B. UNE RÉFORME EN 2009 QUI N'A PAS EFFACÉ TOUS LES EFFETS DÉSTABILISATEURS DE L'INTRODUCTION DES AIDES SPÉCIALISÉES EN 2008
1. Aides personnalisées versus aides spécialisées ?
En 2008 , la réforme de l'enseignement primaire, opérée par décret 1 ( * ) , a fixé la durée du temps scolaire à vingt-quatre heures hebdomadaires, auxquelles s'ajoutent deux heures d'aide personnalisée en petits groupes pour les élèves en difficulté et une heure de travaux en équipes pédagogiques .
La définition même des aides personnalisées empiétait sur les compétences dévolues aux intervenants des RASED, créant le risque que les aides personnalisées remplacent les aides spécialisées , malgré les démentis alors apportés par le Gouvernement selon lequel l'aide personnalisée ne remplacerait pas les dispositifs existants.
L'aide personnalisé a vocation à être proposée à tous les élèves, quand l'aide spécialisée n'intervient que dans le cas de difficultés plus lourdes.
En réalité, les pratiques n'ont pas été uniformes et ont traduit l'absence d'articulation entre les deux dispositifs : dans certaines écoles, les élèves des RASED ont participé aux aides personnalisées, alors que dans d'autres écoles ils en ont été exclus, les enseignants estimant que les aides personnalisées ne pouvant pas traiter efficacement les cas les plus difficiles.
En outre, des enseignants spécialisés ont également dispensé l'aide personnalisée, en contradiction avec les textes . Dans un contexte de diminution des effectifs de l'éducation nationale ( cf. infra ), les besoins en personnel pour dispenser les aides personnalisées ont accru la pression à la baisse sur les moyens des RASED. Le manque de personnel pour les aides personnalisées, notamment dans certains secteurs fragilisés, a entraîné ces solutions ad hoc qui ne sont pas satisfaisantes et exigent de clarifier le régime des aides personnalisées et des aides spécialisées : il convient de réaffirmer la complémentarité des deux dispositifs , en renforçant les effectifs dans les écoles où les besoins en aide personnalisée sont les plus importants, sans prélever sur les moyens dédiés aux RASED.
Recommandation n° 2 : clarifier le régime des aides personnalisées et des aides spécialisées, en soulignant leur complémentarité et en rappelant que les intervenants des RASED n'ont pas à apporter d'aides personnalisées. |
2. Les insuffisances de la réforme des RASED de 2009 : une clarification avec le régime de l'aide personnalisée mais des attributions des enseignants spécialisés restant à préciser
Plusieurs clarifications et évolutions ont été apportées par la circulaire n° 2009-088 du 17 juillet 2009 relative à l'adaptation et à l'intégration scolaires et aux fonctions des personnels spécialisés des RASED dans le traitement de la difficulté scolaire à l'école primaire.
S'agissant de l'articulation entre l'aide personnalisée et les aides spécialisées, la circulaire a précisé que les aides spécialisées interviennent quand les autres dispositifs (aide personnalisée, stages de remise à niveau en cours moyen), se révèlent insuffisants, et qu'il y a lieu d'assurer la complémentarité entre l'aide personnalisée et l'aide spécialisée relevant successivement, ou concomitamment, des deux dispositifs :
« L'aide personnalisée, ou les stages de remise à niveau au cours moyen, lorsqu'ils sont mis en place, peuvent se révéler insuffisants ou inadaptés pour certains élèves, soit parce ceux-ci présentent des difficultés marquées exigeant une analyse approfondie et un accompagnement spécifique, soit parce qu'ils manifestent des besoins particuliers en relation avec une déficience sensorielle ou motrice ou des atteintes perturbant leur fonctionnement cognitif et psychique ou leur comportement.
« Pour aider ces élèves, les enseignants spécialisés des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) viennent renforcer les équipes pédagogiques en apportant des compétences spécifiques permettant de mieux analyser ces situations particulières et de construire des réponses adaptées. Quand un élève relève successivement, voire concomitamment, de l'aide personnalisée et de l'aide spécialisée, il convient de garantir la complémentarité entre les deux modes d'action ».
S'agissant du pilotage des RASED, la circulaire a précisé également le cadre d' intervention des enseignants spécialisés dans le cadre du projet d'école, en concertation avec le conseil des maîtres et sous l'autorité de l'inspecteur de l'éducation nationale . Sur cette base, « les enseignants spécialisés peuvent intervenir directement dans la classe , regrouper des élèves pour des durées adaptées à leurs besoins, ou leur apporter une aide individuelle ».
La circulaire précise aussi le cadre d'intervention des RASED au niveau de la circonscription :
« Les maîtres spécialisés sont tantôt amenés à intervenir dans plusieurs écoles d'une circonscription, tantôt dans une ou deux écoles lorsqu'elles comportent un nombre élevé d'élèves en grande difficulté.
« Avec les psychologues scolaires, ils constituent, pour la circonscription, un réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté exerçant sous l'autorité et la responsabilité de l'inspecteur de l'Education nationale ; ce réseau peut, le cas échéant, fonctionner en antenne, notamment dans les secteurs ruraux. Il est composé de trois types de personnes-ressources -maîtres E, maîtres G et psychologues scolaires- qui interviennent selon les priorités définies à l'issue d'une analyse de besoins conduite avec les personnels spécialisés, les équipes d'écoles et l'équipe de circonscription ».
S'agissant enfin des obligations de service , la circulaire du 17 juillet 2009 a précisé que le temps consacré à la concertation, aux travaux en équipes pédagogiques et aux relations avec les parents s'élève à 108 heures par an, ce qui en pratique les dispense de l'aide personnalisée , qui n'est pas incluse dans ce forfait horaire.
La circulaire du 17 juillet 2009 n'a pas clarifié les attributions des différents intervenants (maîtres E, maîtres G et psychologues scolaires). Ces précisions auraient pourtant été nécessaires pour définir le cadre d'intervention des RASED par rapport à des positionnements d'ordre davantage médical ou tenant à l'accueil et à la scolarisation des élèves handicapés. Les maîtres G, qui ne sont pas des thérapeutes, sont tout particulièrement confrontés à une telle difficulté, qui nécessiterait d' identifier clairement les contours et le contenu de leur mission de rééducation .
La réforme a par ailleurs donné de larges pouvoirs d'organisation des réseaux aux inspecteurs de l'éducation nationale et aux inspecteurs d'académie.
Afin de consolider les missions et les objectifs des RASED, une circulaire ne correspond pas nécessairement au cadre juridique le plus approprié. Il serait ainsi souhaitable que la réforme à l'étude soit mise en oeuvre par décret ou par arrêté.
Recommandation n° 3 : consolider le régime juridique des RASED dans un décret ou un arrêté qui précise les attributions des intervenants des RASED. |
* 1 Décret n° 2008-775 du 30 juillet 2008 relatif aux obligations de service des personnels enseignants du premier degré.