II.
Témoignage de Claude du Granrut,
présidente de la SFAADIR
(Société des familles et amis des anciennes
déportées et internées de la Résistance) :
Les enfants de déportés
Échange avec Laurence Rossignol et Claudine Lepage,
vice-présidentes de la délégation
Annick Billon , présidente . - Nous allons maintenant entendre le témoignage de Claude du Granrut, présidente de la Société des familles et amis des anciennes déportées et internées de la Résistance ( SFAADIR ), qui va témoigner de la situation des enfants de déportés.
Mes collègues Laurence Rossignol et Claudine Lepage vont animer cet échange.
Laurence Rossignol , vice-présidente . - Chère Claude, quel plaisir de vous retrouver au Sénat !
Votre parcours de haute fonctionnaire - vous avez notamment été juge administratif - et d'élue locale, à Senlis et au conseil régional de Picardie où j'ai eu le plaisir de siéger avec vous pendant plusieurs années sur des travées opposées de l'hémicycle - nous y avons noué une amitié solide et durable -, est dominé par deux engagements : vous êtes autant européenne que féministe.
Permettez-moi à cet égard de livrer une petite anecdote. Vingt-quatre heures après avoir été nommée ministre des familles, de l'enfance et des droits des femmes, j'ai reçu de votre part une feuille de route, que j'ai gardée et que j'ai essayé de suivre le plus fidèlement possible.
Vous avez été secrétaire générale du Comité du travail féminin, créé au sein du ministère du travail en 1965 et qui préfigure les premières politiques publiques en faveur de l'égalité femmes-hommes. Vous avez travaillé au cabinet de Françoise Giroud, secrétaire d'État à la condition féminine. Vous faites donc partie de ces pionnières dont notre délégation ne peut que saluer l'implication. Au regard de votre parcours et des actions que vous avez menées, vous avez donc toute votre place ici !
J'en viens aux responsabilités que vous assumez, en tant que fille de résistants, pour porter la mémoire de la Résistance et de la déportation.
Vous présidez la SFAADIR , qui poursuit l'action de l' Association nationale des anciennes déportées et internées de la Résistance ( ADIR puis ANADIR ), une association d'entraide créée à la fin de la guerre et qui, cela a été mentionné tout à l'heure, a été présidée par Jacqueline Fleury 21 ( * ) .
Vos parents, Robert et Germaine de Renty, tous deux résistants, ont été arrêtés en juillet 1944 et déportés le 15 août : votre mère à Ravensbrück et votre père à Buchenwald, puis à Dora-Ellrich. Votre mère a survécu au camp, tandis que votre père n'est jamais revenu.
Je me réfère à votre livre de souvenirs intitulé Dix ans en 1940 .
De manière très émouvante, vous évoquez le « choc » du retour à Paris, après la Libération, votre solitude dans « l'appartement vide de tout bruit familier ». Comme d'autres enfants de déportés, vous essayez de vous rapprocher de ce que vous pouvez imaginer du quotidien de vos parents : en plein hiver, vous allez au lycée sans manteau ; l'un de vos amis se prive de nourriture. « Cela devient une sorte de hantise, c'est comme si nous étions concernés dans notre propre chair », écrivez-vous.
Pouvez-vous nous en dire plus sur cette période terrible qui a précédé le retour de votre mère ?
Claude du Granrut, présidente de la Société des familles et amis des anciennes déportées et internées de la Résistance ( SFAADIR ) . - Chère Laurence, eu égard aux liens très forts qui nous unissent, je suis contente que vous me posiez des questions sur cette période.
Pendant l'Occupation, je vivais à Paris avec mes parents et j'allais au lycée Molière. Lors de toutes les vacances scolaires, mes parents m'envoyaient chez des amis fermiers afin que je sois nourrie convenablement, moi qui étais en pleine croissance.
En 1944, j'avais quatorze ans et, alors que je m'apprêtais à partir pour les vacances de Pâques, mon père m'a prévenue que, cette fois-ci, je resterais jusqu'à la rentrée d'octobre ; le lycée Molière m'enverrait mes devoirs. Sur place, j'étudierais bien sûr et je participerais à la vie rurale : les foins, la moisson et, surtout, le lavoir communal avec les femmes du village. D'ailleurs, si je me suis toujours intéressée aux femmes, c'est parce que les femmes du lavoir que je retrouvais chaque semaine pour battre le linge étaient formidables. C'était elles qui tenaient les rênes, en assumant les travaux des champs.
J'allais donc être loin de ma famille pendant plusieurs mois. Bien sûr, mes parents m'écrivaient régulièrement. Dans une lettre datée du 5 juin 1944, mon père m'écrivait : « La guerre finira bientôt, et nous serons tous réunis ». Cela m'avait alors rassurée. Ce n'est que trois mois plus tard qu'une lettre de ma soeur aînée, mariée, m'apprit que Papa et Maman avaient été arrêtés par la Gestapo dans la nuit du 5 au 6 juillet et déportés par le train du 15 août. Elle ajoutait : « Une voiture viendra te chercher pour te ramener à Paris ».
