INTRODUCTION- Joël BOURDIN , président de la délégation à la prospective du Sénat
Mesdames, messieurs, chers collègues, chers amis, je suis particulièrement heureux de vous accueillir ce matin au Palais du Luxembourg pour cet atelier de prospective consacré à l'avenir des jeunes dans les quartiers sensibles.
Cette initiative de la délégation à la prospective doit beaucoup, si ce n'est tout, à Fabienne Keller, qui s'est investie dans ce domaine avec beaucoup d'énergie et de compétence, sur un sujet qui ne peut laisser indifférents ni les parlementaires que nous sommes, ni les professionnels de terrain que vous êtes, et qui requiert une réflexion d'ensemble.
Voilà deux ans, en mars 2011, notre collègue sénatrice avait présenté, au nom de notre délégation, un premier rapport sur le thème de l'avenir des « années collège » dans les quartiers réputés difficiles des banlieues de nos grandes villes. Ce travail avait, à l'époque, été très remarqué, pour au moins trois raisons.
D'abord, il était l'aboutissement d'un long cheminement, rythmé par de nombreuses auditions, rencontres, visites de terrain, ainsi que par plusieurs manifestations associant directement les collégiens concernés, qui s'étaient eux-mêmes impliqués dans des opérations d'ampleur.
Ensuite, il reposait sur une véritable démarche de prospective, résultant de la conception de trois scénarios - allant du plus sombre au plus optimiste - sur l'avenir de ces quartiers et des jeunes qui les habitent.
Enfin, il élaborait de vraies préconisations pour mettre toutes les chances du côté de l'avènement du scénario le plus favorable : celui de faire de ces quartiers spécifiques des quartiers semblables à tous les autres, qui offrent les mêmes chances à tous les collégiens.
Deux ans après la publication de ce premier rapport, Fabienne Keller a suggéré à notre délégation de faire un nouveau point sur l'état d'avancement du dossier.
C'est précisément ce que nous proposons de faire ce matin, en approfondissant deux des préconisations formulées dans le rapport et susceptibles d'accroître l'efficacité des politiques de la ville. Chacun de ces deux thèmes fera l'objet d'une table ronde.
La première sera consacrée au travail de mémoire. Nous verrons comment élaborer des références communes et partagées entre les cultures de ces jeunes et la nôtre.
La seconde étudiera la manière dont ces foyers, très souvent monoparentaux, peuvent espérer concilier travail - parfois à des rythmes atypiques - et obligations familiales.
Je constate avec plaisir, par votre présence nombreuse, l'intérêt personnel que vous portez à nos travaux, et je remercie par avance les intervenants qui ont bien voulu nous accorder un peu de leur temps pour participer à notre réflexion collective.
Je nous souhaite une matinée de travail riche et fructueuse, et je cède sans plus tarder la parole à notre rapporteure, Fabienne Keller.
Fabienne KELLER , rapporteure
Bonjour à tous. Je vous remercie de nous avoir rejoints, en dépit des intempéries, pour réfléchir et travailler sur certains des leviers d'action que nous avions définis dans le rapport en 2011.
Je suis très heureuse, en particulier, d'accueillir les personnes qui viennent des quartiers que j'avais visités, notamment Corinne Bouet, principale du collège Anatole-France de Bethoncourt, mais aussi nos amis marseillais venus en force, avec Bernard Dunevon, principal honoraire au collège Elsa-Triolet, ainsi que les équipes du centre socio-culturel Les Bourrely à Marseille, du collège Romain-Rolland à Clichy-sous-Bois, du collège Jean-Jaurès et du collège Louise-Michel à Montfermeil.
Je salue également mon collègue sénateur Yannick Vaugrenard, présent parmi nous, aux côtés du président Joël Bourdin. Il mène actuellement un travail sur la pauvreté en France, qui n'est pas totalement disjoint du thème qui nous réunit ce matin.
Je vous remercie de nouveau tous de votre présence, notre objectif aujourd'hui étant bien de croiser les analyses globales et les expériences des acteurs de terrain.
Sans plus attendre, si vous le voulez bien, nous allons nous replonger dans ce rapport de 2011, qui se demande comment épauler les adolescents pour qu'ils puissent se construire un avenir plus positif et faire leurs choix de vie.
Un film est projeté .
Ce film constitue un rappel de la démarche. Le précédent rapport de 2011 identifiait trois scénarios : le scénario catastrophe, c'est-à-dire le ghetto ; le scénario intermédiaire, à savoir la relégation gérée, qui prévaut actuellement ; enfin, le scénario positif, qui renvoie à un quartier ordinaire, où les jeunes grandissent entourés de nombreux repères (commerces, entreprises, établissements d'enseignement, activités culturelles, etc.). Pour essayer de tendre vers ce troisième scénario, le rapport avait identifié six leviers d'action. Ce matin, il nous est proposé de travailler sur deux d'entre eux.