DEUXIÈME PARTIE : LA GESTION DES CRISES REPOSE D'ABORD SUR LES FORCES D'ACTIVE DES ARMÉES, DES SERVICES DE SÉCURITÉ ET DE SECOURS

Si les réserves peuvent donc contribuer à la volonté et à la capacité d'un pays, de la société et des pouvoirs publics à résister aux conséquences d'une agression ou d'une catastrophe majeure, puis à rétablir rapidement leur capacité de fonctionner normalement, la mission n'a pas perdu de vue que la gestion de crise relève en premier lieu des forces d'active.

Autrement dit, si par son ampleur ou par sa durée, une crise peut rendre indispensable le recours aux réservistes, la mission constate un certain consensus autour de l'idée que la France dispose aujourd'hui des moyens humains nécessaires pour faire face aux risques les plus plausibles.

Certes, comme le souligne le Livre blanc: « la professionnalisation et les réductions de format des armées rendent plus que jamais nécessaire le franchissement d'un seuil dans la constitution d'une réserve », mais même lorsque les pouvoirs publics ont recours aux réservistes, ce recours se situe dans le cadre et en complément des actions menées par les forces d'active.

Certes, une différence de nature demeure entre les atteintes à la sécurité résultant d'initiatives hostiles, et celles que ne sous-tend aucune intention malveillante, comme les catastrophes naturelles. Mais l'exigence d'anticipation, de préparation et de rapidité dans la réaction est la même.

Aussi pour bien comprendre le rôle que pourraient jouer les réserves dans la gestion de crise, il faut d'abord s'interroger sur la capacité des pouvoirs publics à faire face à des crises majeures avec les seules forces d'active. Il faut ensuite comprendre comment les réserves sont susceptibles d'être mobilisées dans le cadre des procédures de gestion de crise récemment rénovées.

Le cadre institutionnel et stratégique de gestion de crise a fait l'objet de nombreuses réflexions et de réformes récentes. Ces dernières s'inspirent notamment des travaux du Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale qui a dressé un constat sévère, la nécessité d'améliorer le dispositif français en la matière : « Des progrès importants ont été accomplis ces dernières années, avec notamment la refonte, à partir de 2001, de la planification « Vigipirate » contre le terrorisme. Mais les capacités de planification stratégique gouvernementale demeurent à la fois limitées, incomplètes et dispersées. »

Depuis, la nouvelle stratégie de sécurité nationale mise en place et la réorganisation des pouvoirs publics sur ce sujet ont pour objectifs d'harmoniser l'emploi des ressources de l'Etat et de favoriser le dialogue civilo-militaire et la cohérence de l'ensemble des intervenants.

C'est dans ce cadre rénové que les réserves pourraient avoir à prendre leur place.

Un rapide exposé de ce dispositif permet de mieux comprendre la répartition des rôles entre les différents ministères, en particulier, ceux de l'intérieur et de la défense et ainsi de mieux appréhender les enjeux du dialogue civilo-militaire qu'impose la gestion d'une catastrophe naturelle ou d'un attentat.

La mission a, en effet, constaté que c'est à travers le dialogue au sein des zones de défense et de sécurité que la question du rôle des réserves se pose aujourd'hui. Lorsque le livre blanc émet l'hypothèse qu'une « gestion commune des réserves relevant de différents ministères sera mise en place, afin de répondre de façon coordonnée aux besoins liés à des crises aiguës sur le territoire national. », il préconise que cette gestion passe par « la concertation interministérielle et une coordination territoriale au niveau des préfets de zone de défense et de sécurité » 7 ( * ) .

C'est pourquoi il convient de comprendre comment s'articulent les différents dispositifs nationaux et zonaux de gestion de crise.

I. LE RECOURS AUX FORCES D'ACTIVE COMME AUX RÉSERVES S'INSCRIT DANS LES DISPOSITIFS DE GESTION DES CRISES

La réponse des pouvoirs publics à une crise passe aussi bien par le niveau central que déconcentré. En effet, l'ensemble des défis évoqués précédemment implique une coordination des acteurs civils et militaires dans le but de développer une capacité de réaction rapide .

A. L'ARCHITECTURE DE LA DIRECTION POLITIQUE ET STRATÉGIQUE DE CRISE A ÉTÉ RÉCEMMENT PRÉCISÉE

L'actuelle organisation des pouvoirs publics résulte de l'ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense. Cinquante ans après, cette architecture a été revue pour répondre aux priorités définies en matière de stratégie de sécurité nationale.

1. La direction politique et stratégique de crise

La direction politique et stratégique de la réponse aux crises majeures relève du Président de la République et du Premier ministre. Ils assurent l'impulsion et la prise de décision politique au cours de la crise. Ils s'appuient sur des moyens de commandement adaptés à des crises majeures, leur permettant d'être informés en temps réel du déroulement de la crise et de piloter la communication gouvernementale.

La direction politique et stratégique de la crise s'appuie sur une cellule de crise armée en cas de nécessité à l'hôtel de Matignon ou à l'Elysée. Cette cellule est présidée par un membre du cabinet du Premier ministre. C'est le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale qui en assure le secrétariat.

Cette cellule de crise du Premier ministre assure le pilotage stratégique des crises en liaison permanente avec le ministre chargé de la conduite opérationnelle de l'action gouvernementale qui varie selon la nature de la crise. Elle veille à la cohérence de l'action gouvernementale dans la gestion de la crise. Elle soumet les arbitrages au Premier ministre soit directement, soit en provoquant des réunions interministérielles à Matignon. Sa composition n'est pas figée mais adaptée à la nature particulière de chaque crise. Elle détermine notamment, en liaison avec le chef d'état-major des armées et le directeur du cabinet civil et militaire du ministère de la défense, le cadre politique d'engagement des armées.


* 7 Extrait du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (p. 122)

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