C. DÉVELOPPER LE DIALOGUE ENTRE LES SOCIÉTÉS CIVILES
Si la France a longtemps peiné à concevoir sa politique de coopération autrement qu'au niveau interétatique, la reconnaissance de la contribution des ONG à l'efficacité de l'aide et au dialogue entre les peuples progresse.
Aujourd'hui la France reste cependant le dernier des Etats membres du CAD en part d'APD transitant par les ONG, avec 1,5 %, alors que la moyenne OCDE est de 13 %.
Le Président de la République François Hollande s'était engagé à doubler le montant de l'aide qui transite par les ONG sur cinq ans.
Les ONG sont en effet des acteurs assurant une véritable complémentarité par rapport aux actions mises en oeuvre dans le cadre de la coopération publique.
Une particularité essentielle des ONG est de s'appuyer sur des démarches participatives et partenariales dans leurs actions de renforcement des sociétés civiles du Sud. Les ONG agissent, en effet, le plus souvent, avec des partenaires locaux (ONG des pays du Sud, organisations sociales locales).
Les premiers critères de qualité de l'action des ONG sont ainsi la qualité et la pérennité du partenariat et leur capacité à contribuer au renforcement de la responsabilité et de l'efficacité de leurs partenaires. Leurs atouts résident également dans la mise en oeuvre d'une coopération de proximité, dans leur rapidité d'intervention, et dans leur capacité d'innovation qui leur permet de faire évoluer rapidement leurs interventions et de les adapter aux contextes changeants.
Nous souhaitons en conséquence que les engagements pris à l'égard des ONG soient tenus, car il importe, pour l'efficacité même de notre politique, de renforcer les opérateurs associatifs français qui mènent sur le terrain des actions souvent remarquables.
Sans doute cela exige-t-il que les ONG françaises renforcent leurs capacités d'action collective. Cette contrepartie aurait, me semble-t-il, dû être davantage formulée. Nos ONG de développement, contrairement aux ONG humanitaires qui sont de grands groupes multinationaux, sont globalement bien plus faibles et fragmentées que les ONG anglo-saxonnes.
Les printemps arabes ont montré qu'il convenait de renforcer les liens des services de coopération avec les sociétés civiles pour ne pas rester dans un dialogue exclusif avec les autorités gouvernementales. Dans ce cadre, les ONG peuvent être des vecteurs essentiels de ce dialogue avec la société civile de nos partenaires en Méditerranée mais également en Afrique.
La France a en effet tout à gagner à un renforcement de la capacité des ONG à mener des actions en concertation avec les ONG locales.
Or les ONG françaises ont, dans l'ensemble, des capacités financières limitées par rapport à leurs homologues anglo-saxonnes, comme l'illustrent les tableaux suivants :
Autre acteur infra-étatique, les collectivités territoriales sont en passe de devenir des acteurs majeurs de la coopération.
La coopération décentralisée est souvent le premier contact des citoyens avec L'Afrique. Elle concerne plus des milliers de collectivités françaises.
Un des membres du groupe de travail, M Jean-Claude Peyronnet a essayé dans le cadre des travaux de la Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation d'obtenir une évaluation plus juste de l'effort des collectivités dans ce domaine. Une estimation de l'ordre de 115 millions d'euros, soit près du double du montant déclaré, est souvent donnée pour cette aide publique au développement des collectivités territoriales.
Dans le contexte actuel de crise économique et de stagnation des ressources des collectivités territoriales les collectivités françaises sont sollicitées par leurs administrés qui peuvent avoir du mal à comprendre les justifications d'une action internationale dans ces conditions.
C'est pourquoi, il convient de recourir aux financements innovants et d'inciter les collectivités territoriales et leurs groupements à utiliser 1% des ressources affectées aux budgets des services de l'eau, de l'assainissement, de l'électricité et du gaz pour financer des actions de coopération décentralisée comme la possibilité en est ouverte par la loi Oudin-Santini. Une application totale et généralisée de cette loi permettrait de mobiliser 67 millions d'euros par an, contre près de 20 millions d'euros aujourd'hui.
Le dispositif de la loi Oudin-Santini pourrait être élargi à d'autres domaines de la coopération décentralisée. En effet, ce mécanisme permet de mobiliser des sommes importantes pour une contribution annuelle moyenne par habitant modique. C'est pourquoi le groupe de travail propose de l'étendre au traitement des ordures ménagères pour financer des projets dans ce domaine essentiel sur un continent dont la population urbaine va doubler d'ici 2040.
33) Renforcer le dialogue avec les sociétés civiles et poursuivre l'engagement de doublement du montant de l'aide qui transite par les ONG. 34) Soutenir les actions de coopération décentralisée en faveur de l'Afrique et étendre le dispositif de la loi Oudin-Santini aux ordures ménagères pour financer des actions de coopération dans ce domaine dans une Afrique en urbanisation rapide. |
V. FAIRE ÉVOLUER NOTRE COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT
Le constat établi par le groupe de travail sur les défis auxquels seront confrontés les pays d'Afrique subsaharienne dans les 10 ans à venir conduit d'abord à valider les priorités actuelles de notre coopération dans les cinq domaines clefs :
- l'accompagnement de la dynamique du secteur privé, principal pourvoyeur d'emplois, permettra de favoriser les investissements de productivité, de faciliter l'accès aux financements de long terme, et de renforcer les capacités commerciales des économies de la région ;
- l'accès aux infrastructures essentielles pour désenclaver les économies et les hommes, notamment l'énergie, en particulier à travers le financement du développement des énergies renouvelables comme l'hydroélectricité et la biomasse, les transports et l'amélioration de la capacité d'accueil des mégapoles et des villes secondaires ;
- les secteurs sociaux de la santé et de l'éducation afin de participer à l'amélioration de la santé maternelle et infantile, de l'éducation de base et de la formation professionnelle ;
- la sécurité alimentaire et la productivité agricole ;
- les questions du genre, de l'égalité hommes-femmes et de la santé maternelle et infantile qui sont autant de thèmes qui permettent de rentrer dans celui délicat de la démographie, si central dans l'évolution du continent.
Le groupe de travail a, en revanche, formulé des propositions visant à pallier les carences observées en matière de pilotage de cette politique, de répartition des moyens financiers, de promotion de l'expertise et du renforcement de capacité. Il a enfin souhaité souligner les enjeux liés à la construction d'une coalition la plus large possible avec les pays africains en matière de climat.