VI. COMPARAISONS INTERNATIONALES
A. LES SITUATIONS AU NIVEAU EUROPÉEN ET DANS QUELQUES ÉTATS MEMBRES
1. Les analyses des institutions européennes
a) L'étude de la Commission européenne de 2012 sur les énergies renouvelables et le développement rural
La Commission européenne a publié en 2012 une étude sur les énergies renouvelables et le développement rural qu'elle avait commandé à un cabinet de conseil 176 ( * ) . Elle y montrait alors que dans l'Europe des 27, en 2008, la production totale d'énergie finale à partir de sources renouvelables d'énergie s'élevait à 11,8 Mtep (la majeure partie de cette production étant exportée sous forme d'électricité, dont la plupart provenait de l'énergie éolienne et la production de chaleur étant principalement utilisée pour l'autoconsommation à la ferme) : 8,0 Mtep d'électricité et 3,8 Mtep de chaleur . La production d'énergie primaire (cultures énergétiques, bois forestier, déchets et fumier) dépassait 23,4 Mtep dont une partie était utilisée dans la production de biogaz pour la production d'énergie finale (chaleur, électricité). Le rapport prévoyait une augmentation nette de la production d'énergie par les agriculteurs (multiplication par quatre ou cinq entre 2008 et 2020). En termes de valeur énergétique, les cultures énergétiques pourraient prendre du retard sur les déchets agricoles, dont la production devrait être multipliée par quatre et atteindre 21 Mtep.
La Commission européenne a réalisé en vue de ce rapport une enquête auprès de 800 agriculteurs européens , aux exploitations de tailles différentes, parmi lesquels 372 ont déclaré avoir investi dans les énergies renouvelables pour un montant total de 125 millions d'euros, soit un investissement moyen de près de 350 000 euros par agriculteur . Les investissements varient entre 37 000 euros dans le Warminsko-Mazurski (Pologne) et environ un million d'euros dans le Brandebourg et à Valence. Des chiffres intermédiaires (environ 300 000 euros) ont été communiqués pour la Sarre, la province de Soria (Espagne) et la Haute-Autriche. Ces chiffres ne comprennent pas les investissements que des acteurs externes pourraient réaliser (location de toiture, etc...). La plupart des investissements concernent la biomasse (37 %) et plus particulièrement la biomasse solide (le bois), utilisée pour le chauffage ou la production d'électricité. Les autres sources importantes sont le photovoltaïque (26 %), le solaire thermique (11 %) et le biogaz (8 %).
La plupart des investissements ont été réalisés par les agriculteurs eux-mêmes en utilisant leurs propres fonds ou des emprunts bancaires contractés à titre personnel ou entrepreneurial. Seul 15 % des investissements concernent un acteur externe.
Si l'intervention d'entreprises externes peut avoir des avantages considérables pour les agriculteurs (moins d'endettement, prise en charge des autorisations et des raccordements...), ces derniers se montrent réservés voire hostiles à l'intervention d'acteurs tiers . Cela s'explique par le passé et notamment la volonté de certaines compagnies du Brandebourg d'acheter les terres et de salarier les agriculteurs, plutôt que d'investir dans les projets.
Les agriculteurs qui ont investi dans les EnR déclarent souvent des revenus supérieurs à la moyenne régionale . L'effet sur les revenus le plus fort concerne ceux qui ont investi dans le photovoltaïque et le biogaz . Ils bénéficient plus souvent d'un successeur pour reprendre leur exploitation que ceux qui n'ont pas investi dans les EnR. Il n'y a pas d'autre grande différence entre les agriculteurs qui ont investi dans ces EnR et ceux qui ne l'ont pas fait.
La plupart des agriculteurs affirment investir dans ces projets pour des raisons économiques et notamment la volonté de diversifier leurs sources de revenu, dans le contexte de la volatilité des prix des matières agricoles .
Au niveau de leurs revenus, les agriculteurs qui produisent de la matière première afin d'alimenter des installations sans pour autant posséder ces installations (méthaniseurs notamment) connaissent des effets positifs sur leurs revenus (hausse de 1 à 10 % en Allemagne, en Autriche ou en Espagne). En Pologne, cet impact positif est plus important encore. Pour les agriculteurs qui investissent dans ces installations, la situation est plus compliquée étant donné l'investissement considérable nécessaire.
