B. CONFORTER LE FNADT AU SEIN DU BUDGET DE L'ÉTAT
L'analyse chiffrée du FNADT a mis en évidence la baisse tendancielle des crédits au cours des dernières années , les AE consommées diminuant de 44 % et les CP de 13 % entre 2010 et 2015. Interrogé sur l'adaptation du cadre législatif actuel du FNADT, le CGET répondait ainsi que « la difficulté [provient] plutôt d'une diminution continue, et particulièrement forte depuis deux ans, des moyens budgétaires disponibles, qui limitent la capacité d'intervention au titre du programme 112 » 64 ( * ) .
Compte tenu de la nécessité de conforter le FNADT, en raison de son caractère complémentaire avec les autres outils de financement, et de l'importance de maintenir sa contribution aux volets territoriaux des CPER, le montant de 200 millions d'euros par an en moyenne apparaît comme un seuil minimum en-dessous duquel l'efficacité de l'action du FNADT pourrait être remise en question. De plus, une nouvelle baisse des crédits tendrait à le marginaliser vis-à-vis des autres moyens d'action de l'État : aujourd'hui, la DETR perçue par l'ensemble des départements d'une région pour une seule année est, en moyenne, supérieure aux six années de FNADT prévus au titre des CPER 2015-2020.
Proposition n° 1 : à périmètre constant, stabiliser le montant du FNADT à 200 millions d'euros par an en moyenne afin de maintenir sa contribution aux CPER, tout en conservant des marges de manoeuvre pour venir efficacement compléter les autres dispositifs d'aide de l'État en faveur des territoires les plus fragiles. |
C. LE FNADT COMME OUTIL D'ACCOMPAGNEMENT DES FUTURS CONTRATS DE RURALITÉ
1. Inscrire les crédits spécifiquement dédiés aux contrats de ruralité sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire »
Je me réjouis de l'annonce du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, Jean-Michel Baylet, de la mise en place des contrats de ruralité sur des périodes de six ans et d'un financement dédié au sein du FSIL. Pour 2017, l'enveloppe consacrée aux contrats de ruralité devrait s'élever à 216 millions d'euros.
Pour l'exercice 2016, les crédits du FSIL ont été inscrits sur le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » du budget de l'État. Or les contrats de ruralité poursuivent des objectifs similaires à ceux des dispositifs actuellement financés par le FNADT et leur mise en oeuvre est assurée par les préfectures, sous l'égide du CGET . De plus, la circulaire indique que les contrats de ruralité devront être coordonnés avec les actions des volets territoriaux des CPER.
Aussi serait-il tout à fait cohérent d'inscrire ces crédits sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ». Le programme 112 financerait ainsi deux outils de contractualisation complémentaires : les CPER à l'échelle régionale et les contrats de ruralité à l'échelon local .
Suivant la même logique, il convient de souligner que la dotation politique de la ville, venant en appui des contrats de ville, est actuellement financée à partir du programme 147 « Politique de la ville » de la mission « Politique des territoires ».
Proposition n° 2 : dans un objectif de cohérence budgétaire et d'efficacité d'action de l'État, inscrire l'enveloppe de 216 millions d'euros du Fonds de soutien à l'investissement public local (FSIL) annoncée en faveur des contrats de ruralité sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Politique des territoires ». |
2. Mettre le FNADT au service de la réussite des contrats de ruralité
À l'avenir, l'inscription de l'enveloppe du FSIL en faveur des contrats de ruralité au sein même du FNADT permettrait de faire bénéficier les partenaires des futurs contrats de la souplesse de cet outil et d'apporter ainsi un complément particulièrement utile aux autres sources de financement (DETR, FSIL de « droit commun », PAT, volets territoriaux des CPER, FEDER, FEADER et FSE), coordonnées dans le cadre du contrat.
Les marges de manoeuvre dégagées par l'extinction progressive de certains dispositifs actuellement financés par la section générale du FNADT pourraient également être utilisées pour compléter les financements des projets portés dans le cadre des contrats de ruralité. À budget global constant, on peut estimer qu'environ 15 millions d'euros en engagements et en paiements pourraient être disponibles à l'horizon 2018-2019 65 ( * ) .
Dans tous les cas, l'accompagnement du FNADT devrait être prioritairement ciblé sur trois types d'actions, actuellement mal prises en compte par les autres outils de financement .
a) Un soutien prioritaire à l'ingénierie de développement des intercommunalités rurales
Tout d'abord, le FNADT devrait avoir pour objectif de financer l'ingénierie territoriale de développement des intercommunalités rurales , essentielle à la réussite des contrats de ruralité , et de permettre ainsi à ces territoires de monter en compétence et d'animer leurs projets dans la durée.
Contrairement au FSIL, qui peut uniquement subventionner des opérations d'investissement des collectivités territoriales 66 ( * ) , le FNADT finance déjà de l'aide à l'ingénierie, que ce soit dans le cadre des centres-bourgs ou des volets territoriaux des CPER. Au-delà du financement d'études ou de diagnostics auxquels un soutien direct peut être apporté par le CGET 67 ( * ) ou le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), du soutien à l'ingénierie financière proposée par la Caisse des dépôts et consignations ou encore à l'ingénierie foncière par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), il s'agirait ici de cibler prioritairement l' « ingénierie territoriale de développement » des intercommunalités rurales en renforçant leurs compétences en interne pour leur donner toutes les chances de réussir leur mutation. L'objectif serait de favoriser, dans les secteurs ruraux, le développement de nouvelles activités et la création d'emplois par l'innovation, par exemple dans les domaines du numérique, de l'économie collaborative, de la transition énergétique ou de la valorisation des ressources locales .
