MERCREDI 9 MARS 2011
Présidence de
M. Serge Blisko, député, coprésident et
de
M. François Pillet, sénateur,
coprésident
Audition de M. Patrick Romestaing, président de la section « Santé publique » du Conseil national de l'ordre des médecins
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - Notre mission d'information traitant des toxicomanies essentiellement sous l'angle sanitaire, il était logique que nous entendions le président de la section « Santé publique » du Conseil national de l'ordre des médecins, auquel je souhaite la bienvenue. L'approche et le traitement des toxicomanies ont beaucoup évolué tant du fait de découvertes scientifiques récentes que de la mise en oeuvre de divers programmes de santé publique : mise à disposition et échange de seringues, afin de prévenir les infections par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) ou par le virus de l'hépatite C, délivrance de produits de substitution qui permettent de mieux suivre les toxicomanes - même si certains d'entre eux, en rupture de la société, vivant dans des milieux très défavorisés, avec parfois la rue pour tout logement, échappent à tous les dispositifs. Avec toutes ces évolutions, le corps médical est aujourd'hui plus étroitement associé à la prise en charge de la toxicomanie. Une autre question est celle des produits consommés. Plusieurs pharmacologues nous ont alertés sur la consommation croissante de cocaïne, en complément notamment du cannabis, et de drogues de synthèse, devenues d'accès plus facile grâce à internet et qui constituent les dangers de demain. Nous aimerions, monsieur, connaître votre avis sur tous ces sujets.
M. Patrick Romestaing, président de la section « Santé publique » du Conseil national de l'ordre des médecins . - Je vous remercie d'avoir convié le Conseil national de l'ordre des médecins à participer à vos travaux. Oto-rhino-laryngologue libéral, président du conseil départemental de l'ordre des médecins du Rhône, je préside également depuis un an et demi la section « Santé publique » du conseil national. Comme vous le voyez, je ne suis absolument pas spécialiste des toxicomanies. Je vous prie donc de m'excuser s'il est des questions auxquelles je ne peux pas répondre. La section le fera ultérieurement par écrit.
Pour ce qui touche à la toxicomanie, l'institution ordinale est surtout sollicitée au niveau local. J'ai ainsi eu à connaître, dans le Rhône, du cas de confrères qui s'étaient rapprochés de l'ordre parce qu'ils avaient du mal à gérer certains toxicomanes. L'un d'entre eux, qui exerçait dans un quartier difficile où il en recevait beaucoup, a été récemment retrouvé mort, ligoté. Nous étions au courant de ses difficultés avec sa patientèle car nous l'accompagnions depuis quelque temps.
Les conseils départementaux ne sollicitent que rarement le conseil national. Cela peut arriver face à des conduites « hors norme » de certains confrères qui exercent en général dans des banlieues difficiles et avec lesquels nous entrons alors en contact. Les problèmes les plus fréquents concernent les traitements de substitution.
Le conseil national a débattu de l'ouverture de « salles de shoot » - comme les ont appelées les médias -, sans prendre de position officielle sur le sujet. Notre dernière initiative publique et officielle en matière de toxicomanies a été prise conjointement avec le Conseil national de l'ordre des pharmaciens : il s'agissait d'appeler l'attention des médecins et pharmaciens sur le respect des procédures dans le suivi des toxicomanes.
Si vous souhaitez maintenant aborder d'autres points, je suis à votre disposition.
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - Pensez-vous que, dans le cursus médical, la formation à la prévention et au traitement des toxicomanies soit suffisante ? Il semble que les praticiens se forment essentiellement au contact des patients toxicomanes, ce qui n'est pas l'idéal. Existe-t-il des enseignements post-universitaires spécifiques ?
M. Patrick Romestaing . - Le sujet de la toxicomanie fait partie des enseignements de santé publique, domaine qui n'était jusqu'à présent qu'effleuré durant les études médicales.
