EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 28 septembre 2016, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission entend une communication de M. Albéric de Montgolfier rapporteur général, sur le projet de décret d'avance, relatif au financement de dépenses urgentes, transmis pour avis à la commission, en application de l'article 13 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - La commission des finances a été notifiée vendredi dernier d'un projet de décret d'avance portant ouverture et annulation de crédits à hauteur de 1,5 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 700 millions d'euros en crédits de paiement.
Conformément à l'article 13 de la loi organique relative aux lois de finances, notre commission doit faire connaître son avis sur le décret au Premier ministre dans un délai de sept jours à compter de la notification du projet de décret.
Le recours au décret d'avance constitue une exception au principe de l'autorisation parlementaire des crédits. La loi organique relative aux lois de finances définit quatre conditions de validité du recours au décret d'avance.
Ainsi, les annulations doivent être au moins égales aux ouvertures, afin de ne pas affecter l'équilibre budgétaire défini par la dernière loi de finances. Les montants de crédits ouverts ne doivent pas dépasser 1 % des crédits prévus en loi de finances initiale et les crédits annulés ne peuvent être supérieurs à 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l'année en cours.
Ces trois critères purement techniques sont respectés.
En revanche, le dernier critère, celui de l'urgence, est plus qualitatif. Je souscris à l'analyse de la Cour des comptes selon laquelle l'urgence signifie à la fois que l'ouverture des crédits doit être nécessaire et que le besoin budgétaire était imprévisible.
La vérification du caractère urgent des dépenses supplémentaires exige un examen détaillé des ouvertures, qui concernent trois missions.
La mission « Travail et emploi » représente l'essentiel des ouvertures avec 1,4 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 574,7 millions d'euros en crédits de paiement pour le financement de 150 000 contrats aidés supplémentaires.
84 millions d'euros sont ouverts sur la mission « Égalité des territoires et logement » pour financer la création et la pérennisation de places en hébergement d'urgence.
Enfin, la mission « Justice » bénéficie de 25 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 40 millions d'euros en crédits de paiement pour honorer le paiement de prestations en matière de frais de justice.
Le relèvement du nombre de contrats aidés en 2016 découle de la circulaire du 30 juin 2016 de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Le Gouvernement n'a donc fait aucune annonce publique à ce sujet. Cette circulaire n'a pas été communiquée au Parlement ni aux commissions des finances des deux assemblées.
Je pense qu'on peut être surpris par cette méthode : le Parlement est mis devant le fait accompli et découvre qu'il y a plus de contrats aidés quand il y a urgence à les payer !
Au total, 445 000 contrats aidés devraient être conclus en 2016.
La majorité serait des contrats aidés dans le secteur non marchand. Vous vous souvenez que lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2016 l'année dernière, la majorité sénatoriale avait fortement contesté la priorité accordée aux emplois aidés dans le secteur non marchand. En effet, ce sont les contrats qui donnent les moins bons résultats en termes d'insertion sur le marché du travail : seuls 40 % des bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE) ont accédé à l'emploi après leur engagement alors que c'est le cas de 65,6 % des titulaires de contrats initiative emploi (CIE). Nous avions d'ailleurs proposé lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2016 de réduire les contrats aidés dans le secteur non marchand pour renforcer les contrats aidés dans le secteur marchand.
Le Gouvernement décide de créer encore plus de contrats dans le secteur non marchand, pour un coût qui est loin d'être négligeable : les nouveaux contrats coûtent 1,4 milliard d'euros supplémentaires, qui pèseront pour 600 millions d'euros sur 2016 et pour 850 millions d'euros sur l'exercice budgétaire 2017. En 2016, les plafonds de la loi de finances initiale en matière de contrats aidés seront largement dépassés : de 8 % en crédits de paiement et de 20 % en autorisations d'engagement.
L'objectif affiché est de « conforter le mouvement de reprise de l'activité et de l'emploi amorcé en 2015 ». En clair, les nouveaux contrats aidés serviront surtout à essayer de maîtriser les chiffres du chômage ! Pourtant, l'année dernière, lors du débat sur les crédits 2016 de la mission « Travail et emploi », la ministre du travail avait indiqué que l'objectif de 295 000 contrats aidés en 2015 constituait une « programmation à la fois ambitieuse et cohérente s'appuyant sur les perspectives de rebond de l'emploi marchand en 2016 ». En outre, dans le projet de loi de finances pour 2017, le Gouvernement prévoit la signature de 280 000 contrats aidés en 2017 pour un budget de 2,4 milliards d'euros et revient donc à une cible cohérente avec celle prévue en loi de finances initiale pour 2016. On ne peut donc que s'interroger face à ces 150 000 contrats aidés supplémentaires ajoutés en cours d'année !