C'est ainsi que l'on m'a déposée devant le 78 avenue Mozart. Je suis rentrée toute seule dans notre appartement vide, déserté. À chaque pas, je retrouvai l'odeur de mes parents, la preuve de l'interruption brutale de leur vie quotidienne : leur toilette du soir, leur lit encore ouvert.
Je retrouvai aussi ma chambre, la solitude et l'affreuse réalité de l'absence. C'était d'autant plus pénible que j'arrivais dans un Paris enfin libéré, tout à sa joie d'accueillir les Alliés, de glorifier la Résistance - j'appris alors que mes parents appartenaient au réseau Alliance - et de se projeter dans l'avenir. Comment concilier cette effervescence et mon mal-être d'adolescente abandonnée ? Je ne pouvais participer à cette joie.
En novembre, mon frère, qui s'était engagé, est revenu. Je me vois encore lui ouvrir la porte : « Où sont les parents ? », me demanda-t-il. Il n'arrivait pas à y croire et il partageait ma peine. Il repartit très vite pour reprendre sa place dans l'armée de Lattre. Et je me retrouvai à nouveau seule.
J'avais repris le chemin du lycée Molière, avec la première partie du baccalauréat à réussir. Mais l'enfant studieuse était devenue révoltée et insupportable : je me suis retrouvée deux fois devant le conseil de discipline.
Je n'arrivais pas à dormir. J'avais la vision de wagons rouillés s'éloignant avec mes parents dans les sapinières des Vosges - ce fameux train du 15 août. Cet hiver fut aussi particulièrement rude.
La libération des premiers camps et la découverte de l'horreur concentrationnaire me glacèrent le sang. Tous les camps pouvaient-ils être semblables ? Maman, si frêle, si parisienne, avait-elle pu résister aux travaux de toute sorte exigés par les Allemands ? Devais-je encore prier pour eux ?
Ce n'est qu'à la fin du mois de mai 1945 que j'ai reçu une lettre de Maman. Elle avait été évacuée en Suède. Elle était vivante. Elle n'avait aucune nouvelle de Papa, qui avait quitté le train à Weimar pour être interné à Buchenwald.
Fin juin, Maman est rentrée à la maison.
Le premier matin, je l'ai trouvée allongée par terre ; elle ne savait plus dormir dans un lit, mais elle était souriante et calme, heureuse de nous retrouver.
Au retour des rescapés, j'ai appris que Papa avait été envoyé à Dora, puis au Kommando d'Ellrich pour creuser la montagne et permettre la création d'une deuxième usine souterraine. Grâce à sa connaissance de l'allemand, il avait pu négocier avec les Kapos et obtenir pour son groupe des capotes protégeant du froid et de la neige, un véritable soutien pour ses camarades plus jeunes. Dans le train qui les emmenait au travail à Wolfsleben, il faisait une prière pour tous.
Il a tenu deux mois. Son corps décharné, sans vie, trouvé un soir par ses camarades a été brûlé sur le bûcher du camp - il n'y avait pas de four crématoire.
Finir ainsi, c'était pour moi l'horreur, mais aussi, je dois le dire, un certain réconfort et une fierté de savoir que mon père avait aidé d'autres déportés à s'en sortir et qu'ils lui en étaient reconnaissants.
Pour les revenantes de Ravensbrück, dont faisait partie Maman, Geneviève de Gaulle avait organisé un accueil rue Guynemer, et trouvé une filière pour leur permettre de rétablir en Suisse leur santé altérée. Maman prit l'habitude d'y « retrouver les camarades ». Elle se sentait bien avec elles. D'ailleurs, plusieurs d'entre elles venaient à la maison : Yvonne Pagniez, Hélène Maspero, Sylvie Girard-Cordier et Jeannie Rousseau. Grâce à leurs conversations - et seulement grâce à elles -, je compris ce que fut l'horreur de l'année passée à Ravensbrück.
C'était leur fierté d'avoir tenu dans les épreuves, d'avoir maîtrisé leur vie - une vie, elles le sentaient bien, incompréhensible pour tout autre personne.
Invitée un jour chez d'anciens amis, à quelqu'un qui avait osé dire que Ravensbrück n'avait pas été aussi épouvantable, Maman répliqua : « Le matin, en allant aux toilettes, où l'on avait mis les mortes de la nuit, les rats commençaient par les yeux ». Là-dessus, elle se leva, me prit par la main et nous sommes parties.
Pour l'été 46, nous avions été invitées par un cousin de mon père à passer quelques jours sur les bords du lac de Constance. Je me demandais comment Maman allait supporter de retrouver l'Allemagne. Elle me rassura tout de suite : « Je ne ressens aucune agressivité à l'égard des Allemands », ajoutant : « Il est temps de faire l'Europe et d'en finir avec ces guerres fratricides. Ce sera l'oeuvre de ta génération ».
Elle m'incita à faire Sciences Po et à poursuivre mes études dans une université américaine où j'avais obtenu une bourse, puis à travailler dans l'administration et à m'engager en politique.
