2. Les facilités offertes par les nouvelles technologies
Les auditions ont permis de mesurer à quel point les facilités apportées par certaines nouvelles technologies pouvait entraîner les individus, par ignorance ou par indifférence, à mettre de côté la protection de leur vie privée. Plusieurs exemples peuvent être mis en avant.
a) La géolocalisation : un traçage par nature
Les technologies de géolocalisation, qui visent à déterminer la localisation précise d'un individu, connaissent depuis quelques années un développement très important et tendent désormais à se banaliser dans le grand public.
Leurs applications sont multiples : guidage des véhicules par le système du GPS 29 ( * ) , personnalisation des services offerts à des utilisateurs nomades, suivi du déplacement d'un véhicule pour adapter le montant d'une prime d'assurance-automobile à la réalité des déplacements, surveillance des déplacements d'une personne pour la retrouver immédiatement, etc.
Ces technologies, qui apportent un confort certain à leurs utilisateurs, ne sont toutefois pas sans risques sur le droit à la vie privée. Puisque, par nature, elles visent à suivre ou « tracer » les déplacements des individus, elles sont en effet susceptibles de porter atteinte à l'une de ses deux composantes, à savoir « le droit pour une personne à mener sa propre existence comme elle l'entend avec un minimum d'ingérences de l'extérieur » (cf. supra ).
b) La biométrie
La biométrie désigne l'ensemble des technologies de reconnaissance physique ou biologique des individus . En effet, chaque être humain se distingue de ses « semblables » par un ensemble de caractéristiques morphologiques et biologiques qui rendent son identification possible.
Comme l'a montré la mission d'information de la commission des lois consacrée à la nouvelle génération de documents d'identité et la fraude documentaire 30 ( * ) , dont nos collègues Charles Guené et Jean-René Lecerf étaient respectivement président et rapporteur, les technologies biométriques fonctionnent de façon similaire au cerveau humain , lequel effectue en permanence des opérations de reconnaissance biométrique, notamment de reconnaissance faciale : lorsque nous croisons un individu, nous mesurons inconsciemment l'écartement des yeux, la taille du nez, la position des oreilles. Ces informations sont comparées à notre mémoire afin d'y associer un nom.
Couplée à des traitements informatisés de plus en plus puissants, la biométrie peut permettre l'identification d'un individu parmi plusieurs millions avec certitude , en se basant sur la morphologie du visage, les empreintes digitales ou palmaires, la forme de la main, la reconnaissance de l'iris, les empreintes génétiques ou encore le dessin du réseau veineux de la main, étant précisé, en outre, que la biométrie est universelle et immuable , chaque être humain pouvant être identifié de la sorte quels que soient sa culture et son âge.
C'est pourquoi la biométrie est de plus en plus souvent utilisée pour garantir l'authentification d'une personne : en particulier, les Etats privilégient désormais cette technologie pour limiter le risque de fraude aux titres d'identité.
A titre d'exemple, à la suite des attentats du 11 septembre 2001, l'Organisation de l'aviation civile internationale, l'Union européenne et de nombreux Etats, au premier rang desquels les Etats Unis, ont décidé d'insérer dans les passeports des puces électroniques sécurisées comportant des données biométriques numérisées, notamment la photographie, pour identifier avec certitude leurs détenteurs.
De même, dans le cadre du projet d'identité nationale électronique sécurisée, appelé « projet INES », le Gouvernement français envisage d'équiper également les cartes nationales d'identité de puces électroniques sécurisées qui contiendraient des données biométriques numérisées (la photographie et les empreintes digitales).
Si l'on comprend la finalité ultime de ces technologies biométriques -lutter contre l'immigration clandestine, l'insécurité, le terrorisme 31 ( * ) - il n'en demeure pas moins que, fondées sur le traitement de données éminemment sensibles, elles sont porteuses de risques nouveaux au regard du droit à la vie privée.
* 29 Pour Global Positionning System.
* 30 Rapport du Sénat n° 439 (2004-2005) consultable sur le site du Sénat à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/r04-439/r04-4391.pdf .
* 31 Même si la CNIL souligne que la biométrie n'est pas un système infaillible.