienne (textiles, jouets, emballages, etc.).

Sa production a connu un essor considérable passant de deux millions de tonnes au début des années 1950 à 438 millions de tonnes en 2018 15 ( * ) . Il est aujourd'hui le troisième matériau le plus fabriqué au monde , après le ciment et l'acier. Il s'est imposé sur le verre, le bois, le carton, le papier et d'autres métaux en raison de son faible coût de production et de ses propriétés (cf. supra ).

La production de plastiques a littéralement explosé depuis les quinze dernières années. On estime que sur les 7,8 milliards de tonnes produites entre 1950 et 2015, 3,9 milliards de tonnes, soit plus de la moitié, l'ont été depuis 2002.

La croissance de la production plastique devrait encore s'accentuer puisque, selon les projections, plus de 600 millions de tonnes de plastiques pourraient être produites en 2025.

La production mondiale de plastiques

(en millions de tonnes)

2. Des durées d'utilisation variables selon les usages

Les plastiques sont omniprésents dans tous les secteurs de l'activité économique et de notre quotidien, mais leur durée d'utilisation varie fortement en fonction des usages.

Certains produits ont des durées de vie de plusieurs dizaines d'années. Cela concerne en premier lieu le secteur du bâtiment et des travaux publics : les canalisations, les fenêtres, les isolations thermiques, les câbles extérieurs, les revêtements de sol ont des durées de vie comprises entre trente et plus de cinquante ans.

Les plastiques techniques utilisés pour les équipements industriels ont également des durées de vie qui dépassent les vingt ans .

Les plastiques sont par ailleurs devenus incontournables dans le secteur du transport (voitures, trains, avions, bateaux). Depuis les années 1970, la quantité des plastiques présente dans les avions est passée de 4 % à 50 %. La durée de vie des flottes varie fortement selon les compagnies aériennes, mais on peut estimer qu'un avion vole au moins une dizaine d'années .

Moins lourds que l'acier, plus résistants à l'impact et au vieillissement, les plastiques se sont imposés dans le secteur de l'automobile pour représenter désormais 20 % de la masse globale d'un véhicule (250 à 300 kg de plastique par voiture) :

• 50 % sont présents dans la carrosserie ;

• 40 % dans l'habitacle (tableaux de bord, appuie-têtes, sièges, airbags, ceintures de sécurité, etc.) ;

• 10 % dans le moteur.

La durée de vie des plastiques est fortement liée à celle des véhicules, soit en moyenne un peu plus de neuf ans en France.

Des câbles électriques aux smartphones ou aux appareils électroménagers complexes, les plastiques sont devenus des matières premières indispensables pour tous les équipements électriques et électroniques. Les durées de vie sont variables selon les produits : quinze à dix-huit mois pour un smartphone, trois à cinq ans pour un ordinateur portable, onze ans pour une machine à laver et treize ans pour un réfrigérateur.

Bon marché, résistantes, élastiques, peu absorbantes, imperméables et séchant donc rapidement, les fibres synthétiques confèrent aux tissus des propriétés inégalées par les fibres naturelles. Elles représentent désormais 2/3 du marché des fibres textiles. Selon la fondation Henrich Böll 16 ( * ) , les textiles auraient une durée de vie moyenne de cinq ans . Toutefois, le développement de la « mode rapide » avec le renouvellement des vêtements plusieurs fois par an, voire par mois, tend à réduire la durée de vie des textiles. Selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, depuis 2002, le nombre d'habits achetés par an aurait augmenté de 60 % et leur durée de vie aurait été diminuée par deux. Ainsi, la durée de vie moyenne d'un T-shirt dans le monde serait seulement de 35 jours.

Les plastiques se sont également imposés dans nos cuisines, nos intérieurs, notre hygiène et nos loisirs : ustensiles de cuisine (passoires, essoreuses à salade, spatules, manches de poêle, poubelles, bocaux, etc.), produits pour l'hygiène et la beauté (brosses à dents, brosses à cheveux, miroirs, etc.), articles pour la maison (lampes, cadres, objets de décoration, tapis, balais, etc.), articles de sport (raquettes, ballons, skis, planches à voile, lunettes, etc.), de bricolage (vis, cordes, caisses, robinetterie, peintures, etc.) et de jardin (tuyaux d'arrosage, meubles, outils, etc.), jouets (90 % sont en plastique). Les durées d'utilisation des plastiques de biens de consommation sont très variables selon les objets. Selon la fondation Henrich Böll précitée, la durée moyenne d'utilisation serait de trois ans .

Les plastiques sont la matière première emblématique de très nombreux objets à usage unique . Le secteur de l'emballage alimentaire est particulièrement concerné : boissons, produits laitiers, céréales, pâtes et riz, viandes et poissons, produits surgelés, plats préparés, viennoiseries... Les emballages plastiques sont omniprésents. En dehors du domicile, ils sont également utilisés pour la vente à emporter. En dépit du manque de statistiques fiables sur la durée moyenne d'utilisation des emballages alimentaires, il est évident que pour de très nombreux produits, elle est inférieure à un mois, voire à quelques minutes , notamment pour la vente hors domicile.

L'emballage ne concerne pas seulement le secteur alimentaire. Le secteur de la cosmétique et de l'hygiène est lui aussi devenu un grand utilisateur de contenants plastiques (flacons, pots, bouteilles, etc.). Cette tendance a été accentuée par le développement de produits liquides (savons, lessives, etc.) et de dosettes individuelles, au détriment des produits solides, traditionnellement emballés dans du papier. La durée moyenne d'utilisation des plastiques dans le secteur de la cosmétique et de l'hygiène est de quelques mois .

Les plastiques à usage unique sont également très présents dans le secteur de l'agriculture (films de paillage, clips, emballages pour les semences, les engrais, les produits phytosanitaires, etc.). Leur durée de vie varie entre quelques semaines et quelques mois .

Enfin, certains dispositifs médicaux utilisent exclusivement du plastique pour des raisons de facilité d'utilisation, tels que les pansements, les seringues, les cathéters, les poches souples, les gants, les masques, etc. Leur durée de vie est extrêmement courte et varie de quelques minutes à quelques jours .

Globalement, considérant les différents usages, leurs volumes et leurs durées de vie respectifs, 81 % des plastiques mis en circulation deviennent des déchets au bout d'une année.

Évolution de la production de plastiques par terrien
entre 1950 et 2015

(en kg par habitant)

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

En comparant la population mondiale (en millions d'habitants) et la production de plastiques (en tonnes) entre 1950 et 2015, il est possible de calculer la quantité de plastique produite chaque année par terrien.

En 1950, l'industrie du plastique produisait moins de 1 kg de matière par habitant (0,8 kg/hab) contre 45 kg par habitant 60 ans plus tard, en 2010. Sur la période 1990-2010, l'analyse montre que la quantité de plastique par terrien double, passant de 22,5 kg par habitant à 45 kg par habitant. Plus récemment, en 2015, la quantité de plastiques produite par habitant s'établit à 52 kg. En faisant l'hypothèse que cette valeur viendrait à se stabiliser et en considérant par ailleurs l'espérance de vie des terriens (66 ans pour les hommes et 71 ans pour les femmes), la production totale de plastique sur la durée de vie d'un humain varierait entre 3,4 et 3,7 tonnes de plastiques .

Utilisation des résines selon les usages

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

3. Une production sous l'influence des plastiques à usage unique

Évolution de la production de plastiques par secteur d'activité
entre 1950 et 2015

(en millions de tonnes)

Source : Geyer, R., Jambeck, J. R., & Law, K. L. (2017). Production, use, and fate of all plastics ever made. Science Advances, 3(7).

La forte croissance de la production plastique est tirée par l'essor du secteur de l'emballage , qui, avec une part de marché de 36 % au niveau mondial (soit une production de 158 millions de tonnes de plastiques en 2018), constitue leur premier débouché . En France, la part des emballages dans la consommation de plastiques s'est élevée à 46,3 % en 2018, contre 39,9 % en moyenne au niveau de l'Union européenne. Cette différence s'explique, notamment, par la forte consommation en France d'eaux minérales conditionnées dans des bouteilles plastiques à usage unique 17 ( * ) .

Sources : PlasticsEurope, Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Alors que la croissance mondiale de la production plastique est déjà très dynamique tous secteurs confondus (+ 7,1 % entre 2015 et 2018), elle atteint + 7,6 % pour les emballages.

Selon la fondation Ellen Mac Arthur, la production des emballages plastiques devrait quadrupler d'ici à 2050, pour atteindre 318 millions de tonnes 18 ( * ) .

Conçu à l'origine comme un matériau résistant et de longue durée, le plastique est désormais largement utilisé pour des usages uniques de très courte durée.

Au cours de leurs auditions, vos rapporteurs ont entendu de nombreux arguments justifiant l'essor des plastiques à usage unique dans le domaine de l'emballage. Ils peuvent être résumés de la manière suivante :

- les plastiques à usage unique apportent des réponses aux changements des modes de vie : le développement du travail féminin, la place accrue accordée aux loisirs limitent le temps consacré aux repas : le « prêt à consommer » permet de gagner du temps. Par ailleurs, l'urbanisation de la société et la réduction de la taille des ménages encouragent la croissance de la vente à emporter et de la livraison à domicile, particulièrement prisées par les jeunes générations ;

- les plastiques à usage unique limitent les émissions de gaz à effet de serre : selon une étude commandée par PlasticsEurope 19 ( * ) , le remplacement des plastiques d'emballage par des matériaux de substitution (verre, aluminium, carton, etc.) multiplierait le poids des emballages par 3,6 et, par conséquence sur l'ensemble du cycle de vie, la consommation d'énergie par 2,2 et les émissions de gaz à effet de serre par 2,7 ;

- les plastiques à usage unique contribuent à la réduction du gaspillage alimentaire et à la lutte contre les risques d'altération microbiologique des aliments périssables : les emballages allongent la durée de vie des aliments (hermétiques et étanches, ils font barrière à la lumière, à l'oxygène et à l'eau) et facilitent leur consommation au moyen du portionnement. L'exemple des biscuits jetés avant d'être consommés parce qu'ils ont perdu leur qualité organoleptique a souvent été avancé pour défendre l'individualisation des portions. Au-delà de l'alimentation, l'association française des industries de la détergence a également insisté sur l'intérêt des doses individuelles pour les machines à laver ou les lave-linges qui éviteraient d'utiliser trop de produit ;

- les plastiques à usage unique permettent de mieux respecter les normes d'hygiène et de sécurité. De facto , ce sont souvent les réglementations liées à l'hygiène qui expliquent le développement de l'utilisation du plastique à usage unique dans les cuisines, dans les hôpitaux, dans la livraison du linge pour ne citer que ces trois exemples. Rappelons qu'avant l'avènement des emballages alimentaires en plastique, les aliments impropres à la consommation, en raison de leur mauvaise qualité sanitaire, provoquaient un nombre important de décès par intoxication (10 000 morts en 1982 au niveau national). Plus récemment, ce sont des plastiques à usage unique (masques, gants, blouses, coiffes, etc.) qui ont été commandés par centaines de milliards par les pouvoirs publics afin de se protéger contre l'épidémie de la Covid-19.

II. UNE POLLUTION QUI NE SE LIMITE PAS AUX MACROPLASTIQUES

A. UNE POLLUTION VISIBLE : LES MACROPLASTIQUES

On appelle macroplastique tout morceau de plastique dont la taille est supérieure à 5 mm.

Tous les plastiques ne contribuent pas à l'apparition de macrodéchets dans l'environnement. De nombreux plastiques s'intègrent dans une chaîne de valeur qui prévoit leur gestion en fin de vie. Ce sont les plastiques mal gérés que l'on retrouve dans la nature et qui sont à l'origine des macrodéchets évoqués ici ; en particulier les plastiques à usage unique et ceux utilisés pour l'emballage alimentaire de produits consommés hors domicile.

1. Un manque de données qui entretient des zones d'ombre sur la quantité de macrodéchets plastiques dans l'environnement

Vos rapporteurs tiennent à souligner les manques en matière d'informations chiffrées validées par les pairs et actualisées sur des sujets aussi essentiels que les déchets plastiques et leur gestion au niveau mondial. Sans ces informations il apparaît particulièrement difficile de quantifier la pollution plastique.

À l'issue de leurs auditions, mais également à la lecture des nombreuses études parues sur le sujet, ils constatent que l'ensemble de la communauté scientifique reprend systématiquement les résultats de deux articles écrits par Jenna Jambeck et Roland Geyer :

- l'un, datant de 2015, sur les trajectoires des déchets plastiques de la terre vers l'océan ;

- le second, de 2017, sur la production, l'utilisation et le devenir de tous les plastiques fabriqués jusqu'à présent.

Sans remettre en cause l'intérêt scientifique de ces études, il convient de remarquer leurs limites, notamment en ce qui concerne la première. En effet, ses résultats s'appuient sur des données de 2010 qui n'ont jamais été actualisées depuis la publication de l'article, qu'il s'agisse du volume de la production de plastiques, du total des déchets par pays, de la part des plastiques dans les déchets totaux, de la taille de la population, du niveau de revenu par habitant ou encore de la concentration de la population dans les régions côtières.

En l'absence d'autres sources scientifiques, vos rapporteurs ont également repris les chiffres avancés par deux associations, le WWF et la fondation Ellen Mac Arthur (voir infra ), tout en ayant conscience que certaines modélisations utilisées par ces associations s'inspirent en partie des deux études scientifiques précitées.

2. Une accumulation de déchets sans précédent dans l'histoire de l'humanité

L'étude américaine précitée de 2017 20 ( * ) a analysé la production de plastique et sa destination finale entre 1950 et 2015. Il en ressort les éléments suivants :

- la production cumulée de polymères, de fibres synthétiques et d'additifs s'élève à 8,3 milliards de tonnes ;

- 2,5 milliards de tonnes de plastiques (soit 30 % du total) étaient encore en service en 2015 ;

- 5,8 milliards de tonnes étaient devenus des déchets (soit 70 % de la consommation).

Parmi ceux-ci, 79 % ( soit 4,6 milliards de tonnes) ont soit été mis en décharge, soit jetés directement dans l'environnement ; 9 % de ces déchets ont été recyclés ; et 12 % ont été incinérés.

3. Une explosion des déchets plastiques qui n'épargne aucun pays

Selon un rapport du WWF 21 ( * ) , la production de plastiques aurait atteint 396 millions de tonnes en 2016. 310 millions de tonnes de déchets auraient été générés la même année, soit l'équivalent de 78 % de la production ! Une autre source 22 ( * ) estime la quantité de déchets plastiques produits en 2016 à 61 % de la production de l'année. Ces deux approches démontrent l'importance du flux de déchets plastiques. La fin de vie de 37 % de ces déchets serait gérée de manière inefficace. Ainsi, plus de 100 millions de tonnes de déchets plastiques finiraient chaque année dans l'environnement.

Dans un autre rapport sur la pollution en Méditerranée 23 ( * ) , le WWF évalue la mise en service annuelle de plastiques 24 ( * ) autour de la Méditerranée à 37 millions de tonnes. Parallèlement, 24 millions de tonnes de déchets plastiques seraient générés, soit 65 % de la production. Plus du quart des déchets plastiques produits par les États autour de la Méditerranée (6,6 millions de tonnes) finirait dans l'environnement faute d'une gestion de leur fin de vie adéquate.

Le rapport de la fondation Ellen Mac Arthur précité se concentre uniquement sur les emballages plastiques. Compte tenu de leur faible durée de vie (moins d'un an), leur volume de production est assimilé au volume de déchets produits. Le rapport estime que 72 % des emballages plastiques ne sont pas collectés de manière efficace : 32 % d'entre eux échapperaient à tout système de collecte tandis que 40 % seraient accumulés dans des décharges à ciel ouvert non contrôlées.

Comme il a été vu précédemment, la production d'emballages plastiques a atteint 158 millions de tonnes en 2018. Près de 114 millions de tonnes d'emballages plastiques se seraient donc retrouvés dans l'environnement cette année-là.

Si ces chiffres sont très loin de constituer une science exacte, ils donnent néanmoins un ordre de grandeur et témoignent de l'ampleur de la pollution de l'environnement par des déchets plastiques mal gérés.

a) Les pays développés n'échappent pas à ce fléau
(1) Une gestion des déchets encore perfectible

Les pays riches produisent plus de déchets plastiques que les pays pauvres. L'Allemagne, par exemple, produit dix fois plus de déchets plastiques par habitant que le Mozambique.

De même, la zone géographique Amérique du Nord (USA/Canada/Bermudes) représente 5 % de la population mondiale mais produit 14 % des déchets (289 millions de tonnes, soit 2,21 kg par habitant et par jour). Les déchets plastiques représentant 12 % des déchets totaux, ce sont près de 35 millions de déchets plastiques qui sont produits annuellement par les ménages dans cette zone.

Contrairement aux pays en voie de développement, la plupart des pays développés disposent de systèmes de collecte des déchets efficaces, qui réduisent fortement les « fuites » dans l'environnement.

Pour autant, la gestion de la fin de vie « ultime » des déchets reste encore perfectible.

En 2018, 29 25 ( * ) millions de tonnes de déchets plastiques ont été collectés dans l'Union européenne et 75,1 % de ces déchets ont été valorisés dont 32,5 % par recyclage et 42,6 % par valorisation énergétique. Toutefois, 24,9 % ont été enfouis .

Ces chiffres sont très variables d'un pays à l'autre. Le taux de décharge varie de 0 % en Suisse, en Autriche et aux Pays-Bas à plus de 70 % à Chypre, en Grèce ou à Malte. Dans 10 pays de l'Union européenne, le taux de décharge atteint 50 %.

En France où 900 000 tonnes de déchets plastiques sont enfouies chaque année, le taux de mise en décharge est de 32,5 %, soit 7,6 points de plus que la moyenne européenne.

La situation des États-Unis n'est pas meilleure . Certes, le ramassage des ordures est assuré sur tout le territoire. Toutefois, sur les 34,5 millions de tonnes de plastiques récoltés dans les ordures ménagères en 2015, seuls 9,1 % ont été recyclées. Pour le reste, 15,5 % (soit 5,35 millions de tonnes) ont été brûlés avec valorisation énergétique et 75,4 % (soit 31,4 millions de tonnes) ont été mis en décharge.

(2) Des mauvaises habitudes qui contribuent à la pollution plastique

Au-delà des déchets mal gérés, il convient d'évoquer les déchets sauvages. L'Ademe les définit comme des déchets abandonnés dans l'environnement de manière inadéquate (au lieu d'être jetés dans les poubelles du service public, apportés en déchèterie publique ou professionnelle, rapportés à domicile ou confiés à des prestataires de traitement dans le cadre des déchets dits professionnels), volontairement ou par négligence, dans des zones accessibles au public ou sur des terrains privés avec ou sans le consentement du propriétaire. Il peut s'agir de dépôts concentrés (en tas comme les déchets issus de chantier par exemple) ou de dépôts diffus (mégots, bouteilles plastiques, emballages, etc.).

Selon l'Ademe, plusieurs dizaines de milliers de tonnes partent en déchets sauvages chaque année.

La part des déchets plastiques dans les déchets sauvages n'est pas facile à déterminer.

Les deux études suivantes ne permettent pas de caractériser les déchets sauvages mais apportent un éclairage intéressant.

Les sociétés d'autoroute font régulièrement des campagnes de caractérisation des déchets sur des portions d'autoroute dont elles ont la gestion. À la suite des campagnes menées en 2017 et 2018 par Vinci Autoroutes, il a été constaté qu'entre le tiers et la moitié des déchets retrouvés le long des autoroutes sont des bouteilles en plastique (86 bouteilles par km par an).

En 2006, l'association des sociétés françaises d'autoroute avait également mené une enquête. 44,8 % des déchets retrouvés le long des autoroutes étaient des gobelets, des emballages, des paquets de cigarettes et des mouchoirs et 33,6 % étaient des bouteilles en plastique. Ces déchets se concentrent sur des zones particulières, telles que les zones d'accélération et de décélération, surtout en sortie d'aires de service.

En fonction des zones choisies et des périodes, le poids des déchets retrouvés le long des autoroutes varie d'une dizaine de kg par km et par an à 20 kg par km et par an.

Une étude récente 26 ( * ) a développé un modèle pour analyser les flux d'émissions de plastiques dans l'environnement pour les sept polymères 27 ( * ) les plus utilisés en Suisse.

Il en ressort les informations suivantes.

Tous polymères confondus, en Suisse, 540 grammes de macroplastiques par habitant (soit 4 423 tonnes en évaluant la population suisse à 8,19 millions d'habitants) sont rejetés chaque année dans le sol et 13,3 grammes dans l'eau (soit 119 tonnes au total).

Le polymère qu'on retrouve le plus dans l'environnement est le PET (200 grammes par habitant, donc 1 638 tonnes pour l'ensemble de la population suisse ), puis le PP (126 gramme par habitant, soit 1 031 tonnes au total), le PEBD (94 grammes par habitant, soit 770 tonnes au total), le PEHD (98 grammes par habitant, soit 803 tonnes au total), le PVC (65 grammes par habitant, soit 532 tonnes au total), le PS (24 grammes par habitant, soit 197 tonnes au total) et le PSE (16 grammes par habitant, soit 1 032 tonnes au total).

Selon l'étude, l'importance de la pollution par le PET est liée aux bouteilles plastiques , dont 35 % sont consommées à l'extérieur du domicile et dont le risque d'être jetées dans la nature est important. Sept sources d'émissions 28 ( * ) sont répertoriées, la première étant liée à la consommation nomade.

Devant la difficulté d'établir des statistiques sur ce type de déchets, le taux retenu ne peut qu'être arbitraire. Dans l'étude de 2015 de Roland Geyer et Jenna Jambeck précitée, la proportion de déchets volontairement abandonnés a été fixée à 2 % de l'ensemble des déchets plastiques mondiaux. Il est généralement repris tel quel dans la plupart des études qui souhaitent quantifier les déchets sauvages.

Les décharges sauvages sont souvent composées de déchets de chantier, d'appareils électroménagers, de carcasses d'automobiles. Tous ces déchets contiennent du plastique mélangé à d'autres matériaux.

b) Les pays en voie de développement particulièrement touchés

Selon le rapport de la Banque mondiale précité 29 ( * ) , au niveau mondial, 33 % des déchets s'entassent directement dans l'environnement, 37 % sont mis en décharge (dont seulement 8 % d'entre elles seraient soumises à des modalités réglementaires d'exploitation visant à en maîtriser les impacts environnementaux), 19 % sont recyclés ou compostés et 11 % sont incinérés.

Ces pourcentages varient fortement en fonction du niveau de revenu par habitant. 93 % des déchets seraient entassés directement dans l'environnement dans les pays aux revenus les plus faibles (moins de 1 025 dollars par personne et par an) 30 ( * ) . Ces mêmes pays collecteraient 48 % des déchets dans les villes, mais ce taux chuterait à 26 % en dehors des aires urbaines. Toutefois, compte tenu des faibles volumes de déchets produits actuellement (460 grammes par habitant et par jour pour l'Afrique sub-saharienne par exemple) et de la part prépondérante des déchets organiques (56 %), les pays aux revenus les plus faibles ne sont pas ceux qui sont le plus touchés par la pollution plastique, même si la situation risque de se détériorer dans les prochaines décennies.

En raison de l'augmentation des revenus de la population 31 ( * ) , de sa forte croissance, de son urbanisation et de ses changements de mode de vie, les volumes de déchets dans cette région devraient tripler d'ici à 2050. Or, il est à craindre que les systèmes de gestion de déchets, même s'ils se développent, ne pourront pas faire face à cette croissance exponentielle des déchets, comme en témoignent les difficultés rencontrées actuellement par les pays de l'Asie du Sud-Est pour gérer les leurs.

En 2018, 51 % de la production mondiale des plastiques est réalisée en Asie, dont 30 % en Chine. En 2016, L'Asie du Sud-Est et le Pacifique 32 ( * ) constituaient la zone géographique produisant le plus de déchets plastiques au niveau mondial, soit 57 millions de tonnes.

Plusieurs études montrent qu'une grande partie de la pollution plastique est générée par un petit nombre de pays majoritairement situés en Asie du Sud-Est 33 ( * ) .

Déchets plastiques susceptibles de se retrouver dans les océans

(en millions de tonnes)

Source : Jenna Jambeck, Roland Geyer, les trajectoires des déchets plastiques de la terre vers l'océan, 2015.

L'étude de Jenna Jambeck et de Roland Geyer de 2015 sur les trajectoires des déchets plastiques de la terre vers l'océan constate que parmi les 10 pays classés par masse de déchets mal gérés, huit sont situés en Asie du Sud-Est : la Chine, l'Indonésie, les Philippes, le Vietnam, le Sri Lanka 34 ( * ) , la Thaïlande, la Malaisie et le Bangladesh. Les deux autres pays non asiatiques sont l'Égypte et le Nigéria.

Parmi ces dix pays, la Chine serait responsable de près de 28 % des déchets plastiques mal gérés (10 % pour l'Indonésie).

Quatre critères ont été retenus pour obtenir ces résultats : la taille de la population, la quantité de déchets par habitant, le taux de déchets plastiques, le taux de déchets mal gérés.

Une autre étude 35 ( * ) estime que cinq pays sont responsables de plus de la moitié des déchets plastiques qui finissent par arriver dans les mers et les océans : il s'agit de la Chine, de l'Indonésie, de la Thaïlande, des Philippines et du Vietnam. Cette « fuite » des déchets plastiques de la terre vers la mer proviendrait à 75 % de l'absence de collecte des déchets et à 25 % des fuites observées au sein des systèmes de gestion des déchets.

Comment expliquer ces résultats ?

Tous les pays de l'Asie du Sud-Est sont considérés comme des pays aux revenus moyens inférieurs 36 ( * ) (Indonésie, Philippes, Vietnam, Cambodge, Sri Lanka, Bangladesh) ou moyens supérieurs 37 ( * ) (Chine, Thaïlande, Malaisie).

Le poids des déchets produits par habitant varie fortement d'un pays à l'autre (430 grammes par habitant au Bangladesh contre 1,1 kg en Chine), mais il reste beaucoup moins important que dans les pays à forts revenus. Toutefois, le taux des déchets mal gérés est très important (57 % en Malaisie, 76 % en Chine et jusqu'à 88 % au Vietnam) et est encore amplifié par la taille de la population en ce qui concerne la Chine, l'Indonésie, et dans une moindre mesure les Philippines et le Vietnam.

Selon la Banque mondiale, les volumes de déchets dans la région Asie du Sud-Est/Pacifique devraient doubler d'ici à 2050.

Les pays en voie de développement sont donc particulièrement touchés par la pollution plastique et la situation risque même de s'aggraver dans les décennies à venir si aucune mesure n'est prise pour réduire la production de plastiques et pour améliorer significativement la gestion des déchets.

Il est irréaliste de penser que la mise en place de systèmes de gestion des déchets pourra, à elle seule, résoudre le problème de la pollution plastique. Une étude 38 ( * ) publiée récemment estimait qu'il faudrait connecter à un système de gestion des déchets plus d'un million de foyers par semaine pendant vingt ans pour mettre un terme à la pollution plastique.

Les pays en voie de développement peuvent certes compter sur un secteur informel de collecte et de tri des déchets plastiques. Selon l'Agence française du développement, vingt millions de personnes travaillent à travers le monde dans ce secteur. Ces « ramasseurs de déchets » jouent un rôle prépondérant. En 2016, ce secteur était responsable de la collecte pour recyclage de 58 % des déchets plastiques post-consommation. Au Caire, 66 % de la valorisation des déchets est réalisée par le secteur informel. Toutefois, leurs conditions de travail sont déplorables. En outre, un taux de collecte plus élevé se heurte à la faible valeur de nombreux déchets plastiques (monomatériaux souples et plastiques multimatériaux ou multicouches) qui rend le recyclage non rentable pour le secteur informel.

4. L'aberration de l'exportation de déchets plastiques vers les pays tiers

Les déchets finissent dans l'environnement parce qu'ils n'ont pas de valeur. Le recyclage, en transformant les déchets en ressources, est censé leur redonner de la valeur, permettre leur réutilisation et contribuer à lutter contre la pollution. Dans la réalité, non seulement les taux des déchets récupérés pour être recyclés sont faibles, mais en outre, une part non négligeable de ces déchets est exportée pour être traitée dans des pays en voie de développement, alors même qu'ils ont des difficultés importantes à traiter leurs propres déchets.

Jusqu'à la décision chinoise d'interdire les importations de plastiques 39 ( * ) , la Chine et Hong-Kong 40 ( * ) captaient 72,4 % des déchets plastiques exportés.

Ces flux de déchets plastiques vers la Chine ont émergé à la faveur de trois facteurs :

• la mise en place dans les années 1990 de la collecte sélective des déchets plastiques dans les pays occidentaux ;

• une logique d'efficience des transports maritimes : les bateaux quittant la Chine remplis de biens manufacturés reviennent chargés de déchets plastiques ;

• ces déchets plastiques intéressent une industrie chinoise en pleine croissance économique, qui peut recycler ces plastiques alors qu'elle ne dispose pas encore de la production de résine vierge pour couvrir ses besoins. La Chine mettra d'ailleurs un frein à ses importations de déchets plastiques dès lors qu'elle commencera à disposer d'une capacité de production de résine vierge.

Cette description des échanges de déchets plastiques doit interroger notre modèle de consommation et de souveraineté industrielle.

Depuis 2013, la Chine a commencé à limiter ses importations de déchets plastiques. En 2013 elle a mis en oeuvre son programme « Green Fence » - restriction temporaire pour les importations de plastiques les plus souillés.

Pour autant, entre 2010 et 2016, la Chine aura importé annuellement entre 7 et 9 millions de tonnes de déchets plastiques. En 2016, ce chiffre atteignait 7,35 millions de tonnes. Dans le même temps, la production domestique de déchets plastiques en Chine s'élevait à environ 61 millions de tonnes. Ainsi, 12 % du total des déchets plastiques de la Chine étaient constitués de déchets importés du monde entier.

Parmi les 10 plus grands exportateurs de déchets plastiques vers la Chine figuraient plusieurs pays développés comme le Japon (925 900 tonnes), les États-Unis (811 400 tonnes), l'Allemagne (701 500 tonnes), la Belgique (415 700 tonnes), la France (404 000 tonnes), le Royaume-Uni (313 000 tonnes), l'Australie (293 000 tonnes), la Pologne (158 000 tonnes) et le Canada (146 000 tonnes).

Ces chiffres montrent le poids de l'Europe dans les exportations de déchets plastiques vers la Chine. Ainsi les 4 pays cités dans le périmètre européen (Allemagne, Belgique, France et Pologne) ont exporté près de 2 millions de tonnes, soit plus du double des seuls États-Unis et près du quart du volume total importé par la Chine en 2016.

En 2017, La Chine a mis en oeuvre une interdiction permanente beaucoup plus stricte des importations de plastique non industriel à travers son programme « National Sword ». Si ces mesures sont maintenues, ce sont 100 millions de tonnes de déchets plastiques à l'horizon 2030 qui ne seront plus envoyées en Chine.

La fin des exportations de déchets plastiques vers la Chine laissait envisager différents scénarios :

- les pays exportateurs profitaient de cette opportunité pour améliorer leurs infrastructures nationales de recyclage et créer des marchés intérieurs ;

- davantage de pays étaient incités à réduire la production primaire de plastique (et à créer des modèles d'économie circulaire des plastiques) afin de diminuer la quantité de déchets à traiter ;

- les règles du commerce mondial des déchets plastiques évoluaient pour favoriser le partage des meilleures pratiques de gestion des déchets et l'harmonisation des normes techniques ;

- d'autres pays en voie de développement étaient tentés de devenir un importateur clé de déchets plastiques en substitution de la Chine, avec le risque qu'ils ne disposent pas de l'infrastructure suffisante à la gestion de ces flux de déchets ;

- les pays qui envisageaient d'importer des quantités importantes de déchets plastiques pouvaient instaurer une taxe d'importation visant spécifiquement à financer le développement de l'infrastructure nécessaire à leur traitement.

Dans les faits, les mesures prises par la Chine ont entraîné une très forte hausse des exportations de déchets plastiques vers l'Asie du Sud-Est, principalement en direction de la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam, dans des conditions souvent à la limite de la légalité. Devant l'afflux massif de ces déchets, parfois de très mauvaise qualité, et l'absence d'infrastructures adaptées pour les gérer, plusieurs pays ont finalement choisi de renvoyer certains conteneurs dans les pays exportateurs, dont le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France.

Récemment, la fuite d'une lettre du directeur du commerce international de l'American Chemistry Council révélait que les États-Unis , par le biais d'un accord commercial, essayaient de convaincre le Kenya d'accueillir une partie de leurs déchets plastiques . Officiellement, il s'agissait d'aider le Kenya à développer une industrie du recyclage et d'en faire un « hub » pour exporter ces déchets, une fois recyclés, vers d'autres pays d'Afrique. Toutefois, ce projet a provoqué l'inquiétude de nombreuses associations environnementales kenyanes et internationales compte tenu de la gestion déjà critique par le Kenya de ses propres déchets qui finissent pour la plupart dans des décharges à ciel ouvert. Actuellement, le Kenya est dans l'incapacité de stocker et recycler des déchets supplémentaires.

D'une certaine façon, ces exportations de déchets plastiques peuvent être considérées comme un transfert de la responsabilité de production entre pays. Ainsi, ces mouvements géographiques ne sont pas sans conséquence sur la comptabilité des déchets plastiques : les volumes exportés s'ajoutent aux bilans massiques des pays qui les réceptionnent et allègent les bilans des pays exportateurs . Eu égard aux volumes concernés, ces flux mondiaux de déchets plastiques contribuent, d'un point de vue statistique, à maximiser la responsabilité des zones importatrices dans la production de macrodéchets. Arithmétiquement, la contribution des pays exportateurs se voit allégée du montant des volumes exportés dès lors qu'ils n'ont plus d'existence physique dans une comptabilité matière des déchets plastiques construite autour de la prise en compte du recyclage, de la valorisation énergétique et de l'enfouissement. À titre d'exemple, en France, l'exportation annuelle de déchets plastiques au départ des ports de Paris, de Rouen et du Havre (périmètre du port HAROPA) s'élève à 1 million de tonnes (vers la Chine jusqu'en 2018 et d'autres pays asiatiques depuis).

Des personnes auditionnées ont estimé que plus le taux de collecte et de tri sélectif des déchets est élevé, plus le risque est grand qu'une part importante des déchets soient exportés... et finissent dans les océans. Lors de l'audition de Julien Boucher 41 ( * ) , celui-ci a évoqué des calculs démontrant que les exportations de déchets des pays européens correspondent à un taux de « fuite » de 5 % supplémentaires des plastiques dans l'environnement.

Le Ban Amendment ratifié en décembre 2019 dans le cadre de la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination devrait désormais limiter l'exportation de déchets plastiques dans les pays qui ont des normes environnementales moins sévères. Il prévoit que les déchets en mélange, dont les déchets en plastique difficilement recyclables, ne pourront être expédiés qu'avec l'accord conjoint du pays exportateur et du pays importateur.

Pour terminer sur ce sujet des exportations des déchets plastiques, vos rapporteurs tiennent à souligner les effets sociaux négatifs qu'elles peuvent également induire sur les populations des pays importateurs. L'afflux de déchets vient cannibaliser des déchets domestiques qui peinent à être traités par insuffisance des infrastructures . Cet afflux réduit également la valeur économique des déchets locaux. Les secteurs informels de traitement des déchets sont dopés par l'importance des gisements de déchets plastiques importés et les voient comme l'opportunité de capter une partie du revenu de leur traitement. 20 millions de personnes vivraient ainsi dans le monde du traitement des déchets dans les secteurs informels, parmi lesquelles des femmes et des enfants à la santé dégradée par la manipulation de ces déchets sans aucune précaution, ni protection. Au-delà de la source de pollution de l'environnement, le sujet des macroplastiques s'ouvre ainsi à la question des droits de l'Homme !

Un brassage mondial des déchets plastiques

Une enquête auprès des ambassades en France des pays étrangers a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les politiques de gestion des déchets plastiques dans leurs pays (cf. annexe II).

Deux questions de l'enquête ciblaient spécifiquement les échanges de déchets : votre pays importe/exporte-t-il des déchets plastiques ? Si oui, depuis/vers quel(s) pays ? Dans une première étape, les 38 pays ayant répondu à l'enquête ont été regroupés en 7 grandes régions géographiques (Afrique, Amérique du Nord, Amérique du Sud, Europe, Asie du Nord, Asie du Sud et Moyen-Orient). Ensuite, les réponses ont été analysées pour identifier les échanges de déchets plastiques entre ces régions. L'importance des échanges a été caractérisée par le nombre d'occurrences des flux entre régions (une attention particulière a été apportée pour éviter les doubles comptes). La méthode comporte trois limites (les réponses se limitent à 38 pays, les flux ne sont pas quantifiés en tonnage, les flux dépendent du nombre de pays associés à chacune des régions). Vos rapporteurs, conscients de ces biais et de leurs conséquences sur l'interprétation des résultats, estiment toutefois que l'analyse effectuée apporte une photographie des échanges internationaux de déchets plastiques. En cela, les résultats présentés, en identifiant les principaux mouvements, sont une réponse à la méconnaissance des flux.

L'Europe est un contributeur important à l'exportation de déchets plastiques . Le flux principal dirige les déchets qu'elle produit vers l'Asie du Sud ; mais des exportations concernent également, dans une moindre mesure, les autres régions du globe. Les exportations se font également au sein même de l'Europe.

L'Asie du Sud reçoit des déchets plastiques d'autres régions que l'Europe. Il reste difficile de préciser quelles sont les régions les plus exportatrices (l'épaisseur des flèches est relative au nombre de citations des échanges et non aux quantités). Les pays d'Asie du Sud indiquent qu'ils exportent également des déchets, notamment vers l'Europe, l'Afrique et l'Amérique du Sud.

L'Afrique et l'Amérique du Sud sont deux régions où les pays qui ont répondu à l'enquête évoquent des importations depuis les autres régions, mais aucune exportation vers les autres régions (des échanges ont cependant lieu au sein des deux régions).

Malgré ces biais, l'enquête confirme l'importance des échanges de déchets plastiques, entre pays, à l'échelle mondiale.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

5. Une nouvelle ère géologique ?

Théorisé pour la première fois par Paul Josef Crutzen, prix Nobel de Chimie en 1995, l'anthropocène signifie étymologiquement « l'Âge de l'Homme ». Elle serait une nouvelle ère dans la chronologie de la géologie débutant lors de la révolution industrielle de 1850 et succédant à l'holocène (ère interglaciaire qui a favorisé l'expansion des sociétés humaines et qui dura plus de 10 000 ans). Elle définit une ère géologique dans laquelle l'influence de l' être humain sur la biosphère atteint un tel niveau qu'elle devient une « force géologique » en mesure de marquer la lithosphère . Si cette notion n'est pas officielle, elle a pour intérêt de montrer à quel point l'empreinte géologique de l'Homme aboutit à une rupture des équilibres naturels.

Dans cette logique d'anthropocène, la pollution plastique serait ainsi l'un des marqueurs de l'impact de l'Homme sur le système terrestre à travers notamment les deux phénomènes limités mais symboliques que sont le plastiglomérat et la plasticroûte.

a) Le plastiglomérat

Il s'agit d'une roche non naturelle apparue dans le sud de l'île d'Hawaï, formée de l'agrégation de déchets plastiques fondus par la lave basaltique et mélangés avec des sédiments marins. Cette roche est le résultat des activités humaines, modifiant irrémédiablement l'écosystème marin et l'équilibre environnemental de cette région.

b) La plasticroûte

Repéré sur les côtes de l'île de Madère, il s'agit d'une roche dans laquelle s'incrustent des plaques de vernis en plastique. Composé essentiellement de polyéthylène, ce vernis provient très probablement des déchets plastique s qui flottent dans l'océan. Ces derniers viendraient se broyer sur la roche et s'y incrusteraient sous l'action de l'eau de mer à l'instar des lichens ou des algues. D'une épaisseur de 0,10 millimètre environ, la couche plastique forme avec la roche un complexe semi-naturel d'une nouvelle nature.

B. UNE POLLUTION INSIDIEUSE : LES MICROPLASTIQUES

La pollution plastique n'est pas uniquement liée à la problématique de gestion des déchets et à la production de macrodéchets. Elle se manifeste également par des fuites de plastique tout au long de son cycle de vie, de sa fabrication à sa fin de vie, en passant par ses usages. Cette autre forme de pollution est toutefois plus insidieuse, car moins visible que celles des macrodéchets qui s'accumulent dans les décharges, le long des fleuves ou dans les mers et les océans. Elle se caractérise par des microplastiques, plus difficiles à identifier à l'oeil nu. Pour cette raison, la prise de conscience par l'opinion publique de l'existence de microplastiques est bien moins établie que celle de macroplastiques.

Les microplastiques sont des fragments solides composés de polymères synthétiques, dont la plus grande dimension est inférieure à 5 millimètres 42 ( * ) . Ils contiennent des additifs et d'autres substances. Ils peuvent se présenter sous différentes formes (fibres, films, granulés, fragments, mousses, microbilles). S'il existe un consensus sur leur taille maximale, leur taille minimale ne fait pas l'unanimité au sein de la communauté scientifique en raison de la difficulté croissante à les détecter et à les analyser au fur à mesure de la réduction de leur taille sous l'effet de leur fragmentation.

Il existe deux catégories de microplastiques :

- les microplastiques primaires, fabriqués intentionnellement par les industriels pour différents usages (comme certaines particules de gommage contenues dans des produits cosmétiques ou encore dans des détergents) ;

- les microplastiques secondaires qui proviennent de la fragmentation de macrodéchets plastiques sous l'effet de différents facteurs environnementaux.

1. Les microplastiques primaires
a) Les microplastiques intentionnellement ajoutés dans des produits manufacturés

Les microplastiques primaires peuvent être produits spécifiquement pour une utilisation industrielle, comme certaines particules de gommage contenues dans des produits cosmétiques ou encore dans des détergents et des produits d'entretien contenant des parfums encapsulés ou des microbilles.

Si l'industrie européenne du secteur cosmétique travaille à la réduction de leur utilisation, les substitutions restent complexes. Elles sont plus ou moins simples selon les propriétés conférées par les microplastiques. Certaines filières font face à des impasses et doivent trouver des molécules de substitution qui n'existent pas aujourd'hui, à fonctionnalité équivalente. Les microplastiques ont apporté des performances aux produits dont il est difficile de se passer.

Les fuites de ces microplastiques dans l'environnement se produisent essentiellement au moment de l'utilisation des produits qui les contiennent.

b) Les granulés industriels

Les granulés industriels sont la matière première fabriquée et utilisée dans l'industrie pour la production de tous les produits plastiques. Ils font partie des microplastiques primaires. Ils peuvent prendre la forme de granules, de sphérules, de microbilles ou de poudres.

Le sujet de leur relargage dans l'environnement est ancien. Il est identifié depuis les années 1970 par la communauté scientifique. En 1993, l'Agence américaine de protection de l'environnement (EPA) avait réalisé une étude sur le sujet 43 ( * ) .

Une étude plus récente sur les granulés industriels 44 ( * ) énumère les causes possibles de leur dispersion dans le milieu naturel :

- les fuites au cours de leur production industrielle durant les processus de fabrication, de conditionnement, de stockage et de nettoyage des unités de production. Les granulés industriels rejoignent alors les réseaux d'eaux usées ou les réseaux d'eaux pluviales ou sont évacués directement dans les fossés puis les cours d'eau. L'association SOS Mal de Seine a évoqué lors de son audition une pollution atteignant 10 000 billes par m 3 (soit 256 grammes de plastique par m 3 ) aux alentours d'une usine de production à Rouen ;

- les fuites au moment du transport en raison d'incidents de chargement ou de manutention, de contenants percés, d'accidents de la route, de pertes de conteneurs ou de chargements depuis les bateaux de transport maritime ou fluvial (des statistiques évoquent la perte de 5 000 conteneurs par an en mer) ;

- les fuites au moment du recyclage des plastiques et de leur transformation en granulés industriels.

Par ailleurs, il semblerait que les granulés industriels soient utilisés pour des usages détournés, notamment pour l'aménagement des pistes et des carrières de chevaux, mais également dans le secteur du nettoyage industriel.

Les fuites de granulés plastiques ont donc lieu tout au long de la chaîne de valeur. Les évaluations sont très variables. L'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) chiffre la perte de granulés plastiques industriels à 41 000 tonnes 45 ( * ) à l'échelle européenne. Cela équivaut à 0,6 % de la production. Une étude récente 46 ( * ) situe les fuites annuelles pour l'Union européenne dans une fourchette comprise entre 16 800 et 167 400 tonnes.

Une étude menée par la commission OSPAR 47 ( * ) estime que dans les bassins versants des zones maritimes couvertes par la convention, entre 2 600 et 26 000 tonnes de granulés industriels seraient rejetés dans l'océan chaque année.

Selon les études, les granulés plastiques seraient donc une source majeure de microplastiques primaires produits sur terre avant de rejoindre les océans.

2. Les microplastiques secondaires

Les particules microplastiques secondaires sont formées par la dégradation physique, biologique et chimique de macroplastiques. Compte tenu du poids prépondérant de la pollution par les macrodéchets par rapport à la pollution par les microplastiques primaires, la pollution par les microplastiques secondaires devrait également être largement supérieure à celle causée par les microplastiques primaires. Certains chercheurs estiment que la pollution par les microplastiques liée à la fragmentation de déchets plastiques de plus grande dimension représenterait 2/3 de la pollution microplastique.

La quantification des microplastiques secondaires implique une bonne connaissance des mécanismes de fragmentation des macrodéchets en microplastiques. L'état de la recherche ne permet pas d'avancer de chiffres précis. Toutefois, il est évident qu'à masse égale, le nombre de microplastiques est considérablement plus important que celui des macroplastiques compte tenu de leur petite taille.

a) Les microplastiques résultant de l'usure des pneumatiques et des vêtements

Les microplastiques secondaires peuvent également résulter de l'usure d'objets en plastique plus gros au cours de leur fabrication, de leur utilisation ou de leur entretien.

(1) L'usure des pneus

Les pneus s'érodent à mesure des kilomètres qu'ils parcourent , perdant des particules qui formaient leur enveloppe extérieure 48 ( * ) . Un pneu usé pèse deux kilos de moins qu'un pneu neuf.

L'abrasion des pneumatiques par kilomètre parcouru varierait entre 20 et 800 um, selon leurs caractéristiques, le type de véhicule, la rugosité de surface de la route, le style de conduite, la température extérieure. Une étude 49 ( * ) sur l'émission des particules en provenance des pneumatiques indique que la France émettrait 75 000 tonnes de particules, les États-Unis 1,52 million de tonnes. Au niveau mondial, l'érosion des pneumatiques libèrerait chaque année 5,86 millions de tonnes de particules.

Le laboratoire fédéral suisse d'essai des matériaux et de recherche (EMPA) évalue à 0,96 kg/hab/an la production de particules issues de l'abrasion des pneumatiques (80 % se retrouvant dans les sols et 20 % dans les eaux).

Au niveau européen, l'étude précitée de l'Inner city fund estime que 503 586 tonnes de microplastiques seraient rejetées par an dans l'environnement en provenance de l'abrasion des pneumatiques.

L'usure des pneus est associée à celle des freins et des marquages routiers. Dans une étude de 2018 50 ( * ) , des chercheurs ont analysé les particules présentes sur les routes. Ils ont constaté que 89 % des particules (en nombre) étaient liées au trafic : 39 % provenaient de l'érosion du revêtement routier, 33 % de l'abrasion des pneus et 17 % de l'usure des freins. En prenant comme référence le volume des particules (et non plus leur nombre), les contributions sont sensiblement différentes : 7 % des particules ne sont pas liées au trafic, 54 % sont liées à l'abrasion des pneus, 28 % à l'érosion de la route et 11 % à l'usure des freins.

Toujours selon l'étude de l'Inner city fund, entre 505 et 17 161 tonnes de microplastiques seraient rejetées annuellement dans l'environnement à la suite de l'usure des freins et 94 358 tonnes issues du vieillissement des marquages routiers.

(2) Les textiles synthétiques

Il s'agit d'un sujet récent qui nécessite un approfondissement des connaissances.

En 2016, 62,1 millions de tonne de fibres synthétiques (dont 54 millions de tonne pour le polyester) ont été produites , contre 35,7 millions de tonne pour les fibres naturelles. Les fibres synthétiques représentent donc près des 2/3 du marché des fibres textiles. Les fibres synthétiques apportent des propriétés que ne permettent pas les fibres naturelles et dominent, à ce titre, la production de vêtements techniques et pour le sport.

Une libération de fibres se produit avec les lavages des vêtements (le nombre de fibres libérées diminue avec la répétition des cycles de lavage). Selon les informations obtenues par vos rapporteurs, 60 à 80 % des fibres seraient libérées au premier lavage.

L'intensité du relargage des fibres textiles dépend de la méthode de découpe. Ainsi, la découpe au laser permet de sceller les bords des tissus et limite le relargage de fibres par rapport à la découpe aux ciseaux.

L'apprêt mécanique subi par le textile joue également un rôle fondamental. Ainsi, les analyses du laboratoire fédéral suisse d'essai des matériaux et de recherche (EMPA) 51 ( * ) montrent que le lavage d'un tissu polaire de 400 grammes libère 14 millions de fibres, soit dix fois plus que les autres textiles retenus pour l'étude. Cette très forte déperdition de fibres par le tissu polaire s'explique par le « grattage » des fibres superficielles qu'il subit pour le rendre gonflant et moelleux.

La température de lavage et l'agressivité des lessives influencent également la libération des microfibres.

La valeur repère de 120 mg de microfibres par kilogramme de textile est avancée pour quantifier le relargage issu du lavage des vêtements. Considérant l'incidence de plusieurs facteurs sur l'intensité du relargage, cette référence doit être prise avec précaution. Un comité de normalisation européen travaille sur un protocole de mesure des microfibres libérées durant le lavage des vêtements.

Le relargage de fibres textiles dans l'environnement est évalué au niveau européen entre 18 000 et 46 000 tonnes par an. Au-delà du phénomène physique de relargage des fibres, il faut souligner que cette abondance trouve également ses origines dans une surproduction de vêtements faiblement qualitative, à prix bas, conduisant à une surconsommation.

Une étude sur les microplastiques menée au sein du LEESU 52 ( * ) montre que les fibres se retrouvent en très forte proportion dans les effluents des machines à laver (9 000 à 35 000 fibres par litre). Cette proportion se réduit dans les eaux usées (70 à 473 fibres par litre) en raison de la dilution des eaux issues des machines à laver dans les autres eaux grises. Une fois les eaux traitées, le nombre de fibres par litre atteint des valeurs comprises entre 14 et 50, témoignant de l'efficacité des stations d'épuration. Néanmoins, rapporté aux volumes d'eau traités par ces stations d'épuration, le nombre de fibres relarguées dans les eaux superficielles est considérable.

Lors de l'audition de Maria Luiza Pedrotti 53 ( * ) , celle-ci faisait remarquer que 4,3 milliards de microfibres étaient rejetées en mer à la sortie de la station d'épuration de Nice par an alors qu'elle intercepte 92 % des fibres.

Néanmoins, une étude récente 54 ( * ) a montré que 8,2 % des fibres présentes dans l'océan seraient d'origine synthétique, contre 79,5 % d'origine cellulosique et 12,3 % d'origine animale.

Les recherches sur la quantification et la caractérisation du relargage des fibres, notamment synthétiques dans les eaux douces et marines doivent donc encore progresser pour être capables de donner des informations fiables sur ce sujet.

b) Les autres sources de microplastiques d'usure
(1) Les gazons synthétiques des terrains de sport

Souvent fabriqués à partir de granulés de pneus recyclés, les gazons synthétiques relarguent de nombreux microplastiques sous l'effet des frottements provoqués par leur fréquentation (entre 18 000 à 72 000 tonnes par an selon l'Inner city Fund au niveau de l'Union européenne).

(2) Les poussières urbaines

On trouve dans les poussières urbaines des particules issues de l'usure d'objets (semelles de chaussures, ustensiles de cuisine synthétiques, etc.), de la dégradation d'infrastructures (habitations, aménagements, pelouses artificielles, ports commerciaux et de plaisance, peintures des bâtiments) ainsi que de l'utilisation d'abrasifs ou de détergents. Ces sources sont rassemblées, car leur contribution individuelle est faible. Cependant, une fois regroupées, elles représentent une quantité de rejets considérables. Cette catégorie apparaît particulièrement compliquée à identifier. Néanmoins, elle met en avant le fait que le montant des microplastiques relargués dans l'environnement reste sous-estimé et qu'il existe de nombreuses autres sources de microplastiques difficilement quantifiables mais qui, ajoutées les unes aux autres, contribuent de manière non négligeable à la pollution plastique .

3. Une pollution par les microplastiques difficile à chiffrer et sous-estimée

Il est difficile de trouver un chiffre faisant consensus sur la part des microplastiques dans la pollution des océans, dans la mesure où il n'existe pas de quantification globale de la fragmentation de tous les macroplastiques. Certaines sources de pollution par les microplastiques semblent plus faciles à modéliser 55 ( * ) et sont donc souvent mises en avant comme la pollution liée aux fibres synthétiques, aux pneumatiques ou encore aux granulés industriels. Pour autant, aucune des principales catégories de macrodéchets présentées précédemment (tels que les emballages, les plastiques liés à la construction et au bâtiment ou encore les plastiques utilisés pour la production de biens de consommation) ne se retrouve comme une origine contributive à l'apparition et au transfert des microplastiques secondaires (ce qui paraît somme toute assez aberrant).

Certains résultats apparaissent également difficiles à généraliser. Une étude menée au niveau du port de Charleston 56 ( * ) constate que 57 % des microplastiques retrouvés dans l'océan ont comme origine l'abrasion des pneus. 42 % sont des microplastiques secondaires. Les fibres ne représenteraient que 0,1 % des microplastiques dans l'océan. Toutefois, on peut se demander si ces résultats ne sont pas influencés par la configuration des lieux puisque le port est entouré de routes qui le surplombent.

En ce qui concerne l'étude commanditée par la direction générale pour l'environnement de la Commission européenne dont les principaux résultats figurent dans l'encadré ci-après, elle montre les difficultés rencontrées pour obtenir des informations chiffrées précises. Les fourchettes entre lesquelles évoluent certains volumes sont tellement importantes que les chiffres finissent par perdre leur pertinence (l'ordre de grandeur varie d'un à dix pour les textiles, d'un à 33 pour l'usure des freins, d'un à quatre pour les gazons synthétiques).

Ces divergences et lacunes témoignent de notre connaissance encore très partielle sur la pollution plastique par les microplastiques et la nécessité de poursuivre les recherches dans ce domaine.

Les principales sources de relargages de microplastiques

- l'usure des pneus (503 586 tonnes par an) et des freins (entre 505 et 17 161 tonnes) ;

- les marquages routiers (94 358 tonnes) ;

- les granulés industriels (entre 16 888 et 167 431 tonnes) ;

- les textiles (entre 18 430 et 46 175 tonnes) ;

- les gazons synthétiques des terrains de sport (entre 18 000 et 72 000 tonnes) ;

- les peintures pour bâtiments (entre 21 100 et 34 900 tonnes) ;

- les peintures marines (entre 3 187 et 5 719 tonnes).

Source : Inner City Fund : pistes de recherche pour réduire le relargage dans les eaux de microplastiques (non intentionnellement ajoutés) émis par des produits ; rapport du 23 février 2018 pour la direction générale environnement de la Commission européenne.

Selon l'étude commanditée par l'Union Internationale de la Conservation de la Nature et de ses ressources 57 ( * ) , e ntre 1,8 million et 5 millions de tonnes de microplastiques seraient perdus dans l'environnement chaque année au niveau mondial en ne prenant en compte que les sept sources suivantes : l'usure des pneus, les granulés industriels, les fibres synthétiques, les microplastiques dans les cosmétiques, les microplastiques dans les peintures des bateaux et les microplastiques contenus dans les poussières urbaines. Entre 0,8 et 2,5 millions de tonnes entreraient chaque année dans les océans.

En ce qui concerne le nombre des microplastiques dans les océans, les estimations sont également peu étayées scientifiquement. Selon certains intervenants, les microplastiques, qui ne représenteraient que 8 % de la masse totale des déchets plastiques présents dans les océans, constitueraient 90 % des déchets plastiques en nombre. Les chiffres entendus par vos rapporteurs varient fortement selon les chercheurs : certains avancent un chiffre compris entre 15 000 et 51 000 milliards, d'autres parlent de 1 800 milliards.

À ce jour, il n'existe aucun modèle scientifique permettant de quantifier avec certitude le nombre de microplastiques.

C. UNE POLLUTION INVISIBLE ET MAL CONNUE : LES NANOPLASTIQUES

1. Les nanoplastiques : définition

Les nanoplastiques correspondent à des fragments dont la taille est inférieure à 1 um.

2. L'état actuel des connaissances

Contrairement aux macro et microplastiques, la pollution due aux nanoplastiques est invisible compte tenu de leur taille.

Les nanoplastiques sont libérés tout au long du vieillissement des plastiques par érosion de leur surface, altérée sur ses premiers micromètres, notamment sous l'effet de l'oxydation. Ainsi, l'altération des plastiques ne produit pas que des fragments de microplastiques mais génère également des particules de tailles inférieures au micromètre : les nanoplastiques.

Selon Julien Gigault 58 ( * ) , les particules de nanoplastiques, comprises entre 1 et 1 000 nm (1 um) présentent un comportement colloïdal 59 ( * ) . Dans les colloïdes, la taille et le nombre de particules dispersées entraînent des changements dans le phénomène de sédimentation des particules (des particules dont on attendrait qu'elles sédimentent restent en suspension). Ainsi, des nanoparticules de PVC peuvent être retrouvées dans la colonne d'eau des gyres 60 ( * ) alors que le PVC coule compte tenu de sa densité.

Le sujet des nanoplastiques comporte différents angles morts.

En premier lieu leur quantification reste difficile et leur structure est méconnue. Il s'agit pourtant de deux paramètres essentiels à la compréhension de leur devenir dans le milieu naturel et de leur interaction avec les organismes vivants.

Par ailleurs, leurs processus de formation restent inconnus ainsi que les cinétiques associées.

3. Une pollution potentiellement préoccupante

Les recherches sur les nanoplastiques en sont encore à leur début. Toutefois, si la fragmentation des macrodéchets en microplastiques puis en nanoplastiques était avérée, elle serait particulièrement préoccupante pour deux raisons.

D'une part, le nombre de nanoplastiques dans l'environnement pourrait être considérable. Actuellement, il n'existe aucune étude chiffrée sur leurs quantités. Toutefois, comme l'a fait remarquer Bruno Grassl 61 ( * ) lors de son audition: « Si on retient l'hypothèse souvent citée de 200 millions de tonnes de déchets plastiques accumulés dans les océans et si seulement 3 % de ces déchets se sont dégradés en nanoplastiques de 200 nm, ils représenteraient une surface développée de 180 millions de km². »

Détail du calcul

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

D'autre part, par analogie avec les propriétés de translocation connues pour d'autres nanoparticules, les nanoplastiques sont susceptibles de pénétrer dans l'ensemble des organes en traversant soit la barrière intestinale, lorsqu'elles sont ingérées, soit la barrière pulmonaire lorsqu'elles sont inhalées.

En évoquant lors de son audition qu'« absence de données ne veut pas dire absence de préjudices », le sociologue Denis Blot a traduit l'idée de la nécessaire vigilance vis-à-vis des nanoplastiques et du besoin de connaissances plus fines.

D. LE PASSAGE DES MACROPLASTIQUES AUX MICROPLASTIQUES ET NANOPLASTIQUES : DES PROCESSUS COMPLEXES

1. Des plastiques qui se fragmentent

La formulation des plastiques utilise des additifs pour leur conférer des propriétés de durabilité en les protégeant contre la corrosion (cf. supra ). À ce titre les plastiques peuvent apparaître comme particulièrement résistants, voire inaltérables. Cette idée des plastiques qui ne seraient pas dégradables est fausse. Abandonnés dans l'environnement, les plastiques se dégradent, selon des cinétiques qui dépendent de facteurs abiotiques (paramètres physiques et chimiques) et biotiques (microorganismes) . La dégradation des plastiques se traduit par leur fragmentation en particules de dimensions de plus en plus petites.

C'est uniquement lorsque le plastique arrive au stade final de la minéralisation que l'on peut parler de biodégradation complète. Dans toutes les étapes intermédiaires de dégradation (fragmentation, érosion, biodétérioration), il pourra persister dans l'environnement.

2. L'influence des facteurs abiotiques

Une fois dans l'environnement, les plastiques vont subir une dégradation abiotique sous l'effet du rayonnement ultra-violet, de l'oxygène et de l'eau. L'effet conjugué des ultra-violets et de l'oxygène de l'air produit une photo-oxydation 62 ( * ) qui prend naissance en surface du plastique avant de pénétrer dans la profondeur du polymère. La présence d'eau favorise l'hydrolyse 63 ( * ) des plastiques. Le couplage des rayons ultra-violets et de l'eau accélère la dégradation des plastiques par un effet de synergie : l'eau ramollit le plastique qui devient plus fragile à la photo-oxydation.

Différentes actions mécaniques favorisent l'action des rayons ultra-violets, de l'oxygène et de l'eau : les vagues, le vent, l'érosion sableuse, l'alternance de périodes de gel et de dégel, etc.

Les agressions chimiques et physiques auxquelles sont soumis les plastiques dans l'environnement finissent par réduire la matière en fragments de plus petite taille (phénomène de fragmentation).

3. L'influence des facteurs biotiques

Au cours de sa fragmentation, le matériau peut également être progressivement colonisé par des micro-organismes opportunistes (essentiellement des bactéries) qui finissent par coloniser sa surface pour former un biofilm. La capacité d'adhésion et de multiplication par les micro-organismes dépend des propriétés de surface des polymères.

La biodégradation des plastiques est évoquée plus en avant dans le rapport, il s'agit ici d'en détailler les mécanismes.

Pour attaquer le plastique les micro-organismes doivent y trouver un bénéfice énergétique et métabolique. En synthétisant et libérant des exo-enzymes, ils dépolymérisent le plastique, produisant des oligomères qu'ils utilisent comme source de carbone de leur métabolisme. Ce phénomène peut prendre la forme de cométabolisme : un micro-organisme dispose de l'enzyme, l'autre métabolise les oligomères libérés. Les communautés de micro-organismes qui constituent les biofilms évoluent avec l'état de dégradation de la surface du polymère.

Source : Boris Eyheraguibel, Institut de chimie de Clermont-Ferrand.

La dégradation biologique des plastiques en mer : théorie et réalité

La dégradation biologique est en majeure partie réalisée par les micro-organismes, essentiellement des bactéries. Organismes les plus abondant dans les océans (dans chaque litre d'eau de mer, on compte plus de 100 millions de bactéries et plus de 100 espèces différentes), ces micro-organismes ont des capacités métaboliques extrêmement variées et pourraient contribuer à la biodégradation des plastiques à travers quatre étapes successives :

1. La bio-détérioration est engendrée par l'action mécanique du biofilm bactérien qui se forme à la surface du plastique et qui va contribuer à agrandir les fissures déjà présentes. Ce biofilm peut contribuer également à une dégradation chimique via la production de composés acides par certaines bactéries.

2. La bio-fragmentation est l'action d'enzymes libérées à l'extérieur des cellules bactériennes pour cliver les polymères du plastique en séquences plus courtes, oligomères et monomères.

3. L'assimilation consiste au transfert des molécules plastiques de taille inférieure à 600 Da (daltons) dans les cellules bactériennes et à leur transformation en composés cellulaires et en biomasse.

4. La minéralisation correspond à la dégradation complète du plastique en molécules oxydées (CO 2 , N 2 , CH 4 , H 2 O).

Dans les faits, des études ont démontré qu'une souche particulière de bactéries incubée 30 jours sur du polyéthylène photo-oxydé conduisait à la formation d'un biofilm et contribuait à la perte de 8 % du poids sec de plastique. Si d'autres exemples de ce type ont été rapportés dans la littérature scientifique, ces observations reposent néanmoins sur des études en conditions de laboratoire sur une seule espèce bactérienne. Or, le processus en milieu naturel est beaucoup plus complexe puisqu'il fait intervenir de nombreuses espèces bactériennes. Les cinétiques de biodégradation des plastiques en milieu naturel restent encore peu connues et leur étude est rendue complexe par la grande diversité des types de plastiques retrouvés dans l'environnement.

Source : Jean-François Ghiglione, directeur de recherche CNRS au Laboratoire d'Océanographie Microbienne de Banyuls et cofondateur de la start-up Plastic@Sea et Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

4. La durée de vie des plastiques dans l'environnement

La cinétique de dégradation dépend de la nature chimique du polymère et des facteurs externes liés au milieu dans lequel il se trouve. Ainsi, le même polyéthylène se dégradera beaucoup plus rapidement en surface de l'océan ou sur une berge avec l'action des ultra-violets qu'au fond de la mer, privé de lumière et d'oxygène. Toutefois, il ne se biodégradera pas.

Ainsi, des études de vieillissement accéléré montrent qu'en immersion, la perte de 10 % de la masse pour le polyamide varie de 6 ans avec oxygène à 25°C à 65 000 ans sans oxygène 64 ( * ) ! En outre, l'état de la recherche ne permet pas de savoir si cette perte de masse est attribuable à un phénomène de fragmentation ou à une bio-assimilation puisque cette dernière ne peut pas être démontrée en milieu naturel ouvert.

La valeur de 400 ans régulièrement citée pour évoquer la cinétique lente de dégradation des plastiques est erronée. En premier lieu, parce qu'elle dépend du type de polymère et oublie l'influence cruciale des conditions du milieu sur le temps de dégradation. En second lieu, parce que cette dégradation se traduit par une fragmentation avec formation de fragments de plus en plus petits dont il est difficile de suivre la trace en-dessous d'une certaine dimension.

La structure du polymère et son procédé de fabrication influencent également sa cinétique de dégradation. Ainsi, les proportions relatives entre les phases cristallines et amorphes qui constituent le polymère déterminent sa sensibilité à la fragmentation. La connaissance de ces devenirs ouvre la possibilité de jouer sur la structure semi-cristalline des plastiques pour modifier leur résistance aux agressions et au vieillissement. Soulignons toutefois qu'il s'agit d'un dilemme avec l'objectif de produire des plastiques résistants et durables.