Le développement des énergies renouvelables dans l'agriculture implique une masse de travail nécessaire plus importante dans les fermes . Dans le cas polonais, l'arrivée des EnR dans l'agriculture a engendré une forte demande de main d'oeuvre dans les installations agricoles. Cet effet, même s'il reste positif, était moins important dans les autres régions. Pour certaines exploitations, l'effet a été négatif en raison d'une conversion de cultures intensives vers des cultures énergétiques moins intensives, si elles étaient assez rentables. Les agriculteurs constatent que les investissements dans les EnR augmentent les revenus de leur exploitation. Cette hausse de travail concerne surtout la production de biomasse solide et de biogaz, le photovoltaïque et l'éolien n'ont pas cet effet.
L'étude de la Commission européenne présente certaines limites : bien qu'un grand nombre de sources aient été consultées au cours du processus de collecte des données, il existe très peu de sources de données centralisées avec des données pertinentes recueillies selon la même méthodologie et le même format pour tous les pays ; la plupart ayant même des données incomplètes voire inexactes.
Cette limite confirme les analyses de vos rapporteurs. Étant donné que la plupart des données nécessaires n'étaient pas directement disponibles, des intermédiaires ont été utilisés pour calculer des estimations. Et parce que des données différentes étaient disponibles dans différents pays, il n'a pas été possible d'établir une règle comptable unique pour tous les pays, ce qui a introduit certaines incohérences dans les soldes d'énergies renouvelables. En raison des écarts entre les différentes sources, les chiffres totaux ne sont pas toujours la somme des sous-catégories.
b) Le rapport de la Cour des comptes européenne de 2018 « Énergies renouvelables et développement rural durable »
En 2018, le rapport spécial de la Cour des comptes européenne « Énergies renouvelables et développement rural durable : d'importantes synergies sont possibles, mais rarement exploitées » 177 ( * ) a souligné que plusieurs études démontrent que les intérêts locaux et le développement rural durable peuvent tirer parti du déploiement de projets dans le domaine des énergies renouvelables .
Si les énergies renouvelables peuvent créer des emplois directs (exploitation et maintenance du matériel, par exemple), la plupart des emplois à long terme sont indirects et se retrouvent tout au long de la chaîne d'approvisionnement (construction, fabrication, ou secteurs de la foresterie et de l'agriculture dans le cas de la biomasse).
La Cour des comptes européenne a identifié quelques facteurs clés et quelques freins à l'essor de la production d'énergie dans le monde rural et a souligné le manque de données disponibles , comme l'ont fait également vos rapporteurs et la Commission européenne.
S'agissant des facteurs clés permettant de faire des énergies renouvelables un vecteur de développement rural , la Cour invite à :
- intégrer les stratégies énergétiques dans la stratégie de développement économique local , de telle sorte qu'elles coïncident avec le potentiel et les besoins locaux ;
- intégrer les énergies renouvelables dans les chaînes d'approvisionnement plus vastes des économies rurales , telles que l'agriculture, la sylviculture, l'industrie traditionnelle et le tourisme vert ;
- limiter les subventions tant dans leur portée que dans leur durée et ne les utiliser que pour soutenir des projets dans le domaine des énergies renouvelables en passe d'être viables économiquement ;
- éviter d'imposer des types d'énergies renouvelables à des régions qui ne sont pas de nature à les accueillir ;
- mettre l'accent sur des technologies relativement matures , comme la production de chaleur à partir de la biomasse, la petite hydroélectricité et l'éolien ;
- créer un système énergétique intégré basé sur de petits réseaux capables de soutenir des activités de production ;
- reconnaître que les énergies renouvelables sont en concurrence avec d'autres secteurs pour les intrants, en particulier les terres ;
- évaluer les projets potentiels à l'aune de critères d'investissement et non sur la base de niveaux de subvention à court terme ;
- localement, emporter l'adhésion des populations en leur procurant des avantages manifestes et en les faisant participer au processus.
Pour ce qui concerne les freins, la Cour indique que la bioénergie n'est pas synonyme d'énergie durable . Le caractère durable de la bioénergie dépend dans une large mesure de la manière dont la biomasse est produite et utilisée. La production de biomasse et son utilisation ne sont pas nécessairement durables, par exemple si elles ont sur les populations, l'environnement ou les ressources naturelles une incidence négative telle qu'elle pourrait compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs besoins.
