ANNEXE 2 - Comptes rendus des entretiens

Jacques Laforest, directeur général du Centre jeunesse de Québec,
Chantal Maltais, directrice des jeunes et des familles,
Marie Jacob et Annie-Eve Girard, conseillères
au Ministère de la santé et des services sociaux
(7 septembre 2010)

Présentation des centres jeunesse du Québec (par Jacques Laforest)

C'est le ministère de la santé et des services sociaux, par le biais de la Direction des jeunes et de leur famille, qui oriente et définit les paramètres de l'offre de services qui sera dispensée aux jeunes en difficulté et à leur famille.

Parmi ceux-ci, on distingue les « services de première ligne » - services sociaux généraux et certains services particuliers s'adressant à l'ensemble de la population, dispensés par la centaine de centres de santé et de services sociaux (CSSS) et les organismes communautaires - et les « services de deuxième ligne » - services spécialisés mis en oeuvre par les centres jeunesse (CJ), à destination des jeunes dont la situation peut être ou est compromise en regard de leur développement et de leur sécurité (LPJ) ainsi qu'aux jeunes contrevenants (LSJPA).

Couvrant l'ensemble des grandes régions du Québec, les seize centres jeunesse sont des organismes parapublics à vocation régionale intervenant jour et nuit avec pour particularité, s'agissant des deux CJ de Montréal et de Québec, d'être également des instituts universitaires, contribuant à ce titre à la formation des professionnels, à la réalisation de recherches sociales à l'évaluation des technologies et des modes d'intervention auprès des jeunes en difficulté et de leur famille ainsi qu'au développement des pratiques de pointe et au transfert des connaissances.

La primauté à la responsabilité parentale étant consacrée, le système de protection n'intervient qu'au titre d'une mesure d'exception, les CJ étant régis par trois lois 76 ( * ) qui en définissent le statut, la mission, le mandat et les obligations. Ainsi, ils assurent une mission de protection de l'enfance et de la jeunesse et de réadaptation pour jeunes en difficulté 77 ( * ) .

Les CJ employaient, au 31 mars 2010, 13 865 personnes, dont 70 % affectés aux services cliniques (intervention psychosociale et de réadaptation 78 ( * ) ), entre 5 % et 10 % de gestionnaires et entre 20 % et 25 % d'employés de bureau ou de services auxiliaires.

En 2007-2008, 105 000 enfants - soit un peu plus de 2 % des enfants québécois - ont fait l'objet d'une intervention des CJ, dont 70 % au titre de la LPJ, 15 % en vertu de la LSSSS et 15 % sur le fondement de la LSJPA, et 12 000 interventions ont nécessité le retrait temporaire ou permanent du milieu familial 79 ( * ) .

Parmi les 70 000 cas signalés au directeur de la protection de la jeunesse (DPJ), la moitié environ a été retenue pour évaluation et la situation d'un peu plus de 10 000 enfants a in fine été jugée compromise au sens de la LPJ 80 ( * ) .

Les motifs de signalement sont assez stables suivant les années : 63 % à raison de situations de négligence, 21 % pour des troubles de comportement, 11 % pour abus physiques, 4 % pour abus sexuels et 1 % à la suite d'un abandon. Les enfants de moins de cinq ans représentent près de 20 % des signalements, ceux âgés entre six et treize ans près de 40 % et ceux entre quatorze et dix-sept ans les 40 % restants.

S'agissant de l'application de la LSJPA, sept cents jeunes contrevenants ont fait l'objet d'une peine de mise sous garde ouverte ou fermée, les autres situations évaluées - soit trois mille enfants ayant commis dix mille délits au sens du code criminel - étant traitées dans la collectivité (probation, programme de développement des habiletés sociales, déjudiciarisation, travaux réparatoires, etc.).

En outre, les CJ ont, en 2008, procédé à près de trois cents adoptions québécoises, quatre cents adoptions internationales, mille recherches d'antécédents sociobiologiques et un peu plus de mille retrouvailles.

Quant aux familles aidées, la moitié d'entre elles ont un revenu annuel inférieur au seuil de pauvreté et bénéficient de la sécurité du revenu, près de la moitié sont monoparentales, près de 40 % des parents ont été eux-mêmes victimes de mauvais traitements, 25 % des parents ont un problème de toxicomanie, 25 % vivent une situation de violence conjugale et près de 20 % présentent des problèmes de santé mentale.

Les programmes des CJ se déclinent, notamment, en interventions auprès des familles présentant une problématique de négligence ou des jeunes ayant des troubles de l'attachement, en actions de réadaptation en internat, en foyer de groupe ou par le travail, ou de qualification des jeunes afin d'accroître leur autonomie.

Ils s'inscrivent dans des approches diverses (bio-psycho-sociale, systémique, centrée sur les solutions, psycho-éducative, cognitivo-comportementale, thérapie de la réalité ou médiation en contexte de protection) et mobilisent des services spécialisés (thérapie, expertise, médiation, intervention en centre de jour, intervention spécialisée en santé mentale, clinique d'attachement, etc.), en application de protocoles, de guides et d'outils d'évaluation et d'interventions normés 81 ( * ) .

En réponse à Alain Gournac qui l'interrogeait sur les liens entre les CJ et l'école s'agissant notamment du signalement de l'absentéisme scolaire ainsi que sur les mesures de réparation prévues pour les jeunes délinquants, Jacques Laforest, directeur général, a indiqué qu'il existe un protocole d'intervention avec le ministère de l'éducation et que les CJ travaillent au niveau local avec les commissions scolaires, tant au niveau des signalements que de la mise en oeuvre des services rendus aux enfants lorsque ceux-ci sont toujours scolarisés. En outre, la LSPJA a prévu des programmes spécifiques de travaux communautaires à destination des jeunes contrevenants qui peuvent être confiés aux municipalités.

A Claire-Lise Campion qui souhaitait connaître la proportion d'enfants déscolarisés et les critères présidant au choix de la déjudiciarisation, Jacques Laforest, directeur général, a confirmé que la rupture de scolarité constitue l'un des motifs essentiels de signalements - de l'ordre de 90 % des cas - jusqu'à l'âge de la fin de l'obligation scolaire. L'option des mesures volontaires est par ailleurs retenue lorsque la disponibilité et la capacité des parents sont jugées suffisantes, la judiciarisation restant logiquement privilégiée dans les cas d'abus physiques ou sexuels.

Si l'homologation, l'évaluation et le suivi des familles d'accueil font par ailleurs l'objet d'un encadrement strict, ces familles sont assujetties, en cas de signalement d'un enfant placé auprès d'elles, aux mêmes dispositions que les autres familles : il s'agit tout à la fois de se prémunir contre les dénonciations calomnieuses et de privilégier la stabilité des enfants placés en modulant la réponse à apporter - retrait du père de la famille d'accueil si celui-ci est en cause ou d'un enfant seulement, par exemple. Enfin, la professionnalisation des familles d'accueil est en cours.

En réponse à Muguette Dini , présidente, et Claire-Lise Campion qui l'interrogeaient sur les effectifs et sur l'état d'esprit général des intervenants sociaux, Jacques Laforest, directeur général, a considéré que leur nombre est suffisant pour répondre aux situations en urgence et rappelé que la mise en place de la LPJ et sa révision en 2006 ont suscité des débats importants parmi les intervenants entre primauté de la famille naturelle et intérêt supérieur de l'enfant. Ceux-ci semblent globalement en phase avec le choix clairement opéré par le Gouvernement de privilégier l'intérêt de l'enfant mais font état des difficultés à appliquer une loi devenue particulièrement pointue.

A Muguette Dini , présidente, qui souhaitait savoir comment les communautés culturelles autochtones sont envisagées dans l'application de la loi, Chantal Maltais, directrice, a rappelé que l'identité culturelle est une donnée dont il est tenu compte dans chaque intervention, l'optique restant d'accompagner la famille et l'enfant vers une situation apaisée.

Présentation de la loi sur la protection de la jeunesse (par Marie Jacob)

? Adoptée le 19 décembre 1977, la LPJ est entrée en vigueur le 15 janvier 1979. Outre qu'elle reconnaît l'enfant comme sujet de droit et lui accorde des droits spécifiques, la loi pose le principe de l'antériorité de l'intervention sociale, à l'opposé de la judiciarisation automatique des situations qui avait cours jusqu'alors.

Elle introduit, ce faisant, la figure délibérément personnalisée du directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) et le partage des responsabilités entre réseaux social et judiciaire. Toute intervention d'autorité doit être fondée sur des motifs prévus dans la loi et la révision régulière des mesures prises est obligatoire. Depuis son adoption, la LPJ a été modifiée à plusieurs reprises, en 1984, 1994 et 2006.

Elle s'applique à un enfant 82 ( * ) dont la sécurité ou le développement est considéré comme compromis (art. 2) à raison d'une situation d'abandon, de négligence, de mauvais traitements psychologiques, d'abus physiques ou sexuels ou de troubles sérieux du comportement (art. 38), ou peut être compromis à la suite d'une fugue, d'une situation d'absentéisme scolaire ou de délaissement après un placement (art. 38.1), l'intervention du DPJ ayant pour but de mettre fin à la situation et d'éviter qu'elle ne se reproduise (art. 2.3).

La LPJ se fonde sur plusieurs principes : l'intérêt de l'enfant et le respect de ses droits (art. 3), la primauté de la responsabilité parentale (art. 2.2) - y compris lorsque l'enfant est placé, seul un juge pouvant retirer l'autorité parentale -, la participation active de l'enfant et de ses parents (art. 2.3) - encore accrue en 2006 -, le maintien de l'enfant dans son milieu familial ainsi que la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de vie (art. 4), la participation de la communauté (art. 2.3), l'importance d'agir avec diligence (art. 2.4) - ajouté en 1994 -, le respect des personnes et de leurs droits et la prise en considération des caractéristiques des communautés culturelles et des communautés autochtones (art. 2.4).

Parce que le signalement est la pierre angulaire de la LPJ, le signalant est doublement protégé, par la garantie de la confidentialité d'abord, par l'immunité dont il bénéficie ensuite, dès lors qu'il est de bonne foi. Dès réception du signalement, et si la situation l'exige, le DPJ peut décider de mesures de protection immédiate, qui ne peuvent toutefois être prolongées au-delà de quarante-huit heures qu'avec l'accord du juge.

Après que le traitement du signalement a permis de s'assurer qu'une des situations visées à l'article 38 est en cause, le DPJ vérifie notamment, au cours de son évaluation, la crédibilité du déclarant, la matérialité des faits, la vulnérabilité de l'enfant ou le niveau des compétences parentales. A l'issue de cette enquête, et seulement si la sécurité ou le développement de l'enfant sont effectivement compromis, l'on s'oriente soit vers des mesures volontaires, établies après entente avec les parents (art. 54), soit vers la voie judiciaire 83 ( * ) . Le DPJ a alors la responsabilité du suivi de l'application des mesures, un intervenant extérieur devant participer à la révision ultérieure obligatoire des mesures mises en oeuvre 84 ( * ) .

? Plusieurs modifications substantielles de la LPJ sont intervenues en 2006. Ainsi, le principe du maintien de l'enfant dans son milieu familial et, lorsqu'il est placé, de la continuité des soins et la stabilité des liens et des conditions de vie (art. 4 LPJ) sont clarifiés : si, malgré les efforts faits pour maintenir l'enfant dans sa famille, le retrait est inévitable, il faut privilégier un placement auprès de personnes significatives et impliquer étroitement les parents. De plus, si le retour dans la famille est impossible, un milieu de vie stable doit lui être assuré de façon permanente.

Mais c'est surtout l'introduction d'une durée maximale d'hébergement 85 ( * ) , modulée en fonction de l'âge de l'enfant (art. 53.0.1 et 91.1), qui a fait l'objet des débats les plus vifs. Elle est fixée à douze mois si l'enfant est âgé de moins de deux ans, dix-huit mois si l'enfant est âgé de deux ans à cinq ans et vingt-quatre mois au-delà. A l'expiration du délai, obligation est alors faite au tribunal de rendre une décision visant à assurer un milieu de vie stable à l'enfant de façon permanente, sauf dans certaines situations précisées dans la LPJ 86 ( * ) .

De fait, l'expérience a démontré que les allers-retours permanents entre famille biologique et famille d'accueil sont très déstabilisants pour les enfants et qu'en l'absence de date-butoir, peu de parents s'amendent véritablement. En outre, le nombre de placements annuels a considérablement diminué - trente mille au milieu des années 1970, contre dix mille aujourd'hui - malgré la hausse des signalements et de la population car l'intervention en milieu familial reste privilégiée.

