3. L'adoption du « partenariat pour la modernisation »
La principale nouveauté des relations entre l'Union européenne et la Russie tient à l'adoption du « Partenariat pour la modernisation » , lors du Sommet Union européenne-Russie de Rostov-sur-le-Don, les 31 mai et 1 er juin 2010.
Il ne s'agit pas d'un instrument juridique contraignant mais d'une déclaration politique visant à renforcer la coopération dans plusieurs domaines.
L'objectif de ce partenariat est de servir de « cadre souple pour promouvoir les réformes, stimuler la croissance et améliorer la compétitivité » .
Cette initiative fait écho au discours réformateur du Président russe Dimitri Medvedev sur la nécessaire « modernisation » de la Russie.
Il s'articule autour de cinq domaines prioritaires : navigation satellitaire, efficacité énergétique et économie verte, normes et règlements, coopération judiciaire et lutte contre la corruption et dialogue accru avec la société civile.
Déclaration commune sur le partenariat pour la modernisation Sommet UE-Russie de Rostov-sur-le-Don Les 31 mai - 1er juin 2010 * Réunies à Rostov-sur-le-Don pour leur 25ème sommet, les 31 mai et 1er juin 2010, l'Union européenne et la Russie ont lancé un partenariat pour la modernisation, qui devrait profiter aux citoyens des deux parties. Dans un monde où les peuples et les économies sont de plus en plus étroitement liés et interdépendants, il est d'autant plus important et nécessaire de moderniser nos économies et nos sociétés. L'Union européenne et la Russie, qui sont des partenaires stratégiques de longue date dans un monde multipolaire en évolution, ont la volonté de travailler ensemble pour relever les défis communs d'une manière équilibrée et pragmatique, dans le respect de la démocratie et de l'État de droit, tant au niveau national qu'international. Le nouvel accord entre l'Union européenne et la Russie, qui est en cours de négociation, servira également de base pour atteindre ces objectifs. Dans ce contexte, le partenariat pour la modernisation offrira un cadre souple pour promouvoir les réformes, stimuler la croissance et améliorer la compétitivité, et se fondera sur les résultats déjà engrangés dans le cadre des espaces communs entre l'Union européenne et la Russie, en complément des partenariats développés entre les États membres de l'Union européenne et la Fédération de Russie. Les dialogues sectoriels constitueront un outil essentiel pour la mise en oeuvre du partenariat pour la modernisation. L'Union européenne et la Russie ont toutes deux intérêt à développer le commerce bilatéral et les possibilités d'investissement et à faciliter et à libéraliser les échanges dans une économie mondialisée, ainsi qu'à renforcer et à étendre la concurrence, y compris par une accession rapide de la Russie à l'OMC. Figureront au nombre des actions prioritaires du partenariat pour la modernisation: multiplier les possibilités d'investissement dans des secteurs clés porteurs de croissance et d'innovation, renforcer et approfondir le commerce bilatéral et les relations économiques et promouvoir les petites et moyennes entreprises; promouvoir l'alignement des réglementations et normes techniques, ainsi qu'un respect rigoureux des droits de propriété intellectuelle; améliorer les transports; promouvoir une économie durable sobre en carbone et l'efficacité énergétique, ainsi que les négociations internationales sur la lutte contre le changement climatique; améliorer la coopération en matière d'innovation, de recherche et développement, ainsi que dans l'aéronautique; assurer un développement équilibré en s'intéressant aux conséquences régionales et sociales des restructurations économiques ; assurer le fonctionnement efficace de l'appareil judiciaire et renforcer la lutte contre la corruption; encourager les liens entre les citoyens; et améliorer le dialogue avec la société civile pour favoriser la participation des personnes et des entreprises. Cette liste de domaines de coopération n'est pas exhaustive, et d'autres pourront s'y ajouter s'il y a lieu. L'Union européenne et la Russie encourageront la mise en oeuvre de projets spécifiques dans le cadre du partenariat pour la modernisation. Le partenariat pour la modernisation fera l'objet d'un suivi et d'échanges permanents à tous les niveaux du dialogue entre l'Union européenne et la Russie. Les coordinateurs du partenariat et les coprésidents des dialogues sectoriels entre les deux parties seront étroitement associés à la mise en oeuvre du partenariat. L'Union européenne et la Russie ont confronté leurs manières d'envisager les principaux domaines de coopération dans le cadre du partenariat pour la modernisation. Les dirigeants ont chargé les coordinateurs des deux parties d'élaborer un plan de travail. |
Que faut-il penser de cette initiative ?
Le « partenariat pour la modernisation » a permis de donner une image plus positive des relations entre l'Union européenne et la Russie.
Il offre également un cadre utile pour développer la coopération dans une série de domaines, tels que l'efficacité énergétique, le développement des énergies renouvelables, l'agriculture, la santé, l'innovation, la promotion des petites et moyennes entreprises, etc.
L'adoption d'un programme de travail lors du Sommet Union européenne-Russie du 7 décembre 2010 devrait permettre de faire gagner en substance ce partenariat.
Des interrogations demeurent toutefois au sujet de son financement. En effet, l'innovation est un domaine qui relève pour l'essentiel des entreprises privées pour l'Union européenne, alors que la Russie n'a pas la même conception, comme l'illustre le « projet de Skolkovo », destiné à devenir un pôle d'innovation technologique sur le modèle de la « Silicon Valley » , situé en périphérie de Moscou, et piloté directement par le gouvernement russe.
Lors du Sommet Union européenne-Russie des 9 et 10 juin 2011, la Banque européenne d'investissement (BEI) et la Banque de développement de la Russie (VEB) ont conclu un memorandum d'entente portant sur un montant de près de 2 milliards d'euros afin de soutenir les projets de modernisation.
Plus généralement, l'insistance de l'Union européenne à inclure dans ce partenariat un important volet sur l'Etat de droit, les échanges entre la société civile et la lutte contre la corruption, est symptomatique des différences d'approche entre l'Union européenne et la Russie.
Lorsque la Russie souhaite parler avec l'Union européenne de sujets comme le commerce, l'innovation ou le développement des investissements, l'Union européenne semble lui répondre : « démocratie, droits de l'homme, Etat de droit et lutte contre la corruption ».
Certes, la question de la démocratie et de l'Etat de droit présente une certaine importance en matière économique, par exemple pour la sécurité des investissements étrangers. Mais n'est-il pas paradoxal de vouloir faire du « Partenariat pour la modernisation », qui se voulait avant tout une initiative à caractère économique, un instrument principalement destiné à faire progresser l'Etat de droit en Russie ?