Actuellement, il n'est pas possible de prédire exactement le devenir des polymères à long terme dans l'environnement, que ce soit dans le sol ou dans l'eau (douce ou marine). Par ailleurs, il n'y a pas forcément consensus sur la définition de la durée de vie des polymères ni sur l'interprétation du terme « dégradation » : s'agit-il de la dégradation ultime en molécules oxydées ou d'une fragmentation suffisamment petite pour ne plus être vue à l'oeil nu ?

Une méta-analyse 65 ( * ) à partir de 255 estimations issues de 57 documents réalisés dans 13 pays différents montre une grande dispersion dans l'estimation des durées de vie des plastiques. Ainsi, à 65 kilomètres de distance, la durée de vie d'un sac de caisse est évaluée à 20 ans par The Woods Hole NOAA Sea Grant office et à 500 ans par le gouvernement local de Nantucket.

Par ailleurs, la méta-analyse conclut qu'aucun document n'a fait l'objet d'une revue par les pairs et que pour 40 % des cas, les sources ne sont pas citées. Il semblerait que les chiffres soient souvent repris d'une étude à l'autre, sans que leur pertinence soit interrogée et vérifiée 66 ( * ) .

Des études récentes ont commencé à mettre en évidence des phénomènes de solubilisation partielle de certains polymères soumis aux UV en phase aqueuse. Ainsi, alors que certains auteurs et les médias annoncent des durées de vie de plusieurs centaines d'années, ces résultats suggèrent que dans certaines conditions d'exposition aux UV, la disparition partielle de ces matériaux pourrait être plus rapide qu'annoncée, ce qui montre la nécessité de poursuivre les recherches sur le devenir ultime des plastiques dans l'environnement.

Pour autant, même si les données sur la durée de vie des déchets plastiques restent lacunaires, de nombreuses études sur les comportements des plastiques à long terme concluent à la persistance des polymères dans l'environnement, notamment dans le milieu marin (milieu très carencé en azote et phosphore, deux éléments essentiels pour le développement des micro-organismes).

III. UNE POLLUTION DIFFUSE SUR L'ENSEMBLE DU GLOBE

A. UNE POLLUTION QUI TROUVE SES ORIGINES SUR TERRE ET EN MER

1. Les origines de la pollution plastique

Du fait de l'utilisation massive des plastiques dans la vie quotidienne, des fuites peuvent apparaître tout au long de leur cycle de vie, de leur production au traitement de leurs déchets. Ces fuites sont à l'origine de la présence de plastiques, sous différentes formes, dans tout l'environnement.

a) Les sources terrestres

Si les images de la pollution plastique sont souvent associées à la mer, les activités humaines terrestres jouent un rôle prépondérant dans l'origine de cette pollution. Quotidiennement, dans nos différentes activités professionnelles ou personnelles, dans le cadre de nos loisirs et de notre consommation, nous utilisons des plastiques qui deviendront des déchets susceptibles de contribuer à la pollution plastique.

L'impact du tourisme sur la pollution en Méditerranée

Selon le rapport précité du WWF sur la pollution plastique en Méditerranée, cette mer et ses pourtours accueillent 200 millions de touristes par an. Selon l'étude, ces derniers engendreraient jusqu'à 30 % de déchets plastiques supplémentaires.

b) Les sources maritimes

Les activités maritimes contribuent également à la pollution plastique. Quatre secteurs sont particulièrement visés : les activités de la pêche et de l'aquaculture ; le transport maritime ; les activités de la plaisance ; l'exploration et l'exploitation minière et pétrolière.

(1) Les activités de la pêche et de l'aquaculture

La plupart des équipements pour la pêche, l'aquaculture et la conchyliculture sont aujourd'hui en plastique. Les fibres synthétiques offrent une plus grande commodité que les cordes en fibres naturelles traditionnelles en réduisant le poids des équipements. Les filets de chalutage et de dragage sont désormais tous en plastique (polyamide, PP, PE). Le plastique est aussi omniprésent dans la conchyculture et l'aquaculture à travers les ombrières, les cordes, les sacs, les pièges, les paniers, les bouées, les poches, etc. Sa généralisation s'explique par une combinaison de facteurs : sa légèreté, son prix et la facilité d'obtention d'objets dont la géométrie est adaptée aux besoins de professionnels.

Ces activités génèrent une grande quantité de déchets en raison de la casse, de l'abandon et de la perte de matériels. Malheureusement, les filets de pêche abandonnés ou perdus continuent pendant plusieurs années à piéger poissons, tortues, et mammifères marins et constituent dès lors un véritable fléau pour la biodiversité marine (dénommée « pêche fantôme »).

Selon l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture FAO), 640 000 tonnes de filets de pêche seraient abandonnées par an dans les océans au niveau mondial .

Selon la fondation The Ocean Cleanup, au moins 46 % de la masse de déchets flottant dans le gyre du Pacifique Nord seraient des filets de pêche.

Dans le cadre de la surveillance nationale des déchets sur le littoral, il apparaît qu'au niveau national, 21 % des déchets 67 ( * ) recueillis sur le littoral métropolitain proviennent de la pêche et de l'aquaculture.

La FAO a élaboré des directives volontaires sur le marquage des engins de pêche, reconnaissant qu'il est important d'identifier leurs propriétaires, de déterminer l'emplacement des engins et la légalité de leur utilisation. Le recours à un tel système de marquage des engins de pêche, assorti d'un mécanisme de signalement, peut réduire le nombre d'engins de pêche abandonnés, perdus ou rejetés et leurs nuisances. Le marquage facilite également la récupération des engins et simplifie les mesures de gestion, comme l'application de sanctions en cas de comportements combattus par les lois et règlementations. Les directives encouragent également la mise en place d'incitations à la réutilisation et au recyclage des engins usagés et promeuvent l'adoption de pratiques de gestion optimales, notamment en matière d'élimination.

(2) Le transport maritime

Près de 10 milliards de tonnes de biens et de marchandises sont déchargées dans les ports chaque année par une flotte commerciale mondiale estimée à près de 90 000 navires en 2015. Ce trafic maritime contribue à la pollution plastique à plusieurs titres, sans qu'il soit possible de quantifier leur part respective.

Aperçu du trafic maritime mondial le 24 septembre 2020

Source : www.marinetraffic.com

D'abord, les peintures antifouling rejettent des microplastiques dans l'eau.

Ensuite, de nombreux containers sont perdus ou jetés 68 ( * ) chaque année en mer , notamment en cas de tempête, mais également lorsque ces derniers sont mal arrimés. Depuis 2017, il existe une obligation internationale de signaler la perte du container, mais sans obligation de traçabilité de ce dernier.

Selon un rapport du World Shipping Council (dont les 26 membres affiliés représentent 90 % de la capacité mondiale de navires de ligne et de transport), il est estimé pour les années 2011, 2012 et 2013, une perte moyenne annuelle de 2 683 containers, dont 733 tombés du bateau et 1 950 perdus à la suite d'événements dit « catastrophiques » (collision, naufrage, etc.). Au cours de leurs auditions, plusieurs interlocuteurs ont estimé que ce chiffre était sous-estimé et qu'il s'élèverait plutôt autour de 5 000. Ces containers peuvent évidemment contenir des produits manufacturés en plastique ou des granulés de polymères (matière première de l'industrie de la plasturgie).

Enfin, le rejet sauvage de déchets plastiques en mer ne doit pas être négligé . La convention de Londres interdit les rejets de matières en mer qui, à terme, deviennent des macrodéchets flottants, coulant sur le fond ou présents dans la colonne d'eau. De même, la convention MARPOL interdit de jeter à la mer des matières plastiques, sous quelque forme que ce soit.

Néanmoins, régulièrement, d'importantes quantités de plastiques arrivent sur les plages, notamment des îles isolées. Ainsi, en janvier 2019, des centaines de sacs plastiques avec des inscriptions chinoises se sont échoués sur l'île Huva Oa dans l'archipel des Marquises.

Devant l'accumulation depuis plusieurs années de bouteilles plastiques sur l'île Henderson, située au centre du gyre du Pacifique Sud, une étude scientifique a été menée pour connaître leur origine. Il en a été conclu qu'elles étaient jetées par les navires de commerce.

(3) Les activités de la plaisance

Au même titre que les navires de commerce, les activités de la plaisance sont d'autres sources de pollution plastique à travers les peintures antifouling et le rejet de déchets plastiques à la mer.

Vos rapporteurs avaient convié le groupe MSC Croisières à une audition, mais ses représentants ont décliné l'invitation et n'ont pas envoyé de contribution écrite qui aurait pu apporter des informations quantitatives et qualitatives sur cette source de pollution.

De nombreux ports de plaisance réalisent des campagnes de sensibilisation auprès des plaisanciers. D'importants moyens sont également mobilisés par les ports pour prévenir et combattre la pollution plastique.

Lors de son audition, le directeur de Port Camargue a expliqué avoir introduit depuis trois ans un service de collecte des déchets sur le plan d'eau. Outre les déchets solides, sont également collectées par ce dispositif les eaux usées. Par ailleurs, des poubelles tous les 50 mètres ont été installées sur les 10 km de quai.

(4) L'exploration et l'exploitation minière et pétrolière off-shore

Que ce soit au moment de leur construction, de leur utilisation ou de leur démantèlement, les plateformes off-shore génèrent des déchets solides, notamment plastiques, qui, de manière involontaire ou volontaire, peuvent finir directement dans les mers et les océans.

c) Quelle contribution respective des activités terrestres et maritimes ?

Au niveau mondial, 80 % de la pollution maritime seraient liés aux activités humaines terrestres, tandis que les activités marines contribueraient à hauteur de 20 %. Ces chiffres donnent un ordre de grandeur et des observations in situ montrent que les taux peuvent varier selon les zones géographiques.

Par exemple, dans le cadre d'une campagne de collecte et de catégorisation de déchets organisée en 2016 sur l'arc atlantique 69 ( * ) , l'identification des déchets collectés montre que 30 % proviennent des activités maritimes, dont 27 % de la pêche et 3 % de la conchyliculture.

Sur certaines plages, les déchets maritimes sont prépondérants. Ainsi, sur la plage de la Forêt-Fouesnant (département du Finistère), 60 % des déchets retrouvés sont issus de la pêche. À l'Houmeau (département de la Charente-Maritime), 63 % des déchets sont d'origine marine (dont 22 % issus des activités de pêche et 41 % issus des activités de conchyliculture). À Plouharnel (département du Morbihan), les activités de la pêche représentent 49 % des déchets plastiques, celles de la conchyliculture 2 %.

B. LA DISPERSION ET LE DEVENIR DE LA POLLUTION PLASTIQUE : DES CERTITUDES ET DES QUESTIONNEMENTS

1. Des voies de transfert qui peuvent devenir des zones d'accumulation

La pollution plastique obéit à un processus dynamique qui peut être schématiquement divisé en trois étapes.

La première étape correspond aux pertes ou aux fuites de plastiques sur l'ensemble de leur cycle de vie, depuis leur production jusqu'à leur traitement lorsqu'ils deviennent des déchets, en passant par leur utilisation. Ces pertes ou ces fuites peuvent l'être sous les formes macro ou microplastiques, à terre ou dans l'espace maritime.

L'intensité des pertes ou des fuites dépend de différents paramètres : l'infrastructure de gestion des déchets, le domaine d'utilisation des polymères (un plastique à usage médical dans un hôpital risque moins d'être relargué dans le milieu naturel qu'un emballage alimentaire pour une consommation hors domicile).

Les facteurs explicatifs des déchets « gérés inadéquatement »

L'audition de Matéo Cordier a permis à vos rapporteurs de prendre connaissance de recherches portant sur les facteurs explicatifs des déchets « gérés inadéquatement » 70 ( * ) . Ces travaux s'appuient sur une modélisation 71 ( * ) effectuée à partir des données de 141 pays, comparant la quantité de déchets « gérés inadéquatement » avec le PIB, l'urbanisation, le contrôle de l'influence des lobbies, l'éducation, etc. Les résultats de ces travaux montrent que la prise en compte, dans le modèle, de plusieurs facteurs offre une meilleure compréhension de la pollution plastique. Trois résultats sont importants à souligner :

- si rien n'est fait, les fuites de déchets plastiques mal gérés sur la période 1990-2050 et accumulés dans l'écosystème mondial vont doubler entre 2017 et 2050 ;

- l'augmentation de la scolarité à 12 années dans les 43 pays les plus polluants réduirait de 44 % la quantité mondiale de déchets plastiques rejetés dans l'écosystème en 2050 (par rapport à 1990) ;

- la diminution de l'influence des lobbies auprès des politiques, au niveau de l'Uruguay ou de la France, dans les 43 pays les plus polluants réduirait de 28 % la quantité mondiale de déchets plastiques rejetés dans l'écosystème en 2050 (par rapport à 1990).

Source : Cordier M., Uehara T., Baztan J., Jorgensen B., Yan H. (2021, à paraître). Plastic pollution and economic growth: the influence of corruption and lack of education. Ecological Economics.

La deuxième étape correspond au transfert des plastiques dans l'environnement. Les voies de transfert sont essentiellement :

- les réseaux d'eaux usées ou pluviales : les fibres textiles, les microplastiques issus des cosmétiques et des détergents, certains macroplastiques comme les textiles sanitaires sont transportés par les réseaux d'eaux usées. Les déchets plastiques jetés sur la voie publique vont rejoindre les réseaux d'eaux pluviales, entrainés par les pluies. Ces réseaux sont également la voie de transfert privilégiée des microplastiques issus de l'abrasion des pneumatiques, des freins et des chaussées routières ;

- l'air et le vent : sont concernées par cette voie de transfert les fibres textiles relarguées par frottement, mais également les poussières urbaines et les particules de pneumatiques. Certaines études ont montré que des particules de pneumatiques étaient retrouvées à 50 mètres de distance des routes. Cette voie de transfert concerne autant les macro que les microdéchets ;

- la pluie et la neige : une fois mobilisées dans l'atmosphère sous l'effet du vent, les particules plastiques peuvent retomber à terre avec la pluie ou la neige ;

- les fleuves et les rivières (voir infra ) ;

- les courants marins (voir infra ).

Le rôle des systèmes de gestion des eaux usées et des
eaux pluviales dans le transport de la pollution plastique en France

Deux systèmes de gestion des eaux cohabitent sur le territoire national : les systèmes unitaires et les systèmes séparatifs.

Dans les systèmes unitaires, les eaux usées et les eaux pluviales sont gérées dans le même réseau. Les canalisations sont dimensionnées pour accepter d'importants débits. Toutefois, les capacités des réseaux et des stations d'épuration qui leur sont associées peuvent être amenées à rencontrer des débits très supérieurs aux débits de dimensionnement. Dans de telles situations, une partie du débit est évacuée par des ouvrages (appelés « déversoirs d'orage »), directement dans le milieu naturel avec les déchets solides présents (dont les déchets en plastique). Cette situation correspond aux systèmes les plus anciens, qui ne respectent pas les normes actuelles de conception et de dimensionnement des réseaux de gestion des eaux usées.

Dans les systèmes séparatifs, deux réseaux distincts prennent en charge respectivement les rejets d'eaux usées (réseau d'assainissement) et les eaux pluviales. Les réseaux d'assainissement sont connectés à des stations d'épuration. Les réseaux d'eaux pluviales débouchent le plus souvent sur des bassins de filtration où les déchets vont sédimenter. Les eaux sont ensuite restituées au milieu naturel sans traitement spécifique.

Dans les communes en bord du littoral, les eaux usées et les eaux pluviales sont le plus souvent rejetées dans la mer malgré le renforcement régulier de la réglementation en la matière.

Les eaux usées, aussi bien que les eaux pluviales, emportent avec elles des déchets plastiques (jetés dans les toilettes, dans l'espace public, dans les fossés). Les avaloirs 72 ( * ) sont malheureusement utilisés comme des réceptacles à déchets par de trop nombreuses personnes, mais parfois également par des agents publics de la propreté dans le cadre du nettoyage des caniveaux.

Les grilles présentes en entrée des stations d'épuration « arrêtent » les macrodéchets, mais une partie d'entre eux peut être déroutée vers le milieu naturel via des déversoirs, en cas de très fortes pluies.

Le CEREMA a réalisé une étude sur les flux de macrodéchets dans les systèmes d'eaux usées en France métropolitaine. Il en ressort les conclusions suivantes :

- les flux de déchets seraient compris entre 2 000 et 10 000 tonnes par an, soit entre 40 et 110 grammes par an et par habitant (la fourchette est grande en raison de la diversité des équipements de traitement des eaux usées) ;

- les textiles sanitaires (serviettes hygiéniques, lingettes, tampons, etc.) représenteraient entre 78 et 93 % des macrodéchets ;

- la proportion de plastiques dans ces macrodéchets varierait entre 1 et 6 % (en comptabilisant uniquement les textiles sanitaires alors que d'autres déchets comportent du plastique).

La réglementation sur les eaux résiduaires urbaines prévoit que les rejets par débordement des capacités doivent représenter moins de 5 % des volumes d'eaux usées produits durant l'année. Si cette réglementation était appliquée à l'ensemble du territoire national, le flux global de déchets déversés dans l'environnement par les eaux usées et les eaux pluviales pourrait être réduit de 20 à 30 %.

Source : Florian Rognard, Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

La troisième étape correspond à l'arrivée et à l'accumulation des plastiques dans l'un des quatre compartiments environnementaux que sont les eaux douces, le sol, l'air et les mers et océans. Cette « arrivée » peut se produire indirectement, en suivant les voies de transfert décrites précédemment, ou directement (la fuite se produit directement dans le compartiment : cas des macroplastiques jetés « dans la nature »). La fragmentation en microplastiques peut également se produire directement dans l'un des quatre compartiments environnementaux (dégradation de la peinture des navires dans l'eau, relargage de particules pneumatiques d'un pont traversant un fleuve ou la mer, etc.).

Cette « arrivée » dans un compartiment environnemental n'est pas toujours définitive et les plastiques peuvent passer d'un compartiment à l'autre. Ainsi, une bouteille jetée à la mer peut venir s'échouer sur un rivage. De même, des microplastiques accumulés dans les couches sédimentaires des fleuves peuvent être remobilisés au moment des crues 73 ( * ) et finir dans les océans. La pluie et la neige peuvent également faire « retomber » sur les sols des particules accumulées dans l'atmosphère.

Le cycle de vie des plastiques

Source : Le Bihanic et al, 2019.

2. Une recherche historiquement focalisée sur les océans

Jusqu'à très récemment, les chercheurs, la communauté internationale et le grand public ont focalisé leur regard sur la pollution plastique dans les mers. Plusieurs raisons expliquent ce comportement.

Certains scientifiques comme les océanographes et les biologistes marins s'intéressent de longue date à l'impact des activités humaines sur les océans en tant qu'écosystème, mais également en tant que source majeure d'alimentation pour une grande majorité de la population mondiale.

Dès 1972, deux scientifiques évoquent la présence de plastiques à la surface de la mer des Sargasse 74 ( * ) .

En France, la première étude sur les déchets concernait l'origine espagnole des déchets trouvés sur les plages du Pays Basque et plus au nord. Dix ans après, l'Ifremer a lancé la première étude en mer et commencé à quantifier systématiquement les déchets dans les fonds marins en profitant des campagnes d'analyse des stocks de poissons organisées pour fixer les quotas de pêche au niveau de l'Union européenne.

Au-delà de la communauté scientifique, la forte sensibilité de l'opinion publique à la pollution plastique s'explique par la place symbolique qu'occupent les océans dans l'imaginaire collectif. Comme le faisait remarquer le sociologue Denis Blot lors de son audition, les océans sont associés à des zones vierges qui devraient rester intactes.

La pollution plastique des océans a également concentré l'attention de l'opinion publique au travers d'images devenues symboliques , comme celles par exemple de mammifères marins emprisonnés dans des filets de pêche, de tortues blessées par une paille plastique bloquée dans leur narine ou asphyxiées par des sacs plastiques (voir infra ).

Le milieu maritime apparaît comme le principal domaine de recherche sur la pollution plastique avec une focalisation sur les thématiques environnementales (impacts de la pollution plastique sur les organismes vivants et les écosystèmes) et sur sa caractérisation (en termes de sources et de devenir).

a) La concentration des plastiques dans les gyres

L'association de la présence des déchets en mer aux zones de convergence océanique des courants (gyres) a été faite en 1997 par l'océanographe Charles J. Moore. Cette accumulation de déchets de plastiques au milieu du Pacifique Nord a marqué les esprits. Sur une surface trois fois supérieure à la France (1,6 million de km²), des débris s'accumulent sous l'effet des courants circulaires formant des gyres.

(1) L'explication de ce phénomène

En fonction de leur densité, les déchets déversés dans l'océan vont soit couler vers les fonds marins (comme les PVC de densité supérieure à celle de l'eau de mer), soit flotter et être entraînés par les vents et les courants marins (c'est le cas du polyéthylène PE).

Les directions et les vitesses de déplacement dépendent de l'organisation générale des circulations atmosphériques et océaniques. Celles-ci sont liées et ont pour « moteur » l'énergie solaire. Les disparités d'énergie solaire reçue par la surface terrestre selon les latitudes, couplée à la rotation de la Terre autour de son axe (force de Coriolis) entraînent la formation de grandes cellules de convection atmosphérique 75 ( * ) et des vents. Ces derniers provoquent des mouvements d'eau, de la surface jusqu'à plus de 100 m en profondeur. Les déplacements des déchets plastiques résultent de la cinétique de ces vents et courants marins de surface.

À l'échelle du globe, les courants marins de surface, déviés par la rotation de la Terre, présentent une circulation « en tourbillons », appelés gyres. Les gyres montrent un mouvement en spirale avec enroulement sur la droite dans l'hémisphère nord et sur la gauche dans l'hémisphère sud. Ces vastes mouvements tourbillonnaires s'accompagnent d'un lent flux convergent en surface qui concentre les particules flottantes.

Depuis 1997, quatre autres zones d'accumulation ont été mises en évidence dans le Pacifique Sud, l'Atlantique Nord, l'Atlantique Sud et l'Océan Indien.

(2) Les caractéristiques des déchets dans les gyres

De nombreuses études scientifiques portent sur la quantification et la caractérisation des déchets plastiques accumulés dans les gyres. Une étude de 2018 consacrée au gyre du Pacifique Nord 76 ( * ) apporte les résultats suivants :

- les plastiques représentent 99,9 % des déchets retrouvés dans ce gyre ; près de 1 800 milliards de déchets plastiques y seraient accumulés (la fourchette est comprise entre 1 100 et 3 600 milliards) , correspondant à un poids total de 78 400 tonnes ;

- les déchets plastiques sont répartis en quatre catégories :

> les microplastiques (compris entre 0,5 et 5 mm) : ils représentent 6 400 tonnes (soit 2,5 kg par km²) et 1 700 milliards de déchets, soit une concentration de 678 000 déchets par km² ;

> les mésoplastiques (compris entre 0,5 et 5 cm) : ils représentent 10 000 tonnes (soit 3,9 kg par km²) et 56 milliards de déchets , soit une concentration de 22 000 déchets par km² ;

> les macroplastiques (compris entre 5 et 50 cm) : ils représentent 20 000 tonnes (soit 16,8 kg par km²) et 821 millions de déchets , soit une concentration de 690 déchets par km² ;

> les mégaplastiques (plus de 50 cm) : ils représentent 42 000 tonnes et 3,2 millions de déchets , soit une concentration de 3,5 déchets par km².

En conséquence, si les plastiques de plus de 5 cm représentent près de 80 % des déchets (62 000 tonnes rapportées à 79 000 tonnes), ce sont les plastiques compris entre 0,5 et 5 mm qui sont les plus nombreux (97 % du total).

Lors de la découverte de l'accumulation de plastiques dans le gyre du Pacifique Nord, certains l'ont comparé avec un septième continent, à la fois en raison de sa taille, mais également du nombre considérable de déchets présents. En réalité , il s'agit plutôt d'une « soupe » de plastiques invisible à l'oeil nu (les concentrations de plastiques varient de 678 particules par m² pour ceux compris entre 0,5 et 5 mm à 3,5 par km² pour les déchets dont la taille dépasse 50 cm).

Toujours dans le gyre du Pacifique Nord, les polymères fréquemment retrouvés sont le polyéthylène et le polypropylène 77 ( * ) . Dans la mesure où il s'agit de débris, il est difficile de savoir de quels objets ils proviennent. Toutefois, lorsque les dates de production peuvent être repérées, on constate une certaine ancienneté (de 1977 pour les plus anciens à 2010 pour les plus récents).

En ce qui concerne le stock de plastiques dans ce gyre, les études sont contradictoires. Certaines estiment que la concentration moyenne de plastiques dans ce gyre semble augmenter au fil du temps, alors que d'autres études affirment le contraire.

Les concentrations des déchets plastiques dans les autres gyres ont également fait l'objet d'évaluations . Le gyre du Pacifique Sud contiendrait 19 000 tonnes de déchets ; celui de l'Atlantique Nord 51 300 tonnes ; celui de l'Atlantique Sud 11 600 tonnes et celui de l'Océan Indien 53 600.

Au total, les déchets plastiques accumulés dans les cinq gyres représenteraient près de 215 000 tonnes.

(3) Les autres zones d'accumulation

Au-delà des cinq gyres, plusieurs personnes auditionnées ont insisté sur l'existence d'autres zones d'accumulation.

En mer Méditerranée , la concentration moyenne de plastiques s'élèverait à 115 000 fragments par km², atteignant 600 000 fragments par km² au large de Nice et 2,5 à 8 millions de microplastiques par km² au large du cap Corse 78 ( * ) (alors même que cette zone fait partie du sanctuaire Pelagos créé par la France, l'Italie et Monaco pour protéger les mammifères marins). Elle atteint 64 millions de microplastiques/km² dans le bassin oriental !

Au total, entre 259 à 680 milliards de débris plastiques flotteraient en Méditerranée (469 milliards en moyenne), représentant entre 515 et 3 999 tonnes de microplastiques (2 257 tonnes en moyenne).

68,9 % des débris plastiques collectés et analysés sont en polyéthylène, 20,2 % sont en polypropylène, 3,2 % en polystyrène et 2,6 % en polyamide.

La mer Méditerranée serait la plus polluée au monde puisqu'elle représente seulement 1 % des océans mais concentrerait 7 % des microplastiques.

Les causes de cette situation sont multiples :

- la Méditerranée est une mer semi-fermée dont les eaux mettent 90 ans à se renouveler ;

- elle accueille 30 % du tourisme mondial ;

- 30 % du trafic maritime mondial l'emprunte pour effectuer la route entre le détroit de Gibraltar et le canal de Suez ;

- le pourtour méditerranéen connait une forte pression démographique. Dans de nombreux pays riverains les infrastructures de traitement de l'eau sont déficientes, la collecte des ordures ménagères souvent absente et les rejets de déchets à la mer chroniques ;

- d'importants fleuves se déversent dans la méditerranée (Nil, Rhône, Pô, etc.) charriant 700 tonnes de déchets plastiques chaque année.

La mer du Groenland et la mer de Barents seraient également des zones d'accumulation de déchets plastiques en provenance du gyre de l'Atlantique Nord. Lors de son expédition autour du cercle polaire en 2013, Tara Océans avait découvert une zone d'accumulation de 300 milliards de débris dans l'Arctique, représentant environ 400 tonnes.

Le golfe du Bengale serait également une zone d'accumulation de déchets plastiques, notamment en raison de l'apport de plastiques par le Gange.

b) La théorie du plastique manquant

Source : Alexandra Ter Halle, CNRS.

Comme indiqué précédemment, entre 1,8 million et 5 millions de tonnes de microplastiques seraient relargués dans l'environnement chaque année. Entre 0,8 et 2,5 millions de tonnes entreraient dans les océans 79 ( * ) .

Outre les microplastiques, l'océan est également le réceptacle de macroplastiques :

- entre 8 et 15 millions de tonnes s'y déverseraient chaque année en provenance de la terre ; entre 1,5 et 2 millions de tonnes issues des activités maritimes s'y ajouteraient annuellement.

Au total, entre 10 et près de 20 millions de tonnes de plastiques seraient rejetés dans les océans chaque année.

Pourtant, les mesures et les observations, tout comme les modélisations concluent à une masse de débris flottant à la surface des océans bien inférieure, comprise entre 150 000 et 250 000 tonnes (soit entre 0,75 et 2,5 % 80 ( * ) seulement de la masse totale des plastiques qui arriveraient dans les océans) . L'écart important entre ces deux bilans massiques suscite de nombreuses interrogations au sein de la communauté scientifique. Il interroge en particulier sur le devenir des plastiques dans les océans. Un film-documentaire 81 ( * ) a été consacré au sujet intitulé « Océans, le mystère plastique ».

Plusieurs hypothèses sont avancées pour tenter d'expliquer cette apparente anomalie comptable.

Certains experts estiment qu'une partie non négligeable des microplastiques pourrait être ingérée par des organismes marins . Cette thèse s'appuie sur les observations réalisées sur le terrain qui constatent que de très nombreuses espèces avalent du plastique (des invertébrés aux mammifères marins en passant par les poissons, les oiseaux et les tortues - voir infra ). La quantité de plastique ingérée par le biota reste très difficile à évaluer. En outre, la plupart des microplastiques ingérés par les organismes vivants sont excrétés rapidement et retournent donc dans la mer.

D'autres avancent qu'une grande partie des microplastiques sédimentent. Dès leur arrivée dans l'océan, les particules plastiques de faible densité ont tendance à flotter à la surface de la mer ou dans la colonne d'eau tandis que les microplastiques ayant une densité supérieure à celle de l'eau de mer (1,02 g/cm) vont couler et s'accumuler dans les sédiments. La colonisation des particules plastiques par des organismes vivants augmente leur densité provoquant leur sédimentation ; ce phénomène porte le nom de biofouling. Des observations confirment l'accumulation de plastiques sur les fonds marins mais restent rares en raison de leur complexité et de leur coût. Récemment, des plastiques ont même été découverts dans la fosse des Mariannes, à 11 000 mètres de profondeur. Une étude récente 82 ( * ) montre que les courants thermohalins 83 ( * ) , qui provoquent de vastes accumulations de sédiments sur le fond marin, jouent un rôle considérable dans la distribution des microplastiques, générant des zones d'accumulation avec des concentrations très élevées (190 débris par 50 grammes de sédiment).

Le processus de dégradation auquel seraient soumis les microplastiques est également avancé pour expliquer leur « disparition » comptable des bilans massiques. Plusieurs hypothèses coexistent. La première avance qu'une partie des microplastiques ferait l'objet d'une biodégradation par des bactéries . La seconde évoque un processus de dégradation transformant les microplastiques en nanoplastiques (ces derniers étant difficilement repérables et quantifiables par défaut d'outils d'identification à la disposition des chercheurs).

Une partie des microplastiques présents dans l'eau de mer pourrait être aérosolisée par les vagues déferlantes et ainsi rejoindre les neiges, les glaciers et les lacs de montagne via le grand cycle de l'eau.

Certains scientifiques considèrent que l'agrégation des microplastiques avec la matière organique serait la principale voie de leur migration vers les sédiments des fonds marins. Ces sédiments constitueraient dès lors un important réservoir de microplastiques. D'autres font remarquer que l'agrégation des microplastiques avec la matière organique peut expliquer leur transport au fond des mers. Toutefois, cette matière a vocation à se dégrader. Les microplastiques devraient donc être libérés et remonter dans la colonne d'eau.

Ajoutant du flou aux suppositions qui viennent d'être énoncées, d'autres chercheurs expliquent le plastique manquant comme la résultante de leur va-et-vient et de leur échouage sur les côtes. C'est le cas de deux d'entre eux auditionnés par vos rapporteurs.

Au cours de son audition, Laurent Lebreton a insisté sur le fait que les gyres sont constitués de plastiques plutôt anciens, ce qui exclurait l'hypothèse selon laquelle une grande partie des plastiques coulerait rapidement. Selon lui, une partie du plastique manquant s'expliquerait par les allers-retours effectués par les déchets plastiques entre la mer et les plages.

Lors de son audition, Christophe Maes 84 ( * ) , spécialiste de la modélisation de la dispersion des microplastiques à l'échelle des océans, a fait remarquer que les modèles actuels ne prenaient pas en compte l'échouage des plastiques sur les îles. Ce phénomène pourrait, selon lui, contribuer à l'explication du plastique manquant.

La pollution plastique dans les îles inhabitées et isolées

Le projet de recherche MICMAC 85 ( * ) (2018-2020) vise à évaluer la pollution plastique dans les Iles Eparses, îles inhabitées et isolées de l'Océan Indien situées autour de Madagascar. Quatre îles ont été retenues dans le cadre de ce projet (Europa, Juan de Nova, Glorieuses et Tromelin) où 13 sites d'observation ont permis de collecter 14 455 déchets.

Le bilan de cette étude est sans appel : les plastiques sont omniprésents sur ces îles. S'agissant plus particulièrement des déchets supérieurs à 2,5 cm, les quantités retrouvées sont du même ordre de grandeur que celles observées en métropole (à la différence près que ces îles, inhabitées, ne produisent pas de déchets plastique).

Ainsi, 929 déchets ont été récoltés sur 100 m de côte en moyenne et 417 déchets sur 100 m en médiane dans les îles éparses contre respectivement 982 et 547 en métropole.

Sur Tromelin, 6 076 plastiques supérieurs à 2,5 cm ont été récoltés sur 100 m, soit 6 fois plus qu'en Métropole.

Source : Centre de documentation, de recherches et d'expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre).

En conclusion, la connaissance et la compréhension du devenir des plastiques dans les océans restent encore floues et partielles . S'il existe bel et bien une répartition verticale des plastiques entre la surface des océans, la colonne d'eau et les sédiments, ni les processus de passage d'un compartiment à l'autre, ni la quantification des microplastiques dans chacun de ces compartiments ne sont connus.

En raison des connaissances parcellaires, de nombreux scientifiques plaident pour la mise en place de réseaux d'observation et de surveillance des plastiques dans les océans.

3. Des études récentes sur les fleuves et les rivières
a) Le rôle prépondérant des fleuves

Plusieurs études ont mis en exergue le rôle des fleuves et des rivières dans le transport des plastiques vers les océans.

Deux études publiées en 2017 ont établi la responsabilité des grands fleuves asiatiques et, dans une moindre mesure, africains, en matière de pollution plastique.

L 'étude du Helmoltz Centre for Environmental Research 86 ( * ) a établi que 88 à 95 % des déchets plastiques des océans provenaient de seulement dix cours d'eau , dont huit situés en Asie et deux en Afrique. Le fleuve chinois Yang-Tsé est considéré comme celui qui transporte le plus de déchets plastiques au monde. Il charrierait 1,5 million de tonnes de plastiques par an.

La seconde étude 87 ( * ) menée conjointement par la fondation néerlandaise The Ocean Cleanup et l'université de Caroline du Nord confirme la responsabilité des fleuves asiatiques, mais dans une moindre mesure. Selon cette étude, ce sont 20 fleuves, principalement asiatiques, qui sont responsables de 67 % des déchets plastiques déversés dans les océans . Quant au Yang-Tsé, il reste le fleuve le plus pollueur, mais il ne transporterait « que » 300 000 tonnes de déchets plastiques par an, soit cinq fois moins que le chiffrage obtenu par l'étude allemande.

Au cours de leurs auditions, vos rapporteurs ont entendu deux scientifiques du Centre de formation et de recherche sur les environnements méditerranéens 88 ( * ) (CEFREM) de Perpignan. Sans remettre en cause le rôle important des fleuves asiatiques dans le transport des plastiques vers les océans, ils insistent également sur la responsabilité des fleuves européens et américains .

Selon leurs estimations, au niveau mondial, les fleuves rejetteraient entre 6 000 à 7 000 tonnes de microplastiques par an dans les océans avec une répartition équilibrée entre les océans : 28 % des rejets se feraient vers le Pacifique Nord par le biais des fleuves d'Asie et d'Amérique du Nord, 24 % des rejets atteindraient l'Atlantique Nord via des fleuves d'Europe et d'Amérique du Nord, 23 % des rejets se feraient vers l'Océan Indien, 12 % des rejets concerneraient le Pacifique Sud et 13 % l'Atlantique Sud.

Ces différences dans les estimations s'expliquent par les critères retenus. Dans l'étude du CEFREM, le critère de mauvaise gestion des déchets plastiques a été écarté au profit d'un critère de densité de population. Ce critère de mauvaise gestion des déchets plastiques a été introduit par l'étude précitée de Jambeck et al de 2015. Selon les scientifiques du CEFREM, c'est un paramètre statistique fondé sur des données nationales de gestion des déchets (taux de recyclage, site d'enfouissement, décharges) dont la fiabilité est remise en question à très grande échelle pour les modèles d'apport fluviaux.

D'autres études se sont attachées à quantifier la responsabilité des fleuves dans le transport des microplastiques.

Une étude de 2015 89 ( * ) évalue le flux annuel de microplastiques dans la Seine à la sortie de Paris à environ 800 milliards de particules.

En 2020, une autre étude 90 ( * ) évalue à 22 tonnes par an la masse de microplastiques rejetés par le Rhône en Méditerranée.

Globalement, les recherches actuelles montrent que l'on retrouve systématiquement des microplastiques dans tous fleuves étudiés. Elles concluent également à des flux de l'ordre de plusieurs milliards de particules par an pour les microplastiques compris entre 0,3 et 5 mm.

Les volumes de microplastiques transportés par les fleuves sont fortement corrélés à leurs débits et aux densités de population de leur bassin versant. L'importante variabilité de ces deux paramètres d'un fleuve à l'autre déclenche les écarts importants entre les différentes estimations.

L e recueil de données est primordial pour remédier à cet écueil. À cet égard, l'expédition de Tara Océans sur les dix plus grands fleuves européens, menée entre mai et novembre 2019, devrait apporter de précieuses informations. En effet, plus de 2 700 échantillons ont été prélevés en surface et dans la colonne d'eau. S'ils n'ont pas encore été analysés, l'expédition a déjà permis de confirmer un résultat décisif pour la compréhension de la pollution plastique. Contrairement aux idées reçues, le processus de fragmentation ne commence pas lors de l'arrivée des plastiques dans les océans. Il a déjà lieu dans les fleuves ou sur le sol ou sur les plages à cause de l'effet des rayons solaires, et la majorité des plastiques transportés par ces derniers sont sous forme de microplastiques.

Si les rivières jouent elles aussi un rôle déterminant dans le transport des plastiques, leur contribution encore inconnue. Selon Laurent Lebreton, elle est comprise entre 9 et 50 %, ce qui laisse une marge d'incertitude considérable.

b) Un processus complexe qui reste à approfondir

Le transport des plastiques par les fleuves est un processus dynamique complexe qui doit faire l'objet de recherches complémentaires. De nombreuses équipes scientifiques se sont saisies du sujet. Le projet MacroPLAST 91 ( * ) illustre ces nouvelles voies de recherche. Il porte sur l'estimation des flux de macrodéchets issus du bassin de la Seine et rejetés à la mer. Il a notamment analysé le rôle des crues dans le transport des déchets plastiques.

Les résultats montrent que les déchets circulent trois fois plus vite en période de crue qu'en régime de basses eaux.

D'une manière générale, l'apport annuel de débris microplastiques aux océans par les cours d'eau relève d'une dynamique saisonnière marquée par des déversements jusqu'à dix fois plus élevés après de fortes pluies.

Les crues impactent également le transport des microplastiques, à travers le phénomène de remobilisation : alors qu'en hydrologie de basses eaux, les microplastiques s'accumulent dans les sédiments et au niveau des berges des rivières, les crues les détachent de leurs zones d'accumulation pour les remettent en suspension, et donc en mouvement.

Dans le cadre du projet MacroPLAST, des déchets plastiques ont été « tagués » afin de décrire les phénomènes d'échouage, l'influence de la marée ainsi que l'apparition de zones d'accumulation préférentielles. Les flux de déchets ne sont pas linéaires et certains déchets restent plusieurs années dans la Seine avant d'atteindre l'estuaire.

Le tableau suivant réunit les principaux résultats de deux recherches effectuées sur le transport de déchets plastiques par les fleuves (les chercheurs cités ayant été auditionnés par vos rapporteurs).

Équipe

Fleuve

Flux de plastiques

Autres résultats

J. Gaspéri

Seine

100 à 200 t / an

6 à 11 g / hab /an

soit 0,01 à 0,02 % des 52 kg de plastiques consommés par habitant

P. Kerhervé

Têt

1 à 3 t /an

Plastiques flottants uniquement (mégots, fragments de polystyrène expansé, emballages, cotons-tiges)

4. Une connaissance très partielle du devenir des plastiques dans le sol
a) Une pollution mal connue

Le comportement des microplastiques dans les sols est mal connu autant sur le sujet de leur mobilité que sur celui de leur évolution. Ces informations s'avèrent pourtant cruciales à la bonne connaissance de la pollution des sols par les microplastiques.

Selon Christian Mougin 92 ( * ) , la communauté scientifique française ne s'est véritablement saisie de la question de la pollution plastique des sols que depuis 2016 à la faveur de l'organisation d'un premier colloque sur le sujet 93 ( * ) .

Différents obstacles freinent la connaissance sur la dynamique des microplastiques dans les sols.

En premier lieu, les méthodes habituellement utilisées pour étudier les microplastiques dans les milieux aquatiques (digestion de la matière organique, séparation densimétrique, filtration, comptage, caractérisation) ne sont pas adaptées à leur suivi dans les sols. Il est donc nécessaire de créer des outils d'analyse spécifiques.

En second lieu, alors que les sources de la pollution plastique des sols sont en nombre limité, les méthodes d'estimation des apports de microplastiques ne sont pas harmonisées et les unités de comptage sont hétérogènes et difficilement comparables d'une étude à une autre, ou d'une source de pollution à une autre.

Le schéma suivant illustre la très grande hétérogénéité des unités retenues pour caractériser les flux de microplastiques associés aux différentes sources de pollution.

Les sources d'apports de microplastiques aux sols
et l'estimation des flux associés

Sources de microplastiques

Flux estimés

Auteurs

Pays

Retombées atmosphériques

13 à 110 particules/m²/j
27 ug/kg sol/an

Dris et al. 2016

France

Films plastiques

0,03 à 10,82 kg/ha/an

Huang 2020

Chine

Irrigation

3 900 à 17 000 p 94 ( * ) /m 3 »

Zhou 2020

Chine

Engrais organiques et composts

0,08 à 6,3 kg/ha/an

Blasing 2018

Slovénie

Épandage des boues de stations d'épuration

0,2 à 8 mg/ha/an/hab

Nizetto 2016

Europe

1,68 à 40,8 x 10 6 p/ha/an

Blasing 2018

États-Unis

10 6 à 10 9 p/ha/an

Qi 2020

Chine

Source : Christian Mougin, INRAe.

Cinq sources de microplastiques sont identifiées : les précipitations atmosphériques ; les boues d'épuration des stations d'épuration ; les films plastiques utilisés pour l'agriculture ; les engrais et composts ; l'irrigation. Compte tenu de l'hétérogénéité des unités de mesure associées à chaque des sources, il est difficile de pouvoir établir des comparaisons solides et de hiérarchiser les contributions.

Au-delà de la quantification des apports de microplastiques, il existe peu d'analyses sur l'exposition des organismes du sol à la pollution plastique . Les expérimentations sont menées sur un temps court. Pour une bonne compréhension de l'impact de la pollution plastique du sol sur les écosystèmes, il est nécessaire de développer un biomonitoring permettant le suivi des sols.

Des métaux tels que le zinc, le plomb, l'arsenic ou le chrome et des molécules issues de la dégradation des produits phytosanitaires ont la capacité à s'adsorber sur les microplastiques sous des formes toxiques s'accumulant dans les sols. Cette combinaison serait à l'origine de la toxicité des macroplastiques, davantage que les polymères.

Actuellement, seuls quelques articles isolés ont été publiés, dont l'un sur les invertébrés du sol 95 ( * ) . Il montre un effet négatif de la pollution plastique sur leur taux de reproduction, sur leur masse corporelle et sur leur mortalité.

S'agissant des impacts sur les micro-organismes, la présence de microplastiques dans les sols est de nature à perturber la diversité et l'abondance des communautés microbiennes avec des effets indirects, par exemple, sur le cycle de l'azote. Les bactéries fixatrices de l'azote sont susceptibles d'être sensibles aux microplastiques en fonction de leur durée d'exposition.

Les effets sur les végétaux ne sont pas plus étudiés. Il serait pourtant pertinent de s'y intéresser considérant l'influence des paramètres édaphiques susceptibles d'être impactés par les microplastiques, sur les phases clés du développement végétal que sont la germination et la disponibilité en éléments nutritifs. La translocation des particules plastiques dans les plantes, et en particulier dans les organes consommés, n'est pas non plus étudiée.

L'évolution des microplastiques dans les sols est un autre sujet important. Leurs tailles et leurs formes influencent leur mobilité et leur faculté, ou non, à migrer en profondeur vers les nappes phréatiques.

S'il existe peu de travaux de recherche sur les plastiques dans les sols en France, des dispositifs existants pourraient être utilisés pour leur intégrer la problématique des plastiques. C'est le cas du dispositif in natura , mis en place il y a 30 ans, pour surveiller la qualité des sols. De manière identique, le réseau Recotox 96 ( * ) pourrait élargir son action aux polluants compris dans les microplastiques. Les personnes auditionnées ont signalé la difficulté à obtenir des crédits à long terme pour financer des observatoires (alors même qu'il existe un important besoin de données chiffrées sur de longues périodes).

b) Une pollution majeure

Selon différentes publications, la pollution des écosystèmes terrestres (sols et cours d'eau) par les microplastiques pourrait être plus importante que celle du milieu marin.

Lors de son audition, Nathalie Gontard 97 ( * ) a précisé que 90 % des plastiques finissent dans l'environnement (soit 70 kg par personne et par an), dont seulement 3 % dans les océans, mais 87 % dans les sols.

En 2017, au niveau européen, environ 6 millions de tonnes de films de plastiques agricoles ont généré 11 millions de tonnes de déchets. À l'horizon 2030, la filière agricole devrait utiliser 15 millions de tonnes de films plastiques, générant une importante quantité de déchets 98 ( * ) . Si en France, les acteurs privés de l'agrofourniture (les metteurs en marché, les distributeurs, les agriculteurs) ont créé, à travers Adivalor, une filière efficace de collecte et de traitement des déchets 99 ( * ) , c'est loin d'être le cas dans la plupart des pays de l'Union européenne. Les films de paillage pourraient constituer la principale source de pollution plastique des sols sur lesquels ils sont utilisés.

Une autre source importante de microplastiques dans les sols est attribuée aux boues des stations d'épuration principalement valorisées par épandage pour la fertilisation des terres agricoles. Ces boues d'épuration des eaux usées contiennent, en quantité importante, des microfibres synthétiques issues des lessives (cf. supra partie relative à la formation des microplastiques) .

La production de boues d'épuration des eaux urbaines avoisine les 10 millions de tonnes de matières sèches en Europe. 42 % font l'objet d'un épandage agricole, 14 % d'un compostage, 32 % sont incinérées et 12 % sont enfouies.

En France, 70 % des boues sont valorisées dans la filière agricole dont 30 % sont compostées.

Selon les études, les boues d'épuration concentrent entre 1 000 et 100 000 particules de plastiques par kg de matière sèche, ce qui équivaudrait pour la France au rejet dans les sols de 100 000 tonnes de microplastiques par an 100 ( * ) .

5. Une recherche sur la pollution de l'air par les microplastiques à construire

Les connaissances sur la pollution de l'air par les microplastiques sont clairsemées. À ce jour, seules quelques études ont été publiées sur les retombées de particules plastiques en provenance de l'atmosphère 101 ( * ) , avec des résultats sensiblement différents.

La première concerne Paris 102 ( * ) . Seules les particules supérieures à 100 um ont été étudiées. Les résultats peuvent être résumés de la manière suivante. Le nombre de particules observées est de 118 par m 2 et par jour (avec une variabilité qui oscille entre 29 et 280 particules par m 2 et par jour). 90 % des microplastiques sont des fibres. L'étude conclut également à un dépôt annuel de 6 à 17 tonnes de fibres dans la métropole parisienne.

La deuxième étude 103 ( * ) a été réalisée à Hambourg et évalue le nombre de particules à 275 par m 2 et par jour (avec une fourchette comprise entre 136 et 512 particules). Les petites particules (taille inférieure à 63 um) sont prédominantes.

La troisième étude 104 ( * ) réalisée à Donggang en Chine évalue le nombre de particules par m 2 et par jour à 244 (fourchette des résultats entre 175 et 313).

Enfin, une étude 105 ( * ) réalisée à la station météorologique de Bernadouze, dans les Pyrénées, évalue le nombre de particules par m 2 et par jour à 365 avec une prédominance des particules inférieures à 25 um. Cette étude a également révélé la capacité des microplastiques à être transportés par les airs. En effet, les concentrations de particules retrouvées dans ce lieu isolé en altitude sont comparables, voire supérieures à celles observées dans les grandes métropoles. Cela démontre le transport des microplastiques par la voie atmosphérique.

S'agissant plus particulièrement de l'observation des particules en suspension, seules les études réalisées à Paris, à Hambourg et dans les Pyrénées s'y sont intéressées.

Vos rapporteurs ont également été informés de l'existence de deux études françaises mesurant les retombées de fibres textiles dans les atmosphères intérieure et extérieure.

Cette première compilation des études sur la pollution atmosphérique par les microplastiques souligne que la thématique reste encore peu explorée par la communauté scientifique . Les instruments, autant que les méthodologies restent à développer. Si, jusqu'à une date récente, seules les fibres d'une taille supérieure à 50 um ont été recherchées, il semblerait que la majorité des particules plastiques présentes dans l'atmosphère sont plus petites, soulevant les enjeux de leur détection et des précautions à prendre afin d'éviter la contamination des échantillons (par les microfibres textiles produites par les vêtements des opérateurs par exemple).

Les études disponibles privilégient les investigations sur la taille des microplastiques présents dans l'air au détriment de leur composition chimique. Il est donc difficile de connaître l'origine des microfibres retrouvées dans l'atmosphère (textiles, lingettes, cordages, etc.). Les chercheurs ignorent également leurs impacts sur l'environnement et sur la santé humaine. Toutefois, considérant le diamètre des fibres observées, compris entre 7 et 15 um, une partie d'entre elles peuvent être assimilées à des PM10 106 ( * ) . Les directives de l'Union européenne relatives à la qualité de l'air ambiant extérieur contiennent des dispositions détaillées en ce qui concerne les PM10. Étant donné qu'aucun type, ni aucune composition de matériau, ne sont spécifiés, tous les microplastiques en suspension dans l'air dont la taille correspond aux PM10 sont automatiquement concernés.

Compte tenu de leur taille, les microplastiques en suspension dans l'air pourraient avoir un impact sur la santé humaine puisqu'ils sont susceptibles d'être inhalés.

Les études sur les microplastiques en suspension dans l'air libre et dans des environnements intérieurs tendent à démontrer que l'atmosphère est une voie importante de diffusion des microplastiques vers les autres compartiments environnementaux.

Sous l'effet du transport atmosphérique, les microplastiques peuvent parcourir de très longues distances en raison de leur légèreté. Les observations de microplastiques dans les Alpes, mais également sur de la glace flottante au large du Groenland, montrent leur capacité à être transportés sur des milliers de kilomètres puis à se déposer sous les effets du vent, de la pluie ou de la neige.

IV. LES IMPACTS : D'UNE POLLUTION VISUELLE À UN RISQUE SANITAIRE MAJEUR

A. LES IMPACTS SOCIO-ÉCONOMIQUES

Il est très difficile d'évaluer l'impact économique de la pollution plastique. Le Programme des Nations Unies pour l'Environnement estime qu'à l'échelle mondiale, les dommages annuels causés aux environnements marins atteignent 8 milliards de dollars.

Les secteurs les plus impactés sont ceux de la pêche, du tourisme et du transport maritime.

1. Les impacts sur la pêche

Une étude de 2013 107 ( * ) évalue à 61 millions d'euros le coût des déchets sauvages pour l'industrie européenne de la pêche, soit 1 % des recettes générées par les captures réalisées par la flotte de l'Union européenne en 2010.

Dans son rapport sur la Méditerranée, le WWF évalue à 138 millions d'euros le montant des pertes du secteur de la pêche pour l'ensemble des pays du pourtour méditerranéen.

Cette évaluation intègre les pertes de revenus liées à une moindre capture de poissons, l'allongement des durées de pêche (nettoyage et réparation des filets), la dégradation des filets et les avaries des bateaux provoquées par les macrodéchets.

À long terme, les filets fantômes peuvent avoir un impact non négligeable sur les stocks de poissons. Dans le Golfe du Lion, 2 à 3 % des stocks halieutiques seraient capturés par les filets de pêche abandonnés.

2. Les impacts sur le tourisme

La pollution plastique a plusieurs effets sur le secteur du tourisme.

Elle altère la valeur esthétique des lieux pollués et limite les opportunités de loisirs, diminuant la fréquentation et occasionnant une perte de revenus pour l'ensemble des acteurs économiques qui dépendent du tourisme. Ce n'est pas un hasard si de nombreux labels environnementaux (« ports propres » ou « pavillon bleu ») ont été lancés pour garantir aux touristes une gestion des déchets efficace et, par conséquent, la propreté des lieux.

La pollution plastique entraîne également des coûts supplémentaires aux collectivités locales chargées de la collecte et du traitement des déchets. En raison de l'afflux de touristes, la quantité de déchets augmente. Par ailleurs, certains lieux peu fréquentés en dehors des périodes touristiques, comme les plages par exemple, doivent être nettoyés régulièrement, voire quotidiennement en haute saison.

Vos rapporteurs ont réalisé une enquête auprès de l'ensemble des communes littorales françaises 108 ( * ) .

L'enjeu du nettoyage des littoraux

Une enquête auprès des communes littorales a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les opérations de nettoyage de leurs rivages -qu'il s'agisse des rivages maritimes (côtes ou plages) ou de ceux des étendues d'eaux continentales (lacs principalement) - (cf. annexe III).

Les réponses à l'enquête montrent que seulement 29 % des communes littorales sont épargnées par la pollution de leurs plages par des déchets plastiques. Les communes sont conscientes que la présence de ces déchets altère leur image. Afin d'assurer leur attractivité, elles s'efforcent donc de nettoyer les plages, les côtes ou les rivages de leurs territoires ; en particulier en été, lorsque la fréquentation saisonnière est la plus importante.

Selon l'enquête, 85 % des communes littorales sont concernées par des opérations de nettoyage. Dans 63 % des cas, c'est la commune elle-même qui en est à l'initiative. 63 % des opérations de nettoyage font appel à des partenaires (principalement des associations de protection de l'environnement).

Les déchets ramassés sont triés dans 82 % des opérations de nettoyage (58 % partent en valorisation matière, 22 % en enfouissement et 20 % en valorisation énergétique).

Les réponses recueilles dans le cadre de l'enquête ont également été valorisées pour chiffrer le coût des opérations de nettoyage : il s'élève, annuellement, à 6 570 euros par kilomètre de rivage. Ce ratio, même s'il doit être considéré avec précautions considérant le manque de précision associé à certaines réponses, permet d'effectuer une évaluation du coût de la pollution plastique des littoraux à l'échelle de la France métropolitaine. Pour un littoral qui s'étend sur 5 853 kilomètres, le coût de nettoyage annuel se chiffrerait donc à 38 millions d'euros.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Selon Yann Wehrling 109 ( * ) , le coût du nettoyage des plages s'élèverait à 630 millions d'euros par an au niveau de l'Union européenne.

Selon le WWF, le secteur du tourisme en Méditerranée verrait ses recettes amputées de 268 millions d'euros par an en raison de la pollution plastique.

3. Les impacts sur la plaisance et le transport maritime

La pollution plastique engendre des coûts de maintenance à la suite des avaries mécaniques causées par les macrodéchets. Les filets sont particulièrement redoutés : ils peuvent s'enlacer autour des hélices, des ancres et des gouvernails. Par ailleurs, les ports et les marinas doivent entreprendre régulièrement des opérations de nettoyage et de dragage . Enfin, une partie des coûts des secours en mer sont générés par des actions de sauvetage de navires endommagés par la pollution plastique.

Une étude de 2009 110 ( * ) s'intéresse au chiffrage des dommages causés par les déchets marins aux services de ferry à grande vitesse de Hong Kong. Leur coût est estimé à 19 000 dollars par navire et par an. La même étude chiffre à 279 millions de dollars le montant des dommages causés à l'industrie du transport maritime dans la région de la coopération économique Asie-Pacifique. Cette évaluation doit être considérée avec prudence compte tenu du manque de données sur le sujet.

Selon l'étude du WWF sur la Méditerranée, les pertes liées à la pollution plastique subies par les activités maritimes dans cette zone s'élèveraient à 235 millions d'euros.

Les préjudices économiques de la pollution plastique ne se limitent pas aux seules activités en mer mais concernent également les infrastructures portuaires : les coûts supportés par les ports du Royaume-Uni, pour les opérations de nettoyage, se chiffrent annuellement à 2,4 millions 111 ( * ) d'euros ;

Une étude 112 ( * ) de 2012 évalue à 300 000 euros le coût total de nettoyage des déchets du port de Barcelone ; la ville de Marseille a acheté un bateau pour aspirer les déchets flottants dans le vieux port. Lors de l'audition des représentants de Port Camargue, il a été présenté la mise en place, depuis trois ans, d'un service de collecte des déchets sur le plan d'eau fonctionnant entre deux et sept jours par semaine selon les saisons. Au total, Port Camargue verse une redevance spéciale de 200 000 euros à la collectivité compétente pour couvrir les coûts liés à la collecte des déchets.

B. LES IMPACTS SUR LES ORGANISMES VIVANTS

Aucun organisme marin n'échappe aux impacts de la pollution plastique. 560 espèces sont impactées à des degrés divers par les macro et les microplastiques, dont une cinquantaine sont consommées par l'Homme.

1. Le risque physique
a) Les enchevêtrements et les étranglements

De nombreux déchets plastiques présents dans l'environnement constituent un vrai danger pour les animaux . Des cas d'enchevêtrement ont été signalés pour au moins 344 espèces, toutes les espèces de tortues marines, plus des deux tiers des espèces de phoques, un tiers des espèces de baleines et un quart des oiseaux de mer. L'enchevêtrement dans des déchets plastiques concerne également 89 espèces de poissons et 92 espèces d'invertébrés.

Au Nord de l'Australie, les 8 000 filets de pêche fantômes collectés entre 2005 et 2012 auraient causé la mort de plus de 14 000 tortues 113 ( * ) .

Les enchevêtrements impliquent le plus souvent des engins de pêche abandonnés (cordes et filets) mais des cas d'enchevêtrements occasionnés par d'autres déchets plastiques sont également signalés (sacs plastiques, anneaux plastique de conditionnement des cannettes, etc.).

Dans 80 % des cas les enchevêtrements ont un effet néfaste pouvant aller jusqu'à la mort de l'animal par asphyxie (incapacité à remonter à la surface pour respirer, étranglement) ou par suite d'hémorragies.

Les effets sublétaux sont également considérables lorsqu'ils provoquent des blessures susceptibles de s'infecter ou lorsqu'ils entraînent des amputations (queue, ailerons, nageoires) réduisant l'agilité des animaux blessés.

b) L'ingestion

L'ingestion de plastique peut se produire involontairement, intentionnellement (le déchet ressemble par sa forme ou sa couleur à une proie 114 ( * ) ) ou indirectement (ingestion de proies contenant du plastique).

331 espèces seraient concernées par l'ingestion de déchets plastiques en mer, dont 40 % des oiseaux marins, la totalité des tortues marines et la moitié des mammifères marins.

Selon Jean-François Ghiglione 115 ( * ) , 1,4 million d'oiseaux et 14 000 mammifères seraient retrouvés morts chaque année en raison de l'ingestion de plastiques (sans compter les mammifères qui échappent à cette macabre comptabilité parce qu'ils ont coulé sur les fonds marins après leur mort).

Les quantités de plastique avalées peuvent être considérables. Régulièrement, les journaux signalent l'échouage de cachalots dont l'estomac est rempli de kilos de plastiques. 95 % des fulmars 116 ( * ) ont du plastique dans leur estomac. La quantité moyenne constatée par individu s'élève à 0,6 grammes. Ce qui correspond, pour un être humain, à 60 grammes de plastique.

L'ingestion peut provoquer la mort à travers l'obstruction ou la perforation de l'estomac ou des intestins.

Les conséquences peuvent être sublétales : l'ingestion de plastiques peut entraîner des inflammations ou une réduction de la prise alimentaire (par diminution du volume d'estomac disponible ou en raison d'une sensation de satiété trompeuse).

Les organismes filtreurs sont particulièrement concernés par l'ingestion de microplastiques. Néanmoins, aucune accumulation n'a été constatée jusqu'à présent et une fois passés par le transit digestif, les microplastiques sont rejetés dans l'environnement. Comme évoqué plus haut dans le rapport, le sanctuaire Pelagos héberge plus de microplastiques que de plancton (ratio de 2,8 microplastiques pour un organisme planctonique). Dès lors, les organismes qui se nourrissent de plancton n'en trouvent que 26 % parmi la totalité du nombre de particules qu'ils ont extraites de l'eau de mer par filtration.

La taille des plastiques ingérés est déterminée par la taille de l'organisme. De minuscules particules, telles que les fibres plastiques, peuvent être absorbées après filtration par de petits organismes tels que les huîtres ou les moules. Elles sont néanmoins excrétées rapidement.

Des plastiques plus gros, tels que des films, des paquets de cigarettes ou des emballages alimentaires peuvent être avalés par de grandes espèces de poissons. Ainsi, l'analyse de l'estomac d'un cachalot a révélé l'ingestion de déchets plastiques volumineux : 9 m de corde, 4,5 m de tuyau, deux pots de fleurs et de grandes quantités de bâches en plastique. Les observations de mammifères, tortues, oiseaux marins retrouvés morts remplis de plastiques attestent d'une accumulation de déchets plastiques qui n'ont pas pu être évacués.

Avant leur excrétion, lors du transit digestif, les microplastiques peuvent libérer des substances chimiques.

2. Le risque chimique

L'ingestion de microplastiques par les organismes vivants peut également engendrer des effets chimiques par libération durant le transit digestif de constituants chimiques.

a) Les plastiques sources de contaminants

Comme indiqué précédemment dans le rapport, la fabrication des plastiques associe aux polymères des additifs potentiellement toxiques et susceptibles de se diffuser lors de leur séjour dans l'environnement ou dans les organismes.

(1) La variabilité des effets toxicologiques sur les organismes vivants

Plusieurs auditions ont été consacrées à la compréhension des effets écotoxicologiques de l'exposition des organismes vivants aux microplastiques.

Selon les espèces, les microplastiques (et les contaminants chimiques qui les composent) ont des effets sur la physiologie, le métabolisme, le comportement et la reproduction.

(a) Les coraux en eau froide

Une étude en aquarium menée par l'observatoire océanologique de Banyuls a évalué l'impact des plastiques sur la physiologie des coraux. Il en ressort qu'après 86 jours d'exposition à des microplastiques, leur taux de croissance diminue de 30 % et le demeure jusqu'à 5 mois. Ce constat s'expliquerait par la dépense énergétique nécessaire à l'élimination des particules de plastique ingérées par les coraux.

(b) Les poissons

Plusieurs chercheurs auditionnés ont produit des travaux sur les effets des microplastiques sur les poissons.

Une étude de l'Ifremer 117 ( * ) s'est en particulier intéressée à la toxicité chronique des microplastiques. Trois types de microplastiques différents 118 ( * ) ont été ajoutés à l'alimentation de deux espèces de poisson 119 ( * ) . À partir de 4,5 mois, les chercheurs constatent un retard de la croissance chez les deux espèces de poisson quel que soit le type de microplastique utilisé. L'effet est accentué chez les femelles.

La reproduction est également perturbée. Chez les médakas 120 ( * ) , le nombre d'oeufs pondus diminue sensiblement. Chez les poissons-zèbres 121 ( * ) c'est le succès des pontes qui est affecté à la baisse.

Une autre étude a exposé pendant trois semaines des larves de médakas à des microplastiques collectés sur trois îles isolées 122 ( * ) et composés de polymères adsorbés par différentes substances chimiques 123 ( * ) . Après 30 jours d'exposition, les larves concernées par les microplastiques des îles de Pâques et de Guam ont vu leur croissance ralentir (diminution de la taille du corps et de la taille de la tête avec certains plastiques) et leur comportement natatoire augmenter. Par ailleurs, la mortalité a augmenté pour les larves exposées aux microplastiques d'Hawaï.

(c) Les huîtres

De nombreuses études sont menées sur les huîtres. À Tahiti, l'Ifremer s'est intéressé à l'impact de microplastiques sur l'huître perlière 124 ( * ) . Quatre valeurs de concentration en microbilles de 6 à 10 um ont été retenues 125 ( * ) . Après deux mois d'exposition en aquarium, il a été observé une diminution de l'efficacité d'assimilation, du gain d'énergie et de la gamétogénèse (diminution d'autant plus importante que la concentration en microplastiques était élevée). En parallèle aux observations de laboratoire, les chercheurs ont également suivi des huîtres dans leur milieu naturel (lagons avec présence de 75 à 140 particules de microplastiques par mètre cube d'eau). In situ il a été démontré une toxicité des phtalates contenus dans les structures perlières neuves.

D'autres recherches de l'Ifremer se sont intéressées aux impacts de l'exposition d'huîtres adultes à des microbilles de polystyrène durant deux mois. Les résultats montrent des effets négatifs sur la fonction de reproduction des huîtres . Le protocole d'exposition retenu se traduit par une diminution de 38 % du nombre d'ovocytes, une réduction de leur taille de 8 %, une baisse de 23 % de la mobilité des spermatozoïdes. Les effets constatés concernent également la descendance de la population initialement exposée.