La mise en place de ce délai ayant fait craindre qu'un nombre croissant de placements n'aboutisse à l'adoption de l'enfant, le législateur rappelle l'obligation, pour le DPJ comme pour les familles concernées, de mettre à profit cette période pour autoriser le retour de l'enfant dans son milieu d'origine.

Depuis 2006, la révision des mesures est aussi plus fréquente en cas de placement, le droit des parents de recevoir des services sociaux et de santé adéquats est affirmé (art. 8), une évaluation périodique 87 ( * ) de l'impact de la LPJ sur la stabilité et les conditions de vie des enfants - mesurant en particulier l'effet de la durée maximale - doit être déposée à l'Assemblée nationale et des recommandations de modification de la législation proposées, le cas échéant (art. 156.2).

Il est aussi prévu que toute intervention privilégie, lorsque les circonstances sont appropriées, les moyens permettant à l'enfant et à ses parents de participer activement à la prise de décision et au choix des mesures qui les concernent (art. 2.3 b et 51), le droit, pour chacun d'entre eux, d'être accompagnés et assistés étant reconnu (art. 8).

Plusieurs mesures visant à favoriser les ententes entre les parties ont été introduites : allongement de vingt-quatre à quarante-huit heures de la durée maximale d'une mesure de protection immédiate (art. 46), possibilité de convenir d'une entente provisoire pendant l'évaluation (art. 47.1 à 47.5), possibilité pour un juge de tenir une conférence de règlement à l'amiable (art. 85 de la LPJ et 151.14 à 151.23 du code de procédure civile), possibilité de convenir d'un projet d'entente à tout moment de la procédure judiciaire (art. 73.3), suppression du nombre limite d'ententes sur mesures volontaires à l'intérieur du délai de deux ans (art. 53), possibilité de poursuivre des mesures de protection sur base volontaire à la suite d'une ordonnance judiciaire (art. 92.1), introduction d'une procédure de révision accélérée des ordonnances judiciaires sans devoir se présenter au tribunal (art. 95).

Afin de s'assurer du caractère exceptionnel de l'intervention d'autorité de l'Etat dans la vie des familles, les motifs de compromission visés à l'article 38 ont été redéfinis en fonction des conséquences pour les enfants, les mauvais traitements psychologiques étant formellement reconnus. Sont aussi énumérés dans la loi les facteurs devant appuyer toute décision (art. 38.2) : la nature, la gravité, la chronicité et la fréquence des faits ; l'âge et les caractéristiques personnelles de l'enfant ; la capacité et la volonté des parents de corriger la situation ; enfin, les ressources du milieu pour venir en aide à l'enfant et à ses parents.

Toujours dans cet objectif, des précisions ont été apportées aux responsabilités du DPJ et des autres ressources du milieu 88 ( * ) .

Des règles strictes sont également fixées pour concilier protection des enfants et respect de la vie privée, dont l'obligation pour les établissements de communiquer au DPJ un renseignement confidentiel contenu au dossier d'un enfant, d'un parent ou d'un tiers mis en cause par le signalement (art. 35.4) 89 ( * ) . De façon plus générale, est affirmée la possibilité, pour le DPJ, de consulter, pour tous les motifs de compromission (art. 36), le dossier d'un enfant ou celui d'un parent ou d'un tiers mis en cause par le signalement, avec l'autorisation du tribunal, ainsi que de divulguer des renseignements confidentiels pour assurer la protection d'un enfant, aux autorités d'autres services de protection de la jeunesse à l'extérieur du Québec (art. 72.6) ou à un établissement ou un à organisme lorsqu'un enfant est victime d'abus sexuels, d'abus physiques ou de négligence grave (art. 72.7).

Outre la constitution d'un registre sur les enfants ayant fait l'objet d'un signalement, les délais de conservation des dossiers tenus par le DPJ sont allongés (art. 37.1 à 37.4) et la diffusion par les médias d'une information permettant d'identifier un enfant ou ses parents est expressément interdite (art. 11.2.1).

La modernisation de la procédure judiciaire a aussi été recherchée, qu'il s'agisse de simplifier et d'assouplir les règles applicables 90 ( * ) ou d'élargir la gamme des mesures de protection pouvant être décidées par le tribunal 91 ( * ) et, surtout, un délai maximal de soixante jours à l'intérieur duquel le tribunal doit rendre un jugement est posé (art. 90).

Dernière modification substantielle introduite en 2006, le recours exceptionnel à l'hébergement dans une unité d'encadrement intensif est encore plus strictement balisé (art. 11.1.1), avec notamment l'obligation faite à l'établissement d'aviser la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (art. 63), la possibilité pour le jeune et ses parents de contester devant le tribunal la décision prise par le directeur de l'établissement de recourir à ce type d'hébergement (art. 74.2 e ) et, enfin, l'inscription dans la loi que cette option, tout comme une mesure d'isolement d'un jeune, ne peut jamais être utilisée à titre de mesure disciplinaire (art. 10).

Présentation de l'Entente multisectorielle relative aux enfants victimes d'abus sexuels, de mauvais traitements physiques ou d'une absence de soins menaçant leur santé physique (par Annie-Eve Girard)

On recense environ soixante-dix mille signalements d'enfants en danger par an au Québec, soit entre 1 % et 2 % du million et demi d'enfants de la province, étant entendu qu'il peut y avoir plus d'un signalement par enfant.

Conclue en 2001 entre cinq ministères - santé et services sociaux, justice, sécurité publique, éducation, loisirs et sports, et famille et enfance - et associant d'autres organismes nationaux ou locaux, l'« entente multi » consiste en l'engagement d'agir en concertation dans les situations mettant en cause des enfants victimes d'abus sexuels, de mauvais traitements physiques ou d'une négligence grave lorsqu'il existe un motif raisonnable de croire que la sécurité ou le développement de ces enfants est compromis et qu'un crime a été commis à leur endroit. Elle vise, pour l'essentiel, à faciliter la transmission de l'information pertinente, éviter la multiplication des interventions et agir au plus vite.

L'application de l'entente débute quand l'un des partenaires constate ou présume que l'enfant est menacé et que la situation est portée à la connaissance du DPJ ou de la police ; elle s'achève quand les mesures de protection de l'enfant ou s'appliquant à la personne abusive sont décidées. En tous les cas, c'est le DPJ qui assure un rôle de coordonnateur de l'entente et ce, même si le signalement de l'enfant n'est pas retenu.

L'intervention se déroule alors en cinq étapes : une fois le signalement d'une situation d'abus reçu par le DPJ, est instaurée une liaison et une planification des actions entre tous les intervenants - DPJ, policier, substitut du procureur général 92 ( * ) . Il s'en suit une phase d'enquête et d'évaluation, avec mise en commun des informations recueillies, qui fonde la prise de décision - chacun des partenaires conservant son pouvoir de décision et sa responsabilité ; enfin, l'action est mise en oeuvre et les autres intervenants sont tenus informés de son déroulement et des résultats atteints.

Si un premier bilan de l'entente effectué en 2006 a montré une amélioration significative du niveau de concertation, de collaboration et de communication entre partenaires et que l'entente a permis in fine d'assurer une meilleure continuité des interventions auprès des enfants victimes, les besoins en formation des intervenants sur son application, notamment du côté de l'éducation, restent importants.

Line Bérubé, sous-ministre adjointe aux politiques,
Lynda Fortin, directrice de la recherche et du développement des politiques,
Céline Lamy, économiste, et Karine Kouamé, conseillère en affaires internationales
et intergouvernementales, Ministère de la famille et des aînés
(7 septembre 2010)

Aux origines de la politique familiale, la « Révolution tranquille » à l'oeuvre à partir du début des années 1960 est marquée notamment par la transformation de la société et des familles québécoises : généralisation des unions libres - un couple sur trois avec enfant aujourd'hui -, hausse fulgurante du nombre des divorces - 10 % en 1960, 52 % de nos jours - et multiplication corrélative des familles recomposées, présence massive des femmes sur le marché du travail - une sur trois seulement dans les années 1970 contre plus de 80 % aujourd'hui -, etc.

Face aux besoins nouveaux des familles, le Gouvernement a d'abord consulté les organismes communautaires en vue de la rédaction d'un Livre vert (1984) puis adopté un Enoncé d'orientation (1987) pour fixer les aspects financiers du soutien aux familles, avant de déposer le Livre blanc (1997) à l'origine de la politique familiale actuelle et de créer, à la même date, un ministère dédié à la famille et à l'enfance.

Parmi les valeurs guidant cette politique figurent l'égalité des chances pour tous les enfants, l'égalité entre les femmes et les hommes, le respect de la diversité des réalités familiales et des parcours de vie - la politique familiale n'ayant pas pour objet d'inciter à adopter un mode de vie plutôt qu'un autre -, et la solidarité intergénérationnelle.

Tout en réaffirmant la responsabilité première des parents dans la réponse aux besoins de leurs enfants, le soutien de l'Etat est rendu nécessaire par l'érosion continue du taux de natalité à partir de la décennie 1960, jusqu'au creux des années 2000 : constatant que le désir d'enfant parmi les couples ne se traduisait qu'imparfaitement dans les chiffres des naissances - 2,2 enfants souhaités dans les enquêtes contre 1,5 enfant effectivement né -, le Gouvernement a donc cherché à favoriser la réalisation du désir d'enfant. La politique familiale a aussi eu pour objectifs de favoriser le développement optimal des enfants et la conciliation travail-familles-études, d'appuyer les initiatives communautaires venant en soutien des familles, de reconnaître et de valoriser la diversité des familles et de lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, en visant particulièrement les familles vulnérables.

? Premier axe d'intervention, l'aide financière accordée aux familles se décline, pour l'essentiel, en trois mesures structurantes : le soutien aux enfants, la prime au travail et le crédit d'impôt remboursable pour frais de garde. Comparable aux allocations familiales en ce qu'il s'agit d'une mesure universelle dont le montant varie suivant le nombre d'enfants, le soutien aux enfants s'en distingue cependant par le fait qu'il est versé chaque trimestre sous la forme d'un crédit d'impôt remboursable et, surtout, qu'il est versé dès le premier enfant et modulé selon le revenu des familles 93 ( * ) . L'allocation est du reste plus élevée pour le premier enfant, majorée à compter du quatrième enfant et un supplément est versé pour les familles monoparentales et les familles avec un enfant handicapé.

Autre aide financière aux familles, la prime au travail se présente aussi sous la forme d'un crédit d'impôt, éventuellement versable par anticipation, visant à maintenir une incitation financière à l'activité pour les familles à faibles revenus. Elle peut atteindre jusqu'à 2 130 euros par an pour une famille biparentale et 1 600 euros par an pour une famille monoparentale.

Quant au crédit d'impôt remboursable pour frais de garde, il a pour objet de compenser les coûts d'une garde à plein tarif en raison du manque de places de garde à contribution réduite. Ainsi, il permet de rendre comparable le coût net de la garde à plein tarif d'un enfant de moins de sept ans avec celui d'une place à 7 $ par jour pour les familles ayant un revenu annuel familial de moins de 125 000 $ et peut aussi être versé par anticipation.

S'y ajoutent encore quelques mesures spécifiques telles que les aides au logement, la détaxation des couches et des produits d'allaitement, l'aide financière pour les naissances multiples - 6 000 $ pour des triplés, 8 000 $ pour des quadruplés et 2 000 $ supplémentaires pour chaque naissance multiple additionnelle - ou les prestations spéciales au titre de l'aide de dernier recours. Au total, les familles à faible revenu auront connu, entre 2003 et 2009, une hausse considérable de leur revenu disponible grâce à ces aides financières - jusqu'à 43 % de revenu disponible supplémentaire pour un couple avec deux enfants et un revenu annuel du travail aux alentours de 20 000 $.

? Deuxième axe d'intervention, les services de garde éducatifs à contribution réduite ont pour objectif d'accueillir les enfants et de répondre à leurs besoins, d'en assurer le bien-être, la santé et la sécurité, de contribuer à leur socialisation et de faciliter leur entrée à l'école et, enfin, d'apporter un appui aux parents en leur permettant de concilier responsabilités familiales et professionnelles. Trois types de milieux offrent ces services : les centres de la petite enfance (CPE) - pour 38 % des places -, les garderies subventionnées - 18 % des places - et les responsables d'un service de garde en milieu familial - l'équivalent de nos assistantes maternelles (44 % des places disponibles).

Au nombre d'un millier environ, les CPE sont des structures associatives sans but lucratif gérés directement par les parents tandis que les garderies subventionnées correspondent à des organismes privés, généralement à but lucratif, agréés par le ministère de la famille, chacun de ces milieux accueillant quatre-vingts enfants par installation. Quant à la garde en milieu familial, la capacité d'accueil varie de six enfants pour un responsable à neuf pour deux assistantes 94 ( * ) .