La bioénergie s'accompagne également de risques environnementaux et socioéconomiques pour les zones rurales . À titre d'exemple, le changement d'affectation des sols, l'intensification de la gestion des forêts ou la culture intensive de plantes énergétiques peuvent entraîner un déclin de la biodiversité, une dégradation des sols, un stress hydrique ou une pollution de l'eau. La combustion de biomasse ligneuse peut également entraîner une hausse des émissions de certains polluants atmosphériques nocifs, et des discussions sont en cours quant à la question de savoir si ce type de biomasse est réellement neutre en carbone. La Cour rappelle que la Commission européenne a recensé seize risques environnementaux et socioéconomiques liés à la production et à l'utilisation de bioénergie 178 ( * ) et a analysé les risques liés à la production et à l'utilisation de bioénergie dans l'analyse d'impact relative à la durabilité de la bioénergie et élaborée à l'occasion de la refonte de la directive EnR.
Enfin, la Cour souligne le problème du manque de données : il n'existe pas, au niveau de l'UE, d'informations exhaustives sur le nombre de projets, la quantité d'énergie produite à partir de sources renouvelables ou la capacité installée . Il est donc impossible de quantifier la contribution du FEADER au déploiement des énergies renouvelables dans les zones rurales. En l'absence d'informations pertinentes et fiables sur les énergies renouvelables, il n'est pas possible d'apprécier l'efficacité de ces mesures sur cette période, et il demeure difficile de comprendre sur quelle base les États membres ont conçu les sections de leurs Programmes de développement rural (PDR) consacrées à ces énergies. Ces constatations concordent avec les observations précédentes concernant les données de suivi de l'aide du FEADER et du Fonds de cohésion en faveur des énergies renouvelables pour la période de programmation 2007-2013.
2. L'Allemagne
a) Généralités
Le mix énergétique de l'Allemagne est composé à 42,4 % d'énergies renouvelables en 2019 . Le secteur agricole contribue principalement à la production de biogaz (5,8 % du mix énergétique). Le secteur agricole ne contribue que partiellement à la production d'énergie d'origine éolienne et photovoltaïque (en 2016, les agriculteurs sont responsables de 16 % de la capacité énergétique solaire totale de l'Allemagne). Pour mémoire, les énergies renouvelables ont représenté en 2019 14 % de la consommation d'énergie primaire.
Ainsi, en 2017, la part de la production d'énergies renouvelables dans le mix énergétique allemand est supérieure à celle du mix énergétique français ; de plus, le mix énergétique allemand repose principalement sur le charbon, à l'inverse de la France qui a privilégié l'énergie nucléaire.
b) La production d'énergie dans le secteur agricole par filière
L'Allemagne réalise la moitié de la production d'énergie primaire européenne sous la forme de biogaz ( 9 444 unités installées selon le dernier baromètre de l'OFATE d'avril 2020 qui dresse un bilan pour 2018, dont 200 en injection) contre environ 500 méthaniseurs liés à l'agriculture en France (c'est-à-dire utilisant au moins 50 % d'intrants agricoles) pour un total inférieur à 1 000 installations toute forme d'intrants confondus 179 ( * ) .
La méthanisation en Allemagne témoigne de davantage de production issue des exploitations agricoles mais cela correspond aussi à une certaine dérive, à l'instar d'une méthanisation basée sur le maïs cultivé à cette fin et non pas sur les déjections animales. Ces pratiques aggravent les compétitions pour l'usage de la biomasse vis-à-vis de l'alimentation humaine .
Une analyse détaillée par secteur conduit aux observations suivantes :
- le secteur de l'éolien connaît une croissance rapide, la puissance installée ayant presque doublé entre 2010 et 2019, et la production d'électricité d'origine éolienne étant passée de 38,4 TWh à 101,8 TWh sur la même période 180 ( * ) . En termes de consommation finale, l'énergie éolienne passe de 7 % de la consommation totale d'énergie renouvelable en 2009 à plus de 17 % en 2019 ;
- la biomasse a augmenté plus modestement en passant de 5 % à 8,2 % sur la même période. C'est la production principale d'énergie dans le secteur agricole allemand grâce aux cultures énergétiques, à la biométhanisation, et à la production de bois ;
? pour la chaleur, la production a atteint 2 250 millions de tonnes en 2017 ;
? la production de biocarburants représente 3,4 millions de tonnes en 2018 ;
? concernant la production d'électricité grâce à la biomasse, selon des données de 2017 avec 8 700 installations de biogaz présentes en Allemagne, il s'agit d'une puissance électrique de 4 953 MW, selon l'ambassade de France en Allemagne. L'Office franco-allemand pour la transition énergétique (OFATE) rapporte des chiffres actualisés en 2020 pour l'année 2018, avec une puissance électrique de 4 943 MW 181 ( * ) avec 9 444 unités et une projection de l'OFATE pour 2019 table sur un nombre total de 9 523 unités de méthanisation, pour une puissance électrique totale installée de 5 228 MW.