D'autres effets sont démontrés par des travaux menés par l'Université catholique de l'Ouest à Angers. Des huîtres sont exposées durant 10 jours à différentes concentrations de particules de polyéthylène et de polypropylène. Bien que les particules soient éliminées très rapidement, les résultats démontrent que la présence des microplastiques dans l'organisme déclenche un stress oxydant avec augmentation des enzymes agissant sur les radicaux libres. La présence des microbilles de plastiques enclenche une réaction du système immunitaire qui considère les microplastiques comme des corps étrangers à éliminer de l'organisme. Le transit en quelques heures, par le tube digestif, de microplastiques peut donc avoir des effets qui vont au-delà d'une perturbation de l'alimentation et du métabolisme.

(2) Un besoin de prise en compte des expositions sur le temps long

Les recherches qui viennent d'être présentées démontrent que l'exposition des organismes vivants aux microplastiques a des conséquences variables selon les espèces, les polymères et les protocoles. Néanmoins, elles ne permettent pas de conclure avec certitude sur la nature des impacts dans le milieu naturel où l'exposition (de nature chronique 126 ( * ) ) est sensiblement différente de celle simulée au laboratoire (qui s'apparente davantage à une exposition aigüe 127 ( * ) ).

La durée d'exposition étant un facteur aggravant, des recherches sur les conséquences des expositions sur le temps long sont nécessaires. Elles restent rares à ce jour, en particulier en raison d'une prise de conscience récente du sujet.

(3) Un besoin de prise en compte des effets sur la chaîne trophique et à l'échelle des écosystèmes

Comme le souligne la synthèse des premières rencontres du groupement de recherche « Polymère et océans » : « la plupart des approches (plus de 90 % du total des publications sur les impacts environnementaux des plastiques) portent aujourd'hui sur l'étude des impacts toxiques au niveau de l'individu, du niveau infra-cellulaire à celui de l'organisme ; par contraste, les conséquences de l'exposition aux plastiques à l'échelle des populations, des communautés ou des écosystèmes restent très peu abordées par la recherche. »

(4) Une source de pollution diffuse certaine mais difficile à quantifier : les perturbateurs endocriniens

En diffusant différentes molécules chimiques dans leur environnement (plastifiants, charges, additifs), les plastiques agissent comme une source de pollution diffuse. Leurs toxicités se cumulent par « effet cocktail » sans que la science puisse, à l'heure actuelle, en déterminer avec certitude les impacts.

Les perturbateurs endocriniens présents dans les plastiques illustrent parfaitement cette problématique 128 ( * ) . Ils correspondent à des substances chimiques d'origine naturelle ou artificielle qui peuvent interférer avec le fonctionnement du système hormonal et provoquer des dysfonctionnements des organes et de l'organisme.

De nombreux additifs utilisés pour la fabrication des plastiques sont reconnus comme perturbateurs endocriniens : il s'agit des phtalates (utilisés comme plastifiants), des retardateurs de flammes perfluorés ou polybromés, du bisphénol A.

Les perturbateurs endocriniens contenus dans les plastiques

Le bisphénol A et les autres bisphénols

Le bisphénol A (BPA) est utilisé depuis cinquante ans pour la fabrication des plastiques. Il peut entrer dans la composition de nombreux objets de la vie courante : emballages alimentaires, boîtes de conserve, revêtements en plastique, tickets de caisse, etc. La principale source d'exposition au BPA est l'alimentation par migration vers les aliments du BPA présent dans les emballages. Le BPA a fait l'objet de mesures d'interdictions successives en France (voir plus loin).

D'autres molécules, telles que le bisphénol S ou le bisphénol F, de structure très proche, utilisées en substitution au bisphénol A, soulèvent tout autant de questions (voir plus loin).

Les phtalates

Les phtalates sont notamment utilisés depuis cinquante ans pour leur propriété plastifiante permettant d'assouplir et de rendre flexible certains plastiques. Ils sont présents dans de nombreux produits de consommation courante : emballages de produits alimentaires, médicaments et cosmétiques, matériaux de construction, peintures, jouets pour enfants ou dispositifs médicaux 129 ( * ) . Le rapport de Santé publique France signale que « l'alimentation participerait à 90 % de l'exposition totale 130 ( * ) .

Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) souligne que, dans la mesure où ils ont été largement utilisés, on retrouve les phtalates dans les trois types de contenants, alimentaires, cosmétiques mais aussi médicaux avec les tubulures, poches de sang et cathéters.

S'agissant des contenants alimentaires, Elipso indique que « bien qu'autorisés, les phtalates sont de moins en moins utilisés pour la fabrication de matériaux plastiques au contact alimentaire en Europe et quasiment plus en France ». La charte de l'association des producteurs de films étirables européens (EPFMA) proscrit en effet l'usage de phtalates, de même que certains grands donneurs d'ordre. « En 2011, une enquête menée par Elipso a montré que, sur l'ensemble des adhérents ayant répondu (tous les adhérents ne fabriquant pas d'emballages souples), seul un adhérent avait indiqué utiliser des phtalates. L'association européenne d'Elipso, Flexible Packaging Europe, a mené la même enquête au niveau européen et en a conclu que les phtalates n'étaient plus utilisés comme plastifiants au niveau européen. » 131 ( * )

Les composés perfluorés

Les composés perfluorés (PFOS, PFOA, etc.) sont des polluants organiques persistants utilisés depuis 1950 pour leurs propriétés chimiques (composés à la fois hydrophiles et hydrophobes). Ils peuvent être présents dans de nombreux produits de consommation courante et ont été largement utilisés dans les revêtements antiadhésifs de type Teflon (revêtement polymère fluoré) jusqu'en 2008. L'Agence nationale de la recherche (ANR) a rappelé que ces contaminants peuvent être présents dans des emballages alimentaires (cartons des fast-food , certains emballages plastiques).

Source : Rapport d'information n° 2483 sur les perturbateurs endocriniens présents dans les contenants en plastique du 4 décembre 2019 de Mmes Claire Pitollat et Laurianne Rossi, députées.

La concentration de ces perturbateurs endocriniens dans les plastiques est variable et peut atteindre des valeurs très élevées. Ainsi, les phtalates peuvent représenter jusqu'à 70 % du poids des PVC et 20 % de la cellulose qui sert à fabriquer les gélules de médicament. De même, les retardateurs de flamme peuvent représenter 30 % du poids des mousses polyuréthane.

Les perturbateurs endocriniens sont présents dans la plupart des applications plastiques , qu'il s'agisse des matériaux à usage alimentaires, des cosmétiques, des véhicules, du mobilier, des textiles, des équipements électroniques, des dispositifs médicaux, des sols et papiers peints en PVC.

Les voies d'expositions sont donc multiples : ingestion, inhalation, contact cutané.

S'agissant des retardateurs de flammes bromés dans les véhicules, une voiture moderne peut contenir jusqu'à 200 kg de polymères ignifugés présents en particulier dans les textiles. L'analyse des textiles des véhicules en fin de vie montre qu'ils ne contiennent plus que 1 à 2 % de retardateurs de flammes bromés alors que cette proportion s'élève à 20-30 % dans les véhicules neufs. Ces molécules se photodégradent rapidement par exposition à la lumière solaire. Leur durée de demi-vie à l'intérieur d'une voiture est estimée entre 3 et 6 ans. Leur migration dans l'air de l'habitacle se produit rapidement, exposant les utilisateurs des véhicules.

Les retardateurs de flamme sont également présents dans un grand nombre de textiles, notamment les vestes polaires, qui constituent une nouvelle source d'exposition permanente pour l'Homme.

Dans le cadre du programme de biosurveillance de la cohorte Elfe, il a été montré que la population française était contaminée par les perturbateurs endocriniens dès la phase périnatale. Sur les 4 000 femmes enceintes suivies, toutes étaient imprégnées par des perfluorés, des PCB et des polybromés, 96,4 % par des phtalates et 70 % par le bisphénol A. Ces deux derniers perturbateurs endocriniens sont éliminés dans la journée, les chiffres signifient que ces femmes enceintes - et ce constat peut être étendu à l'ensemble de la population française - sont exposées de manière chronique à ces substances, par le biais des produits achetés comme par celui de l'environnement. Les représentants de Réseau environnement santé ont fait remarquer, lors de leur audition, que les phtalates étaient les premiers composants de la poussière domestique.

Compte tenu de l'impact des perturbateurs endocriniens sur la santé humaine et sur l'environnement, leur ubiquité ne peut que susciter des craintes. En effet, il existe désormais un fort niveau de preuves sur leur rôle dans le développement de l'obésité, du diabète, de cancers hormono-dépendants, d'effets thyroïdiens, neurodéveloppementaux et neuroendocriniens. Ils altèrent également la fonction de reproduction autant chez l'homme que chez la femme. Des effets épigénétiques sont également évoqués avec une altération de la transcription des gènes, susceptible d'être transmise d'une génération à la suivante.

Certains perturbateurs endocriniens ont un effet dose-réponse non linéaire. Ils peuvent produire leurs effets à faibles doses et ne plus le faire à dose élevée (la dose ne crée par l'effet). Ce phénomène rend plus difficile l'établissement du lien à causalité entre une cause d'exposition et son effet.

Par ailleurs, les interactions entre substances (« effets cocktail ») posent de réelles difficultés pour identifier les risques liés à l'exposition concomitante à plusieurs substances chimiques. Selon les cas, l'effet combiné peut être additif (il correspond à la somme des deux effets isolés), antagoniste (l'effet combiné est inférieur à celui de l'une des deux substances) ou au contraire synergique (l'effet combiné est supérieur à la somme des deux effets isolés).

Plusieurs personnes auditionnées ont signalé l'inadaptation de la réglementation actuelle sur les migrations. En effet, le règlement UE n° 10/2011 concernant les matériaux et objets en matière plastique destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires fixe des limites de migration spécifiques. En dessous de ces seuils, la concentration est jugée suffisamment basse pour estimer que la substance n'est plus toxique. L'existence de courbes dose-réponse non linéaires montre au contraire que les effets peuvent se manifester à faible concentration. Par ailleurs, la réglementation actuelle ne prend pas en compte les effets cocktail.

b) Les plastiques vecteurs de contaminants
(1) Les plastiques vecteurs des polluants organiques persistants

Le milieu marin est le réceptacle ultime des contaminants chimiques utilisés dans le cadre des activités anthropiques. Le transfert de ces contaminants dans le milieu marin s'effectue via les ruissellements, les déversements, les apports fluviaux et les retombées atmosphériques (précipitations). Caractérisés par leur persistance et leur bioaccumulation dans les organismes, les polluants organiques persistants (POP) forment une famille chimique qui regroupe un grand nombre de molécules : pesticides organochlorés 132 ( * ) et produits ou sous-produits chimiques industriels 133 ( * ) .

Les polluants organiques persistants sont hydrophobes. Dans les océans, ils vont ainsi présenter une affinité avec les microplastiques dont la surface est également hydrophobe. Absorbés aux microplastiques, ils suivent leur dispersion dans les océans. Après ingestion des plastiques, ils sont libérés dans les organismes.

Certains scientifiques font remarquer que le nombre des microplastiques est très largement inférieur à celui d'autres vecteurs des POP comme les matières organiques particulaires.

Lors de son audition, Yann Aminot 134 ( * ) a ainsi expliqué que le bouchon vaseux de la Gironde comprenait à lui seul 4 à 5 mégatonnes de matières organiques particulaires susceptibles d'adsorber des POP.

Par ailleurs, compte tenu de la contamination généralisée de l'environnement et du biote par les polluants organiques persistants, les microplastiques ne joueraient finalement pas un rôle important dans la bioaccumulation des POP.

Il n'en demeure pas moins que les microplastiques contribuent à la dissémination des polluants organiques persistants.

Dans le cadre du rapport de synthèse sur l'étude MICROPLASTIC2 135 ( * ) , l'Ifremer a été amené à faire plusieurs campagnes de prélèvement dans les bassins versants et les rades de Brest et de Marseille. De nombreuses molécules de polluants adsorbés sur les microplastiques ont été retrouvées.

Dans le bassin versant de la rade de Brest, 24 polluants adsorbés aux microplastiques ont été détectés. 12 d'entre eux font partie de la liste des molécules prioritaires de la directive cadre sur l'eau : l'atrazine, six hydrocarbures polyaromatiques, le PCB 105, la cyperméthrine, le PPDDT, l'aldrine et la dieldrine.

Pour rappel, l'atrazine est un herbicide maïs interdit depuis les années 2000. Les autres pesticides retrouvés sont des organochlorés persistants interdits en France. L'aldrine et la dieldrine sont des insecticides organochlorés persistants également interdits en France.

Dans le bassin versant de la rade de Marseille, 57 polluants adsorbés aux microplastiques ont été détectés, dont 20 d'entre eux font partie de la liste des molécules prioritaires de la directive cadre sur l'eau : HAP, PCB, PBDE et de nombreux pesticides interdits en France.

(2) Les plastiques vecteurs d'espèces invasives et de pathogènes

Les plastiques flottants ou en suspension constituent, par leur surface et leur volume, un habitat potentiel pour les microorganismes, les bactéries, les virus, les algues microscopiques et les petits invertébrés aquatiques. Ces espèces vont rapidement coloniser les déchets plastiques en s'y fixant. C'est un véritable écosystème, baptisé « plastisphère », qui se développe à la surface des plastiques présents dans les océans.

Les plastiques vont jouer un rôle de radeau en transportant ces espèces sur de grandes échelles d'espace et de temps. Avec cette nouvelle arche de Noé, des espèces vont passer d'une aire géographique, où elles étaient présentes, à une autre, où elles étaient absentes.

À cet égard, plusieurs personnes auditionnées ont rappelé que le tsunami qui a frappé la côte Pacifique du Tôhoku, le 11 mars 2011, a généré plus d'1,5 million de tonnes de débris flottants, dont une grande partie en plastique, transportant près de 300 espèces des côtes japonaises vers les côtes ouest américaines.

Cette capacité de dispersion, démultipliée par le nombre de particules plastiques, soulève de nouveaux questionnements : les micro-organismes transportés peuvent-ils s'avérer invasifs, nuisibles ou pathogènes dans leur milieu d'arrivée ? Ces micro-organismes sont-ils des agents pathogènes pour les organismes qui ingèrent les plastiques sur lesquels ils sont fixés ? Ces sujets sont plus préoccupants que d'autres impacts, plus visibles, de la pollution plastique (emmêlements, enchevêtrement, étranglement).

Des bactéries du genre Vibrio 136 ( * ) auraient même été décelées. Les chercheurs cherchent donc à savoir si les déchets plastiques pourraient héberger des souches pathogènes et servir de vecteur aux maladies infectieuses, chez les espèces qui les ingèrent (oiseaux, poissons, etc.) et chez les humains. Des travaux récents de l'Ifremer qui n'ont pas encore été publiés montrent que des espèces à risques comme les dinoflagellés toxiques et d'autres pathogènes d'huitres se fixent sur les plastiques.

Point plus positif, cette colonisation des particules plastiques par la plastisphère est également une voie de recherche qui s'ouvre pour la découverte de micro-organismes qui dégradent les plastiques (et qui seraient présents à leur surface pour les dégrader et s'en nourrir).

C. QUELLES CONSÉQUENCES POUR L'ENVIRONNEMENT ET LA SANTÉ HUMAINE ?

1. Des impacts délétères sur l'environnement déjà mesurables
a) La contribution au réchauffement climatique

La fabrication des plastiques contribue au réchauffement climatique. Selon un chiffrage effectué par le CIEL 137 ( * ) en tenant compte des différentes étapes du cycle des plastiques : (extraction, transport, fabrication, gestion de la fin de vie des déchets), le bilan carbone des plastiques représenterait 860 millions de tonnes de CO 2 par an, soit l'équivalent du fonctionnement de 189 centrales à charbon de 500 mégawatts.

En 2050, l'industrie plastique pourrait représenter 10 à 15 % des émissions mondiales de CO 2 en raison du report de l'utilisation des hydrocarbures pour le transport vers la production de plastiques.

Le développement de la voiture électrique fait craindre des pertes de débouchés à l'industrie pétrolière. De nombreux intervenants ont souligné que cette dernière envisageait un basculement stratégique vers la production de plastique, qui ne semble donc pas amorcer une trajectoire de réduction de sa production dans les prochaines années.

b) Un facteur de risque non négligeable pour la biodiversité

Une méta-analyse récente a estimé à 2 249 le nombre de plantes, d'animaux et de microbes affectés par la pollution plastique à l'échelle mondiale.

Comme évoqué précédemment, plus de 300 espèces sont concernées par les enchevêtrements, les étranglements ou l'ingestion de plastiques. Or, 15 % des mammifères marins, vulnérables aux déchets plastiques, figurent déjà sur la liste rouge des espèces menacées.

Le transport d'espèces invasives sur des milliers de kilomètres constitue également un risque d'atteinte à la biodiversité.

L'étude précitée sur la pollution des coraux par les plastiques montre une modification de leur holobiote par transfert des bactéries présentes sur les plastiques.

2. La difficulté d'évaluer les risques que fait peser la pollution plastique sur l'environnement et la santé humaine

Un risque résulte de la combinaison d'un danger et d'une exposition ; il traduit la probabilité qu'une personne ou que l'environnement soit atteint par un effet négatif produit par la source de danger.

Pour quantifier le risque que la pollution plastique fait peser sur l'environnement et sur la santé humaine, il faut donc être en capacité d'évaluer le danger que représente la pollution plastique, de quantifier l'exposition de l'environnement et de l'homme à ce danger et de fixer des seuils au-delà desquels le risque devient significatif.

L'état actuel des connaissances ne permet pas d'apporter d'informations précises à ces conditions d'évaluation du risque.

Comme il a été indiqué précédemment, la toxicité liée à la pollution plastique est une toxicité chronique, qui doit être analysée sur le long terme en considérant ses effets sur plusieurs générations. La prise de conscience des éventuels dangers liés à la pollution plastique étant relativement récente, les outils scientifiques pour étudier les répercussions à long terme des plastiques sur l'environnement et la santé humaine (cohortes, réseaux de surveillance, observatoires, etc.) n'ont pas encore été mis en place.

En dépit du dynamisme des recherches sur le sujet, de nombreux progrès doivent encore être accomplis en matière de recueil des données et de compréhension des phénomènes (sources de la pollution plastique, quantification, devenir des plastiques dans l'environnement, processus de fragmentation, écotoxicologie des nanoplastiques, etc.).

Par ailleurs, la connaissance des impacts de la pollution plastique nécessite la capacité à distinguer les effets des contaminants associés aux plastiques des effets des autres contaminants présents dans l'environnement ; objectif qui s'avère particulièrement complexe.

L'analyse de la toxicité des plastiques se heurte également à des obstacles métrologiques.

La plupart des substances contenues dans les plastiques sont inconnues. Comme le rappelait Remy Slama 138 ( * ) lors de son audition : « dans la toxicologie classique, on arrive à caractériser les effets d'une molécule, mais pas d'un plastique en général. » La variété quasi-infinie des plastiques complique également la recherche de substances toxiques. Rémy Slama le résume ainsi : « quand on sait quelle molécule on cherche, on risque de la trouver. Si on s'intéresse aux plastiques, c'est compliqué car on ne sait pas quelle molécule chercher . »

Pour cette raison, de nombreuses personnes interrogées ont insisté sur la nécessité d'imposer une information détaillée sur la composition des plastiques, une réduction du nombre des formulations et une standardisation des plastiques en fonction des usages.

La réglementation actuelle n'exige pas l'évaluation du risque chimique de certaines substances lorsqu'elles ne sont pas utilisées pour le contact alimentaire : c'est le cas pour certains stabilisateurs de polymères, ainsi que pour les oligomères. La réglementation doit donc évoluer dans le sens d'une meilleure appréhension du risque chimique lié aux plastiques.

Les deux voies principales d'exposition aux plastiques sont l'ingestion et l'inhalation.

Les quantités de microplastiques ingérées sont actuellement inconnues , comme la manière dont ces particules interagissent dans le corps et l'impact physique comme chimique du transit des microplastiques à travers le tractus gastro-intestinal n'est pas connu. Les connaissances actuelles montrent que les temps de séjour des microplastiques dans les organismes sont assez courts (excrétion en quelques jours chez les poissons et les crevettes). Les concentrations dans les coquillages en revanche, peuvent être plus élevées (mais il s'agit d'organismes filtreurs).

Il est possible que les microplastiques soient l'objet d'une bioamplification dans la chaîne trophique (transfert au prédateur des microplastiques contenus dans des proies). Des exemples de bioamplification ont été documentés (cf infra ).

Exemple de bioamplification chez le goéland argenté

Source : RC2C / Têtes chercheuses.

Un facteur potentiellement limitant pour le transfert des microplastiques des poissons vers l'Homme est leur tendance à être présents dans leurs organes digestifs (parties des poissons qui ne sont généralement pas consommées). La présence de microplastiques dans les poissons au-delà du tractus gastro-intestinal (par exemple dans les tissus) reste à étudier en détail. Cependant, des microplastiques ont également été découverts dans les moules consommées par l'Homme. Selon une étude de 2014 139 ( * ) , jusqu'à 90 particules de plastique pourraient être ingérées lors d'un repas contenant ces fruits de mer. Toutefois, elles sont quasiment toutes excrétées par le corps humain 140 ( * ) .

Des microplastiques ont également été détectés dans d'autres aliments, comme le miel, la bière, l'eau minérale et le sel de table, mais les chercheurs ayant travaillé sur ces sujets considèrent comme négligeables les risques sanitaires résultant de cette exposition.

En ce qui concerne l'ingestion de nanoplastiques, compte tenu de leur taille, leur translocation vers les organes peut être envisagée , entraînant une augmentation du temps de rétention des plastiques par les organismes, voire une bioaccumulation. Selon les informations obtenues par vos rapporteurs, les particules inférieures à 300 nm peuvent passer à travers les parois des vaisseaux capillaires et gagner ainsi la grande circulation et les organes. Toutefois, il n'existe à ce jour par d'étude sur l'Homme sur ce sujet.

L'Homme peut être également exposé aux plastiques par inhalation. Lors de son audition, le docteur Bertrand Dautzendberg a expliqué que les particules de plastique de 10 um rentraient dans les voies respiratoires. Toutefois, il convient de distinguer parmi les particules inhalées (qui entrent dans les voies respiratoires hautes) celles qui vont pénétrer dans les poumons. En ce qui concerne les fibres, plus le diamètre des fibres est réduit, plus celles-ci sont susceptibles de pénétrer profondément dans les poumons. Leur présence peut entraîner des irritations. L'absorption des plus petites particules par les macrophages est une voie possible d'entrée dans l'organisme.

A l'heure actuelle, les connaissances sur les fibres en plastique susceptibles d'être inhalées par l'homme sont émergentes. Les sources commencent à mieux être connues (cigarettes, fibres textiles, poussières urbaines), mais il n'existe encore aucune donnée sur leur quantification, leur caractérisation et leur impact sur la santé humaine.

Les informations sur l'impact des microplastiques sur les humains sont donc très parcellaires.

3. Un faisceau d'indices laisse penser à un risque réel lié à l'exposition aux microplastiques
a) De très nombreuses espèces sont contaminées

Le projet Plastic-Seine, réalisé entre 2016 et 2020, vise à déterminer les flux et les impacts des microplastiques dans l'estuaire de la Seine. Parmi les objectifs figure une meilleure connaissance de la contamination du réseau trophique par les microplastiques.

Pour réaliser cette étude, huit espèces de l'estuaire de la Seine ont été étudiées (invertébrés -vers de vase-, crustacés -moule bleue- et poissons). Un échantillon de 960 organismes aquatiques a été prélevé.

Toutes les espèces analysées sont contaminées, principalement par des fibres. La prévalence des fibres varie d'une espèce à l'autre (40 % pour le bar contre 100 % pour la moule bleue) et d'un individu à l'autre (notamment en fonction de leur âge et des sites de prélèvement).

Les auditions montrent que de très nombreuses autres espèces étaient également contaminées. L'exposition des milieux marins aux plastiques est la mieux documentée, contrairement aux recherches naissantes sur les organismes vivants dans les sols.

b) L'exposition aux contaminants des plastiques est permanente et va en s'accroissant

Les résultats de la cohorte Elfe présentés précédemment montrent la contamination générale de la population française par les perturbateurs endocriniens . D'autres études confirment ces chiffres. Ainsi, une étude de 2007 a montré que sur un échantillon de 2 084 Américains, 98 % étaient contaminés aux perfluorés (PFOS et PFOA). De nombreuses espèces animales sont également concernées, comme les ours polaires, les pandas, les mammifères marins, les poissons, les oiseaux.

Selon la Fondation Ellen Mac Arthur, parmi les 150 millions de tonnes de plastiques actuellement dans l'environnement, 23 millions de tonnes seraient des additifs (15 % du poids total des déchets plastiques présents dans les milieux naturels).

Selon d'autres études, 225 000 tonnes d'additifs seraient déversées chaque année dans les océans. Ce chiffre pourrait atteindre 1,2 million de tonnes en 2050.

La forte croissance de la production de plastiques s'accompagne donc d'une exposition toujours plus forte aux contaminants chimiques que sont leurs additifs. Non seulement elle touche tous les compartiments environnementaux, mais elle semble incontrôlable.

c) Leur accumulation lors des transferts trophiques

Trois processus définissent le devenir des contaminants dans les différents compartiments de l'environnement.

La bioconcentration

C'est le processus par lequel une substance se trouve présente dans un organisme vivant à une concentration supérieure à celle de son milieu aquatique environnant (accroissement de la concentration d'un contaminant lorsqu'il passe de l'eau à un organisme aquatique).

La bioconcentration des phtalates dans le plancton est 5 000 fois plus importante que la concentration des phtalates dans l'eau.

La bioamplification

Elle correspond à l'augmentation progressive de la concentration d'un contaminant le long d'un réseau trophique, à l'intérieur des biocénoses contaminées. Elle correspond au transfert d'un contaminant de la proie à son prédateur (concentration plus forte dans le prédateur que dans sa proie).

La bioamplification dans la chaîne alimentaire est évaluée à 100 entre le phytoplancton et le poisson carnassier.

La bioaccumulation

C'est le processus par lequel un organisme vivant absorbe une substance à une vitesse plus grande que celle avec laquelle il l'excrète ou la métabolise. Elle désigne la capacité des organismes à concentrer dans leurs tissus des contaminants quel que soit leur toxicité pour l'organisme.

Ainsi, le taux de PCB est 30 fois plus élevé dans les poissons carnassiers adultes qu'il ne l'est chez leurs juvéniles. Une forte bioaccumulation est constatée dans les poissons qui consomment les mollusques benthiques. Les phtalates les plus lourds sont présents dans le foie, la bile et, pour les plus légers, dans les reins et les branchies.

Quant aux esters organophosphorés, leur accumulation a été constatée chez les dauphins dans le cerveau, la graisse, les reins, les muscles et le foie ; laissant à penser que ces substances se métabolisent.

d) Les plastiques sont des sources de contaminants persistants

Dans le cadre de son audition, Yann Aminot a insisté sur le rôle des déchets en polystyrène comme source d'hexabromocyclododécane (HBCC) dans l'environnement marin. LE HBCC a été l'un des principaux retardateurs de flammes bromés utilisés jusqu'en 2013 avant d'être inscrits dans la liste des polluants organiques persistants de la convention de Stockholm. 97 % de sa consommation était destinée aux panneaux d'isolation en polystyrène expansé pour les bâtiments. En raison de sa persistance, il a vocation à contaminer l'environnement pendant des décennies, en s'y accumulant ainsi que dans les organismes vivants.

Les plastiques peuvent également être la source de contaminants persistants en raison de leur propriété hydrophobe. Il a été déjà mentionné la présence de nombreuses substances persistantes adsorbées sur des microplastiques (cf. supra ). Parmi eux figurent plusieurs contaminants interdits depuis des décennies.

Les plastiques présents dans l'environnement apparaissent donc comme une vraie menace pour les écosystèmes et la santé humaine.

La convention de Stockholm vise à garantir l'élimination des polluants organiques persistants ainsi qu'à en réduire la production et l'utilisation. Les polluants organiques persistants doivent remplir quatre critères pour être reconnus comme tels : la persistance, la bioaccumulation, le transfert sur de longues distances, les effets néfastes. Les microplastiques remplissent ces quatre critères. C'est la raison pour laquelle certaines associations environnementales souhaiteraient les faire reconnaître comme polluants organiques persistants.

L'ECHA juge également qu'il faudrait traiter les microplastiques de la même manière que les produits chimiques persistants, bioaccumulables et toxiques. Elle a ainsi proposé l'interdiction des microplastiques intentionnellement ajoutés dans un grand nombre de produits de consommation courante.

Le risque associé à l'utilisation de ces microplastiques n'est pas qualifié mais la permanence de leurs émissions a été considérée comme nécessitant un passage à l'action. Selon l'ECHA : « il n'est pas possible aujourd'hui de conclure avec une certitude raisonnable que des effets nocifs ne se produisent pas actuellement dans l'environnement, ou ne se produiront pas à l'avenir ».

Les risques associés aux plastiques conduisent donc à faire jouer le principe de précaution. Comme le faisait remarquer l'une des personnes auditionnées : « Est-ce que le seul fait d'avoir dans notre corps des particules qui n'ont rien à y faire ne devrait pas nous pousser à agir ? Il faut analyser le niveau de risque et soutenir toutes les mesures qui réduisent la source d'exposition au risque . »

Dans son rapport rendu en janvier 2019 141 ( * ) , le consortium SAPEA indique que des risques écologiques liés aux microplastiques existent peut-être déjà, du moins dans certaines zones côtières et sédimentaires. Le SAPEA conclut également que, si aucune mesure n'est prise pour réduire la pollution par les microplastiques, leurs concentrations pourraient fortement augmenter dans un avenir proche et un risque généralisé pourrait apparaître d'ici un siècle.

Compte tenu des prévisions de croissance de la production de plastiques dans les prochaines décennies, du faisceau d'indices démontrant les dangers d'une pollution incontrôlée par les microplastiques, de leur persistance irréversible à long terme, il apparaît urgent de prendre dès maintenant des mesures adaptées pour lutter contre la présence dans l'environnement des microplastiques primaires et secondaires.

V. UNE PRISE DE CONSCIENCE GÉNÉRALE

La pollution plastique est un sujet très médiatisé. Il ne se passe pas une semaine sans que des images, diffusées par la presse ou sur les réseaux sociaux, ne mettent en lumière le sujet et ses conséquences, participant à la sensibilisation de l'opinion publique et à l'émergence d'une prise de conscience collective.

Ces images, tournées dans des pays asiatiques ou africains, montrent des montagnes de déchets plastiques à ciel ouvert, des villages submergés par les matières plastiques, des recycleurs informels travaillant dans des conditions déplorables, des enfants se baignant dans une mer de plastiques, des plages jonchées de déchets.

Ces images montrent aussi des animaux marins de toutes les mers et les rivages du globe, échoués, entravés, enchevêtrés, emmêlés dans des objets en plastique que nous avons tenus entre nos mains et qui sont devenus des déchets marins.

Enfin, sans image parce qu'elle est moins visible, la prise de conscience de l'ampleur de la pollution par les microplastiques et leurs contaminants suscite une inquiétude croissante.

Face à cette prise de conscience et aux préoccupations environnementales et sanitaires qu'elle parvient à susciter, de plus en plus de voix s'élèvent non seulement pour réclamer un meilleur contrôle de la fin de vie des plastiques et de leur toxicité, mais également pour plaider en faveur de la limitation de certains usages, souvent inutiles.

A. L'IMPLICATION DES POUVOIRS PUBLICS

1. Au niveau international
a) L'interdiction de rejet des plastiques en mer

La mer a longtemps été considérée comme une poubelle. Son immensité permettant de se débarrasser de déchets que l'humanité ne voulait plus voir. Elle a trop longtemps servi de solution, au prétexte qu'elle aurait été en capacité « d'absorber » la pollution générée par les activités humaines sans conséquence pour son état écologique. L'existence d'eaux internationales, qui n'appartiennent à aucun État et qui ne faisaient l'objet d'aucune réglementation, a facilité ces comportements.

Néanmoins, à partir des années 70, et notamment à la suite de marées noires spectaculaires, la communauté internationale a commencé à se doter de règles pour limiter la pollution des océans en interdisant le rejet des déchets en mer. Peu à peu, les plastiques ont été intégrés dans cette logique.

(1) La convention de Londres

La convention sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion des déchets , dite « Convention de Londres », a été adoptée le 13 novembre 1972 et est entrée en vigueur le 30 août 1975 .

Elle contribue au contrôle et à la prévention de la pollution des mers à l'échelle internationale, en interdisant l'immersion de certaines matières dangereuses énumérées à son annexe I. L'immersion d'un certain nombre d'autres matières énumérées à son annexe II est subordonnée à la délivrance préalable d'un permis spécifique tandis que l'immersion de tous autres déchets est subordonnée à la délivrance préalable d'un permis général. « L'immersion » est définie comme l'élimination délibérée dans la mer de déchets ou autres matières à partir de navires, aéronefs, plateformes ou autres ouvrages artificiels, ainsi que le sabordage en mer de ces navires ou plateformes.

Initialement, la Convention ne couvre ni les émissions à partir de sources côtières (comme les égouts), ni les déchets provenant de l'exploration et de l'exploitation des ressources souterraines maritimes. Elle ne s'applique pas en cas de force majeure (lorsqu'il s'agit de sauvegarder des vies humaines ou de sécuriser des navires). Elle ne couvre pas non plus le stockage de matière dans un but autre que l'élimination.

En 1996, les Parties ont adopté un Protocole à la Convention de 1972 portant sur la prévention de la pollution des mers résultant de l'immersion de déchets (connu sous le nom de Protocole de Londres). Il est entré en vigueur en 2006 dans 30 pays, dont la France. Ce protocole permet d'actualiser la Convention en déplaçant son périmètre vers le milieu terrestre, permettant ainsi de créer un lien entre les déchets terrestres et maritimes. C'est un changement majeur qui permet une prise en compte plus rigoureuse de la prévention avec l'intégration de solutions de gestion des déchets à terre et qui interdit l'immersion de tous les déchets, à l'exception de ceux qui figurent sur la « contre-liste », dans une annexe du Protocole.

Le Protocole dispose également que « le pollueur devrait, en principe, assumer le coût de la pollution » et il souligne que les Parties contractantes devraient s'assurer que le Protocole n'a pas simplement pour résultat de déplacer la pollution d'un secteur de l'environnement à un autre.

Cette convention a donc pour effet d'interdire les rejets en mer qui pourraient à terme devenir des macrodéchets flottants, immergés sur les fonds marins ou dans la colonne d'eau.

(2) La convention Marpol (Marine pollution)

Cette convention internationale pour la prévention de la pollution marine par les navires a été élaborée par l'organisation maritime internationale et a été adoptée le 2 novembre 1973. Un Protocole additionnel a été adopté en 1978 à la suite d'une série d'accidents de navires citernes survenus en 1976 et 1977. Elle est la principale convention internationale traitant de la prévention de la pollution du milieu marin, que les causes soient liées à l'exploitation de matières premières en mer ou à des accidents.

MARPOL compte six annexes. L'annexe V cible les « Règles relatives à la prévention de la pollution par les ordures des navires ». 119 États (représentant 95,23 % du tonnage mondial des ordures produites par les navires) l'ont ratifiée et elle est entrée en vigueur le 31 décembre 1988. L'annexe V 142 ( * ) définit les différents types d'ordures et précise à quelle distance de la terre, et selon quelles modalités, elles peuvent être évacuées. Une disposition de l'Annexe V prévoit l'interdiction totale de jeter à la mer des matières plastiques, sous quelque forme que ce soit. Un registre des ordures doit être tenu et un contrôle des normes d'exploitation du navire peut être diligenté par les autorités portuaires.

(3) La convention des Nations Unies sur le droit de la mer

La convention des Nations Unies sur le droit de la mer a été adoptée le 10 décembre 1982 et est entrée en vigueur le 16 novembre 1994 . L'article 207 est consacrée à la pollution d'origine tellurique : « Les États adoptent des lois et des règlements pour prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin d'origine tellurique, y compris la pollution provenant des fleuves, rivières, estuaires, pipelines et installations de décharge. » L'article 210 prévoit que les États adoptent « des lois et des règlements afin de prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin par immersion. »

(4) Les conventions régionales

Il existe 18 conventions sur les mers régionales qui ont vocation à identifier les menaces qui pèsent sur l'environnement marin dans leur zone maritime et à fixer des objectifs approuvés au niveau international, par les engagements des gouvernements participants, pour protéger collectivement la biodiversité marine.

Deux conventions concernent la France métropolitaine : la Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est et la Convention de Barcelone pour la protection de la Méditerranée.

(a) La convention OSPAR

La Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est, dite Convention OSPAR, a été signée à Paris le 22 septembre 1992 par 16 parties contractantes 143 ( * ) . Elle résulte de la fusion de deux conventions internationales : la convention d'Oslo de 1972 (traitant de la prévention de la pollution marine) et la convention de Paris de 1974 (traitant des rejets de substances d'origine tellurique). La convention OSPAR vise à prévenir et à éliminer la pollution marine résultant des activités humaines en Atlantique Nord-Est (dont celle liée aux sacs plastiques et à la perte en mer de granulés en plastique), afin d'en protéger les écosystèmes et la diversité biologique.

La Commission OSPAR, composée des représentants de chaque partie contractante, évalue périodiquement l'état du milieu marin de sa zone de compétence, adopte diverses recommandations et décisions et veille à leur mise en oeuvre.

(b) La convention de Barcelone

La convention pour la protection de la mer Méditerranée contre la pollution régionale (convention de Barcelone) a été signée le 16 février 1976 pour prévenir et réduire la pollution marine par les navires, les aéronefs et les sources terrestres en mer Méditerranée. Elle interdit l'immersion de plastiques et s'adosse à un plan d'actions qui vise les sacs plastiques et la gestion des déchets dans les ports.

b) Une réglementation qui s'élargit aux plastiques
(1) La convention de Stockholm du 22 mai 2001 relative aux polluants organiques persistants

La Convention de Stockholm réglemente les polluants organiques persistants (POP), dont certains se retrouvent dans les produits ou déchets de matières plastiques.

Elle vise à réduire les niveaux de polluants organiques persistants qui s'accumulent dans l'environnement au fil du temps, en éliminant ou restreignant les rejets de POP provenant de produits chimiques industriels et de pesticides, des sous-produits de POP produits non intentionnellement, ainsi que des stocks et des déchets de POP. Elle a été adoptée le 22 mai 2001 et regroupe 184 parties.

En 2001, 12 substances chimiques ont été inscrites à son annexe A 144 ( * ) : l'aldrine, le chlordane, le DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), la dieldrine, l'endrine, l'hepatachlore, le mirex, le toxaphrène, les PCB (polychlorobiphényles), l'hexachlorobenzène, les dioxines et les furanes.

En 2009, neuf nouveaux composés ont été ajoutés à cette annexe A : le chlordécone, le lindane, l'alpha-hexachlorocyclohexane, le bêta- hexachlorocyclohexane, l'octabromodiphényléther, le pentabromodiphényléther, l'acide perfulorooctane sulfonique, l'hexabromobiphényle et le pentachlorobenzène.

En 2013, l'hexabromocyclododécane et les naphthalènes polychlorés ont été ajoutés, puis les chloroparaffines en 2018.

En mai 2019, les Parties à la convention de Stockholm ont adopté de nouvelles mesures relatives à l'interdiction de produits chimiques, dont l'inscription de deux nouveaux groupes de produits à l'annexe A : le dicofol (un pesticide particulièrement nocif pour les oiseaux et les poissons), et l'acide perfluorooctanoïque (PFOA, utilisé comme antitache et imperméabilisant).

Polluants organiques persistants et plastiques

Les pesticides organochlorés tels que l'aldrine, le chlordane, le DDT, la dieldrine, l'endrine, l'heptachlore, le mirex, le toxaphène, le dicofol, le chlordécone, le lindane, l'alpha-hexachlorocyclohexane, le bêta- hexachlorocyclohexane et l'endosulfan sont des polluants persistants dans l'environnement qui peuvent être adsorbés sur les plastiques lors de leur séjour dans l'environnement.

En revanche, les PCB (polychlorobiphényles), les PBDE (polybromodiphényléthers), l'hexabromocyclododécane, les chloroparaffines, les naphthalènes polychlorés peuvent avoir été associés à des polymères lors de leur cycle de vie.

L'hexabromocyclododécane par exemple a été très largement utilisé comme retardateur de flamme dans les panneaux d'isolation de polystyrène pour la construction.

Les PCB ont servi comme isolant électrique liquide, et dans une moindre mesure comme plastifiant.

Ces composés peuvent être émis dans l'environnement à tous les stades du cycle de vie des produits manufacturés (dès leur synthèse ou leur incorporation à un produit fini, par rejet atmosphérique, par le biais d'effluents industriels, lors de l'usage des produits, lors de leur fin de vie).

Dans l'environnement il est impossible d'attribuer la présence de ces composés à un relargage depuis un plastique. Lorsqu'il s'agit d'un composé réglementé de longue date comme les PCB, la probabilité que le relargage ait déjà eu lieu est également plus forte.

Le PFOA et le PFOS appartiennent à la famille des composés perfluoroalkylés et peuvent être émis directement ou être des produits terminaux de dégradation d'autres composés tels que les fluoropolymères. Des études récentes suggèrent que les polymères à base de fluorotélomères constituent une source considérable de composés perfluoroalkylés dans l'environnement.

Source : Yann Aminot, Ifremer.

(2) La convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination

La Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination a été adoptée le 22 mars 1989. Elle est entrée en vigueur dès le 5 mai 1992 et fait partie des conventions quasi universelles, puisqu'elle comporte 187 parties.

Elle rappelle, en préambule, le risque que les déchets dangereux, et leurs mouvements, font peser sur l'environnement et la santé 145 ( * ) . En outre, la spécificité des pays en développement du fait de leurs « capacités limitées de gestion des déchets » est mentionnée dès le préambule. La première obligation générale consacrée par l'article 4, § 1, a) de la Convention concerne le droit souverain de chaque État d'interdire l'entrée ou l'élimination de déchets dangereux et d'autres déchets d'origine étrangère sur son territoire , sous réserve d'en informer les autres Parties, selon les dispositions pertinentes. La suite de l'article 4 prévoit notamment que les États doivent mettre en place des installations adéquates d'élimination pour permettre une gestion écologiquement rationnelle des déchets et réduire leurs mouvements transfrontières. En outre, la gestion écologiquement rationnelle des déchets par l'État tiers est érigée en véritable condition à leur exportation (article 4, § 2, g)). Un contrôle effectif de leurs mouvements et des documents de traçabilité et d'information est par ailleurs mis en place. Le trafic illicite de déchets est considéré comme une infraction pénale (article 4, § 3).

Avant la quatorzième conférence des Parties, en 2019, les plastiques n'étaient que très partiellement intégrés dans le champ d'application matériel de la Convention 146 ( * ) . Désormais, le contrôle des déchets plastiques contaminés ou en mélange, dont les déchets en plastique difficilement recyclables, s'est vu considérablement renforcé. Les exportateurs devront obtenir, pour ces déchets plastiques, le consentement préalable des pays importateurs « en connaissance de cause », c'est-à-dire qu'ils pourront obtenir des informations sur les produits en question et leur caractère recyclable, ou non, avant de choisir d'accepter, ou pas, l'importation. Cette mesure prend effet au 1 er janvier 2021.

L'Union européenne et ses États membres sont parties prenantes de la convention de Bâle. L'extension de la liste des plastiques soumis au système de contrôle et d'interdiction de la convention de Bâle exige une modification des annexes du règlement (CE) n° 1013/2006 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2006 sur les expéditions de déchets. Dans ce contexte, la Commission européenne a lancé une consultation publique sur le projet de règlement entre le 24 juin et le 22 juillet 2020 à laquelle vos rapporteurs ont participé (cf. contribution en annexe IV).

Par ailleurs, 24 ans après son adoption en 1995, l'amendement d'interdiction (le « ban amendment ») est entré en vigueur en décembre 2919. Il prévoit l'interdiction de toute exportation de déchets dangereux d'un pays développé (Union Européenne, OCDE et Liechtenstein) vers un pays en développement ou en transition. Cette interdiction ne concerne toutefois que les 98 pays ayant ratifié l'amendement 147 ( * ) .

c) L'agenda 2030

En septembre 2015, les 193 États membres de l'organisation des Nations Unies ont adopté le programme de développement durable à l'horizon 2030, intitulé agenda 2030. Il définit 17 objectifs de développement durable . La production incontrôlée de plastiques, les pollutions qu'elle engendre et les risques qu'elle fait peser sur l'environnement et la santé humaine sont susceptibles de remettre en cause 7 des 17 objectifs de développement durable : la bonne santé et le bien-être ; l'eau propre et l'assainissement ; l'énergie propre et d'un coût abordable ; la consommation et la production responsable ; les mesures relatives à la lutte contre le changement climatique ; la vie aquatique ; la vie terrestre.

Les 17 objectifs de développement durable

Le 25 septembre 2015, l'assemblée générale des Nations Unies a adopté à l'unanimité un « programme de développement durable à l'horizon 2030», dit « Agenda 2030 ». Il est assorti de 17 objectifs de développement durables (ODD) qui abordent différentes dimensions assignées au développement durable : la croissance économique, l'intégration sociale et la protection de l'environnement.

Les 17 objectifs sont les suivants :

1. éradication de la pauvreté ;

2. lutte contre la faim ;

3. accès à la santé ;

4. accès à une éducation de qualité ;

5. égalité entre les sexes ;

6. accès à l'eau salubre et à l'assainissement ;

7. recours aux énergies renouvelables ;

8. accès à des emplois décents ;

9. bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l'innovation ;

10. réduction des inégalités ;

11. villes et communautés durables ;

12. consommation et production durables ;

13. lutte contre le changement climatique ;

14. vie aquatique ;

15. vie terrestre ;

16. justice et paix ;

17. partenariats pour la réalisation des objectifs.

L'Agenda 2030 établit par ailleurs un processus de revue internationale, par lequel les États sont invités, sur une base volontaire, à rendre compte annuellement de leurs progrès. Déclinée au niveau de chaque État, la mise en oeuvre des ODD fait appel à un engagement actif des gouvernements comme de l'ensemble des acteurs (entreprises, collectivités, associations, chercheurs...).

d) Un exemple de coopération multilatérale : le programme Clean Oceans

Clean Oceans est un programme de coopération internationale porté par l'Agence française de Développement, la Banque Européenne d'Investissement et la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW, institution de coopération allemande). Lancé en 2018, le programme bénéficie de 2 milliards d'euros de crédits destinés à financer des investissements dans la lutte contre la pollution plastique.

Un bilan du programme mi-2020 montre que 50 % des crédits ont d'ores et déjà été engagés pour accompagner des projets de gestion des déchets solides (24 % des crédits), de gestion des eaux usées (75 % des crédits) et de gestion des déversements d'orages (21 % des crédits).

Deux exemples de projets financés illustrent la diversité des initiatives soutenues :

- 75 millions d'euros ont bénéficié à deux villes du SriLanka pour financer l'extension de son réseau de collecte des eaux usées ;

- 43 millions d'euros ont été accordés à la modernisation du système de gestion des déchets de Lomé au Togo, permettant la construction d'un centre de collecte et de traitement des déchets, la création de 25 emplois et la sécurisation sociale et environnementale des travailleurs concernés.

e) Les limites des conventions internationales

La communauté internationale a pris conscience des dangers que font courir les déchets plastiques et les microplastiques à l'environnement et à la santé humaine. De nombreux instruments juridiques ont été mis en place au niveau international pour lutter contre ces formes de pollution.

Toutefois, ces conventions internationales ont leurs limites : ce sont souvent des instruments déclaratoires et non contraignants. Par ailleurs, la multiplication des initiatives provoque un manque de lisibilité. Enfin, seule la question des déchets plastiques est abordée. En réalité, il faudrait une approche holistique en termes de cycle de vie du plastique (production, consommation, transport, recyclage, déchet et pollution générée à chaque étape de leur cycle de vie) avec des objectifs de réduction contraignants.

Plusieurs États plaident ainsi pour la négociation d'un traité international juridiquement contraignant sur les déchets plastiques et les microplastiques, qui s'inspirerait de l'accord mondial sur le climat et le réchauffement climatique signé à Paris le 12 décembre 2015 .

L'importante prise de conscience de la pollution plastique
par les législations de très nombreux pays

Une enquête auprès des ambassades en France des pays étrangers a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les politiques de gestion des déchets plastiques dans leurs pays (cf. annexe II).

L'enquête montre la sensibilisation de la communauté internationale sur le sujet des pollutions plastiques. Une question portait sur la préoccupation des pays vis-à-vis de la pollution (préoccupation notée sur une échelle croissante de 0 à 5). Majoritairement (20 pays sur 38, soit 53 %), la préoccupation est notée à 5 (valeur maximale de l'échelle). Seuls 3 pays (8 % des répondants) situent leur niveau de préoccupation à moins de 3, sur l'échelle de 0 à 5.

Ces préoccupations se traduisent par l'adoption de législations visant à réduire la pollution.

82,5 % des pays qui répondent à l'enquête indiquent avoir adopté des lois pour limiter la pollution plastique. Dans 55 % des cas, ces législations ont été prises dans le cadre d'orientations supranationales (Exemple de la Commission européenne pour les pays européens).

L'interdiction des plastiques à usage unique est une mesure très fréquente : plus de 80 % des pays qui se sont dotés d'une législation contre la pollution plastique ont intégré cette mesure. Deux autres mesures sont fréquemment reprises : les obligations de recyclage (70 % des législations) et l'interdiction des sacs plastiques (plus de 50 % des législations).

S'agissant de l'Union européenne et de la transposition par les pays membres de la directive sur l'interdiction des plastiques jetables, l'enquête montre que :

- la transposition est en cours dans 86 % des pays de l'Union et que 15 % d'entre eux ont déjà adopté certains des articles de la directive ;

- 7 % des états membres ont transposé la directive en l'état ;

- 7 % des états membres l'ont transposée en renforçant ses exigences.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

2. Au niveau européen

L'Union européenne s'est longtemps intéressée aux plastiques uniquement sous l'angle des déchets. Toutefois, face à la menace croissante que fait peser la production incontrôlée de plastiques sur l'environnement et la santé humaine, l'Union européenne a défini une stratégie sur les matières plastiques visant à concilier protection de l'environnement et croissance économique, le plastique restant pour de nombreux usages un matériau irremplaçable.

a) La hiérarchisation de la gestion des déchets

La hiérarchie des modes de traitement est un ordre de priorité, défini au niveau européen 148 ( * ) , qui conditionne le processus de gestion des déchets.

La première priorité est d'éviter la production du déchet : elle repose sur des démarches de prévention des déchets , définies comme « les mesures prises avant qu'une substance, une matière ou un produit ne devienne un déchet et réduisant :

- la quantité de déchets, y compris par l'intermédiaire du réemploi ou de la prolongation de la durée de vie des produits ;

- les effets nocifs des déchets produits sur l'environnement et la santé humaine ; ou

- la teneur en substances nocives des matières et des produits 149 ( * ) » .

Quand un déchet n'a pas pu être évité, la personne chargée de sa gestion doit privilégier, dans l'ordre :

- la préparation en vue de la réutilisation : l'objectif est que le déchet soit préparé de manière à être utilisé de nouveau sans autre opération de traitement (le traitement du déchet nécessite généralement des opérations de contrôle, de nettoyage ou de réparation). Il s'agit souvent de remettre en état des objets d'occasion, notamment des appareils électroménagers, des pièces de véhicules hors d'usage, etc. ;

- le recyclage : il concerne toutes les opérations de valorisation par lesquelles les déchets sont retraités, soit pour remplir à nouveau leur fonction initiale, soit pour d'autres fonctions. Le recyclage implique une chaîne d'acteurs parfois longue, incluant une étape de préparation de la matière extraite du flux de déchets, qui devient alors une matière première de recyclage (MPR) ;

- toute autre valorisation : toute opération dont le résultat principal est que des déchets servent à des fins utiles en substitution à d'autres substances ou objets qui auraient été utilisés à la place. En particulier, cela concerne la « valorisation énergétique », qui consiste à utiliser des déchets en substitution de combustibles, pour la production de chaleur ou d'énergie ;

- l'élimination : même si cette solution est à éviter dans la mesure du possible, elle consiste à incinérer des déchets sans valorisation énergétique, ou à les stocker dans une décharge dédiée. Elle n'est censée concerner que les « déchets ultimes », c'est-à-dire ceux qui ne sont plus susceptibles d'être réutilisés ou valorisés dans les conditions techniques et économiques du moment.

Cette hiérarchie des modes de traitement a pour but d'encourager la valorisation des déchets et donc de diminuer l'utilisation de matières premières vierges. Elle est l'un des piliers de la réglementation relative aux déchets.

b) Une stratégie des matières plastiques compatible avec la mise en place d'une économie circulaire

Le plastique est un matériau important, omniprésent dans notre économie et dans notre vie quotidienne. Pour autant, sa production, son utilisation, sa consommation et la gestion de sa fin de vie soulèvent des problèmes écologiques importants. L'Union européenne s'est efforcée de sortir de ce dilemme en développant une stratégie sur les matières plastiques qui favorise la réutilisation, le recyclage, la réparation, la promotion de matériaux plus durables et non toxiques, afin de diminuer la quantité de déchets générés et leurs effets délétères sur l'environnement et la santé humaine.

Cette stratégie a été élaborée entre 2015 et 2019 et s'articule autour de plusieurs textes européens :

- la directive européenne 2015/720 du 29 avril 2015 modifiant la directive 94/62/CE en ce qui concerne la réduction de la consommation de sacs en plastique légers ;

- la communication de la commission européenne « boucler la boucle - un plan d'action de l'Union européenne en faveur de l'économie circulaire » du 2 décembre 2015 ;

- la communication de la commission européenne « une stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire » du 16 janvier 2018 ;

- la directive (UE) 2018/851 du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE relative aux déchets ;

- la directive (UE) 2018/852 du 30 mai 2018 modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballages ;

- la directive (UE) 2019/883 du 17 avril 2019 relative aux installations de réception portuaires pour le dépôt des déchets des navires ;

- la directive 2019/904/UE du 5 juin 2019 relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique.

La stratégie européenne repose sur plusieurs axes :

(1) La réduction des déchets plastiques par l'interdiction de certains usages

La directive sur les sacs en plastique exige des gouvernements nationaux qu'ils s'assurent que le nombre de sacs en plastique légers consommés chaque année ne dépasse pas 90 par personne d'ici à la fin de 2019. Avant la fin de 2025, ce nombre doit baisser à 40 sacs.

La mise sur le marché des produits fabriqués à partir de plastiques oxodégradables ainsi que de certains objets en plastique à usage unique est interdite à partir du 3 juillet 2021 (cotons-tiges, couverts, assiettes, pailles, bâtonnets mélangeurs et tiges de ballons de baudruche, récipients pour aliments en polystyrène expansé, récipients pour boissons en PSE.

En outre, les États membres doivent prendre les mesures nécessaires pour parvenir à une réduction ambitieuse et soutenue de la consommation des produits en plastique à usage unique suivants : les gobelets et les récipients pour aliments.

Mise en place d'un réseau national de surveillance
des macrodéchets sur le littoral

La directive 2008/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 appelée « Directive-cadre Stratégie pour le milieu marin » (DCSMM) conduit les États membres de l'Union européenne à prendre les mesures nécessaires pour réduire les impacts des activités sur ce milieu afin de réaliser ou de maintenir un bon état écologique du milieu marin au plus tard en 2020.

En France, la directive a été transposée dans le code de l'environnement (articles L. 219-9 à L. 219-18 et R. 219-2 à R. 219-17). Elle s'applique au travers de Plans d'action pour le milieu marin (PAMM) aux côtes métropolitaines sous souveraineté ou juridiction française, divisées en quatre sous-régions marines : la Manche-mer du Nord, les mers celtiques, le golfe de Gascogne, la Méditerranée occidentale.

La DCSMM poursuit trois objectifs majeurs :

- assurer la protection, la conservation et éviter la détérioration des écosystèmes marins. Là où une forte dégradation est observée, le fonctionnement des écosystèmes doit être rétabli ;

- prévenir et éliminer progressivement la pollution ;

- maintenir la pression des activités humaines (pêche et autres utilisations des ressources marines) à un niveau qui soit compatible avec la réalisation du bon état écologique.

L'évaluation initiale de la DCSMM de 2012 a produit un état des lieux des déchets en mer (objets et microparticules dans la colonne d'eau, au fond des mers ou sur le littoral) et mis en évidence le manque de données sur les microplastiques.

Parmi les critères retenus pour évaluer le bon état écologique du milieu marin figure le critère 10 qui prévoit que « les propriétés et les quantités de déchets marins ne provoquent pas de dommages au milieu côtier et marin ».

Une surveillance harmonisée des déchets sur le littoral a donc été mise en place au niveau de l'Union européenne visant à caractériser ces derniers.

La directive 2019/904/UE relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique est directement inspirée des mesures de surveillance. Elle vise les plastiques à usage unique et les engins de pêche.

À la suite d'une étude menée sur 276 plages de l'Union européenne (le meilleur indicateur que nous ayons pour les déchets marins), il a été constaté que les objets en plastique à usage unique constituent près de 50 % de ces déchets, tandis que les équipements de pêche en représentent 27 %. Pour les plastiques à usage unique, la Commission a proposé de se focaliser sur les 10 objets à usage unique les plus utilisés. À partir du 3 juillet 2021, il est interdit de mettre sur le marché les cotons-tiges, les couverts, les assiettes, les pailles, les bâtonnets mélangeurs, les tiges de ballons de baudruche, les récipients pour aliments et pour boissons en polystyrène expansé.

Source : Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer.

(2) L'amélioration de la collecte, du tri et du recyclage des plastiques

D'ici à 2035, 65 % des déchets municipaux doivent être recyclés et seuls 10 % des déchets municipaux en poids pourront être mis en décharge. Les États membres s'efforcent de faire en sorte que d'ici à 2030, aucun déchet susceptible d'être recyclé ou valorisé ne soit admis dans une décharge, sauf exceptions dûment justifiées.

D'ici à 2030, 55 % des plastique et 70 % des emballages plastiques doivent être recyclés.

D'ici à 2030, 90 % des bouteilles en plastique à usage unique doivent être collectées (77 % d'ici à 2025).

L'objectif de la commission européenne est d'atteindre un taux de recyclage de 100 % pour tous les emballages plastiques d'ici à 2030.

(3) Le soutien à l'incorporation de plastiques recyclés

D'ici 2025, les bouteilles pour boisson en PET doivent contenir 25 % de matières recyclées. D'ici 2030, les bouteilles pour boisson en autres résines doivent contenir 30 % de matières recyclées.

Par ailleurs, la commission européenne compte sur des engagements volontaires pour réutiliser au moins 10 millions de tonnes de plastiques recyclés par an d'ici à 2025 dans les secteurs de l'emballage, de la construction, de l'industrie électrique et électronique et de l'automobile.

(4) L'élargissement des obligations pour les producteurs

L'Union européenne a mis en place plusieurs filières de responsabilité élargie des producteurs : emballages, piles et accumulateurs portables, automobiles, équipements électriques et électroniques, médicaments, gaz fluorés. Récemment, elle a créé de nouvelles filières pour les récipients pour aliments (y compris pour la restauration rapide), les filets de pêche, les lingettes, les ballons de baudruche et les produits du tabac avec filtres (comme les mégots de cigarette).

(5) Une meilleure gestion des déchets des navires

La directive du 17 avril 2019 relative aux installations de réception portuaires pour le dépôt des déchets des navires a renforcé les dispositions visant à gérer les déchets des navires. Elle vise tous les navires, quel que soit leur pavillon, qui font escale dans un port d'un État membre. La directive impose, pour chaque port, la mise en oeuvre d'un plan de réception et de traitement des déchets. Les coûts d'exploitation des installations portuaires pour la réception et le traitement des déchets des navires - autres que les résidus de cargaison - sont couverts par une redevance perçue sur les navires. Afin de dissuader ces derniers à jeter leurs déchets dans la mer, ils sont soumis à ladite redevance indépendamment du dépôt ou non de déchets. Enfin, chaque État membre doit procéder à des inspections annuelles d'au moins 15 % du nombre total de navires distincts faisant escale dans ses ports.

(6) Une attention récente portée aux microplastiques

Les microplastiques intentionnellement ajoutés concernent une multitude de produits . En 2018, l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a été saisie pour une éventuelle interdiction des microplastiques ajoutés intentionnellement. En août 2019, elle a rendu un rapport proposant l'élimination d'ici à 2026 des microplastiques intentionnellement ajoutés dans les fertilisants et les produits phytosanitaires 150 ( * ) utilisés en agriculture et en horticulture, dans les produits cosmétiques à rincer ou sans rinçage (maquillage et crèmes solaires), dans les détergents et produits d'entretien contenant des parfums encapsulés ou des microbilles, dans les cires et les vernis, dans les dispositifs médicaux, dans certains médicaments à usage humain ou vétérinaire, dans certains compléments alimentaires, dans les peintures et les revêtements, dans les cartouches des imprimantes en trois dimensions, dans les encres d'imprimerie, dans les produits de construction, dans les produits utilisés dans le secteur pétrolier et gazier.

Selon l'ECHA, les sources de microplastiques mentionnées précédemment seraient responsables du rejet annuel de 36 000 tonnes de microplastiques dans l'environnement à l'échelle européenne, dont plus de la moitié proviendrait de l'activité agricole (fertilisants et produits phytosanitaires) 151 ( * ) .

Le plan d'action européen pour l'économie circulaire
et la lutte contre la pollution plastique

À l'occasion de la présentation du plan d'action européen pour l'économie circulaire en mars 2020, la commission européenne a rappelé ses objectifs en matière de lutte contre la pollution plastique.

« Alors que le plan d'action en faveur de l'économie circulaire guidera la transition de tous les secteurs, des mesures cibleront en particulier les secteurs à forte intensité de ressources, comme ceux des textiles, de la construction, de l'électronique et des matières plastiques. La Commission assurera le suivi de la stratégie de 2018 sur les matières plastiques en se concentrant, entre autres, sur des mesures visant à lutter contre les microplastiques et les rejets non intentionnels de plastique, par exemple, par les textiles et l'abrasion des pneumatiques. La Commission définira des exigences pour faire en sorte que tous les emballages sur le marché de l'UE soient réutilisables ou recyclables d'une manière économiquement viable d'ici à 2030. Elle élaborera un cadre réglementaire pour les plastiques biodégradables et biosourcés et elle mettra en oeuvre des mesures concernant les plastiques à usage unique. »

« La Commission examinera la possibilité de stimuler le marché des matières premières secondaires par des dispositions juridiques imposant un contenu recyclé obligatoire (par exemple pour les emballages, les véhicules, les matériaux de construction et les batteries). Afin de simplifier la gestion des déchets pour les citoyens et de garantir aux entreprises des matières secondaires plus propres, la Commission proposera également un modèle européen de collecte sélective des déchets. La Commission considère que l'UE devrait cesser d'exporter ses déchets en dehors de son territoire et, dès lors, réexaminera sa réglementation relative aux transferts de déchets et aux exportations illégales ».

Source : Commission européenne.

c) Le lancement de la lutte contre la pollution plastique : la directive relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique

À travers l'adoption de cette directive, l'Europe veut à nouveau affirmer son leadership mondial en matière de politiques de lutte contre la pollution plastique. Entrant en vigueur en 2021 et ciblant les plastiques à usage unique, la cause principale de la fuite des plastiques vers l'environnement, cette directive donne à l'Europe les moyens de s'attaquer à la préservation des océans.

La directive s'appuie sur la définition de trois listes : celle des produits interdits, celle des produits avec réduction obligatoire, celle des produits avec mise en place d'une campagne de sensibilisation des consommateurs.

La directive n'exclut pas, pour le moment, les plastiques biodégradables, considérant le besoin de connaissances complémentaires sur le sujet. Pour cette raison, une révision de la directive est prévue en 2027 afin de tenir compte des progrès dans la compréhension du phénomène de pollution.

La directive ambitionne 90 % de collecte des bouteilles en plastique pour boisson sur le continent à l'horizon 2029. À titre de comparaison, et afin de bien mesurer les efforts à entreprendre, le taux de collecte des bouteilles en plastique pour boisson était de 58 % en France, en 2018.

3. Au niveau national
a) De nouvelles mesures législatives

Depuis dix ans, la France a pris une série de mesures législatives visant à encadrer le traitement et la gestion des déchets plastiques, à favoriser leur valorisation, à réduire l'utilisation de plastiques à usage unique ou de microplastiques, à responsabiliser les producteurs, à mieux informer les consommateurs et à promouvoir le réemploi . Ces ambitions s'adossent aux textes suivants :

- la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (loi Grenelle I) ;

- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (loi Grenelle II) ;

- l'ordonnance n° 2010-159 du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d'adaptation du droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets ;

- la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

- la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ;

- la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales entre le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable (loi EGAlim) ;

- la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ;

- la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire ;

- l'ordonnance n° 2020-920 du 29 juillet 2020 relative à la prévention et à la gestion des déchets.

De nombreuses mesures visent à adapter la législation française au droit européen, mais également à prendre des mesures plus contraignantes.

(1) Les premières interdictions de produits plastiques

Depuis cinq ans, la France a multiplié les interdictions de produits plastiques à usage unique.

Les sacs plastiques à usage unique sont interdits en caisse depuis le 1 er juillet 2016. Les sacs plastiques à usage unique hors caisse (comme les sacs de fruits et légumes) sont interdits depuis le 1 er janvier 2017 152 ( * ) , sauf s'ils sont compostables en compost domestique et biosourcés.

Depuis le 1 er janvier 2020, l'utilisation de bouteilles d'eau plate en plastique dans le cadre des services de restauration collective scolaire est interdite. Les gobelets en plastique mis à disposition vides sont également interdits à cette date, sauf lorsqu'ils sont compostables et constitués partiellement de matière biosourcée et sauf lorsqu'ils sont partiellement composés de plastique et que cette teneur en plastique est inférieure à la teneur maximale en plastique fixée par un arrêté.

Au 1 er janvier 2021 est interdite la distribution gratuite de bouteilles en plastique contenant des boissons dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel. Sont également interdites les clauses contractuelles imposant la fourniture ou l'utilisation de bouteilles en plastique à usage unique dans le cadre d'événements festifs, culturels ou sportifs.