211 000 places à contribution réduite étaient disponibles en septembre 2011, pour un objectif de 220 000 places fin 2011, ce qui ne suffit pas à couvrir tous les besoins : tous milieux de garde confondus, 53 % des enfants en âge préscolaire peuvent en bénéficier, les parents dont les demandes sont insatisfaites - pas de place ou pas dans le milieu souhaité - s'inscrivant sur listes d'attente. Les services de garde ont par ailleurs l'obligation d'adopter un programme éducatif - 75 % des CPE et 44 % des garderies ayant choisi celui développé par le ministère en 1997 et révisé en 2007, les autres ayant opté pour leur propre programme.

? Troisième axe d'intervention, le régime québécois d'assurance parentale (RQAP) s'est substitué, en 2006, au volet « congé parental » du régime d'assurance salariale fédéral et combine deux régimes : un régime de base accordant jusqu'à cinquante-cinq semaines de congé parental avec un taux de remplacement variant de 55 % à 70 % du salaire, ou un régime particulier limitant le congé à quarante-trois semaines mais portant le taux de remplacement à 75 %, dans la limite d'un plafond de l'ordre de 60 000 $.

Quatre types de prestations sont assurées : selon le régime choisi, entre quinze et dix-huit semaines de congé maternité, trois à cinq semaines de congé paternité non transférables à la mère - 45 % des nouveaux prestataires sont des pères -, vingt-cinq semaines de congé parental dans les deux régimes, partagés entre la mère et le père, et un congé d'adoption selon les mêmes règles. 1,2 milliard de dollars sont consacrés annuellement à ce régime, autofinancé par les contributions des employeurs et des salariés. Au vu des enquêtes, les bénéficiaires le jugent globalement accessible, flexible et généreux.

La conciliation travail-famille constitue un objectif majeur de la politique familiale au Québec et s'inscrit dans la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes. Dans ce cadre, le ministère de la famille soutient financièrement les milieux de travail pour faciliter la conciliation - flexibilité des horaires, recours au télétravail, installation de CPE en entreprise, etc.

Enfin, le ministère appuie les initiatives communautaires en faveur des familles - dont les haltes-garderies communautaires - et apporte un soutien financier et technique aux municipalités désireuses d'élaborer une politique familiale spécifique.

Si l'on raisonne en termes de politique familiale comparée, on constate qu'au cours des dernières décennies, la plupart des pays industrialisés ont mis en place ou renforcé leurs mécanismes de soutien aux familles. S'agissant des allocations familiales, deux approches sont observées, l'une universelle - un même montant pour toutes les familles, modèle retenu notamment dans les pays nordiques et d'Europe de l'ouest -, l'autre modulée selon le revenu familial avec un seuil - le cas dans les pays d'Europe méridionale - ; de ce point de vue, le Québec se situe à mi-chemin, avec une allocation universelle mais dont le montant varie en fonction des revenus.

Concernant les services de garde, le Québec se démarque des autres provinces canadiennes par la densité de son réseau public - plus de 211 040 places - et par le caractère universel du système de garde à contribution réduite. Comparé aux 7 $ par jour du programme et aux 2,2 % du revenu mobilisé par les familles québécoises pour assumer le coût de la garde d'enfants, les parents des autres provinces payent en moyenne 31 $ par jour, soit 12,7 % de leur revenu 95 ( * ) .

Quant aux congés parentaux, s'il existe dans la plupart des pays des congés maternité et paternité payés et parfois un congé parental partageable entre les parents, ils sont souvent moins longs qu'au Québec.

Au total, en 2009, les dépenses publiques en faveur des familles sont estimées à 3,3 % du Pib - dépenses provinciales et fédérales confondues -, ce qui rapproche le Québec des pays européens de tête et le distingue des Etats-Unis et du reste du Canada 96 ( * ) . Ces mesures généreuses ont d'ores et déjà permis d'augmenter la natalité et la fécondité, le nombre de naissance passant de 72 000 par an au milieu des années 2000 à 89 000 par an aujourd'hui et l'indice synthétique de fécondité de 1,45 à 1,73 enfant par femme.

L'effet sur la présence des femmes sur le marché du travail est aussi notable puisque le taux d'emploi des femmes âgées de vingt-cinq ans à quarante-quatre ans a rejoint puis dépassé celui des Canadiennes, les femmes occupant par ailleurs davantage d'emplois à temps plein.

Enfin, on note une amélioration significative du revenu disponible des parents et la réduction corrélative de la pauvreté des enfants - 15,8 % d'enfants pauvres en 2000, 7,3 % en 2007.

En réponse à Muguette Dini , présidente, qui souhaitait savoir comment le prix de journée en CPE est fixé, Line Bérubé, sous-ministre adjointe, a indiqué que celui-ci fait l'objet d'un calcul très complexe pour s'établir actuellement autour de 50 $ par jour, dont 7 $ demandés aux parents, les 43 $ restants étant versés par le ministère de la famille. Le programme des places à contribution réduite est donc particulièrement onéreux, d'où la difficulté à créer de nouvelles places. Si chaque structure est par ailleurs responsable de sa liste d'attente, elles sont invitées, comme les parents, à s'inscrire auprès de guichets régionaux uniques mais seules 40 % des prestataires de services le font effectivement.

Marie Réheaume, présidente, et Isabelle Bitaudeau, secrétaire générale,
Conseil de la famille et de l'enfance
(7 septembre 2010)

Créé en 1988 - soit un an après la mise en place d'une première politique familiale explicite au Québec - et ainsi dénommé depuis 1997, le Conseil de la famille et de l'enfance est destiné à orienter les programmes gouvernementaux en faveur des familles au travers des différentes études qu'il conduit. Il est composé de quinze personnes issues de la société civile et se veut un lieu d'échanges, de recherche et d'analyse.

La politique familiale a d'abord eu pour objectif de répondre à la chute du taux de fécondité, celui-ci s'établissant à 1,4 enfant par femme dès le début des années 1960. Elle est également confrontée, depuis plusieurs décennies, à l'amplification de la diversité familiale, à la mouvance croissante des liens conjugaux ainsi qu'à l'allongement de la vie et à la présence des femmes sur le marché du travail.

Si les premières mesures adoptées ont permis une hausse spectaculaire du taux de natalité ainsi qu'un maintien en emploi des jeunes parents - montrant ainsi le lien entre politique familiale et lutte contre la pauvreté -, le conseil invite à la plus grande prudence avant d'envisager toute modification de la législation actuelle, les trois politiques publiques visées étant encore relativement jeunes, afin de ne pas en perdre les premiers bénéfices.

1. Les services de garde éducatifs à l'enfance

Les services de garde éducatifs à l'enfance sont confrontés à plusieurs difficultés :

- le manque récurrent de places à contribution réduite, alors même que certains économistes soulignent que le coût brut de ces programmes doit être diminué, pour une moitié environ, du surcroît de recettes fiscales produit par la participation de ces jeunes mères au marché du travail ;

- l'insatisfaction des besoins de garde à des horaires atypiques, alors que les formes de travail à horaires atypiques se développent ;

- une interrogation plus générale sur la qualité des services et le coût budgétaire du réseau.

2. Le régime d'assurance parentale

Entré en vigueur en janvier 2006, ce régime vise à favoriser la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, tout en répondant à la raréfaction de la main d'oeuvre disponible du fait du vieillissement de la population. Le fait qu'une part de l'assurance parentale soit réservée aux pères témoigne au passage de la place croissante dévolue aux pères dans la vie des très jeunes enfants.

3. Le soutien aux enfants

Ce soutien, qui prend la forme d'un crédit d'impôt remboursable, a bénéficié à 96 % des enfants âgés de dix-sept ans et moins.

Au total, le conseil juge que ces trois grandes mesures constituent une combinaison équilibrée de services et de soutien financier à destination de l'ensemble des familles, même si le financement et la qualité des services de garde peuvent toujours être améliorés.

Quant aux axes de développement futurs de la politique familiale, il y a sans doute à chercher du côté du lien parent/enfant comme facteur de cohésion sociale et de stabilité familiale : au-delà de la mouvance des unions, qui se forment et se dissolvent, c'est aujourd'hui l'enfant qui fait la famille.

Il est par ailleurs essentiel d'accompagner les familles dans toutes les phases de transition - début de la vie de couple, arrivée d'un enfant, rupture d'une union conjugale, etc. Ainsi, alors que les services psychosociaux s'orientent logiquement vers les familles les plus en difficulté, le besoin d'avoir accès, lors de ces périodes charnières, à un soutien et à une information adaptés, notamment en matière de sexualité, s'exprime largement.

En réponse à Christiane Demontès et Claire-Lise Campion qui l'interrogeaient sur le rôle du conseil auprès des autorités gouvernementales et sur sa composition, Marie Réheaume, présidente, a précisé que le conseil est composé de quinze personnalités qualifiées et que les nominations - pour un mandat de trois ans, renouvelable une fois 97 ( * ) - doivent être avalisées en conseil des ministres ; il dispose par ailleurs d'une équipe permanente de dix personnes, dont cinq analystes.

Le conseil a deux mandats principaux :

- il rend des avis, à la demande du ministre - par exemple sur la publicité de la politique familiale -, ou en s'autosaisissant d'une question ;

- il présente chaque année son rapport sur la situation des familles, après une série de consultations en régions.

Enfin, il assure un rôle de représentation devant les commissions parlementaires.

A Muguette Dini , présidente, qui évoquait le concept d'une « école des parents » pour aider ceux d'entre eux qui se trouvent démunis face à des enfants difficiles, Marie Réheaume, présidente, a indiqué que les actuelles « maisons de la famille », supposées soutenir l'ensemble des parents, connaissent un sous-financement chronique qui les contraint à se concentrer sur les enfants de moins de cinq ans et sur des catégories ciblées de la population.

Or, toutes les familles connaissent des périodes de transition difficiles et les parents sont de plus en plus isolés face à leurs enfants ; ainsi, l'organisation du ramassage scolaire raréfie les occasions de partager son expérience avec d'autres parents comme ce peut être le cas, en France, à la sortie des écoles. Un encadrement renforcé à la sortie de la maternité serait également souhaitable, d'autant que les mères, qui préfèrent le plus souvent conserver leur congé pour être présentes lors des premiers mois de leur enfant, sont dans un état de fatigue avancé à la naissance.

Le conseil souligne par ailleurs qu'à vouloir mener des politiques trop ciblées vers les familles les plus en difficulté, l'on risque de stigmatiser les lieux d'accueil aux yeux des « bons » parents. Il reste que le développement des services de garde a mobilisé des ressources budgétaires importantes qui sont dès lors moins disponibles pour le soutien aux familles en milieu communautaire.

Enfin, un projet de loi proposant la disparition du conseil a été déposé et le ministre de la famille envisage d'organiser des Assises annuelles de la famille.

Vincent Auclair, député de Vimont,
et René Gauvreau, député de Groulx,
Assemblée nationale du Québec
(8 septembre 2010)

Le système de protection de la jeunesse au Québec (présenté par René Gauvreau)

La protection de l'enfance est régie à la fois par des lois provinciales - dont la loi sur la protection de la jeunesse (LPJ) québécoise - et fédérales - comme la loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA). En vertu de cette dernière, il appartient aux directeurs de la protection de la jeunesse (DPJ) de veiller au respect des sentences et, surtout, à la réhabilitation des jeunes contrevenants, en cherchant notamment à les responsabiliser par la recherche d'une sentence négociée avec la victime.

Adoptée en 1977 et entrée en vigueur le 1 er janvier 1979, la LPJ n'a longtemps pas eu d'équivalent dans le monde ; elle a depuis fait l'objet de plusieurs modifications dont les principales sont intervenues en 1984, 1994 et 2007, notamment pour fixer un délai maximal au cours duquel les parents dont les enfants sont placés pourront s'amender et définir la notion de « projet de vie stable ». Ainsi, aux termes de l'article 91-1, une mesure d'hébergement de l'enfant au sein d'une famille d'accueil ne peut excéder un an lorsqu'il est âgé de moins de deux ans 98 ( * ) , la situation de l'enfant étant systématiquement révisée tous les six mois pour éviter le prolongement indu du placement.

Posée par l'article 39, la stricte confidentialité de l'identité du signalant demeure la règle malgré plusieurs tentatives judiciaires contraires ; les signalements proviennent, pour 40 % d'entre eux, des écoles, puis des proches et du voisinage, la situation de négligence parentale étant la plus fréquemment évoquée, devant les abus physiques 99 ( * ) .