De façon désormais classique, des crédits sont aussi ouverts au profit de l'hébergement d'urgence, à hauteur de 84 millions d'euros. Sur ce total, 34 millions d'euros découlent de décisions prises par le Gouvernement en cours d'année : création de 3 000 places supplémentaires et pérennisation de 2 300 places qui avaient été créées pendant l'hiver 2015 2016. A contrario , 50 millions d'euros sont ouverts pour les places déjà existantes, ce qui signifie que le programme était sous-budgété - comme notre collègue Philippe Dallier ne manque pas de le constater chaque année.
En outre, le Gouvernement indique qu'à fin septembre, il ne dispose pas d'une estimation fiable de la prévision budgétaire totale du programme en 2016. Il est donc probable que ces ouvertures ne suffisent pas à combler les besoins pour l'année 2016. Nous devons certainement nous attendre à revoir paraître l'hébergement d'urgence lorsque nous examinerons le décret d'avance de fin de gestion.
Enfin, 25 millions d'euros en autorisations d'engagement et 40 millions d'euros en crédits de paiement sont ouverts pour payer les frais de justice. Le Gouvernement indique que ces frais sont en hausse à la suite des attentats, en raison d'un nombre plus élevé d'enquêtes et de réquisitions techniques. Il est évidemment compréhensible que les attentats conduisent à une hausse de certaines dépenses. Mais je regrette qu'aucune précision ne m'ait été fournie sur ce point.
J'évoquerai rapidement les annulations de crédits permettant de gager les ouvertures.
Les annulations portent sur la totalité des ministères.
En autorisations d'engagement, plus de la moitié des annulations est portée par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », pour 894 millions d'euros. Ces annulations ne correspondent pas à de vraies économies. En effet, les crédits de ce compte spécial sont fixés à un niveau conventionnel et indépendant du montant des dépenses réellement prévues. En revanche, les crédits ouverts se traduiront bien par des dépenses supplémentaires qui pèseront sur le budget de l'État en 2016 et en 2017 !
La mission « Écologie » est une fois de plus largement mise à contribution : elle représente 20 % des annulations en crédits de paiement et 10 % des annulations en autorisations d'engagement. On est assez loin de la « COP 21 » !
Je constate également que des annulations sont prévues sur le programme « Administration pénitentiaire » de la mission « Justice », alors même qu'on a pu entendre dans les dernières semaines le Gouvernement affirmer que les établissements pénitentiaires constituaient une priorité !
En crédits de paiement, 80 % des crédits annulés étaient mis en réserve. Officiellement, la mise en réserve n'est pas ventilée par action ou par dispositif. Il n'est donc pas possible de savoir sur quels dispositifs portent les annulations de crédits « gelés ». Malgré l'envoi d'un questionnaire, malgré nos échanges avec Bercy, le Parlement ne peut donc pas identifier les dispositifs touchés par les redéploiements avant la présentation par le Gouvernement, à la fin de l'année, du schéma de fin de gestion.
Pourtant le secrétaire d'État chargé du budget et des comptes publics Christian Eckert avait bien précisé, lors d'une audition le 18 mai 2016 devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, que « cette réserve, comme son nom l'indique, est mise en place par simple précaution. Tous les crédits mis en réserve n'ont pas vocation à être annulés, loin de là ».
Pour conclure sur le respect des critères définis par la loi organique relative aux lois de finances : certes, je ne le conteste pas, les dépenses sont toutes urgentes au sens où les crédits doivent être engagés rapidement.
Mais je ne suis pas convaincu de l'imprévisibilité de la plupart des dépenses que ce projet de décret d'avance vise à financer.
Le relèvement de la cible de contrats aidés n'est pas un évènement de force majeure qui s'impose au Gouvernement - à la différence par exemple des opérations extérieures, ou du renforcement des mesures de sécurité à la suite des attentats. Il s'agit d'une décision politique dans un contexte de taux de chômage élevé. Le coût de la mesure est très important, pour une efficacité au mieux incertaine.
Concernant l'hébergement d'urgence, la sous-budgétisation des dépenses était manifeste dès la loi de finances initiale. Notre collègue Philippe Dallier indiquait dans son rapport spécial que l'insuffisance des crédits pour l'année 2016 semblait « évidente s'agissant de la veille sociale et de l'hébergement d'urgence ». Là encore, ces dépenses n'étaient pas imprévisibles.