- s'agissant du secteur photovoltaïque , la puissance raccordée connaît une augmentation considérable, passant de 1896 MWc en 2014 à 3943 MWc en 2019. La production d'électricité solaire photovoltaïque, quant à elle, est passée de 56,15 TWh à 71,62 TWh sur la même période. Par ailleurs, l'OFATE précise indique qu'au premier trimestre 2020, la production photovoltaïque s'est élevée à 7 TWh, représentant ainsi 4,7 % de la production brute d'électricité (contre 3,8 % sur la même période en 2019) 182 ( * ) . En outre, les agriculteurs sont responsables en 2016 de 16 % de la capacité énergétique solaire en Allemagne, soit 6 528 MW, avec pourtant un potentiel technique d'au moins 1,4 TW 183 ( * ) .
La question de l'introduction des distances forfaitaires entre éoliennes et habitations est au coeur des débats actuels sur la politique énergétique allemande. Le régime actuel donne le pouvoir discrétionnaire aux régions ( Länder ). Les distances en place varient donc en fonction de la région concernée, généralement entre quelques 300 mètres à 1 000 mètres. Par exemple, la région du Schleswig-Holstein dans le nord de l'Allemagne connaît depuis quelques années une règle de distance de 1 000 mètres. En Bavière, un cas exceptionnel en ce qui concerne le développement éolien, la règle en place est 10 fois la hauteur totale de l'installation (règle « 10H »), rendant difficile l'implantation des éoliennes dans cette région.
Le gouvernement allemand a proposé d'instaurer une règle nationale d'une distance forfaitaire minimale de 1 000 mètres . Néanmoins, cette proposition a été beaucoup contestée par les acteurs industriels et la population, rendant plus ou moins impossible la réalisation des projets de Repowering ou l'implantation de nouveaux projets dans un certain nombre de zones. Il faut savoir dans ce contexte que la densité du pays est environ deux fois plus intense par rapport à la France. En 2020, la volonté du ministre de l'Économie de retirer la proposition d'une règle de distance de 1 000 mètres a été exprimée. Lors d'un sommet entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des régions le 12 mars 2020, cette question faisait partie des points débattus pour permettre la sortie du nucléaire et du charbon tout en assurant la sécurité d'approvisionnement du pays.
c) Objectifs et incitations
Les énergies renouvelables représentent un véritable intérêt pour les agriculteurs : il s'agit d'un complément de revenu assez stable par rapport à la production alimentaire, dont les quantités produites et prix de ventes sont plus fluctuants. Les énergies renouvelables concourent à une meilleure compétitivité globale des exploitations , mais ce n'est qu'un aspect parmi d'autres.
Ce soutien des pouvoirs publics a été impulsé par la loi sur les énergies renouvelables (EEG) de 2000 et la loi sur les énergies renouvelables de 2009, qui accorde un avantage financier supplémentaire à l'utilisation des déjections animales et de la biomasse issue de l'entretien des espaces verts.
Le gouvernement allemand cherche à augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation d'électricité à 65 % d'ici 2030 . Ainsi, la loi sur les énergies renouvelables (EEG) a été révisée en 2017 avec les objectifs suivants concernant la part de production électrique issue des énergies renouvelables : 45 % en 2025, 60 % en 2035 et au moins 80 % en 2050. Cette loi poursuit également l'augmentation du parc photovoltaïque, éolien, et des installations biomasses, afin d'atteindre 2 800 MW d'énergie éolienne en 2020, 2500 MW d'énergie solaire en 2030 et 200 MW d'énergie issue de la biomasse en 2022.
L'EEG prévoit aussi de subventionner la production d'énergie renouvelable par la mise en place de tarif de rachat fixé par l'État de 2012 à 2017, puis elle instaure un subventionnement de l'énergie par mise en concurrence au travers d'appels d'offre depuis 2017.