Son ami d'enfance, Paul Arrighi, qui avait été lui aussi déporté et devait lui remettre la Légion d'honneur, me fit entrer au Comité du travail féminin. Je fis la connaissance de Colette Même, la secrétaire générale du comité, qui m'a recommandée auprès de Joseph Fontanet pour que je lui succède à ce poste.
Nous étions dans les années 1970. Les mouvements féminins réclamaient le droit aux grandes écoles - on a obtenu l'accès à Polytechnique - et la maîtrise de notre corps.
Par les centristes, j'ai connu Simone Veil, amie fidèle, qui se battait aussi et avec succès pour les droits des femmes, notamment le droit à l'interruption volontaire de grossesse. Elle m'a fait partager sa volonté de faire vivre l'Union européenne.
Désignée par le gouvernement pour siéger au Comité européen des régions, je pouvais enfin bâtir avec mes collègues élus régionaux une Europe forte et paisible pour que les futures générations ne revivent jamais l'horreur de la guerre. Maman suivait cela de près. Elle me remplaçait d'ailleurs, chaque fois que cela était nécessaire, auprès de mes enfants et petits-enfants qui adoraient leur « Mamaine ». Elle m'avait aussi associée à son action de mémoire à l' ADIR . La Société des Amis de l'ADIR n'ayant plus de président depuis la démission d'André Postel-Vinay 22 ( * ) , Geneviève de Gaulle m'a demandé de succéder à ce dernier 23 ( * ) . Lorsque l' ADIR a été dissoute en 2005, j'ai fait modifier le nom de l'association, qui s'appelle depuis la Société des familles et amis des anciennes déportées et internées de la Résistance : la SFAADIR .
En 2016 et 2017, j'ai travaillé avec Jacqueline Fleury à la réhabilitation du Mémorial des martyrs de la déportation , érigé sur l'île de la Cité en 1962. Jacqueline Fleury était avec ma mère pour représenter l' ANADIR lors de l'inauguration du mémorial en 1962.
Avec le soutien de Jacqueline Fleury, nous faisons vivre la mémoire de ces femmes qui avaient pris le risque d'entrer en Résistance, d'intégrer des réseaux, de soutenir les maquis, de risquer leur vie, alors qu'elles n'avaient ni droit de vote ni compte en banque.
Une journée comme celle-ci - j'en remercie le Sénat - montre que nous avons raison et que notre combat se perpétuera pour que plus jamais personne ne revive cela !
Annick Billon , présidente . - Merci beaucoup pour votre témoignage poignant. Vous nous avez transmis avec émotion votre expérience : vous avez réussi à muer votre colère et votre immense souffrance en un engagement politique et professionnel.
Anne Cordier, membre du bureau de la SFAADIR . - Je remercie tout particulièrement Jacqueline Fleury - vous étiez dans le même wagon que ma mère, Sylvie Girard-Cordier, le 15 août 1944 : vous avez évoqué précédemment les souffrances qu'elle a subies de la part de la Gestapo. Merci également à Claude du Granrut - nos mères étaient très amies.
Créée en 2006, la SFAADIR a considéré qu'il fallait perpétuer l'esprit qui animait l' ADIR , laquelle venait de cesser son activité.
Que représentons-nous aujourd'hui ?
Nous comptons une centaine d'adhérents et contribuons par nos actions auprès des pouvoirs publics à relayer les témoignages de nos mères, parentes ou amies. Nous travaillons avec les historiens et les professeurs, comme en témoigne l'hommage organisé ici même lors de l'entrée au Panthéon de Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Germaine Tillion.
Ayant le souci de ne pas nous substituer aux anciennes résistantes déportées, nous organisons des voyages au Mémorial de Ravensbrück , et, dans cet esprit, nous avons contribué à une levée de fonds pour améliorer la visibilité du mémorial auprès des autorités du Brandebourg et du gouvernement fédéral allemand. Nous avions prévu un voyage en avril 2020 pour les soixante-quinze ans de la libération du camp, mais il a été annulé du fait de l'épidémie ; nous espérons pouvoir le reporter à peu près aux mêmes dates en avril 2021.
Voilà trois ans, lorsque nous avons parlé à l'auditorium de l'Hôtel de Ville de Paris des « Femmes engagées d'hier et d'aujourd'hui » devant un public de lycéens et d'étudiants, nous avons souhaité faire un lien avec nos mères, nos parentes résistantes déportées ; nous perpétuons ainsi la mémoire de ces femmes résistantes et, surtout, leur exemplarité.
Enfin, nous participons au Comité international de Ravensbrück , qui réunit les anciennes déportées encore de ce monde et leurs descendants en Europe. Lorsque nous rencontrons Eugenia - qui fut une enfant ukrainienne déportée - ou Stella, fille de Républicain espagnol, déportée avec ses parents et recueillie par l'Armée rouge lors de la libération du camp, nous nous comprenons même si nous ne parlons pas la même langue : l'Europe existe entre nous.