Depuis la toute récente mise en place de la première année commune des études de santé, les programmes ont été passablement modifiés et se sont ouverts davantage à cette dimension de la santé. Mais la formation initiale des médecins déjà en activité, en matière de toxicomanies comme de santé publique en général, est indigente. Quant à la formation continue sur le sujet, elle concerne surtout les praticiens qui, de par leur lieu d'exercice ou leurs relations professionnelles, ont été amenés à prendre en charge des patients toxicomanes et s'intéressent à cette patientèle particulière.
Mme Françoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale . - Notre politique de prévention des toxicomanies et des addictions en général vous paraît-elle suffisante ? Les médecins s'intéressant à cette question sont peu nombreux tandis que les associations, très actives dans la prise en charge de la toxicomanie, mettent avant tout l'accent sur la réduction des risques. Quelles sont vos propositions en la matière ?
M. Patrick Romestaing . - Hormis en matière de vaccination, la prévention est très insuffisante dans notre pays. On pourrait dire que nos confrères ne cessent d'en faire, mais qu'en même temps ils en font très peu, faute de temps. Ils souhaiteraient que ce pan essentiel d'activité soit spécifiquement rémunéré, par exemple au forfait. Le sujet est d'ailleurs à l'ordre du jour de la négociation conventionnelle. Une mixité de la rémunération permettrait sans doute aux médecins de consacrer plus de temps à la prévention. Cela dit, ils déplorent aussi d'y être mal formés, celle-ci étant le parent pauvre de la formation médicale. Il faudrait développer la prévention sanitaire dès l'école et ne pas attendre l'université où les étudiants sont moins réceptifs, parfois même braqués contre certains messages.
Le rôle des associations est essentiel dans la prise en charge des toxicomanes. Ce sont surtout elles qui soutiennent ces patients et sont les mieux à même de leur assurer la présence et l'écoute nécessaires.
M. François Pillet, coprésident pour le Sénat . - La déontologie impose-t-elle des limites aux médecins dans l'accompagnement et la prise en charge des toxicomanes ? Si oui, lesquelles ? Certaines vous paraissent-elles regrettables ?
M. Patrick Romestaing . - L'exercice médical obéit à une déontologie très stricte. Un médecin doit recevoir tout patient qui s'adresse à lui et ne peut opérer aucune discrimination.
Nous n'avons pas eu à connaître de difficultés particulières à ce titre. Force est néanmoins de constater que ce sont presque toujours les mêmes praticiens qui, en empathie avec les toxicomanes, les prennent en charge. Certains confrères, en revanche, changent parfois de lieu d'exercice pour être moins confrontés à cette population particulièrement difficile à gérer.
La déontologie impose également la confidentialité et le respect absolu du secret médical. Nous n'avons pas eu à connaître, non plus, de difficultés particulières sur ce point.
Ce secret est préservé, y compris dans le cadre de la mise à disposition ou de l'échange de seringues et de la prescription de produits de substitution.
M. François Pillet, coprésident pour le Sénat . - Le Conseil national de l'ordre des médecins a-t-il une doctrine officielle sur ce que vous appeliez les « salles de shoot », c'est-à-dire les centres d'injection supervisés ?
M. Patrick Romestaing . - Je l'ai dit, le conseil national n'a pas pris de position officielle. Lorsque le sujet est venu en débat, nous avons eu un échange nourri au sein de la section « Santé publique ». Même si certains avancent que de telles structures permettraient un meilleur suivi des toxicomanes, nous n'étions pas favorables à l'autorisation de centres dédiés à la consommation de drogues, estimant que cela irait à l'encontre de tout ce qui a été fait jusqu'à présent et de toute politique de prévention, en levant un interdit. Par ailleurs, tel que présenté, le projet excluait les associations, dont nous persistons à penser qu'elles sont les mieux à même de prendre en charge ce type de patients. Mieux vaudrait, selon nous, en rester là.
Mme Catherine Lemorton, députée . - Je préférerais qu'on parle de salles de consommation supervisées ou à moindre risque plutôt que de « salles de shoot ». Le Conseil national de l'ordre n'y est pas favorable. Mais quel sentiment le médecin que vous êtes éprouve-t-il face à des toxicomanes qui s'injectent n'importe quoi dans la rue, les parcs publics ou les parkings souterrains ?