Après une première enquête de terrain destinée à écarter les signalements abusifs, il est procédé à une évaluation qui conclut soit au classement du dossier - néanmoins conservé en archive pendant un an -, soit à la compromission de la sécurité ou du développement de l'enfant ; sont alors proposées, dans 40 % environ des cas, des mesures volontaires aux parents (formations pour les nouveaux parents, ateliers de gestion de la colère, cures de désintoxication, etc.) mises en oeuvre pendant une année au plus ; dans les autres cas, le procureur de la direction de la protection de la jeunesse entame une procédure judiciarisée et le DPJ peut prendre, pour une durée maximale de quarante-huit heures 100 ( * ) , des mesures de protection immédiate, dont le retrait immédiat de l'enfant de sa famille.

Le tribunal, lorsqu'il est convaincu que la situation de l'enfant est compromise, rend toute une série d'ordonnances dont, par exemple, le retrait de certains attributs de l'autorité parentale confiés, le cas échéant, à la famille d'accueil (depuis 2007).

En réponse à Claire-Lise Campion qui faisait remarquer que le retrait de l'autorité parentale est rarement retenu en France, dans l'idée que les parents puissent continuer à l'exercer, a minima , en prévision du retour de l'enfant, René Gauvreau, député, a indiqué qu'il s'agit là d'une mesure de bon sens 101 ( * ) et qu'il appartient au juge de la moduler en fonction des situations.

A Alain Gournac , René Gauvreau a précisé qu'il n'est pas rare que les enfants, une fois revenus dans leur famille, gardent un contact avec leur famille d'accueil et que les parents, en particulier les plus jeunes, peuvent parfois n'être d'excellents parents qu'à temps partiel, ce qui autorise par exemple des retours dans la famille le temps du week-end et la responsabilisation progressive des parents par la supervision des devoirs. En outre, aux termes de l'article 91-1, le placement peut être interrompu avant l'expiration du délai d'un an et la situation de l'enfant révisée à tout moment à sa demande ou à celle de ses parents, du DPJ ou de toute partie à l'instance (art. 95).

Puis Claire-Lise Campion a évoqué l'accueil séquentiel ou par alternance, expérimenté dans certains départements français, qui permet à l'enfant de ne pas quitter sa famille tout en étant pris en charge, et regretté que l'on n'accompagne pas suffisamment les parents ; enfin, elle a jugé essentielle la fixation, par l'article 91-1, d'un délai maximal pour les mesures d'hébergement temporaire.

René Gauvreau a indiqué qu'une telle fixation incite les parents à se prendre en charge, aidés en cela par les services qui leur sont offerts par le DPJ 102 ( * ) , et qu'elle n'aboutit pas à un nombre d'adoptions plus important.

En réponse à Muguette Dini , présidente, qui faisait référence à l'expérience passée de René Gauvreau au poste de procureur de la DPJ, ce dernier est convenu que les transmissions d'information d'une province à l'autre sont parfois trop lentes, du fait notamment de la nécessité d'obtenir une autorisation judiciaire dès lors qu'il s'agit de données confidentielles, et que les procureurs n'ont hélas que trop peu de temps à consacrer à chaque dossier : pendant trois ans, c'est en moyenne une vingtaine de dossiers qu'il a eu à traiter alors que l'on considère qu'un procureur devrait étudier un dossier aussi longtemps qu'il le plaide...

En matière de justice pénale pour les mineurs, le fait que la sentence puisse être négociée entre la victime et son auteur permet incontestablement de réduire le taux de récidive, la rencontre en face à face avec sa victime produisant une gêne le plus souvent réparatrice. Il existe par ailleurs des « mesures de rechange » 103 ( * ) par lesquelles le jeune contrevenant, ayant admis son délit, consent à rencontrer un intervenant social ou à accomplir des travaux communautaires ; cette solution a pour avantage d'éviter la création d'un dossier judiciaire et de responsabiliser l'intéressé, pour un taux de récidive quasi nul.

A Claire-Lise Campion qui souhaitait connaître la teneur des débats ayant précédé l'adoption, en 2007, d'un délai maximal pour l'application des mesures d'hébergement, René Gauvreau a rappelé qu'il arrivait précédemment qu'un enfant soit placé jusqu'à sa majorité, ce qui n'est désormais plus possible. Les parents disposent dès lors d'un agenda clair pour s'amender, étant entendu que l'application de l'article 91-1 n'est pas automatique mais pragmatique, le juge pouvant en particulier ordonner le prolongement du placement lorsque les services de soutien aux parents 104 ( * ) n'ont pas été rendus.

La réalité budgétaire de la protection de la jeunesse étant la même au Québec qu'en France, certains services, en santé mentale par exemple, font parfois défaut. Le recrutement de nouvelles familles d'accueil, dont la moyenne d'âge atteint cinquante-six ans, s'avère, en outre, de plus en plus difficile et 50 % des intervenants en centres jeunesse auront pris leur retraite d'ici à quatre ans.

Au total, la LPJ est une législation très ambitieuse mais il demeure, pour sa pleine application, de fortes inégalités territoriales, avec le paradoxe que les régions les moins bien pourvues en intervenants et en moyens sont souvent celles au plus fort taux de natalité.

En réponse à Muguette Dini , présidente, qui expliquait le découragement de certains intervenants par le fait que le retour dans la famille pour le week-end, décidé par le juge, annule parfois le travail de toute la semaine, René Gauvreau a indiqué qu'il s'agit là de la dichotomie fondamentale de la protection de la jeunesse, dont le premier mandat consiste à résorber une situation familiale difficile tout en ayant pour objectif le retour, à terme, de l'enfant dans sa famille.

Claire-Lise Campion a regretté que l'on n'ait pas davantage recours, en France, à la famille élargie, et que la présence d'un avocat auprès de l'enfant, contrairement au Québec, ne soit pas systématique 105 ( * ) .

Organisée par les articles 70-1 et suivants, la tutelle de la LPJ autorise par ailleurs le DPJ à demander au tribunal, dans l'intérêt de l'enfant, la désignation d'un tuteur - lui-même, la famille d'accueil ou toute autre personne qu'il recommanderait - avec pour inconvénient de fermer le dossier de la protection de la jeunesse et de faire cesser les services rendus à la famille, et pour horizon éventuel l'engagement d'une procédure d'adoption simple 106 ( * ) .

A Alain Gournac qui faisait part de son étonnement face à l'appréciation de l'intérêt de l'enfant dans certaines décisions de justice, René Gauvreau a rappelé toute la difficulté à définir cet intérêt, notamment dans sa composante culturelle.

Les difficultés de recrutement des familles d'accueil s'expliquent d'abord par la faible attractivité des salaires en comparaison de ceux des familles relevant des centres de la petite enfance, ainsi que par l'implication permanente à laquelle ce travail oblige. En outre, certaines familles s'y engagent dans l'espoir, souvent vain, de pouvoir adopter plus rapidement un enfant par ce biais que dans le cadre d'une adoption classique - sept à huit ans d'attente en moyenne pour un enfant québécois. Il n'existe plus d'orphelinat au Québec, à l'exception des seules « pouponnières » pour les bébés nés sous X, et l'adoption internationale est relativement bien organisée dans la province.

Les politiques familiales au Québec (présentées par Vincent Auclair)

Depuis 1997 et la création des services de garderie subventionnés, le développement des politiques familiales, qui transcende du reste les clivages partisans, a considérablement amélioré le sort des familles. Outre le subventionnement des places à contribution réduite - initialement fixées à 5 $ par jour et aujourd'hui à 7 $ -, ces politiques visent principalement les congés parentaux et le soutien aux enfants, assimilable aux allocations familiales.

L'objectif clairement affiché visait à lutter contre le vieillissement accélérée de la population : avec l'arrivée à l'âge de la retraite des baby-boomers, il y aura en 2013 plus de départs en retraite que d'entrées sur le marché du travail et, dès 2017, deux actifs pour un retraité ; il s'ensuit également une hausse continue des dépenses de santé - qui absorbent 45 % du budget de la province (21 % pour l'éducation, 17 % pour le service de la dette).

Avec l'apport du budget fédéral, ce sont au total dix milliards de dollars qui sont investis chaque année en faveur des familles. Réintroduit en 2003-2004 après que la mise en place du programme de garderie subventionnée et la crise économique et budgétaire majeure de l'époque a conduit en 1997-1998 à sa suppression, le soutien aux enfants, attribué dès le premier enfant et qui varie suivant les revenus, bénéficie aujourd'hui à 900 000 familles québécoises et à près d'un million d'enfants.

Il existe trois types de services de garde 107 ( * ) : les centres petite enfance (CPE) gérés selon une approche coopérative par un conseil d'administration composé de citoyens ; des services similaires aux CPE, répondant aux mêmes normes mais relevant du secteur privé bien que subventionnés par la province ; et, enfin, des services de garde en milieu familial, avec un maximum de six enfants par gestionnaire ou de neuf pour deux éducatrices. Outre les 7 $ par jour payés par les parents, l'Etat verse autour de 42 $ par jour et par enfant aux CPE, 36 $ pour les centres privés et de 24 à 26 $ pour l'accueil en milieu familial, pour un coût global de 2,2 milliards de dollars par an.

Par comparaison, l'Ontario ne dispose pas de services de garde subventionnée et dans la région de Toronto, le coût de la garde atteint pour les familles 50 $ à 60 $ par jour et par enfant. Il existe cependant un crédit d'impôt minorant le coût pour les parents mais qui a l'inconvénient de n'être versé qu'une fois par an et qui contraint les parents à avancer la totalité de la somme. A l'opposé, le Québec a fait le choix de supporter directement la dépense, se privant au passage d'un crédit d'impôt fédéral. En 2008, la province a cependant mis en place un crédit d'impôt, versé à compter du 1 er janvier 2011 tous les mois et auquel le niveau fédéral contribue - mais toujours sous la forme d'une subvention annuelle -, ce qui ramène le coût d'une place en service non subventionné autour de 35 $ par jour et par enfant.

Il reste que les 200 000 places subventionnées disponibles ne suffisent pas à couvrir les besoins, le nombre de places manquantes étant estimé à 40 000.

Quant au soutien aux enfants, il s'agit d'une allocation universelle et non imposable réévaluée chaque année, généreuse pour les plus faibles revenus et d'un montant proportionnellement plus important pour le premier enfant 108 ( * ) . En 2009, le soutien aux familles était compris entre 608 $ et 2 166 $ pour un couple avec enfant, et entre 2 291 $ et aux alentours de 6 000 $ pour un couple avec quatre enfants.

Les politiques familiales ont eu un impact important sur la présence des femmes sur le marché du travail puisque la proportion de femmes âgées de vingt-cinq à quarante-quatre ans en activité est passée de 45 % en 1976 à 80 % aujourd'hui.

Précédemment géré au niveau fédéral dans le cadre de l'assurance chômage, le régime d'assurance parentale, qui relève depuis 2005 du niveau provincial, a été profondément réformé au bénéfice des nouveaux parents : alors qu'ils avaient auparavant le choix entre un congé parental de cinquante-deux semaines non rémunéré ou d'une assurance parentale limitée à vingt-six semaines, l'allocation peut désormais être versée jusqu'à cinquante-cinq semaines et est ouverte aux travailleurs autonomes, près des trois quarts des pères utilisant par ailleurs la totalité des semaines allouées.

Les effets de ces politiques sont spectaculaires : depuis 1997, le taux de natalité a été porté de 1,37 enfant par femme à 1,73 et l'on estime que la population totale aura crû de 800 000 personnes d'ici à 2031 sous l'effet de ce nouveau baby-boom, soit une hausse de 10 %. Combinée au renouveau de la politique d'immigration - 35 000 arrivées en 2003 contre 55 000 aujourd'hui, dont 80 % environ sont choisis sur des critères linguistiques, culturels, professionnels, etc. -, cette croissance démographique contribuera à réduire la pression sur les régimes de retraite.

S'il constitue un choix coûteux pour une province de huit millions d'habitants, le renouveau de la politique familiale québécoise était indispensable car sans cela, les tensions entre jeunes générations et baby-boomers n'auraient cessé de croître et le déséquilibre des fonds de pension actuariels de s'accentuer.

René Gauvreau a ajouté que le développement des services de garde, en permettant le retour des mères sur le marché du travail, constitue un investissement rentable pour le Gouvernement et que l'extension du congé parental, en favorisant le bon développement de l'enfant au contact de ses parents, prévient aussi les éventuels conflits relationnels.