Vous connaîtrez nos projets, nos actions, nos réflexions en lisant les Lettres de la SFAADIR , qui sont publiées deux fois par an ; la prochaine paraîtra début décembre 2020.
Nous venons de réaliser un travail de recherche dans les archives de Voix et Visages 24 ( * ) et parmi les poèmes et les textes - « Le retour d'une déportée », écrit en mémoire de Magdeleine Bouteloupt, par exemple - que Jacqueline Fleury a sélectionnés sur la libération du camp de Ravensbrück et ses Kommandos . En reprenant intégralement ces publications - Jacqueline Fleury a souhaité insérer la carte du parcours qu'elle a suivi lors de la marche de la mort -, nous voulons donner de l'espoir.
Ce recueil de 88 pages de témoignages montre que la survie a existé malgré la barbarie nazie, la libération avec ses désespoirs et ses joies, l'amitié aussi, essentielle pour rester en vie. Vous le constaterez, nous disposons de quelques écrits dès 1944, mais c'est surtout dans les années 1970 et 1990 que les témoignages sont les plus nombreux : le temps a dû faire son oeuvre pour que les déportées passent à l'écriture.
Pour conclure, permettez-moi de citer Violette Maurice, déportée résistante : « Il ne faut pas que l'expérience de la déportation, qui a mis en valeur l'immense exemple de la dignité des femmes, tombe dans l'oubli, car l'oubli est une "complicité" ». À la SFAADIR , nous ne serons donc pas complices de l'oubli !
Claudine Lepage , vice-présidente . - Comme mes collègues, je suis très honorée de votre présence et émue par vos témoignages.
Madame du Granrut, dans le livre que vous avez dédié au souvenir de votre mère, intitulé Le piano et le violoncelle , vous observez : « Il y a une spécificité de la mémoire des femmes résistantes (...). Elles ont été trop modestes et à l'exception de quelques-unes, elles n'ont pas été "reconnues" ».
Quelles sont les actions de la SFAADIR , outre celles qui ont déjà été présentées, pour mieux faire connaître le rôle des femmes dans la Résistance ?
Anne Cordier . - Sans vouloir me substituer à Claude du Granrut, permettez-moi de vous répondre.
J'ai évoqué nos lettres, nos interventions, y compris auprès des pouvoirs publics. Nous organisons des rencontres avec le Conseil international de la Résistance (CIR), des débats avec l' Amicale de Ravensbrück - Marie-France Cabeza-Marnet ici présente peut en témoigner. Notre vie associative a ceci de formidable et de terrible : nous sommes à la fois nombreux - nous comptons une centaine de membres - et pas assez pour tout faire. Le travail que nous venons de réaliser sur la mémoire des témoignages sur la Libération constitue pour nous une source de partage.
Claude du Granrut . - Jacqueline Fleury et moi-même allons témoigner dans les écoles. J'essaie d'appréhender la perception qu'ont les jeunes de ces sujets. Certes, nous racontons ce que nous avons vécu, mais ce sont les questions qu'ils posent qui sont intéressantes. Certaines d'entre elles peuvent être très naïves ou, parfois, rudes. « C'était vraiment si horrible que cela ? », nous demandent-ils... Nous retrouvons les questions qui étaient posées à nos mères lorsqu'elles sont rentrées des camps. Quelquefois encore, il y a des difficultés de compréhension.
Ces jeunes qui ne sont certes pas tous gâtés par la vie, mais qui sont bien habillés et mangent à leur faim, ont du mal à réaliser ce que nous avons vécu pendant la guerre et ce que représente le courage de ces femmes : elles avaient parfois un mari, des enfants, un travail, mais elles ont décidé de tout lâcher pour faire vivre leur France, pour faire partir ces Allemands, pour faire cesser l'Occupation et son lot d'humiliations. Il est très difficile de leur faire comprendre comment nous vivions sous l'Occupation et comment est né ce mouvement de résistance, ce besoin de résistance.
Les récents événements, notamment l'épidémie du coronavirus, montrent qu'il ne faut pas perdre espoir. Il faut lutter et montrer que les hommes et les femmes sont courageux et ont la volonté de vivre librement. C'est merveilleux d'avoir des contacts avec ces jeunes. Nous leur disons : vous vivez dans de bonnes conditions, mais il faut défendre cette liberté ; il faut véritablement défendre le droit au travail, les droits sociaux, tout ce que la vie vous a apporté, parce que l'on ne sait jamais : tout peut être détruit, perdu. Voyez l'exemple de ces femmes qui ont compris qu'elles devaient prendre des risques, qu'elles devaient se défendre, car la vie de leurs enfants, leur propre vie, leur liberté étaient en danger.
Jacqueline Fleury . - On retrouve tout cela dans les travaux réalisés par les élèves qui participent au Concours national de la Résistance et de la déportation. Nous lisons toujours des écrits absolument remarquables, souvent d'élèves de troisième, des travaux, disons-le, que nous admirons.