À partir du 1 er janvier 2022 sont interdits le conditionnement dans des emballages en plastique des fruits et légumes frais non transformés exposés dans les commerces de détail ainsi que la mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable. L'apposition d'étiquettes en plastique sur les fruits et légumes est également prohibée. Par ailleurs, les publications de presse doivent être expédiées sans emballage plastique. Enfin, la mise à disposition gratuite de jouets en plastique dans le cadre de menus destinés aux enfants est prohibée.

À partir du 1 er janvier 2025, il devra également être mis fin à l'utilisation de contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service en matière plastique. Cette interdiction s'applique : aux services de restauration collective des établissements scolaires et universitaires, aux établissements d'accueil des enfants de moins de six ans, aux services de pédiatrie, d'obstétrique et de maternité.

(2) Les mesures de limitation des plastiques ajoutés intentionnellement

La France a pris également très tôt des mesures pour limiter les microplastiques ajoutés intentionnellement.

Les microplastiques dans les produits rincés à usage d'exfoliation ou de nettoyage sont interdits en France depuis le 1 er janvier 2018, ce qui n'est pas toujours pas le cas au niveau de l'Union européenne.

Par ailleurs, s'inspirant de la proposition mentionnée précédemment faite par l'ECHA d'interdire les microplastiques ajoutés intentionnellement dans toute une série de produits 153 ( * ) , la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a interdit l'utilisation de microplastiques intentionnellement ajoutés :

- dans les dispositifs médicaux et les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro , à compter du 1 er janvier 2024 ;

- dans les produits cosmétiques rincés autres que les produits exfoliants et de nettoyage à compter du 1 er janvier 2026 ;

- dans les produits détergents, les produits d'entretien et les autres produits visés par la proposition de restriction du 22 août 2019 de l'Agence européenne des produits chimiques à compter du 1 er janvier 2027.

Les microplastiques dans les boues d'épuration : une prise de conscience récente et une réglementation à renforcer

Les boues d'épuration font l'objet d'une réglementation au niveau européen avec la directive 86/278/CEE relative à l'utilisation des boues d'épuration en agriculture. Ce texte règlemente les épandages de manière à éviter des effets nocifs sur les sols, la végétation, les animaux et l'Homme. Il fixe notamment des seuils limites de concentration en métaux lourds.

De manière similaire, en France, le code de l'environnement rend obligatoire la réalisation d'un plan d'épandage pour l'utilisation des boues sur les sols agricoles. Il vise notamment à surveiller les concentrations en « éléments trace Métalliques » (ETM) dans les sols et dans les boues ainsi que les composés traces organiques (CTO).

Dans les cadres règlementaires cités la présence de microplastiques dans les boues ne fait l'objet d'aucune réglementation dédié. Cette situation met en évidence un potentiel conflit entre, d'une part, la volonté de réduire les transferts de microplastiques vers les eaux superficielles (au moyen, par exemple, de la filtration qui pourrait être imposée par la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines) et, d'autre part, la possibilité que ces microplastiques se retrouvent dans les sols s'ils ne sont pas retirés des boues.

Une révision de la directive sur les boues d'épuration mentionnées auparavant devrait donc être envisagée.

Il convient de rappeler que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a adopté plusieurs mesures pour renforcer la qualité des matières fertilisantes épandues sur les sols. Ainsi, l'article 86 prévoit une révision des référentiels réglementaires sur l'innocuité environnementale et sanitaire applicables aux boues d'épuration, en particulier industrielles et urbaines, seules ou en mélanges, brutes ou transformées. Il s'agit de prendre en compte, notamment, les métaux lourds, les particules de plastique, les perturbateurs endocriniens, les détergents ou les résidus pharmaceutiques tels que les antibiotiques. Jusqu'à présent, la norme NFV 40041 relative aux boues d'épandage ne prend pas en considération les plastiques.

En ce qui concerne les composts des biodéchets, ils sont soumis à la norme NFU 44051 qui fixe des teneurs limites en macroplastiques (dont la taille est supérieure à 5 mm). Le polystyrène expansé doit représenter moins de 0,3 % de la matière sèche et les autres plastiques doivent représenter moins de 0,8 % de la matière sèche. Toutefois, aucune limitation n'est prévue pour les microplastiques.

(3) De plus en plus de filières REP (responsabilité élargie des producteurs)

En application du principe « pollueur-payeur », l'Union européenne encourage la mise en place de filières REP 154 ( * ) pour assurer la prévention et la gestion des déchets.

La France a largement suivi ces préconisations puisque depuis la création en 1992 de la première filière REP portant sur les emballages ménagers, le principe de la responsabilité élargie du producteur a été étendu à de nombreux autres produits. En plus de vingt ans, 14 filières obligatoires 155 ( * ) ont été ainsi été développées (auxquelles il faut ajouter 3 REP volontaires 156 ( * ) ).

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire a élargi le champ d'application de certaines filières déjà existantes 157 ( * ) . Elle a également créé huit nouvelles filières REP :

- à partir du 1 er janvier 2021 : les produits du tabac équipés de filtres composés en tout ou partie de plastique et ceux qui sont destinés à être utilisés avec des produits du tabac ;

- à partir du 1 er janvier 2022 : les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, les jouets, les articles de sport et de loisirs, les articles de bricolage et de jardin, les huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles ;

- à compter du 1 er janvier 2024 : les gommes à mâcher et les textiles sanitaires à usage unique ;

- à compter du 1 er janvier 2025 : les engins de pêche.

(4) La promotion du vrac et du réemploi

En France, les emballages plastiques à usage unique représentent 46,3 % 158 ( * ) de la consommation de plastiques. La lutte contre la pollution plastique passe donc par une réduction drastique de la consommation d'emballages en plastique à usage unique. La vente en vrac et l'utilisation d'emballages réutilisables constituent deux alternatives que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire s'efforce de promouvoir .

Celle-ci a non seulement autorisé la vente en vrac, mais elle la rend de droit pour tout produit de consommation courante. Son interdiction ne peut être justifiée que pour des raisons de santé publique. Tout commerce de détail dont la surface de vente est supérieure à 400 m 2 doit mettre à la disposition du consommateur des contenants réemployables dans le cadre de la vente de produits présentés sans emballage.

La loi précitée autorise également tout consommateur à se faire servir dans un contenant apporté par ses soins, dans la mesure où ce dernier est visiblement propre et adapté à la nature du produit acheté. Le consommateur est responsable de l'hygiène et de l'aptitude du contenant.

Afin d'encourager l'utilisation de contenants réutilisables dans la vente à emporter, la loi impose aux vendeurs de boissons une tarification plus basse lorsque le consommateur apporte son propre contenant réemployable.

La loi précitée prévoit également plusieurs dispositions visant à encourager la substitution des plastiques à usage unique par des matériaux réemployables :

- à compter du 1 er janvier 2022, les gobelets, les couverts, les assiettes et les récipients utilisés dans le cadre d'un service de portage quotidien de repas à domicile doivent être réemployables et faire l'objet d'une collecte ;

- à compter du 1 er janvier 2023, les établissements de restauration sont tenus de servir les repas et boissons consommés dans l'enceinte de l'établissement dans des contenants et avec des couverts réemployables.

La loi impose à la commande publique d'encourager le réemploi et l'utilisation de biens intégrant des matières recyclées. Les cahiers des charges des appels d'offre doivent prévoir des clauses et des critères dans ce sens.

Les biens acquis annuellement par les services de l'État, ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements, issus du réemploi ou de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées doivent représenter 20 % à 100 % des achats, selon le type de produit.

En ce qui concerne les achats de pneumatiques, la commande publique doit privilégier les pneumatiques rechapés.

Enfin, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire fixe un objectif national de 5 % d'emballages réemployés mis sur le marché en 2023 et de 10 % en 2027. Pour faciliter l'atteinte de ces objectifs, les éco-organismes sont chargés de définir des gammes standards d'emballages réemployables pour les secteurs de la restauration, ainsi que pour les produits frais et les boissons d'ici au 1 er janvier 2022.

(5) Le renforcement de l'information des consommateurs et des recycleurs sur la composition des plastiques

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire impose aux producteurs de produits générateurs de déchets et à leur éco-organisme, dans le respect des secrets protégés par la loi, de permettre aux opérateurs de gestion des déchets d'accéder aux informations techniques relatives aux produits mis sur le marché, et notamment à toutes informations sur la présence de substances dangereuses, afin d'assurer la qualité de leur recyclage ou leur valorisation.

Elle oblige également les producteurs et importateurs de produits générateurs de déchets à informer les consommateurs sur leurs qualités et caractéristiques environnementales, notamment l'incorporation de matière recyclée, l'emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité et la présence de substances dangereuses, de métaux précieux ou de terres rares.

(6) La fixation d'objectifs chiffrés de réduction de la consommation plastique

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire prévoit une diminution de 50 % des quantités de produits manufacturés non recyclables mis sur le marché avant 2020.

Par ailleurs, elle oblige les éco-organismes à prévoir des objectifs de réduction de la mise sur le marché d'emballages, notamment d'emballages plastiques à usage unique. La non-atteinte de ces objectifs est sanctionnée financièrement.

Elle fixe également pour objectif de réduire de 50 % d'ici à 2030 le nombre de bouteilles en plastique à usage unique pour boisson mises sur le marché.

(7) Le renforcement des obligations de recyclage

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a fixé des objectifs ambitieux en matière de valorisation :

- une valorisation de 55 % en 2020 et de 65 % en 2025 des déchets non dangereux non inertes ;

- une valorisation de 70 % des déchets du secteur du BTP en 2020 ;

- un objectif de 100 % de plastique recyclé au 1 er janvier 2025.

Ces objectifs ne pourront être atteints que si la recyclabilité des déchets est améliorée. C'est la raison pour laquelle la loi précitée renforce le dispositif de modulation de la contribution versée par les metteurs en marché aux éco-organismes en fonction des critères de performance environnementale de leurs produits. Non seulement elle énumère les critères qui peuvent être retenus, mais elle renforce le caractère incitatif de l'éco-contribution en permettant aux éco-organismes de fixer des primes et des pénalités supérieures au montant de la contribution financière nécessaire à la gestion des déchets.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire prévoit également, dans un délai de trois ans à compter de l'agrément d'un éco-organisme, une évaluation de la trajectoire d'atteinte des objectifs afin, le cas échéant, de renforcer le niveau des modulations, si cela est nécessaire pour atteindre les objectifs.

L'État se réserve en outre le droit de fixer le montant de la pénalité applicable aux emballages plastiques qui ne peuvent intégrer une filière de recyclage en fin de vie.

En amont, cette loi exige qu'au plus tard le 1 er janvier 2030, les producteurs, metteurs en marché ou importateurs, responsables de la mise sur le marché d'au moins 10 000 unités de produits par an et déclarant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 10 millions d'euros, justifient que les déchets engendrés par les produits qu'ils fabriquent, mettent sur le marché ou importent sont de nature à intégrer une filière de recyclage. Cette obligation ne s'applique pas aux produits qui ne peuvent intégrer aucune filière de recyclage pour des raisons techniques, y compris en modifiant leur conception. Le non-respect de cette obligation s'accompagne de sanctions financières.

Enfin, elle généralise l'obligation d'un tri six flux 159 ( * ) à partir de 2025 pour tout producteur ou détenteur de déchets.

b) La signature d'engagements volontaires

La réglementation constitue un outil déterminant dans la lutte contre la pollution plastique. Elle est complétée par d'autres outils tels que les engagements volontaires reposant sur un accord entre les parties qui ont l'avantage de responsabiliser les signataires de l'accord.

(1) Le pacte national sur les emballages plastiques

Le 19 février 2019, le gouvernement français, 13 entreprises et 2 organisations non gouvernementales ont signé le pacte national sur les emballages. Il fixe 7 objectifs :

- éliminer les emballages en plastique problématiques 160 ( * ) ou inutiles. Les industriels se sont engagés à supprimer les emballages contenant du noir de carbone, à renoncer à l'utilisation du PSE dans les contenants alimentaires et les gobelets plastiques à usage unique d'ici à 2025 ainsi qu'à éliminer le PVC dans les emballages ménagers, commerciaux et industriels d'ici à 2022 ;

- mettre en place des modèles de réutilisation , lorsque c'est pertinent, pour réduire le recours aux emballages uniques ;

- faire en sorte que tous les emballages plastiques soient 100 % réutilisables, recyclables ou compostables d'ici à 2025. L'enfouissement, l'incinération et la valorisation énergétique des déchets ne font pas partie des objectifs visés par l'économie circulaire ;

- atteindre collectivement 60 % d'emballages plastiques effectivement recyclés d'ici à 2022 ;

- incorporer en moyenne 30 % de matières plastiques recyclées dans les emballages en partageant publiquement le taux cible et sa progression d'ici à 2025 ;

- découpler l'utilisation des plastiques de la consommation de ressources finies ;

- s'assurer que tous les emballages plastiques sont exempts de produits chimiques dangereux.

(2) Les engagements volontaires en faveur de l'intégration de plastique recyclé

Dans le cadre de la stratégie européenne sur les matières plastiques dans une économie circulaire, la commission européenne a lancé en 2018 une campagne d'engagements volontaires pour stimuler l'utilisation de matières plastiques recyclées dans les produits. Elle a fixé un objectif d'incorporation de matières premières recyclées de 10 millions de tonnes d'ici à 2025 au niveau européen répartis entre les différents États membres, soit un million de tonnes pour la France.

Cet objectif a été repris dans la feuille de route pour une économie circulaire publiée à la fin du mois d'avril 2018.

Celle-ci part du constat que « pour mieux produire » 161 ( * ) , il faut incorporer davantage de matières premières issues du recyclage dans les produits tout en assurant leur qualité, leur traçabilité et une réelle sécurité pour les citoyens.

Pour parvenir à cet objectif, la feuille de route pour une économie circulaire propose de « susciter, d'ici à l'été 2018, des engagements volontaires concrets et significatifs visant à organiser une ambition de filière, incluant des objectifs de volumes d'intégration de matière plastique issue de déchets dans les secteurs suivants : l'emballage, le bâtiment, l'automobile ou les équipements électroniques et électriques. Pour ce faire, l'ensemble des acteurs (fournisseurs de matières vierges, fabricants de produits, metteurs en marché, collecteurs et gestionnaires de déchets) travaillent actuellement sous l'égide du ministère de l'Économie et des Finances et du ministère de la Transition écologique et solidaire à l'élaboration d'engagements d'utilisation de matières plastiques recyclées sur différents types de résines utilisées (polystyrène, polyéthylène, polypropylène, polychlorure de vinyle) ».

Le 2 juillet 2018, 55 entreprises et fédérations signaient des engagements volontaires visant à utiliser 275 000 tonnes par an supplémentaires de plastiques recyclés dans la fabrication de nouveaux produits d'ici à 2025. Trois secteurs, totalisant 75 % de la consommation nationale de plastiques, sont concernés : l'emballage (+ 188 000 tonnes par an, soit un quasi-doublement de la matière recyclée réintégrée à la production) ; le bâtiment (+ 75 000 tonnes par an) ; l'automobile (+ 12 000 tonnes par an).

c) La mobilisation des collectivités territoriales

À différentes échelles, les collectivités territoriales sont largement impliquées dans la prévention et la gestion des déchets ainsi que dans le développement de l'économie circulaire.

La loi NOTRe 162 ( * ) a confié aux régions la compétence de la planification, de la prévention et de la gestion des déchets. Ces plans ont pour objet de coordonner, à l'échelle régionale, les actions des parties prenantes concernées par la prévention et la gestion des déchets, visant ainsi à atteindre les objectifs nationaux de la politique de valorisation des déchets.

Au niveau local, les compétences de collecte et de gestion des déchets des ménages et des déchets assimilés sont confiées aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

(1) La réduction et la valorisation des déchets

Des lois successives (le Grenelle de l'environnement et la loi de transition énergétique pour la croissante verte) ont fixé des objectifs de réduction des déchets qui n'ont jamais été respectés. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire 163 ( * ) prévoit désormais une réduction de 15 % des quantités de déchets ménagers et assimilés produits par habitant entre 2010 et 2030. En outre, elle transpose la directive européenne relative à la mise en décharge telle que modifiée en 2018, en retenant l'objectif de réduction des quantités de déchets ménagers et assimilés admis en installation de stockage en 2035 à 10 % des quantités de déchets ménagers et assimilés.

La réduction des déchets ménagers et assimilés constitue un axe important dans la lutte contre la pollution plastique. En effet, ces déchets sont destinés à l'incinération ou au stockage. Or, ils comprennent une part importante de déchets plastiques susceptibles d'être valorisés.

Selon les responsables de Lyon métropole, 46 kg de plastiques par habitant et par an sont ainsi jetés avec les ordures ménagères au lieu d'être triés.

C'est la raison pour laquelle de nombreuses collectivités territoriales poursuivent des objectifs ambitieux de réduction des déchets ménagers.

Ainsi, Grand Besançon Métropole, qui regroupe 69 communes et 192 000 habitants, a mis en place dès 2012 un système de tarification incitative avec comme objectif une réduction des déchets résiduels de 35 % en habitat pavillonnaire et de 12 % en habitat collectif . En 2018, cet objectif a été atteint. En outre, la collecte des déchets recyclables et celle du verre ont augmenté de 11 %. Les déchets collectés en déchèterie ont augmenté de 27 %.

Cette réduction des déchets résiduels a pu se faire pratiquement à coûts constants puisque la redevance annuelle est passée de 65,9 euros par habitant en 2008 à 71 euros en 2018.

En outre, l'extension de la consigne de tri introduite en 2016 ne s'est pas accompagnée d'une forte augmentation du taux de refus de tri comme certains le craignaient. Celui-ci est passé de 14,9 % avant l'extension de la consigne de tri à 18,8 % après son introduction.

Colmar agglomération 164 ( * ) s'est également fixé comme objectif une réduction des déchets résiduels et une amélioration de la valorisation de ses déchets à coûts constants à travers trois axes d'action :

- la valorisation des biodéchets ;

- l'amélioration du dispositif d'apport volontaire des déchets recyclables à travers la multiplication des sites de collecte (bacs enterrés au pied des immeubles). Une convention avec les bailleurs sociaux a été signée afin de mutualiser les investissements et d'imposer l'installation de bacs de collecte pour toute construction de plus de vingt logements ;

- la refonte du système des déchèteries pour une meilleure valorisation matière : le site de la déchèterie a été agrandi (un hectare contre 20 ares précédemment), un quai a été dédié aux déchets verts, le nombre de filières de valorisation est passé de 19 à 35 et une ressourcerie, gérée par une entreprise de l'économie sociale et solidaire, a été créée. Ces mesures ont permis de faire passer le taux de recyclage matière en déchèterie de 63 % à 80 %.

Au total, entre 2010 et 2019, les flux d'ordures ménagères résiduelles ont diminué de 39 % (passant de 318 kg à 194 kg par habitant). Les flux en déchèteries ont augmenté de 10 % et la collecte du recyclable sec (plastique, papier, métal) et du verre a augmenté de 21 %.

En 2019, la part de la valorisation matière a atteint 53 %. Cette réforme s'est faite à coût constant.

(2) Le développement de territoires « zéro déchet »

En 2014 et 2015, le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, a lancé des appels à projet « Territoire Zéro Déchet Zéro Gaspillage » afin d'identifier des territoires volontaires pour réduire leurs déchets 165 ( * ) et développer l'économie circulaire. 153 territoires ont été retenus et ont bénéficié d'une reconnaissance officielle, d'un accompagnement méthodologique et d'un soutien financier par l'Ademe pendant trois ans. Les moyens et les méthodes pour parvenir aux objectifs fixés ont été laissés à la discrétion des territoires.

Ces initiatives ont souvent eu un impact positif sur la lutte contre la pollution plastique, comme en témoigne l'exemple de Roubaix.

N'exerçant pas la compétence en matière de gestion des déchets, cette ville s'est attachée à susciter une dynamique citoyenne et à encourager le développement économique en donnant du sens aux déchets.

Depuis 2015, 100 familles sont accompagnées par an pour réduire leurs déchets, avec un fort effet d'entraînement puisqu'une personne engagée incite sept autres personnes à réduire ses déchets. En outre, cette mobilisation autour d'un projet commun a renforcé l'engagement citoyen, le lien social et le développement économique. Des écoles, mais également de nombreux commerces de proximité sont associés à la lutte contre les déchets et le gaspillage et la ville constate un essor de créations d'entreprises dans le domaine de l'économie circulaire.

Selon les responsables de la ville de Roubaix, la réduction des déchets permet à la fois de redonner du pouvoir d'achat aux citoyens (jusqu'à 3 000 euros sur un an, pour un foyer de quatre personnes par an), mais également de donner du sens aux déchets. Il s'agit de montrer qu'ils ne disparaissent pas, mais qu'ils peuvent constituer des ressources et créer des emplois.

(3) La lutte contre les perturbateurs endocriniens

Une stratégie nationale contre les perturbateurs endocriniens a été lancée en 2014. Elle vise à réduire l'exposition de la population aux perturbateurs endocriniens. Un nouveau programme couvre la période 2019-2022 avec trois axes d'actions : protéger la population ; protéger l'environnement et la biodiversité ; améliorer les connaissances.

Au niveau local, 200 communes, 6 départements et 4 régions, représentant la moitié de la population française ont signé la charte pour des villes et territoires sans perturbateurs endocriniens lancée par le réseau environnement santé. Les signataires s'engagent à :

- restreindre, puis à terme, éliminer l'usage des produits phytosanitaires et des biocides qui contiennent des perturbateurs endocriniens ;

- réduire l'exposition aux perturbateurs endocriniens dans l'alimentation en développant la consommation d'aliments biologiques et en interdisant, à terme, l'usage de matériels, pour cuisiner et chauffer, comportant des perturbateurs endocriniens ;

- favoriser l'information de la population, des professionnels de santé, des collectivités territoriales, de la petite enfance et des acteurs économiques à l'enjeu des perturbateurs endocriniens ;

- mettre en place des critères d'éco-conditionnalité éliminant progressivement les perturbateurs endocriniens dans les contrats et les achats publics ;

- informer tous les ans les citoyens de l'avancement des engagements pris.

Compte tenu de la place des plastiques comme sources de perturbateurs endocriniens, la réduction drastique de leur utilisation constitue l'un des axes majeurs du dispositif .

Par exemple, la ville de Paris s'est particulièrement engagée dans la lutte contre les perturbateurs endocriniens. Elle s'est dotée d'un plan de santé environnementale qui vise notamment à réduire l'exposition des Parisiens à ces substances. De nombreuses mesures ont été prises dans les crèches : les jouets achetés sont désormais pour moitié en bois, en tissu ou en carton. De nouveaux textiles en coton bio remplacent désormais progressivement les articles en contact direct avec la peau des enfants (tels que les couches).

La ville de Paris souhaite également protéger ses collaborateurs. Ainsi, le renouvellement de la vaisselle est en cours afin de supprimer totalement l'usage du plastique (30 millions de repas sont servis par an dans les différents services de la ville).

(4) Les autres initiatives pour lutter contre la pollution plastique

S'il n'est pas possible de rapporter l'ensemble des mesures prises par les collectivités territoriales pour lutter contre la pollution plastique, les exemples suivants illustrent leur implication : développement de fontaines à eau et de poubelles de tri sélectif dans les villes, organisation de groupes de travail avec les commerçants pour réduire l'utilisation de plastiques à usage unique, chartes « plages zéro plastique », fermeture des bouches de lavage 166 ( * ) pour éviter l'arrivée des déchets dans le réseau d'assainissement unitaire, développement de nudges au niveau des avaloirs pour dissuader les citoyens de les utiliser comme poubelles, utilisation de la commande publique pour supprimer le plastique à usage unique, développement de ressourceries pour encourager le réemploi.

Les routes, une source de fuite de macroplastiques dans l'environnement

Une enquête auprès des conseils départementaux a été réalisée dans le cadre de la mission afin de les interroger sur les opérations de nettoyage des routes départementales (cf. annexe V).

Les conseils départementaux assurent l'entretien des routes départementales dont ils ont la compétence. Des opérations de nettoyage sont ainsi régulièrement organisées. Elles se traduisent par la collecte d'un volume non négligeable de déchets. Selon les résultats de l'enquête, 35 % des déchets ramassés sont des plastiques. Les bouteilles sont les plus fréquentes, suivies des sacs plastiques et des emballages. Dans des proportions moindres, des bidons, des débris automobiles en plastique et des bâches agricoles sont également retrouvées dans les fossés routiers. L'enquête permet d'évaluer la quantité annuelle de déchets plastiques ramassés aux abords des routes départementales à 36 kg par kilomètres de voirie.

Les réponses recueilles dans le cadre de l'enquête ont également été valorisées pour chiffrer le coût des opérations de nettoyage : il s'élève, annuellement, à 73 euros par kilomètre de route départementale.

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les territoires d'outre-mer ont également pris des mesures pour lutter contre la pollution plastique. Ainsi, Wallis-et-Futuna a mis en place une écotaxe en 2017 qui vise à indemniser les consignes en verre, plastique et aluminium qui sont rapportées de façon volontaire dans les centres d'enfouissement techniques.

La Polynésie française a interdit l'utilisation des sacs plastiques.

La Nouvelle-Calédonie a voté l'interdiction totale d'importation et de mise à disposition de sacs en matières plastiques à usage unique mais également de sacs plastiques réutilisables. Elle a également interdit toute distribution d'objets en matières plastiques jetables, tels que les gobelets, verres, tasses, assiettes, couverts, pailles à boire et touillettes. Enfin, les barquettes en matières plastiques jetables destinées à l'emballage des denrées alimentaires ont vu leur interdiction prendre effet le 1 er mai 2020. Celles destinées au préemballage des denrées alimentaires seront interdites à compter du 1 er mai 2022.

B. LE RÔLE DE LA SOCIÉTÉ CIVILE

1. L'implication du tissu associatif

Le monde associatif joue un rôle fondamental dans la lutte contre la pollution plastique. Il est fortement impliqué dans les actions curatives de nettoyage (qui servent également à caractériser les déchets plastiques). Il s'investit également dans des actions de prévention de la consommation de plastiques à travers des actions locales, mais également au niveau international pour les associations les plus importantes (notamment via les réseaux sociaux et les pétitions). Un tel tissu associatif, bénévole, porteur d'initiatives, doit être considéré comme un important levier pour agir . Il doit être vu comme une infrastructure sociale, complémentaire à l'infrastructure technologique mise en place pour lutter contre les pollutions.

a) Les actions de nettoyage

De nombreuses associations réalisent des opérations de nettoyage, que ce soit sur les plages, le long des berges, dans les cours d'eau à sec, les lacs, les rivières, les fonds marins. Si l'objectif principal est de débarrasser la nature des déchets plastiques et d'éviter que ces derniers polluent l'environnement et les écosystèmes, ces opérations sont également l'occasion d'organiser des campagnes de sensibilisation.

La plupart des associations ne se contentent pas de ramasser des déchets. Très souvent, elles les caractérisent.

Ainsi, l'association Mer Terre s'est fixée sept objectifs : mieux comprendre les phénomènes de pollution par les macrodéchets ; récolter de la donnée pour avoir un appui auprès des décideurs ; agir sur les politiques publiques ; impliquer les fabricants, les distributeurs et les industriels dans le dispositif de réduction et de dépollution ; informer les consommateurs ; connaître les zones d'accumulation des macrodéchets pour aider les gestionnaires ; évaluer les actions en observant les évolutions (positives et négatives). Chaque année, cette association organise des actions de nettoyage et de caractérisation des déchets à travers notamment l'opération « Calanques propres » : en 2019, 124 m 3 de déchets ont été collectés. 80 structures 167 ( * ) ont participé à cette action, soit 1 600 personnes de Martigues à La Ciotat.

Cette association a également créé une plateforme 168 ( * ) qui recense et fédère toutes les actions menées dans la région Sud pour lutter contre les déchets plastiques sauvages. Actuellement, sont inscrits sur le réseau ReMed plus de 130 acteurs, dont 67 associations, 10 organismes de recherche, 12 sociétés nautiques, 22 établissements scolaires, 9 collectivités territoriales, 6 entreprises et les gestionnaires des parcs naturels et des zones protégées.

Vos rapporteurs ont constaté que de nombreuses associations travaillent en étroite collaboration avec des instituts de recherche, en particulier avec l'Ifremer, pour la constitution de données, notamment dans le cadre du réseau de surveillance des macrodéchets sur le littoral mis en place à la suite de l'adoption de la directive cadre stratégique pour le milieu marin. Sans la collaboration de la science participative, les scientifiques devraient consacrer des moyens humains considérables pour récolter, trier puis caractériser les déchets. Un axe de progrès est cependant identifié : il concerne la normalisation des protocoles et du reporting, conditions indispensables pour pouvoir comparer les résultats issus des campagnes de caractérisation.

Les exemples suivants illustrent le rôle des associations.

Sur le bassin versant de la Têt, dans le département des Pyrénées orientales, l'association CITECO 66 organise régulièrement des opérations de ramassage et de collecte des déchets. Lors d'une opération en février 2015, en deux heures, 40 bénévoles ont ainsi récupéré 2 278 déchets, dont 78 % en plastiques.

Le comptage, le pesage et la qualification des déchets flottants sur la Têt sont également organisés régulièrement par cette association. Entre 2016 et 2019, 66 observations ont été réalisées par deux personnes pendant 30 minutes selon le protocole mis en place par le réseau européen RIMMEL. Elles ont permis de qualifier 1 169 objets répertoriés, dont 97 % en plastique, pour un poids total de 3 990 kg.

En 2016, l'association Expédition MED a organisé une campagne de collecte participative sur 16 plages de l'arc atlantique qui a abouti à la collecte de données de catégorisation sur 144 997 déchets.

D'autres associations utilisent les opérations de nettoyage pour valoriser les déchets. C'est le cas de l'association « Reseaclons » qui réunit les univers de la mer et de la plasturgie : les déchets sont collectés par les pêcheurs, puis sont valorisés par la société TRIVEO, spécialiste du recyclage des plastiques complexes.

En un an, 1,2 tonne de plastiques marins a ainsi été valorisée. Les mousses, les thermodurcissables et les caoutchoucs, plastiques considérés habituellement comme non recyclables, sont nettoyés et broyés. Par un processus de compression-friction, ils sont recyclés pour la fabrication de pots de fleur. La gamme de produits est donc actuellement très réduite. Néanmoins, cette initiative mérite d'être encouragée. Non seulement elle s'appuie sur une dynamique territoriale permettant de sensibiliser un grand nombre d'acteurs sur la pollution des mers (riverains, collectivités territoriales, touristes, pêcheurs, monde associatif, etc.), mais elle donne une valeur émotionnelle aux déchets et constitue un exemple pour le décloisonnement des filières d'économie circulaire.

Reseaclons vise désormais à essaimer ses résultats sur quatre sites de la façade atlantique.

b) La réduction de la consommation de plastiques

Au-delà des actions de nettoyage, de nombreuses associations cherchent à inciter la population à réduire leur consommation de plastiques. Ainsi, les associations « No plastic in my sea » et « Zero plastic waste» publient des guides pratiques recensant les « éco-gestes » pour limiter l'utilisation de plastiques : achat en vrac ; utilisation de l'eau du robinet (100 fois moins chère que l'eau en bouteille et de très bonne qualité) ; utilisation de cosmétiques solides ; kits « doityourself » (pour les boissons, les lessives, les produits cosmétiques) ; les systèmes de consignes (bouteilles et ventes à emporter).

Des défis sont organisés, tels que l'action « no plastic challenge » qui vise à éviter 15 gestes pendant 15 jours (ne pas utiliser de sacs, de bouteilles, de couverts en plastique, etc.).

Ces associations insistent sur la corrélation entre la production et la pollution plastique. Elles jugent le recyclage inefficace et soulignent ses effets pervers : il n'incite ni les metteurs en marché, ni les consommateurs, à remettre en cause leurs habitudes de production et de consommation puisque la fin de vie des déchets est censée être assurée.

Ces associations prônent donc la réduction de la production ainsi que le développement du réemploi et de l'éco-innovation. À cet égard, elles soulignent que cette dernière n'a pas toujours besoin de faire appel à des technologies très performantes pour être efficace . Ainsi, la standardisation des emballages pour la consommation à emporter apparaît la solution la plus judicieuse pour mettre un terme à l'utilisation de plastiques à usage unique dans ce secteur d'activité.

Conscientes de la nécessité de jouer sur l'offre pour réduire la consommation de plastiques, de nombreuses associations organisent des actions de stigmatisation de certaines entreprises afin de les inciter à se détourner d'un modèle économique basé sur le plastique à usage unique.

A l'occasion de la journée mondiale de ramassage des déchets (world cleanup day), l'association Break free from plastic organise une action « name and shame ». Il s'agit d'identifier les grandes entreprises responsables de la pollution plastique et de les interpeller publiquement. Des opérations de collecte avec identification des marques sont organisées. Les données chiffrées sont collectées puis un rapport est réalisé pour interpeller les grandes marques sur leur responsabilité dans cette pollution. Cette stigmatisation des entreprises n'a pas vocation à modifier le comportement des consommateurs, mais à influencer les pratiques des entreprises qui sont soucieuses de leur réputation.

Lors de son audition, Pascale Ricard 170 ( * ) a évoqué un recours intenté en Californie par des associations environnementales au mois de février 2020 à l'encontre de grands groupes dont Coca-Cola, Pepsi, Nestlé ou encore Danone, sur le fondement du droit de la consommation (les consommateurs étant trompés sur le caractère recyclable des plastiques), ainsi que pour les dommages causés par les déchets plastiques de ces entreprises à l'environnement. Selon elle, la poursuite judiciaire des entreprises responsables de la pollution plastique pourrait être un nouveau type d'action prometteur pour les associations environnementales.

2. La sensibilisation croissante des citoyens
a) Une prise de conscience variable selon les plastiques et les catégories socioprofessionnelles

L'opinion publique est sensibilisée à certains aspects de la pollution plastique à travers les médias, les associations et les mesures prises par les pouvoirs publics. Elle s'inquiète de l'accumulation des macrodéchets en plastique qui constitue une pollution visuelle et s'offusque devant les impacts de cette pollution sur la faune vivant dans les océans.

Les plastiques à usage unique sont considérés comme les principaux responsables de cette pollution et les sondages suivants montrent la réserve des Français vis-à-vis de ce type de plastique.

Dans un sondage Ifop de mars 2019 sur « les Français et le plastique », 84 % des Français sont favorables à l'interdiction des plastiques à usage unique et 90 % sont favorables au retour à la bouteille en verre consignée.

Dans un autre sondage Ifop de novembre 2019 commandé par le WWF, 88 % des Français sont favorables à l'interdiction des produits et emballages plastiques non recyclables.

Pour autant, une conscience écologique et un bon niveau d'information n'entraînent pas automatiquement de changement de comportement et le prix reste un élément déterminant dans les choix de consommation.

Lors de son audition, Sylvie Moison-Pichard, directrice de Ligépack, a montré, à travers plusieurs sondages, les contradictions entre les comportements et les convictions. Ainsi, les jeunes générations sont celles qui apparaissent les plus sensibles à la dégradation de l'environnement. Pour autant, ce sont également elles qui consacrent le moins d'argent pour l'alimentation à domicile au profit de la commande à domicile ou de la restauration rapide, deux secteurs d'activité qui utilisent beaucoup de plastiques à usage unique.

Comme il a été dit précédemment, certaines associations essaient de faire prendre conscience aux consommateurs le lien entre mode de vie et coûts environnementaux en montrant les effets associés aux prix bas des plastiques. Toutefois, il semblerait que ces actions modifient uniquement la consommation des classes moyennes supérieures. Magali Reghezza 171 ( * ) a expliqué ce phénomène par le fait que les classes à très fort bagage culturel investissent la consommation comme un espace politique. Celle-ci leur permet un positionnement statutaire. Pour le reste de la population, qu'il s'agisse des adolescents ou des catégories populaires, les comportements restent grégaires et influencés par les valeurs dominantes (surconsommation, valorisation du jetable par rapport au durable) et le prix des produits.

Par ailleurs, la compréhension de la pollution plastique par l'opinion publique reste très partielle.

La pollution plastique est appréhendée uniquement par le prisme des macroplastiques. L'existence de microplastiques et encore plus de nanoplastiques est méconnue par la population et, par voie de conséquence, le risque que ces derniers font courir à l'environnement ou à l'Homme.

De même, si les Français reconnaissent la responsabilité du secteur de l'alimentation dans le développement de la pollution plastique en raison de sa forte consommation de plastiques à usage unique, ils ignorent le rôle de l'industrie textile, de la cosmétique, des pneumatiques, de l'agriculture ou encore de la pêche.

b) Des messages qui brouillent la perception des citoyens

Alors que les connaissances scientifiques ne sont pas stabilisées, que les menaces sont souvent invisibles et que le risque est mal connu, certains messages ajoutent délibérément de la confusion.

La lutte contre la pollution plastique se heurte à des intérêts économiques très forts qui cherchent par tous les moyens à éviter la mise en cause de leurs modèles d'affaires basés sur le plastique à usage unique. Selon eux, la pollution plastique est liée à une gestion déficiente des déchets plastiques et à un mauvais comportement des consommateurs. Le recyclage est souvent brandi comme susceptible de résoudre la pollution plastique puisque le déchet devient une ressource utilisée dans un nouveau cycle de production. L'accent est donc mis sur la responsabilisation des consommateurs afin de les inciter à mieux trier leurs déchets. Ce discours est également repris par les éco-organismes et les pouvoirs publics qui insistent sur la facilitation du geste de tri avec l'instauration de l'extension des consignes de tri. Néanmoins, ce discours confond - parfois délibérément - deux notions distinctes, à savoir le tri et le recyclage. S'il ne peut y avoir de recyclage sans tri préalable, le prochain chapitre va montrer que le taux de recyclage des plastiques n'atteint que 24,5 % et varie fortement en fonction des résines.

De même, certaines décisions publiques peuvent paraître contradictoires et brouiller la perception des citoyens. Ainsi, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a fixé un objectif de 100 % de déchets recyclés d'ici à 2025. Parallèlement, elle a posé le principe de l'interdiction du plastique à usage unique d'ici à 2040. Or, l'industrie du recyclage requiert non seulement des investissements considérables et donc une visibilité à long terme, mais également des flux importants et réguliers de matières pour rentabiliser les coûts d'investissement et de fonctionnement du traitement. Le message politique devient difficilement audible lorsque l'articulation entre les temporalités des mesures (mesures de recyclage à court terme, mesures de réduction de la consommation de plastiques à usage unique à long terme) est insuffisamment expliquée.

Un autre exemple illustre les confusions que peuvent susciter les débats sur les moyens pour lutter contre la pollution plastique.

De nombreuses associations sont impliquées dans des opérations de nettoyage des océans. The Ocean Cleanup, créée par Boyan Slat, envisage la création d'un barrage flottant qui collecterait les déchets du 7 e continent dans le gyre du Pacifique Nord. D'autres projets (comme The SeaCleaners d'Yvan Bourgnon) proposent de collecter le plastique et de le transformer en carburant.

Le rapport a précédemment évoqué l'inexistence des « continents de plastiques », et il a souligné que les microplastiques constituaient 90 % (en nombre et pas en masse) de la pollution plastique à la surface des océans. Ces opérations canalisent dès lors une vision réductrice de la pollution plastique. Le message du nettoyage des océans n'est pas celui qu'il faut prioritairement adresser à l'opinion publique pour l'informer des causes et des conséquences de la pollution plastique.

Mobilisant d'importants moyens financiers, ces opérations interrogent également sur leur efficience en termes de réduction de la pollution plastique des océans. Considérant qu'elles ne couvrent qu'une infime partie du domaine océanique et qu'elles s'adressent aux macrodéchets flottants, elles ne peuvent traiter que moins de 0,3 % de la pollution qu'elles visent à combattre, oubliant les macroplastiques présents dans la colonne d'eau, sur le fond des mers ou échoués sur les côtes.

Plusieurs des chercheurs auditionnés par vos rapporteurs ont évoqué des opérations qui peuvent être vues comme une affectation inefficiente de moyens pour endiguer la pollution.

Comment expliquer alors un tel niveau d'engouement de l'opinion publique pour le nettoyage des océans ?

Lors de son audition, Jean-Paul Vanderlinden 172 ( * ) a évoqué le concept d'épisode cosmologique qui correspond à « un moment au cours duquel les personnes sentent soudainement et profondément que l'univers n'est plus un système rationnel et organisé, et qu'il a perdu son sens ». La pollution plastique peut être considérée comme un épisode cosmologique. L'opinion publique est alors sensible à l'élaboration d'un récit permettant à nouveau aux événements d'apparaître comme cohérents dans le temps et l'espace et se déroulant d'une manière ordonnée. C'est ce qui expliquerait le succès rencontré par des associations comme The Ocean Cleanup auprès de la population. Elles seraient capables de redonner du sens - nettoyer la pollution plastique - à travers un slogan alors que le discours scientifique, à l'origine de la prise de conscience de l'épisode cosmologique, ne permettrait pas de générer des récits ayant les caractéristiques esthétiques et éthiques qui font les belles histoires.

C. UN ENGAGEMENT CROISSANT DES INDUSTRIELS

Les entreprises sont soumises à une pression croissante à la fois des pouvoirs publics et de l'opinion publique. Pour autant, leur implication varie, selon leur taille et les secteurs d'activité.

1. La prise de conscience par les grandes entreprises

Les grandes entreprises sont particulièrement impliquées dans la réduction de l'impact environnemental de leurs activités. Plusieurs raisons expliquent ce phénomène.

Compte tenu de leur taille et de leur part de marché, ce sont leurs produits qui ont l'impact environnemental le plus délétère. Ainsi, les campagnes de ramassage de déchets pour déterminer les marques dont on retrouve le plus de déchets dans la nature mettent régulièrement en avant la responsabilité de Coca-Cola 173 ( * ) , mais également de PepsiCo, de Nestlé et de Danone en matière de pollution plastique. En Europe, Coca-Cola, PepsiCo et Nestlé représentent 45 % des déchets retrouvés. Ces chiffres ne sont pas surprenants lorsqu'on considère les déchets générés par ces entreprises. Selon l'atlas des plastiques 174 ( * ) , Coca-Cola produit 88 milliards de bouteilles en plastique par an et génère 3 millions de déchets. Nestlé produirait 1,7 million de tonnes de déchets plastiques issus des emballages et Danone 750 000 tonnes.

Or, toutes les entreprises, et notamment les grandes, sont soucieuses de leur image de marque. Celles-ci ont l'avantage de disposer de moyens financiers et humains suffisants pour engager des actions efficaces. Enfin, la réglementation les oblige déjà à fournir des informations sur leurs impacts environnementaux et sociaux. La démarche de réduction de leur empreinte écologique est par conséquent systématiquement intégrée dans leur stratégie d'entreprise, avec des objectifs chiffrés et leur mise en correspondance avec les objectifs de développement durable définis par l'organisation des Nations Unies.

Les trois exemples suivants illustrent l'implication des multinationales dans la réduction de la pollution plastique par leurs activités.

• L'Oréal

Au cours de leur audition, les responsables de cette entreprise ont dressé la liste des engagements environnementaux du leader mondial des cosmétiques et les actions concrètes menées :

- afin de respecter l'environnement et la biodiversité, cette entreprise s'engage à utiliser des produits qui soient sains : les plastiques sont de grade alimentaire et l'entreprise s'engage à n'utiliser ni métaux lourds, ni PVC, ni bisphénol A dans les emballages ;

- afin de réduire la consommation de matières premières en poids et en volume, cette entreprise s'engage à utiliser 50 % de matières premières en moins à partir de 2021 en développant des systèmes de recharges et de contenants rechargeables pour les shampoings et les parfums ;

- l'entreprise s'engage à remplacer les matériaux à fort impact environnemental et à favoriser l'économie circulaire en utilisant des plastiques biosourcés (en provenance du bois), en investissant dans le recyclage chimique enzymatique développé par la société Carbios 175 ( * ) et en concevant un tube cosmétique à base de carton.

D'ici à 2025, tous les emballages devraient donc être rechargeables, recyclables ou compostables. Cette entreprise a également mis au point un outil d'évaluation de l'impact social et environnemental des produits (SPOT- Sustainable Product Optimisation Tool) reposant sur 14 critères. Il est mis à la disposition d'autres entreprises de la cosmétique pour la partie « emballages ».

En ce qui concerne la réduction des microplastiques dans les produits, cette entreprise a pris des engagements volontaires dès 2013 en matière de suppression des microbilles dans les produits rincés. Depuis 2016, L'Oréal a supprimé l'ensemble des microbilles en polyéthylène.

En ce qui concerne l'élimination des plastiques dans les produits non rincés proposée par l'ECHA dans un délai de six ans, L'Oréal a reconnu qu'un très grand nombre de polymères étaient concernés (57), apportant des propriétés fonctionnelles très diverses. Ses responsables ont expliqué que plus de 7 000 formulations seraient à revoir (99 % des produits de maquillage seraient concernés), ce qui serait très coûteux, alors même que l'enjeu environnemental de ces microplastiques serait réduit puisqu'ils ne sont pas éliminés par l'eau et qu'ils ne représenteraient que 192 tonnes de polymères pour l'ensemble du secteur de la cosmétique au niveau européen (dont 73 % liés aux produits solaires, 18 % au maquillage et 9 % à des produits de soin).

D'ici à 2016, L'Oréal a estimé être capable de reformuler 70 % des produits solaires, mais uniquement 30 % des produits de maquillage, tout en estimant que le coût était exorbitant pour ces derniers.

• Henckel

La société allemande Henckel est spécialisée dans trois secteurs d'activité : les détergents et les produits d'entretien (Persil, Somat, Mir), les cosmétiques (Schwarzkopf, Taft) et les colles et les adhésifs.

Cette entreprise prévoit que 100 % de ses emballages seront recyclables, réutilisables ou compostables d'ici à 2025 . Actuellement, le flacon du « Mir vaisselle » est déjà réalisé à partir d'un PET 100 % recyclé, de même que le contenant du nettoyant pour vitre « Bref ». En revanche, les emballages en polyéthylène contiennent un taux de polyéthylène recyclé moins important. Le taux de plastiques recyclés dans des emballages plastiques pour les produits Henckel devrait atteindre 35 % d'ici à 2035.

Elle a également fait part de ses engagements en matière de diminution des microplastiques dans ses produits. Au-delà les obligations légales, cette société affiche sa volonté de supprimer les opacifiants d'ici à la fin 2020 en les remplaçant par des opacifiants biodégradables. En outre, cette entreprise devrait supprimer les capsules microplastiques de parfum synthétique d'ici à la fin 2022.

• Trioplast

Il s'agit d'une entreprise suédoise spécialisée dans les emballages à base de film de polyéthylène (film de paillage, film étirable d'enrubannage, coiffe palette, sacs de caisse, etc.) implantée également en France (à Ombrée-d'Anjou dans le Maine-et-Loire).

Cette entreprise a défini trois axes stratégiques pour réduire son empreinte écologique :

- le développement de produits plastiques à partir de matières premières renouvelables telles que la canne à sucre ;

- la fabrication de produits dont le poids ou le volume a été réduit jusqu'à 50 % tout en conservant, voire améliorant leurs performances physiques et chimiques ;

- l'utilisation de polyéthylène recyclé pour fabriquer des produits plastiques. Les déchets plastiques en polyéthylène sont recyclés directement dans l'usine d'Ombrée-d'Anjou. Celle-ci a une capacité de recyclage de 10 000 tonnes. Les films plastiques utilisés pour le recyclage sont traités par Suez. Pour l'instant, 10 % des granulés issus de films recyclés sont réincorporés dans les granulés vierges utilisés pour la fabrication de films d'ensilage.

De nombreuses multinationales ont officialisé leur volonté de contribuer à la lutte contre la pollution plastique en signant « l'engagement global 176 ( * ) » initié par la fondation Ellen Mac Arthur pour la mise en place d'une économie circulaire pour le plastique 177 ( * ) qui repose sur trois axes : l'élimination de tous les produits plastiques inutiles ; l'éco-conception afin de permettre la réutilisation, le recyclage ou le compostage des plastiques ; l'économie circulaire afin de maintenir les plastiques dans les circuits économiques et éviter qu'ils ne finissent dans l'environnement.

2. Des fédérations professionnelles qui commencent à se mobiliser

Les auditions ont montré une forte sensibilisation de nombreuses fédérations professionnelles au sujet de la pollution plastique.

Ainsi, l'union des métiers et des industries de l'hôtellerie a créé depuis cinq ans une commission développement durable en son sein qui s'efforce de sensibiliser les professionnels à l'écologie à travers des guides pratiques et un processus de certification (label européen la clé verte).

De même, le syndicat national de l'alimentation et de la restauration rapide s'est fortement engagé dans la sensibilisation de ses adhérents sur les règles de tri et de collecte.

La fédération française du bâtiment est également très impliquée dans l'accompagnement de ses adhérents pour les aider à mieux gérer leurs déchets de chantier. Elle propose des formations, des documents de sensibilisation et des outils pratiques tels que l'application « déchets BTP » qui permet de localiser les points de collecte dans toute la France.

Toutefois, les fédérations professionnelles se heurtent à une difficulté liée à l'hétérogénéité de leurs membres. Ainsi, parmi les 50 000 entreprises qui adhèrent à la fédération française du bâtiment, les géants du secteur comme Bouygues ou Vinci côtoient 30 000 entreprises de moins de 10 salariés.

De même, le syndicat national de l'alimentation et de la restauration rapide comprend les grandes chaînes américaines de la restauration rapide, mais également de nombreux petits établissements.

Il en résulte deux conséquences.

D'une part, les adhérents peuvent avoir des préoccupations différentes en fonction de leur taille et leur niveau d'information peut être hétérogène. Ainsi, les représentants de la fédération française du bâtiment ont reconnu la méconnaissance par de nombreuses entreprises de la réglementation liée aux cinq flux 178 ( * ) .

D'autre part, le renforcement des contraintes réglementaires pour lutter contre la pollution plastique tend à accroître les inégalités entre les grandes entreprises et les plus petites.

3. Le rôle des éco-organismes

Les éco-organismes sont des personnes morales de droit privé, à but non lucratif, créées et financées par des producteurs qui, en vertu du principe « pollueur-payeur », sont rendus responsables (responsabilité élargie du producteur -REP-) des déchets issus de la fin de vie des produits qu'ils ont mis sur le marché. Cette responsabilité s'exerce dans le cadre de filières (« filières REP ») qui correspondent chacune à une catégorie de déchets, que ceux-ci soient produits par les ménages ou par des professionnels.

Les éco-organismes ont pour vocation principale d'optimiser la gestion des déchets dans leur périmètre, mais aussi de prévenir la production de ces déchets à travers deux outils : la modulation des contributions versées par les producteurs selon des critères environnementaux et l'accompagnement des producteurs en matière d'éco-conception.

• La modulation des contributions

Au travers de la modulation des contributions, les éco-organismes incitent les metteurs en marché à éco-concevoir leurs emballages.

Comme il a été vu précédemment, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a élargi la liste des critères qui pourront donner lieu à des bonus et des malus : la quantité de matière utilisée, l'incorporation de matière recyclée, l'emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi ou de réutilisation, la recyclabilité, la visée publicitaire ou promotionnelle du produit, l'absence d'écotoxicité et la présence de substances dangereuses, surtout si elles perturbent le recyclage.

En outre, le malus pourra désormais dépasser le montant de l'éco-contribution versée par les producteurs, tout en leur laissant la possibilité de demander que ce montant soit plafonné à 20 % du prix de vente du produit. L'éco-modulation a vocation à décourager certaines pratiques de conception ou l'usage de certains matériaux, comme en témoignent les deux exemples suivants.

Les emballages en PVC (barquettes operculées de charcuterie, boîtes pour pâtisserie, etc.) n'entrent dans aucune filière de recyclage. En raison de son faible gisement, le développement d'une filière de tri et de recyclage dédié au PVC ne peut pas être envisagé. De plus, cette résine n'est pas acceptée actuellement en valorisation énergétique via les Combustibles Solides de Récupération (CSR) du fait de la présence de composés chlorés. Cet emballage non recyclable et non valorisable fait par conséquent l'objet d'un malus de 100 % pour l'éco-modulation 2020 de Citeo.

Les emballages multicouches (associés à de l'aluminium, du PVC ou du silicone de densité supérieure à 1, etc.) impactent significativement les processus de tri et de recyclage en nuisant à la qualité de la matière recyclée et en dégradant l'outil industriel. C'est pourquoi ces emballages (chips, café, sachets de nourriture pour animaux de compagnie) sont majorés de 50 % dans leur tarif par rapport au tarif plastique de base. Ce taux passera à 100 % en 2021.

• L'accompagnement des producteurs en matière d'éco-conception

Les éco-organismes ont également vocation à accompagner les producteurs en matière d'éco-conception.

Ainsi, Eco-TLC 179 ( * ) (devenu Refashion) a développé une plateforme d'éco-conception pour les équipes produits des metteurs en marché.

Citeo 180 ( * ) a développé plusieurs outils pour les entreprises afin de promouvoir les meilleures pratiques en matière d'éco-conception :

- TREE (Test de la Recyclabilité des EmballagEs) afin d'améliorer la recyclabilité des emballages. Dans ce cadre, Citeo a défini trois situations dans lesquelles les emballages sont considérés comme non recyclables :

lorsqu'ils sont exclus des consignes de tri et ne sont donc pas recyclés. C'est par exemple le cas des emballages en bois, des pots en céramique ou en grès. Ces emballages sont soit incinérés avec récupération d'énergie, soit mis en décharge ;

lorsqu'ils sont inclus dans les consignes de tri mais il n'existe pas de filière de recyclage pour les matériaux choisis. C'est notamment le cas des emballages plastiques rigides constitués d'une autre résine que les résines PET, PE et PP ;

lorsqu'ils sont composés d'associations de matériaux conduisant à limiter les performances du recyclage, voire à exclure l'intégralité de ces emballages de la filière de recyclage ;

- FEEL (Facilitateur d'Eco-conception En Ligne) qui permet d'établir un diagnostic de l'éco-conception d'un produit et un plan d'action personnalisé afin de l'améliorer ;

- BEE (Bilan Environnemental des Emballages) : un outil permettant d'évaluer l'impact environnemental des emballages et de soumettre un plan d'action d'éco-conception adapté.

Par ailleurs, pour accompagner les industriels, Elipso, Citeo et Valorplast ont créé en 2001 le COTREP (Comité Technique pour le Recyclage des Emballages Plastiques) dont l'objectif est d'aider les concepteurs d'emballages à développer des solutions recyclables grâce à l'innovation. Pour appuyer son expertise, le COTREP a publié près de 130 avis de recyclabilité des emballages plastiques reposant sur des tests réalisés en laboratoire et en conditions industrielles, sur la base de protocoles validés par la profession.

Il convient de remarquer que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire va imposer aux éco-organismes, dès 2023, d'investir l'équivalent de 2 % de leurs contributions dans des projets de réemploi.

4. Des implications dans la lutte contre la pollution plastique variables selon les secteurs

Certains secteurs sont particulièrement investis compte tenu de la pression sociale et des obligations réglementaires qui pèsent sur eux. Les emballages plastiques à usage unique sont singulièrement montrés du doigt. Non seulement ils représentent 46,3 % de la consommation totale de plastiques en France, mais leur durée de vie est très courte et leur impact délétère sur l'environnement a été démontré scientifiquement. Toutes les filières qui utilisent ces emballages plastiques à usage unique contribuent donc à la pollution plastique, que ce soit l'industrie agroalimentaire, la restauration (notamment rapide et/ou hors domicile), la grande distribution, sans oublier les secteurs de la cosmétique et des détergents. Vos rapporteurs ont constaté que ces filières déployaient toutes des actions de réduction de leur impact environnemental, même si la pertinence de certaines initiatives reste à démontrer (voir infra chapitre VI).

En revanche, les secteurs responsables de la pollution par les microplastiques ne font pas encore l'objet de réglementations visant à prévenir cette pollution et semblent réticents à assumer leurs responsabilités.

• Le secteur du textile

Le secteur du textile fait particulièrement preuve d'attentisme . Alors qu'un nombre croissant d'études scientifiques montre l'importance du relargage des fibres au moment du lavage des vêtements, cette question a souvent été éludée par les représentants de la filière auditionnés. Ils ont été nombreux à justifier la nécessité d'approfondir les connaissances sur la libération des fibres et le besoin des méthodes d'analyses homogènes afin de pouvoir établir des comparaisons fiables. A la question sur les éventuelles mesures de prévention à prendre, les responsables de H&M ont renvoyé à la vente de sacs de lavage pour retenir les microplastiques et à l'obligation, votée dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, d'équiper les machines à laver de filtres à microfibres. Les filtres n'étant pas au point, il faudra veiller à évaluer leur efficacité, autant du point de vue de la filtration que de celui de leur entretien par les utilisateurs des machines à laver.

Si l'efficacité des filtres sur les machines à laver est encore incertaine, différentes auditions menées auprès des chercheurs travaillant sur le relargage des fibres textiles ont montré que le lavage des vêtements avant leur mise sur le marché permettrait de limiter considérablement la libération des microfibres par les lessives ultérieures.

• Les granulés plastiques industriels

Sur ce sujet, aussi bien PlasticsEurope, représentant les fabricants de matières plastiques, que la Fédération de la Plasturgie, représentant les entreprises de transformation, ont mis en avant le programme « operation clean sweep ». Il vise à diffuser et à systématiser les bonnes pratiques permettant de réduire les pertes et les rejets de granulés lors des opérations de production, de transport et de transformation.

Le déploiement du programme repose sur quatre axes : la mise en place d'un audit sur chaque site pour analyser les points de transfert des granulés industriels ; l'analyse des zones de fuite ; la mise en place de mesures correctives ; l'établissement d'un bilan.

Lors de leur audition, les responsables de PlasticsEurope ont rappelé que ce programme avait démarré aux États-Unis en 1992. Il a été lancé en Europe en 2014 en ne devenant véritablement opérationnel qu'à partir de 2018 à la suite de l'engagement volontaire 181 ( * ) de PlasticsEurope en faveur d'une meilleure circularité et d'une utilisation plus efficace des ressources.

Lors de l'audition de leurs responsables, en novembre 2019, seules trois sociétés, soit 6 % des membres de PlasticsEurope, n'avaient pas encore signé l'engagement mais devaient le faire d'ici fin 2019. L'Assemblée Générale de PlasticsEurope de juin 2019 avait acté que toute société non-signataire du programme operation clean sweep au 1 er janvier 2020 ne serait plus membre de l'association.

Au niveau français, toutes les sociétés ayant des sites en France ont signé cet engagement. Désormais, il reste à convaincre les transporteurs et les stockistes à adhérer à ce programme.

Pour rappel, 41 000 tonnes de granulés industriels sont relarguées chaque année dans l'environnement en Europe. Ce problème n'a été pris au sérieux que très tardivement par les industriels européens et l'engagement volontaire suscite des interrogations sur sa capacité à mettre un terme à cette pollution.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a prévu qu'à compter du 1 er janvier 2022, les sites de production, de manipulation et de transport de granulés de plastiques industriels devront être dotés d'équipements et de procédures permettant de prévenir les pertes et les fuites de granulés dans l'environnement. Cette mesure devra faire l'objet d'une évaluation pour, le cas échéant, être complétée afin d'en améliorer son efficacité.

• Le secteur des pneumatiques

Les pneumatiques peuvent relâcher des matières plastiques à deux stades :

- au cours de leur usage (sous l'effet de l'abrasion) ;

- en fin de vie.

La gestion des déchets de pneumatiques est encadrée depuis 2003 sur la base du principe de responsabilité élargie des producteurs.

Le fonctionnement de la filière est aujourd'hui performant puisque quasiment tous les déchets de pneumatiques issus de pneus neufs mis sur le marché sont collectés puis traités, principalement en valorisation énergétique (cimenterie), mais également en valorisation matière (production de granulats pour des usages divers) et en réutilisation (pneus d'occasion). Environ 504 000 tonnes de pneumatiques (soit 52 millions d'unités toutes catégories confondus) sont mis sur le marché, chaque année, en France.

Par ailleurs, les pouvoirs publics, associés aux acteurs de la filière de gestion des déchets de pneumatiques, ont organisé la résorption des stocks de déchets de pneumatiques dits « historiques » (constitués avant 2003) à travers l'association Recyvalor. Issue d'un accord interprofessionnel de 2008, elle a traité en dix ans plus d'une cinquantaine de sites représentant 55 000 tonnes de déchets de pneumatiques (soit plus de 7 millions de pneus).

Il reste désormais à collecter les pneus d'ensilage. En juillet 2019, dans le cadre de l'accord volontaire passé avec le ministère de la transition écologique et en lien étroit avec les acteurs du monde agricole, les acteurs de la filière pneumatique ont créé l'association Ensivalor qui a pour mission de collecter et traiter les pneus d'ensilage. 15 000 pneus devraient être collectés et traités chaque année. Toutefois, compte tenu du stock existant (800 000 pneus), il faudra 54 ans à Ensivalor pour venir à bout de sa mission. Cette réserve faite, la gestion des déchets de pneumatiques en fin de vie est convenablement assurée par les acteurs de la filière.

En revanche, la pollution résultant des particules d'usure ne fait pour l'instant l'objet d'aucune mesure de prévention et n'est pas réglementée.

Lors de leur audition, les représentants de Michelin ont contesté les chiffres de certaines études scientifiques avançant le fait que les particules de pneus pourraient représenter 30 % du plastique figurant dans l'océan.

Selon Michelin, les particules d'usure des pneus se distingueraient des autres microplastiques. En premier lieu, dans la mesure où le caoutchouc (servant à la fabrication des pneus) n'aurait pas la même nature chimique que les autres plastiques. En second lieu, parce qu'il serait plus facilement dégradable en raison de liaisons insaturées. De surcroît, le phénomène de production des fragments de pneumatiques, au contact de la route, par frottement et échauffement faciliterait ensuite leur dégradation dans les sols. Au bout d'un an, la moitié des particules seraient complètement dégradées.

Enfin, au moment de leur apparition, les particules d'usure se mélangeraient avec le marquage des routes. Ce mélange aurait une densité supérieure à celle du caoutchouc, ce qui l'empêcherait d'être présent dans l'air, mais également de flotter dans l'eau. En définitive, seules 2 à 5 % des particules se retrouveraient dans les estuaires. La grande majorité s'accumulerait dans les sols et dans les sédiments.

Les représentants de Michelin ont signalé l'existence du Tyre Industry Project (TIP), un consortium composé de 11 entreprises de pneumatiques, représentant 65 % de la capacité mondiale de production, qui finance des recherches sur les questions de durabilité des pneumatiques. Créé en 2005, l'objectif du TIP est d'identifier et d'anticiper les impacts sur la santé humaine et l'environnement associés au cycle de vie des pneus. Plusieurs études auraient ainsi été commandées sur les particules d'usure des pneus et des routes, dont une sur la biodégradabilité des pneus. Les résultats seront connus en 2021.

Les cas des particules d'usure des pneumatiques : la vision du manufacturier comparée à celle de la recherche

Vos auditeurs ont auditionné des représentants de l'entreprise Michelin et des chercheurs menant des travaux en lien avec les particules issues de l'abrasion des pneumatiques.

Les représentants du manufacturier ont pris le temps d'énoncer et de caractériser le mécanisme d'abrasion et les propriétés des particules d'usure. Ils ont ainsi précisé que ces dernières étaient constituées d'un mélange de débris issus des pneumatiques et de la route, dont la densité leur permettait de couler. Ils ont également précisé que le frottement entre le pneumatique et la route produisait un raccourcissement des chaînes carbonées facilitant la biodégradabilité de ces particules qui vont se retrouver dans les sols et dans les sédiments. Ils ont par ailleurs évoqué les résultats de leurs études sur la toxicité des particules sur les organismes, revenant en particulier sur deux grands résultats. Le premier démontre l'absence de toxicité des particules tandis que le second évalue à un an leur période de demi-vie 182 ( * ) .

De leur côté, les chercheurs s'interrogent aussi sur l'innocuité des particules d'abrasion des pneumatiques. L'équipe de John E. Weinstein mène des recherches depuis 2014 dans le port de Charleston aux États-Unis. Ces investigations concluent sur la présence de zinc et d'hydrocarbures aromatiques associés aux fragments de pneumatiques. Les chercheurs se sont intéressés à l'impact de ces particules sur les crevettes. Si l'absence la toxicité aigüe n'est pas prouvée, ils observent une persistance des particules dans le corps des crustacés, en raison notamment d'un temps d'excrétion assez long après ingestion (de 45 à 75 heures selon la taille des particules). La question de la toxicité chronique reste donc posée.

Vos rapporteurs concluent de ces auditions que le sujet des particules issues de l'abrasion des pneumatiques demande la plus grande attention. En effet, malgré des résultats de toxicité plutôt rassurants, le flux continue et croissant de particules (considérant l'augmentation du trafic automobile) dans l'environnement reste une menace pour les organismes. Au niveau mondial, 5,86 millions de tonnes de particules d'usure seraient relargués chaque année. En dépit de la courte période de demi-vie des particules, les organismes restent en permanence confrontés à leur présence dans le milieu.

5. Des obstacles structurels à une plus grande implication

À l'issue des auditions de la quasi-totalité des représentants des filières industrielles, les constats suivants s'imposent.

Un certain nombre de fédérations professionnelles et d'entreprises semblent avoir pris conscience de la menace que font courir les pollutions plastiques sur l'environnement et la santé et s'efforcent de trouver des solutions durables.

Une majorité d'entre elles continuent néanmoins à minimiser le problème et à renvoyer la responsabilité de la pollution plastique sur d'autres secteurs économiques.

Certaines fédérations professionnelles et entreprises ont mis en avant le fait que la lutte contre la pollution plastique peut créer des distorsions de concurrence aux dépens des entreprises françaises et européennes.

La règlementation européenne impose l'enregistrement de toutes les substances chimiques dont plus d'une tonne est produite ou importée dans l'Union européenne (cf. encadré).

Or, de nombreuses personnes interrogées ont souligné que cette réglementation était insuffisamment respectée, en particulier pour les produits importés. Elles ont regretté le manque de contrôles qui, finalement, porte préjudice aux entreprises européennes.