En réponse à Muguette Dini , présidente, Vincent Auclair a précisé que l'Etat prélève, pour le financement de l'assurance parentale, une cotisation obligatoire assise sur les salaires 109 ( * ) , au taux de 0,506 % pour la part salarié, 0,708 % pour la part employeur et 0,9 % pour les travailleurs autonomes.

A Alain Gournac , qui faisait remarquer que le Québec avait déjà mis en place, en 1988, une prime à la naissance dès le premier enfant, Vincent Auclair a indiqué que celle-ci a eu un faible impact sur la natalité et qu'elle a été supprimée en 1997 concomitamment au développement des service de garde subventionnés, avant d'être réintroduite en 2003. Dans les années 1950, le Gouvernement accordait même une terre à toute famille ayant un douzième enfant.

A l'opposé des solutions retenues en France - allocations familiales versées indépendamment des ressources et modulation des tarifs de crèche en fonction des revenus -, le choix a été fait d'offrir des places de garde subventionnées quels que soient les revenus du couple afin d'éliminer la garde d'enfants non déclarée. Reste que l'accroissement des places disponibles en CPE se heurte au manque de terrains disponibles, en ville, pour la création de nouvelles installations et que les parents privilégient toujours ces places au détriment du milieu familial, même si des bureaux coordonnateurs ont été créés pour centraliser les demandes.

En réponse à Claire-Lise Campion qui s'interrogeait sur l'existence de systèmes de garde au sein des entreprises, Vincent Auclair a rappelé que les CPE se développent au sein de l'entreprise, le Gouvernement ayant d'ailleurs bonifié les montants versés afin de favoriser la création de nouvelles installations, même si le grand défi reste de répondre aux horaires atypiques.

A ce sujet, Christiane Demontès a rappelé l'examen en cours, en France, de la proposition de loi autorisant la création de maisons d'assistants maternels dans un lieu extérieur à leur domicile, le cas échéant mis à disposition par la commune, qui permettent d'accueillir jusqu'à seize enfants sous la surveillance de quatre assistantes maternelles tout en élargissant les horaires d'ouverture. Celles-ci font cependant l'objet de certaines critiques, qu'il s'agisse de l'application jugée inopportune des ratios applicables à la garde familiale (soit quatre enfants par assistante contre trois précédemment) alors qu'il s'agit d'une garde collective (de six à neuf enfants par personne selon l'âge des enfants) ou de la dégradation supposée de la qualité de l'accueil.

Il reste qu'il s'agit d'un instrument intéressant pour développer l'offre à un coût raisonnable et répondre aux formes de travail atypique, en particulier en milieu rural et dans les petites collectivités, alors que les coûts de fonctionnement importants et la rigueur des normes applicables freinent la création de nouvelles structures.

Après qu' Alain Gournac a indiqué que l'absence de solutions de garde conduit parfois les parents à recourir au travail dissimulé et qu'une crèche peut accueillir un maximum de soixante enfants 110 ( * ) , Muguette Dini , présidente, a précisé que les présidents de conseils généraux, qui délivrent les agréments, peuvent très bien ne l'accorder que pour trois enfants, ce qui limiterait la capacité d'accueil de la maison à douze enfants. Autres avantages : les maisons autorisent le partage d'expérience entre assistantes, rassurent les parents et limitent la participation des collectivités à la seule mise à disposition de locaux.

Vincent Auclair est convenu de la difficulté à concilier respect du ratio d'enfants par éducatrice et hausse de l'amplitude horaire, les crèches pouvant accueillir un maximum de quatre-vingts enfants au Québec.

Puis Christiane Demontès a évoqué l'existence, depuis 2000, de relais d'assistantes maternelles (Ram) financés par la caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) afin de répondre à l'isolement des assistantes maternelles comme au déficit de socialisation des enfants, et de jouer le rôle d'interface entre l'employeur et l'employé pour les questions d'ordre administratif. Outre la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) qui laisse aux parents le choix du mode de garde, il existe en outre un mécanisme de défiscalisation pour l'emploi d'assistantes maternelles à domicile.

Après que Vincent Auclair a prôné une stricte réglementation des éventuels reventes de permis d'accueil d'une installation privée à l'autre - une place en garderie ayant une valeur économique considérable -, René Gauvreau, député, a rappelé les difficultés à créer des CPE : recherche de subventions, respect de normes contraignantes, qui plus est différentes d'une municipalité à l'autre, en matière de sécurité et d'aménagement des bâtiments, et lourdeurs du modèle coopératif.

En réponse à Muguette Dini , présidente, Vincent Auclair a indiqué que l'allocation versée aux éducatrices en milieu familial augmentera probablement, celles-ci s'étant désormais regroupées en syndicat. Certaines structures privées ont parfois exigé des parents, par le passé, des sommes additionnelles supérieures aux 7 $ par jour pour les heures de garde additionnelles mais ces tarifs sont aujourd'hui balisés (2,5 $ maximum par heure supplémentaire et 2,5 $ pour le déjeuner).

L'objectif à terme consiste à parvenir à un développement harmonieux des différents modes de garde - 30 % en CPE, 30 % dans le privé et 40 % en milieu familial -, en privilégiant transitoirement le développement des CPE et du secteur privé qui ne peuvent faire face à la demande au détriment du milieu familial, qui dispose à l'inverse de surcapacités. Avec une moyenne de 88 000 naissances par an, on estime qu'environ 40 000 places de garde manquent actuellement, les parents recourant soit à des modes de garde familiaux, soit au bénéfice de l'assurance parentale pendant la première année.

Puis Muguette Dini , présidente, Claire-Lise Campion et Alain Gournac ont souligné la difficulté, pour les parents - qui contribuent en fonction de leurs revenus - comme pour les communes, d'assumer la charge financière de la garde d'enfants.

Enfin, Vincent Auclair a fait état de la situation préoccupante des populations inuites, désormais sédentarisées, qui souffrent de problèmes de santé spécifiques, dont l'obésité, et parmi lesquelles les cas d'abus physiques ou sexuels des enfants restent plus fréquents.

Claude Boulanger, juge en chef adjoint à la Chambre de la jeunesse,
et Mario Tremblay, juge en chef associé, Cour du Québec
(9 septembre 2010)

La Cour du Québec est composée de deux cent soixante-dix juges, répartis en trois chambres : civile, criminelle et pénale et de la jeunesse, cette dernière étant compétente en matière d'adoption interne et internationale, de protection de la jeunesse et de justice criminelle et pénale pour les adolescents.

Contrairement aux dossiers civils ou criminels, librement accessibles à tous, les dossiers « jeunesse » sont enregistrés au greffe spécial de la jeunesse et uniquement consultables par les parties ainsi que les journalistes, sous réserve du strict respect de l'anonymat des personnes en cause 111 ( * ) .

Lorsque le directeur de la protection de la jeunesse (DPJ) conclut à la compromission de la sécurité ou du développement de l'enfant et que des mesures volontaires ne peuvent être mises en place, il procède à la judiciarisation du dossier en déposant à la Cour une « requête en protection ». Une fois la compromission effectivement déclarée, le tribunal autorise la mise en oeuvre de mesures de protection ; ainsi, dès le signalement d'un abus physique ou sexuel, une plainte est déposée contre la personne suspectée, l'enfant est retiré de son milieu 112 ( * ) et conduit, le cas échéant, en centre hospitalier afin qu'un rapport médical soit ensuite produit devant le tribunal.

Durant toute la procédure, les parents sont tenus informés et invités à se présenter devant le tribunal. Ils peuvent être représentés par un avocat, de même que les enfants le sont dans la quasi-totalité des cas. Si le juge a compétence pour décider du type de placement de l'enfant - famille d'accueil, personnes signifiantes, etc. -, c'est le DPJ qui désigne la famille d'accueil, sans être en principe lié par la recommandation éventuelle du tribunal.

Depuis l'instauration de délais maximaux de placement dans la loi sur la protection de la jeunesse (LPJ), le juge émet une ordonnance pour un temps fixe qui connaît cependant des exceptions dès lors qu'il est établi que le DPJ n'a pas offert les services adaptés pour permettre aux parents de mettre fin à la situation de compromission.

Afin d'éviter la judiciarisation systématique des dossiers, le DPJ peut signer une entente avec les parents ; les procédures de règlement à l'amiable se développent également depuis une dizaine d'années, avec le concours d'un juge mais dans un cadre beaucoup plus informel - pas d'assermentation, pas de robe pour le magistrat, etc 113 ( * ) .

En matière pénale, c'est le « directeur des poursuites criminelles et pénales », avocat indépendant du ministère de la justice, qui représente le public. Lorsque la maltraitance est susceptible de condamnation pénale, les deux procédures - l'une en protection de la jeunesse, l'autre pénale - sont conduites parallèlement.

A l'expiration du délai d'application des mesures de protection, la loi prévoit que le juge qui les a initialement prononcées intervient à nouveau, ce qui assure de sa bonne connaissance du dossier mais fait qu'il est sans doute plus difficile, pour les parents, de regagner en crédibilité auprès du même interlocuteur.

Pour certaines infractions, une rencontre est organisée entre la victime, avec son accord, et l'auteur des faits, afin de responsabiliser ce dernier.

En cas de contestation d'une décision rendue par la chambre de la jeunesse, l'appel doit être porté devant la Cour supérieure du district judiciaire où la décision a été rendue ou devant la Cour d'appel pour certaines infractions pénales. L'appel n'est en principe pas suspensif : le jugement de première instance s'applique tant que l'appel n'est pas prononcé, sauf dans les cas exceptionnels où la cour saisie modifie la décision initiale, à la demande d'une partie, dès sa saisine.

Geneviève Bouchard, présidente-directrice générale,
Brigitte Thériault, secrétaire générale,
et Roger Robitaille, directeur général opérationnel,
Conseil de gestion de l'assurance parentale
(9 septembre 2010)

Présentation du régime québécois d'assurance parentale

Si la loi sur l'assurance parentale (LAP) a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale du Québec en 2001, il a fallu attendre la signature, en 2005, d'une entente entre les gouvernements provincial et fédéral et la modification consécutive de la LAP pour que le régime québécois d'assurance parentale (RQAP) entre effectivement en vigueur le 1 er janvier 2006.

En assurant un revenu de remplacement et une sécurité financière aux nouveaux parents, le régime favorise non seulement la conciliation travail-famille et le maintien du lien d'emploi mais participe plus généralement de l'adaptation de l'économie québécoise aux réalités nouvelles du marché du travail pour atténuer les pénuries de main d'oeuvre résultant du vieillissement de la population, l'objectif étant de concilier développement social et prospérité économique.

Les parents peuvent opter, au choix, entre deux régimes distincts, l'un dit « régime de base », retenu par les deux tiers des prestataires et qui autorise des taux de remplacement variant de 55 % à 70 %, l'autre dit « régime particulier », avec un taux de remplacement plus élevé (75 %) mais une durée maximale de congé moindre. Toute personne qui travaille, qu'elle soit salariée ou travailleur autonome, y est admissible pourvu que son revenu brut annuel soit compris entre 2 000 $ et 62 500 $.

En outre, des prestations de paternité - non transférables - sont spécifiquement versées aux pères et les trois quarts d'entre eux les utilisent désormais.

Comparé au régime fédéral d'assurance emploi (RAE), le RQAP apparaît globalement plus généreux : quinze semaines (à 75 % du dernier salaire) ou dix-huit semaines (à 70 %) 114 ( * ) de congés maternité contre quinze semaines (à 55 %) dans le RAE ; sept semaines (à 70 %) et vingt-cinq semaines (à 55 %) ou vingt-cinq semaines (à 75 %) de prestations parentales partageables contre trente-cinq semaines (à 55 %) ; de plus, les prestations de paternité - trois semaines (à 75 %) ou cinq semaines (à 70 %) - n'existent pas dans le RAE, le revenu maximum assurable y est moins élevé (43 200 $ contre 62 500 $) et un délai de carence de deux semaines y est prévu avant le versement des prestations.

Dans les faits, 96 % des droits ouverts sont utilisés - 98 % au titre du régime de base et 91 % pour le régime particulier - et 85 % des travailleurs y cotisent. Le RQAP s'adresse principalement aux personnes âgées de vingt ans à quarante-quatre ans et aux classes moyennes : ainsi, la moyenne d'âge des prestataires est de trente-deux ans et leur revenu annuel moyen de 40 000 $.

Chargé de gérer le RQAP, le conseil de gestion, organisme gouvernemental autonome, assure la perception des cotisations, le paiement des prestations, administre, en qualité de fiduciaire, le fonds d'assurance parentale 115 ( * ) , produit des études et recherches, donne son avis au ministre et adopte et soumet au Gouvernement pour approbation les règlements du régime (application de la LAP et fixation des taux de cotisation). Il est administré par un conseil d'administration composé de huit membres nommés par le Gouvernement, majoritairement représentatifs des cotisants, et d'un membre représentant le ministère de l'emploi et de la solidarité sociale (Mess).

