IV. DES MODALITÉS DIFFÉRENTES D'INSERTION DES FIRMES DANS LA MONDIALISATION ?
L'importance des actifs à l'étranger constitués par les entreprises françaises conduit à s'interroger sur les effets de ce mode d'adaptation à la mondialisation sur les performances du commerce extérieur d'autant que les firmes allemandes qui apparaissent relativement moins déployées à l'extérieur exportent davantage.
A. POSITION DU PROBLÈME
Il existe a priori deux façons de vendre une production à l'étranger : l'exportation ou la vente des productions réalisées sur place.
Cette dernière suppose qu'une entreprise établisse un site de production à l'extérieur ce qui passe généralement par la réalisation d'un investissement à l'étranger.
Le choix par les entreprises de leurs modalités d'intégration au marché international peut avoir des répercussions sur les flux d'exportation de leurs pays d'origine dont le sens est controversé ainsi qu'on l'indiquera.
Mais, quoi qu'il en soit, le suivi des investissements directs étrangers s'impose pour être en mesure d'apprécier le degré d'adaptation des entreprises d'un pays à la demande étrangère.
Ce suivi est compliqué par des problèmes statistiques de détermination du champ des investissements à l'étranger ainsi que par les difficultés de mesure, et parfois, de qualification de la nature de l'activité réelle des filiales à l'étranger.
Par ailleurs, l'analyse économique des investissements directs à l'étranger est elle-même complexe.
Il est par conséquent en partie conjonctural d'indiquer que la prise en compte des investissements à l'étranger de l'Allemagne et de la France modifie substantiellement le point de vue sur l'intégration des deux pays dans l'économie mondiale.
Cependant, la confrontation de l'évolution des stocks d'investissements directs étrangers (entrants et sortants) avec les résultats du commerce extérieur français conduit à s'interroger sur un éventuel lien de causalité existant entre les deux phénomènes.
On observe que l'augmentation de l'écart entre les investissements directs étrangers sortants et entrants (de 70 à 200 milliards d'euros environ entre 2002 et 2008) correspond un creusement du déficit commercial.
Par ailleurs, l'augmentation du chiffre d'affaires réalisé à partir des implantations des firmes françaises à l'étranger est apparemment importante.
Selon des données globales, ce chiffre d'affaires représentait 380 milliards d'euros en 2001 (soit un montant proche des exportations françaises de biens et services à cette date) et a augmenté pour s'élever à 850 milliards d'euros en 2006 soit le double des exportations de l'année.
Il est évidemment impossible d'en déduire immédiatement un lien de causalité mais il est justifié de l'explorer.
A priori , les investissements directs à l'étranger sortants peuvent ou se substituer à des exportations - la production réalisée à partir de ces importations étant vendue à l'étranger en lieu et place de productions réalisées sur le territoire d'origine puis exportées - ou être complémentaires aux exportations de la firme d'origine. Cette complémentarité suppose que les ventes réalisées par la filiale à l'étranger n'auraient pas pu être effectuées par l'entreprise nationale de rattachement ou que la filiale à l'étranger nourrit un volume d'exportations qui n'aurait pas eu lieu sans elle 45 ( * ) .
Les investissements directs à l'étranger sortants peuvent également exercer des effets sur le courant d'importations du pays d'origine si les filiales étrangères accroissent les importations par leur seule existence.
Mais l'éventualité d'un impact des investissements directs sur les flux d'échanges internationaux n'est pas réservée aux investissements sortants.
Les investissements directs étrangers entrants peuvent aussi exercer un effet sur ces échanges soit que les entreprises en résultant exportent moins, soit qu'elles importent plus que leurs homologues nationales.
Ces mécanismes de substitution ou de complémentarité, sont en partie corrélés avec la nature de l'investissement réalisé à l'étranger :
- horizontal , il consiste à produire à l'extérieur les mêmes biens que ceux produits sur le territoire d'origine et il est supposé s'accompagner d'une substitution à des exportations ;
- vertical , il s'agit de tirer profit des avantages comparatifs des territoires étrangers pour améliorer la productivité de l'entreprise d'origine, ce qui suppose un supplément d'importations mais ouvre l'espérance à davantage d'exportations.
* 45 On note parfois en ce sens l'exemple de la coexistence d'implantations des constructeurs automobiles français en Espagne avec un fort courant des exportations d'automobiles vers ce pays.