Le programme de financement des énergies renouvelables du ministère fédéral de l'agriculture reçoit 61 millions d'euros de budget et a pour priorité :
- la gestion durable de flux de matière pour un approvisionnement optimal des systèmes de production et de transformation d'énergie en ressources renouvelables ;
- le développement de la production et de l'utilisation durable des matières premières renouvelables ;
- le développement décentralisé des ressources dans les systèmes aquatiques ;
- l'information et le dialogue avec la société civile sur la bioéconomie et la durabilité.
Le gouvernement allemand a également prévu des bonus et des primes aux cultures énergétiques.
d) Quelques freins au développement de ces productions d'énergie
Parmi les freins au développement de ces énergies, les contraintes foncières particulièrement fortes empêchent l'augmentation des surfaces agricoles dans le but d'augmenter la production de biomasse.
e) Les perspectives technologiques
Le groupe d'innovation APV-RESOLA étudie une nouvelle forme de système photovoltaïque qui préserve à la fois la production d'électricité et les cultures agricoles : le système dit agrophovoltaïque (APV). Ce système pourrait résoudre la concurrence pour les terres entre production alimentaire et production d'énergie.
Un centre de recherche allemand sur la biomasse (DBFZ) a été créé par le ministère fédéral de l'agriculture en février 2008 afin de renforcer le domaine de la bioénergie.
3. Les Pays-Bas
a) Généralités
Les Pays-Bas produisent et consomment principalement du gaz , jusqu'à développer un état de dépendance au gaz. En 2018, le gaz naturel représente 79 % de la production énergétique néerlandaise et 41 % de la demande primaire en énergie. Le gaz naturel couvrait en outre 45 % de la production électrique néerlandaise et 87 % du chauffage des foyers.
C'est pourquoi les Pays-Bas cherchent surtout à développer la production de biogaz . Il faut aussi souligner qu'il s'agit d'un des pays où la densité de l'élevage est parmi la plus élevée au monde , d'où des quantités considérables d'effluents qui peuvent ainsi être valorisées.
b) La production d'énergie dans le secteur agricole par filière
En 2018, il existait plus de 250 digesteurs en fonctionnement aux Pays-Bas pour une capacité installée de 219 mW. En outre, il existe 25 usines de valorisation du biogaz qui, soit alimentent le réseau de gaz en biométhane, soit l'utilisent comme carburant pour les véhicules. Selon l'Agence Internationale de l'Energie, 56 % du biogaz néerlandais est converti en chaleur, 33 % en électricité et 8 % de l'énergie est utilisée comme carburant pour véhicules.
Les Pays-Bas misent sur le développement d'une filière de production de gaz vert, avec l'objectif d'atteindre un volume de production d'1,2 milliard de m 3 de biogaz en 2020 et jusqu'à 3,7 milliards de m 3 en 2030.
c) Objectifs et incitations
L'agenda néerlandais de transition énergétique prévoit d' augmenter significativement la part d'EnR dans leur mix énergétique, de 8,6 % en 2019 à 16 % en 2023 et 40 % en 2030. L'agenda politique fixe aussi un objectif de réduction des émissions de CO 2 de -25 % en 2020 par rapport à 1990, et de -49 % d'ici à 2030, afin de préparer la neutralité carbone à l'horizon 2050.
Ainsi, le Gouvernement soutient le développement de la filière biogaz au travers d'une collaboration étroite entre secteur public et acteurs privés. Plusieurs mécanismes participent à ce soutien : les Green Deals (partenariats public-privés, sans subvention), les EIA et les SDE+...
d) Quelques freins au développement de ces productions d'énergie
Parmi les freins au développement des énergies, peut être relevé le défaut de volonté politique : le ministère de l'économie, des finances et de la relance et l'agence RVO ont envisagé à plusieurs reprises une réduction progressive, estimée importante selon plusieurs observateurs, du subventionnement de la filière biomasse et biogaz dans le cadre de la réforme du programme SDE+.
4. Le Royaume-Uni
a) Généralités
Le secteur agricole contribue très faiblement à l'économie nationale (moins de 1 %), et son revenu total est en baisse dernièrement.
