C. PRÉVOIR DES MOYENS SUFFISANTS DE L'ETAT POUR RÉSORBER LES DÉSÉQUILBRES TERRITORIAUX ET DÉVELOPPER LA PRATIQUE SPORTIVE
1. Une mission de l'État pour résorber les déséquilibres territoriaux à réaffirmer
La réforme de la gouvernance des politiques du sport a pour effet de transférer à l'Agence nationale du sport des compétences qui relevaient jusqu'à présent du ministère des sports.
Dans son rapport 26 ( * ) sur le projet de loi qui a acté la création de l'Agence nationale du sport, votre rapporteur avait insisté sur l'avenir incertain du ministère. La ministre des sports a elle-même indiqué lors de son audition que le maintien du ministère à l'issue des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 n'était pas acquis.
À court terme, une évolution majeure devrait concerner la direction des sports appelée à se recentrer sur quatre missions principales :
- définir la stratégie nationale de l'État, les enjeux régaliens et l'action interministérielle afin de coordonner des problématiques transversales liées au sport (sport santé, handicap, rayonnement international, attractivité économique...) ;
- exercer la tutelle sur les établissements publics (INSEP, écoles spécialisées, CREPS) et le pilotage des services déconcentrés ;
- contrôler les pratiques et le respect de l'éthique (lutte contre le dopage, prévention de la violence et de la radicalisation...) ;
- assurer la tutelle de l'Agence nationale du sport et le suivi de la convention d'objectifs.
Votre rapporteur observait par ailleurs que « le rétrécissement du champ d'intervention du ministère des sports au niveau central s'accompagnera d'une profonde réorganisation de ses services déconcentrés qui sont appelés à rejoindre au niveau départemental l'orbite de ceux du ministère de l'éducation nationale comme l'indique la circulaire du 12 juin 2019 relative à la mise en oeuvre de la réforme de l'organisation territoriale de l'État ».
Il n'est donc pas aisé dans ces conditions de définir de manière exhaustive le rôle que pourra jouer l'État à l'avenir dans les politiques territoriales du sport.
On peut toutefois rappeler que le nouvel article L. 112-12 du code du sport prévoit que « le représentant de l'État est le délégué territorial de l'agence dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. Dans le cadre de ses missions, il veille au développement du sport pour toutes et tous dans les territoires les moins favorisés. » . Cette mission de rééquilibrage des équipements au bénéfice des territoires carencés doit être une priorité , au même titre que le soutien au haut niveau.
Préconisation n° 11 : éviter un désengagement de l'État du financement des équipements locaux et réaffirmer son rôle pour résorber les déséquilibres territoriaux et développer le sport pour tous. |
2. Des moyens de l'État consacrés au sport à sanctuariser
Au-delà de la répartition des crédits publics entre la haute performance et le sport pour tous, des interrogations demeurent sur le niveau même des moyens dont pourra disposer l'Agence nationale du sport. Alors que les besoins ont été évalués entre 350 et 400 millions d'euros par an, les crédits affectés à l'agence ne devraient pas dépasser 284 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2020 selon les chiffres présentés par le ministère des sports.
La mise en place de l'Agence nationale du sport a ouvert une phase de transition qui a pu limiter le nombre des projets ayant besoin d'être financés. Par ailleurs, l'organisation des élections municipales en mars 2020 devrait mécaniquement enclencher un cycle d'investissements qui montera progressivement en puissance en 2021. L'ensemble de ces considérations amène à souhaiter que le Gouvernement clarifie dans les meilleurs délais les moyens qu'il entend consacrer au développement du sport dans les territoires dans les années à venir.
À cet égard, il convient de rappeler qu'à l'initiative du Sénat, la loi du 1 er août 2019 a inséré dans le code du sport un nouvel article L. 112-16 qui prévoit qu' « une convention d'objectifs est conclue entre l'État et l'Agence nationale du sport dont la durée est comprise entre trois et cinq années civiles. Elle détermine les actions de la politique publique du sport confiées à l'agence, fixe des objectifs et précise les moyens publics mis à sa disposition dans un cadre pluriannuel ».
Interrogés par vos rapporteurs, le directeur général de l'ANS a indiqué que le budget de l'agence était « confortable » et qu'il fallait utiliser les moyens de manière optimale. Il a évoqué un « pacte de stabilité » concernant les moyens qui semble contredire les attentes des collectivités en faveur d'un grand plan d'investissement pour résorber la vétusté des équipements actuels.
Vos rapporteurs ne peuvent que regretter que l'État ne semble pas décidé à donner une impulsion forte pour développer le sport pour tous, ceci en contradiction avec les déclarations ministérielles en faveur de l'augmentation du nombre de pratiquants. Or, les politiques publiques du sport demeurent fondamentales pour permettre de lutter contre les inégalités dans la pratique sportive et il n'est pas souhaitable de s'en remettre aux seules pratiques privées dans des salles pour atteindre cet objectif.
Dans ces conditions, vos rapporteurs appellent de leurs voeux la définition d'une trajectoire budgétaire pluriannuelle ambitieuse des moyens dévolus à l'Agence nationale du sport dans le cadre de la convention devant être conclue entre l'État et l'Agence. Ils rappellent en particulier que le dynamisme des droits de retransmission des matchs de football devrait mécaniquement entraîner l'augmentation du produit de la « taxe Buffet » et qu'il serait dommage que ces ressources supplémentaires ne bénéficient pas au développement du sport.
Préconisation n° 12 : négocier dans les meilleurs délais la convention entre l'État et l'Agence nationale du sport prévue par l'article L. 112-16 du code du sport et définir une trajectoire pluriannuelle des moyens ascendante en lien avec les besoins identifiés par le mouvement sportif et les représentants des collectivités territoriales et tenant compte des ressources disponibles croissantes issues du monde du sport (droits TV, paris sportifs). |
* 26 Voir le rapport n° 597 (2018-2019) de M. Claude KERN, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 26 juin 2019, sur le projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2019-207 du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.