La circulaire du 23 juin 2016 relative aux contrats de ruralité indique que « l'État et les collectivités signataires, ainsi que les autres acteurs publics mobiliseront les outils d'ingénierie de projet dont ils disposent pour accompagner les intercommunalités rurales ne disposant pas des compétences nécessaires ». Cet engagement est, certes, essentiel mais il n'apparaît pas suffisant pour « faire vivre » les contrats dans la durée, particulièrement dans les zones les plus fragiles .
En partant de l'hypothèse d'une aide de 100 000 euros par an en moyenne à l'ingénierie pour chaque contrat de ruralité et de l'objectif de 100 contrats de ruralité durant la première année, seuls 10 millions d'euros seraient nécessaires en 2017. À l'issue de la montée en charge des contrats de ruralité, si l'on considère l'objectif de 500 contrats, une enveloppe de 50 millions d'euros devrait être prévue.
b) Un soutien aux projets privés inscrits dans les stratégies de développement rural et associant secteur public et secteur privé
Poursuivant la même logique de complémentarité entre moyens d'action de l'État, une part du FNADT octroyée dans le cadre des contrats de ruralité pourrait être dévolue en priorité aux acteurs privés, et plus particulièrement aux très petites et moyennes entreprises (TPE et PME) , participant au projet de territoire défini par l'EPCI ou le PETR. Il s'agirait ici de promouvoir la réalisation de projets de partenariat entre le secteur public et le secteur privé .
Cette proposition se fonde notamment sur l'expérience positive des pôles d'excellence rurale (PER), dans le cadre desquels de nouvelles activités économiques ont pu prendre leur essor grâce au soutien financier ponctuel apporté par le FNADT.
Si l'on considère un montant d'aide moyen de 40 000 euros par an par contrat, l'enveloppe financière requise s'élèverait à 4 millions d'euros en 2017 et 20 millions d'euros à terme , si 500 contrats de ruralité étaient signés.
c) Une prime pour donner toutes leurs chances aux territoires ruraux en déclin démographique
Enfin, l'intervention du FNADT dans le cadre des contrats de ruralité pourrait également cibler les territoires ruraux en situation de grande difficulté, en raison d'une baisse démographique constante au cours des dernières années . Le critère de l'évolution négative de la population du territoire sur une durée d'au moins cinq ans présenterait l'avantage d'être simple, lisible et d' inciter les territoires les plus directement menacés par le déclin démographique à conclure des contrats de ruralité et à définir une nouvelle stratégie de développement. Ce « coup de pouce » aurait pour objectif d'éviter que certains territoires ne franchissent un « seuil d'irréversibilité », en-dessous duquel il deviendrait impossible d'attirer de nouveaux habitants ou de nouvelles activités.
La prime pourrait s'élever à 200 000 euros par an, soit 1,2 million d'euros sur la durée complète d'un contrat. Une clause de revoyure à mi-parcours - soit après trois années - pourrait être introduite pour évaluer les effets de ce financement complémentaire et décider de son éventuel maintien. Selon l'Insee , quatorze départements métropolitains ont enregistré une baisse de leur population entre 2008 et 2015 68 ( * ) . Si l'on se fonde sur l'hypothèse d'une prime attribuée dès 2017 dans chacun des quatorze départements touchés par une baisse démographique, l'enveloppe budgétaire annuelle s'élèverait à 2,8 millions d'euros . À terme, si trois primes étaient attribuées par département - soient 42 contrats au total - 8,4 millions d'euros seraient nécessaires.
Proposition n° 3 : donner au FNADT le rôle de « facilitateur » dans la mise en place des contrats de ruralité en lui permettant, grâce au transfert de l'enveloppe de crédits du FSIL et aux marges dégagées par l'extinction progressive de certains dispositifs, de financer prioritairement : - l'« ingénierie territoriale de développement » des intercommunalités rurales afin de leur permettre de « monter en compétence », pour réussir leur contrat de développement et l'animer dans la durée ; - les projets privés inscrits dans les stratégies de développement portées par les intercommunalités rurales et associant secteur public et secteur privé (en particulier les TPE et PME) ; - une prime majorant le soutien apporté aux territoires ruraux hyper-fragilisés par une baisse démographique constante au cours des cinq dernières années, afin de leur donner toutes les chances d'enrayer le déclin et de réussir leur développement. |
* 64 Réponse du CGET au questionnaire de votre rapporteur spécial.
* 65 Du fait de la fin du financement des pôles de compétitivité (2,9 millions d'euros en AE et CP par an sur la période 2013-2018), des contrats de redynamisation des sites de défense et des plans locaux de redynamisation (pour lesquels 7 millions d'euros restaient à engager en 2016 et 2017) et des pôles d'excellence rurale (dont le financement a été intégralement assuré en AE et pour lesquels 16,6 millions d'euros de CP ont été prévus en 2016).
* 66 Cf. circulaire du 15 janvier 2016 du Premier ministre à l'attention des préfets.
* 67 Par exemple, par la fourniture de kits méthodologiques, la mise à disposition de cartographies ou d'études de l'observatoire des territoires.
* 68 Cf. tableau en annexe.