M. Patrick Romestaing . - Je suis d'accord avec vous sur le fait que le vocabulaire n'est pas neutre. Je n'ai parlé de « salles de shoot » que parce que c'est ainsi que les médias avaient au départ désigné ces centres.
Plusieurs praticiens avec qui j'en ai discuté à Lyon m'ont dit que, quoi qu'on fasse, il est quasiment impossible d'amener les toxicomanes à modifier leurs comportements.
L'ouverture de centres où il serait possible de prendre des substances jusqu'à présent illicites lèverait un interdit et reviendrait de fait à une légalisation, sans changer vraiment les réalités de terrain. Même avec des « salles de shoot », une bonne part de ces personnes continuerait vraisemblablement de se droguer dans les lieux publics.
M. Daniel Vaillant, député . - L'ordre a-t-il envisagé d'envoyer une délégation pour s'informer sur certaines expériences menées à l'étranger, en Espagne et en Suisse notamment ? Des élus ont fait ce déplacement. Pourquoi des médecins, qui ont vocation à protéger la vie, ne s'intéresseraient-ils pas à des initiatives comme celle prise à Bilbao, où une salle de consommation à moindre risque a été ouverte avec l'aide d'une municipalité de gauche, puis maintenue par la municipalité suivante, de droite ? Ce n'est certes pas la panacée mais cela permet de mieux encadrer les pratiques, et même de sauver des vies en donnant à certains toxicomanes goût aux soins et en les motivant pour se libérer de leur addiction.
M. Patrick Romestaing . - Le Conseil national de l'ordre des médecins ne se déplace pas hors des frontières. Je peux en parler au président mais à ce jour, ce n'est pas dans notre politique. L'ordre prend connaissance de ce qui se fait à l'étranger au travers de publications et rapports. Lorsque la section « Santé publique » a abordé le sujet des salles de consommation supervisées, plusieurs de ses membres ont fait état d'expériences étrangères ayant tourné court aux Pays-Bas, en Belgique et en Suisse, à Lausanne notamment. Sur le fond, nous en sommes d'accord, il faut tout faire pour assurer une prise en charge correcte des toxicomanes. Mais prévenir les toxicomanies, c'est aussi ne pas exposer, aux yeux des jeunes en particulier, des lieux de consommation légale.
Mme Catherine Lemorton, députée . - Des médecins qui suivent de façon régulière et sérieuse des toxicomanes savent que certains s'injectent le Subutex, parfois associé à d'autres substances. Fort heureusement, bien que cela constitue un détournement d'usage du produit, ils continuent, par déontologie, de recevoir ces « injecteurs compulsifs ». Pourquoi d'autres médecins ne pourraient-ils pas assurer un suivi de même type dans des centres de consommation supervisés ? Le conseil de l'ordre n'y est pas favorable. Mais avez-vous auditionné des confrères qui prennent en charge des toxicomanes ? Cela pourrait faire évoluer votre avis. Songez-vous à de telles auditions ?
M. Patrick Romestaing . - C'est tout à fait envisageable. Cela ne nous poserait en tout cas aucun problème.
Il y a une différence fondamentale entre la prise en charge d'un toxicomane dans un cabinet médical, où la confidentialité est garantie, et celle qui se ferait dans un lieu public dédié à la consommation de drogues. En cabinet, la prise en charge est individualisée et passe par un échange entre deux personnes, le médecin et son patient. Elle n'a rien de comparable à ce qu'elle pourrait être en un lieu collectif, plus semblable à une vaste consultation hospitalière.
Pour l'heure, l'ordre n'a pas souhaité prendre de position officielle sur le sujet. Je reposerai la question lors d'une prochaine réunion du bureau du conseil national.
Mme Fabienne Labrette-Ménager, députée . - La formation initiale des médecins en matière de toxicomanies étant indigente, vous l'avez dit, une formation continue sur le sujet ne serait-elle pas indispensable, d'autant qu'il peut y aller de la sécurité même des praticiens ? Sans formation appropriée, peu d'entre eux seront disposés à suivre ce type de patients. Avez-vous des propositions sur le sujet ?