Je suis donc très réservé sur ce projet de décret d'avance et il me semble que le Parlement serait dans son rôle en exerçant pleinement sa vigilance sur l'usage répété de la procédure du décret d'avance, qui réduit la portée de l'autorisation parlementaire.
Le projet d'avis qui vous est soumis, et qui vous a été distribué, reprend les réserves que j'ai exprimées concernant le caractère prévisible de certaines ouvertures.
Je vous propose de rendre un avis défavorable sur ce projet de décret d'avance.
M. André Gattolin . - À l'instar de notre rapporteur général, je ne suis pas convaincu par le caractère imprévisible du financement des contrats aidés - si ce n'est pour des raisons politiques - et je pense qu'une telle mesure de hausse du nombre de contrats aidés aurait dû trouver sa place en loi de finances rectificative.
Je constate à nouveau que l'écologie est particulièrement touchée. Par un tour de passe-passe on a voulu nous faire croire que l'exécution 2016 était en hausse par rapport à 2015, alors qu'à périmètre constant elle était en baisse ! Certes, des économies sont nécessaires, mais est-il judicieux de couper les crédits de la météorologie quand notre rapporteur spécial Vincent Capo-Canellas nous explique que des investissements lourds sont nécessaires en matière notamment de supercalculateur, afin d'améliorer la qualité des prévisions ? Bercy pense-t-il que les accidents climatiques que nous subissons sont exceptionnels et ne se reproduiront pas ? Il en est de même pour le programme 159 « Information géographique et cartographique ». Quand on connait l'état de l'Institut géographique national, on peut se poser des questions. Pourquoi un tel acharnement sur la mission « Écologie » ? On nous a promis des crédits sur le troisième programme d'investissements d'avenir, mais je constate qu'aucun des trois programmes de la mission « Investissements d'avenir » n'est centré sur l'écologie !
Par ailleurs, je m'interroge sur ce que cache l'annulation de 893 millions d'euros en autorisations d'engagement sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État »...
Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe écologiste partage l'avis défavorable du rapporteur général.
M. Richard Yung . - Personne ne sera surpris que je ne partage pas cet avis défavorable. Il ne me semble pas que l'on puisse parler de recours abusif aux décrets d'avance : celui-ci est le second de l'année et nous sommes fin septembre.
Le document projeté présentait clairement les critères nécessaires de recours au décret d'avance prévu par la loi organique relative aux lois de finances - dont fait partie l'urgence - et qui me semblent réunis.
L'offre d'emplois aidés dans le secteur marchand est insuffisante, nous sommes loin des deux millions d'emplois annoncés par Pierre Gattaz. Or ces contrats constituent une mesure sociale avant d'être économique et il a donc fallu pallier cette offre insuffisante en sortant du seul secteur marchand, sous peine d'abandonner une politique sociale. D'où l'imprévisibilité : nous pensions que les employeurs privés auraient eu davantage recours aux contrats aidés. Quant à l'urgence, on ne pouvait attendre la fin de l'année 2016 pour agir.
Les critères prévus par la loi organique étant respectés, le groupe socialiste et républicain donnera donc un avis favorable à ce décret d'avance.
M. Vincent Capo-Canellas . - Je comprends que des ajustements budgétaires soient nécessaires en cours d'année, mais les annulations proposées pour financer les ouvertures sont considérables : 16 millions d'euros sur l'agriculture, 13 millions d'euros sur la solidarité, 55 millions d'euros sur le tourisme, 95 millions d'euros sur les infrastructures, sujet que nous avons abordé en début de matinée. Même l'administration pénitentiaire est concernée, au moment où le Gouvernement fait des annonces à ce sujet...
Et les motivations sont particulièrement lacunaires ! Il faudrait creuser davantage pour distinguer ce qui relève d'une sous-consommation qui rend des crédits disponibles, ou d'une annulation pure et simple.
Enfin, les départements apprécieront que « les annulations soient permises par le profil de consommation de la dotation globale d'équipement des départements ». C'est à méditer pour les présidents des conseils départementaux. Quand il y a des explications elles sont presque humoristiques...
M. Francis Delattre . - On s'interroge souvent sur le cap de la politique du Gouvernement mais là au moins c'est clair : faire baisser le chômage en 2017 !
Ces 150 000 contrats s'ajoutent aux 300 000 actuels qu'on ne sait comment gérer et qui avaient été financés sur des dépenses d'avenir : la recherche, l'écologie... Ces missions sont à nouveau sacrifiées ! C'est un comble pour les socialistes, il me semblait que vous vous disiez progressistes... Même le programme 224 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » est mis à contribution !
Et les annulations ne sont pas suffisamment détaillées ! C'est un manque de respect du Parlement.
