CONSULTATION PUBLIQUE SUR
L'ATTRIBUTION
DES FRÉQUENCES 5G
POSITION DE LA COMMISSION DE
L'AMÉNAGEMENT
DU TERRITOIRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
Lors de sa réunion du mercredi 11 décembre, l a commission de l'aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a, sur proposition de son président Hervé Maurey, sénateur de l'Eure, et de Patrick Chaize, sénateur de l'Ain, président du groupe d'études « Numérique », décidé à l'unanimité de contribuer à la consultation publique lancée par le Gouvernement le 28 novembre 2019 sur les projets d'arrêté 19 ( * ) et de décret 20 ( * ) déterminant les modalités et les conditions d'attribution des autorisations d'utilisation de fréquences 5G dans la bande 3,5 GHz, telles que fixées par le cahier des charges de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) 21 ( * ) , ainsi que le prix de réserve de cette attribution.
La commission rappelle que l'aménagement du territoire devra constituer un objectif majeur pour le déploiement de la 5G. Pour ne pas répéter les erreurs du passé, commises en matière de 3G et de 4G, il est donc crucial de prendre en compte, dès aujourd'hui, la dimension territoriale pour faire du déploiement de la 5G un levier de résorption des inégalités et non un accélérateur de la fracture numérique.
Pour la commission, résorber les zones blanches en assurant la couverture du territoire par les générations mobiles précédentes, objectif du New Deal mobile de 2018, est une priorité . Cependant, la commission considère que le New Deal et le déploiement équilibré de la 5G ne sont pas antinomiques : le succès de l'un préfigurera la réussite de l'autre, pour faire du numérique un facteur de résorption de la fracture territoriale.
À cet égard, les sénateurs de la commission ont accueilli favorablement les modalités de déploiement inscrites dans le cahier des charges de l'Arcep, qui répondent à l'ambition d'une couverture numérique du territoire (A). Ils ont rappelé que le succès du déploiement de la 5G dépendrait de la capacité du régulateur à assurer le suivi des obligations et engagements des opérateurs, qui devront être restrancrits dans leurs autorisations d'utilisation de fréquences. Le cas échéant, l'Arcep devra être en mesure de recourir à son pouvoir de sanction.
La commission a cependant regretté que de véritables clauses de revoyure n'aient pas été prévues pour imposer, le cas échéant, une adaptation des obligations en cours de déploiement (B). Elle a également estimé que le prix de réserve retenu pourrait limiter l'intensité concurrentielle sur le marché (C).
A) Des obligations et engagements répondant à l'ambition d'une couverture numérique du territoire
Le cahier des charges de l'Arcep impose une trajectoire de déploiement de la 5G sur le territoire français (3 000 sites en 2022, 8 000 sites en 2024, puis 10 500 sites en 2025). Pour les deux derniers jalons (2024 et 2025), 25 % des sites devront être déployés dans une zone rassemblant les communes des zones peu denses et celles des territoires d'industrie, hors des principales agglomérations. La commission accueille favorablement cette obligation, constatant cependant qu'elle ne s'appliquera qu'en fin de déploiement.
Elle considère également que l'accroissement des débits des sites mobiles existants prévu par le cahier des charges contribuera à améliorer la couverture numérique du territoire 22 ( * ) en multipliant le débit par 10 dans les zones peu denses. Elle rappelle néanmoins que la portée de cet accroissement des débits dépendra grandement du succès du New Deal mobile , qui devra permettre une résorption des zones blanches par l'installation échelonnée d'infrastructures passives d'ici 2027.
Elle adhère en outre aux obligations de couverture des axes de transport, en particulier à l'obligation de couverture des routes principales en 4G+ d'ici 2027.
Enfin, la commission accueille favorablement les engagements supplémentaires prévus par le cahier des charges, notamment l'exigence d'une plus grande transparence, tant sur la prévisibilité des déploiements que sur d'éventuelles pannes. Elle rappelle néanmoins que l'Arcep devra être vigilante à ce que ces engagements supplémentaires soient fidèlement retranscrits dans les autorisations d'utilisation de fréquences.
Pour assurer le respect des obligations et engagements des opérateurs, et ainsi garantir une couverture équilibrée du territoire en 5G et 4G+, il reviendra à l'Arcep d'assurer le suivi des déploiements, et le cas échéant, de recourir à son pouvoir de sanctions, défini à l'article 36-11 du code des postes et des télécommunications électroniques. La commission note par ailleurs qu'en fixant la durée des autorisations d'utilisation de fréquences à 15 ans plutôt qu'à 20 ans, le cahier des charges facilitera le contrôle par l'Arcep des obligations et engagements.
B) Des rendez-vous intermédiaires, à défaut de réelles clauses de revoyure
Deux rendez-vous intermédiaires sont prévus à l'horizon 2023 et à l'horizon 2028 pour permettre au régulateur de réaliser un point d'étape sur la mise en oeuvre des obligations et engagements des opérateurs. Sur cette base, une adaptation des obligations pourra être décidée après accord avec l'opérateur titulaire de l'autorisation d'utilisation. Cette faculté de réaliser des points d'étape n'existait pas dans les cahiers des charges de précédentes générations mobiles : la commission ne peut donc que saluer cette nouveauté, qui facilitera le suivi par l'Arcep des déploiements.
Cependant, elle regrette que ces points d'étape ne constituent pas de véritables clauses de revoyure, l'opérateur concerné pouvant s'opposer à la révision des obligations.
C) Un prix de réserve élevé qui pourrait limiter l'intensité concurrentielle sur le marché
Le projet d'arrêté prévoit un prix de réserve de 2,17 milliards d'euros pour l'attribution des autorisations d'utilisation de fréquences. La commission s'inquiète d'un tel prix de réserve, élevé, qui pourrait limiter l'intensité concurrentielle sur le marché.
* 19 Projet d'arrêté relatif aux modalités et aux conditions d'attribution d'autorisations d'utilisation de fréquences dans la bande 3,5 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un système mobile terrestre.
* 20 Projet de décret modifiant le décret n° 2007-1532 du 24 octobre 2007 modifié relatif aux redevances d'utilisation des fréquences radioélectriques dues par les titulaires d'autorisations d'utilisation de fréquences délivrées par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
* 21 Décision n° 2019-1386 de l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse en date du 21 novembre 2019 proposant au ministre chargé des communications électroniques les modalités et les conditions d'attribution d'autorisations d'utilisation de fréquences dans la bande 3,4 - 3,8 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un réseau radioélectrique mobile ouvert au public.
* 22 Dès 2022, au moins 75 % des sites devront bénéficier d'un débit au moins égal à 240 Mbit/s. Cette obligation sera progressivement généralisée à tous les sites jusqu'à 2030.