Lors de l'audition des responsables de l'union des industries textiles de France, ces derniers ont expliqué avoir développé un label pour garantir que les textiles produits et commercialisés par des marques françaises ne posent pas de problème sanitaire pour le consommateur. Afin d'y parvenir, 50 000 prélèvements sont réalisés sur les tissus mis sur le marché français chaque année. Pour autant, ils ont rappelé que tous les fils synthétiques et la plupart des vêtements en fibres synthétiques étaient produits en Asie et qu'ils ne respectaient pas forcément la réglementation REACH.

Un rapport d'inspection de l'Agence européenne des produits chimiques (ECHA), rendu public le 13 février 2018, révélait qu'environ 18 % des 5 600 produits de consommation courante (bijoux, vêtements, articles de bricolage, pièces d'automobiles, jouets, etc.) testés dans les vingt-sept pays de l'Union européenne contenaient des substances de synthèse, des fibres ou des métaux lourds pourtant prohibés par le règlement REACH.
Ce sont les jouets qui présentaient les violations les plus importantes : près de 20 % de ceux testés révélaient la présence de phtalates, alors même qu'ils y sont interdits par la réglementation européenne depuis 1999.

La réglementation REACH (Registration, Evaluation,
Authorization and restriction of Chemicals)

Le rapport de l'Office sur l'évaluation des risques sanitaires et environnementaux par les agences 183 ( * ) présentait le règlement REACH de la manière suivante : « Le règlement REACH n° 1907/2006, entré en vigueur en 2007 constitue la base juridique commune à l'ensemble des États membres de l'Union européenne en matière de produits chimiques. REACH impose a minima de répertorier toutes les substances dès lors qu'elles sont commercialisées à travers la procédure d'enregistrement : aucune substance ne peut être vendue si elle n'est pas répertoriée. Mais le règlement REAC n'organise pas une évaluation préalable systématique et complète des produits. Une évaluation approfondie peut être demandée pour certaines substances pour lesquelles il existe des doutes ou des interrogations quant à leur dangerosité. Pour les substances très préoccupantes, mutagènes et toxiques pour la reproduction de catégorie 1 et 2, les substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT), les substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB), ainsi que les perturbateurs endocriniens, une procédure d'autorisation est imposée. »

Les produits plastiques sont soumis à la réglementation REACH qui se fonde sur trois principes :

? Enregistrement des substances de plus d'une tonne produite ou importée par an

REACH est fondé sur le renversement de la charge de la preuve : les industriels fournissent l'ensemble des données sur leurs produits en enregistrant leurs substances, et en décrivent les risques potentiels. Il leur incombe la preuve que les produits qu'ils mettent sur le marché n'entraînent pas de risque pour la santé ou l'environnement. Le principe est simple : « pas de données, pas de marché ». Par « données » est entendu : les informations sur les propriétés physico-chimiques, toxicologiques et écotoxicologiques des substances, une évaluation des risques pour la santé et l'environnement (en fonction des utilisations de ces substances tout au long de leur cycle de vie) et les mesures de gestion appropriées.

? Évaluation des substances et dossiers selon une approche risque

L'ECHA évalue la conformité des dossiers (au moins 20 % des dossiers, selon une priorisation des dossiers du fait de leur danger, de leur potentiel d'exposition, des données utilisées ou du volume des produits considérés). De plus, en cas de doute sur une propriété de danger, les substances peuvent faire l'objet d'une évaluation approfondie par un État-membre, qui peut alors demander des données complémentaires aux entreprises pour préciser les propriétés de la substance. Les substances prioritaires sont celles produites à tonnage élevé, utilisées par le consommateur, ou à usage dispersif (utilisation étendue et potentiel de rejet/exposition). Après diagnostic, soit les substances ne posent pas de risque ou le risque est maîtrisé et elles peuvent être utilisées, soit elles présentent certains risques et leur utilisation est davantage encadrée, voire interdite.

? Autorisation, restriction ou substitution

Si le risque ne peut pas être géré, les autorités peuvent restreindre en tout ou partie l'utilisation de certains produits. Le dispositif d'autorisation vise à ce que chaque utilisation de certaines substances, parmi les plus préoccupantes 184 ( * ) pour la santé ou l'environnement, soit soumise à une autorisation afin de permettre son contrôle strict. Il s'agit ici des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR), des substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT), des substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) ainsi que des substances suscitant un niveau de préoccupation équivalent (tels que les perturbateurs endocriniens). Les restrictions limitent ou prohibent la fabrication, la mise sur le marché ou l'utilisation de certaines substances qui constituent un risque inacceptable pour la santé humaine et l'environnement.

REACH met par ailleurs l'accent sur la communication tout au long de la chaine d'approvisionnement, et la coopération entre les acteurs, à travers :

- les Fiches de Données de Sécurité (FDS) partagées sur toute la chaine d'approvisionnement : ces fiches contiennent un certain nombre d'informations, telles que les propriétés de la substance, ses dangers et des instructions relatives à sa manipulation, son élimination et son transport. La présence de substances classées par le règlement CLP 185 ( * ) et très persistantes et très bioaccumulables est également précisée. Elles définissent également les conditions d'utilisation et les mesures de gestion des risques ;

- l'obligation d'information sur la présence de substances très persistantes et très bioaccumulables à plus de 1 % dans les articles tout au long de la chaine d'approvisionnement, et au consommateur sur demande. Ces dispositions permettent une traçabilité de la présence desdites substances le long de la chaine d'approvisionnement.

Les entreprises ont également souligné les distorsions de concurrence résultant de l'adoption par la France de mesures réglementaires plus sévères que celles existant au niveau de l'Union européenne.

Lors de leur audition, les responsables de la fédération régionale des producteurs de fruits ont critiqué l'interdiction 186 ( * ) , à compter du 1 er janvier 2022, du conditionnement des fruits et des légumes frais dans des emballages en plastique. Ils ont signalé que l'utilisation des plastiques pour l'emballage de leurs productions était la conséquence d'obligations règlementaires visant, par exemple, à assurer la traçabilité des produits issus de l'agriculture biologique. Ils ont également rappelé qu'en France, 75 % des fruits et légumes sont vendus en vrac. En revanche, dans certains pays (Italie, Grande-Bretagne, etc.), les fruits et légumes sont en grande partie emballés dans du plastique. Ils se sont donc inquiétés de ne plus pouvoir exporter alors que ce débouché représente plus de 40 % de leur chiffre d'affaires. Ils ont également insisté sur le fait que l'emballage des fruits et légumes ne représentait que 1,5 % des emballages alimentaires en France. Ils ont fait remarquer que la substitution du plastique par le carton entraînait d'importants investissements (une barquetteuse coûte entre 200 000 et 300 000 euros). Si les professionnels rencontrés sont convaincus, pour des motifs environnementaux, du bien-fondé de la sortie de l'emballage plastique, ils ont cependant énuméré une série de risques et de conditions de réussite : le besoin de temps pour engager cette transition tout en garantissant la maîtrise des impacts économiques sur leur filière ; l'importance de la transparence des emballages de substitution ; le risque d'une augmentation du prix de vente des fruits et légumes dans leurs nouveaux emballages (avec le risque induit d'un report de consommation vers d'autres produits, moins favorables à l'équilibre alimentaire, et possiblement conditionnés dans des emballages plastiques !).

D'autres filières industrielles ont souligné les coûts souvent très élevés des obligations de reformulation ou de substitution des plastiques par d'autres matériaux. Elles ont fréquemment jugé ces obligations disproportionnées par rapport à la faible part que représentent les plastiques qu'elles utilisent comparativement au volume total des plastiques consommés. Ainsi, en réaction à l'interdiction de microplastiques dans les dispositifs médicaux et les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro à compter du 1 er janvier 2024, le syndicat national de l'industrie des technologies médicales a fait remarquer que cette filière représentait moins de 0,1 % de la consommation mondiale de microplastiques.

Enfin, selon les secteurs d'activité, une lutte efficace contre la pollution plastique exige en réalité une remise en cause du modèle économique que les entreprises ne sont prêtes ni à accepter, ni à engager.

Le relargage croissant de fibres textiles dans les océans est directement lié à l'explosion de la vente de vêtements. 80 milliards de vêtements sont vendus chaque année dans le monde et ce marché devrait progresser de 3,9 % par an d'ici à 2025, largement dopé par la vente en ligne.

De la même manière, l'essor des emballages en plastique à usage unique est largement responsable d'une grande partie de la pollution plastique. Lutter contre cette pollution exige donc une remise en cause profonde de nos modes de consommation qui aura forcément un impact sur le chiffre d'affaires d'entreprises dont la stratégie marketing est étroitement liée à l'utilisation du plastique comme contenant peu cher et jetable.

C'est pour cette raison que certaines initiatives, notamment de la part de grandes entreprises, sont considérées par les associations environnementales plus comme des opérations de marketing que comme des actions efficaces pour limiter leur empreinte écologique. Ce « greenwashing » 187 ( * ) génère une confusion qui porte préjudice aux structures réellement engagées dans des démarches effectives de développement durable .

Il apparaît important d'évaluer l'efficacité de solutions comme le sac de lavage pour retenir les microplastiques ou le prototype de bouteille fabriquée par Coca-Cola à partir de déchets plastiques marins collectés puis recyclés (mais produit à 300 exemplaires seulement). Ces évaluations permettraient de répondre à la question de l'efficacité de ces solutions : apportent-elles de véritables avancées ou doivent-elles être associées à des exemples de greenwashing ?

Dans certains cas, le comportement de greenwashing est plus difficile à établir. Ainsi, 40 multinationales 188 ( * ) ont créé en 2019 une « alliance pour mettre un terme aux déchets plastiques 189 ( * ) » dotée d'un milliard d'euros pour financer quatre types de mesures : l'amélioration des infrastructures ; la sensibilisation des populations ; l'innovation et le nettoyage. Toutefois, comme le faisait remarquer une responsable d'une association environnementale : « ces mêmes entreprises ont aussi prévu d'investir 89,3 milliards de dollars, d'ici à 2030, dans des programmes de développement de la production de plastique. »

D. L'IMPLICATION DE LA COMMUNAUTÉ SCIENTIFIQUE

La communauté scientifique française et internationale s'est emparée du sujet de la pollution plastique. Les travaux des chercheurs, en forte croissance, contribuent à la structuration et à l'enrichissement d'un corpus de connaissances qui s'intéresse autant aux phénomènes liés à cette pollution, qu'à ses conséquences et ses solutions.

Le sujet de la pollution plastique a réussi à se faire une place parmi les autres enjeux environnementaux qui mobilisent l'attention et les moyens de la recherche (changement climatique et érosion de la biodiversité), très vraisemblablement en raison de l'interdépendance des sujets.

1. Une esquisse du paysage de la recherche académique internationale

L'exhaustivité d'une cartographie de la recherche est conditionnée autant par la superficie que par la profondeur des données disponibles.

Les informations utilisées ici ont été transmises par Stéphane Ledoux du CVT Allenvi 190 ( * ) . Elles donnent une vision de la recherche académique internationale en se focalisant sur une analyse bibliométrique des deux mots clés « plactic waste » et « microplastic ». Les résultats de cette analyse sont issus de la base bibliométrique Scorpus® Elsevier. Les publications retenues se limitent aux articles publiés depuis 1970, en langue anglaise dans des revues dotées d'un comité de lecture 191 ( * ) .

La cartographie obtenue à partir de ces informations ne cherche pas l'exhaustivité. Son objectif est de produire une photographie de la recherche académique internationale permettant de souligner des éléments clés en termes de production de recherche et de thématiques associées.

a) Des recherches en forte progression depuis dix ans

Les recherches sur les déchets plastiques sont plus anciennes que celles sur les microplastiques.

S'agissant des déchets plastiques, les recherches progressent régulièrement sur la période 1980-2010. Elles explosent littéralement depuis 2010 avec une multiplication par un facteur 5 du nombre de publications : aux alentours de 500 en 2010, leur nombre tend vers 2 500 dix ans plus tard.

La cinétique des recherches sur les microplastiques est globalement identique, bien que décalée dans le temps. Constant sur la période 1970-2010 (moins de 100 publications annuelles), le nombre de publication connait une augmentation significative à partir de 2014 (quatre ans après les recherches sur les déchets plastiques) suivant une allure exponentielle (entre 2014 et 2020 le nombre de publications est multiplié par un facteur 10).

Nombre de publications par année

Source : CVT Allenvi.

b) La domination des États-Unis et de la Chine

L'effort de recherche est variable d'un pays à l'autre. Les États-Unis cumulent le plus grand nombre de publications sur les déchets plastiques (2 217 articles) et la Chine est la plus féconde sur les macroplastiques (1 787 publications).

Trois pays, les États-Unis, la Chine et l'Inde sont les leaders mondiaux des recherches sur les déchets plastiques : ils cumulent le tiers des publications produites sur le sujet.

L'Allemagne s'invite dans le trio de tête des nations les plus prolifiques en termes de recherche sur les microplastiques, après les États-Unis et la Chine. Les communautés scientifiques de ces trois pays sont à l'origine de 39 % des publications sur les microplastiques.

La comptabilisation des publications rédigées sur les deux thématiques (déchets plastiques et microplastiques) renforce la démonstration de la place prépondérante des États-Unis et de la Chine. Au coude à coude, les recherches académiques des deux pays sont à l'origine, respectivement, de 2 835 et 2 865 publications, soit un total de 5 700 publications qui représente 27 % des articles produits par la communauté scientifique internationale. L'Inde, qui se situe en troisième position, comptabilise 1 576 publications, soit presque moitié moins que les États-Unis ou la Chine.

Seize pays de l'Union européenne 192 ( * ) contribuent à 27 % des recherches sur les déchets plastiques et à 33 % de celles sur les microplastiques. En Europe, les trois nations les plus productives sont, par ordre décroissant du nombre des publications dans les deux domaines : l'Allemagne (1 181 publications), l'Italie (1 063 publications) et l'Espagne (993 publications).

La production de connaissances européenne est plus abondante que celles des États-Unis et de la Chine réunis. La recherche européenne produit en effet 13 % de connaissances en plus que les deux leaders réunis dans le domaine de déchets plastiques et 8 % en plus sur les macroplastiques. La démonstration est faite de la force apportée par la coopération des scientifiques européens quand il s'agit de rivaliser avec les nations leaders.

Nombre de publications pour les principaux pays contributeurs

Source : CVT Allenvi.

La France se classe au 9 e rang en matière de recherches sur les déchets plastiques (554 publications). Son classement est meilleur en ce qui concerne les microplastiques avec une 5 e place (278 publications). Comparativement aux États-Unis, les chercheurs français produisent quatre fois moins de connaissances sur le sujet des déchets plastiques. Le rapport est identique avec la Chine pour les recherches sur les microplastiques.

Une précaution est à associer à la présentation qui vient d'être faite. Les données utilisées ciblent uniquement les publications en langue anglaise et pour deux thématiques. Il est possible qu'un élargissement des statistiques aux publications dans la langue des pays, et à d'autres thématiques, soit de nature à infléchir certains des constats.

c) Les thèmes de recherche associés aux déchets plastiques

L'analyse des mots clés des publications scientifiques ouvre la possibilité de cartographier les thèmes des recherches sur les déchets plastiques. Pour obtenir cette représentation spatiale des sujets de recherches, le CVT Allenvi a effectué une double analyse en :

- examinant la récurrence des mots clés (tailles des bulles de la figure suivante) ;

- considérant les associations des mots clés (proximités et liaisons entre les bulles).

Cinq familles de mots clés sont mises en évidence sur la carte réalisée. Elles correspondent à cinq grandes thématiques de recherches :

- les bulles rouges regroupent les recherches sur la gestion des déchets plastiques . Le recyclage y tient une place importante ;

- les bulles vertes rassemblent les recherches sur les propriétés physiques et chimiques des plastiques ;

- les bulles jaunes correspondent aux recherches sur la valorisation énergétique des déchets plastiques ;

- les bulles bleues réunissent les recherches sur la diffusion des déchets plastique dans les compartiments environnementaux ;

- enfin, les bulles violettes représentent les recherches sur la biodégradation des plastiques . Elles se situent à l'interface entre la gestion des déchets, la diffusion des plastiques dans l'environnement et les propriétés physiques et chimiques des plastiques.

Cartographie des thématiques de recherche
à l'échelle internationale

Source : CVT Allenvi, cartographie VOSviewer.

d) Les thèmes de recherche associés aux microplastiques

De la même manière que pour les déchets plastiques, l'analyse des mots clés des publications donne un aperçu des thématiques approfondies sur le sujet des microplastiques.

Quatre thématiques de recherche sont mises en évidence par l'analyse de la récurrence et de l'association des mots clés :

- les propriétés physiques des microplastiques ;

- les impacts sur les organismes aquatiques de la pollution plastique ;

- la toxicologie des plastiques ;

- la pollution des eaux.

2. Une esquisse du paysage de la recherche académique française

La visualisation du paysage français de la recherche académique sur les plastiques nécessitait des informations complémentaires à celles du CVT Allenvi, centrées sur une vision internationale du sujet. Une enquête a ainsi été effectuée, pour les besoins du rapport, auprès des principaux établissements publics effectuant des recherches dans le domaine de l'environnement et de la santé 193 ( * ) .

L'enquête s'est limitée au périmètre de la recherche publique. Pour des raisons de moyens et de temps disponible, il n'a pas été possible de garantir la parfaite exhaustivité des laboratoires inventoriés (en menant par exemple des investigations complémentaires auprès des universités susceptibles d'intervenir sur le sujet, en dehors de cadres partenariaux avec les organismes de recherche). Il s'agit sans doute d'une limite qui mériterait d'être corrigée. Nonobstant cette zone d'ombre, les données rassemblées permettent de présenter une première photographie du paysage français de la recherche sur les plastiques.

Dans l'objectif de s'assurer de la fiabilité des constats portés, des requêtes ont été réalisées à partir de la base de données scanR 194 ( * ) , permettant de disposer d'un autre moyen de contrôle.

a) Une recherche orchestrée par l'Agence nationale de la recherche

Depuis 2005, année de sa création, l'ANR 195 ( * ) assure le financement de la recherche française dans une logique de projets multipartenariaux, en cohérence avec un plan d'action quinquennal décliné, pour sa bonne progression, en plans d'action annuels.

La mobilisation des chercheurs se fait par un système d'appels à projets organisés autour de 49 axes de recherche qui couvrent l'ensemble des domaines scientifique hors spatial, cancer et VIH 196 ( * ) . Le processus interroge les chercheurs qui font remonter à l'ANR des propositions de sujets de recherche.

Un comité de pilotage procède au choix des projets. Il réunit notamment les ministères concernés, les pôles de compétitivités et les grands établissements publics de recherche comme le CNRS et l'INRAe pour ne citer qu'eux.

Sur la période 2014-2019, l'ANR a financé 26 projets en lien avec la pollution plastique pour un montant de 8,61 millions d'euros :

- 12 projets d'un montant total ANR de 4,47 millions d'euros ont concerné les effets sanitaires des additifs chimiques des contenants alimentaires ;

- 14 projets d'un montant ANR de 4,14 millions d'euros ont porté sur la contamination des écosystèmes par les plastiques (macro, micro et nanoplastiques).

b) Le groupement de recherche « Polymères & Océans »

L'objectif du GDR 197 ( * ) « polymères et océans » est de travailler sur le devenir des plastiques en milieu aquatique en stimulant l'émergence de recherches interdisciplinaires et multi-échelles.

Il est donc construit comme un dispositif fédératif animé par le CNRS et qui réunit plusieurs établissements de recherche.

Il rassemble plus de 250 chercheurs (français et communauté francophone) provenant de divers horizons : 53 laboratoires hébergés par l'Ifremer, l'ANSES et 6 des 10 instituts du CNRS (Institut de physique, Institut de chimie, Institut écologie et environnement, Institut national des sciences de l'Univers, Institut des sciences de l'ingénierie et des systèmes, Institut des sciences biologiques).

Le GDR est un lieu d'échanges et de confrontation d'idées entre les chercheurs de différentes disciplines qui centre ses recherches sur :

- le devenir des fuites de plastiques dans l'environnement : transferts des macro, micro et nanoplastiques (rivières, fleuves, côtes et mer), contamination des océans (surface, colonne d'eau, fonds marins, sédiments), modélisation du continuum terre-mer jusqu'aux abysses ;

- les impacts des plastiques et leurs risques sur le long terme : impacts de leur accumulation sur les organismes et les écosystèmes, interactions cellulaires et tissulaires, toxicité de leurs additifs et des contaminants chimiques et biologiques qui se lient aux plastiques ;

- les solutions possibles pour proposer des polymères alternatifs et innovants en réponse aux enjeux environnementaux et sanitaires, et en définissant de nouveaux modèles économiques pour les plastiques.

c) Une recherche en construction

La recherche française sur les microplastiques est récente, en phase de structuration et de montée en puissance. Depuis 2010, le nombre de projets de recherche augmente, avec une croissance qui s'accélère depuis 2014.

L'activité de recherche française sur la thématique des microplastiques peut être décrite en examinant les mots clés associés aux publications (selon la même méthodologie que celle utilisée pour caractériser l'activité de recherche internationale, cf. supra ). La cartographie des thématiques de recherche présente une structure en filaments caractéristique d'un corpus de recherche récent et de taille réduite, se distinguant, en la matière, du corpus international.

Cartographie des thématiques de recherche
à l'échelle française

Source : CVT Allenvi, cartographie VOSviewer.

Au-delà du seul sujet des microplastiques, la totalité des établissements enquêtés porte des recherches sur le sujet de la pollution plastique :

- 62 % d'entre elles ciblent directement le sujet ;

- 38 % des recherches permettent à la pollution plastique de trouver une place.

Les recherches balayent un large spectre de domaines, des organismes vivants à leurs milieux. Trois domaines font l'objet d'une attention particulière :

- 88 % des recherches portent sur les impacts pour les organismes et la biodiversité ;

- 75 % des recherches s'intéressent au domaine de la mer ;

- 63 % des recherches ciblent les impacts pour la santé humaine.

Le domaine de l'air est moins étudié, confirmant un constat préalablement énoncé dans le rapport.

Les domaines étudiés par les recherches sur les pollutions plastiques

Source : OPECST, enquête réalisée dans le cadre de la mission.

d) Un vaste champ disciplinaire dominé par les sciences « dures »

Les organismes de recherche ont été interrogés sur les disciplines mobilisées dans le cadre de leurs recherches sur la pollution plastique. Les réponses mettent en évidence la prééminence des sciences « dures ». En effet, 90 % des disciplines mobilisées relèvent de leurs champs de compétences contre 10 % pour les sciences humaines et sociales.

Dans le détail, quatre disciplines dominent dans le champ des sciences « dures » : la chimie (discipline mobilisée par 88 % des recherches), la biologie (63 % des recherches), la biochimie et la physique (50 % des recherches).

La diversité des disciplines mobilisées
Sciences dures et sciences humaines et sociales

Source : OPECST, enquête réalisée dans le cadre de la mission.

S'agissant des sciences humaines et sociales, l'économie est la discipline la plus fréquemment mobilisée (38 % des recherches). Dans une moindre mesure, la sociologie et l'anthropologie interviennent dans 25 % des recherches.

Le sport au service de la science

La recherche peut également bénéficier de l'apport de disciplines dont il serait difficile d'imaginer qu'elles puissent lui être associées. C'est par exemple le cas avec la course à la voile.

Le 8 novembre 2020, le skipper Fabrice Amedeo a pris le départ du Vendée Globe (course à la voile autour du monde, en solitaire, sans escale et sans assistance). Il a embarqué à bord de son voilier un équipement permettant de réaliser des mesures et des prélèvements d'eau de mer. Couplé à la centrale de navigation de son bateau, pour géoréférencement, les mesures permettent de suivre la salinité, la teneur en CO 2 et la température de l'eau tout au long du parcours que suivra le navigateur.

En complément à ces mesures, Fabrice Amedeo procèdera à de la filtration d'eau de mer. Des filtres, permettant de retenir les microplastiques, seront changés toutes les douze heures. Ils seront stockés à bord avant d'être remis à l'Ifremer, au retour du skipper, pour y rechercher et analyser les microplastiques.

Cette course au grand large emprunte des routes qui ne sont que très fréquentées par d'autres bateaux. De surcroît, la course à la voile garantit des prélèvements sans la pollution diffusée à ses abords par un bateau à moteur.

L'ambition sportive de Fabrice Amedeo va être mise à la disposition de la communauté scientifique en lui permettant de réaliser un suivi des microplastiques dans des eaux qui ne pourraient que difficilement faire l'objet d'expéditions scientifiques.

e) La structuration de la communauté « microplastique » autour de personnalités et de laboratoires de référence

Les recherches sur les microplastiques mettent en évidence une communauté de scientifiques française structurée autour de laboratoires et de chercheurs spécialistes de différents domaines. Quatre grands ensembles structurent la communauté 198 ( * ) :

- les groupes vert et rouge composés de chercheurs de l'Ifremer avec deux spécialités qui dominent : les microplastiques et les déchets marins ;

- le groupe marron constitué autour de scientifiques du LEESU 199 ( * ) de l'université Gustave Eiffel (anciennement IFSTTAR) spécialisés dans les flux de polluants ;

- le groupe bleu structuré autour de chercheurs du laboratoire EPOC 200 ( * ) de l'université de Bordeaux qui étudient en particulier les impacts des pollutions plastiques sur les poissons ;

- le groupe violet caractérisé par son interdisciplinarité (à la différence des autres groupes il réunit des chercheurs de plusieurs établissements publics) avec un profil notamment marqué par la chimie et l'écotoxicologie.

Cartographie des chercheurs français

Source : CVT Allenvi, cartographie VOSviewer.

La taille des points sur la carte précédente renseigne sur le nombre de fois où les auteurs sont cités et, par conséquent, sur leur ancienneté dans le domaine de la recherche sur la pollution plastique.

Il est à noter que plusieurs des chercheurs présents sur la cartographie (et donc reconnus et influents dans la communauté scientifique française) ont été auditionnés par vos rapporteurs dans le cadre de la présente mission.

f) Une communauté scientifique ouverte sur l'international

La recherche académique française ne travaille pas en vase clos : 88 % des recherches sont ouvertes à des partenaires internationaux. Dans le même ordre d'idées, 63 % des équipes répondent à des appels d'offres européens consacrés à la pollution plastique.

S'agissant des participations à des programmes européens, « Horizon 2020 » apparaît comme un cadre attractif et structurant pour la mobilisation des équipes françaises à l'échelle du continent.

g) Les moyens de la recherche

La quantification des moyens présentée ci-dessous est issue de l'enquête auprès des 8 établissements publics (cf. supra ). Elle doit être comprise comme une première estimation et non comme le résultat d'investigations fouillées (rappelons que l'objectif de la mission n'était pas de dresser un bilan exhaustif des moyens de la recherche académique française).

S'agissant des moyens humains, l'imprécision et l'approximation réside dans la nature même de la fonction de chercheur qui amène à travailler sur différents sujets (sans leur être affectés en totalité) et parfois de manière indirecte. Il n'est donc pas possible de s'appuyer sur une comptabilité analytique.

S'agissant des moyens financiers, l'imprécision et l'approximation réside dans la difficulté à comptabiliser, sans oubli et double compte, de multiples sources de financements (financements directs, appels à projets nationaux et internationaux, partenariats privés, financements dévolus à la valorisation, etc.).

(1) Estimation des moyens humains

Établissements de recherche

Estimation du nombre de chercheurs (grade directeur de recherche) travaillant sur le sujet de la pollution plastique

ANSES

3

BRGM

3

CIRAD

3

CNRS

123

Ifremer

18

INRAe

?

IRD

11

Université Gustave Eiffel (IFSTTAR)

2

Moyennant les incertitudes associées à l'approche de quantification utilisée, la communauté scientifique française (rattachée aux 8 établissements de recherche) impliquée dans des travaux sur la pollution plastique avoisinerait 200 personnes.

Le tableau suivant précise la ventilation des chercheurs du CNRS 201 ( * ) .

Instituts de rattachement

Laboratoires

Membres GDR Polymères & Océans

Nombre de personnes impliquées

INEE

INSU

INP

INC

INSIS

INSB

INSHS

IMMM

X

6

X

LEMAR

X

6

X

X

PROMES

X

1

X

ICMPE

X

2

X

EcoLab

X

4

X

X

MIO

X

6

X

X

LCE

X

6

X

GPM

X

5

X

IMP

X

1

X

LMGE

X

1

X

IBMM-BA

X

6

X

X

CEFREM

X

3

X

X

IMN

X

1

X

X

LOV

X

4

X

X

IRDL

X

2

X

LOPS

X

3

X

CEFE

X

1

X

OSU OREME

X

1

X

X

MARBEC

X

6

X

ICCF

X

5

X

X

L2C

X

2

X

X

I2M

X

7

X

IPREM

X

3

X

LOMIC

X

3

X

X

IMRCP

X

4

X

GEPEA-CBAC

X

4

X

EPOC

X

4

X

X

ESO

14

X

DICE

1

X

IMFT

25

X

LGC

M2P2

LMFA

Pprime

LEMTA

LRGP

LEGI

IRPHE

IRDL

(2) Estimation des moyens financiers

Établissements de recherche

Estimation des moyens financiers dédiés à la recherche sur la pollution plastique

ANSES

80 k€ / an

BRGM

20 k€ / an

CIRAD

30 k€ / an

CNRS

12 M€ / an

Ifremer

2 M€ / an

INRAe

?

IRD

?

Université Gustave Eiffel (IFSTTAR)

700 k€ / an

Moyennant les incertitudes associées à l'approche de quantification utilisée, la communauté scientifique française bénéficierait annuellement de moyens financiers proches de 15 millions d'euros.

3. L'apport des recherches aux politiques internationales sous l'impulsion du Canada et de la France : l'exemple du G7

Lors de son audition, Magali Reghezza a éclairé vos rapporteurs sur une contribution de la communauté scientifique aux réflexions des instances politiques internationales.

En juin 2018, le Canada préside le G7 202 ( * ) et organise, dans ce cadre, un atelier sur la pollution plastique. Il est l'occasion de faire entendre la voix des scientifiques dans une enceinte politique. L'exercice est une réussite et l'ambition est posée de renouveler l'exercice à l'occasion de la prochaine rencontre du Groupe des sept pays les plus développés.

Cette rencontre se tient en août 2019, à Biarritz. Elle est présidée par la France qui choisit de réitérer le principe des ateliers sur les microplastiques. Le pilotage est confié à Roger Genest (directeur de l'ANSES 203 ( * ) ) et à Pascal Lamy (président de la Mission Board 204 ( * ) « santé des océans »). L'objectif est de produire des réflexions sur ce que la science peut apporter pour faciliter la gestion des microplastiques.

Deux ateliers sont organisés :

- le premier, dédié aux sciences « dures » est piloté par Fabienne Lagarde ;

- le second, dédié aux sciences humaines et sociales est piloté par Magali Reghezza.

La participation des chercheurs au G7 enclenche une dynamique qui dépasse la simple formulation de constats sans prise de décisions .

En apportant des connaissances sur les leviers à actionner pour enclencher des changements de comportements, la communauté scientifique a ainsi permis une entrée en force de la pollution plastique dans les débats politiques des grandes puissances mondiales. Cette contribution est utile pour éclairer les débats à partir des faits scientifiques et, in fine , contribuer à l'aide à la décision.

4. Une recherche qui doit progresser dans la définition de référentiels communs

Si la pollution plastique est globale et universelle dans ses principes physiques et chimiques, les pratiques scientifiques mises en oeuvre pour l'appréhender ne reposent pas sur des méthodes et des bases communes et partagées. Les auditions démontrent le besoin de construire un langage commun.

a) Un foisonnement des recherches qui multiplie les protocoles

Les recherches sur la pollution plastique sont récentes, voire émergentes quand elles portent sur les sujets des micro et des nanoplastiques.

La multiplication des recherches depuis une dizaine d'années, la nouveauté des sujets conjuguée à leur transdisciplinarité, provoquent un foisonnement des recherches et une grande variabilité dans les moyens, les méthodes et les protocoles déployés :

- en termes de comptage des déchets plastiques, les équipes se réfèrent à des échelles spatiales différentes, à des périodes d'observations qui diffèrent et à des unités disparates (selon les études, les comptages sont effectués en nombre de déchets, en poids des déchets, en volume de déchets) ;

- en termes de suivi des polymères, leur nombre important oblige à faire des choix. Des études s'intéressent à des résines ciblées en raison de leur volume de production quand d'autres privilégient une approche fondée sur l'usage ou la présence dans l'environnement ;

- en termes de méthodes de détection, les moyens utilisés varient en fonction du niveau d'équipement ou de compétences des équipes. Les résultats des études sont produits en ayant recours à la microscopie (repérage visuel des formes et des couleurs) ou à des méthodes stéréoscopiques (mesure de la réponse vibratoire des échantillons soumis à un rayonnement de photons et comparaison à des banques de signatures types). Ces méthodes stéréoscopiques nécessitent une normalisation des spectres types, indispensable à la comparaison des résultats. Deux technologies sont disponibles (spectroscopie RAMAN ou infra-rouge). Elles se distinguent par leur résolution et leur durée de mise en oeuvre (durée importante pour la méthode RAMAN qui traite des échantillons jusqu'à 1 um, rapidité de la méthode infra-rouge qui se limite aux échantillons supérieurs à 25 um).

Par ailleurs, les dispositions à prendre en laboratoire nécessitent une grande vigilance afin d'éviter la pollution des témoins par les microfibres de textiles synthétiques produites par les vêtements des opérateurs. Ici aussi, les pratiques entre équipes sont de nature à influencer les résultats.

L'ensemble de ces remarques souligne l'importance d'une standardisation des méthodes, des moyens et des protocoles. À défaut, la communauté scientifique va poursuivre des travaux à partir de méthodes différentes et non calibrées entre elles, rendant difficile la comparaison des résultats et retardant d'autant la compréhension des phénomènes et l'avancement des connaissances.

La connexion entre les équipes est fondamentale pour aboutir à des protocoles et des observations normalisées.

b) Des divergences d'appréciation dans la définition des tailles associées aux micro et aux nanoplastiques

La pollution plastique se présente sous trois formes associées à la taille des morceaux de plastique retrouvés dans l'environnement. Sont ainsi distingués les macroplastiques, les microplastiques et les nanoplastiques. Des différences sensibles existent dans la définition de la taille des morceaux. En l'absence de référentiel standardisé, les équipes se réfèrent à des gammes de tailles différentes . Ces différences se justifient par les capacités de mesure des laboratoires, mais également par les objets des recherches.

Pour ne rien arranger, certains chercheurs évoquent des tailles intermédiaires. C'est le cas avec les méso-plastiques, dont les tailles varient entre 0,5 et 2,5 cm, et les oligomères qui caractérisent des éléments de taille inférieure à 10 nm.

Les auditions des chercheurs ont mis en évidence cette hétérogénéité dans la définition des valeurs limites associées aux classes de taille des morceaux de plastiques (cf. graphique ci-après) :

- s'agissant des macroplastiques, la limite inférieure de la classe varie entre 5 mm et 2,5 cm. La limite supérieure n'a jamais été évoquée ;

- s'agissant des microplastiques, la limite inférieure est le plus fréquemment fixée à 1 um. La limite supérieure est régulièrement positionnée autour d'un millimètre ; un chercheur la pousse jusqu'à 0,5 cm. Il faut remarquer qu'un autre scientifique définit les microplastiques comme des débris dont la taille est inférieure à 5 um (sans borner la limite de cette classe) ;

- s'agissant des nanoplastiques, la limite supérieure est en règle générale située autour du micromètre (de 1 à 20 um), sans valeur de taille pour la limite inférieure de la classe. Un chercheur associe les nanoplastiques à la plage comprise entre 1 nm et 1 um.

Deux zones de superposition des classes de tailles sont identifiées (cf. graphique ci-après) :

- superposition des tailles des macro et des microplastiques entre 1 mm et 1 cm ;

- superposition des tailles des micro et des nanoplastiques en-dessous du micromètre. Cette seconde superposition est plus problématique que la précédente en raison des risques de confusions entre des tailles dont les interactions avec l'environnement ne sont pas les mêmes.

Les plages de tailles associées aux macro, micro et nanoplastiques

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Le flou sur la limite de classe entre micro et nanoplastiques s'explique sans doute par le haut niveau d'équipement nécessaire à l'observation des nanoplastiques. Des collaborations entre les équipes de recherche, en faisant appel aux spécialistes des nanoplastiques, pourraient constituer une première solution.

Une normalisation des limites des classes de tailles est nécessaire pour faciliter les échanges de résultats entre les équipes, permettant des comparaisons qui faciliteront la compréhension des phénomènes.

c) Des hétérogénéités dans l'étude des impacts sur les organismes marins

La comparaison des protocoles mis en place pour l'étude des impacts de la pollution plastique sur les organismes aquatiques révèle également une grande disparité.

Cette hétérogénéité est elle aussi de nature à complexifier la comparaison des résultats et à rendre difficile l'accès à une vision claire et synthétique des impacts de la pollution sur les organismes, leurs fonctions, leurs comportements et leur développement.

En premier lieu, les protocoles varient en fonction des organismes cibles. Les espèces étudiées peuvent êtres des invertébrés (vers et mollusques principalement) ou des vertébrés (poissons). Au sein du sous-embranchement des invertébrés, les recherches peuvent portent sur des mollusques bivalves (les moules et les huîtres par exemple). À ce niveau également les comparaisons restent difficiles. En effet, des variabilités comportementales entre espèces sont susceptibles d'influencer significativement les résultats ; ainsi les huîtres filtrent deux fois plus d'eau de mer que les moules.

Logiquement, les polymères sont une autre source d'hétérogénéité des protocoles. Leur grand nombre ne facilite pas la convergence vers un polymère modèle. Différents polymères sont étudiés. Un même polymère peut provenir de granulés issus de l'industrie de la plasturgie ou de prélèvements dans le milieu naturel. Ensuite, les polymères peuvent être utilisés avec ou sans leurs additifs. Certains protocoles les associent à des contaminants chimiques qui s'adsorbent à eux dans le milieu naturel (polluants organiques persistants par exemple). Ainsi, chaque protocole est susceptible de devenir un cas unique, incomparable à d'autres études.

La forme et la taille des plastiques est une troisième source de variabilité. Des chercheurs étudient des fibres quand d'autres privilégient des fragments. Les tailles des microplastiques ne sont pas les mêmes. Pourtant, qu'il s'agisse de la taille ou de la forme, les effets sur les organismes aquatiques ne seront pas les mêmes.

Enfin, les concentrations et les temps d'exposition constituent un autre élément de variabilité des protocoles et de leurs résultats. Les durées d'exposition sont variables, comme les concentrations en particules plastiques. Il s'agit ici aussi d'un nouvel élément susceptible d'influencer les résultats en raison des différentes toxicités simulées en aquarium (rappelons que la toxicité est la combinaison de la concentration et du temps d'exposition).

VI. LES MESURES PRISES ET LEURS LIMITES

A. UN EFFORT MAJEUR POUR AMÉLIORER L'EFFICACITÉ DU RECYCLAGE

1. Le recyclage : levier ultime de l'économie circulaire

Selon l'Ademe, l'économie circulaire se définit comme un système économique d'échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l'efficacité de l'utilisation des ressources, à diminuer les impacts sur l'environnement, tout en développant le bien-être des individus.

Elle repose sur sept piliers :

- l'approvisionnement durable en ressources ;

- l'éco-conception des produits : elle permet notamment de diminuer la quantité de matière, d'allonger la durée de vie ou encore de faciliter la réparation ou le recyclage du produit. Elle a pour but de réduire les effets négatifs des produits sur l'environnement tout au long de leur cycle de vie tout en préservant leurs performances ;

- l'écologie industrielle et territoriale qui s'appuie sur les synergies entre différentes entreprises ;

- l'économie de la fonctionnalité (qui privilégie l'usage à la possession) ;

- la consommation responsable qui conduit l'acheteur à effectuer son choix en prenant en compte les impacts environnementaux à toutes les étapes du cycle de vie du produit ;

- l'allongement de la durée d'usage à travers le recours à la réparation, à la vente d'occasion ou au don, ou à l'achat d'occasion dans le cadre du réemploi ou de la réutilisation ;

- le recyclage des déchets qui vise à les transformer en matériaux identiques, ou équivalents aux matériaux initiaux, afin de les réinjecter dans le processus de production initial.

L'économie circulaire : trois domaines, sept piliers

Source : Ademe.

Dans cette logique, le recyclage est censé réduire la quantité des déchets, limiter les émissions de CO 2 et économiser de l'énergie.

Une étude réalisée en 2017 sur les émissions de CO 2 et les économies en énergie liées au recyclage a montré qu'une tonne de PET recyclé permet d'économiser 70 % de gaz à effet de serre et 83 % d'énergie par rapport à la production d'une tonne de résine vierge. L'économie de gaz à effet de serre et d'énergie atteint 89 % pour le recyclage d'une tonne de PEHD.

Le déchet devient donc une ressource et permet de « boucler » la boucle, même s'il s'accompagne d'une consommation d'énergie et conduit à une perte de matière.

2. Le recyclage mécanique : une technologie qui rencontre des obstacles

Néanmoins, cette vision théorique du recyclage se heurte à une réalité plus prosaïque imposée par les spécificités des polymères.

a) Les obstacles techniques
(1) Tous les polymères ne se recyclent pas

Actuellement, la quasi-totalité du recyclage des plastiques se fait par voie mécanique. Le procédé consiste à trier, broyer, laver, puis fondre la matière plastique pour la transformer en granulés prêts à être utilisés pour la fabrication de nouveaux produits.

Comme il a été vu précédemment, il existe deux familles de polymères : les thermoplastiques et les thermodurcissables. Ces derniers présentent la particularité de ne pas pouvoir être refondus compte tenu de leur structure chimique particulière. Ils ne sont donc pas recyclables 205 ( * ) par voie mécanique .

Par ailleurs, si le recyclage mécanique fonctionne bien pour des objets constitués d'un seul polymère 206 ( * ) , il devient particulièrement difficile avec des matériaux plus complexes comme les composites, les multicouches ou les adhésifs.

Les composites sont des matériaux fabriqués en combinant des matériaux distincts (plastique renforcé de fibres de verre ou encore plastique renforcé de fibre de carbone et d'aramide). Ils sont principalement utilisés dans les secteurs de l'automobile, de la construction et de l'aérospatiale et représentent 6 % des plastiques produits.

Les matériaux multicouches désignent des emballages qui combinent plusieurs films polymères dont l'assemblage améliore les performances de l'ensemble. L'emballage Tetra Pak est un « multicouches » comprenant :

- du carton qui garantit la stabilité, la résistance et la texture lisse de la surface d'impression ;

- du film d'aluminium qui protège de l'oxygène et de la lumière afin de maintenir la valeur nutritionnelle et la saveur des aliments ;

- du polyéthylène qui protège contre des moisissures externes et permet au carton d'adhérer au film d'aluminium. Les matériaux peuvent être collés ou liés ensemble, formant des produits complexes impossibles à séparer mécaniquement.

Les adhésifs sont des polymères ou d'autres résines utilisés pour lier ensemble des matériaux non miscibles, comme des fibres cristallines avec une matrice polymère ou des couches polymères séparées qui ne collent pas entre elles. En plus d'être difficiles à séparer du matériau complexe, les adhésifs sont généralement présents en quantités relativement faibles, ce qui rend leur recyclage économiquement peu attractif. En outre, comme de nombreux adhésifs sont thermodurcis, il n'existe pas de méthode viable pour recréer leur fonctionnalité d'origine une fois récupérés.

La présence de certains additifs dans les plastiques compromet également leur recyclabilité. En effet, le recyclage mécanique ne permet pas d'éliminer les additifs présents dans les plastiques. Ainsi, parmi les 96 000 tonnes de plastiques issus des déchets d'équipements électriques et électroniques, 5 700 tonnes, soit 6 %, sont des plastiques contenant du brome et doivent être incinérés avec d'autres déchets dangereux.

(2) Un procédé qui altère les polymères

Trois des différentes étapes du recyclage mécanique contribuent à dégrader les polymères : le broyage, l'extrusion 207 ( * ) et la granulation. Sous l'effet des opérations de scission, des changements de phase et des pressions exercées sur la matière, les macromolécules des polymères sont raccourcies, ce qui dégrade leurs propriétés physiques et chimiques.

La matière plastique issue du recyclage 208 ( * ) sera donc de qualité inférieure à la matière vierge. Par exemple, elle n'offre pas les mêmes possibilités en matière de couleur puisqu'il n'est pas possible de retirer le colorant d'un plastique à recycler. La matière plastique issue du recyclage sera donc souvent grise ou noire, en raison du mélange de plastiques de différentes couleurs.

Cette dégradation du polymère signifie également que le nombre de recyclages n'est pas infini puisqu'il arrive un moment où la matière recyclée est trop dégradée pour respecter les critères de qualité.

Pour respecter les critères de qualité imposés par les metteurs en marché, la matière première régénérée doit donc être quasi systématiquement mélangée à de la matière vierge lors de sa réutilisation.

Au cours de leur mission, vos rapporteurs n'ont pas pu obtenir d'informations fiables sur le nombre de recyclages que peut subir chaque résine.

(3) Des obstacles techniques qui favorisent le décyclage

Le recyclage en cycle fermé signifie que le matériau recyclé est utilisé pour la même application. C'est le cas du verre et du métal. Actuellement, seul le PET utilisé pour les bouteilles en plastique est utilisé pour fabriquer de nouvelles bouteilles. Il est toutefois mélangé la plupart du temps avec du PET vierge.

La valorisation des bouteilles en PET en Europe

Actuellement, le recyclage en cycle fermé s'applique pour une seule résine plastique : le PET utilisé pour les bouteilles de boisson.

Pour autant, en 2017, seul 29,5 % du PET recyclé est utilisé pour fabriquer de nouvelles bouteilles de boisson. 40 % est utilisé pour les objets thermoformés (emballages pour biscuits, emballages plastiques solides pour pâtisseries, assiettes, etc.). 15,5 % du PET recyclé est utilisé pour le secteur du textile, contre 39,3 % en 2011.

Si une bouteille en PET sur deux est collectée en Europe, moins d'une sur dix sert à fabriquer une nouvelle bouteille.

Source : Nathalie Gontard : déchets plastiques : la dangereuse illusion du tout recyclage, The Conversation, 28 janvier 2018.

Dans tous les autres cas, il ne s'agit pas d'un recyclage en cycle fermé. On parle plutôt de « décyclage » ou de recyclage en tire-bouchon car le matériau recyclé est utilisé pour une autre application, qui exige un plastique recyclé de moindre qualité.

Il est à noter que certains schémas de décyclage sont pertinents. C'est en particulier le cas avec l'exemple 209 ( * ) des films plastiques agricoles décyclés en sacs poubelles compte tenu de la perte de leurs propriétés après plusieurs cycles de régénération.

b) Les obstacles réglementaires
(1) La question des « substances héritées »

Le recyclage s'adresse aux emballages dont la durée de vie est très courte. Il peut également concerner des matériaux en fin de vie qui ont été produits, et mis sur le marché, il y a parfois plusieurs décennies.

Selon la fédération des industries des équipements pour véhicules, le temps de vie d'un véhicule entre sa production et son traitement comme véhicule hors d'usage oscille entre 15 et 20 ans. Il faut ajouter à cette durée celle du développement du véhicule (3 à 4 ans). Les résines qui doivent être recyclées aujourd'hui ont ainsi été développées il y a plus de 20 ans. Elles peuvent avoir été formulées avec des substances autorisées à l'époque mais qui ont été interdites depuis.

Dans le cas où une telle interdiction intervient (au titre de l'application du règlement REACH) dans les nouveaux polymères, sans dérogation spécifique pour les polymères issus du recyclage, les produits fabriqués avec cette substance sont exclus du recyclage. Cette situation concerne des pièces automobiles, des équipements électriques, électroniques et les matériaux de construction.

Les substances héritées : le cas du PVC

Le cas du PVC et des encadrements de fenêtres illustre les difficultés d'une réglementation sur les substances dangereuses 1 fixant un ensemble d'exigences qui s'appliquent, indifféremment, aux matériaux qu'ils soient recyclés ou non.

Les fabricants de profilés en PVC se sont engagés à intégrer 25 % de matières plastiques recyclées 210 ( * ) contre seulement 6,5 % actuellement. La présence de stabilisants au plomb dans les anciens encadrements de fenêtres en PVC pose dès lors un problème, étant entendu que ces stabilisants au plomb sont aujourd'hui interdits.

La Commission européenne a proposé de modifier les règles concernant la concentration de plomb dans le PVC en réduisant le pourcentage de plomb 211 ( * ) autorisé à 0,1 %. En effet, selon la Commission européenne, « les composés du plomb ne peuvent pas stabiliser efficacement le PVC à des concentrations inférieures à approximativement 0,5 % en poids. Par conséquent, la limite de concentration fixée à 0,1 % doit garantir que l'ajout intentionnel de composés du plomb en guise de stabilisants lors de la fabrication de PVC ne puisse plus avoir lieu dans l'Union. »

L'industrie de l'Union européenne a progressivement cessé d'utiliser les stabilisants au plomb dans le PVC depuis 2015. Selon la Commission européenne, 90 % du total estimé des émissions de plomb provenant d'articles à base de PVC dans l'Union est donc imputable aux articles à base de PVC importés.

Afin « d'assurer un juste équilibre entre les avantages généraux à long terme découlant de l'utilisation circulaire de ces matériaux et les problèmes généraux à long terme pour la santé liés à ces matériaux », la Commission européenne a proposé des seuils plus élevés pour le PVC recyclé (2 % pour le PVC rigide et 1 % pour le PVC souple). Elle justifiait cette dérogation par le fait que « l'élimination des déchets en PVC par mise en décharge et par incinération augmente les émissions dans l'environnement et ne réduit pas les risques. Par ailleurs, au vu des prévisions concernant l'évolution de la concentration en plomb du PVC valorisé, ladite concentration diminuerait suffisamment d'ici à 2035-2040 pour que les articles à base de ce matériau soient conformes à la limite de concentration en plomb générale proposée, de 0,1 %. » Par conséquent, la dérogation pour les articles à base de PVC valorisé devrait s'appliquer pendant quinze ans.

Le Parlement européen a toutefois rejeté cette proposition, estimant que le recyclage ne devrait pas justifier l'utilisation continue de substances dangereuses : la protection de la santé humaine et de l'environnement a priorité sur le recyclage.

Selon les informations obtenues par vos rapporteurs lors de la visite de l'entreprise ATE, qui fabrique des tubes en PVC comportant 30 à 35 % de PVC recyclé, le plomb constitue un danger en tant que substance, mais dans le cas des tubes en PVC, il n'y a pas de risque d'exposition pour l'utilisateur. En effet, le PVC recyclé est « nappé » d'une couche de PVC vierge. Ainsi, le plomb contenu dans le PVC recyclé n'est donc pas en contact direct avec les fluides qui circulent dans le tube de PVC recyclé. Les dirigeants de cette entreprise ont estimé que la règlementation européenne, qui fixe des seuils absolus en pourcentage du poids du produit, était inadaptée, et qu'il serait préférable d'examiner, au cas par cas, la notion de risque 212 ( * ) .

La réglementation des substances au niveau européen se durcissant d'année en année, le recyclage des plastiques mis sur le marché il y a plusieurs années est de plus en plus difficile.

(2) La normalisation des matériaux recyclés

La fédération française du bâtiment a souligné que les normes et les spécifications techniques du bâtiment constituaient un obstacle à l'utilisation de plastique issu du recyclage , y compris pour des produits qui, a priori , n'exigent pas des standards de qualité particulièrement élevés. Elle a donné l'exemple des siphons de lavabos qui réglementairement ne peuvent pas contenir plus de 5 % de plastiques recyclés.

De tels obstacles peuvent cependant trouver des solutions. C'est le cas, par exemple, avec le recyclage du PVC des fenêtres à l'usine PAPREC de Cholet dans le Maine-et-Loire : 9 cycles de recyclage du PVC sont effectués en s'appuyant sur une certification spécifique du CSTB 213 ( * ) (3/10 mm de PVC vierge en pelliculage d'un coeur en PVC recyclé).

Les règles liées à l'assurabilité des constructions s'opposeraient également à l'utilisation de matériaux issus du recyclage. En effet, une entreprise ne peut être couverte par l'assurance décennale que si elle utilise des méthodes et des produits courants. Les matériaux incorporant des plastiques recyclés sont considérés comme des matériaux innovants. Si l'entreprise décide d'en utiliser, elle doit alors demander un avis technique dans lequel le produit sera analysé, ce qui non seulement alourdit la procédure, mais la rend plus coûteuse.

(3) Les exigences sanitaires du grade alimentaire

L'aptitude au contact alimentaire nécessite un plastique qui répond à des exigences règlementaires ou normatives garantissant l'absence de risque de toxicité induite au contact des aliments ou des boissons.

Si de nombreux plastiques sont homologués aptes au contact alimentaire, seul le r-PET bénéficie encore de ce grade. En effet, lors du recyclage mécanique, des constituants indésirables apparaissent et doivent être éliminés. Des procédés ont été mis au point pour le PET, mais les autres polymères, comme les polyoléfines, peuvent très difficilement être purifiés, empêchant le retour au grade alimentaire.

De nombreux programmes de recherche visent à développer de nouveaux procédés de recyclage afin d'élargir la gamme des matières premières régénérées en conservant le grade alimentaire. Le recyclage chimique est une voie prometteuse (cf. infra ).

L'extension du grade alimentaire à d'autres résines recyclées (telles que le r-PP, le r-PEHD et le r-PS) constitue un enjeu majeur pour leur ouvrir des marchés très importants en volume.

(4) Le manque de transparence sur la composition des matériaux

Les recycleurs disposent d'informations très partielles sur la composition des matériaux à recycler. En général, seule la résine principale est connue.

Selon Veolia, la réincorporation de plastiques recyclés exige un taux de pureté de production de 99 %. Pour assurer la qualité et l'homogénéité des matières premières régénérées, il est donc indispensable pour les opérateurs de gestion des déchets d'accéder aux informations techniques relatives aux produits mis sur le marché, et notamment à toutes informations sur la présence de substances dangereuses.

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire impose désormais cette obligation aux metteurs en marché. Il conviendra néanmoins de s'assurer que ces derniers ne s'abriteront pas derrière le secret industriel et commercial pour rendre cette disposition inopérante.

c) Les obstacles économiques
(1) L'effondrement du prix des résines vierges provoqué par la chute du prix du pétrole

Les prix des polymère vierges sont déterminés par leurs coûts de production 214 ( * ) . S'agissant de coproduits de la pétrochimie, ces coûts de production suivent donc celui du pétrole.

Le prix du pétrole constitue ainsi la principale composante du prix des polymères vierges 215 ( * ) .

La baisse des prix du pétrole 216 ( * ) entraîne immanquablement celle des prix des polymères vierges . Entre 2018 et début 2020, le polypropylène vierge est ainsi passé de 1 250 à 950 euros la tonne (soit une baisse de 24 %).

(2) Des résines recyclées plus coûteuses à produire que leurs analogues vierges

Le coût de production d'une résine recyclée est régi par la disponibilité et le volume de la résine en fin de vie (utilisée comme matière première) et par les coûts structurels du recyclage : coût de la régénération de la résine en fin de vie ; coût des opérations de tri et de préparation dans l'unité de recyclage ; coût de la collecte de la résine (ramassage des déchets).

Hors période de flambée des prix du pétrole, le coût de production des polymères recyclés est structurellement supérieur à celui des polymères vierges.

(3) Un différentiel de prix défavorable aux polymères régénérés

Les marchés des plastiques recyclés restent de taille réduite en comparaison à ceux des résines vierges.

En dehors du r-PET (qui est un cas particulier), les marchés des polymères recyclés se caractérisent par des volumes réduits en comparaison à ceux des polymères vierges. Dans un tel contexte, les prix des polymères recyclés sont déterminés par leurs alternatives concurrentes, les résines vierges.

En dehors de conjonctures internationales renchérissant significativement le prix du pétrole, le prix d'une résine recyclée est toujours inférieur à celui de la même résine vierge 217 ( * ) .

Les résines recyclées sont négociées à des prix incluant une décote par rapport aux résines vierges. Cette décote traduit la perte de qualité de la résine recyclée et la mauvaise image qu'elle peut véhiculer.

Une telle situation est particulièrement défavorable et constitue un frein important à l'utilisation des résines recyclées par manque de rentabilité. En effet, les prix payés pour la résine recyclée ne couvrent pas ses coûts de production. La situation empire dans un contexte où les prix bas du pétrole font baisser ceux des résines vierges.

Actuellement, seul le recyclage du PET de grade alimentaire est intéressant économiquement. Il a en effet un marché imposé par les obligations d'incorporation décidées par l'Union européenne.

Entre 2014 et 2016, la filière du recyclage des plastiques avait déjà souffert de la chute des prix du pétrole et, par conséquent, de celle des prix des matières vierges.

Face à cette situation, les pouvoirs publics français avaient, en 2016, soutenu financièrement l'intégration, par les plasturgistes ou les transformateurs, de matières plastiques recyclées dans le cadre du dispositif « Objectif Recyclage PLASTiques » (ORPLAST) géré par l'Ademe.

Doté de 15 millions d'euros, ce programme comportait deux volets :

- un soutien à l'approvisionnement en matières plastiques issues du recyclage, sous forme de soutien à la tonne utilisée, pouvant atteindre 200 000 euros par bénéficiaire ;

- des aides aux études et à l'investissement pour adapter les processus de fabrication à l'utilisation de matières plastiques issues du recyclage.

68 programmes avaient été financés, permettant de créer et sauvegarder 800 emplois et d'augmenter de 94 000 tonnes d'ici à 2020 la quantité de plastiques recyclés incorporés par les plasturgistes français (soit 160 euros d'aide publique par tonne supplémentaire incorporée).

Dans le cadre du plan France relance présenté en septembre dernier pour soutenir l'économie à la suite de l'épidémie de la Covid-19, le gouvernement a annoncé des mesures de soutien à l'incorporation de matières plastiques recyclées :

- 16 millions d'euros doivent financer le soutien direct au fonctionnement des plasturgistes et des transformateurs permettant de soutenir la demande en plastiques issus du recyclage, à la suite de la forte chute de la demande et des prix ;

- 140 millions d'euros répartis entre 2021 et 2022 visent à soutenir les investissements dédiés à l'incorporation de matières premières régénérées.

Le gouvernement fixe un objectif d'incorporation de 700 000 tonnes de matières plastiques recyclées supplémentaires à horizon 2022.

(4) L'absence de débouchés pour de nombreuses résines

Comme l'a fait remarquer le syndicat national des régénérateurs de matières premières : « Actuellement, les régénérateurs sont soumis à un double défi : une collecte insuffisante pour le PET clair et le PVC et une demande insuffisante pour les autres résines ».

L'exemple des films plastiques illustre la problématique du manque de débouchés pour certaines résines.

Selon Citeo, les films PE représentent 120 000 tonnes. Seuls 10 % sont recyclés en France, à la fois par manque de capacités de recyclage, mais également par absence de débouchés pour ce produit depuis l'arrêt des exportations vers la Chine. Les prix se sont effondrés, entraînant des répercussions sur toute la filière des films plastiques, en particulier pour le recyclage des films agricoles. En outre, les entreprises de recyclage privilégient les films industriels, moins souillés que les films agricoles. La fermeture en 2017, faute de rentabilité, de l'usine Suez à Viviez en Aveyron, spécialisée dans le recyclage des films agricoles, a conduit à l'enfouissement de 3 000 tonnes de films tandis que 10 000 tonnes de films de paillage étaient stockés en attendant leur valorisation.

En 2019, Adivalor a collecté 44 000 tonnes de films d'ensilage mais 7 000 tonnes ont de nouveau été enfouies faute de débouchés.

3. Des taux de recyclage globalement décevants
a) Des chiffres largement surestimés au niveau européen

En 2018, selon PlasticsEurope, 29,1 millions de tonnes de déchets plastiques tous secteurs confondus ont été collectés dans l'Union européenne. 75,1 % de ces déchets ont été valorisés :

- 32,5 % ont été recyclés ;

- 42,6 % ont été utilisés pour la valorisation énergétique.

24,9 % non valorisés ont été enfouis.

Par ailleurs, le taux de recyclage des emballages plastiques s'élèverait à 42 %.

Comparaison des modes de gestion des déchets plastiques post-consommation en Europe en 2018 218 ( * )

Source : PlasticsEurope.

Dans l'un de ses rapports, la cour des comptes européenne remet en cause la véracité du taux de recyclage des plastiques en Europe. Elle rappelle que la révision de la directive « Emballages » 219 ( * ) a conduit à mettre en place des critères plus rigoureux pour le calcul des taux de recyclage. Les méthodes de calcul sont loin d'être sincères et comparables d'un État membre à l'autre. Avec les nouvelles méthodes de calcul, le taux de recyclage des emballages en plastique devrait être plus conforme à la réalité.

En outre, certains États membres sont fortement tributaires des exportations de déchets plastiques vers des pays tiers pour gérer leurs déchets d'emballages et atteindre leurs objectifs en matière de recyclage. La cour des comptes européenne estime que les transferts à des fins de recyclages en dehors de l'Union européenne contribuent pour un tiers au taux de recyclage des emballages en plastique déclaré pour l'ensemble de l'Union européenne. L'interdiction des exportations des déchets plastiques vers des pays tiers, qui entre en vigueur au 1 er janvier 2021, risque donc de dégrader fortement le taux de recyclage réel des emballages plastiques de l'Union européenne. C'est la raison pour laquelle la cour des comptes européenne estime que l'objectif de 50 % de plastiques recyclés d'ici à 2025 ne pourra pas être tenu.

En conclusion, le taux de recyclage actuel des emballages plastiques en Europe (42 %) s'élèverait plutôt autour de 20 %.

b) Des chiffres médiocres au niveau national

Vos rapporteurs ont rencontré une réelle difficulté pour obtenir des chiffres consolidés sur le recyclage des plastiques. Ils se sont appuyés sur deux sources : les statistiques de PlasticsEurope et les statistiques de l'Ademe. Citeo a également fourni des chiffres sur les emballages plastiques.

Selon PlasticsEurope, en 2018, la France a généré 3,7 millions de tonnes de déchets plastiques tous secteurs confondus.

- 24,2 % ont été recyclés ;

- 43,3 % ont été valorisés énergétiquement ;

- 32,5 % ont été enfouis.

La France est le 3 e pays européen où la demande en matières plastiques est la plus forte, derrière l'Allemagne (25 % de la demande européenne) et l'Italie (14 %). La consommation française de plastique correspond à 10 % de la consommation européenne.

En 2016, selon l'Ademe, la France a produit près de 4,8 millions de tonnes de plastiques et généré 3,4 millions de tonnes de déchets plastiques 220 ( * ) .

Le schéma ci-après illustre la forte déperdition entre le gisement de déchets plastiques issus de la post-consommation et le volume de plastiques effectivement recyclés et produits en France.

Cycle de vie des plastiques en France, 2016

Source : Ademe : bilan nationale du recyclage, 2017.

Le gisement de déchets plastiques (3,4 millions de tonnes) est majoritairement composé de plastiques issus d'emballages (64 %), de déchets plastiques automobiles (5 %), de déchets de construction (4,5 %), de plastiques agricoles (3,6 %) et de DEEE (3,5 %). Les textiles ne sont pas compris dans ces statistiques.

Seules 778 000 tonnes (soit 23 %) ont été collectées pour recyclage 221 ( * ) . 44 % du gisement a fait l'objet d'une revalorisation énergétique et 33 % a été mis en décharge.

Parmi les 778 000 tonnes de déchets plastiques post-consommation collectées, on peut distinguer plusieurs catégories de produits :

- les emballages représentent 74 % des flux post-consommation collectés en vue du recyclage (dont 49 % d'emballages ménagers). Ainsi, près de 576 000 tonnes d'emballages plastiques ont été collectés en vue du recyclage en 2016 en France, soit un taux de 26 % 222 ( * ) . Ce taux n'a gagné que quatre points de pourcentage en dix ans. Parmi les emballages plastiques, la collecte sélective des bouteilles plastiques atteint 58 % en France en 2018, mais cache de fortes disparités territoriales (moins de 10 % à Paris). En revanche, elle ne représente que 4 % pour les pots de yaourt, les barquettes et les films plastiques ;

- les déchets des équipements électriques et électroniques représentent 9 % des flux de déchets plastiques post-consommation collectés, les films et emballages agricoles usagés 7 %, les déchets issus des véhicules hors d'usage 5 % et les déchets issus du BTP 4 %.

Il existe donc une forte déperdition entre le gisement de plastiques post-consommation et les plastiques réellement collectés en vue du recyclage.

Une autre source de déperdition est constatée entre les plastiques collectés en vue du recyclage (1,1 million de tonnes 223 ( * ) ) et les plastiques effectivement envoyés vers le recyclage en France en 2016.

En effet, sur les 1,1 million de tonnes, 484 000 tonnes ont été exportées. 627 000 tonnes auraient été recyclées en France, mais seulement 437 000 tonnes de matières premières régénérées auraient été produites (soit un rendement de 70 %).

Les chiffres du syndicat national des régénérateurs de matières premières sont un peu plus élevés : 517 000 tonnes de matières premières régénérées auraient été fabriquées en France en 2016 (rendement de 82 %).

Ces divergences ne changent rien au constat : moins de 50 % des plastiques collectés en vue du recyclage sont effectivement recyclés.

Selon le syndicat national des régénérateurs de matières premières, 37 % des matières premières recyclées proviennent des emballages, 32 % du secteur de la construction, 13 % du secteur de l'automobile et 18 % d'autres secteurs (agriculture, équipements électriques et électronique, etc.).

En ce qui concerne l'exportation des plastiques français vers l'étranger depuis la fermeture des frontières chinoises, peu d'informations et de chiffres sont disponibles. Cette fermeture a profondément modifié les flux mondiaux de déchets plastiques : la Turquie est devenue l'un des dix plus grands pays importateurs de déchets plastiques, notamment en provenance du Royaume-Uni, de la Belgique et de l'Allemagne 224 ( * ) .

Les scandales d'exportations illégales de déchets vers les pays tiers n'ont pas épargné la France.

