2. Assurer la transparence du processus de certification
a) Vérifier périodiquement la qualité des prestations des organismes notifiés
La commercialisation d'un dispositif médical implantable est conditionnée à la délivrance, pour celui-ci, du marquage CE par un organisme notifié. Dès lors, il apparaît indispensable de s'assurer que ce certificat de qualité et de conformité avec les exigences essentielles posées par le droit européen fasse l'objet d'une procédure uniforme sur tout le territoire de l'UE.
Force est malheureusement de constater que ce n'est pas le cas.
En vertu de la réglementation actuelle, la plupart des décisions concernant les modalités de certification et d'évaluation des dispositifs médicaux relèvent du fabricant. Elles ne peuvent être remises en cause par l'organisme notifié, qui ne dispose d'aucune marge de manoeuvre ou de pouvoir d'appréciation à ce sujet. Comme le prévoient les annexes de la directive européenne, le producteur choisit librement s'il souhaite faire porter le contrôle de l'organisme notifié sur son produit ou sur un dossier de documentation technique.
Ainsi que Mme Laurence Dagallier, directrice déléguée du Laboratoire national de métrologie et d'essais (LNE), seul organisme notifié français, l'a précisé lors de son audition, si un organisme notifié peut exiger d'un fabricant la réalisation d'essais supplémentaires lors de l'examen de la conception d'un produit, il ne peut pas décider unilatéralement de mener à bien de tels essais après mise sur le marché en l'absence d'une nouvelle demande de certification.
Pour un observateur extérieur, il est difficile de savoir quelles sont les méthodes de travail des organismes notifiés et donc légitime de s'interroger sur l'équivalence des différentes méthodes d'examen des dispositifs médicaux qu'ils utilisent.
De plus, les relations financières existant entre les organismes notifiés et les fabricants, qui les rémunèrent pour obtenir la certification de leurs produits, constituent un obstacle à leur parfaite indépendance. Sans remettre en cause le professionnalisme de leurs employés, cette situation, à elle seule, devrait être corrigée pour lever le soupçon de partialité vis-à-vis du donneur d'ordre qu'elle est susceptible de créer .
La surveillance des organismes notifiés au niveau communautaire mérite d'être renforcée, au moins pour assurer un pilotage stratégique des contrôles à l'échelle de l'Union. En dotant le N-Bog d'un statut légal et d'un véritable pouvoir en la matière, il serait possible de réagir de manière coordonnée et de mutualiser les ressources à la disposition des Etats membres, favorisant la coopération entre eux au-delà de ce qui existe aujourd'hui.
Proposition n° 3 :
Doter le N-Bog d'un
statut légal dans la réglementation européenne et lui
confier
la mission d'harmoniser les modalités de surveillance des
organismes notifiés
Le fait de vérifier à intervalles réguliers , si possible annuellement, la qualité des prestations et l'expertise des organismes notifiés doit redevenir l'une des priorités des autorités sanitaires partout en Europe. La régulation ne doit pas être un avantage favorisant la concurrence déloyale à laquelle se livrent ceux d'entre eux qui bénéficient des insuffisances des pouvoirs publics nationaux. Il est urgent que la Commission européenne agisse en ce sens.
b) Renforcer le partage d'informations
Par ailleurs, il faut améliorer le partage d'informations entre organismes notifiés ainsi qu'entre ceux-ci et les autorités sanitaires nationales .
L'absence de circulation de l'information a constitué un des ressorts majeurs de l'affaire PIP : les incidents graves constatés par les médecins n'ont pas été portés à la connaissance des différents acteurs ni, a fortiori , les doutes du Bureau central de tarification quant à la qualité des prothèses mammaires fabriquées par cette entreprise.
Les organismes notifiés ont déjà obligation de communiquer à leurs homologues les décisions de refus, retraits ou suspensions de certifications qu'ils sont conduits à prendre. Il est urgent d'étendre cette obligation d'information aux observations de non-conformité majeures. Un tel renforcement corrigerait une des failles du droit en vigueur et constituerait sans doute un moyen de percevoir plus tôt les premiers signaux d'un risque sanitaire majeur.
Proposition n° 4 :
Etendre l'obligation
d'information des organismes notifiés aux observations de
non-conformité majeures
c) Multiplier les inspections croisées des organismes notifiés
Un certain nombre d'associations de praticiens et d'experts du domaine de la santé ont également proposé que les dossiers techniques en vue d'une évaluation des dispositifs médicaux de la classe III soient soumis directement à un département spécifique, qui serait créé en ce sens au sein de l'EMA. Cette dernière émettrait ainsi un avis pour la Commission européenne relatif à la mise sur le marché du produit concerné.
Enfin, la majorité des participants à la consultation publique engagée en 2008 par la Commission européenne sur la refonte de la réglementation relative aux dispositifs médicaux préconisait qu'Eudamed intègre des informations concernant les performances des organismes notifiés, dans un souci de plus grande transparence.
Cette prise de conscience tardive a été suivie de quelques effets, notamment dans la coopération entre les autorités nationales compétentes. Ainsi, elles conduisent désormais des inspections communes d'organismes notifiés afin de partager leurs méthodes de travail et d'échanger sur les meilleures pratiques. L'organisme notifié allemand TüV Süd, par exemple, a récemment été contrôlé par l'autorité espagnole. Le développement de ces évaluations par les pairs constitue une avancée notable qu'il faut saluer. Il reste néanmoins anecdotique par rapport au chemin qui reste à parcourir pour assurer un encadrement des organismes notifiés à la hauteur de leur rôle dans la préservation de la santé publique.
Proposition n° 5 :
Généraliser les inspections communes des organismes
notifiés par les autorités sanitaires de plusieurs pays
européens