Laurence Cohen , vice-présidente . - Merci pour vos témoignages. L'association que vous représentez réalise un travail extraordinaire : il me semble essentiel que vous puissiez jouer ce rôle de « passeur de mémoire » dans la période actuelle. Certaines et certains ont constaté avec étonnement que les écrits de témoignage étaient parus de longues années après le retour des déportés. Mais il ne leur était pas possible d'en parler en dehors du cercle intime : mon propre père ne voulait pas témoigner, car ce qu'il avait vécu était tellement indicible qu'on ne le croyait pas... Il a fallu du temps pour qu'il aille à la rencontre des élèves. Les témoins directs étant de moins en moins nombreux, il importe de poursuivre le travail de mémoire que vous faites.
Le témoignage de Marie-Claude Vaillant-Couturier à Nuremberg, par exemple, m'a bouleversée lorsque j'étais jeune. Or ce moment extrêmement fort de l'Histoire est relativement peu connu et peu transmis dans les écoles, ce qui est dommageable - mon collègue Max Brisson en sait peut-être plus sur ce sujet. Il serait important qu'il figure dans les programmes d'histoire pour la passation de la mémoire de la déportation.
Véronique Peaucelle-Delelis, directrice générale de l'ONACVG . - Samedi dernier, j'ai assisté à l'inauguration du Mémorial de la déportation rénové au camp de Natzweiler-Struthof, près de Strasbourg. J'ai eu la joie de rencontrer l'un des derniers rescapés du camp : M. Pierre Rolinet, âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, a prononcé sur les marches du mémorial un discours incroyable, empreint d'humanité, et a témoigné de ce qu'a été l'horreur des camps de concentration.
Je cite Anne Cordier : « Nous ne serons donc pas complices de l'oubli ». En France, de nombreuses structures d'État ou associatives luttent ensemble contre l'oubli. Pendant une période, les rescapés des camps n'ont pas souhaité témoigner parce qu'on ne les croyait pas. Pierre Rolinet lui-même s'est tu pendant presque trente ans ; il a commencé à témoigner dans les écoles, collèges et lycées lorsqu'il a pris sa retraite.
Ces témoignages directs ont un impact incroyable sur la jeunesse. Rencontrer une personne ayant vécu cet enfer apporte beaucoup plus que n'importe quel manuel d'histoire. Il faut conserver ces témoignages en les filmant, au travers de recueils d'écrits ou de la mémoire de pierre.
Depuis 2005 seulement, l'État a créé le Centre européen du résistant déporté (CERD) au camp de Natzweiler-Struthof. Y sont accueillis les publics scolaires, qui peuvent visiter les baraques, le four crématoire et la chambre à gaz de ce qui fut le seul camp de déportation situé sur le territoire français. Le musée présente ce qu'a été l'horreur des camps.
Vous avez parlé des difficultés de la jeunesse à s'approprier l'enfer qu'a été la déportation. La mémoire de pierre est l'un des moyens de faire appréhender la souffrance des déportés et l'absurdité du travail qui leur a été demandé. Au camp de Natzweiler-Struthof, les déportés étaient censés extraire le granit dans une carrière située à proximité, mais on savait parfaitement que celui-ci était impropre à la réalisation de quoi que ce soit. Il s'agissait bel et bien d'une entreprise de destruction par l'épuisement, tel que cela a été décrit précédemment.
L'année dernière, le CERD a battu ses records de fréquentation, avec 200 000 visiteurs, dont 100 000 scolaires, ce qui prouve que la mémoire de la déportation reste mobilisatrice. Il est à noter que plus de 30 % des visiteurs sont allemands. Le travail pédagogique sur les valeurs portées par les résistants et les résistantes est reconnu des deux côtés du Rhin, voire au-delà. Dans ce camp, plus de 20 % des déportés étaient étrangers ; chaque année, les descendants des rescapés ou des prisonniers morts dans ce camp viennent commémorer leur souvenir.
Commémorer, c'est honorer les morts, célébrer les héros et, surtout, se tourner vers la jeunesse et la transmission.
Max Brisson , vice-président . - J'aimerais répondre à Laurence Cohen. Le thème de notre rencontre, c'est l'engagement des femmes dans la Résistance. Nous avons entendu des témoignages poignants sur la déportation, les camps d'internement, le retour. Sur le temps long, la transmission de ces témoignages et de l'engagement dans la Résistance dépendra des programmes scolaires...
Or dans les nouveaux programmes de lycée, la place des femmes dans l'Histoire est en questionnement permanent. En dépit des instructions gouvernementales successives, l'histoire de la Résistance dans les manuels scolaires reste fortement masculine. La place des femmes est un véritable sujet.
Par ailleurs, on a peu parlé aujourd'hui des conséquences de l'engagement des femmes dans la Résistance, qui a pourtant conduit à de nombreuses luttes, notamment la marche vers l'égalité entre les femmes et les hommes en France - une marche encore inaboutie. Cela est vrai aussi pour nombre de pays.
