E. AMÉLIORER LES MODALITÉS DU CONTRÔLE FISCAL
L'une des principales critiques du CIR porte sur les modalités du contrôle fiscal.
On rappelle que le contrôle fiscal est effectué par la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI) pour les plus grandes entreprises, et par les directions de contrôle fiscal (DIRCOFI) pour les autres.
Selon la sous-direction du contrôle fiscal, contrairement à une idée répandue le fait de bénéficier du CIR n'accroît pas la probabilité de contrôle.
1. Le rôle essentiel de l'expert du MESR
Le contrôle fiscal se caractérise, dans le cas du CIR, par le fait que les services fiscaux peuvent demander au MESR de vérifier l'éligibilité d'une dépense au CIR :
- l'article L. 45 B du livre des procédures fiscales prévoit que « la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du [CIR] peut, sans préjudice des pouvoirs de contrôle de l'administration des impôts qui demeure seule compétente pour l'application des procédures de rectification, être vérifiée par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie » ;
- l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales précise notamment que ce contrôle peut être effectué « soit par des agents dûment mandatés par le directeur de la technologie, soit par les délégués régionaux à la recherche et à la technologie ou par des agents dûment mandatés par ces derniers ».
L'avis du MESR est en pratique toujours suivi 162 ( * ) , ce qui le rend d'autant plus essentiel.
De ce point de vue, on peut regretter l'absence de suivi du délai de remise de l'avis de l'expert du MESR, de critères transparents de recrutement des experts, ou de fichier d'experts agréés.
2. Garantir la possibilité d'un débat contradictoire
• Le principal reproche fait par les entreprises au sujet de l'avis du MESR est que les modalités d'intervention de l'expert du MESR ne leur permettent pas en pratique de bénéficier des garanties habituelles en cas de contrôle fiscal.
Dans son Livre blanc sur le CIR de décembre 2009, le MEDEF indique : « Depuis la loi Aicardie, les contribuables et leurs conseils sont habitués au débat oral et contradictoire et à disposer de recours notamment en cas de blocage avec le vérificateur ou son supérieur hiérarchique. Ces mesures qui sont des freins efficaces à l'arbitraire n'existent pas lors des contrôles du MESR. Il existe donc un véritable vide juridique qui nécessite d'être comblé ». Il ajoute que « les experts du MESR ne se déplacent pratiquement jamais dans les entreprises » et que « le débat oral n'est pas systématiquement appliqué ».
Ainsi, dans son rapport de 2010 sur le CIR, l'inspection générale des finances préconisait de « formaliser les conditions d'intervention des experts du MESR dans le contrôle fiscal des entreprises, en établissant un protocole concerté avec l'administration fiscale, garantissant, mieux qu'aujourd'hui, le respect du principe du contradictoire et prévenant plus efficacement le risque de conflit d'intérêt ».
Edouard Marcus, sous-directeur du contrôle fiscal, a déclaré lors de son audition par le rapporteur spécial le 4 avril 2012 :
- qu'un protocole précis ant les modalités de collaboration des deux ministères avait été conclu avec le MESR au niveau de la DVNI et qu'un autre était en cours d'élaboration dans le cas des DIRCOFI 163 ( * ) ;
- qu'un décret devant permettre à l'entreprise d'avoir un débat contradictoire avec l'expert du MESR était en cours de rédaction, et devrait prochainement paraître.
Le rapporteur spécial considère que plus de quatre ans après la réforme de 2008, et près de deux ans après le rapport de 2010 de l'inspection des finances, il est urgent d'adopter ce protocole et ce décret.
• La proposition du rapport d'information précité de la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale (2010) de « créer des équipes communes de contrôle du crédit d'impôt recherche entre les services fiscaux et les services du ministère de la recherche, au niveau central et dans les principales régions françaises » suscite en revanche des interrogations.
En effet, un contrôle de l'administration fiscale ne concerne pas spécifiquement le CIR. Par ailleurs, une spécialisation des vérificateurs par dépense fiscale ferait perdre toute souplesse à l'administration fiscale.
* 162 Comme le souligne la sous-direction du contrôle fiscal.
* 163 Le MESR a fait le 3 janvier 2012 la réponse suivante à une question écrite (question n° 117304) posée à ce sujet par notre collègue députée Marietta Karamanli :
« Concernant la création d'équipes de contrôle communes entre les service fiscaux et les services du MESR : le MESR travaille à une meilleure formalisation des conditions d'intervention de ses agents en établissant un protocole concerté avec l'administration fiscale. Le MESR est désireux de voir son rôle à la fois formalisé et mieux reconnu.
Ainsi, afin de renforcer la qualité et l'efficacité de la coopération entre le MESR et la direction des vérifications nationales et internationales (DVNI), les deux parties formalisent dans une convention certaines modalités de coopération. Celle-ci précise le rôle de chacun et les modalités de coordination. Les modalités d'échanges entre les deux parties sont également mieux encadrées et un protocole de rencontres régulières est mis en place, permettant de faire le point sur des sujets importants (affaires en cours, dossiers importants, pratiques agressives constatées, éléments mutualisables, état de la jurisprudence en matière de CIR...).
Par ailleurs, au niveau régional, une coordination des contrôles entre les DRRT et les directions départementales ou les DIRCOFI fait actuellement l'objet de réflexions.
Ces voies d'amélioration du contrôle du CIR ont semblé pouvoir être efficaces dans des délais assez rapides. La mise en place d'équipes de contrôle communes pose en revanche d'importants problèmes d'organisation. »