Pour répondre au déséquilibre observé entre les prestations servies et les cotisations recouvrées, le niveau des cotisations, payées aux 5/12 e par les salariés et aux 7/12 e par les employeurs, a été relevé chaque année depuis quatre ans, ce qui devrait permettre de retrouver l'équilibre annuel en 2012 et de résorber le déficit cumulé dans les sept ans. Au salaire québécois annuel moyen (40 000 $), le taux de cotisation d'un travailleur au RQAP s'établit ainsi à 0,537 %, soit 202,40 $ par an, étant précisé que le Gouvernement fédéral consent dans ce cas une ristourne de cotisation au RAE de 0,370 %, soit 148 $, ce qui ramène le coût net de l'adhésion au RQAP à 54,40 $ par an.

Même si aucune étude n'a encore établi de corrélation directe avec la mise en place du RQAP, il reste que depuis sa création, le taux d'activité des Québécoises a encore progressé pour s'établir à 84,4 % des femmes âgées de vingt-cinq ans à quarante-quatre ans, au-dessus de la moyenne du Canada (82,4 %) ; on observe également une progression importante du taux de participation des pères au régime, passée de 57 % en 2006 à 75 % en 2009, soit le plus élevé du pays (11 % en moyenne). Enfin, bien que n'ayant pas de visée nataliste stricto sensu , le RQAP participe d'un environnement favorable aux familles qui explique la hausse des naissances (+ 16 %, contre + 9,8 % dans l'ensemble des autres provinces) et de l'indice synthétique de fécondité (1,56 en 2005, 1,73 en 2009).

Présentation de la « solution d'affaires » du RQAP

Pour sa gestion administrative, le RQAP recourt à l'expertise existante du Mess et à des ressources extérieures, dont le Centre de services partagés du Québec, notamment pour le développement informatique ; il procède à des échanges de renseignements auprès de ministères et organismes tant provinciaux que fédéraux afin d'assurer l'exactitude des données et de simplifier les démarches des clients 116 ( * ) .

Cette simplification passe surtout par l'adoption d'une procédure totalement numérisée et automatisée qui en fait la première prestation gouvernementale de services en ligne, jusqu'au versement possible des prestations par dépôt électronique 117 ( * ) , ce qui a par ailleurs permis de réduire les coûts de gestion à 1,6 % du volume des prestations servies (1,65 milliard de $ en 2009, pour 204 958 prestataires). Grâce à ses solutions, 82,6 % des demandes sont traitées en moins de quatorze jours.

Les clients ont à leur disposition une solution multicanale et personnalisée - web (qui représente 58,4 % des demandes transmises), service de réponse vocale interactive, téléphone 118 ( * ) et courrier -, le centre de service à la clientèle étant réparti en quatre services des opérations, situés dans trois régions administratives. Selon l'enquête de satisfaction conduite en 2009, 99 % des usagers se disent satisfaits (35 %) ou très satisfaits (64 %) du service rendu.

Camille Picard, directeur général, Denis Adam, directeur général adjoint,
Sonia Gilbert, directrice de la protection de la jeunesse,
et Suzanne Lepage, directrice des services aux jeunes et à leurs familles,
Direction générale du centre jeunesse de la Montérégie
(10 septembre 2010)

Chacune des seize régions administratives du Québec dispose d'un centre jeunesse (CJ), à l'exception de Montréal qui en a deux - un francophone, l'autre anglophone, qui dessert toute la clientèle anglophone de la province. Parmi ceux-ci, le CJ de la Montérégie, avec ses 17 000 enfants et familles suivis, ses 1 800 employés, un budget de 150 millions de dollars et ses vingt-six points de service, est le plus important.

A l'image des services en santé qui se déclinent en deux niveaux - les médecins de famille en première ligne, les hôpitaux et les spécialistes en seconde ligne -, la première ligne est assurée, pour les services à l'enfance, par les centres de services sociaux 119 ( * ) et la seconde par les CJ, services spécialisés.

En réponse à Muguette Dini , présidente, Camille Picard, directeur général, a indiqué que si la France et le Québec sont confrontés aux mêmes situations en matière de protection de la jeunesse, des différences de pratiques et de valeurs existent, la pratique québécoise se distinguant en particulier par son caractère plus interventionniste.

Sonia Gilbert, directrice, a ajouté que la Belgique fait partie des pays qui se sont inspirés de la loi sur la protection de la jeunesse (LPJ) en vigueur au Québec depuis 1979 et révisée en 2006 afin, notamment, de réduire les délais de placement et d'élaborer un projet de vie stable pour les enfants. En fonction de la nature du signalement, l'intervention est classée selon trois niveaux d'urgence codés : intervention immédiate (code 1), dans les vingt-quatre heures (code 2) ou dans les quatre jours (code 3).

Pour apprécier la nécessité d'une intervention, le DPJ se fonde sur une grille de lecture combinant quatre éléments : la gravité des faits ; la vulnérabilité de l'enfant ; les capacités parentales et les ressources du milieu, le questionnement sur chacun des points étant plus ou moins long selon l'urgence présumée de l'intervention 120 ( * ) . En cas de doute sur la crédibilité du signalant, qui est du reste parfois anonyme, les équipes du DPJ se rendent systématiquement sur place.

En tout état de cause, c'est toujours le concept de compromission de la sécurité ou du développement de l'enfant qui guide les actions du DPJ. Celui-ci se décline en divers cas d'abus et de négligences parentales, le motif d'abus psychique ayant été ajouté en 2007 pour autoriser expressément l'intervention auprès de l'enfant en cas d'aliénation parentale, de conflit de garde légale ou de violences conjugales dont il serait la victime psychique collatérale 121 ( * ) .

Ainsi, l'intervention du DPJ est à la fois potentiellement très large et très cadrée afin de garantir que l'immixtion de l'Etat dans la vie des familles est légitime, l'objectif étant d'assurer tant la protection des droits de la jeunesse que celle du citoyen et des droits de la personne.

A Muguette Dini , présidente, qui lui demandait si le Québec a mis en place un numéro d'appel spécifique pour les enfants en danger, Sonia Gilbert, directrice, a répondu qu'il y avait un numéro unique, le 911 122 ( * ) , que les enfants connaissent, même si, dans la plupart des cas de maltraitance physique, les enfants choisissent plutôt d'en parler à un adulte significatif.

L'objectif de la loi étant de responsabiliser les parents, la judiciarisation des situations n'est retenue qu'en cas d'absence de reconnaissance des faits ou de participation des parents, soit dans environ 40 % des cas, l'intervention du juge pouvant toujours être décidée a posteriori en cours de procédure. Des conférences de règlement à l'amiable, où le juge quitte sa robe, sont aussi possibles même si la culture de la médiation reste encore insuffisamment développée dans le monde judiciaire, notamment du côté de la défense.

L'application des mesures de protection dure en moyenne deux ans ; elle fait l'objet d'une révision régulière intervenant a minima tous les ans, voire tous les six mois pour les enfants en bas âge et qui peut être anticipée selon les cas, les parents et l'enfant étant présents à chacune des révisions. Cette application s'inscrit, du reste, dans la continuité de l'évaluation initiale puisque parents et intervenants sont invités à participer à une « table d'orientation » au cours de laquelle sont arrêtées les mesures à mettre en oeuvre dans le cadre d'un projet très individualisé.

Parmi les intervenants des CJ figurent des travailleurs sociaux, des psycho-éducateurs, des psychologues, des criminologues, des techniciens en assistance sociale, etc., et l'on recourt parfois à des ressources extérieures telles que les médecins spécialistes, notamment. La formation des personnels est constamment réorientée en fonction des derniers développements de la recherche et l'on est sans doute plus directif et prescriptif dans les pratiques attendues des intervenants qu'en France.

Abordant le projet France-Québec, Denis Adam, directeur général adjoint, a indiqué que celui-ci est né de la signature, en octobre 2008, d'un protocole de coopération sur la mobilité des travailleurs dans plusieurs secteurs d'activité, dont les services sociaux. Les centres jeunesse de trois régions - Gaspésie, Québec et la Montérégie - ont été invitées à rencontrer leurs collègues de quatre instituts régionaux du travail social (IRTS) français - Lorraine, Poitou-Charentes, Bretagne et ... -, l'objectif étant, à terme, de généraliser ce partenariat à l'ensemble des régions québécoises et françaises.

Bien que 10 % des situations soient suivies en même temps au titre de la LPJ et de la justice pénale pour adolescents, les équipes d'intervenants sont distinctes. A l'occasion du premier délit, on découvre d'ailleurs souvent que les contrevenants sont d'abord des victimes en protection de la jeunesse.

Après avoir loué la façon dont on cherche, au Québec, à valoriser le parent et à lui redonner confiance, Claire-Lise Campion a regretté qu'en France, l'on ait encore trop tendance à exclure le parent défaillant du processus, ce qui conduit parfois à placer des adolescents en familles d'accueil successives jusqu'à leur majorité.

Camille Picard, directeur général, a ajouté que le modèle français de prise en charge reste très médical alors qu'au Québec, le médecin vient en appui de l'équipe d'intervenants sociaux et qu'il s'agit de ne pas déclasser le parent. Il est par ailleurs obligatoire de mesurer régulièrement la satisfaction des parents et des enfants.

Sur ce point, Claire-Lise Campion a indiqué que le département de l'Essonne a conduit une telle enquête de satisfaction auprès des familles et des jeunes ressortissants de l'aide sociale à l'enfance mais qu'il s'agit là d'une pratique très innovante.

En conclusion, Camille Picard, directeur général, a rappelé les débats importants qui ont présidé à l'implantation, dans la loi, des délais maximaux de placement. Il s'agit tout à la fois d'investir sur le parent et sur l'enfant.

Docteur Gilles Julien, fondateur de la pédiatrie sociale au Québec
(10 septembre 2010)

Sur la totalité des enfants pris en charge par le docteur Julien, une moitié environ est envoyée par la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ), l'autre moitié étant référée par les écoles, le voisinage, les centres locaux de services communautaires (CLSC), etc 123 ( * ) .

La pédiatrie sociale consiste en une approche de proximité et vise à couvrir la trajectoire de l'enfant de zéro à quatorze ans afin de prévenir ou de réparer, en collaboration avec la DPJ, les dégâts résultant des négligences ou des abus dont il a pu être victime. Or, il importe de rappeler que la protection de l'enfant ne relève pas uniquement de la loi sur la protection de la jeunesse (LPJ) qui est une loi d'exception : elle n'intervient que lorsque la sécurité ou le développement de l'enfant sont compromis. Il convient avant tout de mobiliser les communautés entendues au sens large - voisinage, quartier, école, milieu associatif - d'où proviennent d'ailleurs la majorité des signalements de négligences.

Dans le cadre de cette approche, le parent est un partenaire essentiel, le premier responsable de l'enfant mais il n'en est pas le seul ; la pédiatrie sociale fait alors intervenir des plans de soutien individualisés - accès à l'école 124 ( * ) , prévention de la négligence, etc.

A Muguette Dini , présidente, qui l'interrogeait sur la durée moyenne de passage des enfants, le docteur Julien a précisé que celle-ci est très variable et que l'intervention est plus ou moins intensive selon les périodes, mais qu'un dossier n'est jamais véritablement fermé. Le centre de pédiatrie sociale se veut être un espace de référence, par ailleurs très lié à un quartier 125 ( * ) , l'objectif étant qu'à terme, il existe un centre par communauté vulnérable, soit de l'ordre de deux-cent centres sur l'ensemble de la province.

Si la LPJ est un modèle, son application est parfois excessive malgré la présence de très bons intervenants au sein des DPJ et des centres jeunesse. Ces derniers, faute d'outils d'accompagnement suffisants permettant de privilégier l'autorité parentale, pénalisent souvent le parent en choisissant de placer l'enfant dans la perspective, le cas échéant, d'une adoption, alors même que le parent pourrait devenir capable de l'élever par la suite, ce qui pose un problème éthique.

Il conviendrait donc, dans la mise en oeuvre de la LPJ, de faire davantage participer la communauté et de privilégier les solutions locales au travers, par exemple, d'une médiation pour remobiliser les familles élargies. Il reste cependant difficile de développer des partenariats avec la DPJ afin d'intégrer cette dimension au sein de la protection de l'enfance. Quant au signalement des enfants dès l'accouchement, il constitue déjà un bris de confiance pour le parent, raison pour laquelle la fondation lui préfère l'opération « bébés kangourous » consistant à solidifier les liens d'attachement entre les bébés et leurs parents.