Ce sujet très important a été peu traité cet après-midi. Le président Larcher a indiqué dans son propos que le pourcentage de femmes au Sénat, au début des années 1970, était bien plus faible qu'au lendemain de la guerre, quand celles qui s'étaient engagées dans la Résistance étaient relativement nombreuses dans notre hémicycle.
Pour en revenir à la thématique du témoignage, on peut actuellement encore observer un décalage entre la période où les combats sont menés et le moment où l'on en témoigne. Cela renvoie à une volonté d'oubli doublée d'une volonté de reconstruction historique quelque peu héroïsée - j'appartiens à une famille politique qui a aussi contribué, avec l'épopée du général de Gaulle, à la volonté de réécrire une histoire qui correspondait aux canons du moment. Il ne fallait pas parler des zones d'ombre. Il est préférable de ne pas chausser les lunettes d'aujourd'hui pour juger nos aînés.
Maryvonne Blondin , membre du bureau de la délégation . - Mesdames, je veux vous dire combien vous nous avez bouleversés par vos témoignages. Nous vous sommes très reconnaissants du travail constant que vous réalisez depuis tant d'années.
Pour rebondir sur les propos de Max Brisson, pour ce qui concerne l'engagement des femmes, on pourrait remonter jusqu'à la Révolution et la période napoléonienne : Napoléon a renvoyé les femmes au foyer. L'engagement des femmes n'a pas été reconnu à sa juste mesure. À nous de faire en sorte qu'il en soit autrement.
Samedi dernier, j'ai assisté à une cérémonie de passation du drapeau national des villes médaillées de la Résistance - dix-huit villes sont médaillées de la Résistance, dont trois dans mon département. Dans ces villes, sont sorties de l'ombre pour leur courage et leur bravoure les femmes entrées dans la Résistance. Certaines d'entre elles sont mortes en déportation. Assez paradoxalement, ces résistantes n'ont pas toutes souhaité assurer la transmission de la mémoire auprès des jeunes et regrettent maintenant, à un âge avancé, de ne pas l'avoir fait. « J'aurais dû le faire quand je pouvais le faire », ai-je entendu. Mais nous, demandons-nous si nous aurions été capables de le faire - je me suis souvent posé cette question.
Annick Billon , présidente . - Permettez-moi de vous lire un extrait d'un discours d'un ancien résistant, président de l' Amicale des déportés des Sables-d'Olonne , décédé cette année à quatre-vingt-dix-sept ans, qui témoignait à chaque cérémonie organisée en Vendée, département dont je suis élue :
« Je témoignerai jusqu'au bout, en votre nom, pour crier aux générations présentes que le bonheur que l'on cherche, c'est le bonheur que l'on donne, ce n'est pas le bonheur proclamé des idéologies qui fabriquent des "Auschwitz", ce n'est pas le bonheur proclamé des idéologies qui fabriquent des "Goulag". Le bonheur, ce n'est pas celui des idéologies qui emprisonnent, ce ne sera jamais celui des idéologies qui égorgent et qui assassinent.
« Je témoignerai jusqu'au bout, en votre nom, jusqu'au bout de ma vie, chers amis disparus, pour dire aux jeunes que je rencontre dans les collèges et les lycées de Vendée, à ces jeunes que je retrouve chaque jour plus nombreux sur ma page Facebook , qu'ils sont désormais un ultime recours, qu'ils doivent bâtir, avant qu'il ne soit trop tard, cette société de liberté et de fraternité dont nous rêvions, cette société que nous n'avons pas pu ou pas su construire.
« Ils la bâtiront cette société, camarades, car les messages quotidiens qu'ils m'adressent sont des chants d'espérance. Ils le construiront, ce monde meilleur, chers amis disparus, car ce sont vos étoiles qui scintillent dans le coeur de nos arrière-petits-enfants vendéens.
« Au revoir, chers camarades, au revoir ».
Laure Darcos , vice-présidente . - Pour clôturer ce colloque sur une note positive et émouvante, si vous le permettez, Jacqueline Fleury, j'aimerais lire le passage de votre livre dans lequel vous évoquez votre retour du camp et vos retrouvailles avec votre père :
« On nous donne une chambre à deux lits, que je partage avec maman. On nous offre une nuit dans un hôtel de luxe, mais notre premier réflexe est de jeter les matelas par terre. Depuis des mois, nous couchons sur des planches ou à même le sol ; les sommiers de ces lits douillets sont bien trop mous, il nous faut du dur...
« Le lendemain, nous sommes interrogées par les militaires. Nous ne sommes donc pas au bout de nos épreuves !? Insupportable interrogatoire. Mais nous comprenons vite que des individus ont essayé de se glisser parmi les déportés, des collabos notamment, pour revenir en France. Les militaires traquent les imposteurs et nous posent un nombre incroyable de questions pour vérifier que nous ne mentons pas.
« Interrogatoire, bureaucratie tatillonne pour établir de nouveaux papiers administratifs, visites médicales... Nous subissons un parcours long et fastidieux qui, pour nous qui ne rêvons que de rentrer à la maison, prend une allure d'épreuve supplémentaire.