M. Patrick Romestaing . - Puisque vous m'en donnez l'occasion, et même si cela nous éloigne de notre thème d'aujourd'hui, je dirai un mot de la formation médicale continue.
Celle-ci est, hélas, dans les limbes depuis des années. La profession est excédée de voir se succéder en vain les sigles - de FMC, « formation médicale continue », on est passé à DPC, « développement professionnel continu » - et les modes d'organisation ! Les trois structures distinctes prévues pour les médecins salariés, hospitaliers et libéraux ont été supprimées, trois ans seulement après leur mise en place, au profit d'une structure unique. Il est urgent de remettre sur les rails une véritable formation continue. C'est une priorité que de former les jeunes médecins à toutes les facettes du métier. Aujourd'hui, formés à l'hôpital, ils ignorent tout ou presque des réalités de l'exercice libéral. Cette méconnaissance explique d'ailleurs pour partie que si peu soient prêts à s'installer en milieu rural, et en exercice libéral d'une manière générale. Sans formation psychologique particulière, il leur est par exemple difficile de prendre en charge des toxicomanes, très demandeurs et parfois agressifs. Nouer le contact avec les patients, résister à leurs demandes, cela s'apprend, et c'est un aspect essentiel de la formation, en matière de toxicomanie plus encore que dans d'autres domaines.
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - Il n'y a pas qu'en milieu rural qu'on manque de médecins. Il existe aussi des déserts médicaux dans certaines zones urbaines sensibles.
Des praticiens sont agressés par des toxicomanes. Avez-vous une idée du nombre de ces agressions ? Ces confrères appellent-ils à l'aide ?
M. Patrick Romestaing . - Nos jeunes confrères rencontrent de plus en plus de difficultés. L'insécurité est une source d'angoisse majeure qui explique leurs réticences à s'installer en libéral. L'ordre a mis en place un « observatoire de l'insécurité médicale » qui va bientôt rendre publiques des statistiques. Mais les incivilités comme les agressions les plus violentes sont largement sous-déclarées. Lorsque les médecins se tournent vers l'institution ordinale, c'est souvent que, déjà, ils n'en peuvent plus. J'ai évoqué le cas de ce confrère retrouvé ligoté après une agression, décédé d'un accident cardiaque. Il aimait son métier qu'il exerçait depuis longtemps, ayant dépassé la soixantaine, mais il se trouvait dans une grande détresse psychologique face à une patientèle de toxicomanes qui le mettaient « sous pression » pour obtenir les produits qu'ils voulaient. Après qu'une pharmacie nous l'eut signalé pour ses prescriptions de Subutex à tour de bras, à des dosages bien supérieurs à la normale, l'ordre était entré en contact avec lui et l'accompagnait depuis quelque temps - ce qui n'était pas le surveiller, comme on a pu le lire dans certains médias. Mais d'une manière générale, les médecins se plaignent peu, même lorsqu'ils exercent dans des banlieues difficiles où se concentrent ces difficultés.
Mme Françoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale . - Un tiers des produits de substitution seraient détournés de leur usage. Le Conseil national de l'ordre travaille-t-il sur le sujet ?
M. Patrick Romestaing . - Pas du tout.
M. François Pillet, coprésident pour le Sénat . - J'ai bien entendu la différence de nature que vous établissez entre la prise en charge d'un toxicomane dans le secret de la consultation médicale en cabinet et celle qui pourrait avoir lieu dans un centre de consommation. Imaginons que de tels centres soient expérimentés, sous des modalités restant à déterminer : cela ne saurait se concevoir sans la présence de médecins. En cas de problème, leur responsabilité civile, voire pénale, ne risquerait-elle pas d'être engagée, d'autant qu'aucun bilan de santé préalable des patients n'aurait pu être dressé ? Vos confrères ne s'en inquiètent-ils pas ?
M. Patrick Romestaing . - C'est précisément l'une des réserves qu'avait formulées notre section. Nous tenions à appeler l'attention des médecins qui accepteraient de travailler dans ces centres sur leur responsabilité, y compris pénale.