Une décision de placement dans les cas de négligence résultant par ailleurs d'une appréciation très subjective 126 ( * ) , il serait souhaitable qu'elle ne soit pas le fait d'un seul intervenant de la DPJ mais qu'y soit également associée la communauté d'appartenance de la famille 127 ( * ) . Il n'a en outre jamais été fait la preuve que l'Etat soit un meilleur parent que le parent moyen et de nombreux enfants qui sortent, à leur majorité, des centres jeunesse ne sont pas autonomes.

Les juges eux-mêmes déplorent d'avoir à prononcer une décision de placement sur la base d'une seule opinion, parfois empreinte de jugements de valeur, alors que les centres de pédiatrie sociale pourraient être le lieu d'une information partagée et offrent l'expertise de terrain qui fait trop souvent défaut.

En réponse à Muguette Dini , présidente, le docteur Julien a indiqué qu'en dehors d'une subvention publique de 700 000 $, le financement de la fondation fait quasi exclusivement appel aux dons du public et des entreprises, par le biais de fondations privées encouragées par des avantages fiscaux ou via l'abondement des dons de leurs salariés.

Serge Charbonneau, directeur du Regroupement des organismes
de justice alternative du Québec (Rojaq)
(10 septembre 2010)

Apparus au Québec en 1979 à titre expérimental, les organismes de justice alternative (OJA) sont le fruit d'une critique des pratiques pénales antérieures, trop centrées sur une approche strictement répressive ; ils s'inscrivent dans un courant de non-judiciarisation et de décriminalisation des actes commis par les jeunes délinquants dont le Gouvernement fédéral s'est inspiré lors de l'élaboration, en 1982, de la loi sur les jeunes contrevenants : un ensemble de mesures non judiciaires, faisant appel à la médiation, est désormais prévu pour répondre à ces situations.

Après avoir connu un développement rapide dans le milieu des années 1980 - 700 adolescents confiés en 1985, 9 000 en 1987 -, l'activité des OJA est stable depuis 2002 - 12 000 jeunes suivis cette année-là - du fait de la baisse de la population adolescente.

Créé en 1989, le Regroupement des organismes de justice alternative du Québec (Rojaq) assure la représentation des trente-sept OJA et joue auprès d'eux un rôle de conseil, d'offreur de services et de diffuseur des bonnes pratiques.

Mettant en oeuvre les concepts de médiation pénale et de justice réparatrice, les OJA substituent à la formule classique : « répondre au mal par le mal » une logique plus vertueuse : « répondre au mal par le fait de faire le bien ». Précédée d'une longue préparation, la médiation vise à confronter physiquement le jeune contrevenant et sa victime afin d'obtenir l'adhésion et la prise de conscience du premier, tout en organisant une première forme de réparation au bénéfice du second.

Lorsqu'un adolescent commet une infraction, son dossier est adressé au procureur de la Couronne qui peut soit l'orienter vers la DPJ, soit, pour les infractions plus lourdes et à sa discrétion, choisir de judiciariser la suite de la procédure ou de l'envoyer vers les centres jeunesse : ceux-ci contactent alors l'adolescent et procèdent à son évaluation afin de déterminer si la non-judiciarisation du dossier est bien adaptée 128 ( * ) . L'adolescent peut se voir appliquer une série de sanctions extrajudiciaires mises en oeuvre par les OJA, le recours à la médiation n'intervenant qu'avec l'accord de la victime.

En réponse à Muguette Dini , présidente, qui lui demandait si le recours à la justice alternative a permis une régression de la récidive, Serge Charbonneau, directeur, a indiqué que si les études sur le sujet sont peu nombreuses, il apparaît que les adolescents ayant participé à une médiation récidivent moins que les autres et que le taux de récidive diminue de 9 % à 29 % en fonction des mesures non judiciaires décidées. Les programmes de médiation s'adressent du reste autant à des primo-délinquants qu'à des récidivistes et c'est le médiateur qui s'assure de la bonne réalisation de la réparation. Enfin, 13 % des adolescents suivis sont des filles.

A Christiane Demontès qui souhaitait savoir comment les premiers OJA ont été créés, Serge Charbonneau, directeur, a précisé que c'est l'école de criminologie de Montréal qui a été à l'origine du mouvement.

Enfin, le Rojaq réfléchit actuellement à la possibilité de délivrer lui-même des formations en médiation, la demande de professionnalisation et de standardisation du métier étant forte.

Sylvie Godin, vice-présidente, responsable du mandat jeunesse,
et Claire Bernard, conseillère juridique de la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)
(13 septembre 2010)

La commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) a pour rôle d'assurer la protection de l'intérêt de l'enfant et le respect de ses droits.

Ceux-ci se déclinent, au niveau provincial, à travers la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, les codes civil et de procédure civile du Québec ainsi que les lois sur la protection de la jeunesse, les services de santé et les services sociaux, les services éducatifs à l'enfance, l'instruction publique, les normes du travail et, enfin, les aspects civils de l'enlèvement international et interprovincial d'enfants.

Quant aux droits posés par la législation fédérale, ceux-ci figurent au sein de la Charte canadienne des droits et libertés, du code criminel et des lois sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA), la prestation universelle pour la garde d'enfants, le divorce, les Indiens et l'immigration et la protection des réfugiés.

Depuis 1995 et la fusion des deux commissions dédiées préexistantes, la CDPDJ remplit une double mission : elle veille d'abord au respect de la Charte des droits et libertés de la personne qui énumère une série de droits et libertés fondamentaux - dont le droit de l'enfant à la protection 129 ( * ) -, un droit à l'égalité et à la non-discrimination, ainsi que des droits politiques, judiciaires et économiques et sociaux 130 ( * ) .

Elle veille ensuite à la protection de l'intérêt de l'enfant et au respect des droits spécifiques qui lui sont reconnus par la LPJ et par la LSJPA : l'enfant étant reconnu comme un sujet de droit, il dispose du droit d'être informé, d'être entendu, de participer à la décision et d'être représenté par un avocat.

Dotée d'un statut indépendant, la commission est composée de treize membres - trois à temps plein, dix à temps partiel, dont un président et deux vice-présidents, l'un d'entre eux étant responsable du mandat jeunesse - nommés, sur proposition du Premier ministre, par un vote à la majorité des deux tiers par l'Assemblée nationale du Québec, pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Elle emploie 164 employés et dispose de dix bureaux en régions.

Outre un rôle d'information et d'éducation aux droits de l'enfant, de coopération avec les organisations et de consultations publiques, la commission délivre auprès des employeurs et des organismes publics un service-conseil en matière d'« accommodement raisonnable » 131 ( * ) . Elle traite des plaintes individuelles, organise des règlements à l'amiable, procède à des enquêtes de sa propre initiative, émet des recommandations, peut saisir le tribunal et assure, le cas échéant, la représentation judiciaire des plaignants.

Ainsi, sur les 2 774 appels reçus lors de l'exercice 2009-2010 en matière de droits de l'enfant, la plupart sont traités par la médiation ; lorsque la plainte est recevable (129 dossiers entre le 1 er avril 2009 et le 31 mars 2010) et que la commission conclut, à l'issue de son enquête, à la lésion effective des droits, elle émet des recommandations au ministre concerné ou à l'établissement visé, sans toutefois disposer d'un pouvoir de mise en demeure. Pour trois des cas traités actuellement, le tribunal a été saisi, la commission étant alors partie civile d'office.

La commission ne dispose cependant pas d'une compétence générale dans le champ des droits de l'enfant puisque son pouvoir d'enquête se limite aux seuls droits reconnus par la LPJ - et seulement lorsque le tribunal n'a pas déjà été saisi - et par la LSJPA, ainsi qu'aux cas de discrimination et d'exploitation d'un enfant handicapé.

Enfin, la commission procède à l'analyse systématique de la législation au regard des droits qu'elle défend, produit des études et recherches et un rapport sur la mise en application de la LPJ et contribue aux rapports soumis aux organes internationaux de surveillance des droits.

Il reste que l'indépendance budgétaire de la commission n'est pas assurée puisque son budget, fixé à 10 millions de dollars, relève de l'enveloppe du ministère de la justice, au contraire de celui du Défenseur du citoyen qui relève directement de l'Assemblée nationale. En outre, le paysage institutionnel de la défense des droits reste confus, ce qui peut conduire à ce que des situations d'enfants en danger soient mal signalées. A rebours de la fusion opérée en 1995 entre la commission des droits de la personne et celle des droits de la jeunesse, qui ne respectait pas l'individualité de chacun des mandats, une piste de réforme consisterait à recréer une entité « défense des droits de la jeunesse » au sein de la commission.

Yolande James, ministre de la famille et des aînés,
et Jacques Robert, sous-ministre adjoint
à la Direction générale des services de garde éducatifs à l'enfance
(13 septembre 2010)

Devant la faiblesse du taux de natalité de la province, le Québec a développé, en l'espace de dix ans et dans un contexte de diversification des formes familiales et d'insertion croissante des femmes dans le monde du travail, un « panier de services » destiné à soutenir les familles :

- un service de garde à contribution réduite (7 $ par jour), pour un total de 220 000 places subventionnées d'ici à quelques mois, ainsi qu'un crédit d'impôt pour les services de garde ;

- un congé parental extrêmement généreux, destiné à permettre aux mères, comme aux pères, de concilier travail et vie familiale ;

- enfin, un soutien aux enfants, modulé en fonction du revenu familial.

Après avoir rappelé le manque de places de crèches en France, Muguette Dini , présidente, a considéré que si la détection des enfants en danger est relativement satisfaisante dans notre pays, tel n'est sans doute pas le cas de la prise en charge de ces enfants, le plus souvent ballotés d'une famille d'accueil à l'autre ; par ailleurs, la loi française pose que le milieu familial reste le meilleur cadre de vie pour ces enfants, alors que cela n'est pas toujours vrai.

A cet égard, Yolande James, ministre, a rappelé qu'à l'occasion de la révision de la loi sur la protection de la jeunesse (LPJ) s'est tenu le même débat au Québec : s'il est évidemment souhaitable d'accompagner les familles et de privilégier le maintien des enfants auprès de leurs parents, il convient, lorsque cette la situation n'est manifestement plus tenable, de se concentrer sur le « projet de vie » de l'enfant.

S'agissant du manque de places, le Québec est, en quelque sorte, victime du succès de sa politique familiale 132 ( * ) , le mini baby-boom auquel elle a conduit créant une pression croissante sur les réseaux de garde. Dans le cadre des places à 7 $, la collectivité prend à sa charge la totalité du coût restant, ce qu'il faut considérer comme un investissement sur l'avenir. Il reste que depuis 1997, le réseau de services de garde à contribution réduite et de garderies s'est considérablement développé, avec pour objectif d'atteindre les 235 000 places d'ici à la fin du mandat.

Le prochain défi consistera à inciter les entreprises à favoriser davantage la conciliation entre travail et vie de famille, le retour sur investissement en termes de productivité et de bien-être des salariés n'étant plus à démontrer.

Puis Jacques Robert, sous-ministre adjoint, a ajouté que le crédit d'impôt varie en fonction des revenus dans la limite d'un plafond. Il y actuellement 12 526 places non subventionnées, ce qui reste encore marginal malgré un doublement en l'espace de cinq ans. Le crédit d'impôt intéresse non seulement les entreprises mais aussi les associations, qui peuvent le préférer à l'attente d'une subvention.

En réponse à Muguette Dini, présidente, qui souhaitait savoir comment les entreprises privées à but lucratif peuvent faire des bénéfices dans le cadre des places à 7 $ pour lesquelles l'Etat leur verse un complément, Jacques Robert, sous-ministre adjoint, a précisé que les frais de gestion des centres de la petite enfance (CPE) sont généralement plus élevés qu'en garderie, en raison notamment de la nécessité de disposer d'un conseil d'administration et de la présence d'un personnel plus important.

Certaines associations cherchent aujourd'hui à optimiser le modèle de gestion des CPE, par exemple en augmentant le nombre d'installations gérées par un même centre afin de mutualiser les personnels de direction, incités en cela par le fait que la subvention versée aux CPE fait l'objet d'une indexation annuelle qui évolue moins vite que la hausse des coûts. Il reste que, sous l'effet notamment de la loi sur l'égalité salariale, les salaires ont beaucoup augmenté au cours des dernières années dans les services de garde, par ailleurs fortement syndiqués, et qui bénéficient en outre d'autres avantages non monétaires - six semaines de congés payés contre deux en moyenne pour l'ensemble de la province.

L'objectif poursuivi reste de réduire progressivement l'écart entre les coûts des CPE et ceux des garderies.

