3. Améliorer les modalités d'examen des demandes en commission des droits et de l'autonomie
a- Les commissions des droits et de l'autonomie : des commissions studieuses qui font une large place aux associations
? Parce qu'elles accordent une large place aux associations de personnes handicapées - leurs membres président souvent la commission -, les CDAPH ne font que très rarement l'objet de critiques quant à leur fonctionnement.
Les associations contribuent à apporter leur expertise et à diffuser une « culture décloisonnée » des types de handicap. En effet, vos rapporteurs ont ainsi observé une certaine mixité des associations au sein de la CDAPH, qui représentent à la fois les personnes handicapées physiques et celles atteintes de troubles mentaux ou psychiques.
? Dans certains départements, la commission est considérée comme un « organe central unique », qui, par souci d'équité et de cohérence des décisions prises, étudie en séance plénière tous les dossiers, y compris les demandes de cartes d'invalidité ou de stationnement.
D'autres départements, au contraire, ont mis en place des formations restreintes ou des commissions spécialisées 31 ( * ) pour statuer plus rapidement sur les cas les plus simples et laisser à la commission plénière le soin de trancher sur des demandes plus complexes (PCH par exemple), les grandes orientations et les cas litigieux relevant de sa seule appréciation.
En réalité, les demandes qui n'exigent pas une enquête approfondie ou qui ne présentent pas d'ambiguïté peuvent bien souvent être préparées sous forme de listes thématiques par les équipes pluridisciplinaire, la CDAPH n'ayant plus qu'à entériner la décision proposée par les instructeurs du dossier.
? Bien que la fréquence des réunions soit soutenue et que leur durée excède souvent trois ou quatre heures, voire dure toute la journée, les membres de la CDAPH sont relativement assidus. En effet, aucun problème de quorum n'a, à ce jour, été signalé qui aurait empêché la tenue d'une réunion. Les membres avec lesquels vos rapporteurs ont eu l'occasion de s'entretenir ont d'ailleurs signalé la forte disponibilité que cette tâche exige, certaines CDAPH se réunissant une à deux fois par semaine ou au minimum tous les quinze jours.
b- Vers l'élaboration d'une doctrine partagée
Le souci de l'équité des décisions est une préoccupation constante de vos rapporteurs, comme de l'ensemble des acteurs intervenant dans le champ du handicap. Or, il apparaît que des efforts substantiels doivent être réalisés dans ce domaine.
Vos rapporteurs ont en effet pu observer, que faute de formation commune aux procédures et à la connaissance des types de handicap, les membres des CDAPH, ainsi que ceux des équipes pluridisciplinaires, ne disposent pas encore véritablement d'une culture commune en la matière.
Afin de remédier à cette faiblesse, certaines MDPH ont mis en place un recueil des décisions les plus litigieuses ou relatives à certains cas spécifiques qui pourraient se répéter, afin d'élaborer une doctrine qui soit propre à la CDAPH.
Par ailleurs, la CNSA, au travers des chroniques mensuelles qu'elle envoie aux directeurs des MDPH, se fait l'écho de certaines jurisprudences ou décisions spécifiques et contribue ainsi à la construction d'une doctrine partagée entre toutes les MDPH . Mais vos rapporteurs ont constaté que ces informations n'ont pas été transmises aux membres des CDAPH.
Afin de parfaire l'édifice, il faudrait également que les magistrats et experts des tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI) soient associés à cette démarche. On y reviendra.
c- Quelques pistes pour améliorer le traitement des demandes
Plusieurs pistes ont été évoquées pour favoriser un traitement plus rapide des demandes et améliorer la qualité des décisions rendues.
? Tout d'abord, vos rapporteurs ont observé que certaines MDPH sont encore réticentes à mettre en place des sections spécialisées de la commission des droits et de l'autonomie ou pour siéger en formations restreintes . S'il est vrai que telles pratiques semblent être moins conformes à l'approche privilégiée par la loi (équité des décisions rendues, approche globalisée des demandes d'une même personne), elles peuvent néanmoins se révélées efficaces pour réduire les délais d'examen des dossiers et développer une forme de spécialisation des équipes, sur des sujets tels que la scolarisation et l'orientation professionnelle.
