B. DES DIFFICULTÉS ANCIENNES

La Turquie a manifesté son intention d'adhérer à l'Union européenne dès la fin des années 50. Le protocole d'Ankara signé entre la Communauté économique européenne et la Turquie indique clairement que cet accord est un préalable en vue de préparer l'adhésion de la Turquie.

La Turquie est candidate depuis 1987 pour adhérer à la Communauté économique européenne. Après la reconnaissance officielle de la candidature turque en 1999 lors du Conseil d'Helsinki, l'ouverture des négociations a débuté en octobre 2005.

Mais l'arrivée au pouvoir de Mme Merkel en Allemagne et de M. Sarkozy en France a freiné les négociations et la perspective d'une adhésion n'était plus crédible.

Les difficultés sont alors très vite apparues.

À titre de comparaison, les négociations avec la Croatie ont débuté le 3 octobre 2005 et ce pays a adhéré à l'Union européenne le 1 er juillet 2013.

1. Les relations avec la Grèce et la République de Chypre

Tout d'abord, les relations avec la Grèce et la République de Chypre restent tendues depuis 1974. Cette année-là, en réponse à un coup d'État appuyé par la Grèce en vue d'un rattachement de l'île, la Turquie intervient militairement et occupe une partie de l'île.

Depuis, la communauté chypriote grecque vit au sud de l'île, et les Chypriotes turcs sont regroupés au nord, au sein de la « République turque de Chypre Nord » autoproclamée en 1983, mais qui n'est reconnue que par la Turquie.

Puis, lorsque la République de Chypre est devenue membre de l'Union européenne en mai 2004 en même temps que neuf autres États, la Turquie a signé le protocole d'Ankara qui étend l'union douanière aux dix nouveaux membres. Toutefois, la Turquie refuse de reconnaître la République de Chypre et donc d'appliquer complètement cet accord.

Le Conseil européen a alors gelé l'ouverture de certains chapitres de négociations en décembre 2006. En outre, la République de Chypre bloque de manière unilatérale l'ouverture d'autres chapitres, ce qui complique davantage la poursuite du processus d'adhésion.

2. Les craintes suscitées par l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne

Tout d'abord, au-delà de la question de savoir si la Turquie est située en Europe ou non, sa proximité géographique avec les pays du Moyen-Orient est une première source d'inquiétude. En effet, il s'agit d'une région instable, aujourd'hui ravagée par la guerre.

En outre, la Turquie compte 74 millions d'habitants. En cas d'adhésion, elle disposerait d'un pouvoir de blocage non négligeable au Conseil et d'un nombre de députés conséquent au Parlement européen.

De plus, les différences culturelles ont été présentées comme un obstacle à l'intégration de la Turquie au sein de l'Union européenne.

Enfin, sur le plan économique et financier, certains s'inquiètent du montant des aides, transferts et prêts qu'il faudra accorder à la Turquie.

3. Les droits de l'Homme et la question kurde

L'article 2 du traité sur l'Union européenne prévoit que celle-ci est fondée sur un ensemble de valeurs telles que le respect de la dignité humaine, la démocratie, l'État de droit et le respect des droits de l'Homme. Elle se définit donc comme une communauté de valeurs que les membres doivent partager.

Les inquiétudes sur la capacité de la Turquie à intégrer ces valeurs sont vives.

Ainsi, la volonté d'un État turc centralisé et unitaire se heurte à la volonté kurde d'une plus grande reconnaissance culturelle et sociale. Cette opposition a débouché sur un conflit armé entre les combattants du PKK et les forces de l'ordre turques. La situation des kurdes est un point de blocage persistant dans les négociations entre l'Union européenne et la Turquie.

Au-delà de la question kurde, le respect des droits fondamentaux reste un sujet préoccupant. En 2012, dans son rapport de suivi des négociations, la Commission européenne s'inquiétait déjà du respect des droits fondamentaux en Turquie, notamment en ce qui concerne le sort réservé aux minorités, la torture, la situation dans les prisons et la liberté d'expression. La répression des manifestants du parc Gezi à Istanbul en 2013 a été sévèrement condamnée par la Commission européenne et le Parlement européen.

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