Pour rappel, à partir de 2021, les États de l'Union européenne se sont engagés à interdire les exportations de plastiques difficilement recyclages vers les pays tiers.

Il apparaît évident que le manque de compétitivité des plastiques recyclés (en raison de l'effondrement des cours du pétrole), la difficile recyclabilité de nombreux emballages plastiques et le nombre insuffisant d'infrastructures au niveau européen (pour recycler les déchets plastiques) limitent les débouchés pour les plastiques collectés pour le recyclage et conduisent à ce qu'une part non négligeable d'entre eux soit in fine incinérée, mise en décharge ou exportée (sans que cette solution soit tracée dans les bilans matière).

c) Des taux de recyclage très inégaux selon les résines

Le recyclage des déchets plastiques se fait en plusieurs étapes :

- le tri et la préparation : les plastiques usagés sont séparés des autres matériaux, puis triés en fonction des polymères. Différents procédés peuvent être combinés selon les exigences de qualité, depuis le tri manuel jusqu'au tri automatique réalisé dans les centres spécialisés ou chez les régénérateurs ;

- la régénération : la matière recyclée peut prendre différentes formes : poudre (si les déchets sont micronisés), paillettes (si les déchets sont broyés et lavés), granulés (si la matière plastique est extrudée) ;

- l'incorporation de matières plastiques issues du recyclage : les transformateurs, dans le respect de leurs cahiers des charges, incorporent les matières premières régénérées en substitution totale ou partielle aux résines vierges. Cette opération peut nécessiter une adaptation de leurs moyens de production.

Huit résines régénérées sont produites en France : le r-PEBD granulés et le r-PEDB granulés « agri » ; le r-PEHD granulés et le r-PEHD paillettes ; le r-PET granulés et le r-PET paillettes ; le r-PP ; le r-PVC.

Globalement, les plastiques recyclés en France représentent 12,8 % 225 ( * ) des déchets plastiques, mais il varie fortement selon les résines .

D'après les statistiques de PlasticsEurope (cf. illustration ci-après), le taux de résine recyclée produite en France atteint 40,5 % pour le PET, alors qu'il n'est que de 14,5 % pour le PEBD, 13,3 % pour le PEHD, 10 % pour le PS, 7,7 % pour le PP et seulement 3,7 % en moyenne pour les autres plastiques.

Flux des déchets plastiques en France par catégorie de résine en 2015

Source : PlasticsEurope.

Dans le secteur de l'emballage, les résines actuellement recyclables sont le PET, le PE et le PP pour les emballages rigides 226 ( * ) ainsi que le PE pour les emballages souples 227 ( * ) . Les emballages en PVC (barquettes operculées de charcuterie, boîtes pour pâtisserie, etc.) sont sans filière de recyclage.

Au sein d'une même famille, la recyclabilité de la résine est variable selon les aspects et les éléments de l'emballage : étiquettes, dispositifs de fermeture (avec présence de colle ou d'adhésif), couleur.

Ainsi, le PET est recyclé à grande échelle lorsqu'il provient de bouteilles, se heurte à d'importants obstacles techniques lorsqu'il s'agit de barquettes en plastique avec présence d'un opercule, d'adhésifs (pour souder ce dernier au corps de la barquette), d'éventuelles couches barrières.

Dans un autre registre, l'exemple du PET opaque 228 ( * ) est révélateur des difficultés de recyclage. Ce polymère se caractérise par l'incorporation d'une charge opacifiante lors de sa formulation. Cependant, au-delà d'une certaine proportion, cette charge rend impossible le recyclage de la résine en obstruant les outils d'extrusion. Les bouteilles ne peuvent pas jusqu'à présent être recyclées pour faire de nouvelles bouteilles de lait. Il faut donc les « diluer » dans du PET clair pour pouvoir leur offrir un débouché.

Un troisième exemple concerne les bouteilles plastiques avec manchon 229 ( * ) . Elles connaissent une croissance rapide mais sont peu recyclées en Europe car les manchons ne sont pas compatibles avec le recyclage du PET.

Selon Citeo, 50 % des emballages plastiques sont recyclables et disposent de filières efficaces (bouteilles d'eau, flacons de shampoing 230 ( * ) ).

25 % nécessitent la constitution de nouvelles filières et de nouveaux débouchés actuellement en cours (films de packs d'eau, barquettes de jambon ou de viande, boîtes d'oeufs en plastique).

25 % restent sans solution de recyclage et doivent faire l'objet de travaux d'éco-conception en vue de leur transformation ou de leur suppression.

Un dernier exemple, dans le domaine de la construction cette fois-ci, illustre les différences qui existent entre résines

Selon la fédération française du bâtiment, le gisement de déchets plastiques de la filière se situe de 160 000 à 200 000 tonnes par an. Cinq résines sont concernées : le polystyrène expansé (isolant et emballages), le PVC rigide (tubes, raccords, fenêtres, portails), le PVC souple (revêtements de sol), le polyuréthane et le PSE des emballages.

Peu de ces résines disposent de filières opérationnelles.

En ce qui concerne le PSE, il existe des filières de recyclage mais elles sont desservies par le volume et la légèreté des matériaux : la rentabilité économique du recyclage n'est pas au rendez-vous.

En ce qui concerne le polyuréthane, il pourrait être régénéré pour produire des panneaux d'isolation, mais la filière est trop réduite pour être rentable.

En réalité, seul le PVC rigide fait l'objet d'une filière véritablement développée, même si l'évolution de la réglementation européenne sur les substances dangereuses pourrait la menacer (cf. supra ).

Selon l'Ademe, 17 % du gisement de plastiques dans le bâtiment est recyclé.

L'existence d'une filière REP ne garantit pas la recyclabilité des objets, comme l'illustre l'encadré ci-après.

Les difficultés liées au recyclage des chaussures

En France, 275 millions de paires de chaussures sont mises sur le marché chaque année (représentant 119 000 tonnes de cuir, de caoutchouc, de plastiques et de textiles collés ou cousus entre eux). Seuls 12 % (soit 14 000 tonnes) sont déposés dans les points de collecte (85 % des chaussures déposées sont plutôt en « bon état » et pourraient être réutilisées). Les autres sont jetées à la poubelle. Même si elles étaient collectées, il n'existe actuellement aucune solution de valorisation.

Les chaussures sont en effet composées d'en moyenne cinq matériaux différents assemblés entre eux avec des colles ou des coutures qui complexifient leur démantèlement. Une fois démantelés et triés, ces matériaux doivent être préparés (broyés, fondus, purifiés, etc.) pour pouvoir être intégrés dans de nouveaux produits. Tout ceci représente beaucoup d'étapes techniques très coûteuses pour un résultat malheureusement moins compétitif que de la matière vierge. Par ailleurs, les pays asiatiques assurent 90 % de la production de chaussures, posant dès lors la question des débouchés des produits d'une filière de recyclage opérée en Europe.

Source : ReFashion (ex Eco-TLC).

4. La face cachée du recyclage
a) L'externalisation du recyclage vers les pays en voie de développement

Cette question a déjà été abordée à plusieurs reprises dans la première partie du rapport. Faute de capacités de recyclage sur leurs territoires, mais également parce qu'il est souvent plus rentable d'exporter les déchets que de les traiter sur place, les pays développés ont « délégué » une partie non négligeable du recyclage de leurs déchets à des pays tiers, souvent incapables d'en assurer un traitement adéquat.

Le contrôle des exportations de plastiques contaminés ou en mélanges au niveau européen a été durci ; il faudra désormais s'assurer qu'il est respecté. Jusqu'à présent, il existe peu de contrôles des exportations de plastiques vers les pays tiers et leur traçabilité est difficile à établir.

b) Des collectivités territoriales prises dans l'engrenage du recyclage

Le développement de la collecte sélective et du recyclage des déchets a fortement augmenté le coût global de la gestion des déchets .

D'une part, le coût de la gestion des déchets issus de la collecte sélective (442 euros hors taxe par tonne au niveau national 231 ( * ) ) est presque deux fois supérieur à celui de la gestion des ordures ménagères résiduelles (242 euros hors taxe par tonne au niveau national).

D'autre part, le financement des infrastructures de recyclage pèse sur le budget des collectivités territoriales. Il accroît le coût marginal de la collecte et du tri. Selon Pierre Desvaux 232 ( * ) , l'extension des consignes de tri devrait nécessiter 700 millions d'euros à un milliard d'euros pour mettre les centres de tri à niveau 233 ( * ) .

Parallèlement, la chute des prix des matières recyclées tend à diminuer les recettes des collectivités territoriales. Ainsi, pour la métropole de Lyon, le coût net à la tonne a augmenté de 120 % entre 2010 et 2018 tandis que les recettes ont diminué de 30 %.

Ce phénomène tend à s'accentuer avec l'extension de la collecte de tri dans la mesure où la plupart des nouveaux déchets collectés ne font pas encore l'objet de filières de recyclage rentables. Actuellement, les bouteilles en PET clair constituent l'une des principales sources de recettes 234 ( * ) des collectivités territoriales.

La possibilité de mettre en oeuvre un dispositif de consigne des bouteilles en plastique pour en amplifier le recyclage (disposition adoptée par la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire) a encore accru l'inquiétude des collectivités territoriales. L'impact financier est évalué à une perte de recettes de 150 millions d'euros. En outre, la déconnexion des calendriers de l'extension des consignes de tri et de l'instauration de la consigne crée des incertitudes qui pèsent sur les décisions d'investissement des collectivités territoriales.

Dans son rapport 235 ( * ) , la sénatrice Marta de Cidrac, rapporteure du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, soulignait que « d'ores et déjà, la perspective de la mise en oeuvre d'une consigne a conduit très récemment de nombreuses intercommunalités à suspendre les plans d'investissement destinés à moderniser leurs centres de tri (décisions qui avaient été prises dans la perspective de l'extension de la consigne de tri d'ici à 2022). On peut estimer que cette suspension, voire cet abandon d'investissements, s'élèverait à 400 millions d'euros. Ce sont les collectivités les plus performantes en matière de collecte sélective qui seront mécaniquement les plus pénalisées, avec un risque de répercussion sur le contribuable local pour maintenir la qualité du service public de gestion des déchets. »

Comme l'ont fait remarquer plusieurs personnes auditionnées, les collectivités territoriales deviennent des fournisseurs de matières premières pour les entreprises de recyclage. Elles doivent respecter des objectifs quantitatifs et qualitatifs qui les conduisent à des investissements massifs dans un contexte incertain sur les recettes et une hausse de la taxe générale sur les activités polluantes applicable à l'enfouissement et à l'incinération de déchets instaurée par la loi de finances pour 2019.

La pandémie de la Covid-19 exacerbe cet effet de ciseaux : les performances de tri se sont dégradées en raison de la fermeture, durant le premier confinement, de nombreux centres de traitement. Sans l'instauration d'une clause de solidarité par les metteurs en marché et Citeo, les provisions de l'éco-organisme risquent d'augmenter alors même que les coûts de gestion des déchets supportés par les collectivités territoriales vont s'alourdir et que les taux de valorisation restent décevants.

En définitive, sous l'impulsion des gouvernements successifs, les collectivités territoriales ont beaucoup investi dans la voie du recyclage sans que les résultats, financiers notamment, soient à la hauteur des investissements engagés pour une grande partie d'entre elles (en particulier les plus grandes métropoles). Les taux de valorisation tendent à stagner en dépit de l'augmentation du volume de collecte, tandis que les coûts de gestion des déchets augmentent. L'État impose une diminution des capacités de mise en décharge et d'incinération (y compris en cas de valorisation énergétique) alors que les refus de tri et des déchets triés s'accumulent sans débouchés.

Prises dans un engrenage qu'elles ne contrôlent pas, beaucoup de collectivités territoriales surveillent avec impatience l'augmentation des taux de régénération des déchets afin de pouvoir justifier, auprès de leurs concitoyens, l'utilité du geste de tri et les surcoûts liés au recyclage.

c) L'effet verrou du recyclage

De nombreuses organisations environnementales se sont également inquiétées de l'effet verrou du recyclage : une fois engagé dans cette voie, il est difficile de revenir en arrière. Le recyclage nécessite en effet des investissements considérables dans les infrastructures de collecte et de tri, mais également un volume important de déchets à traiter dans l'objectif d'abaisser les coûts marginaux de production et d'assurer la rentabilité du recyclage. Par conséquent, il verrouille les politiques publiques de gestion des déchets sur le long terme, en s'opposant peut-être à d'autres initiatives qui réduisent le volume des déchets plastiques.

d) L'effet rebond du recyclage

Les acteurs du recyclage ont tendance à délivrer un message simple et rassurant, comme en témoigne le slogan d'une des campagnes de sensibilisation de Citeo : « vous triez, nous recyclons ». En réalité, non seulement le tri ne garantit pas le recyclage, mais ce discours peut donner bonne conscience aux consommateurs et encourager des comportements nuisibles pour l'environnement. Comme le faisait remarquer Pierre Desvaux 236 ( * ) : « En tant qu'individu, on s'est débarrassé de beaucoup de contraintes, mais elles existent ailleurs. Les opérations de recyclage sont invisibles et les consommateurs ont l'impression d'être passés dans une économie du recyclage. En réalité, très peu d'objets sont recyclables alors que les opérations sont très complexes et chères. »

e) Un simple amortisseur temporel dans les conditions actuelles

Si le recyclage est un élément déterminant pour maîtriser l'épuisement des ressources naturelles non renouvelables, il semble parfois davantage perçu comme une solution de résorption des déchets.

Pour autant, le recyclage n'élimine pas les déchets, il les transforme afin qu'ils puissent, à nouveau, servir de matière première. Dans le cas particulier des plastiques, cette cyclicité n'est pas infinie (en raison de la dégradation de la qualité des polymères). In fine , après un délai plus ou moins long, l'arrivée de déchets ultimes ne peut pas être évitée . Le recyclage est donc un amortisseur temporel notamment conditionné par la durée de vie des objets, le nombre de cycles et la quantité réincorporée dans l'économie de production.

Cette notion de décalage temporel de la transformation des plastiques en déchets ultimes est illustrée par la comparaison de trois scénarios :

- un premier scénario sans recyclage (scénario 1) dans lequel les objets en fin de vie deviennent directement des déchets ultimes ;

- un deuxième scénario avec recyclage (scénario 2) dans lequel l'incorporation des plastiques recyclés se surajoute à la production de plastiques vierges avant de devenir des déchets ultimes lorsque le recyclage n'est plus qualitativement possible ;

- un troisième scénario avec recyclage (scénario 3) dans lequel l'incorporation des plastiques recyclés module la production de plastiques vierges avant de devenir des déchets ultimes lorsque le recyclage n'est plus qualitativement possible.

Définition des trois scénarios de recyclage

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les scénarios reposent sur la prise en compte :

- du taux de croissance de la production de plastique vierge ;

- de la durée de vie des objets en plastique ;

- du taux de recyclage du plastique ;

- du nombre de cycles.

La comparaison des résultats des trois scénarios renseigne (1) sur l'efficacité du recyclage en termes de quantité de déchets ultimes générés et (2) sur la durée d'exploitation des ressources naturelles pour obtenir la même quantité de déchets ultimes.

Afin de rendre la comparaison des trois scénarios la plus concrète possible, quatre cas 237 ( * ) sont distingués (correspondant chacun à un type de plastique) :

- le cas n° 1 dans lequel la durée d'usage du plastique est d'un an, le taux de recyclage de 29 %, le plastique ne peut être recyclé qu'une seule fois et la production croît annuellement de 2 % (les plastiques visés dans ce scénario sont les 81 % des plastiques dont la durée d'usage est inférieure à un an) ;

- le cas n° 2 dans lequel la durée d'usage du plastique est de cinq ans, le taux de recyclage de 50 %, le plastique peut être recyclé deux fois et la production croît annuellement de 2 % (les plastiques visés dans ce scénario sont les plastiques des équipements électroniques et électroménagers) ;

- le cas n° 3 dans lequel la durée d'usage des plastiques est de quinze ans, le taux de recyclage de 50 %, le plastique peut être recyclé quatre fois et la production croît annuellement de 2 % (les plastiques visés sont les plastiques du bâtiment tels que ceux des fenêtres en PVC par exemple) ;

- le cas n° 4 dans lequel la durée d'usage du plastique est de trois ans, le taux de recyclage de 80 %, le plastique peut être recyclé jusqu'à cinq fois et la production croît annuellement de 1 % (le plastique visé est un plastique « idéal » du point de vue de sa durée d'usage, de son taux de recyclage, du nombre de cycles et de sa production maîtrisée).

Comparaison des trois scénarios pour quatre types de plastiques

Unités de déchets plastiques ultimes produites en 50 ans

Décalage temporel pour produire 10 000 unités de déchets plastiques ultimes

Scénario 1

Scénario 2

Scénario 3

Scénario 1

Scénario 2

Scénario 3

Cas n°1

8 200

6 500
(- 21 %)

Référence

+ 8 ans

Cas n°2

7 200

5 100
(- 29 %)

Référence

+ 13 ans

Cas n°3

5 000

3 800
(- 24 %)

2 800
(- 44 %)

Référence

+ 9 ans

+ 19 ans

Cas n°4

6 000

4 900
(- 18 %)

3 200
(- 47 %)

Référence

+ 7 ans

+ 28 ans

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

La comparaison des trois scénarios, déclinés en quatre cas, met en lumière le poids des différentes variables sur l'effet inertiel d'un recyclage qui génère, dans des périodes plus ou moins longues, une quantité de déchets ultimes qui ne peut être évitée.

En 50 ans, la quantité de déchets ultimes est réduite de 29 % pour un temps d'immobilisation de 10 ans (scénario 3, cas n° 2) et de 44 % pour un temps d'immobilisation de 60 ans (scénario 3, cas n° 3). La durée d'immobilisation est de nature à différencier sensiblement les résultats des scénarios 1 et 2 : la quantité de déchets ultimes produits en 50 ans est réduite de 24 % pour le cas n° 3 alors qu'elle est identique au scénario 1 pour le cas n° 2.

Le cas n° 4 cherche à optimiser les variables, tout en visant un réalisme économique et technologique. Pour une durée d'immobilisation de 15 ans, un recyclage de 80 % et une croissance annuelle de 1 % de la production de plastique vierge, le recyclage produit des effets significatifs en termes d'effet retard des déchets ultimes générés. En effet, les scénarios 2 et 3 réduisent la quantité de déchets ultimes par rapport au scénario 1 respectivement de 18 % et 47 %.

Le recyclage étant par définition le moyen pour éviter l'épuisement des ressources non renouvelables, il convient également d'examiner les trois scénarios sous l'angle du « temps gagné » pour produire la même quantité de déchets ultimes 238 ( * ) (qui impacte le temps de prélèvement des ressources économisé).

S'agissant des plastiques pétro-sourcés, les valeurs de temps gagné doivent être rapprochées des durées d'exploitation avant épuisement des stocks de pétrole et de gaz.

Le scénario 2 permet de gagner moins de 10 ans pour les cas n° 3 et n° 4 (effet du temps d'immobilisation). Le gain du scénario 3 peut atteindre jusqu'à 28 ans dans le cas n° 4 (double effet de la durée d'immobilisation et de la modulation de la production -croissance moindre et ajustement à l'apport de plastique recyclé-). Le scénario 3 est le seul à permettre, quel que soit le cas qui lui est associé, un allongement systématique de la période au bout de laquelle la même quantité de déchets ultimes est produite. Cette durée est d'autant plus longue que le temps d'immobilisation est important, que le taux de recyclage est fort et que la production de plastique vierge est maîtrisée.

5. Les leviers de l'amélioration du taux de recyclage

Alors que le taux de recyclage des emballages plastiques atteint aujourd'hui à peine 29 % en 2019, il apparaît indispensable, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, de renforcer l'efficacité du recyclage afin qu'il puisse contribuer à une moindre utilisation des ressources. Deux solutions se présentent : augmenter le taux de collecte des déchets plastiques pour recyclage ; améliorer leur recyclabilité et leur incorporation.

a) L'augmentation du taux de collecte des déchets plastiques

Selon Citeo, la performance relativement médiocre de la France par rapport à la moyenne européenne s'explique par le fait qu'elle s'est longtemps concentrée sur la collecte séparée des bouteilles et flacons. À l'époque, l'objectif était de créer une filière pérenne pour les résines parfaitement recyclables, à savoir le PET et le PEHD.

• L'extension des consignes de tri

Toutefois, la forte augmentation des déchets plastiques, notamment en raison de l'explosion de la consommation d'emballages à usage unique, a conduit à étendre les consignes de tri à tous les emballages . Cette initiative , qui facilite le geste de tri, a été lancée en 2015 239 ( * ) et devrait être généralisée à l'ensemble du territoire , d'ici à 2022. En 2019, 25 millions de Français sont déjà concernés. Selon Citeo, les résultats obtenus jusqu'à présent montrent une progression de la collecte des emballages plastiques de 2 kg par an et par habitant (et de 2 kg pour les autres types d'emballages par effet d'entraînement).

Lors de l'audition des responsables de la gestion des déchets à la ville de Paris, ces derniers ont fait remarquer que le passage au 1 er janvier 2019 à l'extension de la consigne de tri s'était traduit par une augmentation des quantités dans les bacs jaunes de 10 % sur tous les flux et une diminution des ordures ménagères résiduelles quatre fois plus importante que l'augmentation du flux dans les bacs jaunes.

L'extension des consignes de tri a pour objectif non seulement l'augmentation du taux de collecte, mais également celle du taux de déchets recyclés. Elle devrait aider à rentabiliser certaines filières atones et faciliter le recyclage de matières problématiques à travers leur dilution dans les flux à la technologie mature (au prix, néanmoins, d'un risque de perte de la qualité de la matière recyclée).

L'analyse de la composition des ordures ménagères résiduelles témoigne de la marge de progression importante dont dispose la France en matière de collecte des déchets plastiques : en 2017, l'ensemble plastiques/verre/métaux constituait 23,4 % des déchets 240 ( * ) .

Selon PlasticsEurope, 67 % des plastiques collectés dans les bacs de tri sélectif (poubelle jaune) sont recyclés et seulement 10 % sont mis en décharge. En revanche, 4 % des plastiques présents dans la poubelle des ordures ménagères résiduelles sont recyclés et 43 % sont mis en décharge.

Lors de leur audition, les responsables de la gestion des déchets du Grand Lyon ont constaté qu'avec 46 kg, les plastiques constituaient en 2019 21,1 % des ordures ménagères résiduelles. Selon leur estimation, l'extension de la consigne de tri qui a été mise en place au 1 er janvier 2020 devrait permettre d'en collecter 42 kg.

• La tarification incitative

La tarification incitative 241 ( * ) a également pour objectif d'augmenter le taux de collecte sélective de déchets plastiques. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte prévoyait une généralisation de la tarification incitative, avec pour objectif que 15 millions d'habitants soient couverts par cette dernière en 2020 et 25 millions en 2025.

Au 1 er janvier 2019, 192 collectivités appliquent des règles de tarification incitative pour 5,6 millions d'habitants desservis. En incluant les collectivités engagées dans sa mise en oeuvre, 8,1 millions d'habitants sont ou seront bientôt concernés par la tarification incitative.

Selon l'Ademe 242 ( * ) , sur le périmètre des collectivités qui l'ont mise en oeuvre, les effets de la tarification incitative ont été sensibles, avec, selon les cas, une diminution de 20 % à 70 % des tonnages d'ordures ménagères résiduelles collectés et l'augmentation des tonnages collectés dans les flux séparés, dont celui des emballages en plastique.

L'Union européenne a fixé des objectifs de taux de collecte ambitieux pour les bouteilles de boisson en plastique : 77 % en 2025 et 90 % en 2030. La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a prévu, si l'extension des consignes de tri ne permet d'atteindre ses objectifs, la mise en place d'un système de consigne pour recyclage. L'Ademe doit réaliser en 2023 un bilan de la collecte et du recyclage des bouteilles en plastique. En attendant, Citeo a déjà déployé 420 automates de collecte des bouteilles en plastique, qui gratifient le geste de tri via un bon d'achat de 1 ou 2 centimes d'euros par bouteille triée.

L'amélioration de la collecte des déchets plastiques hors foyers constitue également un enjeu central , notamment dans les grandes métropoles. S'ils ne représentent que 10 % du volume des déchets ménagers, ils sont souvent recyclables (bouteilles, cannettes, etc.). C'est la raison pour laquelle de nombreuses villes s'engagent dans l'équipement de points de tri plus nombreux, plus visibles et avec des capacités de stockage renforcées à la fois dans les rues, mais également dans les parcs et les jardins. Ces équipements peuvent également servir aux habitants qui ne disposent pas de bacs de collecte dans leurs immeubles.

Ainsi, à Paris, 15 % des immeubles n'ont pas de bac jaune et 30 % n'ont pas de bac blanc pour le verre. Seulement 20 % de ces flux sont collectés séparément, négligeant l'important gisement des emballages recyclables qui restent jetés dans les ordures ménagères. Une cinquantaine de stations trilib 243 ( * ) ont été mises en place en 2020 pour remédier à ce problème. Un millier de bacs devraient être installés d'ici à 2021.

En outre, 30 000 corbeilles de rue parisiennes devraient être équipées d'un biflux.

• L'alourdissement de la taxe générale sur les activités polluantes pour la mise en décharge et l'incinération

L'amélioration du taux de collecte passe également par une dissuasion plus forte de la mise en décharge et de l'incinération des plastiques.

Comme il a été rappelé précédemment, l'Union européenne prévoit que d'ici à 2035, 65 % des déchets municipaux doivent être recyclés et que seuls 10 % des déchets municipaux en poids pourront être mis en décharge. Avec un taux de mise en décharge des plastiques de 32,5 % en 2018, la France est encore loin d'atteindre ces objectifs.

C'est la raison pour laquelle la loi de finances pour 2019 a modifié les tarifs de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Les nouvelles trajectoires d'évolution des tarifs, prévues jusqu'en 2025, conduisent à un alourdissement des taux de la TGAP à partir de 2021 pour le stockage et le traitement thermique des déchets qui passeront de 48 euros à 65 euros la tonne pour le stockage des déchets non dangereux et d'environ 15 euros à 25 euros la tonne pour le traitement thermique des déchets.

• La création de nouvelles REP

Enfin, la création d'une filière REP pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment à partir du 1 er janvier 2022 et l'extension de la filière REP aux emballages industriels et commerciaux à compter du 1 er janvier 2025 (qui représentent 45 % des emballages) devraient participer à l'augmentation générale du taux de collecte des déchets plastiques.

b) L'amélioration de la recyclabilité des déchets
(1) Le renforcement de l'éco-conception

L'amélioration de la collecte a peu d'intérêt si les déchets ne peuvent pas ensuite être recyclés. La conception des produits est une étape essentielle pour permettre aux entreprises de s'assurer qu'ils pourront être acceptés dans une filière de recyclage.

Les éco-organismes sont fortement impliqués dans l'accompagnement des metteurs en marché en matière d'éco-conception (cf. supra ).

Lors de leur audition, les responsables de Citeo ont présenté trois axes de travail :

• Pour les emballages rigides :

- privilégier les emballages mono-matériau ou mono-résine, uniformiser les polymères utilisés et les formulations associées ;

- améliorer la séparabilité des constituants d'emballage (opercule/barquette).

• Pour les emballages souples :

- faire en sorte que les différents constituants puissent être recyclés sous forme d'un matériau mélange unique ou développer des techniques de recyclage permettant de séparer les couches.

• Pour tous les plastiques :

- utiliser des matériaux faisant déjà l'objet d'une filière de recyclage. Pour les plastiques rigides 244 ( * ) , il s'agit du PET, du PE et du PP. Pour les plastiques souples, il s'agit du PE 245 ( * ) ;

- s'assurer que les éléments constitutifs de l'emballage ne perturbent pas son recyclage (colles, encres, additifs, éléments associés tels que les opercules). La dématérialisation de l'information sur le produit permet également de limiter l'usage d'éléments constitutifs de l'emballage.

Renforcer l'éco-conception pour améliorer le recyclage :
les initiatives du secteur de la chaussure

* Éco-conception au niveau des matériaux

- Réduire le nombre de matières qui constituent la chaussure grâce à de nouveaux procédés de fabrication (exemple ME:sh de Salomon) ou n'utiliser qu'une seule matière (exemple Méduse en PVC, Futurecraft loop d'Adidas en TPU) ;

- Sélectionner des matières ayant un impact environnemental réduit : matières biosourcées (exemple CWL de Veja ; Cotton et Corn de Reebok), matières compostables (exemple OAT shoes), matières recyclées (exemple Authentic Material) ainsi que des matières recyclables ;

- Privilégier les cuirs tannés sans chrome (avec des végétaux) ;

- Soutenir la mise en place d'une caractérisation détaillée des matières (pictogrammes internationaux) pour garantir la traçabilité et la reconnaissance des matières lors du tri.

* Éco-conception au niveau des techniques de fabrication et d'assemblage

- Généraliser l'utilisation de logiciels de conception des prototypes permettant de réduire les déchets : impression 3D et injection de polymère dans un moule fini tridimensionnel (exemple 3D Bonding de Simplicity Works) ;

- Déployer les méthodes de « conception en vue du désassemblage » pour faciliter la séparation des composants en fin de vie, effectuée par le consommateur (exemple Comake Shoes) ou la marque ;

- Assembler la tige et la semelle sans colle ni couture (exemples : Loper de Proef designs ; ACBC Shooz) ;

- Utiliser des fils de couture qui se dissolvent à la chaleur (exemple Resortecs) ou aux ondes électromagnétiques (exemple wear2) ;

- Développer des colles qui facilitent la séparation de la tige et de la semelle ;

- Fabriquer la semelle et/ou la tige des chaussures en impression 3D (exemple Feetz) ;

- Concevoir des modèles aux semelles réparables et/ou remplaçables ;

- Industrialiser la technologie RFID pour identifier les composants lors du tri des chaussures en fin de vie.

Adidas a développé une paire de basket 100 % recyclable et recyclée en polyuréthane thermoplastique. Elle peut être entièrement déchiquetée puis fondue en granulés qui serviront à la production de nouvelles baskets de course.

Source : Eco-TLC.

L'éco-conception intègre également le sujet des additifs en évitant la mise sur le marché de polymères qui ne pourraient pas être recyclés.

Une démarche d'éco-conception s'inscrit dans une approche globale qui intègre l'ensemble des partenaires de la chaîne de valeur d'un produit. Le dialogue et la rencontre entre les acteurs (producteur de plastique, metteur en marché du bien de consommation, consommateur et gestionnaire des déchets) facilitent la définition d'un produit qui conjugue fonctionnalité et recyclabilité.

Cette conception des produits qui les considèrent comme des ressources en fin de vie mérite d'être davantage développée, notamment en généralisant son concept dans le cadre des formations des techniciens et des élèves ingénieurs.

(2) Le recyclage des multicouches

Plusieurs projets de recherche visent à assurer la recyclabilité des produits multicouches.

Le projet européen H2020 Terminus vise à développer un emballage multicouche « intelligent » doté d'une fonction intrinsèque d'auto-délamination des couches. L'innovation principale du projet consiste à inclure des enzymes 246 ( * ) à activité contrôlée et stimulable dans les adhésifs et les interphases entre les différentes couches de polymère composant le matériau d'emballage.

Après utilisation de l'emballage, la dégradation enzymatique de l'adhésif et de la couche de liaison est déclenchée par le biais d'une stimulation qui libère l'enzyme de sa molécule-cage (stimulation par solution aqueuse, UV, etc.). La délamination permise par l'activité enzymatique permet de récupérer, de recycler et de réutiliser les matériaux monocouches.

Terminus s'appuie sur une équipe multidisciplinaire d'institutions de huit pays européens. Il couvre 90 % des multicouches et s'est fixé comme objectif de réduire de 80 % la mise en décharge des multicouches.

La société Henckel et sa start-up Saperatec visent également à assurer la recyclabilité des contenants longue conservation (jus de fruit, lait, soupes, etc.) composés de carton, de polyéthylène et d'aluminium.

Elles ont développé une technologie permettant de séparer ces trois matériaux sans les altérer. Les couches sont ensuite triées et peuvent être introduites dans des processus de recyclage.

En dépit des progrès faits pour améliorer l'éco-conception des plastiques et leur recyclabilité, le recyclage mécanique se heurte à des limites techniques, liés à la complexité des flux de plastiques à recycler et à la dégradation de la matière. En outre, de nombreux plastiques ne peuvent être régénérés par la voie du recyclage mécanique (thermodurcissables, composites, plastiques comportant des substances chimiques dangereuses, etc.). Ils représentent cependant plus de 25 % des plastiques. Le recyclage chimique a vocation à lever ces blocages.

6. Les perspectives ouvertes par le recyclage chimique

Le recyclage chimique est un processus qui permet de dépolymériser les résines pour les transformer en molécules plus courtes. L'objectif est de revenir aux molécules d'origine, les monomères, et ainsi d'obtenir une matière purifiée, disponible pour polymériser de nouvelles matières plastiques. Le recyclage chimique produit un polymère recyclé identique au polymère vierge utilisable sans contrainte dans les applications les plus exigeantes, comme celles des emballages alimentaires.

Le recyclage chimique a l'avantage de séparer 247 ( * ) les polymères des additifs avec lesquels ils sont liés pour formuler les plastiques. Il offre donc un double avantage comparativement au recyclage mécanique : il n'est pas limité en nombre de cycles (absence de dégradation de la matière) et empêche les additifs de polluer le recyclage (séparation des monomères et des autres produits chimiques).

Le recyclage chimique apparaît comme une solution à ces limites technologiques et à l'atteinte des objectifs précédemment cités.

a) Une variété de procédés de recyclage chimique

Les projets de recyclage chimique reposent sur trois types de technologie :

- la dépolymérisation : elle repose sur la rupture des liaisons chimiques des polymères qui reviennent à l'état de monomère (grâce à l'utilisation d'alcool, comme le méthanol ou le glycol, voire d'enzymes) ;

- la dissolution : elle consiste à dissoudre une matière plastique dans un solvant spécifique puis à filtrer le mélange et le « nettoyer » pour obtenir une matière purifiée ;

- les solutions thermiques comme la pyrolyse et la gazéification : elles visent à traiter les plastiques par la chaleur pour les transformer en composés chimiques de base utilisés dans la plasturgie.

En France, plusieurs projets de recyclage chimique ont été lancés.

* Le recyclage des emballages en plastique PET

Porté par le groupe SOPREMA, ce projet vise à recycler par pyrolyse tous les emballages en plastique PET (essentiellement les barquettes). Dans un premier temps les emballages sont transformés en paillettes qui sont ensuite nettoyées. Ensuite, les paillettes passent par un procédé qui va dépolymériser le plastique sous l'action du glycol (pour revenir au polymère d'origine. Ce dernier peut être repolymérisé et transformé en polyols, une nouvelle matière, principale composante des mousses isolantes en polyuréthane pour le bâtiment. En 2019, le groupe SOPREMA s'était fixé comme objectif une capacité de valorisation de 3 000 tonnes d'emballages PET complexes générant 5 500 tonnes de polyols, puis, à terme, une valorisation de 10 000 tonnes par an. Actuellement, 50 % du polyol vierge peut être remplacé par du polyol recyclé.

* Le recyclage de composites PVC par dissolution

Porté par la société Polyloop, le processus de recyclage débute par le broyage des déchets plastiques. Un solvant en boucle fermée est utilisé pour dissoudre les constituants du composite. Les produits insolubles sont séparés par filtration primaire et les contaminants par une filtration secondaire. Le PVC en solution est précipité. Le PVC humide est séché en granulés prêts à l'emploi. L'objectif de Polyloop est de commercialiser des unités de recyclage directement disponibles sur les sites des industriels qui pourront recycler leurs déchets et réutiliser leur propre matière recyclée dans leur production.

* La dépolymérisation enzymatique des déchets en PET

La société Carbios a sélectionné une enzyme qui permet de dépolymériser le PET pour revenir aux monomères initiaux (acide téréphtalique et éthylène glycol), puis de recréer du PET par repolymérisation. L'enzyme est insensible aux additifs ou aux polymères complexes. Tout ce qui n'est pas polymère est considéré comme un déchet qui doit ensuite être géré comme tel. Les déchets textiles pourraient également servir de matières premières à ce PET recyclé. La réaction enzymatique se fait à 60 degrés. Pour être rentable, une unité de production doit recycler 400 000 tonnes de PET. La problématique de la collecte des déchets en PET est donc cruciale. Afin d'industrialiser sa technologie de recyclage, Carbios a fondé un consortium avec l'Oréal, Nestlé Waters, PepsiCo et Suntory Beverage and Food.

* Le recyclage du polystyrène

Le groupe Total a récemment inauguré une unité de recyclage au sein de son pôle Polymères sur le site de Carling en Moselle. 110 tonnes d'emballages en PS ont été recyclées en 2018 et servent à la fabrication de produits d'isolation. L'objectif est d'augmenter progressivement la production de matière recyclée et de tester son aptitude au contact alimentaire afin de développer le recyclage d'emballages en circuit fermé (permettant, par exemple de produire des barquettes à partir de barquettes).

La rentabilité de l'unité de production nécessite le traitement de 50 000 tonnes de polystyrène par an.

* Le recyclage des déchets à base de PET colorés

Le projet GLYPET d'IFP Énergies nouvelles vise à recycler les déchets à base de PET colorés. Les paillettes issues des bouteilles seront récupérées, dépolymérisées, isolées pour éliminer tous les colorants, puis repolymérisées pour obtenir une nouvelle résine de PET. Le seuil de rentabilité du process industrie est de 30 000 tonnes recyclées par an. Un démonstrateur pilote de 2 000 tonnes par an est en cours de construction avec une société japonaise.

Lors de leur audition, les représentants de la société BASF ont également présenté un projet de recyclage par pyrolyse des déchets plastiques. L'idée est d'obtenir une huile substituable au naphta 248 ( * ) permettant de synthétiser de nouveaux polymères tandis que les autres matières, qui ne peuvent pas être transformées en huile par la pyrolyse, seront incinérées avec production de vapeur et d'électricité. Compte tenu des volumes limités, au lancement du projet, il est prévu que l'huile de pyrolyse puisse être mélangée avec le naphta. Toutefois, afin de distinguer la part de polymères issu du recyclage de ceux fabriqués à partir du naphta, la société BASF entend développer un système de « mass balance » permettant de calculer la proportion de polymères issue de la pyrolyse. Ce système est une réponse adaptée à l'absence de traçabilité des produits recyclés qui sont mélangés à des produits « vierges ».

À la fin de l'année 2019, la Direction générale des entreprises du ministère de l'économie a lancé un appel à manifestation d'intérêt pour des projets de recyclage chimique ou biotechnologique des plastiques.

b) Les obstacles à l'industrialisation du recyclage chimique

S'il existe donc de nombreuses solutions de recyclage chimique, à différents stades de maturité et de développement, aucun des projets évoqués précédemment n'est en phase d'industrialisation.

Les obstacles sont doubles. Non seulement les investissements financiers sont très importants, mais la rentabilité des projets exige un volume significatif de déchets plastiques (de plusieurs dizaines de milliers à plusieurs centaines de milliers de tonnes par an). La rentabilité des unités industrielles ne pourra être obtenue qu'au niveau européen. Or, la filière européenne du recyclage reste insuffisamment structurée pour pouvoir satisfaire de telles demandes. La situation est d'autant plus complexe que ces demandes de massification portent sur des résines particulières puisque les processus de recyclage chimique varient en fonction des polymères.

Pour autant, des solutions existent pour contourner les obstacles, comme le montre l'exemple de la société Loop Industrie qui produit, de manière industrielle, du PET par dépolymérisation de déchets en PET (bouteilles d'eau, bouteilles de soda, emballages de consommation, etc.) et de fibres de polyester (tapis, textiles de polyester et déchets industriels, etc.). Coca-Cola, Unilever, PepsiCo, L'Occitane et Danone ont passé des contrats avec cette entreprise pour augmenter la part de PET recyclé dans leurs emballages.

c) Une balance bénéfices/inconvénients à examiner

Le recyclage chimique soulève néanmoins de nombreuses interrogations.

D'un côté, il permet d'obtenir une matière recyclée ayant les mêmes qualités que la matière vierge, satisfaisant ainsi les objectifs de l'économie circulaire (visant à augmenter l'efficience des ressources naturelles non renouvelables) sans sacrifier le développement économique. Un tel bénéfice a séduit de nombreuses multinationales utilisatrices ou productrices de plastique, suscitant d'importants investissements dans le secteur.

D'un autre côté, c'est une technologie extrêmement coûteuse. À ce titre, elle n'a pas vocation à se substituer au recyclage mécanique, mais à le compléter. En revanche, la lourdeur des investissements qu'elle nécessite crée un effet verrou encore plus grand que pour le recyclage mécanique (cf. supra ).

D'autres aspects du recyclage chimique interrogent cependant. Ainsi, ces technologies sont énergivores et concentrent les additifs associés aux polymères dans des effluents toxiques. La question de l'impact environnemental global du recyclage chimique est une réalité.

Les organisations environnementales sont plutôt réservées à l'idée du développement du recyclage chimique.

Certaines s'inquiètent qu'il incite les industriels à ne pas investir dans l'éco-conception. D'autres estiment que l'utilisation du recyclage chimique devrait être réservée pour les plastiques souillés.

Enfin, toutes ont insisté sur l'effet de rebond que fait courir le recyclage chimique . Non seulement il permet aux grandes entreprises de la pétrochimie de « verdir » leur image, mais il donne l'impression que la gestion des plastiques en fin de vie serait désormais maîtrisée, organisée et contrôlée (libérant ainsi le consommateur de sa charge de réduction des déchets plastiques). Il convient toujours de rappeler qu'aujourd'hui seuls 9 % des plastiques sont recyclés au niveau mondial.

Il apparaît donc que, quelle que soit l'amélioration des performances du recyclage procurée par le recyclage chimique, ce dernier ne constitue qu'une des technologies à mettre en oeuvre pour lutter contre la pollution plastique.

B. DES MESURES DE RÉDUCTION À LA SOURCE TROP TIMIDES

Devant l'explosion de la consommation des plastiques et à ses conséquences néfastes pour l'environnement et la santé humaine, les mesures curatives ne suffisent plus. Plusieurs intervenants ont utilisé la métaphore de la fuite d'eau afin de décrire les solutions les plus efficaces pour endiguer la « fuite » des plastiques dans l'environnement : « en cas de fuite d'eau, on coupe d'abord l'eau avant de commencer à l'éponger, sans cela éponger ne sert à rien ! ». Cette logique s'applique à la lutte contre la pollution plastique. Il faut envisager une réduction à la source pour se prémunir contre les effets négatifs des plastiques, pour l'environnement et pour la santé humaine.

Il faut donc réduire la production d'articles en plastique afin d'éviter à avoir gérer leur fin de vie ; en particulier pour les plastiques à usage unique, de durée de vie courte et dont il est possible de se passer.

1. Le levier des interdictions règlementaires

De nombreuses mesures ont été prises ces dernières années afin d'interdire certains plastiques.

a) Des interdictions au niveau européen et national

Les mesures adoptées par l'Union européenne et la France ont déjà été abordées dans la partie V du rapport. Les interdictions en France portent sur trois catégories :

1) Les plastiques à usage unique

Jusqu'à très récemment, seuls les sacs plastiques ainsi que les emballages et sacs oxo-dégradables étaient concernés.

Depuis le 1 er janvier 2020, la liste des interdictions est étendue aux cotons-tiges, aux assiettes en plastique jetables, aux gobelets vides en plastique, aux verres en plastique, aux bouteilles d'eau plate en plastique servies dans le cadre de la restauration collective.

À partir de 2021 seront interdits les assiettes jetables (y compris les assiettes en carton avec un film plastique), les pailles, les bâtonnets mélangeurs, les couverts en plastique, les couvercles à verre en plastique, les piques à steak, les confettis en plastique, les récipients, les gobelets et bouteilles en PSE et les tiges en plastique pour ballons. L'interdiction de ces articles est maintenue s'ils sont en plastiques biosourcés compostables. En outre, la distribution gratuite de bouteilles en plastique dans les établissements recevant du public et dans les locaux à usage professionnel est interdite.

À compter de 2022, l'interdiction visera les sachets de thé en plastique, les jouets en plastique distribués gratuitement dans le cadre d'un menu destiné aux enfants, les emballages de presse en plastique, les récipients, gobelets, et couverts en plastique utilisés pour la restauration sur place, les emballages en plastique pour conditionner les fruits et légumes et les étiquettes apposées sur ces derniers.

Enfin, en 2025 seront interdits les contenants alimentaires en plastique pour la restauration collective.

2) Les microplastiques

Ils ne font l'objet d'aucune interdiction au niveau de l'Union européenne. En revanche, la France a interdit les microplastiques dans les produits rincés à usage d'exfoliation ou de nettoyage depuis 2018. En outre, l'utilisation de microplastiques intentionnellement ajoutés sera interdite :

• à partir de 2024 dans les dispositifs médicaux ;

• à partir de 2026 dans les produits cosmétiques qui échappaient à l'interdiction de 2018 (cf. supra ) ;

• à compter de 2027 dans les produits détergents, les produits d'entretien et les autres produits visés par la proposition de restriction du 22 août 2019 de l'Agence européenne des produits chimiques.

3) Les substances dangereuses

Plusieurs cadres ciblent l'interdiction des substances dangereuses.

La convention de Stockholm établit la liste des polluants organiques persistants à interdire.

Le règlement REACH soumet les substances chimiques les plus préoccupantes 249 ( * ) à une procédure d'autorisation afin de se doter des moyens de leur contrôle. Dès lors qu'une substance est incluse à l'annexe XIV, elle ne peut plus être fabriquée, importée ou utilisée sans autorisation de la Commission européenne. Les substances considérées comme faisant courir un risque inacceptable pour la santé humaine et l'environnement sont inscrites à l'annexe XII qui limite, voire interdit leur fabrication, leur mise sur le marché et leur utilisation.

b) Des interdictions à poursuivre

• Une interdiction encore perfectible pour les sacs de caisse

Depuis janvier 2017, les sacs de caisses de plus de 50 microns sont interdits, à moins d'être composés d'au moins 50 % de plastiques biosourcés et compostables domestiquement. Pourtant, de nombreux sacs plastiques jetables sont encore mis à disposition dans des petits commerces ou sur les marchés. Certains de ces sacs sont conçus pour que leur épaisseur soit supérieure à la limite d'épaisseur de 50 microns (ce qui leur permet d'être considérés réglementairement comme « réutilisables »). Les autres sacs sont distribués illégalement par les commerçants.

L'interdiction est aujourd'hui contre-productive puisqu'elle est contournée en augmentant l'épaisseur des sacs et, in fine , en produisant davantage de plastique et davantage de déchets.

• Le poids des lobbies

La directive européenne du 5 juin 2019, relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique, a marqué les esprits :

• elle été votée dans des délais particulièrement courts pour un texte européen (treize mois se sont écoulés entre le moment où elle a été proposée et son vote) ;

• elle définit une liste d'articles à usage unique à proscrire au 3 juillet 2021, soit deux ans à peine après sa promulgation ;

• elle précise que cette liste a vocation à évoluer en fonction des résultats des prochaines campagnes de surveillance des déchets plastiques sur les plages.

Pour autant, cette prouesse ne doit pas cacher la pression des lobbies à laquelle est soumis tout projet européen visant à interdire un article en plastique ou une substance chimique. Cette pression ralentit la prise de décision et édulcore les ambitions initiales.

Ainsi, selon les informations obtenues par vos rapporteurs, la proposition portée par l'Agence européenne des produits chimiques en août 2019 (proposition visant à restreindre l'ajout intentionnel de microplastiques dans un grand nombre de secteurs) aurait été considérablement amoindrie à la suite des consultations publiques menées par le comité d'analyse socio-économique de l'Agence.

Plus récemment, lors de la première vague de l'épidémie de la Covid-19, les convertisseurs européens du plastique (EuPC) ont écrit à la Commission européenne pour réclamer un sursis d'un an et une refonte de la directive relative à la réduction de l'incidence sur l'environnement de certains produits en plastique qui interdit dès 2021 la commercialisation de certains plastiques à usage unique (assiettes, couverts, pailles, récipients pour aliments, tasses en polystyrène expansé, bâtonnets de coton-tige et ballons en plastique).

• Les obstacles liés à l'interdiction des perturbateurs endocriniens

De nombreuses substances chimiques sont suspectées d'agir comme des perturbateurs endocriniens (bisphénols, phtalates, parabènes, composés bromés, perfluorés, alkylphénol).

Nombre de ces substances se retrouvent dans des articles plastiques de la vie quotidienne (textiles, jouets, contenants alimentaires, véhicules, revêtements pour les sols, etc.).

Pourtant, dans la pratique, la réglementation européenne peine à lutter efficacement contre les perturbateurs endocriniens.

Ainsi, le règlement CLP 250 ( * ) impose un étiquetage spécifique pour un certain nombre de substances CMR (cancérigène - mutagène - toxique pour la reproduction), dont certaines sont des perturbateurs endocriniens potentiels. Mais il exclut certains produits (aliments, compléments alimentaires, dispositifs médicaux, médicaments, cosmétiques) qui relèvent de réglementations sectorielles spécifiques.

Seuls les règlements sur les produits phytopharmaceutiques et biocides prévoient explicitement d'exclure des substances présentant des effets de perturbateurs endocriniens.

2. Le vote très récent d'une stratégie globale de réduction des emballages plastiques

La loi relative à la lutte contre le gaspillage et l'économie circulaire fixe des objectifs de réduction de la quantité d'emballages en plastique à usage unique.

L'article 7 pose comme objectif la fin de la mise sur le marché d'emballages en plastique à usage unique d'ici à 2040. Pour atteindre cet objectif de réduction, un objectif de réutilisation et de réemploi et un objectif de recyclage seront fixés par décret pour la période 2021-2025, puis pour chaque période consécutive de cinq ans.

En outre, ce même article prévoit la mise en place d'une stratégie nationale pour la réduction, la réutilisation, le réemploi et le recyclage des emballages en plastique à usage unique d'ici à 2022. Cette stratégie doit déterminer les mesures sectorielles, ou de portée générale, nécessaires pour atteindre les objectifs fixés par décret. Certaines pistes de réflexion sont d'ores et déjà avancées : mobiliser les filières à responsabilité élargie du producteur via leurs éco-modulations, adapter les règles de mise sur le marché et de distribution des emballages, recourir à d'éventuels outils économiques.

L'article 7 précise que cette stratégie nationale est élaborée et révisée en concertation avec les filières industrielles concernées, les collectivités territoriales et les associations de consommateurs et de protection de l'environnement.

Par ailleurs, l'article 66 prévoit une réduction de 50 % du nombre de bouteilles en plastique à usage unique mises sur le marché d'ici à 2030.

La France devient ainsi le premier État à inscrire dans sa législation l'interdiction à long terme des emballages en plastique à usage unique.

Le vote de cet article a soulevé de nombreuses réactions. Certains le jugent irréalistes, d'autres regrettent que la date retenue pour la fin des emballages plastiques à usage unique soit si éloignée. Quoi qu'il en soit, cette loi introduit un formidable défi et oblige toutes les parties prenantes à collaborer pour établir, ensemble, une feuille de route et organiser cette transition vers une économie sans emballages plastiques à usage unique.

3. La focalisation des industriels sur le poids des emballages plutôt que sur leur réduction

Pour les entreprises, la fin de la mise sur le marché des emballages plastiques à usage unique d'ici à 2040 constitue un défi majeur. Jusqu'à présent, ces dernières se sont surtout focalisées sur la réduction du poids des emballages au détriment de leur élimination.

a) De réels progrès en matière de réduction du poids des emballages plastiques

La réduction du poids des emballages est un souci constant chez les industriels, car elle permet des économies en énergie à toutes les étapes du cycle de vie du produit.

En 1975, un pot de yaourt en PS pesait 6 grammes, contre 3 grammes en 2000 (soit une réduction de 50 % de la quantité de plastique). En 1979, le parechoc en PP de la Fiat Ritmo pesait 5,5 kg. En 2000, le parechoc de la Fiat Punto pesait 3,5 kg tout en ayant amélioré sa résistance aux chocs (soit une réduction de 36 % de la quantité de plastique). De même, l'épaisseur d'un tuyau en PEHD d'un diamètre 400 mm est passée de 46 mm en 1960 à 24 mm en 2000 (soit une réduction de 48 % de la quantité de plastique).

La loi n° 2009-967 du 3 août 2009 (dite de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement) a accentué cette course à la réduction du poids des emballages en posant le principe d'une contribution financière des industriels aux éco-organismes en fonction du poids de leurs emballages.

Selon Elipso (qui représente les entreprises de l'emballage plastique et souple), depuis vingt ans, les emballages ont vu globalement leur poids réduit de 40 % et même de 50 % pour les bouteilles en plastique.

Les exemples suivants illustrent les efforts des industriels dans la réduction du poids des emballages.

Entre 2010 et aujourd'hui, la part du plastique liée aux emballages cosmétiques est passé de 6 % à 2-3 %.

Selon l'association française des industries de la détergence, la mise en place d'une charte pour le nettoyage durable 251 ( * ) en 2005 a permis de diminuer la quantité d'emballages de 3 500 tonnes (ce qui correspond à une réduction de 14 % des emballages).

Les couches Pampers Harmonie ont vu le poids des matériaux utilisés réduit de 30 %.

Le développement des éco-recharges constitue une source non négligeable de réduction des plastiques pour l'Occitane, lui permettant d'économiser 9 % de plastique. Le poids d'une éco-recharge représente 10 % de celui d'un flacon.

L'Oréal a également annoncé une réduction de 50 % des matières plastiques pour la fabrication de ses flacons.

Par ailleurs, un certain nombre d'entreprises se lance dans le remplacement des emballages rigides par des emballages souples, que ce soit dans le domaine des cosmétiques et des détergents, mais également dans celui de l'agroalimentaire (fruits et légumes pré-coupés, viande hachée, etc.). Si ces initiatives contribuent à une réduction du volume total des déchets plastiques, elles ont parfois un effet pervers en matière de recyclabilité. En effet, la réduction de poids des plastiques nécessite souvent l'utilisation de résines plus complexes, telles que des multicouches, qui sont difficilement dégradables.

b) Un engagement plus récent dans la suppression des emballages

Au-delà de la réduction du poids des emballages, un nombre croissant d'entreprises s'efforce de supprimer certains emballages en plastique.

Le développement du vrac permet de réduire fortement l'utilisation de plastiques à usage unique. Les magasins commercialisant des produits « biologiques » ont initié et développé la vente en vrac et en sont les précurseurs. Ils ont depuis été suivis notamment par la grande distribution.

Lors de son audition, le président de l'enseigne de vente en vrac day by day (750 références) a estimé que la suppression des emballages primaires permettait de réduire de 73,3 % la quantité de plastique utilisée. Le ratio poids de l'emballage sur poids de matière est de 6 % dans la grande distribution traditionnelle. Il est de 1,5 % chez day by day.

Le développement du vrac a également un double effet d'entraînement sur les enseignes traditionnelles : non seulement la plupart d'entre elles ont développé un rayon vrac pour certains produits, mais elles sont incitées à supprimer les emballages plastiques superflus. Ainsi, Intermarché a développé le vrac dans 1 250 magasins sur 1 800 au total, avec 80 références en moyenne.

Decathlon s'est lancé dans une stratégie visant à supprimer les emballages de transport (polybag, scotch, etc.). Les solutions techniques sont actuellement testées en Inde et seront ensuite étendues à d'autres pays.

Enfin, de nombreuses entreprises de la cosmétique ont fait part d'initiatives visant à supprimer certains articles en plastique, qu'il s'agisse d'emballages (papier cellophane protégeant le carton d'emballage, etc.) ou des spatules pour l'application des produits de soin.

Toutefois, compte tenu du caractère symbolique de l'emballage dans le domaine des produits de beauté, la fédération des entreprises de la beauté a souligné que les stratégies de réduction des emballages devaient s'assurer qu'elles ne remettaient pas en cause l'image de luxe associée au produit.

Plus généralement, l'emballage est un support d'information qui porte à la fois les mentions légales propres au produit, mais aussi les indications que la marque veut mettre en avant dans sa relation avec le consommateur : conseils d'utilisation, informations nutritionnelles, allégations sanitaires ou environnementales. L'article 13 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a renforcé l'information des consommateurs sur les produits (cf. supra ) et précise que ces informations doivent être visibles et accessibles par le consommateur au moment de l'achat. La suppression des emballages doit donc s'accompagner d'une réflexion sur les solutions permettant d'informer le consommateur.

C. DES MARGES DE PROGRÈS EN MATIÈRE DE SUBSTITUTION

1. La substitution des plastiques problématiques

Comme il a été indiqué précédemment, certains plastiques (et certaines substances) sont jugés problématiques :

• le PSE, le PVC utilisé dans les emballages et les emballages multicouches ne sont pas recyclables ; le noir de carbone, mais également la couleur rouge et le manchon empêchent la lecture optique de l'emballage ; le PET opaque a longtemps perturbé les chaînes de tri en raison d'un taux élevé en charges minérales pour l'opacifier.

Afin d'améliorer la recyclabilité des emballages plastiques, des efforts importants sont entrepris pour éliminer ces emballages problématiques.

A l'occasion de la signature du pacte national sur les emballages, les entreprises signataires se sont engagées à supprimer les emballages contenant du noir de carbone, à renoncer à l'utilisation du PSE dans les contenants alimentaires et les gobelets plastiques à usage unique d'ici à 2025 ainsi qu'à éliminer le PVC dans les emballages ménagers, commerciaux et industriels d'ici à 2022.

De même, Nestlé a dressé une liste des résines non recyclables qui sont sorties de sa gamme de produits.

Decathlon cherche des alternatives au silicone et au polyuréthane, plastiques actuellement non recyclables mais largement utilisés dans les articles de sport.

Henckel s'est également engagé à privilégier l'utilisation des mono-matériaux, plus facilement recyclables.

Total a développé un emballage souple qui remplace une structure multi-matériaux PET-PE par une structure mono-matériau PE (tout en garantissant les mêmes propriétés à l'emballage).

Le renforcement de la modulation des contributions aux éco-organismes (malus de 100 % pour le PVC pour les emballages dès 2020 et pour les multicouches à partir de 2021), comme le durcissement de la réglementation (tous les récipients, gobelets et bouteilles en PSE sont interdits dans l'Union européenne à compter du 3 juillet 2021) incitent fortement les entreprises à renoncer à certains plastiques.

Le cas du PET opaque est singulier. En dépit des difficultés rencontrées par les recycleurs pour régénérer cette résine, les metteurs en marché n'ont pas souhaité y renoncer et ont investi 2,5 millions d'euros pour faciliter son recyclage. Deux ans d'efforts en recherche et développement ont permis de diviser le taux de charges minérales par deux, facilitant la dilution du PET opaque dans le flux de PET clair. Par ailleurs, les metteurs en marché comptent sur les avancées du recyclage chimique pour développer une filière de recyclage du PET opaque en circuit fermé.

2. D'autres substitutions dont l'opportunité doit être vérifiée au cas par cas
a) La substitution des plastiques à usage unique par d'autres matériaux

Afin de réduire leur empreinte environnementale, certaines entreprises ont décidé de remplacer tout ou partie du plastique qu'elles utilisent par d'autres matériaux.

Les limites des analyses de cycle de vie appliquées aux plastiques

Les analyses de cycle vie (ACV) d'un produit visent à évaluer systématiquement les effets environnementaux du produit durant l'ensemble des étapes de sa vie, depuis l'extraction des matières premières jusqu'aux déchets ultimes.

Néanmoins, les critères retenus pour réaliser les analyses de cycle de vie des plastiques tendent à sous-estimer leur impact sur l'environnement. D'abord, les AVC ne tiennent pas suffisamment compte de l'impact de la toxicité du plastique tout au long de sa vie. Ainsi, le relargage de substance chimique n'est pas pris en compte dans la mesure où la liste des additifs contenus dans les plastiques n'est pas connue.

Par ailleurs, le manque d'informations n'est pas pénalisé dans les ACV et la sécurité chimique du produit fini ne fait pas toujours partie des critères retenus.

Enfin, elles ne retiennent pas comme critère la fuite du plastique dans l'environnement et les pollutions qui en résultent. Or, l'impact environnemental principal des plastiques est moins l'émission de gaz à effet de serre que la pollution persistante dont ils sont responsables longtemps après leur utilisation.

Ainsi, chez Decathlon, tous les emballages de vente en ont été supprimés au profit du carton. Coca-Cola s'est également engagé dans une stratégie visant à remplacer les emballages secondaires en plastique par du carton.

De nombreux projets de recherche ont été confiés au centre technique du papier pour développer des évolutions du papier et du carton permettant à ces matériaux de remplacer efficacement le plastique.

Le syndicat national de l'alimentation et de la restauration rapide finance un projet visant à développer une nouvelle technologie « barrière » pour les emballages papier-carton : la chromatogénie 252 ( * ) . Un gobelet de restauration rapide a servi de démonstrateur. Le centre technique du papier est également en train de développer une mousse de cellulose en substitution au polystyrène expansé pour les éléments de calage.

Plusieurs alternatives sont également à l'étude pour palier la suppression de l'emballage plastique de la presse. Une première solution consiste à concevoir des films de routage pour la presse et le marketing direct en papier transparent, recyclable dans la filière papier et compostable. Une autre piste de réflexion porte sur une solution de routage à découvert (sans film) ou une mise sous pli papier.

Selon Citeo, la fibre de cellulose constitue une solution crédible devant la difficulté de recycler certains plastiques. L'enjeu est de lui donner de nouvelles propriétés, comme la résistance, l'étanchéité ou la transparence, pour fabriquer des emballages en papier-carton pour les gobelets, les éléments de calage, les papiers de bonbons et les emballages pour les tablettes de chocolat.

Le remplacement du plastique par du papier-carton doit néanmoins garantir l'innocuité des produits, en particulier pour ceux susceptibles d'être en contact avec des aliments. Les emballages en carton peuvent contenir des matériaux perfluorés. Ainsi, les carboxylates d'alkyls perfluorés sont utilisés pour la protection des papiers car ils apportent une grande stabilité thermique et chimique.

Par ailleurs, depuis quelques années, la perspective de l'interdiction des assiettes, des couverts, des gobelets et des pailles en plastique s'est accompagnée de l'apparition de nombreux produits de substitution dans des matériaux censés être plus respectueux de l'environnement (bambou, carton, papier, plastiques « biodégradables », etc.).

Ces tentatives de substitution se heurtent à deux limites.

Exemple révélateur des impasses dans la substitution
aux emballages plastiques à usage unique

Lors de l'audition d'Emmanuel Saulou, directeur de Restoria, entreprise spécialisée dans la cuisine de plats pour la restauration collective, celui-ci a expliqué rechercher depuis 2006 une alternative au polypropylène utilisé pour le conditionnement, la livraison et la remise en température des plats livrés à ses clients. Cette volonté est la résultante d'une ambition de réduction de la dépendance de l'entreprise au pétrole, d'une réponse apportée à l'image négative des plats en plastique et d'une anticipation des évolutions règlementaires imposées depuis 2019 par les lois EGALIM, PACTE et AGEC 253 ( * ) . Une telle substitution nécessite de trouver un matériau combinant résistance à la chaleur, à l'humidité et aux matières grasses, tolérance aux variations thermiques (descente et montée en température), manipulabilité et légèreté (dans l'objectif de maîtriser le risque de troubles musculosquelettiques chez les personnels de restauration collective), et coûts réduits. Parmi les différentes solutions possibles, le PLA répondait à plusieurs des critères mais procurait des inconvénients : possiblement produit à partir de cultures OGM, il est dès lors incompatible avec les cahiers des charges de la préparation de plats sans OGM. Les fibres de canne à sucre présentaient quant à elles l'inconvénient d'une étanchéité et d'une résistance mécanique insuffisante. La décision finalement retenue est celle d'un basculement vers l'inox qui lui aussi présente des points négatifs : augmentation des temps de manipulation, de la consommation en carburant des véhicules de livraison et en eau pour le lavage des plats. Les bénéfices et les inconvénients doivent s'inscrire dans une réflexion globale et démontrent la complexité de telles substitutions.

D'abord, les substitutions d'articles jetables en plastique par des articles jetables dans un autre matériau peuvent également avoir un impact négatif sur l'environnement ou la santé humaine . C'est le cas de la vaisselle en plastiques biosourcés 254 ( * ) ou en bambou développée par les industriels pour répondre à l'interdiction de certains produits en plastique à usage unique.

Alors qu'elle donne l'impression aux consommateurs de faire un geste pour l'environnement, sa fin de vie est aussi problématique que la vaisselle plastique fossile faute de filière de tri existante dédiée à ces déchets. En effet, la biodégradabilité de la vaisselle jetable n'est garantie que dans des installations industrielles ou dans des conditions spécifiques - de température notamment - rarement rencontrées dans l'environnement. Elle finit donc la plupart du temps dans le bac des ordures ménagères résiduelles pour être incinérée ou enfouie.

Quant à la vaisselle en bambou, il s'agit en fait de fibre ou de poudre de bambou mélangée à une résine plastique de mélamine-formaldéhyde. Or, le bambou ne fait pas l'objet d'une réglementation européenne et son processus de fabrication s'avère souvent de mauvaise qualité, entraînant une migration de mélamine ou/et de formaldéhyde dans les aliments. Au-delà d'un certain seuil, la mélamine est toxique pour les reins tandis que le formaldéhyde est reconnu cancérogène. Par ailleurs, le consommateur ne dispose d'aucune information sur l'origine du bambou utilisé pour la vaisselle jetable et sur le caractère « durable » de sa culture.

Ensuite, les substitutions de matériaux jetables par d'autres matériaux jetables peuvent freiner le développement de solutions plus durables basées sur la prévention des déchets tel que le réemploi ou la réutilisation.

La recherche de matériau de substitution au plastique doit donc s'accompagner d'une analyse du cycle de vie du produit susceptible de remplacer le plastique afin de s'assurer de son réel intérêt.

b) La substitution des plastiques issus des énergies fossiles par des plastiques biosourcés

L'épuisement des énergies fossiles 255 ( * ) et leur contribution au dérèglement climatique conduit les entreprises à trouver des solutions pour se libérer de la production de polymères à base d'hydrocarbures. Ainsi, elles sont nombreuses à s'être lancées dans la fabrication de plastiques biosourcés, issus de ressources renouvelables végétales.