M. Marc Laménie . - Le principe du décret d'avance ne me choque pas, nous prenons bien des décisions modificatives dans nos collectivités. On peut en revanche regretter que l'enseignement, la recherche, l'écologie, les transports, la sécurité intérieure ou l'agriculture, qui souffre beaucoup, soient touchés. Même la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est mise à contribution ! Toutes ces dépenses sont importantes et 700 millions d'euros en crédits de paiement, ce n'est pas neutre...
M. Maurice Vincent . - Je souhaite rassurer Francis Delattre. Des ajustements techniques sont faits mais regardons l'ensemble du quinquennat : 9 milliards d'euros de plus pour l'enseignement et la recherche. Nous sommes toujours progressistes mais également réalistes : nous avons ajouté quelques milliards d'euros sur la sécurité pour corriger les baisses du quinquennat précédent. Nous gardons à la fois le moral et nos convictions.
S'agissant des participations financières de l'État, ces sommes n'étaient pas nécessaires en 2016 : leur annulation constitue une mesure de bonne gestion. Certes, des dépenses s'annoncent pour 2017 mais d'autres ressources de ce compte pourront alors être mobilisées.
M. Éric Bocquet . - Cette discussion nous ramène au débat budgétaire de l'an dernier et au choix qu'il portait et que nous avions souligné : celui de l'austérité et de la réduction de la dépense publique. Il est logique que l'on ait ensuite des difficultés en cours d'exécution ! Nous aurons à nouveau ce débat avec Didier Migaud cet après-midi puis ce soir avec Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget. Ils nous diront sûrement qu'il faut continuer !
M. Claude Raynal . - Ne préjugeons pas !
M. Éric Bocquet . - Je n'ai pas beaucoup d'illusions, mais nous jugerons sur les faits. Le groupe communiste et républicain n'avait pas voté le budget donc nous nous abstiendrons aujourd'hui.
M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Ce que je conteste, c'est le caractère imprévisible des mesures portées par ce décret d'avance. Le projet de loi de finances qui nous sera présenté ce soir prévoit 280 000 contrats supplémentaires, soit un nombre à peu près identique à celui prévu en loi de finances initiale pour 2016 avant cette rallonge de 150 000 contrats aidés supplémentaires : ce n'est pas cohérent avec ce projet de décret d'avance ! Je rejoins Francis Delattre, ces mesures sont purement politiques ! Je fais de la politique depuis suffisamment longtemps pour comprendre pourquoi le Gouvernement n'a pas souhaité faire d'annonce sur le sujet.
Concernant les annulations, le sujet principal réside effectivement sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » : on repousse des dépenses à 2017 mais les annulations ne sont pas de vraies économies, puisque les crédits inscrits sont purement conventionnels !
Quant au parallèle qu'a fait Marc Laménie avec les décisions modificatrices, je rappelle que dans ce cas l'organe délibérant doit les voter. L'équivalent serait une loi de finances rectificative, qui suppose un débat en séance et un vote, quand nous sommes seulement invités ce matin à donner un simple avis !
C'est l'absence d'imprévisibilité des mesures proposées qui me conduit à vous proposer de donner un avis défavorable à ce décret d'avance.
La commission a donné acte de sa communication au rapporteur général et en a autorisé la publication sous la forme d'un rapport d'information ; elle a adopté l'avis sur le projet de décret d'avance.