« Je garderai un mauvais souvenir du Lutetia, le brouhaha nous excède et nous avons l'impression d'avoir atterri sur une planète inconnue. Nous n'avons qu'une idée en tête : obtenir des nouvelles de notre famille et de notre maison. Mais nous sommes entraînées dans un tunnel qu'il nous faut suivre jusqu'au bout... Pas le choix.
« Enfin, après un certain temps, nous sommes invitées à regagner nos foyers. On nous donne dix francs et un ticket de métro à chacune, et, mesdames, repartez chez vous !
« Maman et moi errons seules et désemparées dans Paris. Nous décidons d'emprunter le métro, ce qui est surréaliste pour nous et pour les autres passagers, qui nous regardent comme des bêtes curieuses, avec un mélange d'ahurissement et de peine. Nous descendons à la station Saint-Lazare et prenons le train jusqu'à Versailles-Montreuil.
« Enfin, nous rentrons chez nous !
« Mais l'idée a du mal à s'imposer. Deux pas en avant, un pas en arrière... Nous sommes tétanisées par l'envie étrange de rebrousser chemin. Nous ne tenons pas sur nos jambes et je finis par m'asseoir sur le bord du trottoir, comme je le faisais par terre dans les camps. Aussitôt, maman me lance cette phrase baroque, c'est le cas de le dire :
« -- Mais ma fille, que fais-tu assise par terre ? Veux-tu te relever ! Tu es quand même à Versailles !
« Nous n'avons plus rien, nous sommes épuisées et anxieuses. Plusieurs quartiers de la ville ont été bombardés et nous nous demandons dans quel état nous allons retrouver la maison familiale.
« La voici. Nous sommes devant chez nous, au numéro 1 du boulevard de Lesseps. Bonne surprise : la maison est toujours debout. Nous nous arrêtons pour la contempler. Puis nous avons ce geste inouï : nous sonnons à notre porte. Nous sonnons pour rentrer chez nous !
« Il y a quelqu'un ?
« La porte s'entrebâille lentement, tout doucement, sur un homme fébrile et méconnaissable. Lui aussi semble avoir du mal à nous reconnaître. Et pourtant, c'est bien mon père qui se tient dans l'embrasure de notre entrée. Il vient de sortir de l'hôpital Percy. Il a été l'un des premiers prisonniers à avoir été rapatriés du camp de Buchenwald, par avion, parce qu'il était à l'article de la mort. Il pensait que nous ne rentrerions jamais et s'était fait à l'idée de continuer sa vie seul. Et voilà que devant lui se tiennent... sa femme et sa fille ! Des revenantes ! Oui, mais des revenantes bien vivantes ! Devenu presque aveugle, il nous touche pour être sûr de ce qu'il ne peut que deviner, reprendre contact en chair et en os avec ces êtres aimés.
« Nous serrant contre lui, il nous raconte, à mi-mot tant ces souvenirs l'accablent, les drames qu'il a vécus à Buchenwald, où il a été déporté le 15 août 1944 sous le matricule 77634. On l'a affecté aux Kommandos de Berga puis de Dora. Il est diabétique et sous insuline depuis l'âge de trente ans, il a donc été sevré et il est extraordinaire qu'il ait survécu dans son état : en général, les diabétiques mouraient en prison. Lui a pratiquement perdu ses yeux. Nous apprenons qu'il a subi les mêmes interrogatoires que nous de la part de la Gestapo.
« Ma grand-mère est à ses côtés ; elle est venue s'occuper de son gendre. L'émotion qui nous submerge tous les quatre est un moment extraordinaire, qui n'appartient qu'à nous, qu'il nous sera toujours difficile de partager avec d'autres ».
Annick Billon , présidente . - Merci de nous avoir fait partager cet extrait très émouvant.
Frantz Malassis . - La Fondation de la Résistance a créé une exposition sur les femmes dans la Résistance, qui est amenée à circuler dans les établissements scolaires et les établissements culturels. Présentée au Mémorial du Mont Valérien grâce à l'ONAC, elle a été interrompue dans sa circulation par la pandémie de COVID 19. Formée de treize panneaux, elle rappelle le contexte de l'Occupation et de Vichy s'agissant de la condition féminine, le rôle de pionnières de ces femmes - je pense notamment à Germaine Tillion au sein du réseau dit du musée de l'Homme, mais aussi à Hélène Viannay, co-fondatrice du mouvement Défense de la France , auquel Jacqueline Fleury appartenait. Cette exposition retrace également les trajectoires de certaines figures emblématiques comme Lucie Aubrac ou encore, par exemple, Marie-Madeleine Fourcade, la responsable du réseau Alliance .
Cette exposition à vocation pédagogique va maintenant circuler dans toute la France. Accompagnée d'un dossier thématique paru en juin 2020 dans notre revue, La lettre de la Fondation de la Résistance , elle rappelle que le rôle de ces femmes n'a pas toujours été reconnu au lendemain de la Libération. Seulement 9 % des titulaires de la Médaille de la Résistance française sont des femmes. Leur humilité a joué contre elles. Cette exposition vise à rappeler leur parcours, quels que soient leurs horizons.