La société brésilienne Braskem est le leader mondial dans la fabrication de polyéthylène biosourcé issu de la canne à sucre. Elle a également développé un polypropylène biosourcé. Ces deux polymères ont les mêmes caractéristiques que leurs homologues issus de produits fossiles. Ils sont donc recyclables mais non biodégradables.

Total est le deuxième producteur mondial d'acide polylactique, avec une production de 75 000 tonnes par an dans son usine située en Thaïlande. Ce polymère n'est pas recyclable. En revanche, il est dégradable industriellement 256 ( * ) .

L'Institut Français du Pétrole et des Energies nouvelles développe également une technologie permettant de fabriquer, à partir de la biomasse, des produits qui vont servir de matière première pour la pétrochimie. Ainsi, le projet Biobutterfly vise à synthétiser du butadiène à partir de la biomasse pour fabriquer du caoutchouc synthétique.

Si les polymères biosourcés ont un moindre impact sur les émissions de gaz à effet de serre (en comparaison aux polymères fossiles), leur gain environnemental est réduit, du point de vue des déchets, s'ils ne sont pas biodégradables. Comme il a été vu précédemment, la question de la biodégradabilité des polymères biosourcés peut entraîner des confusions auprès de l'opinion publique.

C'est la raison pour laquelle l'article 13 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a interdit l'utilisation de la mention « compostable » pour les produits et les emballages en matière plastique biosourcée dont la compostabilité ne peut être obtenue qu'en unité industrielle. Il interdit également à tout produit et emballage de porter la mention « biodégradable » ou « respectueux de l'environnement ».

L'article 84 de la même loi impose également la remise d'un rapport au Parlement sur les impacts sanitaires, environnementaux et sociétaux des plastiques biosourcés, biodégradables et compostables sur l'ensemble de leur cycle de vie. Ce rapport devra aborder notamment le risque de dispersion des microplastiques dans l'environnement lié à leur compostage.

3. Un engagement croissant dans l'incorporation de plastiques recyclés
a) Des initiatives soutenues par les pouvoirs publics et les industriels

Cinq secteurs économiques utilisent le plastique recyclé : l'emballage (r-PET et r-PEBD), le textile et l'ameublement (r-PET), le bâtiment (r-PEHD et r-PP), l'automobile (r-PP) et l'industrie électrique et électronique (r-PP). En 2019, seules 300 000 à 400 000 tonnes de plastiques recyclés ont été utilisés en France par les plasturgistes contre 5 millions de tonnes de plastiques vierges (soit 6 à 8 %).

Au niveau européen, la demande de produits recyclés ne représentait que 7,8 % de la demande totale de plastiques en 2016.

Selon l'Ademe, le taux moyen d'incorporation de matière première régénérée a atteint 5,6 % en 2016.

Les technologies évoluent rapidement et sous la pression des pouvoirs publics 257 ( * ) , les grandes sociétés de boissons notamment se sont engagées dans une course visant à augmenter rapidement le taux de PET recyclé dans leurs bouteilles. Ainsi, d'ici à 2025, PepsiCo France souhaite utiliser 50 % de PET recyclé dans ses bouteilles.

De même Coca-Cola a annoncé qu'en Europe de l'Ouest, ses bouteilles seront fabriquées avec 50 % de r-PET d'ici à 2023.

Les grandes entreprises agroalimentaires annoncent également des taux d'incorporation de matières recyclées importants d'ici à 2025 : 25 % pour les emballages des produits Danone (et 50 % pour les bouteilles en PET) ; plus de 25 % pour les emballages des produits Nestlé.

Les entreprises de la cosmétique ne sont pas en reste : L'Oréal annonce 50 % d'emballages d'origine recyclée ou biosourcée d'ici à 2025 et 100 % d'ici à 2030. Colgate-Palmolive s'engage sur un taux d'incorporation de matières recyclées de 25 % pour les emballages de ses produits.

Ces chiffres sont encourageants. Toutefois, ils soulignent surtout le rôle déterminant de la contrainte pour amener les entreprises à développer des modes de production plus respectueux de l'environnement. En l'absence d'objectifs chiffrés contraignants, de nombreuses entreprises continuent à privilégier des emballages produits essentiellement avec de la matière vierge.

Ainsi, au niveau mondial, les bouteilles pour boissons produites par Coca-Cola ne comptent que 7 % de matières plastiques recyclées. Ce taux est de 6 % seulement pour les bouteilles d'eau distribuées par Nestlé Waters North America 258 ( * ) .

En 2018, Nestlé a utilisé au niveau mondial 1,7 million de tonnes de plastiques, dont seulement 30 000 tonnes issus de matières premières régénérées, soit 1,7 %.

Les entreprises semblent néanmoins avoir compris l'intérêt qu'elles avaient à incorporer du plastique recyclé dans leurs produits. Dans un contexte où la production de plastiques fait l'objet de critiques croissantes de la part de l'opinion publique, l'utilisation de matières premières recyclées permet de « verdir » l'image des entreprises et de rendre le plastique plus acceptable socialement.

Au niveau français, les entreprises de l'emballage se sont engagées à quasiment doubler la proportion de matières plastiques recyclées utilisées dans leurs articles d'ici à 2025 (soit près de 400 000 tonnes).

Le secteur du bâtiment s'est engagé à augmenter de 75 000 tonnes supplémentaires la quantité de matière plastique recyclée.

En ce qui concerne le secteur automobile, les taux d'incorporation de plastiques recyclés restent globalement encore très bas : 2 à 3 % pour le groupe PSA, 5 % pour Volvo cars. Dans le cadre de l'engagement volontaire signé en juillet 2018, les constructeurs se sont engagés sur un volume de 12 000 tonnes supplémentaires de matières plastiques recyclés, avec des objectifs chiffrés variables d'un constructeur à un autre.

Le tableau ci-dessous précise les objectifs retenus par trois constructeurs automobiles en juillet 2019 :

Peugeot

Renault

Volvo

Augmentation de la consommation de plastiques recyclés

+ 28 %

+ 50 %

x 6

Quantité associée

45 000 tonnes

60 000 tonnes

Non communiquée

Marché concerné

Europe

Monde

Monde

Échéance

2025

2022

2025

Les objectifs de Volvo cars sont particulièrement ambitieux puisque ce constructeur veut passer de 5 % d'incorporation de plastiques recyclés dans ses véhicules en 2020 à 25 % en 2025.

Afin de prouver la viabilité de ses ambitions, le constructeur suédois a dévoilé en 2020 une version spéciale d'un de ses modèles 259 ( * ) , en tous points identique, en apparence, au modèle existant. Dans ce modèle plusieurs composants en plastique ont été remplacés par des équivalents en matériaux recyclés. Au total, ce sont 170 pièces recyclées qui sont concernées pour un poids total de 60 kg (soit environ 20 % de plastiques recyclés dans le véhicule).

Volvo fait remarquer que comme toute innovation ou nouvelle technologie, les composants utilisant des plastiques recyclés devraient être légèrement plus chers. Cependant l'écart de prix induit ne devrait pas être significatif, considérant la production de masse de ces pièces plastiques.

Exemples d'éléments automobiles réalisés à partir de plastiques recyclés

Panneau de protection de la console centrale sous le volant conducteur

Matériau : 100 % polypropylène post-consommation (PP)

Fournisseur du composant : IAC Group

Origine des matières : 50 % de déchets d'emballages alimentaires et 50 % de déchets plastiques issus de véhicules hors d'usage

Fournisseur de matériaux : Rondo et Axion Polymersap

Réservoir de dépression

Matériau : 100 % polyamide post-industriel (PA)

Fournisseur du composant : Nolato

Origine des matières : Découpes de la fabrication des airbags

Fournisseur de matériaux : Solvay

Panneau tunnel de console centrale

Matériau : Polypropylène (PP) issu de l'océan et fibres de lin

Fournisseur du composant : BComp

Origine des matières : Matrice de lin et plastiques de l'océan

Fournisseur de matériaux : BComp et Plastix

Cache de ceinture de sécurité

Matériau : Polypropylène (PP) post-consommation à 25 %

Fournisseur du composant : Polytec

Origine des matières : Recyclage d'emballages européens post-consommation

Source : Volvo cars.

Certaines grandes entreprises du secteur des équipements électriques et électroniques se sont engagées à titre individuel à incorporer davantage de matières plastiques recyclées, mais il n'existe pas d'engagement collectif.

Au total, les engagements pris permettraient d'incorporer 600 000 tonnes de plastiques recyclés pour un objectif d'un million de tonnes d'ici à 2025.

Jusqu'à présent, les engagements volontaires sont insuffisants pour atteindre les objectifs fixés par la Commission européenne.

b) Des obstacles à surmonter

Plusieurs obstacles 260 ( * ) ont été avancés au cours des auditions pour expliquer le faible taux d'incorporation de matières plastiques recyclées.

Certains s'inquiètent de la qualité des matières plastiques recyclées. Les plastiques utilisés dans les secteurs de l'automobile, des équipements électriques ou encore du bâtiment répondent à des contraintes techniques fortes. Les performances de la matière recyclée doivent donc respecter, dans la durée, les exigences des cahiers des charges des donneurs d'ordre, au même niveau que la matière vierge.

D'autres s'interrogent sur la capacité des régénérateurs à garantir un approvisionnement constant en plastiques recyclés.

Par ailleurs, compte tenu des faibles prix de vente de la matière vierge, les industriels ne seraient pas incités à acheter une matière plastique recyclée, plus chère, qu'ils jugent de moindre qualité et qui exige une adaptation de leurs procédés de production.

Enfin, l'incorporation de matières plastiques recyclées soulève la question de leur traçabilité : comment vérifier que les engagements volontaires et les obligations réglementaires d'incorporation sont bien respectés s'il n'existe pas de méthodologies de quantification et de contrôle des matières plastiques recyclées ?

Cette question de la traçabilité est essentielle afin d'éviter les fraudes. De nombreux interlocuteurs se sont notamment inquiétés de la possibilité de s'approvisionner en plastiques recyclés dans des pays tiers sans garantie sur l'origine du produit.

Les craintes sur la qualité des matières plastiques recyclées sont souvent exagérées en raison d'une mauvaise information des donneurs d'ordre de la diversité des sources d'approvisionnement. Ainsi, le recyclage à partir des chutes ou rebus de production garantit une très bonne connaissance de la composition des matières plastiques collectées et de leurs caractéristiques techniques. En fonction du besoin du donneur d'ordre, le compoundeur peut ajouter à la résine régénérée du plastique vierge, des colorants et des charges pour garantir la qualité du produit fini. Dans ces conditions, les cas dans lesquels seule la résine vierge permet de respecter les cahiers des charges des donneurs d'ordre sont relativement limités. Cela peut concerner des pièces très techniques, mais également des pièces de finition.

L'amélioration des performances des matières plastiques recyclées exige une étroite collaboration entre le producteur de résine régénérée et son client.

Par ailleurs, il faudrait fixer, à l'échelon européen, les exigences applicables aux matières recyclées, afin d'assurer, au moyen de l'élaboration de standards, un niveau de qualité équivalent des matières premières régénérées.

En ce qui concerne les questions d'approvisionnement en matières plastiques recyclées, il existe des tensions sur le r-PET. Alors que la demande est importante, notamment en raison de l'obligation d'incorporation de 25 % de matière plastique recyclée dans les bouteilles d'ici à 2025, la collecte reste insuffisante. C'est d'ailleurs dans le but de sécuriser ses approvisionnements en r-PET que Coca-Cola a financé l'extension du site de revalorisation des déchets Plastik Packaging en Côte-d'Or, permettant ainsi de régénérer 48 000 tonnes annuelles de PET 261 ( * ) . C'est également dans le but de réduire cette tension sur le r-PET que l'actuel gouvernement, compte tenu des résultats médiocres de collecte de bouteilles, envisage l'instauration d'une consigne pour recyclage.

L'amélioration de la collecte des bouteilles en PET constitue un véritable test pour la crédibilité des politiques publiques d'incitation à l'incorporation de plastiques recyclés.

En ce qui concerne les surcoûts liés à l'adaptation des unités de production pour leur permettre d'accepter des résines recyclées, les avis divergent. Certains font état de coûts supplémentaires (procédure de qualification de l'équipement, pré-tests, etc.) et de pertes d'efficacité industrielle (rendement plus faible, davantage de manutention, etc.) quand d'autres, au contraire, estiment que les procédures de production ne changent pas puisque la matière plastique recyclée dispose des mêmes caractéristiques techniques que la matière vierge.

D. LES BALBUTIEMENTS DU RÉEMPLOI ET DE LA RÉUTILISATION

1. Un foisonnement d'initiatives à la portée limitée

L'article L. 541- 1 du code de l'environnement distingue le réemploi de la réutilisation :

- le réemploi consiste en toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui ne sont pas des déchets sont utilisés de nouveau pour un usage identique à celui pour lequel ils avaient été conçus ;

- la réutilisation consiste en toute opération par laquelle des substances, matières ou produits qui sont devenus des déchets sont utilisés de nouveau (par exemple, le bien usagé est déposé dans une borne d'apport volontaire ou dans une déchèterie).

Réemploi et réutilisation se distinguent donc par le passage, ou non, par le statut de déchet.

En matière d'emballages, les pratiques portent essentiellement sur le réemploi 262 ( * ), même si la frontière entre réemploi et réutilisation est parfois floue (voir infra ). Dans les textes européens également, les notions de réutilisation et de réemploi des emballages ne sont pas distinguées (usage du seul terme "reuse"). Dans tous les cas il s'agit du « reremplissage » de l'emballage.

Le secteur de l'alimentation est celui qui connaît le plus d'initiatives de réemploi des emballages, notamment avec la réintroduction de la consigne pour réemploi (pratique qui existait auparavant avant de disparaître avec le remplacement des bouteilles en verre par des bouteilles en plastique à usage unique).

Le réemploi des bouteilles de verre

En 2019, 7 000 tonnes de verre seulement ont été réemployées pour les emballages ménagers, dont 42 % uniquement pour la brasserie Meteor à Strasbourg.

Cette même année, les cafés, hôtels et restaurants ont utilisé 220 000 tonnes de verre réemployable. Toutefois, les représentants de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie ont reconnu lors de leur audition une réduction de l'utilisation des bouteilles en verre réutilisable dans les hôtels et les restaurants au profit des bouteilles en plastique à usage unique.

La consigne pour réemploi souligne le besoin d'un cadrage plus précis des notions de réutilisation et de réemploi. En effet, les bouteilles vides étant rapportées sur un lieu de collecte afin d'être préparées pour leur réemploi (lavage notamment), le dispositif correspond en partie à la définition de la réutilisation.

Dans le cadre de ses investissements en recherche et développement, Citeo a financé en 2019 quatre projets d'emballages réemployables portés par des entreprises et start-up françaises innovantes :

- Petrel (prestataire de Carrefour et de sa plateforme de e-commerce Loop ) a développé une solution pour la gestion de la consigne des emballages réemployables dans le e-commerce, ainsi que la conception de mallettes de transport recyclables ;

- SolZero propose des solutions logistiques et industrielles pour le réemploi des emballages dans les secteurs de la restauration et de la distribution alimentaire. Elle développe et exploite les outils industriels, conçoit et gère des parcs d'emballages réutilisables. Un premier partenariat avec Franprix dans cinq magasins parisiens, met à la disposition des clients des contenants en verre réemployables ;

- Bout' à bout' propose une solution pour lever les freins techniques au réemploi des bouteilles (robustesse des bouteilles, étiquettes, etc.), identifiés lors d'une expérimentation de retour à la consigne lancée en 2017 avec des vignerons des Pays de la Loire ;

- Squiz développe des contenants alimentaires flexibles réemployables en plastique pour le transport et le stockage du vrac sec (céréales) et humide (compote) vendus en grandes et moyennes surfaces.

Par ailleurs, Citeo et l'Ademe ont lancé en 2020 un Appel à Manifestation d'intérêt (AMI) pour développer des dispositifs performants de réemploi d'emballages en verre. Cet AMI a pour objectif d'améliorer les dispositifs locaux existants, de soutenir les projets permettant la mise sur le marché d'emballages réemployables et d'identifier et partager les standards et référentiels d'efficacité environnementale et économique.

D'autres secteurs se sont également lancés dans le réemploi des emballages.

C'est le cas du secteur des cosmétiques et des détergents.

Les éco-recharges constituent souvent une première étape au réemploi puisqu'elles permettent de conserver le même contenant rigide et de le « recharger » lorsqu'il est vide. Elles sont particulièrement utilisées pour les savons liquides et la lessive. Elles ont l'avantage de dispenser le consommateur d'avoir à porter son contenant dans le magasin. En revanche, elles produisent tout de même un déchet : l'emballage souple qui contient le produit à recharger.

C'est la raison pour laquelle certaines enseignes ont installé des « stations de remplissage » directement dans les magasins. Le contenant est vendu au consommateur lors du premier achat. Lorsqu'il est vide, le consommateur vient en magasin le remplir à nouveau.

Cette pratique s'est d'abord développée dans les magasins de vrac, mais elle inspire depuis d'autres enseignes.

Au cours de son audition, Henckel a rappelé l'échec de sa tentative de vente en vrac de la lessive Le Chat en 2010. Un nouvel essai a cependant été effectué en 2019, dans 10 drogueries Rossmann, en République tchèque.

L'Occitane a également installé des « fontaines » de remplissage dans trois sites pilotes. Afin d'inciter les consommateurs à privilégier le réemploi, une tarification incitative est appliquée : le flacon contenant le produit et un premier remplissage sont vendus au même prix que le seul flacon.

Aussi bien Henckel que l'Occitane ont insisté sur les défis que représentait ce mode de vente. Non seulement la technologie doit être fiable, mais le personnel doit être formé et sensibilisé à l'intérêt de telles innovations. Le consommateur doit également être convaincu de l'intérêt du réemploi pour accepter de changer de comportement et de rapporter ses contenants au magasin.

2. Les bases introduites par la récente loi sur le gaspillage et l'économie circulaire

En dépit du foisonnement des initiatives mentionnées précédemment, celles-ci restent pour l'instant à l'état d'expérimentations au niveau local.

Le développement durable et massif d'une économie fondée sur le réemploi des emballages exige un pilotage au niveau national pour imposer des standards, accélérer le développement d'infrastructures (usines de lavage des bouteilles et des récipients) et fixer une trajectoire aux acteurs privés avec des objectifs chiffrés. La commande publique doit également faciliter l'essor du réemploi des emballages à travers des cahiers des charges privilégiant cette pratique.

A l'heure actuelle, beaucoup d'incertitudes entourent la mise en oeuvre concrète de cette stratégie en faveur du réemploi des emballages plastiques, même si la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a posé des jalons importants.

Ainsi, l'article 9 prévoit que la France se dote d'une trajectoire nationale visant à augmenter la part des emballages réemployés mis en marché par rapport aux emballages à usage unique . L'objectif recherché est d'atteindre une proportion de 5 % des emballages réemployés mis en marché en France en 2023 263 ( * ) , puis de 10 % en 2027. Les emballages réemployés doivent être recyclables.

Par ailleurs, cet article crée un observatoire du réemploi et de la réutilisation. Il est chargé :

- d'évaluer la pertinence des solutions de réemploi et de réutilisation d'un point de vue environnemental et économique ;

- de définir la trajectoire nationale mentionnée précédemment ;

- d'accompagner, en lien avec les éco-organismes, les expérimentations et le déploiement des moyens nécessaires à l'atteinte des objectifs définis dans les cahiers des charges de ces derniers.

L'article 65 oblige les éco-organismes à définir des gammes standards d'emballages réemployables pour les secteurs de la restauration, ainsi que pour les produits frais et les boissons. Ces standards sont définis au plus tard le 1 er janvier 2022.

Enfin, l'article 72 prévoit que les éco-organismes concernés consacrent au moins 2 % du montant des contributions qu'ils perçoivent au développement de solutions de réemploi et de réutilisation des emballages.

Plus récemment, le plan France Relance a rappelé la volonté du gouvernement de soutenir les solutions de réduction et de réemploi des équipements électriques et électroniques et des emballages , mais aussi de substitution des plastiques à usage unique. 61 millions d'euros sont prévus pour des appels à projets pilotés par l'Ademe via le fonds « Économie Circulaire ». Ils permettront de financer le développement des infrastructures logistiques et des outils de lavage. Le rôle de l'observatoire du réemploi et de la réutilisation est également rappelé, afin, notamment, d'éclairer les metteurs en marché dans leurs choix d'emballages réemployables.

VII. POUR UNE LUTTE EFFICACE CONTRE LES POLLUTIONS PLASTIQUES

La lutte contre les pollutions plastiques implique un bouleversement de nos modes de production et de consommation. Elle exige de se questionner en profondeur sur un modèle de société de surconsommation fondée sur le jetable et sur la surexploitation des ressources naturelles.

Dès lors, elle remet potentiellement en cause de nombreux intérêts :

- ceux des industriels qui doivent revoir leur modèle économique ;

- ceux des consommateurs qui doivent modifier leurs habitudes de consommation et renoncer à la facilité apportée par la société du jetable ;

- ceux des dirigeants politiques qui doivent assumer des choix réalistes en veillant à assurer une justice sociale.

Il pourrait alors être tentant de privilégier des solutions qui, tout en apportant des réponses à la pollution plastique, éviteraient la remise en cause de nos intérêts, pratiques et comportements. De telles mesures sont malheureusement inefficaces.

A. LES IDÉES REÇUES À ÉCARTER

1. La technologie permettrait de régler le problème de la pollution plastique

Si la technologie apporte des solutions pour prévenir et lutter contre la pollution plastique, elle constitue une condition nécessaire mais non suffisante pour résoudre cette pollution. En outre, elle peut parfois s'avérer contreproductive lorsqu'elle retarde ou empêche la prise de solutions simples et beaucoup moins onéreuses. Enfin, elle est parfois récupérée par des lobbies qui revendiquent la technologie pour défendre leur modèle économique.

Parfois les développements technologiques ouvrent autant de questions qu'ils apportent de solutions. En voici quelques exemples :

• L'installation de filtres sur les machines à laver

Afin de lutter contre le relargage de fibres textiles lors du lavage des vêtements, la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a introduit l'obligation d'équiper les lave-linges neufs d'un filtre à microfibres plastiques à compter du 1 er janvier 2025. Outre que ces filtres ne sont pas encore au point et qu'on peut légitimement s'interroger sur leur efficacité, d'autres problèmes se posent : comment nettoyer ces filtres ? Les consommateurs respecteront-ils les consignes ? Ces filtres se satureront-ils de fibres et faudra-t-il les changer ? Que deviendront les filtres usagers ? Ces questions ne sont aujourd'hui pas résolues. L'effet attendu d'une technologie nécessite donc une adaptation de ses utilisateurs et devient sa condition de réussite.

• Le nettoyage des océans

Le projet « Ocean Cleanup » (déjà évoqué plus haut dans le rapport), visant à nettoyer la pollution plastique présente dans le gyre du Pacifique Nord est louable mais nécessite d'importants moyens pour concevoir les structures flottantes capables de capter les macrodéchets ensuite récupérés par bateau. Si ce projet a l'intérêt de sensibiliser l'opinion publique sur une des formes de la pollution plastique, l'image qu'il en donne peut donner l'impression que nous aurions la capacité de nettoyer les océans. Même une mobilisation mondiale ne permettrait d'éliminer qu'un infime pourcentage de la pollution marine sans en tarir la source (laquelle est essentiellement liée aux activités terrestres).

• Le recyclage chimique

Le recyclage chimique pourrait donner l'impression d'une circularité parfaite des flux de matière. Les limites de cette technologie ont été mises en avant. Outre son coût et le nombre limité de résines potentiellement concernées, son impact environnemental est non négligeable. De surcroît le recyclage chimique ne règle pas le problème des fuites des plastiques dans l'environnement.

• Les plastiques biosourcés compostables

Afin d'anticiper l'interdiction de nombreux plastiques à usage unique, une multitude de produits de substitution, en plastique biosourcé compostable, a été mise sur le marché. Dans de nombreux cas, le polymère utilisé est l'acide polylactique, qui n'est biodégradable qu'en conditions industrielles. Les chercheurs et les industriels spécialisés dans les bioplastiques ne manquent pas d'imagination pour développer des produits. Ils poussent en particulier au développement de leur utilisation comme emballage alimentaire (films, barquettes, bouteilles, etc.) en arguant du fait qu'ils pourraient ensuite rejoindre le flux de biodéchets.

La réalité n'est pas si parfaite : en raison des volumes qu'ils pourraient représenter, leur mélange avec les biodéchets risquerait de perturber une filière en quête de légitimité auprès des agriculteurs (utilisateurs finaux des biodéchets compostés). De nombreux objets en plastique, affichés comme biodégradables en compost domestique, n'apportent aucune garantie de l'être également dans les sols, dans les eaux douces ou dans les océans. Dès lors, le risque n'est pas à négliger de mauvais comportements chez les consommateurs vis-à-vis de ces « bioplastiques » qui, en raison de leur qualification de plastiques compostables, les considèreraient comme inoffensifs pour l'environnement.

2. La bonne gestion des déchets mettrait fin à la pollution plastique

L'argument de la fin de la pollution plastique grâce à une bonne gestion des déchets est souvent avancé par les fabricants de plastiques. Selon cette vision, la pollution plastique serait uniquement due à une gestion non optimale des déchets et à un comportement inadapté des consommateurs. C'est la raison pour laquelle les metteurs en marché de plastiques insistent sur :

- la sensibilisation des citoyens aux gestes de tri ;

- l'interdiction de mises en décharge des plastiques ;

- l'amélioration des performances des centres de tri.

Si ces trois pistes d'amélioration sont pertinentes, elles ne permettront pas de résoudre le problème si, dans le même temps, la croissance de la consommation de plastiques n'est pas réduite.

En dépit des mesures récentes prises par les pouvoirs publics, aussi bien au niveau européen que national, pour augmenter la valorisation matière des déchets, les objectifs annoncés dans ce domaine apparaissent difficilement réalisables (100 % de plastiques recyclés d'ici à 2025 pour le Gouvernement français et 100 % d'emballages plastiques recyclables d'ici à 2030 pour la Commission européenne).

Par ailleurs, l'amélioration de la gestion des déchets n'a pas d'influence sur l'une des sources de la pollution plastique : la fuite des microplastiques dans l'environnement au cours de leur production ou de leur utilisation (granulés industriels, microparticules de pneus, fibres synthétiques, etc.).

Quant à la gestion des déchets dans les pays en voie de développement, elle constitue une tâche titanesque à mener alors que la consommation de plastiques devrait doubler à tripler dans ces zones géographiques d'ici à 2050 (cf. supra ).

3. La croissance économique permettrait d'endiguer la pollution plastique

Les pays développés éprouvent des difficultés à gérer leurs déchets qui augmentent par ailleurs. Ainsi les fuites dans l'environnement sont loin d'être jugulées.

Compte tenu des prévisions alarmistes des organisations environnementales sur la croissance de la consommation de plastiques dans des pays équipés de systèmes de gestion des déchets défaillants, il pourrait être tentant de se réfugier derrière l'argument de la croissance économique : considérant l'augmentation du revenu par habitant et donc leur croissance économique, ces pays pourront investir dans des infrastructures performantes de gestion des déchets.

Cette théorie s'appuie sur la courbe environnementale de Kuznets en U-inversé (équation basée sur le PIB par habitant comme facteur explicatif). Selon cette théorie, la croissance d'un pays, à mesure que le revenu par habitant augmente, s'accompagne d'un accroissement de la quantité de déchets plastiques mal gérés. Toutefois, passé un certain niveau de revenu par habitant, la quantité de déchets plastiques mal gérés diminuerait en raison d'une augmentation de la capacité à investir pour protéger l'environnement. La population ayant accès à un meilleur confort de vie, elle se préoccuperait davantage de la qualité de ses conditions d'existence et exigerait des améliorations environnementales.

Une économie en croissance possède plus de moyens pour investir dans les innovations technologiques vertes (gestion des déchets, nettoyage des océans, etc.).

Le rôle de la croissance dans la capacité des pays à mieux gérer leurs déchets doit cependant être relativisé . D'autres critères interviennent en plus du seul PIB : l'éducation, la lutte contre la corruption et l'influence des lobbies, etc. Selon les modèles mathématiques développés par Mateo Cordier 264 ( * ) , la variation du PIB par habitant n'explique que 11 % de la production de déchets plastiques par habitant. En se focalisant sur les 43 pays les plus polluants 265 ( * ) (91 % de la pollution plastique), augmenter le nombre d'années d'éducation et mieux contrôler la corruption et l'influence des lobbies réduiraient respectivement de 44 % et de 28 % la quantité de déchets mal gérés en 2050 par rapport à 1990.

4. La croissance verte serait la solution miracle

L'économie circulaire repose sur le principe de la maximisation de l'efficience des ressources naturelles (maximisation du service rendu par unité de ressource prélevée). Elle s'obtient par la réduction de la production des biens et des services, la mise en place de la réutilisation de la matière. Les principes de l'économie circulaire sont incompatibles avec l'idée d'une augmentation de la consommation de matières premières.

Lors de son audition, Pierre Desvaux 266 ( * ) a insisté sur le dévoiement de la définition initiale de l'économie circulaire au profit d'un discours en faveur de la croissance verte, laissant croire à une possible déconnection entre l'augmentation de la richesse et les conséquences environnementales de nos modes de production. L'application de ce principe au cas des plastiques conduit à faire croire que l'utilisation efficace des ressources et la prolongation de leur durée de vie (grâce au recyclage et au réemploi) neutraliseraient les effets négatifs de leur consommation excessive.

En réalité, l'accent mis sur la croissance verte évite de remettre en cause nos modèles de production et de consommation. « Dans une économie de croissance, les bénéfices à long terme du recyclage et de l'allongement des durées de vie (par substitution des fonctionnalités aux biens) sont en partie, voire totalement contrecarrés par l'accroissement des volumes totaux extraits et consommés 267 ( * ) ».

5. La responsabilisation des citoyens permettrait de contenir la pollution plastique

Au cours de leurs entretiens, plusieurs interlocuteurs, en particulier des industriels, ont insisté sur la nécessaire responsabilisation du citoyen pour adopter de nouvelles pratiques. Un constat pessimiste est construit autour de la déconnexion entre les convictions du citoyen et son comportement de consommateur. En conséquence, les entreprises sont obligées d'intégrer ces résistances dans leur stratégie marketing.

En réalité, un certain nombre de travaux de recherche en sciences humaines et sociales prouve la relative inefficacité des politiques construites sur la sensibilisation et la responsabilisation les citoyens, notamment en raison de la forte inertie des modes de consommation.

Au cours de son audition, Sophie Dubuisson-Quellier 268 ( * ) a souligné le rôle des industriels dans la construction des comportements de consommation. Les innovations de produits répondent d'abord aux objectifs des entreprises 269 ( * ) , qu'il s'agisse de faire venir des consommateurs sur de nouveaux marchés, de capter de nouveaux consommateurs dans des contextes de marchés saturés, de faciliter des opérations logistiques dans des chaînes de valeur de plus en plus longues et complexes ou encore de réduire les coûts de production.

Ainsi, la dépendance très forte aux plastiques à usage unique a été façonnée par les industriels qui ont profité du faible prix du plastique pour élargir considérablement leur marché. Progressivement, nos habitudes de consommation ont été profondément et durablement modifiées : elles sont désormais régies par des normes sociales très ancrées dans la société et qui reposent sur l'abondance des produits, la surconsommation et l'absence de valeur de l'emballage en raison de l'externalisation de ses coûts environnementaux 270 ( * ) .

Les plastiques à usage unique ont verrouillé de nouveaux comportements routiniers qui se justifient par la suppression de tâches dont les consommateurs avaient la charge (préparation, nettoyage, conservation, etc.). La sortie de ces modes de consommation est complexe : il faut se rééquiper, réassigner des tâches, accepter une augmentation des coûts (car le durable est parfois plus cher). Selon la scientifique, un tel bouleversement peut difficilement résulter d'une décision individuelle et repose sur des changements plus systémiques qui concernent l'ensemble de la société. Elle insiste ainsi sur le rôle de l'action collective et des mesures portant sur l'offre.

B. NOS RECOMMANDATIONS

Vos rapporteurs ont élaboré huit séries de recommandations en réponse aux constats posés dans le rapport :

- sensibiliser, éduquer et impliquer les citoyens ;

- réduire la production de plastique ;

- prévenir la fuite des plastiques dans l'environnement ;

- favoriser le réemploi ;

- rendre le recyclage plus efficient ;

- soutenir l'acquisition de connaissances et la recherche ;

- évaluer et contrôler l'application des lois qui intègrent des dispositions relatives à la pollution plastique ;

- promouvoir de nouvelles actions à l'échelon européen et international.

1. Sensibiliser, éduquer et impliquer les citoyens

La lutte contre la pollution plastique est l'affaire de tous. Les solutions ne peuvent se limiter aux seules actions des pouvoirs publics et des acteurs économiques. Il est indispensable d'impliquer l'ensemble des citoyens, à tous les âges, dans leurs différentes responsabilités, en les aidant à adopter des modes de consommation moins utilisateurs de plastiques.

• Intégrer dans les parcours scolaires au moins une opération de ramassage de déchets plastiques (plages, bords de routes, berges de rivières) sous forme ludique et instructive pour éveiller les consciences ;

• Intégrer dans toutes les formations supérieures un module sur les matières plastiques et la pollution qu'elles peuvent engendrer ;

• Rendre obligatoire l'affichage en magasin de la possibilité pour le consommateur de laisser les emballages en caisse ;

• Multiplier les nudges « Ici commence la mer » aux abords des avaloirs des réseaux publics d'eau pluviale ;

• Rendre obligatoire, par voie d'étiquetage, l'affichage d'une mention « relargue des microfibres dans l'environnement » pour tous les textiles à base de fibres plastiques ;

• Associer davantage les citoyens à la définition des politiques de lutte contre la pollution plastique ;

• Informer les consommateurs sur les risques associés aux mésusages des contenants plastiques (risques de migration de perturbateurs endocriniens lorsque l'on utilise un contenant alimentaire en plastique en le détournant de la fonction pour laquelle il a été mis sur le marché).

2. Réduire la production de plastique

Pour lutter efficacement contre la pollution plastique, il faut infléchir l'explosion de sa consommation . S'il n'est pas question de supprimer tous les plastiques, l'objectif est de rationaliser leurs usages en les réservant aux applications où leurs performances leur confèrent une nette supériorité vis-à-vis des autres matériaux.

• Définir une liste des plastiques à réduire en considérant :

- leur qualité (conditionnée notamment par la toxicité de leurs additifs) ;

- leur évitabilité (certains usages du plastique sont par exemple sans intérêt particulier en dehors de la fonction marketing qui leur est associée) ;

- leur durée de vie (des plastiques ne sont utilisés que quelques minutes avant de devenir des déchets) ;

- leur risque de fuite vers l'environnement (les modes de consommation ou d'utilisation de certains plastiques conditionnent leur forte probabilité à se retrouver dans l'environnement) ;

- leur substituabilité (avec démonstration par l'analyse du cycle de vie de leur capacité à être remplacés par d'autres matériaux, sans impacts environnementaux plus importants).

• Accélérer l'interdiction des microplastiques intentionnellement ajoutés en les reconnaissant comme des polluants organiques persistants ;

• Utiliser le levier de la commande publique pour amplifier la réduction de la consommation de plastiques ;

• Développer et généraliser les accès à l'eau potable dans l'espace public de manière à réduire le recours aux bouteilles en plastique à usage unique ;

• Favoriser la réduction de la consommation de plastique par les entreprises par la coercition et l'incitation ;

• Accompagner la reconversion des entreprises qui seraient directement impactées par des interdictions de plastiques ;

• Imposer l'utilisation de plastiques biosourcés et compostables dans le secteur des films agricoles ;

• Interdire l'utilisation de polystyrène expansé pour l'emballage des colis, y compris pour les produits frais (poissons) et les objets fragiles.

• Promouvoir l'utilisation de masques en tissu par les citoyens.

3. Prévenir la fuite des plastiques dans l'environnement

La fuite des plastiques dans l'environnement est le point de départ d'une pollution qui va se disperser et s'amplifier avec la libération de particules de micro et de nanoplastiques. Il est nécessaire de contenir les différentes fuites, qu'elles concernent les granulés de polymères utilisés par l'industrie, les microplastiques ajoutés intentionnellement dans différents produits de consommation ou les objets en fin de vie.

• Renforcer la réglementation pour éviter les fuites de granulés industriels ;

• Imposer la géolocalisation des engins de pêche industrielle et de tous les conteneurs transportant des granulés ou des plastiques ;

• Favoriser le recours aux équipements de pêche et de conchyliculture en matériaux mono-matière et biodégradables ;

• Renforcer la règlementation sur la certification des pneus en l'élargissant à la prise en compte de l'abrasion des bandes de roulement ;

• Développer une procédure de test standardisé pour mesurer la dispersion des billes des gazons synthétiques et conditionner leur mise sur le marché au respect d'un seuil maximum de dispersion ;

• Interdire les lâchers de ballons ;

• Procéder à l'inventaire des décharges (actuelles et anciennes) ainsi que des lieux d'enfouissement sauvages et mettre en place un plan pour leur élimination progressive ;

• Interdire l'utilisation, dans la formulation de tout plastique, des substances utilisées comme additif ou charges dès lors qu'elles ont été classées par REACH comme substances toxiques, polluants très persistants et bioaccumulables.

4. Favoriser le réemploi

Avant le recyclage, le réemploi est une solution qui ne doit pas être négligée.

• Subventionner massivement le réemploi ;

• Inciter le développement de la consigne en verre pour les boissons (en particulier pour les productions de boissons locales), notamment en accélérant le développement d'infrastructures (verrerie, industrie du lavage, etc.) ;

• Élaborer une feuille de route nationale déclinée à l'échelle territoriale sur les contenants alimentaires dans d'autres matières que le plastique ;

• Augmenter au-delà des 2 % actuels la part des contributions perçues par les éco-organismes consacrée au développement du réemploi.

5. Rendre le recyclage plus efficient

La production de plastique est consommatrice de ressources non renouvelables. Il est indispensable de mener des actions pour renforcer l'efficience de la matière première (garantir sa réinjection dans le cycle de production le plus longtemps possible). Même si le recyclage ne constitue pas une solution miracle, il peut limiter la consommation de matière première vierge dans la logique de l'économie circulaire.

• Documenter les flux de déchets par résine en vue de la création de filières de recyclage lorsque les quantités les rendent pertinentes ;

• Interdire dès maintenant la mise en décharge des plastiques bénéficiant d'une filière opérationnelle de recyclage ;

• Imposer des taux de réincorporation par résine et par produit ;

• Imposer la transparence sur les additifs utilisés afin de garantir leur traçabilité pour la gestion de fin de vie (tri, recyclage et réincorporation) ;

• Mettre en place des incitations fiscales et réglementaires pour encourager l'incorporation de plastiques recyclés ;

• Garantir la traçabilité de l'incorporation des matières premières recyclées pour éviter les fraudes ;

• Conditionner la mise sur le marché de tout nouvel emballage plastique à son respect de critères environnementaux (recyclable, compostable ou réutilisable) ;

• Imposer pour le produit final un étiquetage indiquant le pourcentage d'incorporation de matières plastiques recyclées, y compris s'il n'en contient pas (mention « 0 % de plastique recyclé ») ;

• Généraliser l'écoconception de tout objet en plastique, notamment en lui intégrant une analyse technico-économique du recyclage pour en chiffrer le coût ;

• Faire appliquer la réglementation internationale sur les exportations de déchets plastiques vers les pays tiers en renforçant leur suivi et leur traçabilité.

6. Soutenir l'acquisition des connaissances et la recherche

L'arrivée massive des plastiques dans notre vie quotidienne est un phénomène récent qui s'accompagne de fuites de certains d'entre eux dans tous les compartiments de l'environnement. La recherche s'intéresse à la pollution plastique depuis une dizaine d'années et n'a pas encore exploré tous les domaines qui permettront de la comprendre et de trouver des solutions pour y remédier. Le soutien à l'acquisition des connaissances est essentiel et doit être encouragé.

• Poursuivre les recherches sur les sources des pollutions plastiques, leurs voies de transfert dans l'environnement, notamment dans le sol et dans l'atmosphère ; renforcer les connaissances sur le devenir des plastiques en étudiant leur vieillissement en conditions naturelles standardisées avec un accent particulier mis sur les microplastiques et les nanoplastiques ; cartographier la répartition des pollutions à l'échelle du globe ;

• Harmoniser les définitions des microplastiques et des nanoplastiques et standardiser les protocoles de collecte et de mesure des données sur les pollutions plastiques ;

• Mieux connaître les impacts toxiques des microplastiques et développer de nouvelles méthodes d'évaluation des risques intégrant les effets conjugués avec d'autres polluants ;

• Renforcer les recherches sur les transferts de micro et de nanoplastiques dans la chaîne alimentaire ;

• Renforcer le rôle de la science coopérative par le financement d'appels à projets impliquant des organismes de recherche et des associations ;

• Soutenir la recherche en sciences humaines et sociales afin de disposer de données quantitatives et qualitatives sur les pratiques de consommation et de production, sur la perception du risque, sur les mécanismes encourageant l'acceptation du changement, sur la formation et l'évolution des normes sociales, etc. ;

• Favoriser le mécénat d'entreprise en direction de l'environnement afin de faciliter l'augmentation des moyens de la recherche et des associations.

7. Évaluer et contrôler l'application des lois qui intègrent des dispositions relatives à la pollution plastique

De nombreuses lois comportent d'ores et déjà des dispositions qui concernent la pollution plastique, la dernière en date étant celle relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Il convient, par le contrôle de l'application des lois, de s'assurer de leur concrétisation, c'est-à-dire de leur transposition sous forme de décret dans le respect de l'esprit dans lequel elles ont été votées et dans un délai raisonnable.

Plus généralement, à court terme, trois dispositifs devront particulièrement retenir l'attention des parlementaires :

• la règlementation sur les cinq flux qui peine à être appliquée ;

• les mesures d'amélioration de la collecte (tarification incitative, extension de la consigne de tri ; tri à la source des biodéchets, harmonisation des couleurs des poubelles ;

• la mise en conformité des rejets des réseaux de collecte des eaux usées, importante voie de transfert dans l'environnement de produits plastiques à usage domestique.

Enfin, lors des débats des prochaines lois, il sera essentiel de s'assurer que les mesures votées ne soient pas contre-productives en termes de lutte contre la pollution plastique. À l'image de la volonté affirmée par de nombreux parlementaires d'inscrire les lois dans un principe de neutralité carbone, il faudra également les considérer sous l'angle de leur « neutralité plastique ». Plus généralement, comme il est d'usage dans de nombreux autres pays, les lois votées devraient être examinées selon le prisme des ODD 271 ( * ) afin d'identifier en quoi et comment elles respectent, ou non, ces objectifs arrêtés par la communauté internationale et que la France s'est engagée à atteindre.

8. Promouvoir de nouvelles actions à l'échelon européen et international

À l'instar de la question du réchauffement climatique, la pollution plastique est un problème global qui ne pourra être résolu qu'au niveau international. C'est la raison pour laquelle il est indispensable de fédérer la communauté internationale autour du sujet. En outre, certaines mesures ne seront efficaces que si elles sont prises au niveau européen. Il apparaît dès lors important de :

• Mettre en place, à l'image du GIEC, une plateforme scientifique européenne ou mondiale sur la pollution plastique pour permettre un accès partagé à des données normalisées ;

• Promouvoir un traité mondial visant à réduire la pollution plastique ;

• Faire évoluer la directive cadre sur l'eau afin de prendre en compte la problématique plastique et exiger, qu'à l'instar de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin », les États membres prennent des mesures pour lutter contre les déchets plastiques dans les eaux de surface ;

• Renforcer la réglementation européenne afin de lutter plus efficacement contre les perturbateurs endocriniens.

• SAISINE DE L'OFFICE

EXAMEN DU RAPPORT PAR L'OFFICE

Réuni le 10 décembre 2020, l'Office a examiné le rapport de Philippe Bolo, député, et Angèle Préville, sénatrice, sur la pollution plastique : une bombe à retardement ?

Il a autorisé à l'unanimité la publication du rapport.

http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/office-parlementaire-d-evaluation-des-choix-scient.-tech..html

ANNEXE I :
LISTE DES ABRÉVIATIONS

Abréviations

Noms commerciaux

ABS

Acrylonitrile butadiène styrène

BPA

Bisphénol A

DDT

Dichlorodiphényltrichloroéthane

HAP

Hydrocarbure aromatique polycyclique

HBCC

Hexabromocyclododécane

HCH

Hexachlorocyclohexane

OPEs

Esters organo-phosphorés

PA

Polyamide, nylon, Perlon

PAEs

Phtalates

PBAT

Polybutylène adipate-co-téréphtalate

PBDE

Polybromodiphényléthers

PBS

Polybutylène succinate

PCB

Polychlorobisphényle

PCL

Polyaprolactone

PE

Polyéthylène

PEBD

Polyéthylène basse densité

PEHD

Polyéthylène haute densité

PET

Polytéréphtalate d'éthylène

PFOA

Acide perfluorooctanoïque

PFOS

Sulfonates perfluorooctane

PHA

Polyhydroxyalcanoate

PLA

Acide polylactique

PMMA

Polyméthacrylate de méthyle

POP

Polluants organiques persistants

PP

Polypropylène

PPDDT

Dichlorodiphényltrichloroéthane

PS

Polystyrène

PSE

Polystyrène expansé

PSU

Polysulfone

PUR

Polyuréthane, Lycra, Spandex

PVC

Polychlorure de vinyle

SI

Silicone

ANNEXE II :
ENQUÊTE AUPRÈS DES AMBASSADES

I - Méthode

L'enquête a été réalisée du 6 octobre au 1 er décembre 2020 auprès des ambassades en France de 179 pays. Un courrier a été adressé à chacun des ambassadeurs pour les inviter à répondre à une enquête en ligne. 38 réponses ont été reçues (soit 21 % des pays invités à participer à l'enquête).

Le questionnaire comptait huit questions portant sur :

- l'existence d'une législation sur le plastique ;

- les mesures prises dans la législation ;

- les exportations et les importations de déchets plastiques.

Les pays qui ont répondu à l'enquête

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Les pays de l'Union européenne qui ont répondu à l'enquête

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

II - Résultats

ANNEXE III :
ENQUÊTE AUPRÈS DES COMMUNES LITTORALES

I - Méthode

L'enquête a été réalisée du 14 octobre au 1 er décembre 2020 auprès des 1 167 communes de France qui comptent un rivage sur leur territoire, qu'il s'agisse de rivages maritimes ou d'étendues d'eau continentales. S'agissant d'une enquête effectuée par voie électronique, le lien vers l'enquête a été transmis aux communes concernées par l'intermédiaire de l'Association des Maires de France. 106 réponses ont été reçues, soit 9 % des communes invitées à participer à l'enquête.

Le questionnaire comptait 24 questions portant sur :

- les opérations de nettoyage ;

- la gestion des déchets collectés ;

- la communication associée à ces opérations.

Nombre de réponses reçues par façades maritimes

Source : Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

II - Résultats

1. Les opérations de nettoyage

À quelle fréquence sont réalisées ces opérations de nettoyage ?

Quotidienne

Hebdomadaire

Mensuelle

Trimestrielle

Printemps

6 %

22 %

29 %

43 %

Été

42 %

28 %

18 %

12 %

Automne

5 %

13 %

30 %

53 %

Hiver

3 %

6 %

38 %

53 %

Moyenne

Médiane

Écart-type

Minimum

Maximum

Quel est le linéaire de rivage nettoyé chaque année ?

3 600 m

3 000 m

2 100 m

200 m

60 km

Concernant les communes qui n'effectuent pas d'opérations de nettoyage

2. Gestion des déchets collectés

3. Communication

ANNEXE IV :
CONTRIBUTION DES RAPPORTEURS À LA CONSULTATION PUBLIQUE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE SUR LE PROJET DE MODIFICATION DU RÈGLEMENT SUR LES EXPÉDITIONS DE DÉCHETS

ANNEXE V :
ENQUÊTE AUPRÈS DES DÉPARTEMENTS

I - Méthode

L'enquête a été réalisée du 12 octobre au 1 er décembre 2020 auprès des 101 départements de France. S'agissant d'une enquête effectuée par voie électronique, le lien vers l'enquête a été diffusé auprès des départements par l'intermédiaire de l'Association des Départements de France. 38 réponses ont été reçues (soit 38 % des départements invités à participer à l'enquête). Le questionnaire comptait 6 questions portant sur le degré de pollution des routes départementales.

II - Résultats

Moyenne

Médiane

Écart-type

Minimum

Maximum

Quel est le linéaire de route nettoyé chaque année ?

2 897 km

3 000 km

1 886 km

50 km

6 962 km

Quel est le nombre d'ETP dédiées au nettoyage ?

11

6

13

0

54

À combien estimez-vous le coût global de ces opérations de nettoyage pour la collectivité départementale ?

172 276 €

65 000 €

238 966 €

2 000 €

1 300 000 €

Quelle est la quantité annuelle de déchets collectés ?

282 t

150 t

418 t

2 t

2 210 t

Quelle est la proportion de plastique dans ces déchets ?

36 %

30 %

22 %

5 %

75 %

ANNEXE VI :
COMPARAISON DES MODES DE GESTION DES DÉCHETS PLASTIQUES POST-CONSOMMATION EN EUROPE EN 2018

Classement des pays par ordre décroissant du recours à l'enfouissement
(à gauche) et à la valorisation énergétique (à droite)

Source : PlasticsEurope.

ANNEXE VII :
LE RAPPORT EN BANDE DESSINÉE

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mercredi 11 septembre 2019

France Nature Environnement

- M. Michel DUBROMEL, président

Surfrider Foundation Europe

- Mme Diane BEAUMENAY-JOANNET, plaidoyer déchets aquatiques

Zero Waste France

- Mme Laura CHATEL, responsable du plaidoyer

Plastic Odyssey

- M. Simon BERNARD, responsable de l'expédition

The SeaCleaners

- M. Yannick LERAT, directeur scientifique

- M. David TAÏEB, directeur marketing et développement

Fondation Tara Océan

- M. Romain TROUBLÉ, directeur général

Expédition MED

- M. Bruno DUMONTET, directeur et fondateur

- Mme Tosca BALLERINI, coordinatrice

Mercredi 18 septembre 2019

Citeo

- M. Carlos DE LOS LLANOS, directeur scientifique

- Mme Sophie GÉNIER, directrice services recyclage

- M. Laurent GRAVE-RAULIN, conseiller affaires publiques

Paprec Group

- M. Sébastien PETITHUGUENIN, directeur général

Fédération professionnelle des entreprises du recyclage - FEDEREC

- M. Christophe VIANT, président

- Mme Marion HALBY, chargée de mission

- Mme Marie-Ange BADIN, responsable relations institutionnelles

Syndicat national des activités du déchet (SNAD) - Fédération nationale des activités de dépollution et de l'environnement (FNADE)

- M. Didier COURBOILLET, président du SNAD

- Mme Muriel OLIVIER, déléguée générale de la FNADE

TerraCycle

- Mme Lauriane PANNIER, responsable commerciale Europe

Comité français des plastiques en agriculture

- M. Bernard LE MOINE, délégué général

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA)

- M. Thierry COUÉ, vice-président

- Mme Audrey N'DIAYE, chargée de mission économie circulaire

Confédération paysanne

- M. Jean-François PÉRIGNÉ, secrétaire national

- M. Vincent DELMAS, porte-parole de la Confédération paysanne de la Drôme.

Mardi 1 er octobre 2019

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins

- M. Hubert CARRÉ, directeur général

- Mme Caroline TON, chargée de mission

Comité national de la conchyliculture

- M. Philippe LE GAL, président

- Mme Anne-Laure PREGO-CAUCHET, responsable des affaires européennes et institutionnelles

Coopération maritime

- M. Jean-Loup VELUT, secrétaire général

- Mme Mathilde GUEGUEN, chef de projet PechPropre

Armateurs de France

- Mme Nelly GRASSIN, responsable affaires techniques, sécurité, sûreté et environnement

- Mme Laurène NIAMBA, responsables affaires juridiques et fiscales

Direction des affaires maritimes (DAM)

- M. Thierry COQUIL, directeur, commissaire délégué aux transports maritimes et délégué à la mer et au littoral

Fédération des industries nautiques

- M. Guillaume ARNAULD DES LIONS, délégué général adjoint

- Mme Maud DUGOURD, responsable institutionnel et développement durable

Mercredi 16 octobre 2019

Coca-Cola European Partners France

- Mme Emmanuelle de KERLEAU, vice-présidente affaires publiques, communication et RSE

- M. Benoist BERTON, directeur stratégie packaging et économie circulaire

PepsiCo France

- Mme Caroline MISSIKA, head of public affairs, communication & CSR

- Mme Louise LE BRET, chargée de mission affaires publiques et RSE

Groupe Nestlé France

- M. Mathieu TUAU, directeur corporate packaging

- M. Fabio BRUSA, directeur des affaires publiques et européennes

Association nationale des industries alimentaires (ANIA)

- M. Antoine QUENTIN, directeur des affaires publiques

- Mme Victoire PERRIN, responsable des affaires publiques

- Mme Agathe CURY, directrice générale de Boissons rafraîchissantes de France

ELIPSO, les entreprises de l'emballage plastique et souple

- Mme Emmanuelle BUFFET, responsable des affaires réglementaires

- M. Sébastien JACQUES, chargé d'affaires publiques

- M. Gilles ISTIN, directeur commercial, marketing & innovation, Groupe Knauf Industries

- Mme Sophie GUILLIN-FRAPPIER, directeur général, Groupe Guillin

Mardi 22 octobre 2019

Fédération du commerce et de la distribution

- M. Philippe JOGUET, directeur développement durable, RSE et questions financières

- Mme Émilie TAFOURNEL, directrice qualité

- Mme Cécile ROGNONI, directrice des affaires publiques

Association des Centres Distributeurs - E. Leclerc

- M. Stephan ARINO, directeur qualité et développement durable

- M. Alexandre TUAILLON, chargé de mission auprès du président

Groupement Les Mousquetaires

- M. Frédéric THUILLIER, secrétaire général

- M. Olivier TOUZÉ, directeur qualité et développement durable

- M. Pierre DEGONDE, conseil auprès du groupement

Day by Day

- M. Didier ONRAITA-BRUNEAU, président

Mercredi 30 octobre 2019

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses)

- M. Roger GENET, directeur général

- M. Mathieu SCHULER, directeur de l'évaluation des risques

- Mme Anne BRISABOIS, directrice adjointe du Laboratoire de sécurité des aliments, responsable du site de Boulogne-sur-mer

- Mme Sophie LE QUELLEC, directrice de cabinet

- M. Matthieu COMBE, journaliste, fondateur du webzine Natura Sciences

Jeudi 31 octobre 2019

Fédération française du bâtiment

- Mme Stéphanie COULLON, ingénieure au service environnement

- Mme Annabelle LAVERGNE, chargée des relations parlementaires et institutionnelles

GTM bâtiment (filiale de Vinci construction France)

- Mme Anne COLAS, chef de service amélioration continue

- M. Marc-Antoine BOUILLET, conducteur de travaux principal

SERFIM Recyclage

- M. Raphaël GAS, directeur

Direction des constructions publiques et de l'architecture à la Ville de Paris

- M. Philippe CAUVIN, directeur

- Mme Isabelle LARDIN, ingénieur en chef

- M. Mustapha ZERRIAHEN, ingénieur

Comité des constructeurs français d'automobiles

- Mme Clémence LIEBERT, responsable de l'économie circulaire

- Mme Louise d'HARCOURT, chargée des affaires parlementaires

Fédération des industries des équipements pour véhicules (FIEV)

- M. Hugues BOUCHER, chargé d'affaires innovation et environnement

- M. Bertrand de La FOUCHARDIÈRE, vice-président en charge des affaires publiques

Volvo Car France

- M. Yves PASQUIER-DESVIGNES, président

- M. Marc DEBORD, directeur communication

- Mme Céline DOMECQ, director government affairs, head of EU office de Volvo Car Group

Mardi 5 novembre 2019

Fédération de la plasturgie et des composites

- M. Marc MADEC, directeur développement durable

- M. Jean MARTIN, délégué général

PlasticsEurope

- M. Éric QUENET, directeur général pour l'Europe de l'Ouest

- M. Hervé MILLET, directeur des affaires techniques et réglementaires

Mardi 12 novembre 2019

Groupe Michelin

- M. Éric LE CORRE, directeur des affaires publiques

- Mme Maud PORTIGLIATTI, directrice de la recherche avancée

- Mme Estelle PANIER, manager affaires publiques

Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA)

- Mme Hélène ORLIAC, directrice des affaires environnementales, économiques et internationales

- Mme Olivia GUERNIER, directrice des affaires publiques et de la communication

- Mme Anne DUX, directrice des affaires scientifiques et réglementaires

- Mme Carlota VICENTE, chargée des affaires environnementales

Procter & Gamble

- Mme Nicole SALDUCCI, responsable affaires réglementaires et scientifiques

- Mme Inge DEBACKER, responsable communication scientifique

- M. François de La FAIRE, directeur juridique et relations institutionnelles

L'Occitane en Provence

- M. Sylvain DESJONQUÈRES, directeur général du groupe

- Mme Raphaëlle ARCHAMBEAUD, directrice du développement durable

- Mme Corinne FUGIER GARREL, directrice de l'innovation packaging

- M. David BAYARD, directeur du développement packaging

- M. Jean-François GONIDEC, directeur général de Laboratoires M&L, en charge de la R&D et de la production pour le groupe

Jeudi 21 novembre 2019

Ministère des outre-mer

- M. Olympio KYPRIANOU, conseiller en charge de la transition écologique

- Mme Sandra-Élise REVIRIEGO, conseillère parlementaire

- Mme Valérie TERRAM, chargée de mission climat, déchets, eau

Syndicat national de l'alimentation et de la restauration rapide (SNARR) - Syndicat national de la restauration thématique et commerciale (SNRTC) - Syndicat national de la restauration collective (SNRC)

- Mme Kathy DIAZ, membre de la commission sûreté alimentaire du SNRC

- Mme Cerise DUCOS, responsable des affaires réglementaires du SNARR, du SNRTC et du SNRC

- Mme Esther KALONJI, déléguée générale du SNARR et du SNRC

- M. Éric Ledjou LAUBOUET, membre de la commission sûreté alimentaire du SNARR

- Mme Agnès THÉODOSE, déléguée générale du SNRTC

- M. Said OMARY, président de la commission sûreté alimentaire du SNRTC

Mardi 26 novembre 2019

SOS Mal de Seine

- M. Laurent COLASSE, responsable-fondateur

Commissariat général au développement durable (CGDD) au ministère de la transition écologique et solidaire

- Mme Diane SIMIU, directrice, adjointe au commissaire général

- M. Richard ROUQUET, conseiller économie verte et green deals

Mercredi 11 décembre 2019

Rencontre avec des chercheurs américains

- Mme Grace CHEN, assistant professor, department of plastic engineering

- M. Richard DICKINSON, division director - division of chemical, bioengineering, environmental and transport systems (CBET)

- M. Reto GIERÉ, professor and chair - department of earth and environmental science

- Mme Christine KNAUSS, graduate research assistant

- M. John E. WEINSTEIN, professor and head of the department of biology

- Mme Michelle WYMAN, executive director

- Mme Melissa BILEC, associate professor - department of civil and environmental engineering

- Mme Suzanne VAN DRUNICK, national program director

- M. Nikolai MAXIMENKO, senior researcher

- Mme Mary Ellen TERNES, partner

- M. Collin WARD, assistant scientist

Mardi 17 décembre 2019

AFISE - Association française des industries de la détergence

- Mme Virginie D'ENFERT, déléguée générale

- Mme Christelle HENRY, directrice développement durable et RSE

Mardi 14 janvier 2020

L'Oréal

- M. Philippe THUVIEN, directeur général packaging

- M. Denis SIMONNEAU, délégué général des relations institutionnelles

- M. Hervé TOUTAIN, senior vice-president, product stewardship & public affairs

- Mme Ariane THOMAS, directrice du développement stratégique des opérations

Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris)

- M. Éric THYBAUD, responsable du pôle « Dangers et impact sur le vivant » (VIVA)

Bpifrance

- M. Michel DAIGNEY, responsable sectoriel chimie-environnement

- M. Jean-Philippe RICHARD, directeur d'investissement au sein du Fonds sociétés de projets industriels (SPI)

- Mme Salomé BENHAMOU, chargée des relations institutionnelles

Jeudi 23 janvier 2020

Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH)

- M. Karim KHAN, président de la commission développement durable

- M. Laurent PRIGENT, chef de projet développement durable

- Mme Ophélie ROTA, directrice de la communication et des relations institutionnelles

Henkel

- M. Arndt SCHNEIDGEN, corporate vice-president de Henkel Düsseldorf

- M. Yves GAUTIER, directeur de la communication et des relations extérieures France & Benelux

- Mme Pauline DESMARAIS, responsable recherche et développement France pour la division détergents et produits d'entretien

Mercredi 29 janvier 2020

Ifremer

- M. François GALGANI, responsable de projet

Jeudi 30 janvier 2020

Veolia France Recyclage et Valorisation des déchets

- Mme Françoise WEBER, directrice des schémas de responsabilité élargie des producteurs (REP)

- Mme Peggy CODREANU, directeur département plastiques

- M. Dominique GÄTEL, directeur des affaires publiques pour l'eau

- Mme Marie-Thérèse SUART-FIORAVANTE, directrice des relations institutionnelles

- M. Jean-Christophe DELALANDE, responsable affaires publiques

Cerema

- M. Pascal BERTEAUD, directeur général

- M. Pierre-Yves BELAN, chef de division impacts environnementaux des activités à la direction eau, mer et fleuves

Direction générale de la prévention des risques (DGPR) au ministère de la transition écologique et solidaire

- M. Philippe BODÉNEZ, chef du service des risques santé-environnement, déchets et pollutions diffuses

Mardi 4 février 2020

Fédération des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC)

- M. Yohann BOILEAU, président de la commission environnement et développement durable

- Mme Anne-Charlotte WEDRYCHOWSKA, cheffe de service développement durable

- M. Jean-Michel ROSSIGNOL, responsable environnement du groupe Legrand

Samsung Electronics France

- Mme Alessandra CALZOLA, responsable développement durable

- Mme Florence CATEL, directrice des relations publiques

Ecosystem

- M. Guillaume DUPARAY, directeur du développement de la collecte et des relations institutionnelles

- M. Xavier LANTOINETTE, directeur technique adjoint

Ecologic France

- M. René-Louis PERRIER, président

- M. Quentin BELLET, responsable des affaires publiques

Loom

- Mme Julia FAURE, co-fondatrice de la marque Loom

Déplacement à Angers et Nantes

Mardi 11, mercredi 12 et jeudi 13 février 2020

Centre de traitement de dépollution d'eau (Vinci)

- M. Laurent DAMOUR, vice-président Angers Loire Métropole, chargé de l'eau, de l'assainissement et des eaux pluviales

- M. Jean-Louis DEMOIS, vice-président Angers Loire Métropole, chargé de l'environnement et des déchets

- M. Cyrille BADER, directeur environnement déchets Angers Loire Métropole

Coopérative des Vergers d'Anjou

- M. Albert RICHARD, président

- M. Jacques MALAGIÉ, directeur

Pom'évasion

- M. Olivier MAUGEAIS, directeur

- M. Pascal et Mme Stéphanie PINEAU, producteurs

Fédération régionale des producteurs de fruits

- M. Bruno DUPONT, président

- Mme Hélène PAUCET, animatrice

Veolia - Triade Électronique - Saint-Sylvain-d'Anjou

- M. Jean-Christophe MAILHAN, directeur du site d'Angers Triade Électronique

- M. Éric WASCHEUL, directeur des opérations de Triade Électronique

- Mme Françoise WEBER, directrice des schémas de responsabilité élargie des producteurs (REP)

- Mme Marie-Thérèse SUART-FIORAVANTE, directrice des relations institutionnelles Veolia Environnement

- M. Jean-Christophe DELALANDE, responsable affaires publiques, recyclage et valorisation des déchets France

- Mme Claire MÉTAIS, responsable régionale de la collecte Centre Ouest Écosystem

- M. Guillaume MEYNET, chargé de mission à la direction des affaires publiques Veolia Environnement

- Mme Marianne FLEURY, expert traitement D3E Écosystem

Université catholique de l'ouest (UCO)

- Mme Amélie CHATEL, enseignant-chercheur en écotoxicologie

- Mme Catherine MOUNEYRAC, vice-recteur

Conseil régional des pays de la Loire

- M. Jean-Michel BUF, conseiller régional, vice-président délégué à l'économie circulaire

- M. Éric LEROY, chercheur du CNRS - Université de Nantes

- M. Yann AMINOT, chercheur - Ifremer Atlantique

- Mme Aurore ZALOUK-VERGNOUX, maître de conférences - Université de Nantes

- M. Gérald THOUAND, professeur - Université de Nantes

- M. Johnny GASPERI, directeur de recherche IFSTTAR

- M. Jean-Marc BENGUIGUI, enseignant, École centrale de Nantes

- M. Bertrand HUNEAU, enseignant-chercheur - École centrale de Nantes

- M. Érik MOUILLÉ, président entreprise NAODEN

- M. Laurent GÉRAULT, élu en charge des thématiques de l'eau

- M. Thierry BURLOT, vice-président région Bretagne chargé de l'environnement

- Mme Lydie BERNARD, vice-présidente région Pays de la Loire

- M. Pierre SIEFRIDT, directeur adjoint DREAL Pays de la Loire

Arc-en-Ciel - Usine de valorisation des déchets - Couëron

- Mme Annaïg PESRET-BOUGARAN, directrice d'unité opérationnelle

- M. Olivier SCALLIET, directeur territoire Loire-Atlantique Vendée

- M. Philippe MAREST, directeur général de la transition écologique, énergétique et services urbains de Nantes Métropole

- Mme Mauricette CHAPALAIN, directrice du service des déchets à Nantes Métropole

- Mme Marie-Thérèse SUART-FIORAVANTE, directrice des relations institutionnelles Veolia Environnement

- M. Jean-Christophe DELALANDE, responsable affaires publiques recyclage et valorisation des déchets France à la direction des affaires publiques Veolia

- M. Guillaume MEYNET, chargé de mission à la direction des affaires publiques Groupe Veolia

Trioplast - Pouancé

- M. Thierry GAUCHET, directeur général Trioplast France

- Mme Anne-Laure GILLES, responsable produit Trioplast France

- Mme Lyna OULD-AMER, responsable marketing

- M. Vincent MOTTIER, responsable QSE

- Mme Marie MAUFFRET-VALLADE, sous-préfète de Segré-en-Anjou-Bleu

- Mme Marie-Jo HAMARD, maire d'Ombrée-d'Anjou, vice-présidente du département de Maine-et-Loire

- M. Pierrick ESNAULT, maire délégué de Pouancé

- M. Gérard MÉRET, secrétaire général Plasti Ouest

- M. François MÉNARD, délégué régional Plasti Ouest

Paprec Plastiques - Segré

- M. Olivier LECLERCQ, directeur territoire ouest division plastique

- M. Sébastien RICARD, directeur du développement durable et des affaires publiques

- Mme Agathe REMOUÉ, chargée des relations publiques

A.T.E - Agri Tube Extrusion

- M. William REFFUVEILLE, président

- M. Christophe BOUÉ, directeur technique

- M. Benoît HAMON, directeur développement

Versoo

- M. Xavier et Mme Valérie DELESALLE, directeurs

Déplacement au Centre de tri de collecte sélective (Paris 15 e ) et au Centre de traitement multifilière des déchets ménagers Isséane (Issy-les-Moulineaux)

Mardi 18 février 2020

Syctom

- M. Jacques GAUTIER, président

- M. Pierre HIRTZBERGER, directeur général des services techniques

- M. Romain PÉLISSOU, directeur recyclage et transport alternatif

Jeudi 20 février 2020

H&M France

- Mme Julie-Marlène PELISSIER, responsable sustainability & corporate engagement

- Mme Aurélie PRUVOST, sustainability manager

Eco TLC

- M. Alain CLAUDOT, directeur général

Jeudi 27 février 2020

Decathlon

- M. Raffaele DUBY, responsable développement durable pour l'offre et la conception

- M. Nirina RAMANOARIMANANA, responsable développement durable univers industriel plastique

Union Sport & Cycle

- Mme Claire RABÈS, directrice des affaires publiques & relations extérieures

Fédération française des industries Jouet-Puériculture (FJP)

- M. Michel MOGGIO, directeur général

- M. Martial DOUMERC, responsable qualité, sécurité, environnement

Office français de la biodiversité (OFB)

- M. Pierre-François STAUB, chargé de mission pollution des écosystèmes et métrologie

- Mme Bénédicte AUGEARD, chef du service mobilisation de la recherche

Déplacement à Orléans

Vendredi 28 février 2020

Groupe La Laiterie-Saint-Denis-de-L'Hôtel (LSDH)

- M. Emmanuel VASSENEIX, président et administrateur de l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA)

- Mme Graziella MELCHIOR, députée du Finistère

- Mme Victoire PERRIN, responsable des affaires publiques de l'ANIA

Déplacement au Mans et à Angers

Jeudi 5 et vendredi 6 mars 2020

Institut des molécules et matériaux du Mans (IMMM)

- M. Laurent FONTAINE, directeur, professeur

- Mme Fabienne LAGARDE-ABRIBAT, maître de conférences, chercheur

Ligépack

- Mme Sylvie MOISON-PICHARD, directrice générale

Bouvard-INPA

- M. Stéphane SÉJOURNÉ, président

Global Recov

- M. Nicolas RICHARD, directeur

Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe)

- M. Noam LEANDRI, secrétaire général

- M. Marc CHEVERRY, directeur économie circulaire et déchets

- Mme Isabelle DESPORTES, ingénieure

- Mme Émilie MACHEFAUX, chef de service

- Mme Alice GUEUDET, ingénieure

- M. Raphaël GUASTAVI, chef de service adjoint

- M. Sylvain PASQUIER, ingénieur

- M. Nicolas PETIT, ingénieur

- Mme Adeline PILLET, ingénieure

Visioconférences

Lundi 6 avril 2020

Carbios

- M. Jean-Claude LUMARET, directeur général

Carbiolice

- Mme Nadia AUCLAIR, présidente

Mardi 7 avril 2020

Réseau Environnement Santé (RES)

- M. André CICOLELLA, président

- Mme Pascale IOOS, chargée du dossier risques chimiques

Jeudi 9 avril 2020

Institut de Chimie de Clermont-Ferrand (ICCF) - SIGMA Clermont

- Mme Anne-Marie DELORT, directrice de recherche CNRS

- M. Boris EYHERAGUIBEL, chercheur

- M. Pierre AMATO, chercheur

Vendredi 10 avril 2020

École normale supérieure

- Mme Magali REGHEZZA, maître de conférences, directrice du Centre de formation sur l'environnement et la société (CERES)

Mardi 14 avril 2020

Université de Montpellier

- Mme Pascale FABRE, chercheur CNRS

- Mme Emmanuelle GASTALDI, maître de conférences

- M. Matthieu GEORGE, maître de conférences

Mercredi 15 avril 2020

Institut méditerranéen d'océanologie (M.I.O.)

