2. Le mécanisme de coopération et de vérification : une précaution utile mais pesante pour la Bulgarie et la Roumanie
Ainsi, le 1 er janvier 2007, tout le monde s'accordait sur la nécessité d'encourager les deux nouveaux membres, la Bulgarie et la Roumanie, à faire des progrès essentiellement dans les domaines de la réforme judiciaire, de la lutte contre la criminalité organisée et de la corruption. C'était la principale raison d'être du « mécanisme de coopération et de vérification » chargé d' aider les deux pays à combler leurs dernières lacunes et à poursuivre leurs efforts.
Cette décision de continuer à évaluer régulièrement la Bulgarie et la Roumanie traduisait naturellement la volonté de l'Union européenne de voir les deux pays continuer à construire et développer des systèmes judiciaires et administratifs efficaces leur permettant de remplir les obligations de l'adhésion.
Ce mécanisme a pour conséquence que chaque année, depuis 2007, la Bulgarie et la Roumanie ont l'obligation de rapporter à la Commission sur les progrès qu'elles ont réalisés en vue d'atteindre chacun des objectifs de référence dont il a été question plus haut.
La Commission, de son côté, peut, à tout moment, apporter une aide technique ou collecter et échanger des informations sur les objectifs de référence ; elle peut en outre organiser des missions d'experts sur place. La Commission transmet au Parlement et au Conseil ses propres commentaires et conclusions sur les rapports présentés par la Bulgarie et la Roumanie ; puis, en fonction de l'évolution de la situation, la Commission leur adresse un rapport au moins tous les six mois.
En 2010, les rapports étaient encore préoccupants et l'Union européenne, le 13 septembre 2010, a décidé de prolonger le contrôle de la Bulgarie et de la Roumanie pour une année complémentaire. Le 20 juillet 2011, les deux pays ont dû à nouveau admettre qu'ils devraient attendre une année supplémentaire. Dans ce contexte tendu est apparue la question de leur entrée dans l'espace Schengen.
3. L'entrée dans l'espace Schengen et l'offensive contre le MCV
C'est alors que la Roumanie et la Bulgarie se sont lancées dans une tentative de contre-offensive sur deux fronts : obtenir la suppression du MCV et obtenir l'entrée dans l'espace Schengen, en tentant d'isoler les critères exigés pour l'espace Schengen et ceux débattus dans les rapports du MCV.
Il est vrai que le MCV est inédit - mais aujourd'hui un mécanisme à peu près similaire n'existe-t-il pas pour la Croatie ? -, vrai aussi qu'il a été créé pour aider la Bulgarie et la Roumanie en matière de liberté, de sécurité et de justice, et qu'il dure depuis cinq ans. Enfin, on s'accorde à reconnaître que les critères techniques exigés pour l'entrée dans l'espace Schengen sont autres que ceux contrôlés par le MCV et qu'aujourd'hui, il est admis qu'ils seraient à peu près remplis.
Cependant n'était il pas probable que les rapports du MCV influent sur l'appréciation des critères de Schengen, espace qui repose essentiellement sur la confiance mutuelle que vont s'accorder les États membres en matière de coopération judiciaire et policière ?
La Bulgarie et la Roumanie demandent maintenant la fin immédiate d'un mécanisme jugé « humiliant et injuste » par la Bulgarie et qualifié de « moyen de pression » par la Roumanie. Pourtant, à Bruxelles, il existe un consensus sur l'idée que ce mécanisme ne doit cesser d'exister que lorsque les conditions exigées au départ seront remplies.
L'agacement provoqué par le MCV était palpable chez nos interlocuteurs officiels bulgares et roumains sauf dans le cas des ministres des affaires européennes, qui ont toujours préféré souligner l'avancement des progrès accomplis plutôt que de remettre en cause une des conditions mêmes (l'existence du MCV) qui a permis l'entrée de leur pays dans l'Union européenne. Le ministre de l'Intérieur - aussi bien en Bulgarie qu'en Roumanie - adopte la même attitude au regard des critères de l'espace Schengen. Toutefois, le MCV reste une question sensible dans la mesure où, perçu d'abord par les nouveaux États membres comme un mal nécessaire, il est perçu au fil du temps comme une atteinte à la souveraineté nationale.
Même si vos rapporteurs ont toujours insisté sur la partie « coopération » plus que sur la partie « vérification » du MCV, nos interlocuteurs officiels dans leur majorité ont récusé le mécanisme, oubliant parfois qu'il ne se perpétue que parce que les avancées sont trop lentes. Il est facile de comprendre que la Bulgarie et la Roumanie préfèrent évoquer la forme (MCV) que le fond (les critères non encore remplis). Pourtant, comme le reconnaît la Commission, les progrès existent, même s'ils sont insuffisants.