Présentation du développement des places à contribution réduite en services de garde (par Jacques Robert)

Avec le soutien aux enfants et l'assurance parentale, les services de garde à contribution réduite constituent l'un des trois principaux investissements gouvernementaux en faveur des familles. Ce programme vise tout à la fois à faciliter la conciliation des responsabilités professionnelles et familiales et l'accès des parents au marché du travail, à améliorer l'égalité des chances pour les enfants ainsi qu'à réduire le recours au travail dissimulé.

Le réseau se décline en trois types de prestataires de services : les centres de la petite enfance (CPE), les garderies et les responsables d'un service de garde (RSG) en milieu familial.

On compte 981 CPE - répartis en 1 376 installations, pour un total de 80 168 places. Ce sont organismes à but non lucratif, gérés par un conseil d'administration composé aux deux tiers de parents usagers du service, qui offrent en moyenne une soixantaine de places - et accueillent au plus quatre-vingts enfants par installation - dont nécessairement des places à 7 $.

Les garderies subventionnées, au nombre de 626 pour 39 265 places - s'en distinguent en ce qu'il s'agit d'entreprises principalement à but lucratif et que les parents y sont seulement associés par le biais d'un comité consultatif réuni au moins quatre fois par an.

Le ministère s'assure que les titulaires de permis de garde, subventionnés ou non, respectent l'ensemble des prescriptions applicables en matière de sécurité, d'aménagement, de programmes éducatifs et de qualification des personnels, réceptionne et traite les plaintes éventuelles, apporte son soutien aux structures et administre les subventions versées.

Quant aux quinze mille responsables en milieu familial - pour 91 607 places -, ils peuvent accueillir à domicile jusqu'à six enfants - et neuf lorsqu'ils sont assistés - sous la supervision des 165 bureaux coordonnateurs mis en place en 2006 133 ( * ) , chargés de les reconnaître - et, le cas échéant, de les suspendre ou de les révoquer -, de répartir les places à contribution réduite, d'administrer les subventions, de vérifier le respect des normes, de traiter les plaintes et d'apporter un soutien pédagogique. S'il s'agit du mode de garde qui a le plus progressé depuis 1997, c'est d'abord parce qu'il a permis de répondre au manque de places en installation et non parce que les parents préfèrent y recourir.

Au 30 juin 2010, 211 040 places à contribution réduite étaient ainsi disponibles, l'objectif étant d'atteindre les 220 000 places d'ici avril 2011, et 12 000 places non subventionnées.


* 76 Il s'agit des lois sur les services de santé et les services sociaux (LSSSS) - qui en définit l'organisation générale - sur la protection de la jeunesse (LPJ) - loi spécifique, administrée uniquement par les CJ - et sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) - loi fédérale mais administrée dans chaque province.

* 77 Missions résumées dans la formule : « Permettre aux jeunes en difficulté ainsi qu'à leur famille de se reprendre en main afin de retrouver un mieux-être sur le plan personnel, familial ou social ».

* 78 Travailleurs sociaux professionnels, psychologues, psycho-éducateurs, éducateurs spécialisés, criminologues, infirmiers.

* 79 3 000 enfants ont fait l'objet d'une mesure de placement en centre de réadaptation et en ressource intermédiaire, 600 ont été placés en foyer de groupe et 7 000 en ressource de type familial (famille d'accueil), 2 000 enfants ont été confiés à un tiers significatif et 150 autres placés dans d'autres types de ressources.

* 80 Dont 75 % portées à l'attention du tribunal de la jeunesse et 25 % ayant l'objet de mesures consensuelles.

* 81 Cadre de référence projet de vie, politique et guide sur les outils cliniques, politiques sur la continuité des services, l'amélioration continue de la qualité des services, politique et guide d'intervention sur les fugues et non-retours de sortie, guide de pratique pour l'intervention dans le cadre de l'application de la LSJPA, guide sur le retrait et le placement, protocole d'intervention auprès des jeunes suicidaires, histoire socio-familiale, intervention concernant le bien-être des enfants (ICBE), système de soutien à la pratique (SSP), cadre de référence sur le plan d'intervention et plan de services individualisés (PIPSI).

* 82 L'enfant étant défini comme une personne âgée de moins de dix-huit ans (art. 1 c).

* 83 Depuis 2006, une entente sur des mesures volontaires est possible même après l'intervention du juge.

* 84 Qui peut aussi avoir lieu à la demande des parents.

* 85 Auparavant, la loi ne visait que le principe de la diligence de l'intervention.

* 86 Notamment lorsque l'intérêt de l'enfant l'exige ou si des services n'ont pas été rendus aux parents (art. 91.1).

* 87 La première fois à l'issue d'un délai de trois ans, puis tous les cinq ans ; le premier rapport a été déposé le 20 octobre 2010.

* 88 Entre autres, renforcement de l'obligation des établissements et des organismes de donner des services aux enfants dont la situation est prise en charge par le DPJ (art. 55 et 92), élargissement de l'obligation du DPJ d'informer et de diriger l'enfant et ses parents vers d'autres ressources du milieu, avec leur consentement, lorsqu'ils ont besoin d'aide et que le DPJ n'intervient pas ou n'intervient plus (art. 45.1, 50, 57.2, et 70.2).

* 89 Sous réserve que le renseignement soit en lien avec le motif de compromission et qu'il puisse, le cas échéant, permettre au DPJ de retenir le signalement ou de décider si la sécurité ou le développement de l'enfant est compromis.

* 90 Possibilité pour le tribunal de tenir une conférence préparatoire (art. 76.2), possibilité de tenir une seule enquête commune lorsque plusieurs enfants issus d'un même parent sont concernés (art. 73.1), plus grande souplesse des règles pour permettre le témoignage d'un enfant et pour corroborer la déclaration d'un enfant inapte à témoigner (art. 85.1 et 85.2), possibilité de recourir à tout moyen technologique disponible pour entendre et juger certaines demandes (art. 74.0.1), clarification des règles concernant la reconnaissance d'autres personnes que l'enfant et les parents comme « parties » ou « personnes intéressées » (art. 81).

* 91 Par exemple, obligation pour l'enfant de fréquenter un milieu de garde ou de participer à un programme visant l'apprentissage et l'autonomie, détermination d'une période de retour progressif de l'enfant dans son milieu familial ou social (art. 91).

* 92 Etant précisé qu'un policier doit toujours être de garde pour recueillir ce type de faits et qu'une telle situation doit être attribuée sous un délai de vingt-quatre heures à un intervenant jeunesse.

* 93 De 442 euros à 1 575 euros par an pour un enfant selon les revenus.

* 94 Y compris le ou les enfants du responsable âgé(s) de moins de neuf ans.

* 95 Pour un couple avec deux enfants et un revenu familial égal au revenu médian en 2008 (11,4 % en Ontario, 11,5 % en Colombie britannique).

* 96 Dépenses publiques pour les familles en pourcentage du Pib (2005, OCDE) : France 3,8 ; Royaume-Uni 3,6 ; Danemark et Suède 3,2, Allemagne 3,0, Etats-Unis 1,3 et Canada 1,1, la moyenne des pays de l'OCDE s'établissant à 2,3.

* 97 Cinq ans pour le président du conseil.

* 98 Dix-huit mois si l'enfant est âgé de deux à cinq ans et vingt-quatre mois s'il est âgé de six ans et plus.

* 99 L'article 38 énumère l'ensemble des situations où la sécurité et le développement de l'enfant sont compromis : abandon, négligence, mauvais traitements psychologiques, abus sexuels ou physiques ou lorsque l'enfant présente des troubles du comportement sérieux.

* 100 Qui peut être prolongée pour cinq jours ouvrables lorsque le tribunal, à qui le DPJ doit s'adresser, constate la nécessité de maintenir la mesure de protection.

* 101 Citant en cela une épidémie de méningite, en 1992, à la suite de laquelle cent onze requêtes ont dû être formulées devant le tribunal pour autoriser la vaccination d'autant d'enfants placés dont on ne parvenait pas à joindre les parents.

* 102 Soulignant en cela le fait que les parents sont accompagnés tout au long du processus.

* 103 Proposables pour tout premier délit.

* 104 Dont le droit à l'accompagnement est reconnu à l'article 8 de la LPJ.

* 105 Le Conseil général de l'Essonne a cependant conclu un accord avec le barreau du département afin que chaque enfant, victime ou auteur, puisse bénéficier de l'assistance d'un avocat.

* 106 Etant entendu que la procédure d'adoption n'est jamais engagée lorsqu'il y a risque d'échec, afin d'éviter l'impact négatif considérable que cette situation provoquerait pour l'enfant comme pour la famille d'accueil.

* 107 Avec un effectif maximal de quatre-vingts enfants par installation.

* 108 Assorti, le cas échéant, d'un montant additionnel pour les familles monoparentales ou en cas de présence d'un enfant handicapé.

* 109 Ou sur le revenu annuel pour les travailleurs autonomes.

* 110 Avec une tolérance de 10 % supplémentaire pour permettre une plus grande amplitude horaire d'ouverture.

* 111 Parents et enfants mineurs en protection de la jeunesse, victimes et contrevenants âgés de douze à dix-huit ans en matière de justice pénale pour les adolescents et, s'agissant des dossiers d'adoption, parents et enfants mineurs voire, dans certains cas, majeurs.

* 112 A l'initiative du DPJ pour une durée maximale de quarante-huit heures, seul le tribunal pouvant autoriser le retrait au-delà de ce délai.

* 113 Ces procédures de conciliation à l'amiable aboutissent à la résolution du dossier dans la très grande majorité des cas puisque 88 % d'entre elles ne sont pas révisées judiciairement.

* 114 Selon le régime, de base ou particulier, choisi.

* 115 Dont les produits sont gérés par la Caisse de dépôt et placement du Québec.

* 116 L'autorisation du client est cependant requise, dès la déclaration de naissance auprès de l'état civil, pour permettre ces échanges d'informations.

* 117 89 % des clients ont choisi le versement de la prestation par ce biais, les 11 % restant préférant le paiement par chèque.

* 118 Accueil téléphonique ouvert soixante-quatorze heures par semaine.

* 119 Dont le mandat s'étend à la santé et aux services sociaux, dont les services à l'enfance.

* 120 Un logiciel d'intelligence artificielle a par ailleurs été développé afin de garantir l'application systématique de cette grille d'analyse par tout intervenant. Les services peuvent aussi accéder, depuis 2007, au registre provincial des signalements.

* 121 Auparavant, l'application de la LPJ dans ces cas ressortissait d'une acception extensive du concept de négligence.

* 122 Qui renvoie au standard de la police, lequel les oriente alors vers un intervenant jeunesse.

* 123 Le niveau de signalements diffère selon les quartiers, en fonction de la culture de la communauté.

* 124 Un enfant pris en charge sur trois n'est pas prêt à être scolarisé à cinq ans en raison de carences ou de troubles du développement.

* 125 L'idéal étant qu'un enfant puisse se rendre à pied au centre.

* 126 Au contraire des situations d'abus physiques ou sexuels.

* 127 Le docteur Julien a pris pour exemple le cas de trois enfants enlevés à leur famille par la DPJ à raison de l'insalubrité du logement et dont le retour est intervenu à la suite du simple ménage du domicile, ce qui produit des traumatismes inutiles pour les enfants.

* 128 60 % environ des dossiers transmis sont retenus, 25 % sont renvoyés dans la voie pénale, les cas restants étant classés sans suite après une forme de rappel à la loi.

* 129 « Tout enfant a droit à la protection, à la sécurité et à l'attention que ses parents ou les personnes qui en tiennent lieu peuvent lui donner » (art. 39 de la charte), droit non opposable directement mais qui donne une assise quasi-constitutionnelle à la LPJ.

* 130 Adoptée en 1975, la charte reconnaît ainsi le droit à l'instruction publique gratuite, le droit des parents à assurer l'éducation morale et religieuse des enfants, le droit des minorités à la vie culturelle, etc.

* 131 Cette notion juridique, tirée de la jurisprudence canadienne, vise à assouplir l'application d'une norme en faveur d'une personne menacée de discrimination en raison de particularités individuelles protégées par la loi ; elle a fait l'objet de nombreuses controverses qui ont justifié la création, en 2007, de la Commission Bouchard-Taylor, destinée à examiner les questions liées aux accommodements raisonnables consentis sur des bases culturelles ou religieuses au Québec. Son rapport a été rendu public le 22 mai 2008.

* 132 « La Presse », journal québécois, a ainsi pu titrer : « Le Québec, le paradis des familles ».

* 133 Qui sont, dans leur très grande majorité, des CPE par ailleurs.

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