Près de 40 % des agriculteurs produiraient de l'énergie renouvelable . L'énergie produite génère au moins 10 % des besoins en électricité du Royaume-Uni (environ 333 TWh), ce qui équivaut à la consommation d'électricité de 10 millions de ménages.
b) La production d'énergie dans le secteur agricole par filière
Les deux principaux types de production d'énergie du secteur agricole sont le photovoltaïque et la méthanisation .
Les agriculteurs et les producteurs associés produisent environ 70 % de l'énergie solaire du Royaume-Uni, ce qui représente plus de 1 200 fermes solaires et plus de 19 000 toits solaires.
c) Objectifs et incitations
En décembre 2018, le Gouvernement a publié une stratégie nationale de la bioéconomie pour la période 2018 à 2030, composée de quatre objectifs principaux :
- maximiser la productivité et le potentiel des atouts bioéconomiques déjà existants ;
- créer les bonnes conditions sociétales et commerciales pour permettre le bon développement de nouveaux produits bio-sourcés ;
- miser sur la recherche, le développement et l'innovation des entreprises et instituts britanniques pour développer la bioéconomie ;
- obtenir des résultats réels et quantifiables sur l'économie britannique.
NFU Energy, le principal syndicat agricole britannique, est l'une des principales sociétés de conseil en énergie du Royaume-Uni. Il accompagne fortement les agriculteurs dans la production d'énergie. Ce syndicat a publié son ambition d'atteindre la neutralité des émissions de GES pour le secteur agricole en 2040.
Afin de remplir ces objectifs, le plan Smart export guarantee est entré en vigueur au 1 er janvier 2020 : il s'agit d'une obligation fixée par le Gouvernement pour les fournisseurs d'électricité de payer l'électricité produite par des petits producteurs d'énergie bas carbone, afin de pouvoir exporter cette énergie vers le réseau national. Enfin, le projet d' Agriculture bill déposé en janvier 2020 vise à remplacer la politique agricole commune afin de mettre en place de nouvelles aides basées sur les services publics.
d) Quelques freins au développement de ces productions d'énergie
L'un des freins au développement des énergies réside dans le fait que les innovations technologiques liées à l'agriculture peinent à être appliquées car peu d'entreprises britanniques cherchent à commercialiser l'innovation .
e) Les perspectives technologiques
L'agritech est fortement soutenue par le Gouvernement et fait partie intégrante de la nouvelle stratégie industrielle depuis 2017. Cette dernière met en particulier l'accent sur l'intelligence artificielle au service de divers domaines d'application dont l'agriculture.
5. L'Italie
a) Généralités
La production nationale d'énergie était de 43,419 Mtep en 2018. Il n'y a pas de chiffres précis concernant la part du secteur agricole à la production de chaque EnR. Les origines de l'énergie électrique sont en revanche connues.
b) La production d'énergie dans le secteur agricole par filière
L'énergie électrique produite en 2018 en Italie à partir de sources renouvelables se répartit comme suit :
- hydraulique : 49,3 TWh ;
- solaire : 22,7 TWh ;
- bioénergies : 19,2 TWh ;
- éolien : 17,5 TWh ;
- géothermie : 6,1 TWh.
L'Italie compte 1 629 exploitations agricoles actives dans la production de biogaz en 2017 pour un total de 988 MW, ce qui représente 0,14 % des exploitations. Par ailleurs, une augmentation exponentielle du nombre d'installations de production de biogaz agricole a été constatée entre 2000 et 2015. À cette date, le nombre d'installations était de 1 300, représentant une capacité de production de 2 milliards de mètres cubes.
c) Objectifs et incitations
Le Plan national intégré pour l'énergie et le climat publié en décembre 2019 prévoit la valorisation des résidus agricoles, y compris pour éviter la pratique de la combustion en plein champ.
Le décret du 4 juillet 2019, nommé « Fer 1 », vise à inciter la production d'électricité à partir des sources renouvelables les plus compétitives (éolien, hydroélectricité, photovoltaïque), avec un tarif global incitatif .
Concernant le biogaz et biométhane, la technologie de production est consolidée et largement diffusée. De plus, la filière est capable de produire de l'énergie avec une utilisation limitée des sols. L'utilisation du digestat en substitution des fertilisants de synthèse permet de réduire les coûts de production des cultures. Enfin, c'est une production d'énergie prévisible et stable.
