V. DES BAISSES D'IMPÔTS REPORTÉES APRÈS 2017

En dépit du « coup d'arrêt » donné aux baisses d'impositions entre 2016 et 2017 - afin d'assurer un retour du déficit public en deçà de 3 % du PIB au cours du prochain exercice -, ce qui se traduirait par une stagnation du taux de prélèvements obligatoires à 44,5 % du PIB entre ces deux années, le Gouvernement ne s'interdit aucunement d'afficher des réductions d'impôts qui n'auront une incidence - en particulier sur le déficit public - qu'à compter de 2018 . Il apparaît, en effet, que les engagements pris par le Gouvernement en matière fiscale pourraient substantiellement peser sur les finances publiques après l'achèvement du quinquennat en cours.

A. UNE MULTIPLICATION DES PROMESSES FISCALES

Au cours des derniers mois, le Gouvernement a multiplié les promesses fiscales pour les années à venir . En premier lieu, il a substitué à la baisse de charges de 5 milliards d'euros initialement prévue en 2017 dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité une hausse du taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), un renforcement des allègements de cotisations pour les travailleurs indépendants à hauteur de 150 millions d'euros, et une baisse de l'impôt sur les sociétés pour les seules PME - reportant aux années ultérieures la baisse du taux légal de l'impôt sur les sociétés qui devait intervenir en 2017 (voir supra ).

En second lieu, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, il est prévu, notamment, une prolongation du crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE), une extension du crédit d'impôt en faveur des services à la personne et la création d'un crédit d'impôt en faveur des associations.

Ces différentes mesures ont, pour la plupart, en commun de ne produire des effets qu'à moyen terme, soit après 2017 .

1. Une hausse du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi

Tout d'abord, l'article 44 du projet de loi de finances prévoit une hausse du taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) de 6 % à 7 % à compter du 1 er janvier 2017 . Par suite, les entreprises pourront déduire de leur impôt sur les sociétés un crédit d'impôt égal à 7 % et non plus 6 % de la masse salariale, hors salaires supérieurs à 2,5 SMIC ; toutefois, compte tenu du fonctionnement du CICE, les entreprises ne pourront bénéficier du « surcroît » de déduction qu'à compter de l'exercice 2018 - ce qui explique que l'incidence budgétaire de la hausse du taux du crédit d'impôt ne soit observée qu'à partir de cette dernière année (voir tableau ci-après). Le sursaut du coût budgétaire du CICE en 2021 est lié au remboursement du solde du montant de crédit d'impôt constitué en 2017 n'ayant pu être déduit par les entreprises intéressées entre 2018 et 2021.

Tableau n° 37 : Incidences budgétaires de la hausse du taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE)

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

Impact pérenne

- 1 600

- 1 900

- 1 900

- 3 100

- 3 100

Source : étude d'impact de l'article 44 du projet de loi de finances pour 2017

Si la hausse du taux du CICE représenterait un coût budgétaire de 1,6 milliard d'euros en 2018, son impact sur le déficit public devrait s'élever, cette même année, à 3 milliards d'euros , selon les données figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2017. En effet, en application des règles de la comptabilité nationale, s'agissant des crédits d'impôt « restituables » 70 ( * ) , la créance des contribuables doit être enregistrée pour sa totalité l'année de sa formation - et ce même si les déductions ou le remboursement du solde n'intervient qu'ultérieurement.

2. Une baisse programmée du taux légal de l'impôt sur les sociétés

Ensuite, l'article 6 du projet de loi de finances prévoit une baisse progressive du taux légal de l'impôt sur les sociétés vers un taux de 28 % . En application de ce dispositif, en 2017, seules les petites et moyennes entreprises (PME) bénéficieraient de cette réduction du taux - les entreprises aujourd'hui soumises à un taux réduit de 15 % continuant d'en jouir jusqu'à 38 120 euros de bénéfices, se voyant ensuite appliquer un taux de 28 % pour les bénéfices compris entre 38 120 euros et 75 000 euros.

Le taux de 28 % trouverait, à compter de 2018, à s'appliquer à l'ensemble des entreprises dans la limite de 500 000 euros de bénéfices puis, à partir, de 2019, sans limite de bénéfices pour les entreprise réalisant un chiffre d'affaires inférieur à 1 milliard d'euros. Le nouveau taux de l'impôt sur les sociétés ne concernerait, sans conditions, l'ensemble des entreprises qu'à compter de 2020.

Par suite, le coût budgétaire de la mesure n'augmenterait que progressivement ; limité à 0,33 milliard d'euros en 2017, celui-ci s'élèverait à 1,45 milliard d'euros en 2018 pour atteindre 7 milliards d'euros à partir de 2021 .

Tableau n° 38 : Incidences budgétaires de la baisse progressive
du taux d'impôt sur les sociétés

(en millions d'euros)

2017

2018

2019

2020

Impact pérenne

- 330

- 1 450

- 3 900

- 6 600

- 7 000

Source : étude d'impact de l'article 6 du projet de loi de finances pour 2017

3. Un crédit d'impôt pour la transition énergétique prolongé

Par ailleurs, l'article 10 du projet de loi de finances propose une prorogation du crédit d'impôt pour la transition énergétique , ainsi que l'ouverture du cumul avec l'éco-PTZ sans conditions de ressources.

Tableau n° 39 : Incidences budgétaires de la prolongation du crédit d'impôt pour la transition énergétique et l'ouverture du cumul avec l'éco-PTZ

(en millions d'euros)

2017

2018

Impact pérenne

- 1

- 1 675

-

Source : étude d'impact de l'article 6 du projet de loi de finances pour 2017

Ces deux mesures représenteraient un coût budgétaire de 1 million d'euros en 2017 et de 1,7 milliard d'euros en 2018 .

4. Une extension du crédit d'impôt en faveur des services à la personne

L'article 47 du projet de loi de finances, quant à lui, vise à étendre le crédit d'impôt en faveur des services à la personne au bénéfice des foyers non imposables . Là encore, le coût budgétaire de cette mesure ne serait constaté qu'à compter de 2018, pour un montant de 1,1 milliard d'euros.

Tableau n° 40 : Incidences budgétaires de la baisse progressive
du taux d'impôt sur les sociétés

(en millions d'euros)

2017

2018

Impact pérenne

-

- 1 100

- 1 100

Source : étude d'impact de l'article 47 du projet de loi de finances pour 2017

5. La création d'un crédit d'impôt en faveur des associations

Enfin, l'article 49 bis du projet de loi de finances, introduit par l'Assemblée nationale, tend à créer un crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires pour les organismes à but non lucratif - soit, notamment, les associations. Fondé « sur le même mécanisme que le CICE » 71 ( * ) , ce crédit d'impôt représenterait un coût budgétaire de 600 millions d'euros au bout de trois ans , selon le rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale. À supposer que ce dispositif fonctionne de manière analogue au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), son coût budgétaire approcherait 310 millions d'euros en 2018 et 370 millions d'euros en 2019 .


* 70 Dans le cadre du système européen de comptabilité (SEC 2010), les crédits d'impôt « restituables » correspondent aux crédits d'impôt tels qu'ils sont conçus dans le droit français ; il s'agit des dispositifs qui « peuvent être "à payer", dans le sens où tout montant du crédit qui dépasse la créance fiscale est payé à son bénéficiaire ». À l'inverse, les crédits d'impôt qui ne sont pas exigibles, comme les abattements ou les déductions, sont décrits comme « non récupérables ».

* 71 Rapport général (n° 4125, XIV e législature), tome III, de Valérie Rabault sur le projet de loi de finances pour 2017, 13 octobre 2016, p. 230.

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