II. AGIR SANS ATTENDRE POUR RESTAURER LA SOUTENABILITÉ DU SYSTÈME

Au cours de son audition par la mission, Dominique Libault, directeur de la sécurité sociale, a rappelé que « la situation financière des régimes de retraite est particulièrement difficile et que, s'il n'existe pas de consensus sur la réforme à conduire, chacun peut s'accorder au moins sur le constat selon lequel un régime de retraite par répartition ne peut pas durablement être en déséquilibre, dans la mesure où cela revient à répartir de l'argent qu'on n'a pas . La sauvegarde du système de répartition implique de trouver les moyens d'équilibrer les comptes à moyen terme » .

Cette réflexion de bon sens résume le défi auquel sont confrontés aujourd'hui les pouvoirs publics. Proclamer son attachement au système de retraite par répartition serait vain si l'on ne se donne pas les moyens de parvenir à l'équilibrer. Il ne s'agit pas en effet de contenir les déficits dans une limite qui serait jugée acceptable, mais bien de retrouver un équilibre à terme qui est la condition de la pérennité du système.

Les nombreuses auditions auxquelles a procédé la mission l'ont convaincue de l'urgence de prendre, à l'occasion du rendez-vous 2010, des mesures destinées à restaurer la soutenabilité du système de retraite et de la nécessité d'activer l'ensemble des paramètres disponibles pour parvenir à ce résultat. Aucun levier d'action n'est à même, à lui seul, de conduire au rééquilibrage des comptes de l'assurance vieillesse . Par ailleurs, la Mecss estime essentiel de lier étroitement politique de l'emploi et évolution des régimes de retraite, unique moyen d'éviter que l'allongement de la durée d'activité ne conduise à fabriquer du chômage.

Alors que la réforme de 2003 se fixait 2020 pour horizon, ce rendez-vous 2010 pourrait utilement aboutir à des mesures allant jusqu'en 2030.

A. EXAMINER TOUS LES PARAMÈTRES

Dans ses projections financières actualisées à moyen et long terme, le Cor a, comme à l'accoutumée, chiffré les besoins de financement du système à différents horizons puis présenté les abaques associés à ces projections, afin d'illustrer la diversité des choix possibles pour assurer, à un horizon donné, l'équilibre financier du système de retraite.

Comme le répète inlassablement le Cor dans tous ses rapports, trois paramètres seulement peuvent être utilisés pour garantir le financement des retraites :

- le niveau relatif des pensions ;

- l'âge moyen de départ en retraite ;

- les recettes des régimes.

Les abaques permettent de mettre en relation ces trois leviers pour faire apparaître les différents « dosages » possibles dans leur utilisation. Ainsi, l'abaque suivant correspond au scénario A du Cor, le plus optimiste, reposant sur les hypothèses d'un taux de chômage à long terme de 4,5 % et d'une progression de la productivité de 1,8 % par an.

Abaque à l'horizon 2020 - Scénario A - Rendements Agirc-Arrco constants

Source : Cor

Un simple regard sur ce schéma permet de comprendre que le retour à l'équilibre ne peut être obtenu en agissant sur un seul paramètre du système. Dans l'hypothèse où il serait décidé de réaliser l'ajustement financier en intervenant sur un levier unique, il faudrait d'ici 2020 :

- soit relever l'âge effectif moyen de départ de près de cinq ans ;

- soit augmenter les cotisations de 5 points ;

- soit diminuer de plus de 20 % le niveau relatif des pensions.

A l'horizon 2050, et en utilisant les mêmes hypothèses économiques favorables, les chiffres obtenus sont plus impressionnants encore puisque l'équilibrage du système par la voie d'un seul paramètre impliquerait :

- soit de relever l'âge effectif moyen de départ de près de dix ans ;

- soit d'augmenter les cotisations d'environ 10 points ;

- soit de diminuer le niveau relatif des pensions de plus de 35 %.

Assurément, les résultats de l'abaque doivent être interprétés avec prudence, compte tenu des hypothèses et simplifications retenues pour sa réalisation, mais ils démontrent sans ambiguïté la nécessité d'activer l'ensemble des paramètres disponibles pour parvenir à équilibrer le système de retraite.

1. Le taux de remplacement et le niveau des pensions

La réussite essentielle du système de retraite français a résidé dans sa capacité à assurer progressivement une quasi-parité de niveau de vie entre actifs et retraités. Même si cette situation moyenne recouvre d'importantes différences, il reste que le niveau des pensions est aujourd'hui assez élevé dans notre pays.

Pour autant, il n'apparaît pas envisageable de restaurer l'équilibre du système de retraite par une diminution du montant des pensions versées, une telle évolution constituant une régression inacceptable. Cette solution est d'autant moins concevable que le niveau relatif des pensions dans le secteur privé diminue dès à présent , comme l'a relevé Danièle Karniewicz, présidente de la Cnav, lors de son audition par la mission : « Si les partenaires sociaux n'ont pas arrêté, à l'heure actuelle, d'éventuelles propositions communes dans le cadre du rendez-vous 2010, il se dégage néanmoins une vraie problématique autour du niveau de vie à la retraite et du taux de remplacement des pensions, qu'elles soient servies par le régime de base ou par les régimes complémentaires.

« Alors que la référence retenue par la Cnav se situe théoriquement, pour une carrière complète, à 50 % du plafond de la sécurité sociale, le taux de remplacement n'atteint d'ores et déjà que 43 % du dernier salaire, sous l'effet combiné de l'indexation des pensions sur les prix et de la prise en compte des vingt-cinq meilleures années d'activité pour le calcul du salaire de référence ».

Dans les régimes complémentaires, les gestionnaires ont fait face aux déséquilibres en ne revalorisant pas de la même manière valeur d'achat du point et valeur de service du point, ce qui conduit mécaniquement à diminuer le rendement du régime.

La diminution du taux de remplacement ou du niveau des pensions ne figure donc pas parmi les pistes envisageables à l'occasion du rendez-vous 2010, même si, en revanche, il est souhaitable d'examiner la pertinence des règles fiscales dérogatoires dont bénéficient les retraités, notamment en ce qui concerne la CSG applicable aux pensions.

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