(2) Solution proposée

Compte tenu de ce qui précède, une solution simple pour encourager la reprise en SCOP est de faire sauter le verrou d'une détention de 50 % du capital au cours d'une période de cinq à dix suivant la transformation de la société en coopérative. La SCOP conserverait ainsi, de façon dérogatoire et à titre transitoire, son régime fiscal particulier. Formellement, cela revient à écarter l'application de l'article 26 bis de la loi de 1978 pendant la phase transitoire de reprise 12 ( * ) .

Des investisseurs extérieurs entreraient alors en jeu pour assurer le portage d'une part majoritaire du capital social tout en permettant à celle-ci, en utilisant son régime fiscal coopératif, de dégager progressivement les bénéfices nécessaires à la montée des salariés au capital. Précisons bien qu'il s'agit bien d'un portage , c'est-à-dire que, les investisseurs extérieurs entrent au capital avec, dès le départ, l'objectif de redevenir minoritaires dans les cinq à dix ans suivants la reprise, le temps pour les salariés de racheter les parts nécessaires grâce à la ristourne coopérative. L'ensemble de l'opération devra avoir fait l'objet d'une convention qui en fixe les conditions dès l'élaboration du dossier de reprise.

Il faut souligner, pour finir sur ce point, qu'un tel mécanisme de portage suppose, pour fonctionner, la présence de financeurs ayant un profil très particulier, puisqu'ils entrent au capital avec l'intention de s'en retirer à terme sans perspective de plus-value. Il s'agit donc soit d'investisseurs partageant les valeurs du monde coopératif, soit d'un investisseur public. Nous y reviendrons quand il sera question de la proposition suivante, créer un fonds de développement coopératif.

LES PARTICULARITÉS DES SCOP DU POINT DE VUE DE L'IMPOSITION DES BÉNÉFICES

Les SCOP sont soumises, comme toutes les sociétés, à l'impôt sur les sociétés. Elles le sont cependant dans des conditions qui favorisent l'auto accumulation du capital de manière à compenser, au moins partiellement, leurs difficultés d'accès au marché des capitaux. La spécificité de leur régime d'imposition à l'I.S tient à la prise en compte des sommes versées aux salariés au titre de la participation aux bénéfices de l'entreprise (ristourne coopérative, qualifiée de part travail dans le cas des SCOP). La comparaison du régime fiscal des coopératives avec celui des sociétés traditionnelle permet d'en mesurer toute la portée.

Cas des entreprises qui ne sont pas placées sous le statut des SCOP

Obligatoirement lorsqu'elles comptent plus de cinquante salariés, facultativement dans le cas contraire, les sociétés instaurent un système de participations selon les règles fixées par le livre III du Titre II de la troisième partie du code du travail. Les sommes dues aux salariés à ce titre sont portées à une réserve spéciale de participation (RSP), où elles sont généralement bloquées pendant cinq ans. Ce régime de participation, conçu pour profiter aux salariés, s'accompagne d'importants avantages pour les entreprises elles-mêmes. D'une part, en effet, les sommes versées au titre de la participation viennent en déduction de l'assiette de l'impôt sur la société (I de l'article 237 bis A du code général des impôts). D'autre part, les entreprises peuvent constituer, en franchise d'impôt, une provision pour investissement (PPI), également déductible de l'assiette imposable, qui peut représenter jusqu'à 50 % du montant des sommes portées à la réserve spéciale de participation. Au total, 150 % des sommes versées au titre de la participation peuvent être déduites du résultat imposable 13 ( * ) .

Cas des SCOP

Comme pour les autres entreprises, les sommes versées à une réserve spéciale de participation par les SCOP sont déductibles de l'assiette de l'impôt sur les bénéfices. Elles peuvent également servir à constituer une provision pour investissement. Par rapport au régime « normal », les différences sont cependant significatives. Dans le cas des SCOP, le montant de la PPI est au plus égal à celui des sommes portées à la réserve spéciale de participation au titre du même exercice (3 du I de l'article 237 bis A 14 ( * ) ). Autrement dit, la PPI atteint 100 % des sommes versées aux salariés, contre 50 % dans le cas général. Au total, la déduction d'assiette totale (PPI plus RSP) peut donc atteindre 200 % des sommes dues aux salariés au titre de la participation au lieu de 150 %. Par ailleurs, dans les SCOP, la réserve spéciale de participation et la provision pour investissement sont constituées par l'affectation du résultat fait par l'assemblée générale d'approbation des comptes. La RSP est créditée du montant de la ristourne coopérative revenant aux salariés et la PPI correspondant aux sommes qui sont affectées aux postes de réserve légale et au fonds de développement de ces sociétés. Enfin, dans le cas général, la PPI est réintégrée à l'assiette imposable si elle n'est pas utilisée dans le délai de deux ans pour l'acquisition ou la création d'immobilisations. Or, ce délai est porté à quatre ans pour les SCOP lorsque la provision est représentée par des dotations à la réserve légale et au fonds de développement.


* 12 Cet article dispose que le quatrième alinéa (3) du II de l'article 237 bis A et l'article 1456 du code général des impôts ne sont pas applicables aux sociétés coopératives ouvrières de production dont le capital est détenu pour plus de 50 p. 100 par des associés extérieurs.

* 13 Cette provision pour investissement doit cependant être utilisée pour investir sans quoi elle est ultérieurement réintégrée dans l'assiette imposable.

* 14 Remarque : la ristourne est déductible de l'assiette sans passer par le mécanisme de la réserve de participation (par application de l'article 214 du CGI) mais ce mécanisme est peu utilisé par les SCOP car il permet de déduire de l'assiette seulement 100 % de la ristourne contre 200 % quand est constituée une réserve de participation.

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