Pour les structures les plus lourdes, telles que la MDPH de Paris ou celle du Nord par exemple, la question de la mise en place de sections géographiques par arrondissement ou par zone a été posée. Vos rapporteurs n'y sont pas hostiles, à la condition qu'un relevé des décisions permette chaque mois de vérifier le caractère harmonieux des décisions prises, ce qui suppose, on l'a vu, l'élaboration d'une doctrine propre à la CDAPH.
Il serait souhaitable, sur ces différents points, que la CNSA précise quelles sont les possibilités légales dans ce domaine, afin que les MDPH qui ont accumulé le plus de retard réorganisent leur mode de fonctionnement pour réduire les délais de traitement de certaines demandes.
Enfin, des aménagements de la loi pourraient être envisagés pour donner plus de souplesse à la CDAPH dans l'organisation de ses travaux et pour que ses décisions, toujours prises collectivement, ne soient pas trop lourdes à gérer.
? La simplification du traitement des cartes d'invalidité, de stationnement et de priorité, qui représentent la part la plus importante des demandes des MDPH, a été plusieurs fois évoquée : centralisation de leur émission et signature au conseil général (alors qu'elles doivent transiter actuellement par la préfecture, ce qui rallonge le délai d'un à deux mois) ; réflexion sur la mise en place d'une carte unique ; dématérialisation de la carte d'invalidité, son utilisation se réduisant peu à peu à une simple attestation pour obtenir des avantages fiscaux ; développement du traitement des demandes de renouvellement par liste en CDAPH, etc.
? Par ailleurs, afin de favoriser un traitement plus rapide des demandes, il convient de signaler que la CNSA a intégré dans les nouveaux formulaires 32 ( * ) la possibilité pour les usagers d'opter pour la procédure simplifiée. En cas d'accord du demandeur, la CDAPH peut alors statuer en formation restreinte pour différents types de demandes : renouvellement d'un droit ou d'une prestation en l'absence d'évolution du handicap ou de la situation personnelle du demandeur ; reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ; carte d'invalidité ou de priorité ; affiliation gratuite à l'assurance vieillesse de la tierce personne d'une personne handicapée ; ou encore dans les cas d'urgence.
Vos rapporteurs souscrivent à cette approche pragmatique qui permet de réduire les délais d'instruction sans contourner le droit de la personne handicapée à exprimer ses souhaits . Lors de l'examen du projet de loi, votre commission avait d'ailleurs estimé que, s'il est parfois nécessaire que l'équipe pluridisciplinaire entende et reçoive la personne handicapée qui sollicite une aide ou une prestation, il n'était pas opportun d'en faire une obligation légale. Une telle obligation, soulignait-elle alors, risquait de se retourner contre la personne handicapée, les délais d'instruction en étant inévitablement allongés. La loi a donc prévu que l'entretien ait lieu à la demande de la personne handicapée et qu'à défaut, un entretien soit sollicité à l'initiative de l'équipe pluridisciplinaire.
Néanmoins, de nombreuses personnes membres des CDAPH rencontrées par vos rapporteurs ont souligné l'intérêt d'entendre les personnes handicapées ou leur famille. L'expression de leur point de vue permet en effet une meilleure connaissance des réalités du handicap, des difficultés que rencontrent les personnes handicapées au quotidien, de leurs attentes et de leurs espoirs.
? Enfin, la dématérialisation et la numérisation des dossiers devraient permettre des gains de temps considérables au niveau de l'instruction par les équipes pluridisciplinaires, celle-ci permettant la consultation des dossiers simultanément par tout le réseau.
* 31 MDPH de Seine-et-Marne : une dédiée aux PPS ; une deuxième, aux projets de vie et orientation en établissement ; une troisième, aux projets de vie à domicile et une quatrième, aux projets d'insertion et de formation professionnelle.
* 32 Disponibles depuis le 1 er janvier 2009.