L'avis est ainsi rédigé :
La commission des finances,
Vu les articles 13, 14 et 56 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances ;
Vu la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 ;
Vu le décret n° 2016-732 du 2 juin 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance ;
Vu le projet de décret d'avance notifié le 23 septembre 2016, portant ouverture et annulation de 1 532 250 403 euros en autorisations d'engagement et 698 718 934 euros en crédits de paiement, le rapport de motivation qui l'accompagne et les réponses du secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget, au questionnaire du rapporteur général ;
Sur la régularité du projet de décret d'avance :
1. Constate que l'objet du projet de décret d'avance est de permettre le financement de 150 000 contrats aidés supplémentaires, des dépenses relatives à l'hébergement d'urgence et aux frais de justice ;
2. Observe que les ouvertures de crédits prévues par le présent projet sont gagées par des annulations de même montant réparties sur vingt-cinq missions du budget général et un compte d'affectation spéciale ;
3. Constate que les ouvertures de crédits prévues par le projet de décret d'avance et le décret n° 2016-732 du 2 juin 2016 portant ouverture et annulation de crédits à titre d'avance n'excèdent pas le plafond de 1 % des crédits ouverts par la dernière loi de finances de l'année et que les annulations n'excèdent pas le plafond de 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l'année en cours ;
4. Relève que les ouvertures représentent plus de 5 % de la budgétisation initiale hors dépenses de personnel des programmes 102 « Accès et retour à l'emploi » et 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » ;
5. Note que le montant des crédits ouverts par le projet de décret d'avance excède le plafond de 2 % des crédits de chaque programme et ne peut par conséquent pas faire l'objet d'une procédure de virement de crédits ;
6. Constate qu'il n'apparaît donc pas possible d'ouvrir les crédits supplémentaires considérés autrement qu'en recourant à un décret d'avance ;
7. Estime que la nécessité d'une ouverture rapide des crédits est avérée au regard de la nécessité de financer les contrats aidés supplémentaires dont la création a été décidée par le Gouvernement, d'assurer la continuité de l'accueil en hébergement d'urgence et d'honorer le paiement des prestations en matière de frais de justice ;
8. Constate que les conditions techniques de régularité du recours au décret d'avance prévues par la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 précitée sont donc formellement réunies ;
Sur les ouvertures prévues par le projet de décret d'avance :
9. Note que les ouvertures de crédits en cours d'année pour financer une hausse de 50 % du nombre de contrats aidés par rapport à la programmation budgétaire initiale 2016 ne résultent pas d'un évènement imprévisible mais d'une décision gouvernementale dans un contexte de taux de chômage élevé ;
10. Relève que la réorientation de la programmation des contrats aidés ne découle pas d'une annonce publique du Gouvernement mais d'une circulaire du ministère du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle qui n'a fait l'objet d'aucune communication au Parlement ni aux commissions des finances des deux assemblées malgré ses conséquences budgétaires importantes ;
11. Souligne que le relèvement de la programmation des contrats aidés à hauteur de 150 000 contrats aidés supplémentaires conduit à une augmentation des dépenses pour la fin de l'année 2016 représentant un dépassement de 8 % de la budgétisation initiale votée par le Parlement et entraîne l'engagement par l'État de près d'1,5 milliard d'euros, qui pèseront pour 850 millions d'euros en crédits de paiement sur l'exercice 2017 ;
12. Rappelle le caractère récurrent, ces dernières années, du dépassement de l'enveloppe budgétaire allouée aux contrats aidés ;
13. Note par conséquent que le coût de la politique des contrats aidés n'est pas contenu ;
14. Observe que la sous-budgétisation des dépenses d'hébergement d'urgence est habituelle et que l'insuffisance des moyens était manifeste dès la loi de finances initiale au regard de l'exécution 2015 et de l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile sur le territoire à partir de la seconde moitié de l'année 2015 ;
15. Estime par conséquent que l'urgence à ouvrir les crédits ne découle pas du caractère imprévisible des besoins budgétaires, mais d'une décision gouvernementale s'agissant des contrats aidés d'une part et de l'insuffisance des moyens alloués en loi de finances initiale concernant l'hébergement d'urgence d'autre part ;
16. Constate par ailleurs que le Gouvernement ne fournit aucun chiffrage relatif à la hausse des dépenses liées aux frais de justice qui serait intervenue à la suite des attentats ; que le Parlement ne peut par conséquent en apprécier l'imprévisibilité ;
Sur les annulations prévues par le projet de décret d'avance :
17. Constate que la plus grande partie des annulations porte sur des crédits mis en réserve, ce qui ne permet pas au Parlement d'identifier les dispositifs touchés par les redéploiements avant la présentation par le Gouvernement, à la fin de l'année, du schéma de fin de gestion ;
18. Estime par conséquent que le recours croissant, par le Gouvernement, à la mise en réserve de crédits, qui s'élève depuis 2015 à 8 % des crédits ouverts sur le budget de l'État, et à la procédure de décret d'avance nuit à la lisibilité de la politique budgétaire du Gouvernement ainsi qu'à la portée de l'autorisation parlementaire ;
19. Relève que les annulations en autorisations d'engagement sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » ne constituent pas des économies réelles sur le budget de l'État dans la mesure où les crédits inscrits à cette mission sont fixés à un niveau conventionnel, identique d'année en année et indépendant du montant des dépenses réellement prévues ; que les ouvertures qu'elles permettent se traduiront en revanche par une charge supplémentaire certaine sur le budget de l'État en 2016 et en 2017 ;
20. Souligne qu'une part importante des annulations sur le budget général pèse sur la mission « Écologie, développement et mobilité durables », à rebours des priorités affichées par le Gouvernement ;
21. Émet, en conséquence, un avis défavorable au présent projet de décret d'avance.