Véronique Peaucelle-Delelis . - J'ajoute que 9 % des femmes sont médaillées, alors qu'elles étaient 15 % dans la Résistance, un pourcentage énorme au regard du contexte - elles n'avaient pas le droit de vote, ni d'entrer dans l'armée - et 15 % des déportés politiques. Six femmes seulement, cela a été dit, sont Compagnons de la Libération.
Je rends grâce aux associations et aux amicales qui se sont créées depuis lors. Après la guerre, les hommes se sont constitués en réseau, mais les femmes beaucoup moins. Elles sont rentrées dans l'ombre, retrouvant modestement leur activité. Heureusement, certaines d'entre elles ont réussi, contre leur modestie naturelle, à défier la condition qui était la leur pour témoigner et représenter les figures emblématiques des femmes dans la Résistance.
Jacqueline Fleury . - Permettez-moi de vous dire que l' ADIR n'est pas restée sans porter la Résistance. L'association a été très présente dès notre retour.
Frantz Malassis . - Au travers du bulletin de l'ADIR, vous avez rendu hommage à de nombreuses camarades qui ont survécu ou qui sont mortes dans les camps. La lecture du journal Voix et Visages relate de très belles trajectoires.
Jacqueline Fleury . - En effet, c'est vraiment extraordinaire.
Valérie Tesnière, directrice de la bibliothèque La Contemporaine . - Si je puis me permettre, ce bulletin est disponible en ligne dans la bibliothèque La Contemporaine via l'Argonnaute. Les archives de l' ADIR ont été versées à l'ex-Bibliothèque de documentation internationale contemporaine (BDIC), devenue La Contemporaine. Vous pouvez vous reporter aux témoignages « à chaud », si je puis dire.
Véronique Peaucelle-Delelis . - Je veux dissiper toute ambiguïté, Jacqueline Fleury. Je n'ai pas dit que vous n'aviez pas témoigné, j'ai dit que, proportionnellement les femmes avaient moins témoigné que les hommes. Au contraire, votre action auprès de l' ADIR et d'autres amicales et associations est absolument extraordinaire.
Annick Billon , présidente . - Je vous remercie toutes et tous de vos interventions. Nous constatons régulièrement, au sein de la délégation aux droits des femmes, que les femmes sont souvent moins actives dans les réseaux que les hommes. Vous avez montré la voie, Mesdames, et nous sommes admiratives de vos actions.
Malgré les conditions sanitaires qui s'imposent à nous, c'est une chance pour nous de vous avoir entendues cet après-midi. Derrière nos masques, vous n'avez sans doute pas pu déceler toutes les expressions de nos visages, mais nous vous avons écoutées et entendues religieusement, si vous me permettez ce terme dans l'enceinte de la Haute Assemblée. Nos échanges ont été très intéressants et passionnants.
Je laisserai Bernadette Fleury-Gougis, la fille de Jacqueline Fleury, nous lire la conclusion préparée par sa mère.
Bernadette Fleury-Gougis . - La conclusion dont je vais vous donner lecture est intitulée « Turbulences et tensions dans notre monde » :
« En ces temps d'inquiétudes, de menaces diffuses qui obscurcissent l'avenir de l'humanité, je suis profondément émue par le spectacle des désordres souvent dramatiques qui secouent le monde et angoissent notre pays.
« Si sensible aux multiples détresses qui favorisent des revendications justifiées, je comprends les transformations nécessaires de notre société, je ne peux approuver que la violence puisse détruire les valeurs essentielles dont nous avons hérité et que nous avons défendues dans des circonstances dangereuses.
« Nous étions alors persuadées que le courage quotidien et l'espoir qui permet de surmonter toutes les difficultés nous aidaient à franchir de nombreux obstacles.
« Cette conviction, une des raisons de mon engagement, n'est-elle pas certitude encore aujourd'hui ? »
Annick Billon , présidente. - L'heure est venue de clore cette rencontre et de remercier chaleureusement nos témoins pour leurs interventions. J'espère que nous aurons l'occasion de nous revoir sans masque.
(Applaudissements.)
* 21 Voir en annexe la liste des présidentes et secrétaires générales de l' ADIR .
* 22 La Société des amis de l'ADIR a été créée en 1951. Elle a été présidée à l'origine par Alexandre Parodi. André Postel-Vinay a par la suite longtemps été son président. Il démissionna de la présidence de cette association en 2002 dans le bureau de Geneviève de Gaulle (informations transmises en marge de la réunion par Jacqueline Fleury).
* 23 Comme l'a indiqué Jacqueline Fleury en marge de la réunion, il a également existé une association dénommée Les amis américains de l'ADIR , dont la présidente, Caroline Ferriday, très active, a eu un rôle important dans l'obtention de l'indemnisation des victimes d'expériences pseudo-médicales.
* 24 Le bulletin mensuel de l' ADIR , Voix et visages , a paru pour la première fois en juin 1946.