Mme Catherine Lemorton, députée . - L'ordre des médecins n'a pas travaillé sur le détournement d'usage des produits de substitution, dites-vous. Je ne sais pas ce qu'il en est au niveau national mais en région, notamment en Midi-Pyrénées en 2004, du fait d'une actualité brûlante, l'ordre s'était, sans délai, engagé aux côtés de l'ordre des pharmaciens et des caisses d'assurance maladie pour stopper certains mésusages.
M. Patrick Romestaing . - J'ai répondu tout à l'heure en tant que président de la section « Santé publique » du conseil national. Les conseils départementaux s'impliquent en effet fortement à l'échelon local. C'est souvent, je l'ai dit, vers l'institution ordinale que les médecins se tournent lorsqu'ils ne peuvent plus eux-mêmes faire face ou qu'ils ont repéré qu'un confrère était en difficulté. Merci d'avoir cité l'initiative tout à fait intéressante d'un conseil départemental. Il y en a eu d'autres, ailleurs, qui n'ont pas fait la une de l'actualité.
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - La prescription de Subutex et celle de méthadone obéissent à des réglementations très différentes. La première peut être le fait de tout médecin quand la seconde est beaucoup plus strictement encadrée, l'initiative en étant réservée à certains praticiens. Avez-vous réfléchi à un assouplissement en ce qui la concerne ?
M. Patrick Romestaing . - N'étant pas du tout expert de ces sujets, je préfère ne pas répondre.
Mme Françoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale . - La prescription, par un médecin, de substances susceptibles de provoquer la mort ne vous pose-t-elle pas de problèmes éthiques ? Imaginerait-on des lieux dédiés à la consommation d'alcool pour les personnes souffrant d'addiction à cette substance ?
Mme Catherine Lemorton, députée . - Que sont d'autre les bars ?
Mme Françoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale . - Ils ne sont pas subventionnés par la puissance publique.
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - Il n'a jamais été question que les médecins prescrivent des drogues dans ces centres ! Les consommateurs s'y injecteraient, sous la supervision d'un médecin - ou d'un infirmier - les produits qu'ils auraient apportés.
Mme Françoise Branget, corapporteure pour l'Assemblée nationale . - Il existe à Genève des centres d'injection où on prescrit de l'héroïne.
M. Patrick Romestaing . - Autoriser ces centres, c'est en effet ouvrir la porte à d'autres pratiques, encore plus contestables. L'ordre croit en la force des interdits : de même qu'il n'avait pas souhaité que des médecins puissent être autorisés à donner la mort à des patients en fin de vie, afin de ne pas lever un interdit, il est contre l'ouverture de tels centres pour que perdure un interdit fort sur ces substances illicites.
Reste à savoir que faire des toxicomanes. Il faut qu'ils soient pris en charge par des associations ou par des structures spécialisées. La solution n'est pas d'ouvrir des centres de consommation supervisés, c'est-à-dire, à ce que j'avais cru comprendre, placés sous le contrôle d'un médecin - ce qui nous paraissait en tout état de cause le minimum.
Mme Catherine Lemorton, députée . - J'entends bien ce raisonnement. Mais quelle hypocrisie, tout de même, dans notre pays où on autorise les pharmaciens à délivrer aux toxicomanes des kits Stéribox ! On se donne bonne conscience en se disant qu'avec une seringue stérile, on prévient au moins le risque d'infection par le VIH ou par le virus de l'hépatite C. Cela suffit sans doute aux bien-pensants, et des pharmaciens estiment leur éthique ainsi préservée. Mais pouvons-nous continuer de nous voiler la face ?
M. Patrick Romestaing . - Je comprends votre interrogation. Le problème est complexe. Je le redis, les toxicomanes constituent une population très difficile à gérer.
D'après ce que nous rapportent ceux qui les reçoivent, ils échapperont de toute façon aux dispositifs et même si on ouvrait des lieux de consommation légale, il en resterait toujours en marge, peut-être moins nombreux, mais au prix de la mise en place de structures officielles très dérangeantes sur le plan des principes.
M. Serge Blisko, coprésident pour l'Assemblée nationale . - Je vous remercie, monsieur le président, pour cette contribution à nos travaux.