B. UN EXERCICE AUX MARGES ÉTROITES MAIS NÉCESSAIRE
Si près de la moitié des textes examinés lors de la session parlementaire 2012-2013 par le Sénat est traitée par les sept commissions permanentes, dans le cadre de leur activité législative, votre commission ainsi que celle des finances doivent examiner l'autre moitié, au titre de l'autorisation parlementaire de ratification ou d'approbation des engagements internationaux.
En conséquence, les conditions d'examen de ces textes ne peuvent être les mêmes que pour un projet de loi ordinaire, alors que les ressources déployées et le temps disponibles sont moindres.
Les auditions sont plus rares, en raison du manque de visibilité de la programmation des textes. La longueur du délai écoulé entre la signature de l'accord et le dépôt du projet de loi devant la première assemblée, nuit également au dialogue entre le Parlement et les ministères traitants .
En effet, entre temps, le rédacteur du traité ou de l'accord peut avoir été affecté à un autre service, au titre de sa mobilité. En outre, un temps trop long de préparation du dossier législatif peut entrainer une obsolescence des études d'impact, annexées aux projets de loi.
Enfin, une difficulté supplémentaire pèse sur la seconde assemblée saisie . Alors que, le plus souvent, le temps est particulièrement contraint dans un calendrier parlementaire très chargé, elle doit éviter l'écueil du bis repetita, après examen de la première assemblée . Afin d'y échapper, elle doit le plus souvent transmettre des questionnaires complémentaires détaillés aux services traitants. Absorbés par le flux des nouvelles négociations, ces derniers doivent à nouveau ouvrir un dossier qui appartient désormais au « passé », dans l'urgence, afin de permettre à la seconde assemblée d'approfondir une analyse que la première a déjà menée de manière exhaustive.
Pour autant, cet exercice est nécessaire et non formel, comme l'a rappelé notre collègue Nathalie Goulet, lors de l'examen d'un accord aérien avec les Etats-Unis 78 ( * ) .
Elle a tenu à observer que, « premièrement , sur la méthode, même si les procédures d'adoption des projets de loi de ratification ne donnent lieu, en règle générale, qu'à des procédures accélérées et en toute hypothèse sont non amendables, il est extrêmement dommage que l'accélération d'examen des conventions, voulue par le Gouvernement, n'ait pas pu permettre, compte tenu du calendrier sénatorial, de procéder aux auditions pertinentes. En l'espèce, le texte a été adopté par l'Assemblée nationale, le 23 juillet dernier alors qu'il a été signé quatre ans plus tôt . »
Deuxièmement, sur le fond, l'accord entre les Etats-Unis et l'Union européenne qui nous est présenté aujourd'hui préfigure le type de rapports de force que nous retrouverons dans les négociations des traités TAFTA et TTIP. C'est-à-dire un abandon de normes au profit de bénéfices hypothétiques en matière d'investissement ou d'emploi. Le rôle du Parlement en l'état réduit à une portion congrue, acceptable dans le cadre de la présente ratification, ne le sera absolument pas dans le cadre des deux autres textes évoqués, compte tenu notamment de la mobilisation citoyenne. Notre commission devrait mettre en place une procédure adaptée à l'arrivée de ces deux textes. »
En effet, l'intégration des traités et accords , visés à l'article 53 de la Constitution dans notre droit interne, exige un contrôle vigilant du Parlement au titre de la protection des citoyens .
Rappelons à titre d'illustration que les accords de sécurité sociale permettent une meilleure coordination des régimes des deux pays contractants, associée à une garantie de certains droits 79 ( * ) . Les droits de la personne sont également concernés quand la France conclut des traités d'extradition permettant de juger une personne en France pour un crime commis dans un autre Etat partie. D'autres accords visent à renforcer la compétitivité de la France notamment en matière de transport aérien.
En conséquence, sans constituer d'injonction au Gouvernement, l'action de contrôle du Parlement sur la politique conventionnelle doit pouvoir s'exercer dans de meilleures conditions et de manière plus ciblée.
C'est en cela que les propositions (Cf. seconde partie) de concertation préalable entre les différents acteurs de l'élaboration de la loi, d'une part et de rapport « synthétique » de la seconde assemblée saisie, d'autre part, permettraient à répondre à cette préoccupation.
* 78 Cf. Projet de loi n° 780 (2013-2014) autorisant la ratification du protocole modifiant l'accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats-Unis d'Amérique, d'autre part.
* 79 A titre d'illustration, loi n° 2014-427 du 28 avril 2014 autorisant la ratification de l'accord entre la République française et la République fédérative du Brésil en matière de sécurité sociale.