Au sujet des biocarburants, les technologies de production industrielle sont matures et fiables. De plus, la réglementation technique de référence et les standards qualitatifs sont bien définis. C'est une production d'énergie prévisible et stable.
d) Quelques freins au développement de ces productions d'énergie
Le premier frein est de nature politique , en raison de la position du ministère de l'agriculture et de l'alimentation italien sur le plan climat-énergie (juillet 2019), et notamment un problème de gouvernance au plan national.
De plus, la filière bioénergie est bloquée par :
- un niveau insuffisant de connaissance des opportunités du secteur ;
- le manque d'une stratégie de filière au niveau territorial ;
- la limitation des financements à disposition pour des interventions efficaces de mise à jour et intégration des bases de données statistiques ;
- des incohérences et lacunes dans la législation sur les déchets et sur les fertilisants .
6. L'Espagne
a) Généralités
Sur les 933 000 exploitations agricoles présentes en Espagne, seules 566 d'entre elles produiraient des énergies renouvelables. Cela représente 0,06 % des exploitations agricoles espagnoles.
b) La production d'énergie dans le secteur agricole par filière
Les principales sources d'énergie dans ce secteur sont l'énergie photovoltaïque et la biomasse :
- dans le photovoltaïque , 25 % des nouvelles puissances installées photovoltaïques ces cinq dernières années ont été installées par des agriculteurs ;
- la biomasse reste peu exploitée, le plan national intégré Énergie Climat prévoit de doubler la capacité installée de cette technologie, jusqu'à 1 677 MW.
c) Objectifs et incitations
Le décret 244/2019 facilite l'autoconsommation et la production collective, mais ne s'adresse pas à une filière en particulier.
Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation prépare un Plan directeur d'irrigation pour la période 2020-2027, qui doit identifier 8 000 hectares prioritaires qui doivent incorporer des mesures d'efficacité énergétique.
Dans le cadre des mesures annoncées le 25 février 2020 par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, 30 millions d'euros seront destinés au déploiement d'EnR dans le secteur agricole.
Le Gouvernement actuel a un projet de loi de transition écologique avec des objectifs ambitieux de décarbonation et de pénétration des EnR dans le mix électrique (74 % à l'horizon 2030).
Le Plan national énergie climat a pour objectif l'installation, d'ici 2030, de :
- 22 900 MW de photovoltaïque ;
- 5 000 MW de thermosolaires ;
- 3 500 MW de pompes à chaleur ;
- 800 MW de biomasse ;
- 500 MW d'hydraulique ;
- 30 MW de géothermie.
d) Les perspectives technologiques
Le Centre d'édaphologie et biologie appliquée du Bassin du Segura est l'un des principaux centres de recherche travaillant sur l'utilisation de l'intelligence artificielle dans le secteur agricole.
Le premier distributeur espagnol de gaz, Naturgy, travaille sur un projet (COSIN) afin de produire du biométhane synthétique à partir du surplus de l'hydrogène produit par les ENR.
* 176 Cf. https://ec.europa.eu/agriculture/sites/agriculture/files/external-studies/2012/renewable-energy-impacts/exec_sum_en.pdf
* 177 Cf. le rapport spécial n° 05/2018 de la Cour des comptes européenne
https://www.eca.europa.eu/fr/Pages/DocItem.aspx?did=44963
* 178 Cf. le document de travail de la Commission SWD(2014) 259 final du 28.7.2014 intitulé « State of play on the sustainability of solid and gaseous biomass used for electricity, heating and cooling in the EU » ainsi que le document de travail de la Commission SWD(2016) 418 final du 30.11.2016, intitulé « Impact assessment: Sustainability of Bioenergy. Accompanying the document Proposal for a Directive of the European Parliament and of the Council on the promotion of the use of energy from renewable sources ».
* 179 Données EurObserv'ER 2015.
* 180 OFATE, Baromètre OFATE de l'éolien terrestre en Allemagne. 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/energie-eolienne/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-leolien-terrestre-en-allemagne.html
* 181 OFATE, Baromètre OFATE du biogaz en Allemagne, 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/bioenergies/actualites/lecteur/barometre-ofate-de-biogaz-en-allemagne.html
* 182 OFATE , Baromètre OFATE sur le photovoltaïque en Allemagne, 2020. Disponible sur : https://energie-fr-de.eu/fr/energie-solaire/actualites/lecteur/barometre-sur-le-photovoltaique-en-allemagne.html
* 183 Selon l'Institut Fraunhofer.