- M. Richard SEMPÉRÉ, directeur

- M. Vincent FAUVELLE, chercheur

- M. Javier CASTRO JIMENEZ, chercheur

- Mme Mélanie OURGAUD, chercheure

Jeudi 16 avril 2020

Observatoire océanologique de Banyuls-sur-mer

- M. Jean-François GHIGLIONE, directeur de recherche CNRS

- M. Franck LARTAUD, directeur adjoint

- Mme Anne-Leila MEISTERTZHEIM, président-directeur général Plastic@Sea

Vendredi 17 avril 2020

Centre de formation et de recherche sur les environnements méditerranéens (Cefrem)

- M. Wolfgang LUDWIG, directeur

- Mme Lisa WEISS, doctorante

- M. Mel CONSTANT, doctorant

- M. Philippe KERHERVÉ, enseignant-chercheur

Lundi 20 avril 2020

Institut de Chimie de Clermont-Ferrand (ICCF) - SIGMA Clermont

- M. Mohamad SLEIMAN, maître de conférences, chargé de mission innovation pédagogique

Club Bio-plastiques

- M. Christophe DOUKHI-de BOISSOUDY, président

Mardi 21 avril 2020

Laboratoire Géosciences Rennes (UMR6118 CNRS/Université de Rennes1)

- M. Julien GIGAULT, CNRS research scientist

École des hautes études en santé publique (EHESP)

- M. Bernard JÉGOU, directeur de la recherche

Jeudi 23 avril 2020

Centre technique de la conservation des produits alimentaires (CTCPA)

- M. Philippe SAILLARD, expert en alimentarité des emballages

- M. Patrice DOLE, directeur de la recherche

Vendredi 24 avril 2020

Amorce

- M. Nicolas GARNIER, délégué général

Lundi 27 avril 2020

Centre de documentation, de recherches et d'expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre)

- Mme Camille LACROIX, ingénieure

- M. Loïc KERAMBRUN, responsable scientifique et technique et responsable de l'activité déchets aquatiques

Mardi 28 avril 2020

Confédération des métiers de l'environnement et du comité stratégique de filière traitement et valorisation des déchets

- M. Dominique MAGUIN, président de la CME

- M. Roland MARION, délégué permanent CSF transformation et valorisation des déchets et délégué général de la CME

- Mme Kako NAIT ALI, ingénieur matériaux de génie civil et docteur en chimie des matériaux

Lundi 4 mai 2020

Ifremer

- M. François HOULLIER, président-directeur général

- M. René GARELLO, professeur, enseignant-chercheur - IMT Atlantique Bretagne-Pays de Loire

- M. Christophe MAES, chercheur - Institut de recherche pour le développement (IRD)

- M. Arnaud HUVET, chercheur

- M. Kévin TALLEC, doctorant

- Mme Maelenn LE GALL, ingénieure

- Mme Enora PRADO, chargée de recherches

- Mme Maria EL RAKWE, chercheur

- Mme Gaël DURAND, directrice déléguée à la recherche et au développement (Labocea Bretagne océane)

Mardi 5 mai 2020

Cerema

- M. Joël LHER, directeur du département environnement et risques

- M. Florian ROGNARD, responsable d'étude environnement

AgroParisTech

- Mme Sandra DOMENEK, enseignant-chercheur

- M. Thomas KARBOWIAK, maître de conférences

- M. Stéphane BRUZAUD, professeur des universités

LEESU, École des Ponts ParisTech

- M. Bruno TASSIN, directeur de recherche

Mardi 12 mai 2020

Association MerTerre - ODEMA (Observatoire des déchets en milieux aquatiques)

- Mme Isabelle POITOU, directrice

WWF France

- Mme Juliette KACPRZAK, chargée de plaidoyer et campagnes

- M. Denis ODY, responsable programme cétacés

Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines

- M. Mateo CORDIER, maître de conférences

Jeudi 14 mai 2020

Institut de chimie de Clermont-Ferrand (ICCF) - SIGMA Clermont

- M. Vincent VERNEY, chercheur

Reporters du Large SAS

- M. Fabrice AMEDEO, journaliste du quotidien Le Figaro et navigateur

- Mme Catherine CHABAUD, députée européenne et navigatrice

Lundi 18 mai 2020

Centre de sociologie des organisations (Sciences Po/CNRS)

- Mme Sophie DUBUISSON-QUELLIER, directrice adjointe, directrice de recherche CNRS

Queen's University, Canada

- Mme Myra J. HIRD, professor, School of environmental studies

Université de Bordeaux

- M. Jérôme CACHOT, enseignant-chercheur

- Mme Pauline PANNETIER, chercheuse - University of Heidelberg

- Mme Bénédicte MORIN, enseignant-chercheur, maître de conférences

- M. Florane LE BIHANIC, environmental toxicologist

Mardi 19 mai 2020

UMR 1208 IATE (CIRAD, INRAe, Montpellier SupAgro, Université de Montpellier)

- Mme Nathalie GONTARD, directrice de recherche - INRAe

- M. Sébastien GAUCEL, ingénieur de recherche - INRAe

- M. Stéphane PEYRON, maître de conférences - Université de Montpellier

- Mme Valérie GUILLARD, professeur - Université de Montpellier

- Mme Hélène ANGELIER COUSSY, maître de conférences - Université de Montpellier

Mardi 26 mai 2020

Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines

- M. Juan BAZTAN, chercheur en sciences de l'environnement

Syndicat national des régénérateurs de matières plastiques (SRP)

- M. François AUBLÉ, président de VEKA Recyclages

- M. Robert DJELLAL, directeur général SRP

Jeudi 28 mai 2020

Laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE)

- M. Thierry VINCELOT, responsable du département chimie des matériaux

- M. Jean-Mario JULIEN, ingénieur R&D

- Mme Catherine LORIOT, coordinatrice du RMT Propackfood

- M. Didier MAJOU, directeur de l'Association de coordination technique pour l'industrie agro-alimentaire (ACTIA)

Institut national de la recherche agronomique (INRAE)

- M. Christian MOUGIN, directeur de recherche

Syctom

- M. Jacques GAUTIER, président

- M. Martial LORENZO, directeur général des services

- M. Pierre HIRTZBERGER, directeur général des services techniques

- Mme Catherine BOUX, directrice générale adjointe

Jeudi 4 juin 2020

Ifremer - Plateforme écophysiologique des poissons (PEP)

- M. Xavier COUSIN, chercheur

CNRS

- Mme Martine HOSSAERT, directrice de recherche

Reseaclons

- M. Edmond MILLET, président

- M. Xavier MURARD, co-directeur opérations

- Mme Marie-Laure BAROIS BOUGIER, co-directrice opérations

- M. Pablo OLLIVER, conseiller stratégique

Institut marin du Seaquarium

- Mme Pauline CONSTANTIN, chargée de projet

Trivéo

- M. Cyril KRETZSCHMAR, président

Vendredi 5 juin 2020

The Ocean Cleanup

- M. Laurent LEBRETON, océanographe

Groupe français des polymères

- Mme Sophie GUILLAUME, présidente, directrice de recherche CNRS

- M. Michel BOUQUEY, secrétaire général, enseignant-chercheur CNRS

- M. Jean-François GÉRARD, enseignant-chercheur - INSA Lyon

- M. Robert PELLETIER, professeur, maître de conférences

Université Paris-Saclay/Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines

- M. Jean-Paul VANDERLINDEN, professeur en économie écologique et études de l'environnement

Lundi 8 juin 2020

Schweitzer SAS (Groupe Sphère)

- M. Louis LEBON, président

- M. John PERSENDA, fondateur et président-directeur général du groupe Sphère

- M. Jean-Marc NONY, directeur du développement durable du groupe Sphère

Innovation Plasturgie Composites

- M. Gilles DENNLER, directeur de recherche

Université Paul Sabatier de Toulouse

- Mme Alexandra TER HALLE, chercheuse

Mardi 9 juin 2020

- M. François-Michel LAMBERT, député des Bouches-du-Rhône, auteur du rapport « Stop aux pollutions plastiques »

Ville de Paris

- M. Paul SIMONDON, adjoint à la maire de Paris chargé de la propreté et de la gestion des déchets

- Mme Aurélie SOLANS, conseillère déléguée chargée de l'environnement auprès de l'adjointe à la maire en charge de l'environnement, du développement durable, de l'eau, de la politique des canaux et du plan climat

- Mme Marie ALLANIC, responsable des contrats complexes au pôle juridique

- M. Boris VASSAUX, chef de projet héritage à la Délégation générale aux Jeux olympiques et paralympiques et aux grands événements

- M. Bertrand DAUTZENDBERG, ex-pneumologue APHP - Professeur émérite Sorbonne Université

Vendredi 12 juin 2020

Ifremer Tahiti

- M. Gilles LE MOULLAC, chercheur

- M. Tony GARDON, chercheur

- M. Yann WEHRLING, ambassadeur de France chargé des questions d'environnement

- Mme Marie-Claire LHENRY, responsable de la cellule des affaires européennes et internationales de la Direction générale de la prévention des risques

France Chimie

- Mme Marie ZIMMER, responsable management des produits

- M. Constantin DALLOT, toxicologue expert santé-environnement

- Mme Marion BOUISSOU-THOMAS, directrice des affaires publiques

Lundi 15 juin 2020

- Mme Laurianne ROSSI, députée des Hauts-de-Seine, questeure, rapporteure de la mission d'information sur les perturbateurs endocriniens dans les contenants plastiques

- Mme Claire PITOLLAT, députée des Bouches-du-Rhône, rapporteure de la mission d'information sur les perturbateurs endocriniens dans les contenants plastiques

- M. Michel VIALAY, député des Yvelines, président de la mission d'information sur les perturbateurs endocriniens dans les contenants plastiques

Laboratoire d'océanographie de Villefranche-sur-mer

- Mme Maria Luiza PEDROTTI, chercheuse

Suez Recyclage et valorisation France

- M. Olivier VILCOT, directeur de la division Plastiques

- M. Aurélien TOUPET, directeur tri mécanique

- M. Laurent BRUNET, directeur technique - Suez Eau France

- Mme Nora MEGDER, directrice déléguée aux relations institutionnelles

- M. Hugues D'ANTIN, directeur délégué aux relations institutionnelles

Mardi 16 juin 2020

Université de Picardie - Jules Verne

- M. Denis BLOT, maître de conférences en sociologie

Haute école d'ingénierie et de gestion du canton de Vaud

- M. Julien BOUCHER, chargé de recherche appliquée et développement

- M. Damien FRIOT, chargé de cours à l'École polytechnique de Lausanne

Jeudi 18 juin 2020

École des mines d'Alès

- M. José-Marie LOPEZ-CUESTA, directeur du centre des matériaux des mines d'Alès

No plastic in my sea

- Mme Muriel PAPIN, déléguée générale

Citeo

- M. Antoine ROBICHON, directeur général adjoint

- M. Nicolas FURET, secrétaire général

Vendredi 19 juin 2020

- M. Bernard DEFLESSELLES, député des Bouches-du-Rhône, et Mme Caroline JANVIER, députée du Loiret, auteurs d'un rapport d'information sur la stratégie européenne sur les matières plastiques

Empa-Swiss Federal Laboratories for Materials Science and Technology

- Mme Véronique ADAM, postdoc researcher

- M. Berndt NOWACK, environmental risk assessment and management group

Lundi 22 juin 2020

Métropole de Lyon

- M. Thierry PHILIP, vice-président

- M. Christian DEBIESSE, directeur de la direction de l'eau et des déchets

Université de Pau et des Pays de l'Adour (UPPA)

- M. Bruno GRASSL, professeur

- Mme Stéphanie REYNAUD, chargée de recherche

BASF France

- Mme Stéphanie MARTEL, directrice affaires publiques, communication et développement durable

- M. Ewen CHESNEL, responsable affaires publiques et politiques environnementales

Groupement des marques d'appareils pour la maison (GIFAM)

- Patrick LE DEVÉHAT, directeur technique

- Mme Alexandrine FADIN, responsable développement durable

Mardi 23 juin 2020

Aix-Marseille Université

- Mme Sandrine MALJEAN-DUBOIS, directrice de recherche

- Mme Pascale RICARD, chargée de recherche au CNRS

Association scientifique et technique pour l'eau et l'environnement (Astee)

- Mme Christine GANDOUIN, fondatrice, animatrice du groupe de travail « Plastiques »

Agence de l'eau Loire-Bretagne

- M. Martin GUTTON, directeur général

Jeudi 25 juin 2020

Inserm - Institut thématique Santé publique

- M. Rémy SLAMA, directeur

Agence française du développement

- M. Gilles KLEITZ, directeur agriculture, eau, biodiversité

Université Lyon 2

- Mme Laurence ROCHER, maître de conférences

Lundi 29 juin 2020

Laboratoire MAPIEM - Matériaux Polymères Interfaces Environnement Marin (Université de Toulon)

- Mme Lénaïk BELEC, assistant professor

INRA - AgroParisTech

- Mme Sabine HOUOT, directrice de recherche

Plastipolis

- Mme Emmanuelle BOUVIER, présidente

- M. Patrick VUILLERMOZ, directeur général

- M. Jean-Jacques LEGAT, directeur technique et industriel

Métropole Aix-Marseille

- M. Victor TOBIA, directeur adjoint de la propreté et du cadre de vie

- M. Vincent OCHIER, chef de service plan de prévention des déchets & économie circulaire

Mardi 30 juin 2020

Agence nationale de la recherche (ANR)

- M. Frédéric MONOT, responsable du département environnements, écosystèmes, ressources biologiques

- M. Jérôme FERRAND AMMAR, chargé de mission auprès de la direction générale

Ville de Roubaix

- M. Alexandre GARCIN, adjoint au maire, chargé du développement durable, du numérique et de la modernisation de l'administration

Grand Besançon métropole

- Mme Marie-Laure JOURNET-BISIAUX, directrice de la gestion des déchets

Ville de Colmar

- M. Laurent OTT, chargé de la gestion des déchets

Jeudi 2 juillet 2020

Union des industries textiles de France (UIT)

- Mme Vanessa de SAINT-BLANQUAT, directrice générale de l'UIT

- Mme Karine SFAR, directrice générale de la Fédération de la maille, de la lingerie & du balnéaire

- M. Jacques-Hervé LÉVY, directeur général de l'Institut français du textile et de l'habillement (IFTH)

IFP Énergies nouvelles

- M. Jean-Christophe VIGUIÉ, responsable de programme biomasse vers chimie

- M. Fabrice BERTONCINI, responsable de programme recyclage des plastiques

- Mme Anne-Laure de MARIGNAN, chargée des relations institutionnelles

Laboratoire REGARDS - Faculté des sciences économiques, sociales et de gestion

- M. Baptiste MONSAINGEON, maître de conférences

Lundi 6 juillet 2020

Port de plaisance de La Rochelle

- M. Bertrand MOQUAY, directeur

- Mme Angélique FONTANAUD, responsable QSE du port de plaisance

- M. David BEAULIEU, directeur-fondateur de l'association Écho-Mer

- Mme Vanessa WARSKI, chargée de mission « Circular seas » à l'agglomération de La Rochelle

Port de plaisance de Port Camargue

- M. Michel CAVAILLÈS, directeur

France Urbaine

- M. Jean-Patrick MASSON, conseiller délégué à l'environnement et aux déchets ménagers de Dijon Métropole, adjoint au maire de Dijon

- Mme Delphine BOURDIN, conseillère développement durable, ESS et Europe

Mardi 7 juillet 2020

Association des maires de France (AMF)

- M. Nicolas SORET, maire de Joigny, président de la communauté de communes du Jovinien, vice-président de l'Association des petites villes de France

- Mme Charlotte OBERLÉ, chargée de mission

Association des petites villes de France (APVF)

- M. Sacha BENTOLILA, conseiller relations avec le Parlement

Assemblée des départements de France (ADF)

- Mme Valérie NOUVEL, vice-présidente du conseil départemental de la Manche, en charge de la transition énergétique, de l'environnement et d'innovation

Association des régions de France (ARF)

- M. Jean-Michel BUF, conseiller régional des Pays de la Loire, vice-président délégué à l'économie circulaire

Grand port maritime de Marseille

- Mme Magali DEVÈZE, chef de département valorisation domaniale et développement durable

Jeudi 9 juillet 2020

Vinci Autoroutes

- Mme Hélène LOHR, directrice du développement durable

- Mme Bernadette MOREAU, déléguée générale de la Fondation Vinci Autoroutes

Total Raffinage-Chimie

- Mme Valérie GOFF, directrice polymères

- M. Bernard HOFFAIT, directeur des relations institutionnelles

Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)

- M. Mathieu SCHULER, directeur de l'évaluation des risques

- M. Guillaume DUFLOS, adjoint au chef de département des produits de la pêche et de l'aquaculture - Laboratoire de sécurité des aliments, site de Boulogne-sur-mer

- Mme Sophie LE QUELLEC, directrice de cabinet

- Mme Sarah AUBERTIE, chargée des relations institutionnelles

École normale supérieure de Lyon

- M. Romain j. GARCIER, docteur en géographie, maître de conférences

- Mme Fanny VERRAX, spécialiste environnement et déchets

Vendredi 10 juillet 2020

Laboratoire Pacte, laboratoire de sciences sociales

- M. Pierre DESVAUX, chercheur associé

Métropole européenne de Lille

- Mme Muriel ARNAUD, directrice déchets ménagers

- M. Julien KOESTEN, directeur adjoint

Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (SNITEM)

- Mme Cécile VAUGELADE, directrice des affaires technico-réglementaires

- Mme Marie TOURRET, responsable des affaires publiques

Restoria

- M. Emmanuel SAULOU, codirigeant

Mercredi 15 juillet 2020

Commission européenne

- M. Mattia PELLEGRINI, chef de l'unité « Waste management & secondary materials » de la direction générale environnement

Institut de l'Ouest Droit & Europe - UMR 6262 CNRS - Université de Rennes 1

- Mme Nathalie HERVÉ-FOURNEREAU, directrice de recherche CNRS

- Mme Alexandra LANGLAIS, chargée de recherche CNRS

- Mme Marion LEMOINE-SCHONNE, chargée de recherche CNRS

Jeudi 16 juillet 2020

Break free from plastic

- Mme Delphine LÉVI ALVARÈS, coordinator

Commission européenne

- M. Panagiotis BALABANIS, directeur général research & innovation, deputy head unit eco-innovation

- Mme Emmanuelle MAIRE, cheffe de l'unité production, produits et consommation durables à la direction générale environnement

- Mme Sieglinde GRUBER, cheffe d'unité santé des océans et des mers

- M. Hans-Christian EBERL, policy officer RTD/C.1.

HAROPA - Ports de Paris

- Mme Catherine RIVOALLON, présidente du GIE HAROPA et présidente du Port autonome de Paris

- M. Gauthier POURCELLE, chargé de l'innovation et de la transition écologique au sein du GIE HAROPA

- Mme Alix de GUERRE, chef de cabinet

Direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI) au ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation

- Mme Marie-Hélène TUSSEAU-VUILLEMIN, directrice scientifique

Les Entreprises du Médicament - LEEM

- M. Thomas BOREL, directeur recherche, innovation, santé publique et engagement sociétal

- M. Laurent GAINZA, directeur des affaires publiques

- Mme Julie LANGEVIN, responsable RSE

- M. Pierre THEBAULT, chargé de conception packaging chez Pierre Fabre

Vendredi 17 juillet 2020

SERAMM - SERvice d'Assainissement de Marseille Métropole

- M. Yves FAGHERAZZI, directeur général

- M. Dominique LAPLACE, directeur scientifique et innovation

Groupe ADP

- Mme Amélie LUMMAUX, directrice du développement durable et des affaires publiques

- M. Yannaël BILLARD, responsable département environnement-énergie

Réseau Compost Plus

- M. Mathilde BORNE, déléguée générale

SMICVAL

- M. Nicolas SÉNÉCHAU, directeur général

Lorient Agglomération

- M. Sébastien LEJAL, chargé des exploitations à la direction réduction et valorisation des déchets

- M. Vincent GADONNA, responsable traitement et valorisation des déchets

- M. François GROSSE, consultant et entrepreneur.


* 1 Geyer, R., Jambeck, J. & Law, K. L. (2017). Production, use, and fate of all plastics ever made. Science Advances, 3(7).

* 2 Ellen Mac Arthur Foundation : the new plastics economy, rethinking the future of plastics, 2016.

* 3 Ocean conservancy : endiguer la marée : stratégies terrestres pour un océan sans plastiques.

* 4 Granulés de polymère, matières premières pour la fabrication des résines.

* 5 Loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales entre le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 6 Cependant cette opération ne peut être répétée qu'un nombre limité de fois au risque de voir le polymère perdre ses propriétés initiales. Par ailleurs, c'est la totalité du plastique qui est retransformée avec ses additifs et ses charges.

* 7 Il s'agit donc de carbone renouvelable à la différence du précédent.

* 8 Elle se vérifie par la présence de l'isotope 14 du carbone (C 14 ) qui est absent du pétrole.

* 9 Une présentation plus détaillée de l'action des micro-organismes est présentée au D du II du rapport.

* 10 Plus la surface d'interaction avec le milieu sera importante, plus la dégradation sera rapide.

* 11 ATP : adénosine triphosphate qui représente l'énergie cellulaire.

* 12 La température du sol est fixée à 25°C, avec une température minimale de 20°C et une température maximale de 28°C.

* 13 Substances qui, sans subir de transformation visible, provoquent ou accélèrent les réactions.

* 14 La bakélite a été créée en 1907 par le chimiste belgo-américain Leo Baekeland.

* 15 PlasticsEurope avance un chiffre de 359 millions de tonnes. Toutefois, ne sont pas inclus dans ce chiffre les plastiques pour le textile (62 millions de tonnes) ni les caoutchoucs synthétiques pour les pneumatiques (17 millions de tonnes).

* 16 Atlas du plastique : faits et chiffres sur le monde de polymères synthétiques, 2020.

* 17 La part de la consommation de PET, résine particulièrement utilisée pour les bouteilles d'eau, est ainsi de 10 % en France contre 7 % en moyenne au niveau de l'Union européenne.

* 18 Ellen Mac Arthur Foundation : the new plastics economy, rethinking the future of plastics, 2016.

* 19 Denkstatt : l'impact du cycle de vie des emballages plastiques sur la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre en Europe, juillet 2011.

* 20 Geyer, R., Jambeck, J. R., & Law, K. L. (2017). Production, use, and fate of all plastics ever made. Science Advances, 3(7).

* 21 WWF : Pollution plastique, à qui la faute? 2019.

* 22 Le volume de déchets plastiques pour 2016 est évalué à 242 millions de tonnes dans la publication de la Banque mondiale de 2018 intitulée « Quel gâchis 2.0 : un aperçu global de la gestion des déchets solides jusqu'en 2050 ». Il a été calculé en pourcentage de l'ensemble des déchets solides (12 %) selon la méthode retenue par Roland Geyer et Jenna Jambeck.

* 23 WWF : arrêter le flux de plastiques : comment les pays méditerranéens peuvent sauver leur mer ? 2019.

* 24 En réalité, seule la production des six résines polyoléfines les plus utilisées est comptabilisée (PP, PEHD, PEBD, PET, PVC et PS). Comme il a été indiqué précédemment, les polyoléfines représentent 80 % de la production de plastiques.

* 25 Chiffres de PlasticsEurope.

* 26 Delphine Kawecki et Bernd Nowack : “Polymer-specific modelling of the environmental emission of seven commodidy plastic as macro-and microplastics”, Environmental Science &Technology, 2019, 53.

* 27 PE, PP, PEBD, PEHD, PVC, PS et PSE.

* 28 1 On-the-go consumption: for PET, PEHD, PP, PEBD, PS, and PVC ; 2 Postconsumer processes: for PVC, PEHD, EPS, PP, and PS ; 3 Use of plastic in agriculture: for PEBD and PP ; 4 Construction and demolition sites: for PVC, PEHD,EPS, and PS ; 5 Flushing of hygiene products: for PEHD, PET, and PP ; 6 Collection with organic waste: for PP, PEHD, PEBD, PET, and PS ; 7 Textiles : for PET and PP.

* 29 Le rapport traite de l'ensemble des déchets solides et pas seulement des déchets plastiques. Néanmoins, les analyses restent pertinentes pour comprendre les difficultés auxquelles sont confrontés les pays en développement pour la gestion de leurs déchets.

* 30 Il s'agit essentiellement de pays africains à l'exception de l'Algérie, de la Libye, du Gabon, de l'Angola, de la Namibie, du Botswana, de la Mauritanie, de la Côte d'Ivoire du Ghana, du Nigéria, du Togo, du Cameroun, de la Guinée équatoriale, de la République du Congo, de la Zambie, du Soudan, de l'Égypte, du Yémen, du Kenya et de l'Afrique du Sud.

* 31 La production de déchets augmente à un rythme plus rapide lorsque l'augmentation des revenus concerne les plus bas de ces revenus (plus rapide que lorsqu'elle concerne les revenus les plus élevés).

* 32 Zone géographique définie par la Banque mondiale.

* 33 Ces études reprennent à chaque fois le modèle développé par l'étude précitée de 2015 produite par Jenna Jambeck et Roland Geyer.

* 34 Le Sri Lanka a contesté officiellement les chiffres de cette étude et a été retiré de ce classement par des études ultérieures.

* 35 Ocean conservancy : endiguer la marée : stratégies terrestres pour un océan sans plastiques.

* 36 Classification de la Banque mondiale : le revenu par habitant est compris entre 1 026 et 4 035 dollars par an.

* 37 Le revenu par habitant est compris entre 4 036 et 12 435 dollars par an.

* 38 Winnie W.Y and all: “Evaluating scenarios toward zero plastic pollution”, Science, 18 septembre 2020.

* 39 La Chine acceptait des taux d'impureté dans les balles importées de 4 à 5 %. Désormais, le taux est fixé à 0,5 %. L'annonce a été faite en mai 2017.

* 40 La majorité du plastique importé par Hong-Kong ne faisait que transiter dans ce pays et était réacheminé vers la Chine.

* 41 Chargé de recherche appliquée et développement, Haute école d'ingénierie et de gestion du canton de Vaud.

* 42 Les divergences d'appréciation dans la définition des tailles des micro et nanoplastiques sont expliquées dans la partie V-D-4-b.

* 43 Plastic Pellets in the Aquatic Environnement Sources and Recommandations.

* 44 Association SOS Mal de Seine : « Granulés plastiques industriels sur le littoral français », mai 2009.

* 45 Étude menée par Eumonia en 2018 qui établit une fourchette comprise entre 3 000 et 78 000 tonnes.

* 46 Inner City Fund: investigating options for reducing releases in the aquatic environment of microplastics emitted by (but not intentionally added in) products, février 2018.

* 47 Convention pour la protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est.

* 48 Elle se compose d'une matrice en polymère synthétique dénommée caoutchouc styrène-butadiène (environ 60 % dans les pneumatiques des voitures) incorporée à un mélange de caoutchouc naturel et de nombreux autres additifs. La proportion du caoutchouc de synthèse varie avec les exigences de résistance à l'échauffement (pneumatiques utilisés pour équiper les avions ou les engins de génie civil).

* 49 Kole and al, 2019.

* 50 Frank Sommer and al: Tire abrasion as a major source of microplastics in the environment ; Aerosol and Air quality research, 2018. Les filtres ont été installés à 1,5 m de hauteur et à 4,6 m des routes étudiée.

* 51 Yaping Cai and al: Systematic Study of Microplastic Fiber Release from 12 different Polyster Textiles during washing ; Environmental Science & Technology, 6 avril 2020.

* 52 Johnny Gasperi, Laboratoire Eau, Environnement et Systèmes Urbain.

* 53 Laboratoire d'océanographie de Villefranche-sur-mer.

* 54 Giuseppe Suaria et al: Microfibers in oceanic surface waters: A global characterization; Science Advances, 5 juin 2020.

* 55 La modélisation est un outil d'analyse largement utilisé pour quantifier les sources de pollution, mais les résultats qui en sont issus doivent être confrontés avec des observations in situ pour vérifier leur pertinence. Plusieurs chercheurs nous ont fait part des discrépances constatées entre les chiffres avancés par modélisations et ceux résultant des observations sur le terrain.

* 56 John E. Weinstein, Professor and Department Head, Biology, Citadel.

* 57 Julien Boucher, Damien Frot : microplastiques primaires dans les océans : évaluation mondiale des sources, 2017. Cette étude ne fait pas l'unanimité au sein de la communauté scientifique dans la mesure où elle considère que les microplastiques issus des sept sources retenues sont des microplastiques primaires, alors qu'il conviendrait de les considérer comme des microplastiques secondaires, ce qui a été fait dans ce rapport. Toutefois, ce différend sur la qualification des microplastiques n'a pas d'impact sur les ordres de grandeur avancés pour la quantification de certaines pollutions par les microplastiques. Le rapport reprend ces chiffres avec les réserves d'usage liées aux chiffres émanant de modélisations.

* 58 Gigault, J., and al, “Current opinion: what is a nanoplastic?”, Environmental Pollution, 2018.

* 59 Une solution colloïdale est un mélange liquide qui contient des particules dispersées et en suspension. Ces particules ont une taille, nanométrique à micrométrique, qui permet au mélange de demeurer homogène. Le lait est une solution colloïdale composée de lipides en suspension dans de l'eau.

* 60 Gigantesques tourbillons d'eau formés d'un ensemble de courant marins (voir infra ).

* 61 Professeur à l'université de Pau et des pays de l'Adour.

* 62 L'oxydation est une réaction chimique par laquelle la matière oxydée perd des électrons, un atome ou une molécule.

* 63 L'hydrolyse est une réaction chimique au cours de laquelle il y a rupture de liaisons atomiques d'une molécule provoquée par la présence d'eau.

* 64 Maelenn Le Gall, Ifremer.

* 65 Collin Ward, Assistant Scientist, Department of Marine Chemistry & Geochemistry, Woods Hole Oceanographic Institution.

* 66 Vos rapporteurs ont constaté qu'il ne s'agissait pas d'un phénomène isolé. En l'absence de données suffisante, il arrive souvent qu'un chiffre soit lancé sans véritable base scientifique, puis qu'il soit repris par l'ensemble des parties prenantes (la communauté scientifique, les associations, les pouvoirs publics). Il en est ainsi pour les parts respectives des activités terrestres et maritimes comme sources de la pollution plastique des mers et des océans. Cette proportion est habituellement fixée à 80 % et 20 % (respectivement pour la part terrestre et maritime) sans qu'aucune démonstration scientifique vienne démontrer cette assertion. Il en est de même pour la quantité de 5 grammes de plastiques qui serait ingérée chaque semaine par tout individu.

* 67 87 % des déchets recueillis sur le littoral sont en plastique. 5 % sont en caoutchouc (constituent élastiques utilisés pour la conchyliculture).

* 68 Le droit de la mer autorise de jeter un container à la mer pour sauver le navire du naufrage.

* 69 Expédition MED - Stop plastic in the sea : opération déchets côtiers, rapport sur l'arc atlantique de 2016. 14 plages du littoral Atlantique entre Brest et Mimizan ont fait l'objet d'une campagne de collecte et de caractérisation des déchets.

* 70 Les déchets « gérés inadéquatement » correspondent aux déchets entreposés dans des décharges à ciel ouvert ou non contrôlées, ou encore rejetés dans l'environnement, dans les cours d'eau ou dans la mer.

* 71 Le modèle développé est basé sur la théorie de la courbe environnementale de Kuznets en U-inversé. Appliquée au domaine des macrodéchets plastiques mal gérés, cette théorie repose sur les deux postulats suivants : 1) dans la phase de croissance d'un pays, la quantité de déchets mal gérés augmente à mesure que le revenu par habitant croît et 2) passé un certain niveau de revenu par habitant, la quantité de déchets mal gérés par habitant diminue en raison d'une augmentation des investissements environnementaux (préoccupation vis-à-vis des conditions d'existence et moyens économiques plus importants pour investir dans les technologies vertes). Le modèle simule comment les variables prises en compte modifient cette théorie.

* 72 Ouverture le long d'un trottoir servant à évacuer les eaux de ruissellement vers l'égout.

* 73 Plus généralement, les phénomènes climatiques extrêmes (comme les tempêtes ou les submersions marines) favorisent la mobilisation, le transfert et le brassage des déchets plastiques entre les différents continents.

* 74 Edward Carpenter, K.L. Smith: « Plastics on the Sargasso Sea surface » ; Sciences, 1972.

* 75 Cellules « de Hadley » à l'équateur, « de Ferrel » dans les zones tempérées et cellules polaires aux pôles.

* 76 Laurent Lebreton et al: Evidence that the Great Pacific Garbage Patch is rapidly accumulating plastic, scientific reports, 22 mars 2018.

* 77 C'est le cas dans toutes les autres zones de concentration.

* 78 En comparaison à la densité d'organismes planctonique, cette concentration revient à dire que l'on compte 2,7 particules de plastique pour 1 organisme planctonique.

* 79 Ce chiffre ne concerne que six sources de pollution par les microplastiques : l'abrasion des pneus, le relargage de fibres synthétiques, les peintures utilisées pour les bateaux, les cosmétiques, les granulés industriels et les poussières urbaines.

* 80 Le pourcentage varie selon les hypothèses retenues. Le chiffre d'1 % est souvent avancé. Il repose sur l'hypothèse d'un relargage dans l'océan de 15 millions de plastiques par an et la présence de 150 000 tonnes de plastiques à la surface des océans.

* 81 Film de Vincent Pérazio sorti en 2016.

* 82 Ian Kane et al: « Seafloor microplastic hotspots controlled by deep-sea circulation », Science, 5 juin 2020.

* 83 La circulation thermohaline est la circulation océanique engendrée par les différences de densité de l'eau de mer, qui proviennent des écarts de température et de salinités des masses d'eau.

* 84 Institut de recherche pour le développement.

* 85 Projet de recherche porté par le Centre de documentation, de recherches et d'expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre), l'IMRCP (laboratoire des interactions moléculaires et réactivité chimique et photochimique) et le LOMIC (laboratoire d'océanographie microbienne).

* 86 Schmidt C, Krauth T, Wagner S (2017): Export of Plastic Debris by rivers into the sea; Environmental Science & Tecnology.

* 87 Laurent Lebreton et al (2017): « River plastic emissions to the world's oceans; Nature communications.

* 88 Wolgang Ludwig, directeur du CEFREM, et Lisa Weiss, doctorante.

* 89 Dris et al., 2015.

* 90 Constant et al., 2020.

* 91 Projet commandé par le ministère de la transition écologique et solidaire qui s'est déroulé entre octobre 2017 et septembre 2019.

* 92 Directeur de recherche à l'INRAe.

* 93 Colloque organisé à l'initiative de l'Association pour la Recherche en Toxicologie (ARET).

* 94 Particules.

* 95 Sanchez Hernandez et al 2020.

* 96 Réseau de sites de recherche en écotoxicologie pour suivre, comprendre et atténuer les impacts éco-toxicologiques des polluants dans les écosystèmes.

* 97 Directrice de recherche à l'INRAe de Montpellier.

* 98 Cette quantité est difficile à estimer considérant le développement actuel de films biodégradables et biosourcés à base de PLA.

* 99 7 000 tonnes de films de paillage ont toutefois été enfouis en 2019 en raison de l'absence de débouchés sur le marché du recyclage.

* 100 Luca Nizzetto et al: Are Agricultural Soils Dumps for Microplastics of Urban Origin?, Environmental Science & Technolog, mai 2019.

* 101 S'agissant d'études centrées sur les retombées des microplastiques et non sur leur concentration en suspension dans l'air, les résultats sont exprimés en nombre de particules par m² et par unité de temps.

* 102 Dris et al, 2015.

* 103 Klein et Fischer, 2019.

* 104 Cail et al, 2017.

* 105 Allen et al, 2019.

* 106 Les PM 10 sont des particules en suspension dans l' air dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres, d'où leur nom anglais de particulate matter 10, ou PM 10 en abrégé.

* 107 Acoleyen et al.

* 108 Enquête réalisée du au auprès de communes littorales, avec l'appui de l'AMF. Le taux de réponse à l'enquête est de 9 %.

* 109 Ambassadeur de France chargé des questions d'environnement.

* 110 McIlgorm et coll.

* 111 Mouat et al, 2010.

* 112 Brouwer et al, 2015.

* 113 UNEP : Marine Litter ; Vital Graphics.

* 114 Certains microplastiques peuvent par exemple être confondus avec des oeufs de poissons.

* 115 Directeur de recherche au CNRS à l'observatoire océanologique de Banyuls-sur-mer.

* 116 Le fulmar est une espèce d'oiseau marin appartenant à la famille des Procellariidae. Il est caractéristique des eaux froides de l'hémisphère Nord et hauturier en dehors de la saison de nidification.

* 117 Étude menée par Xavier Cousin, Ifremer.

* 118 Polyéthylène (11-13 um), PVC (125-250 um) et microplastiques récoltés sur une plage de Guadeloupe. Le PE et le PVC ont été utilisés vierges ou adsorbés avec différents polluants organiques. Le PE a été utilisé dès l'éclosion des larves, le PVC un mois après et les autres microplastiques deux mois plus tard.

* 119 Le poisson-zèbre et le médaka sont deux poissons à cycle de vie court.

* 120 Le médaka est une espèce de poissons de la famille des Adrianichthyidaese. Se reproduisant vite et facilement, il est utilisé comme animal modèle en biologie.

* 121 Le poisson-zèbre est une espèce de poissons de la famille des Cyprinidés. Il est couramment utilisé en laboratoire comme organisme modèle.

* 122 Île de Pâques, île de Guam et Hawaï.

* 123 Les microplastiques récoltés sur l'île de Pâques et l'île de Guam se caractérisent par la présence prédominante de polyéthylène et de DDT (dichlorodiphényltrichloroéthane), un pesticide désormais interdit. Les microplastiques sur Hawaï sont constitués de polypropylène, de HAP (hydrocarbure aromatique polycyclique) et de PCB (polychlorobisphényle), substance interdite depuis 1987.

* 124 Les lagons perlicoles sont en effet confrontés à une pollution par les microplastiques produits par la fragmentation des structures d'élevages abandonnées sur place.

* 125 Un témoin à zéro et trois concentrations à 0,25 ug par litre, 2,5 ug par litre et 25 ug par litre.

* 126 Exposition à de faibles concentrations sur une longue durée.

* 127 Exposition à de fortes concentrations sur une durée courte.

* 128 Un rapport d'information de l'Assemblée nationale sur les perturbateurs endocriniens présents dans les contenants en plastique, dont Claire Pitollat et Lauriane Rossi ont été rapporteurs, a été publié en décembre 2019 (n° 2483).

* 129 Berman T., Hochner-Celnikier D., Calafat A. M., Needham L. L. et al. Phthalate exposure among pregnant women in Jerusalem, Israel: results of a pilot study. Environ Int 2009, 35, pp. 353-357.

* 130 Ce chiffre est issu du rapport de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, Reproduction et environnement, expertise collective. Paris, 2011.

* 131 Réponse au questionnaire adressé par la mission d'information.

* 132 Parmi lesquels on trouve le DDT, le lindane, le chlordane.

* 133 Parmi lesquels on trouve le polyclorobiphényl (PCB), les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et les composés perfluorés : sulfonates perfluoroalkylés (PFAS), acide perfluorooctanoïque (PFOA) et sulfonates perfluorooctane (PFOS).

* 134 Ifremer, Laboratoire de biogéochimie des contaminants organiques, unité biogéochimie et écotoxicologie.

* 135 Pollution aux microplastiques : détection, risques et rémédiation à l'interface terre-mer.

* 136 Les bactéries du genre Vibrio appartiennent à la famille des Vibrionaceae. Ce sont de petits bacilles, de formes fréquemment incurvées dites « en virgule », extrêmement mobiles. L'espèce la plus connue du genre Vibrio est Vibrio cholerae : agent responsable du choléra.

* 137 Centre for international environment law.

* 138 Directeur de recherche à l'Inserm.

* 139 Lisbeth Van Cauwenberghe, Collin Janssen: Microplastics in bivalves cultured for human consumption; Environmental Pollution, 193 (2014).

* 140 60 particules resteraient dans le corps par an.

* 141 Science Advice for Policy by European Academies: A scientific perspective on microplastics in nature and society, janvier 2019.

* 142 Elle a été modifiée en 2011.

* 143 Les États riverains de l'Atlantique du Nord-Est (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, France, Irlande, Norvège, Islande, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni, Suède), ainsi que le Luxembourg, la Finlande, la Suisse et l'Union européenne.

* 144 Les parties s'engagent à interdire la production, l'utilisation, l'importation et l'exportation de ces produits.

* 145 Cf. Pascale Ricard : Le droit international et la lutte contre la pollution marine par les déchets de matières plastiques, Annuaire Français de Droit International 2019, vol. 65, à paraître fin 2020.

* 146 Seuls certains produits plastiques étaient mentionnés, et cela au sein de deux annexes. D'abord l'Annexe I, qui dresse la liste des catégories de déchets « à contrôler » qui peuvent être réputés dangereux s'ils obéissent aux caractéristiques recensées en Annexe III. Ensuite, d'autres produits plastiques étaient également intégrés à l'Annexe IX, qui concerne les déchets réputés non dangereux et exportés en vue d'être valorisés, à condition donc qu'ils soient destinés à être recyclés d'une manière écologiquement rationnelle et qu'ils soient presque exempts de contamination, dans une logique d'économie circulaire. Ces derniers ne sont pas soumis au système de contrôle et d'interdiction de la Convention des mouvements transfrontières sauf s'ils contiennent l'une des substances recensées à l'Annexe I.

* 147 Ce que n'ont pas fait, entre autres, les États-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud, la Russie, l'Inde ou encore le Brésil.

* 148 Directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives et directive (UE) 2018/851 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive 2008/98/CE précitée.

* 149 Article 3-12 de la directive 2008/98/CE relative aux déchets.

* 150 Il s'agit notamment de polymères qui servent à enrober des granulés d'engrais à diffusion lente et des semences.

* 151 Ces chiffres sont tirés du rapport l'Agence européenne des produits chimiques d'août 2019 proposant d'éliminer les microplastiques intentionnellement ajoutés dans un grand nombre de secteurs d'ici à 2026. Vos rapporteurs n'ont pas mené d'investigations sur ce sujet.

* 152 Ils restent autorisés au-delà d'une épaisseur de 50 microns car ils sont alors considérés comme réutilisables.

* 153 Pour rappel, il s'agit des fertilisants et des produits phytosanitaires du secteur de l'agriculture et de horticulture, des produits cosmétiques à rincer et sans rinçage (maquillage, crèmes solaires), des détergents et produits de maintenance contenant des parfums encapsulés ou des microbilles, des cires et des vernis, des dispositifs médicaux, des médicaments à usage humain et vétérinaire, des compléments alimentaires, des peintures et des revêtements, des cartouches des imprimantes en trois dimensions, des encres d'imprimerie, des produits de construction, des produits utilisés dans les secteurs pétrolier et gazier.

* 154 Responsabilité élargie des producteurs.

* 155 Piles, équipements électriques et électroniques, automobiles et véhicules légers, emballages ménagers, fluides frigorigènes fluorés, médicaments, pneumatiques, papiers graphiques, textiles/linge de maison/chaussures, déchets d'activités de soins à risques infectieux, produits chimiques, ameublement, bouteilles de gaz, navires de plaisance.

* 156 Produits de l'agrofourniture, cartouches d'impression bureautiques, mobil-homes.

* 157 Les produits textiles neufs pour la maison intègrent la REP sur les produits textiles d'habillement dès le 1 er janvier 2020 ; à compter du 1 er janvier 2022, la REP « véhicules hors d'usage » est étendue aux voiturettes, véhicules à moteur à deux ou trois roues et quadricycles à moteur ; la REP sur les emballages ménagers couvre les emballages de la restauration à compter du 1 er janvier 2021 et les emballages industriels à compter du 1 er janvier 2025.

* 158 Chiffres de 2018 fournis par PlasticsEurope.

* 159 Papier, métaux, plastiques, verre, bois et textiles.

* 160 Les parties ont défini l'emballage problématique en fonction des critères suivants :

1. il n'est pas réutilisable, recyclable ou compostable ;

2. il contient ou nécessite, pour sa fabrication, des produits chimiques dangereux qui posent un risque important pour l'homme, la santé ou l'environnement ;

3. il peut être évité (ou remplacé par un modèle de réutilisation) tout en conservant son utilité ;

4. il empêche ou perturbe la recyclabilité ou la compostabilité d'autres articles ;

5. il est très probable qu'il soit jeté dans la nature ou qu'il se retrouve dans l'environnement naturel.

* 161 Il s'agit d'un des quatre axes clés de la feuille de route pour une économie circulaire.

* 162 Loi n °2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 163 Loi n °2020-105 du 10 février 2020.

* 164 20 communes et 116 000 habitants.

* 165 Les objectifs à atteindre correspondaient à ceux fixés par la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, soit une réduction de 10 % des déchets ménagers et assimilés (DMA) entre 2010 et 2020.

* 166 L'eau non potable qui coule dans les rues provient de plaques en fonte situées sur les bordures des trottoirs, vers la chaussée.

* 167 Il s'agit de collectivités territoriales, de services de l'État, d'associations et d'entreprises.

* 168169 www.remed-zero-plastique.org

* 170 Chargée de recherche au CNRS, Centre d'Études et de Recherches en droit International et Communautaire.

* 171 Directrice du centre de formation sur l'environnement et la société.

* 172 Professeur en économie écologique et études de l'environnement.

* 173 Au cours de la campagne de ramassage des déchets organisés par le réseau Break free from plastic en 2018, des déchets de cette marque ont été trouvés dans 40 des 42 pays dans lesquels était menée cette opération.

* 174 Fondation Henrich Böll, 2020.

* 175 La société Carbios a développé un procédé de dépolymérisation des déchets en PET par une enzyme pour revenir aux monomères initiaux (acide téréphtalique et éthylène glycol), puis de repolymérisation pour créer de nouveau du PET. La réaction enzymatique se fait à 60 degrés. Selon le directeur général de Carbios, Jean-Claude Lumaret, les enzymes ne sont pas gênées par les additifs ou les polymères complexes. Les déchets textiles pourraient également servir de matières premières à ce PET recyclé.

* 176 Global Commitment.

* 177 New Plastic Economy.

* 178 Depuis le 1 er juillet 2016, les entreprises ont pour obligation de trier à la source cinq types de déchets (papier, métal, plastique, verre et bois) dans le but d'une meilleure valorisation de ces déchets .

* 179 Éco-organisme pour la filière des produits textiles et des chaussures.

* 180 Éco-organisme pour la filière des emballages ménagers et des papiers graphiques.

* 181 Cet engagement volontaire a été nommé Plastics 2030.

* 182 La période de demi-vie est la période au terme de laquelle la moitié des particules disparaissent.

* 183 Philippe Bolo, Anne Genetet, Pierre Médevielle, Pierre Ouzoulias : Évaluation des risques sanitaires et environnementaux par les agences : trouver le chemin de la confiance, 7 mai 2019 n° 1919 (Assemblée nationale) et n° 477 (Sénat).

* 184 SVHC : substances of very high concern.

* 185 CLP : classification, labelling, packaging : il s'agit du règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances chimiques et des mélanges. Les fournisseurs ou les importateurs d'une substance ou d'un mélange sont tenus d'étiqueter le produit si ce dernier est classé comme dangereux. De plus, si un mélange contient au moins une substance classée comme dangereuse, le produit doit également être étiqueté.

* 186 Article 77 de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 187 Il consiste à mettre en avant des arguments écologiques pour se forger auprès du public une image écoresponsable, alors que la réalité des faits ne correspond pas, ou insuffisamment, à la teneur explicite ou implicite des messages diffusés.

* 188 Les sociétés participant à cette alliance sont des spécialistes de la pétrochimie, du recyclage et des biens de grande consommation comme BASF, Total, ExxonMobil, Dow, Mitsui Chemicals, LyondellBasell, Procter&Gamble, Suez, Veolia, etc... qui fabriquent, utilisent, vendent et recyclent des plastiques.

* 189 Alliance to end Plastic Waste.

* 190 Le CVT Allenvi est une équipe spécialisée en intelligence économique issue de de la réunion de 27 organisations de l'Alliance nationale de recherche pour l'environnement (INRAe, IRD, Ifremer, IRSN, ANSES, CEREMA, CNRS, Météo France, IGN, CNES, etc.).

* 191 À la date d'interrogation de la base Scorpus® Elsevier, le 27 octobre 2020, le mot clé « plastic waste » était associé à 16 204 articles et le mot clé « microplastic » à 4 704 articles.

* 192 Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, France, Grèce, Finlande, Ireland, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Suède.

* 193 Au nombre de huit, il s'agit de quatre établissements publics à caractère scientifique et technologique (CNRS, IFSTTAR - devenu Université Gustave Eiffel-, INRAe et IRD), de trois établissements publics à caractère industriel et commercial (BRGM, CIRAD et Ifremer) et d'un établissement public à caractère administratif (ANSES).

* 194 scanR est un moteur de recherche couplé à une base de données sur les entreprises et les laboratoires publics actifs en matière de recherche et d'innovation. scanR décrit les travaux de recherche (thèses, publications et brevets) et les financements publics.

* 195 Agence Nationale de la Recherche.

* 196 Human Immunodeficiency Viruses, virus à l'origine du syndrome d'immunodéficience acquise (sida).

* 197 Groupement de Recherche.

* 198 La cartographie est obtenue en référence aux auteurs des publications (sur le thème des microplastiques) pondérés par leur nombre de citations.

* 199 Laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains.

* 200 Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux.

* 201 Les chercheurs des laboratoires soulignés en gris ont été entendus par les rapporteurs.

* 202 Le G7, autrement appelé le Groupe des sept est un lieu de discussion et de partenariat économique des sept plus grandes puissances mondiales (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni).

* 203 Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail.

* 204 Les Mission Boards s'inscrivent dans Horizon Europe, le futur programme-cadre de recherche et d'innovation de l'Union européenne. Au sein d'Horizon Europe, les Mission Boards visent à faire naître des solutions et des initiatives en écho aux grands défis de l'humanité.

* 205 Il existe des voies de recherche pour rendre les polymères thermodurcissables recyclables par le développement du recyclage chimique.

* 206 La plupart des thermoplastiques ne sont pas miscibles, leur recyclage exige donc un tri préalable par résine.

* 207 L'extrusion est un procédé de fabrication au cours duquel le polymère, chauffé et ramolli, est contraint, sous pression, à prendre une forme allongée.

* 208 On parle de matière première régénérée.

* 209 Exemple présenté par les représentants de l'entreprise Trioplast lors de leur audition.

* 210 En 2018, plus de 739 000 tonnes de PVC ont été recyclées en Europe, dont 105 000 tonnes en France.

* 211 Proposition de règlement modifiant l'annexe XVII du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), en ce qui concerne le plomb et ses composés.

* 212 Dans sa proposition de modification du règlement mentionnée précédemment, la Commission européenne laisse entendre que la technique d'encapsulation du plomb visant à limiter les émissions de plomb n'est pas facile d'usage, au moins pour les PVC souples. Pour cette raison, elle introduisait une dérogation de cinq ans pendant laquelle les articles en PVC souple issus du recyclage pouvaient déroger au seuil de 0,1 % même s'ils n'étaient pas revêtus d'une couche externe de PVC neuf ou de tout matériau équivalent.

* 213 Centre scientifique et technique du bâtiment.

* 214 Association Alliance Chimie Recyclage, Direction générale des entreprises, Ademe : Analyse de la chaîne de valeur du recyclage des plastiques en France - synthèse, 2014.

* 215 Ce raisonnement ne vaut que pour les polymères pétrosourcés, d'autres règles économiques prévalent s'agissant des polymères biosourcés.

* 216 Après avoir atteint un pic à 150 dollars le baril avant la crise financière de 2008, le prix du baril de brut s'est effondré en 2009 pour remonter progressivement jusqu'en 2014 (110 dollars le baril). Il a ensuite fortement chuté jusqu'en 2016 (un peu plus de 30 dollars le baril). Depuis 2018, la tendance est à la baisse, avec un effondrement des prix en 2020 en raison de l'effondrement des consommations occasionné par la pandémie mondiale de la Covid-19.

* 217 Les prix du r-PET échappent à cette règle : alors que le prix du PET vierge est de 700 euros la tonne, celui du r-PET varie entre 1 100 et 1 200 euros la tonne (soit un écart de prix de 57 à 71 % en faveur de la matière recyclée). Actuellement, seul le recyclage du PET de grade alimentaire est intéressant économiquement. En effet, compte tenu des obligations d'incorporation de r-PET imposées par l'Union européenne pour les bouteilles de boisson, le prix de la résine recyclée est découplé de celui de la résine vierge.

* 218 Les classements des pays pour les autres modes de gestion (enfouissement et valorisation énergétique) sont présentés en annexe VI.

* 219 Directive (UE) 2018/852 du 30 mai 2018 modifiant la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballages .

* 220 Ces chiffres ne tiennent pas compte des chutes de production (330 000 tonnes).

* 221 Auxquelles s'ajoutent les 330 000 tonnes de plastiques issues des chutes de production, soit 1,1 million de tonnes au total.

* 222 Il aurait atteint 29 % en 2019 selon Citeo.

* 223 Il s'agit de la somme des 778 000 tonnes de plastiques collectés pour recyclage et des 300 000 tonnes de plastiques issus des chutes de transformation.

* 224 WWF: Stop the food of plastics, 2019.

* 225 En prenant comme hypothèse un gisement de 3,4 millions de déchets plastiques et une production de résines régénérées de 417 000 tonnes. Ce taux est de 15,2 % si la valeur du tonnage de résines régénérées est 517 000 tonnes (cf. supra).

* 226 Le recyclage du PS reste encore à l'état de recherche et développement.

* 227 Le recyclage du PP reste encore à l'état de recherche et développement.

* 228 On le retrouve notamment pour les bouteilles de lait.

* 229 Type d'étiquette qui épouse les formes des contenants et ce, sans utilisation d'adhésifs.

* 230 Les bouteilles d'eau et les flacons représentent 40 % des emballages.

* 231 Référentiel national 2014.

* 232 Chercheur associé au laboratoire de sciences sociales Pacte.

* 233 Un large panel de techniques est disponible pour trier les déchets allant du tri manuel réalisé par un opérateur au tri dit automatisé (comme l'utilisation de technologie par spectrométrie proche infrarouge qui déterminera la composition du déchet), en passant par des procédés mécaniques (un crible qui prendra en compte la taille du déchet par exemple). De nouveaux systèmes sont également en développement : traçages électroniques (radio-frequency identification) pour repérer les contenants réutilisables ; traçages chimiques pour identifier les plastiques opaques ou noirs.

* 234 L'accord cadre passé entre Grand Lyon et Citeo illustre le poids des bouteilles dans les recettes : le soutien de Citeo (qui doit couvrir 80 % du coût net de référence d'un service de collecte et de tri optimisé) pour la gestion des emballages et des papiers s'élève à 660 euros la tonne. La vente des matières triées pour recyclage rapporte 220 euros la tonne en moyenne à la collectivité territoriale, mais ce montant s'élève à 880 euros la tonne pour le PET clair. Les bouteilles représentent ainsi 3 % du flux des déchets mais 12 % des recettes qu'ils génèrent (1,6 million d'euros).

* 235 Rapport fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable n° 727, session extraordinaire 2018-2019.

* 236 Chercheur associé. Laboratoire Pacte, Grenoble.

* 237 Les quatre cas retenus le sont uniquement pour leur valeur démonstrative de la notion d'amortissement temporel et non parce qu'ils correspondent à des situations idéales ou des objectifs à atteindre.

* 238 Nombre d'années nécessaires à l'apparition de 10 000 unités de déchets ultimes.

* 239 Article 70 de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

* 240 Ademe : déchets chiffres clés, édition 2020.

* 241 En application du principe « pollueur-payeur », le principe de la tarification incitative est de lier le montant payé par les usagers à la quantité d'ordures ménagères résiduelles qu'ils produisent.

* 242 Ademe : déchets chiffres clés, édition 2020.

* 243 Ces bacs de tri distinguent cinq poubelles différentes : les bacs jaunes pour les bouteilles et flacons en plastique, les emballages en métal et les briques alimentaires ; les bacs bleus pour le papier et le carton ; les bacs blancs pour le verre ; les bacs bruns pour les cartons, les bacs roses pour les textiles et les chaussures.

* 244 Citeo souhaiterait également développer une filière PS (voir infra).

* 245 Citeo souhaiterait également développer une filière PP (voir infra).

* 246 L'enzyme est emprisonnée dans une molécule-cage de cyclodextrine (oligomère cyclique de formule brute (C 6 H 10 O 5 )n, où n varie entre 6 et 8).

* 247 Ils deviennent toutefois des déchets qu'il faut ensuite traiter.

* 248 Le naphta est un mélange liquide d'hydrocarbures légers. Il est principalement issu du raffinage du pétrole brut et sert de matière première à la pétrochimie. Il permet notamment de produire de l'éthylène et du propylène.

* 249 Il s'agit des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR), des substances persistantes, bioaccumulables et toxiques (PBT), des substances très persistantes et très bioaccumulables (vPvB) ainsi que des substances suscitant un niveau de préoccupation équivalent telles que les perturbateurs endocriniens ou les sensibilisants respiratoires.

* 250 CLP (Classification, Labelling, Packaging) : il s'agit du règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances chimiques et des mélanges. Les fournisseurs ou les importateurs d'une substance ou d'un mélange sont tenus d'étiqueter le produit si ce dernier est classé comme dangereux. De plus, si un mélange contient au moins une substance classée comme dangereuse, le produit doit également être étiqueté.

* 251 Cette initiative volontaire de l'industrie de la détergence encourage l'adoption de pratiques conformes au développement durable à toutes les étapes du cycle de vie d'un produit. Elle a été signée par 230 entreprises et concerne les savons, les détergents et les produits d'entretien, aussi bien pour le grand public que pour le secteur du nettoyage et de l'hygiène professionnel et industriel.

* 252 La chromatogénie est un processus physico-chimique qui consiste à déposer à la surface du papier, ou du carton, une mince couche de molécules issues de lipides biosourcés afin de le rendre imperméable. Cette couche est suffisamment mince pour ne pas altérer le recyclage du papier ou du carton.

* 253 EGALIM : loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales entre le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable.

PACTE : loi n ° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises.

AGEC : loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

* 254 Essentiellement en acide polylactide, donc uniquement compostable en conditions industrielles.

* 255 Rappelons qu'il ne reste plus que quelques dizaines d'années d'ici à la fin du pétrole.

* 256 La société Carbiolice a développé un procédé qui permet de rendre le PLA compostable en conditions domestiques. La formulation du polymère intègre une enzyme qui rend le PLA compostable quand certaines conditions de PH, de température et d'humidité sont réunies. Grâce à cette enzyme, il est possible de prévoir la durée de vie du plastique.

* 257 Pour rappel, la réglementation européenne prévoit que d'ici à 2025, les bouteilles pour boisson en PET doivent contenir 25 % de matières recyclées. D'ici à 2030 les bouteilles pour boisson en autres résines doivent contenir 30 % de matières recyclées.

* 258 Vanessa Wong: almost no plastic bottle get recycled into plastic bottle; Buzzfeednews, 24 avril 2017.

* 259 SUV XC60 hybride rechargeable T8.

* 260 Les obstacles réglementaires ont déjà été abordés dans la partie consacrée au recyclage.

* 261 Emmanuel Vasseneix, président du groupe de la laiterie Saint-Denis-de-L'Hôtel, s'est inquiété de la stratégie des grands groupes fabricant des boissons visant à « s'accaparer » des gisements en PET recyclé, au risque de voir les entreprises plus petites ne pas être capables de respecter les obligations d'incorporation imposées au niveau européen en raison de la pénurie en matière de r-PET.

* 262 Ainsi, vos rapporteurs ont interrogé l'Ademe qui n'a pas connaissance de dispositif de réutilisation d'emballages.

* 263 Exprimés en unité de vente ou équivalent unité de vente.

* 264 Maître de conférences à l'Université de Versailles-Saint-Quentin.

* 265 Générant le plus de déchets plastiques mal gérés.

* 266 Chercheur associé au laboratoire PACTE.

* 267 Christian Arnsperger et Dominique Bourg : Écologie intégrale pour une économie permacirculaire, 2017.

* 268 Directrice-adjointe du centre de sociologie des organisations.

* 269 Si cette logique d'innovation reste pertinente lorsqu'elle apporte un indéniable progrès social ou sociétal, elle suscite des interrogations lorsqu'il s'agit de produits ou de services, susceptibles d'être substituables, dont l'utilité est relative et a un impact négatif sur les ressources ou sur l'environnement.

* 270 L'éco-contribution dans le cadre de la responsabilité élargie aux producteurs est un début d'internalisation du coût environnemental des plastiques, mais son montant relativement modeste et surtout son absence de visibilité pour les consommateurs limite son efficacité et ne permet pas à ces derniers de prendre conscience du coût environnemental des plastiques.

* 271 Objectifs de Développement Durable des Nations Unies.

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